Initiatives locales et paroles d'acteurs
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January 28, 2021 4:16 AM
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Quand intégrer une entreprise est un jeu

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Le principe d’un escape game est de sortir d’un lieu en trouvant des indices et en résolvant des énigmes. Persuadé que cet outil propose des moyens efficaces et différents d’acquérir de la compétence, le réseau Retravailler a décidé en 2019 de créer son propre « serious game », sur le principe de l’escape game inversé. Son objectif ? Non pas sortir d’une pièce, mais entrer dans une entreprise le plus vite possible. Son nom : « Entrance game ».

 

Pour Marion Brillault, responsable du service ingénierie, « ce projet est né d’un constat et d’une frustration des équipes pédagogiques. La frustration vient du fait que de nombreux serious games dans les domaines de l’orientation et de la recherche d’emploi sont créés par des organismes dans la même optique. Ils sont mis à disposition du grand public puis disparaissent ou deviennent payants. Ce qui ne nous permet pas de les exploiter avec nos bénéficiaires ou nos stagiaires. » Le constat repose sur les conclusions d’une étude de Pôle emploi, qui indique que les personnes sont essentiellement recrutées sur leur savoir être. Aujourd’hui le diplôme, les compétences techniques, le niveau de qualification ne sont pas les premiers items pris en compte par les recruteurs, qui cherchent avant tout des profils.

 

Retravailler a engagé depuis plusieurs années un travail de digitalisation de ses formations, notamment la création d’une plateforme de formation en ligne, E-proévolution. Entrance game s’inscrit dans cette logique, un outil complémentaire à la plate-forme qui ne propose pas de contenu de type serious game relatif à l’insertion professionnelle. « Nous avions envie de proposer un outil qui soit détaché de la plate-forme, qui soit gratuit et utilisable par le plus grand nombre. Et que l’on continue de le faire vivre, de l’améliorer et de l’adapter. C’est un outil en interne et à l’externe, une offre complémentaire aux jeux déjà existants. »

 

Potentiellement, les futurs utilisateurs sont tous ceux qui relèvent d’un parcours d’orientation et d’insertion professionnelle ou d’accompagnement auprès des organismes du réseau. Viendront dans un deuxième temps tous les publics en formation auprès d’autres organismes. La mise en œuvre se fera d’abord en Nouvelle-Aquitaine, elle devrait ensuite être étendue au territoire national.

 

Adopter la bonne posture

 

Le jeu interviendra plutôt en fin de parcours à l’issue de l’élaboration du projet professionnel. Sur un parcours plus court, type prestation accélèr’emploi, il sera plutôt en amont, pour ajuster les contenus en fonction des difficultés rencontrées par les stagiaires. Il constitue aussi une sorte de révision, pour apprendre à adopter la bonne posture et le bon état d’esprit, mais cela n’est pas forcément une nécessité pour certains publics moins éloignés de l’emploi.

 

En pratique, Entrance game propose à l’utilisateur, pour une durée de 20 à 40 minutes, d’endosser le rôle de « Gamie », représenté par un avatar qu’il choisira (homme ou femme). La mission de Gamie est de trouver un emploi en réussissant à intégrer une entreprise fictive. Au début du jeu, il est en contact avec le service des ressources humaines. Au cours d’une série de missions, il doit préparer sa candidature et son entretien. Il est épaulé par ses amis qui le conseillent. Les missions que doit réaliser Gamie sont ancrées dans son quotidien. Outre sa recherche d’emploi, il aide et conseille aussi ses amis.

 

« Le joueur doit identifier le parcours le plus rapide pour aller à l’entretien, gérer son planning quotidien, vérifier s’il peut se permettre de rendre service à quelqu’un, etc. Nous avons décidé d’aborder tout ce qui relève de l’informel, toutes les difficultés que peuvent rencontrer nos stagiaires, les petites interruptions qui ne sont pas toujours prises en compte quand on fait de la théorie générale de recherche d’emploi. C’est aussi comment s’organiser pour aplanir ces obstacles et se mettre dans les bonnes conditions, apprendre la bonne posture, comprendre ce qu’il faut mettre en valeur, ce qu’il ne faut pas faire. »

 

Chacun à son rythme

 

L’utilisateur n’est pas limité en temps, pour lui permettre d’aller à son rythme. Pour favoriser son engagement et valoriser ses réussites, il sera gratifié par un système d’étoiles. Régulièrement, le jeu fera des retours sur la progression de Gamie, notamment par ses amis qui lui donneront des conseils sur sa tenue, sur la mise en valeur de ses savoir être. Les conseils, recommandations et interactions avec les autres personnages sont au service de la coopération pour progresser. Il aura la possibilité de télécharger des fiches mémos, des petits documents qui explicitent la méthodologie à aborder sur chaque thématique.

 

« C’est un outil méthodologique. La « gamification » nous permet d’aller plus loin que la fiche technique, de rentrer dans le quotidien de la personne en recherche d’emploi et de la confronter à son quotidien et ce qu’elle doit faire pour atteindre l’entreprise. L’avatar induit un certain décentrement de l’utilisateur, ce qui nous permet de nourrir un dialogue avec un groupe ou un stagiaire, d’évoquer plus facilement les sujets qui l’ont touché. Cela permet d’aborder des situations réelles qui sont voisines de celles qu’on trouve dans le jeu. On ne prend pas la personne de front en évoquant sa vraie vie. »

 

Entrance game devrait être disponible en juin 2021, après une phase de test avec les publics. A noter qu’il a été pensé et réalisé entièrement en interne. Les scénarios ont été élaborés par le service ingénierie et des collaborateurs spécialisés dans l’insertion des personnes très éloignées de l’emploi et dans le recrutement, qui ont apporté des exemples de situations qu’ils ont pu rencontrer avec certains de leurs stagiaires. La conception graphique et technique de l’entrance game est réalisée par le service FOAD.

