Les hexapodes n’ont pas systématiquement besoin de leur système respiratoire trachéen pour respirer: les collemboles par exemple, sont si petits que l’oxygène diffuse passivement à travers leur cuticule. Et bien certains insectes aquatiques peuvent réaliser la même prouesse sous l’eau, en laissant l’oxygène dissous dans l’eau diffuser passivement à travers leurs téguments pour oxygéner les cellules de leur corps, un peu comme ce que font les grenouilles sous l’eau:
Et puis pour faciliter les échanges gazeux, elle pare la partie terminale de son abdomen de splendides tubules, dernière tendance fashion chez les larves d’insectes… C’est aussi utile puisque les tubules augmentent la surface d’échange entre l’organisme et le milieu extérieur, et de fait la quantité de dioxygène absorbé.
Cette fois-ci, ces branchies ne sont pas pleines de liquides avec de l’hémoglobine mais sont des extensions remplies de trachées! De véritables branchies trachéennes. Donc contrairement aux poissons pour qui les branchies servent à transférer du dioxygène dissous dans l’eau directement dans le sang, toujours à l’état dissous, les larves d’éphémères utilisent leurs branchies pour que le dioxygène dissous dans l’eau se transfère à l’état gazeux dans l’air contenu dans les trachées.
Mais les branchies trachéennes ne se trouvent pas systématiquement sur les flancs de l’insecte et on peut les retrouver par exemple à l’extrémité de l’abdomen des larves de zygoptères (Demoiselles, agrions, qui portent donc des branchies anales au stade larvaire):
(larve de zygoptère avec trois branchies anales)
Les branchies, ce sont les trois ‘plumes’ qui garnissent l’anus de madame (ou monsieur)…
Étonnant, non? Mais surtout, une transition toute trouvée pour le dernier volet de cette palpitante série où nous aborderons le sujet de la locomotion des hexapodes. Mais en attendant, je vous laisse souffler un peu.
Comme l’année précédente, le mois de Novembre représente pour moi une période intense en enseignements avec notamment de nouveaux cours à donner, et notamment de nouveaux TP à préparer. Alors certes, j’ai du dormir un total de 36 heures en un mois mais voyons le bon côté des choses: que de matière pour remplir ce blog qui s’est retrouvé à l’abandon! Par exemple, cette année, j’ai non seulement repris mon TP sur les amphibiens et les relations qu’ils entretiennent avec leur environnement, mais je l’ai complété par un TP du même acabit sur les insectes. Mais comme il y a énormément de choses à raconter sur le sujet, je vais narrer ce TP en trois parties.
(Image : papillon monarque Danaus plexippus)
Bernadette Cassel's insight:
Voici le début d'une deuxième série de billets sur la biologie des insectes, que Pierre Kerner a publiés sur son blog Strange Stuff And Funky Things et qu'il partage avec nous.
Pour accéder directement au sujet précédemment publié sur les Membracides — les tout premiers scoops d'EntomoScience, point de départ et origine du nom de ce blog ! — cliquer sur ce lien :
Bref, tous les insectes appartiennent au groupe des hexapodes, mais tous les hexapodes ne sont pas insectes. Et d’ailleurs ce n’est pas parce qu’on a 6 pattes qu’on doit systématiquement faire partie des Hexapodes, hein! Les apparences sont souvent trompeuses…
(Ceci n'est pas un hexapode)
Il faut s’appuyer sur de nombreux critères pour pouvoir attribuer une espèce dans un groupe. C’est la joie de la phylogénie!
Prenez par exemple notre croissance continue et notre squelette interne: pour un hexapode, on fait tout à l’envers! Leur squelette à eux, ils le portent autour de leur corps : c’est un exosquelette. Pas mal pour se protéger des adversités du monde extérieur. Par contre, cet exosquelette constitué d’une cuticule rigide représente un frein à la croissance de l’animal. Mais c’est pas bien grave non plus parce que ces animaux peuvent reconstituer leur exosquelette! Pour grandir, ils n’ont qu’à muer: se débarrasser de leur vieille cuticule pour laisser apparaitre leur nouveau corps. Cette capacité à vrai dire est partagée par tous les animaux du groupe appelé Ecdysozoa (du grec ecdysis qui veut dire “mue” et zoa “animal”). Pour en savoir plus, je vous invite à découvrir ce billet de Nicobola sur le blog ‘Les poissons n’existent pas’. Chez les hexapodes, les mues se succèdent durant sa croissance. Mais parfois, l’animal peut avoir des formes variables tout au long de sa vie. C’est ce qui permet de distinguer plusieurs types de développement: le développement amétabole, hétérométabole et holométabole (et non, y’a pas de développement discobole ou dragonball).
(Différents modes de développement chez les insectes)
D’autres hexapodes amétaboles célèbres sont les collemboles (j’avoue, cette terminaison en –bole ajoute de la confusion pour les étudiants… c’est pas de bol!).
(Sminthurus viridis)
Ce sont de minuscules bestioles qui vivent surtout dans l’humus.