 

 

*Le projet Entrance Game a été financé par le Fonds Régional pour l’Innovation dans la Formation

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April 24, 6:01 AM
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Une solution inclusion pour tous les jeunes

Une solution inclusion pour tous les jeunes | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

En 2024, l’association OHÉ-PROMÉTHÉE Charente a répondu à l’AMI O2R afin de déployer le dispositif « Cap’inclusion » dont l’objectif est de sécuriser le parcours socio-professionnel des jeunes en situation de handicap en fin de scolarisation et/ou sans solution d’accompagnement adapté à leur situation. L’équipe de Cap’inclusion est composée principalement d’une chargée de mission inclusion (Florence Ilboudo) et d’un animateur (Wilfrid Andrieux).

 

Quel est l’historique de votre dispositif ?

Cap’inclusion vient surtout d’un partenariat de longue date entre Ohé Prométhée Charente et l’Education nationale, avec le soutien des coordonnateurs des Unités localisées pour l'inclusion scolaire (Ulis) des lycées professionnels du département de la Charente. Certains jeunes sortaient du parcours scolaire sans solution d’accompagnement adaptée à leur situation.

 

Avec le soutien de la DDETSPP nous avons alors mis en place une mission inclusion jeunes qui nous a permis durant quatre ans d’accompagner les jeunes et leurs familles dans le travail de projet professionnel, et de les informer sur les dispositifs existant via les partenaires, mission locale, Ecole de la deuxième chance, Promo 16 18, Structures spécialisées comme les Institut Médico Professionnels (IMPro, Plateforme Emploi Accompagné…).  L’étroite collaboration avec les enseignants a mis en évidence les besoins d’intervenir précocement auprès des élèves en fin de scolarisation pour sécuriser leur parcours d’orientation socio-professionnel. C’est comme ça qu’est né Cap’inclusion, une façon de pérenniser notre mission inclusion.

 

Quel est le profil des jeunes que vous visez ?

Ce sont des jeunes très éloignés de l’emploi, avec tous types de handicaps et qui manquent d’autonomie. Beaucoup souffrent de phobies sociales, c’est surtout ça qui fait que les jeunes sont reclus chez eux. Il faut qu’ils soient sans solution d’accompagnement adapté, qu’ils aient une notification de la MDPH (RQTH, AAH…), et surtout qu’ils ne soient pas suivis dans un parcours d’insertion suivi par un organisme du réseau public de l’emploi (mission locale, France Travail, Cap emploi...). Nous leur proposons un accompagnement renforcé, parfois en les prenant par la main, comme avec les jeunes ayant des difficultés d’élocution qui ont besoin que l’on soit présent lors des entretiens avec des employeurs.

 

On pourrait penser que ce public est déjà repéré par différents acteurs ? Ce n’est pas le cas ?

En fait aujourd’hui ces jeunes sont repérés par différentes institutions, mais il n’y a aucune structure pour les accompagner dans leur projet socio-professionnel. Leurs parents sont démunis et ne savent pas du tout quoi faire. Ils peuvent toujours être scolarisés, ou être en rupture parce que leur handicap a pris le dessus, ou qu’ils subissent des freins sociaux importants. Notre objectif est de repérer ces situations-là.

 

Notre repérage consiste surtout à faire le lien avec les partenaires du territoire, l’école, le CIO, ou encore les parents. Nos partenaires nous les envoient, on a des fiches de repérage. On les reçoit pour vérifier qu’ils ne sont pas déjà accompagnés par une structure, même s’ils nous disent que non. On essaie de savoir depuis quand ils sont chez eux, ce qui a été fait dans leur parcours. Nous organisons des entretiens avec les familles pour comprendre la situation, comment ils peuvent rejoindre le dispositif et les informer sur les dispositifs existants.

 

Selon vous, quelles sont les causes du manque d’informations ?

La Charente est très rurale, il y a beaucoup de parents qui ne connaissent pas les dispositifs, ils sont souvent perdus. Ils tentent des choses mais sont démunis, et ne savent plus quoi proposer à leurs enfants. Les jeunes qu’on repère sont souvent avec un statut scolaire, donc il y a du monde autour d’eux (AESH, orthophoniste, souvent le SESSAD...) La difficulté vient quand il faut passer du milieu scolaire au monde professionnel. Pour certains, il est trop précoce d’envisager le milieu ordinaire, il faut plutôt les diriger avant vers un IMPro. Parfois il y a vraiment besoin d’une structure médicosociale pour travailler les comportements, avant d’aller vers le milieu ordinaire. Ça n’est pas toujours compris par les familles. C’est cette transition qui est la plus difficile.

 

Cap’inclusion, c’est la continuité de ce que vous faisiez avant, ou vous avez modifié votre approche ?

On a dû se réinventer, parce qu’on s’est rendu compte qu’il fallait vraiment avoir un animateur dédié pendant quatre semaines, pour prendre les jeunes en main, leur redonner confiance, les sécuriser. C’est le plus de ce dispositif. Durant les quatre dernières années, notre rôle principal auprès des jeunes, des familles et des enseignants était d’informer, d’accompagner et de réorienter vers les dispositifs existants. À présent, avec la phase de remobilisation, nouvelle pour nous, il a fallu tout construire, déterminer de quoi les jeunes ont besoin, comment les faire se lever le matin, leur donner l’envie de venir vers nous, de bouger en fait. On ne le faisait pas avant, ou plutôt par l’intermédiaire d’autres partenaires. Depuis avril 2025, nous sommes en période d’expérimentation avec un premier groupe de jeunes.

 

Comment se déroule la phase de remobilisation ?

La remobilisation dure quatre semaines. Chaque mois, nous avons un nouveau groupe d’une dizaine de jeunes. L’objectif est de les faire sortir de chez eux. Au travers d’ateliers collectifs, d’activités culturelles et sportives, on amorce le projet socioprofessionnel. Nous sommes deux à mener ce projet dans la structure, et on s’appuie sur un réseau de partenaires.

 

Qui sont les partenaires qui interviennent dans le dispositif ?

Nous avons des entreprises engagées comme TRANSDEV qui permet le déplacement des jeunes vers les évènements culturels et sportifs (comme l’action Equitation avec UPCA). La STGA (Société de transport du Grand Angoulême) vient faire de la sensibilisation à la mobilité, nous accompagner pour apprendre à faire un trajet en bus. Avec la CPAM, nous pouvons proposer des bilans santé, mais aussi des ateliers thématiques sur l’alimentation, la vie sexuelle et affective, les addictions. Le CIJ et L’ERIP sont sollicités pour travailler le projet professionnel. Pour les sorties culturelles, nous avons la médiathèque d’Angoulême (l’Alpha) et l’office de tourisme. Au démarrage nous déterminons le programme, mais par la suite, nous voulons que les jeunes choisissent ce qu’ils veulent faire.

 

L’Education nationale nous met aussi à disposition une enseignante qui assure des temps de soutien en individuel. Au besoin, on peut orienter un jeune vers les associations de lutte contre l’illettrisme. Beaucoup de nos partenaires savent que cette mission est importante. Ils ne peuvent pas nous attribuer des budgets, mais sont prêts à nous fournir des moyens humains ou matériels.

 

À quoi s’engagent les jeunes quand ils participent à Cap’Inclusion ?

Ils signent un contrat d’adhésion de six mois maximums, dans lequel ils s’engagent à participer activement à toutes les phases, à être présents aux activités et ateliers proposés par l’animateur pendant la remobilisation. Ils ont des rendez-vous individuels pour travailler leur projet et leur CV. Et puis aussi des actions en autonomie, par exemple pour la recherche de lieux de stages. Si certains jeunes ont déjà des projets en tête, on n’attendra pas quatre semaines pour les travailler avec eux. Surtout, on s’assure que ces projets soient réalistes et réalisables, on les confronte à la réalité. S’ils trouvent une formation qui les intéresse, ils peuvent partir avant le délai maximum. Le but c’est avant tout de leur remettre le pied à l’étrier.

 

En quoi consiste votre accompagnement au projet professionnel ?

Notre approche c’est la découverte des métiers, sous la forme « un jour, un métier en action », par des immersions, mais aussi le bénévolat, le service civique… l’école ne les intéresse plus ou leur fait peur. On peut aussi multiplier les mini stages dans les organismes de formation. C’est la mise en action de ces jeunes que nous recherchons, les confronter à la réalité du milieu ordinaire. Ils veulent tous travailler, mais il faut leur montrer des réalités comme se lever le matin, mettre ses EPI, passer une journée dehors à tondre le gazon, etc. C’est ce qu’on va mettre en avant dans l’accompagnement pour valider un projet.

 

Est-ce qu’il y a des métiers à éviter ? Ou plus adaptés que d’autres ?

On tient vraiment à ouvrir le champ des possibles. On s’interdit de considérer que tel profil ne peut pas, par principe, aller à tel endroit. Le mieux c’est de se confronter à la réalité, par exemple lors de visites d’entreprise. C’est souvent comme ça que le jeune voit si ça peut lui convenir. En faisant des petits pas, on arrive à définir ce qui leur correspond. C’est l’environnement de travail qui va véritablement jouer. Ils rêvent tous de travailler dans certaines entreprises, mais une visite suffit parfois à leur faire changer d’avis.

 

Il faut d’abord déterminer ce qui leur plait, ce qui leur donnera la force de se lever tous les matins. Mais on ne ferme la porte à aucune envie. Evidemment, la marche peut être plus ou moins haute en fonction de chaque situation individuelle. S’ils trouvent un emploi (CDD, contrat d’apprentissage, service civique…), on peut faire intervenir un ergonome de Cap emploi 16 pour évaluer les besoins éventuels en compensation du handicap au poste de travail (aménagement technique, organisationnels, humain…).

 

Que se passe-t-il quand ils quittent le parcours après les six mois ?

Pour certains jeunes, ils auront l’occasion d’aller vers une formation, pour d’autres d’aller vers l’emploi (contrat d’apprentissage, service civique, CDD…). Pour ceux qui auront besoin de plus de temps, un comité local de suivi avec le réseau public de l’emploi, est organisé pour évaluer l’évolution socio-professionnel du jeune afin de l’orienter vers le partenaire le plus adapté avec inscription auprès du Réseau public de l’emploi (France Travail, Cap emploi, mission locale…).

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs de l'AMI O2R et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

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April 10, 9:34 AM
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Ephémères mais bien réelles

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Comme son nom le laisse entendre, une « Flashcoop » est une entreprise éphémère, qui propose à un petit groupe d’environ huit personnes de gérer une coopérative pendant une semaine. Le concept a été créé et déposé sous forme de label par des Coopératives d'Activité et d'Emploi (CAE) de Mayenne, pour lequel elles ont élaboré un cahier des charges très précis. C’est auprès de l’une d’entre elles, Coodem, qu’une CAE de Poitiers, Aceascop, s’est formée à la mise en place du dispositif et a mené les premières expérimentations sur le territoire de l’agglomération de Poitiers.