Chez la plupart des insectes, lépismes non compris, on trouve peu d’organismes amétaboles. Cela signifie qu’on peut distinguer des différences notable entre le stade adulte et le stade juvénile qu’on qualifiera de larvaire. Chez un insecte hétérométabole, Il y a 3 stades : l’œuf, la larve et l’adulte (qu’on appelle, en entomologie, l’imago). Il y a donc une étape importante de la vie de ces insectes, la métamorphose, à travers laquelle ils passent d’un stade larvaire à un stade adulte capable, notamment, de se reproduire. Et cette transition, elle se réalise au moment d’une mue, un peu particulière, qu’on appelle la mue imaginale (puisqu’on passe d’une larve à un imago). Toutes les mues précédentes correspondent donc à des mues larvaires. C’est vraiment différent de la situation des hexapodes amétaboles chez qui on ne peut pas trop faire la différence entre une mue et une autre. Un imago est caractérisé par sa capacité à se reproduire mais aussi par la présence d’ailes pour les insectes qui en portent. Il y a donc quand même de sacrés remaniements morphologiques lors de cette métamorphose. Pour certains insectes hétérométaboles, la larve se trouve dans le même milieu de vie que l’adulte. C’est ce qu’on appelle un développement paurométabole et c’est le cas retrouvé par exemple chez les criquets:
Les larves de chironomes par exemple n’ont pas de trachées et leur respiration se fait entièrement à travers la cuticule. Pour faciliter le transport gazeux à l’intérieur de la larve, elle possède même un pigment respiratoire apparenté à l’hémoglobine et qui lui donne sa couleur rouge:
En plus, ces branchies sont associées à des muscles et peuvent être battues dans l’eau pour réaliser un courant d’eau et favoriser l’oxygénation:
(L'éphémère ou mouche de mai)
Les adultes perdent systématiquement leurs branchies par contre. Pour l’éphéméroptère, on a déjà vu ce que ça donne dans mon précédent article sur les mues (et attention aux leurres!)
Aujourd’hui, nous aborderons donc le développement mystérieux de nos amis à six pattes: les hexapodes (du grec ἑξάς, èxas “six”, et ποδός, podos, “pied”… l’étymologie en entomologie, c’est fun! ).
Pourquoi Hexapodes et pas insectes? Et bien c’est que les insectes, stricto sensu, correspondent à un sous ensemble d’arthropodes à 3 paires de pattes auquel on rajoutera les protoures, diploures et collemboles…
Et voilà, à peine son TP commencé qu’il va nous saouler avec des nuances saugrenues… Mais oui, mais en même temps, les gars qui avaient constitué le groupe des insectes n’avaient pas fait que compter les pattes! Ils avaient notamment remarqué d’autres caractéristiques uniques dans ce groupe, comme la division du corps en 3 parties (tête, thorax, abdomen), la présence de trachées, l’absence d’appendices abdominaux et la présence de pièces buccales externes…
Ben c’est là que ça coince: certains arthropodes à 6 pattes (protoures, diploures et collemboles) ont des pièces buccales qu’on retrouve à l’intérieur de la tête… C’est malin de fiche le souk dans les classifications! Tout ça pour ne pas montrer ses mandibules: qu’ils sont prudes ces hexapodes parfois!
Mais bon, on est pas là pour causer groupes, on est là pour se demander comment nos hexapodes se débrouillent dans différents environnements. Ben ils sont plutôt pépères, merci pour eux…
Un décompte approximatif de toutes les espèces répertoriées amène à un chiffre astronomique : 1 million d’espèces. Et c’est un indice très faible de l’incroyable diversité et du nombre total d’espèces d’insectes sur notre planète.
(Échantillonnage de différentes espèces d'insectes d'une région sur un an)
Sachant qu’une espèce d’insectes peut représenter des milliards d’individus, on n’a pas de mal à croire que de nombreux entomologistes les considèrent comme LA véritable réussite évolutive du monde animal. Du coup, à la lumière de ces chiffres, ne soyez pas prompts à considérer que nous, humains, sommes les bestioles les plus adaptées à notre environnement.
Si certaines caractéristiques sont partagées par l’intégralité des hexapodes, c’est qu’il peut s’agir d’adaptations particulièrement utiles pour survivre dans ce bas monde!
Chez les hexapodes amétaboles le juvénile qui éclot de l’œuf a grosso modo la même morphologie que l’adulte, si ce n’est qu’il est riquiqui. On retrouve ce mode de développement surtout chez nos fameux diploures, protoures et collemboles: vous savez les hexapodes qui n’ont pas le droit de rentrer dans le club des insectes. Ces bébêtes ne font donc muer que pour grandir. C’est le cas par exemple des lépismes, plus connus sous le nom (totalement bidon) de poissons d’argent (et qui pour le coup sont des insectes vu qu'ils possèdent bien des pièces buccales externes).
(Lepisma saccharina)
On en trouve souvent qui filent sur le carrelage de nos salles de bain. Et bien les lépismes peuvent muer entre 17 et 66 fois au cours de leur vie! C’est beaucoup et cela s’explique notamment par le fait que le lépisme continue à muer même lorsqu’il atteint l’âge adulte et sa taille finale.
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