 

Ce projet a été porté par le groupement des CAE de Grand Poitiers dans le cadre de projets collectifs. Il a reçu un soutien important de la communauté d’agglomération, dont les élus ont immédiatement adhéré au principe. Trois actions ont été financées en 2023 et 2024, grâce également à des financements de l'Etat, de la Région Nouvelle-Aquitaine, et de la fondation du Crédit coopératif. C’est en raison de sa bonne connaissance du dispositif, qu’Aceascop a porté et animé ces trois Flashcoops au nom du groupement.

 

La première a rassemblé des jeunes décrocheurs scolaires de 16 à 25 ans, la deuxième des femmes éloignées de l’emploi, la dernière un groupe mixte. « Les publics accueillis sont des gens qui étaient sur le bord du chemin ou qui sont suivis par différentes structures d'accompagnement à l'insertion professionnelle, » précise Benoît Furelaud, directeur. « On sait très bien que, parmi eux, beaucoup souhaitent créer leur activité. La Flashcoop permet de tester en condition réelle, en accéléré, tout ce qu’il y a à faire quand on est son propre patron. Dans tous les cas, c’est une expérience qui permet une reprise de confiance et une remobilisation par le biais d’un projet tangible. »

 

Seule condition, la motivation

 

Chaque coopérative éphémère est mise en place et animée en collaboration avec des structures partenaires (mission locale, atelier de pédagogie personnalisée, collectivités, etc.), qui se chargent de mobiliser les publics en amont. Elles sont complètement libres de fixer des prérequis. Seule condition, que les candidats soient extrêmement motivés, parce que l’expérience dans laquelle ils s’engagent est très intense. Il faut également qu’ils n’aient aucun problème de mobilité. L'inscription se fait quasiment au dernier moment, les participants n'ont rien à préparer avant le premier jour. Ils signent un contrat d'appui au projet d'entreprise (Cape), comme s’ils intégraient une véritable CAE en tant que créateur d'entreprise.

 

Le choix du produit à fabriquer et à commercialiser est fixé lors des comités techniques rassemblant les partenaires mobilisés, qui s’efforcent de trouver une marchandise agréable à créer (exemple avec les kokédamas de la Flashcoop 3) et qui permettra de découvrir plusieurs métiers différents. Le dernier mois est consacré à l’étude de faisabilité, à fixer les horaires, le lieu de commercialisation, etc. « Tout cela se décide vraiment en fonction de l'appétence des personnes constituant la structure partenaire. L’activité est imposée aux coopérateurs, qui la découvre le premier jour de participation. »

 

Juste après la découverte du produit, les coopérateurs doivent rapidement enchaîner les étapes : rendez-vous chez le banquier ou l'assureur, présentation de ce qu’est un modèle économique, comment on fixe ses prix avec les notions de marge et de chiffre d’affaires, puis la production, la commercialisation, et pour finir, le bilan comptable. Tout cela en sept jours.

 

« Compte tenu du calendrier très court, ils ne peuvent pas se permettre de moment d'hésitation. Le rythme soutenu ne laisse pas aux gens le temps de se regarder pendant des heures avant qu'il se passe quelque chose. Il faut tout de suite entrer dans le concret. L’entente doit être bonne au sein du groupe, pour s’accorder sur le nom de la marque, fixer les prix, gérer la fabrication et la vente, la répartition des bénéfices, etc. Nous choisissons le produit et le lieu de commercialisation, mais tous les autres aspects, ce sont les associés qui les déterminent ensemble. » Les participants ont également conscience qu'ils sont sur un format très particulier et que les impératifs de production et de commercialisation peuvent les amener à travailler plus de 35 heures, que ce soit pour assurer l’objectif de fabrication ou la vente sur un marché qui implique de commencer tôt.

 

« Tout va très vite. Plus ça va vite, moins les gens ont le temps de se poser des questions. En général, dans nos activités d'insertion, le pire ce sont les temps morts, qui présentent toujours le risque de mettre en péril la dynamique de mobilisation. Donc le risque de perdre des gens. À l’issue, ils obtiennent une rétribution, certes symbolique, mais qui leur donne la preuve qu’ils ont vraiment mené une activité à son terme. »

 

Tout au long de la semaine, des intervenants extérieurs accompagnent les groupes dans la conception de leur offre, la production et la commercialisation. Ainsi ce sont des banquiers qui proposent de simuler un rendez-vous avec la banque, et des graphistes apportent leurs compétences pour la partie communication, la création du logo et du nom de marque. Des professionnels de l’activité choisie (boulangerie, couture, pâtisserie…) aident à la production. Tous sont sollicités plusieurs semaines avant le début de la coopérative, afin de s’assurer qu’ils soient bien disponibles

 

« Parmi nos contacts, nous avons des professionnels qui adhèrent à ce projet, auxquels nous faisons régulièrement appel, » explique Imane Guarraz, chargée de communication.  « Par exemple, dans le cadre de la troisième Flashcoop fin 2024, nous avons sollicité l'Atelier du Soleil et du Vent, structure d’éducation au développement durable, qui a accueilli le groupe dans ses locaux pour la journée de production. Et puis deux graphistes qui font partie d'une CAE. Pour nous, c’est très intéressant de mobiliser des personnes qui croient au modèle coopératif et qui connaissent l'entrepreneuriat. »

 

Favoriser la mixité

 

En fonction des Flashcoops, l'ambiance et le fonctionnement dans le groupe ont été à chaque fois différents. Lors de la dernière édition, la dynamique s’est révélée la meilleure, en raison de la mixité, en termes d’âges et de genres. « Animer un groupe avec des profils très divers est plus facile que lorsque le groupe est homogène, par exemple des jeunes de mission locale. La diversité est gage de réussite dans la construction du commun. À la fin du premier jour, tout le monde avait un sentiment d'appartenance et la motivation pour aller au bout. » 

 

« Nous avons constaté un vrai engagement de la part des participants notamment en raison de leur différence d'âge. À la fin, ils parlaient même de créer leur entreprise ensemble. Pour nous, ça a été une véritable surprise. Sinon, on s'est rendu compte qu’ils étaient tous très curieux de tout, qu’il y avait une vraie envie de découvrir un grand éventail métiers. L'adhésion des structures et de Grand Poitiers s’est révélée aussi très précieuse. »

 

Même si la forme est très cadrée, chaque groupe a dû s'adapter aux circonstances, par exemple en modifiant leur mode de commercialisation, et passer d’un petit marché rural à de la commercialisation en ligne. Comme ce fut le cas pour le groupe qui a fabriqué beaucoup plus de kokédamas que prévu. L’objectif était de tout vendre, les associés ont dû adapter leurs prix. Ils ont réussi à rebondir et à trouver des solutions pour ne pas rester sur une demi-réussite, preuve de leur réactivité.

 

Une Flashcoop peut avoir comme effet de bousculer certaines certitudes chez les participants, notamment ceux qui avaient un projet professionnel déjà bien déterminé. Car il arrive qu’ils se rendent compte que le champ des possibles est complètement ouvert. S’ils se découvrent une appétence pour les chiffres et la comptabilité, ils se mettent à envisager de s'intéresser aux métiers de la gestion, chose qui n’était pas apparue au cours de leur accompagnement préalable. D’autres réalisent que l'entrepreneuriat n’est pas pour eux, qu’ils préfèrent recevoir un salaire régulier.

 

Aceascop envisage de continuer à développer des actions autour de l'entrepreneuriat sous forme coopérative. Les élus de Grand Poitiers sont prêts à renouveler leur soutien, ce qui facilite la recherche de nouveaux territoires et partenaires. « Pour organiser de nouvelles Flashcoops sur d’autres territoires, il faut toujours bien en expliquer le principe, parce qu’il est peu connu. C’est pareil pour les CAE, une fois qu’on a compris leur fonctionnement, on se demande pourquoi un créateur d'entreprise ne commence pas toujours par tester son activité dans ce cadre, quitte ensuite à choisir un statut d'entrepreneuriat individuel ou de société. Pour convaincre, notre message c’est, la formule que nous vous proposons permet de remotiver et mobiliser vos publics, et de valoriser votre territoire. En plus le plan de financement est clos, donc ça ne va rien vous coûter. »

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March 27, 9:45 AM
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De l’insertion à la formation

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Altea Cabestan est une association rochelaise employant 170 salariés. Elle comprend un pôle social, avec notamment des centres d’hébergement, et un pôle insertion disposant d’un chantier et d’un restaurant d’insertion, ainsi que d’une agence immobilière à vocation sociale. Elle propose également des actions de formation et un accompagnement vers l’emploi, notamment depuis 2022 avec son projet Connexions, financé par l’appel à projets régional « Mobilisation Formation ».

 

Les activités de formation de l’association existent depuis 1984. Leur principe est d’être accessible aux habitants des quartiers de La Rochelle. Elles sont complétées par des actions d'accompagnement vers la formation, menées en amont. Elles ont pris différentes formes, parfois plus axées sur l'accès aux droits, ou sur le numérique, en dirigeant les publics vers les partenaires pour l’insertion professionnelle ou vers les centres sociaux pour les questions familiales.  

 

Pour Christophe Petit-Clair, responsable des services insertion et formation, « tout ce travail en amont est invisible. Il se fait de toute façon déjà autour des actions illettrisme et de l’HSP socle. Si nous pouvons développer des actions comme Connexions, qui se concentrent sur ces aspects, c’est un plus. Et s’il y a la volonté d'aller au plus près des publics, c'est encore mieux parce que c’est aussi ce que nous recherchons. »

 

La réponse déposée par Altea Cabestan comporte trois axes de travail. Le premier, l'animation du réseau local. De fait, l’HSP socle repose déjà sur un réseau, plutôt lié aux prescripteurs habituels. L’ambition était d’élargir le réseau, d’y inclure des structures qui orientent moins, mais rencontrent tout autant les publics. « Nous avons pris le temps de contacter des associations caritatives, les maisons France service, le CCAS, l’ADEI, le service militaire volontaire, des structures que l'on connaissait, mais que l’on croise beaucoup plus ponctuellement, parce qu’elles travaillent moins directement sur l’HSP. Notre idée était d’en voir le maximum. »

 

« D'ailleurs plutôt que de réseau on parle beaucoup de lien partenarial, précise Hélène Syrot, coordinatrice formation. « En fait c'est une extension du lien partenarial. Développer l'information permet de travailler dans un premier temps sur le repérage, puis sur l'orientation et ses modalités. »

 

De voisin à parrain

 

L’axe deux est celui du parrainage, du pair à pair, en complément du travail de « aller-vers » déjà mené parfois sur l'espace public ou en pied d’immeuble. Partant du principe que les personnes qui connaissent déjà la structure, parce qu’elles y ont suivi une formation, vont parler de leur expérience et accompagner leurs connaissances, voisins, amis, famille. Il s’agit en quelque sorte d’une autre modalité d’accueil, ne reposant pas sur un entretien individuel, mais qui se fait dans un cadre convivial, un goûter ou un « café discute ». L’axe deux propose également les ateliers « Premières marches ». Ils permettent, lorsque les personnes sont repérées ou orientées, de les recevoir rapidement et simplement sur une solution de démarrage des apprentissages, tout en travaillant l’accès aux dispositifs de formation.

 

Troisième axe, la sensibilisation à la question de l’illettrisme qui vise en priorité les médiateurs numériques de l’agglomération, mais concerne également tous les autres partenaires. Qu’est-ce qu’est l’illettrisme, comment en parler, comment orienter et vers quel intervenant ? Ces interventions permettent de décomplexer le sujet, de le clarifier, de proposer un panel de solutions. Le constat de l’association est que les professionnels repèrent déjà. Ce qui leur manque ce sont les outils pour aller plus loin. « La sensibilisation, nous n’en faisions pas avant sous cette formule. Nous avons pris conscience du besoin qui pouvait exister autour de cette question. Ces séquences demandent autant de temps que les actions menées directement avec le public. »

 

Dans ce domaine, c’est la récurrence dans les échanges entre partenaires qui est susceptible de produire des effets.  Plus ils travaillent ensemble, moins il est compliqué de repérer et d'orienter. Le problème est le turnover que connaissent les structures, qui oblige à relancer les sensibilisations régulièrement. Afin de proposer une réponse rapide, Altea Cabestan fait la promotion de son numéro de téléphone unique. Son but est d’inciter les personnes à franchir la porte et à entamer une démarche, quitte à ce qu’elle se poursuive ailleurs.  

 

« Nous avons décidé de mener nos trois axes de front. L'animation du réseau c’est un travail en continu. Comme les actions de formation, en entrée sortie permanente. Notre volonté est d’orienter aussi vite que possible toutes les personnes en demande d'apprentissage, qui sont en attente d’une réponse immédiate. On tire toutes les ficelles possibles. Avec chaque personne, on définit d'où elle préfère partir et vers où elle veut aller. » Rentrer sur un dispositif de formation comme l’HSP demande du temps, et un peu d'organisation personnelle. C’est là que les ateliers Première marches se révèlent utiles, accessibles immédiatement et sans condition, en attendant d’engager une formation.

 

Côté personnes éloignées de l’emploi, la tendance depuis deux ans est à l’augmentation des problèmes de santé, physiques ou psychologiques, ainsi qu’au cumul de difficultés. Et ce, quels que soient les types de public. « Sur la formation on a vu arriver depuis quelques années un public en reconversion suite à des problématiques de santé, et qui doit se reconvertir dans des métiers plus administratifs. Souvent, l'accès au numérique, par exemple, devient un problème. Ces personnes qui ont été qualifiées et diplômées dans les années 80 se retrouvent assez démunies face à une reconversion professionnelle, et doivent se remettre dans les apprentissages. »

 

Le public en situation d’illettrisme a lui aussi évolué. Les personnes qui n’avaient pas appris à lire et écrire, fréquents il y a une vingtaine d'années, n’existent quasiment plus. Aujourd’hui en majorité, il s’agit de personnes « installées », qui ont occupé longtemps le même poste, ont développé des stratégies d’évitement, et pour qui la question de l’illettrisme ne s’est jamais véritablement posée. Jusqu’au jour où elles sont confrontées à des évolutions brutales (changement de poste, de machine, de process, licenciement…) ou des problèmes de santé. 

 

Faciliter l'accès aux dispositifs

 

« On sait qu’on ne captera jamais tout le monde, ça c'est une certitude. En revanche, Connexions nous permet effectivement de repérer les personnes à côté desquelles nous serions passées. Il existe de nombreux dispositifs divers et variés, mais l’enjeu c’est que les publics y accèdent facilement, sinon on prend le risque de n’accueillir que les plus autonomes. Ce que nous constatons également, c'est le besoin du public de trouver des lieux et des actions dont l’accès est facile (sans conditionnalité et prérequis) et sans jugement. »

 

L’association fonde ses actions sur ce principe de non-jugement, ainsi que sur la mixité des publics, qui facilite les échanges entre personnes de différents horizons et niveaux. Elle privilégie le travail sur l’autonomie et l’instauration d’une relation de confiance. Au-delà de la formation, le lien social est primordial, au sein d’un espace où les personnes se sentent bien et peuvent reprendre confiance en elles.

 

« C’est une demande récurrente, celle d’avoir le temps de se poser et de reprendre un parcours concret, efficace avec des objectifs atteignables et mesurables. Nous sommes toujours disponibles, mais le but n’est pas d'accompagner les gens pour tout et n'importe quoi, toute leur vie. Ce qu’on fait ne porte pas ses fruits immédiatement, cela peut être des mois ou des années plus tard. Il ne faut pas que ce soit frustrant, parce que ça fait partie du jeu. »

 

En 2025, Altea Cabestan a décidé d’étendre l’action du projet « Connexions » au public accueilli par l’association à Rochefort, en Centre d'Hébergement de Réinsertion Sociale et en Maison Relais. Elle va mettre en place des ateliers Premières marches pour franchir le palier, parfois très grand, entre la structure d'hébergement et une entrée en formation.

 

« Pour nous, tout est question de temps disponible. Temps nécessaire pour entretenir le réseau de partenaires, temps nécessaire pour accompagner les publics vers les dispositifs. Une partie d'entre eux arrivent directement sur l’HSP, mais les autres ont besoin de ce temps-là.  Nous voudrions aussi aller à la rencontre des entreprises, pour y mener des sensibilisations. »

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March 6, 12:31 PM
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Un campus dans un campus

Un campus dans un campus | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

À Tulle, le quartier de Souilhac a longtemps été le siège de la manufacture d'armes qui a fait la prospérité de la ville durant des décennies. Le site a périclité progressivement jusqu’à sa fermeture au milieu des années 2000. Depuis 2016, la communauté d'agglomération de Tulle réfléchissait à l’implantation d’un campus destiné à rassembler la majorité de l’offre de formation post-bac locale sur un site unique. Un restaurant universitaire et inter-entreprises y a ouvert ses portes en 2019, précédant le regroupement des organismes de formation en 2021.

 

C’est dans le cadre de cette stratégie, qu’un Campus connecté a vu le jour en septembre 2021. Sa création a été rendue possible grâce à la labellisation obtenue dans le cadre d’un appel à projet national lancé en 2020. Ce projet est ainsi financé sur 5 ans par le Secrétariat Général pour l’Investissement dans le cadre du PIA 3 – Territoires d’Innovation pédagogique sous l’égide de France 2030, opéré par la Caisse des Dépôts.

 

« De mars à juin 2020, une grande campagne de concertation a été menée dans le cadre du programme Action Coeur de Ville à l’échelle du territoire de l’agglomération de Tulle, » explique Caroline Monteil, cheffe de projet à Tulle agglo. « Les collégiens et lycéens, mais aussi les acteurs économiques, se sont exprimés afin de mieux comprendre ce qui faisait rester ou partir les jeunes étudiants et travailleurs. Ils ont évoqué leurs difficultés à poursuivre des études supérieures en raison de différentes contraintes, que ce soient des problèmes financiers, de mobilité ou de santé, mais aussi des difficultés à recruter des personnes diplômées ou inciter à l’esprit entrepreneurial »

 

« Quand on a réalisé le diagnostic, on s'est bien rendu compte que le concept du Campus connecté était une solution très intéressante pour nos jeunes, que de pouvoir continuer leurs études localement. Pour concevoir notre offre, nous nous sommes notamment appuyés sur l’expérience des Campus connectés déjà existants, comme celui de Cahors. »

 

C’est Sylvain Domenger, tuteur du Campus connecté Tulle Corrèze, qui a géré la première rentrée avec cinq étudiants. « Dans un premier temps, j’ai dû m’approprier l’outil, interroger les autres tuteurs, observer un dispositif né juste avant les Campus connectés qui s'appelle la Digital Académie, afin d’être capable de l'expliquer et de le vendre auprès des personnes intéressées. » Des actions de communication ont été entreprises, les établissements locaux contactés pour les informer et les convaincre que le nouveau dispositif n’entrait pas en concurrence avec eux, et qu’ils pouvaient lui adresser des candidats. Avec l'université de Limoges, des comités de sites ont été mis en place à Brive, Tulle et Guéret, afin de rapprocher l'enseignement supérieur des territoires.

 

Le cahier des charges national des Campus connectés indique que l’offre s’adresse aux néo bacheliers. Mais Tulle a voulu d’emblée toucher un public plus large, comprenant aussi des adultes en reconversion ou des jeunes suivis par la mission locale ou France Travail. En fait, toute personne exprimant son intérêt à faire des études, et ayant la capacité de suivre des enseignements à distance, qui nécessitent un certain degré d’autonomie. L’idée était également de s’adapter au territoire, de répondre aux besoins des entreprises en restructuration, notamment en matière de reconversion professionnelle.

 

Les études c'est aussi à distance

 

Le message du Campus connecté consistait à promouvoir les études supérieures pour tous, à expliquer qu’il était possible de suivre des études à distance proche de chez soi, que le manque de moyens ou d’envie de quitter son territoire ne devait pas faire renoncer quelqu’un à une formation. La dimension « campus » a été valorisée dès le départ, elle qui offre un environnement étudiant et des solutions pour rompre l’isolement.

 

Les candidats se présentent eux-mêmes, ou sont aiguillés par une mission locale, France Travail, le CIO, un lycée.  Ils sont reçus en rendez-vous, pendant lequel le tuteur passe en revue leurs motivations, leur explique les règles de fonctionnement, leur fait visiter les locaux, évalue leurs connaissances en informatique pour voir s’ils sont à même d’être autonomes devant un écran. Seule véritable condition pour être accepté, avoir trouvé une formation à distance.

 

Chaque candidat signe un contrat d'accueil et un règlement intérieur. Il s’engage à être présent douze heures par semaine en moyenne sur l’année. « On fait du cas par cas, on ne va pas sanctionner quelqu’un et rompre son contrat parce qu’il a eu un empêchement d’ordre familial. Chacun a un mode de vie et des contraintes différents.  Certains sont en service civique ou travaillent à mi-temps, ils ont parfois des rythmes différents d’une semaine à l’autre. C'est à moi de m'adapter, d’essayer de trouver un créneau pour mettre en place des activités avec le maximum de personnes. »

 

La date de rentrée est liée au cursus universitaire ou privé. Les néo bacheliers démarrent plutôt en septembre après les résultats de bac ainsi que les retours de leurs vœux sur Parcoursup. Le processus de sélection s’étend globalement de juillet à septembre, et c’est le plus souvent à ce moment là qu’intervient un temps d’intégration. D’autres jeunes ou adultes arrivent plus tard, en fonction de leur calendrier d’entrée en formation respectif.

 

La nature de l’accompagnement du tuteur dépend de chaque individu et de son degré d’autonomie. Le contrat passé entre l’agglomération et l’étudiant est finalement assez simple : réussir son année. Pour cela, il faut qu’il prouve qu’il s’en donne les moyens. « Je leur impose un entretien mensuel, en face à face, ça fait partie de leur engagement. J’adopte un peu la posture d’un manager, l’étudiant vient me présenter son travail du mois, je lui demande des comptes sur les objectifs fixés au préalable, on étudie son planning de cours, on y intègre du temps de révisions avant ses examens. »

 

 « Une fois que nous avons fait le tour des questions « scolaires », nous échangeons sur sa situation personnelle, son intégration au sein du Campus, son envie de participer aux activités, ou d’en proposer de nouvelles. C’est la dimension psychologique de mon poste. Les étudiants ont besoin d'une écoute, d'une personne présente à leur côté pour les rassurer, les rebooster parfois. Certains ont plus besoin de moi donc je vais vraiment être derrière eux régulièrement. »

 

« Il n’existe pas de règles générales, de logiques d'âge ou de genre. Chaque individu a des besoins propres. Je suis beaucoup plus sollicitant dans les premiers temps, je crée les liens pour que ça se passe bien entre eux, ensuite je m'efface petit à petit. Dans tous les cas, ils restent entièrement responsables de leurs objectifs et de leurs résultats. »

 

Une dynamique collective

 

La fréquentation d’un Campus connecté présente plusieurs avantages, en premier lieu une vie étudiante qui permet de rompre l’isolement, de rencontrer des pairs de différents âges, dans diverses situations, qui suivent des formations différentes. De plus l'accompagnement du tuteur est un avantage indéniable pour l’accompagnement vers la réussite. Ce dernier joue également un rôle important en matière d’orientation.

 

Par ailleurs, les animations et activités proposées toute l’année, ont pour principe de sortir les étudiants du cadre de leurs études, et de créer du lien entre eux. Elles peuvent être ludiques (faire son savon, atelier cuisine), artistiques (ateliers sculptures) ou culturelles (visite d’un théâtre ou d’un musée), ainsi que méthodologiques, pour travailler sur la prise de notes, rédiger son CV et sa lettre de motivation, s’entrainer à la prise de parole, rencontrer des entrepreneurs qui viennent présenter leur métier. Chaque année un des Campus connectés reçoit les étudiants de tous les autres sites, l’occasion pour eux de se rendre compte qu'ils ne sont pas les seuls et peuvent être solidaires. « Je leur dis à chaque fois, venez comme vous êtes. Vous pourrez faire plein de choses que vous ne pourriez pas faire dans un cursus universitaire classique, donc à vous de me proposer des idées ».

 

Les retours sont essentiellement positifs et on constate que les Campus connectés entraînent des résultats bénéfiques pour les territoires, tant au niveau démographique qu’économique. Certains étudiants ou adultes en reconversion créent, par exemple, leur propre activité après leur formation, des entreprises qui ont vocation à rester et à se développer sur leur territoire.

 

À Tulle, le Campus connecté a su enclencher une belle dynamique sur le territoire grâce à une implication remarquable de l'ensemble des parties prenantes du projet. La recherche de nouveaux partenariats est désormais une des priorités pour pérenniser le dispositif, en multipliant les contacts directs, lors de salons, de forums, etc. Les réflexions portent également sur la rentabilité du dispositif pour le maintenir et le faire croître. « Nous travaillons pour asseoir le fonctionnement et ainsi prouver aux élus qu’ils ont eu raison de le mettre en place, et que la dynamique doit se poursuivre. Petit à petit les choses évoluent, de nouvelles portes s’ouvrent. Le dispositif s’intègre localement dans le paysage universitaire et les partenariats s’étoffent pour maintenir ce service localement »

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February 20, 9:48 AM
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Le futur a sa classe

Le futur a sa classe | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Quietam studio est une filiale dédiée à l'innovation pédagogique du groupe Magellan PSI (Bruges), dont la mission est de déployer des projets numériques dans le monde de l'éducation. Yannick Brudieux, son directeur de l'innovation, précise son objectif. « Nous voulons que le matériel et les dispositifs numériques que l’on implante au sein des établissements scolaires et de formation, aient du sens. C'est-à-dire que les usages soient associés à l'utilisation de ces nouvelles technologies. Il y a une grande tendance à équiper les classes, mais nous avons constaté que les enseignants n'arrivaient pas à s’emparer de toutes ces solutions techniques, faute d’accompagnement. »

 

En 2021, Quietam Studio a déposé un dossier baptisé « classe du futur » auprès de la Région Nouvelle-Aquitaine. Le projet était celui d’une classe flexible et comodale, équipée de mobiliers adaptés, de technologies diverses et de solutions logicielles. Le prototype est installé depuis l’été 2024 au sein de Aérocampus Aquitaine, plus précisément au lycée Flora Tristan de Camblanes-et-Meynac. Il est mis à disposition de tous les enseignants, qui l’ont intégré dans leurs plannings afin d’y pratiquer de nouvelles techniques d'apprentissage.

 

Pour imaginer ce dispositif, les enseignants ont été sollicités pendant quelques mois, et leurs avis rassemblés afin de définir ce que serait le type de mobilier idéal pour transformer une salle de classe en mode « autobus » classique, en un lieu aménagé pour le travail par groupe, plus propice à l’engagement des élèves, la collaboration, le développement des compétences cognitives. Le choix final s’est porté sur des tables amovibles, de forme trapézoïdale, faciles à agencer en ilots, pour que les apprenants s'approprient l’espace.

 

Travail collaboratif et interactivité

 

Du côté des technologies, un mur interactif grand format permet de faire de la collaboration entre apprenants, par exemple pour construire des séquences pédagogiques, des tutoriels ou une carte mentale. Des outils sont utilisables par l'enseignant, comme un écran numérique interactif, et un réseau de caméras et de système audio qui lui donnent la possibilité de s’adresser à la fois aux élèves en présentiel et à distance. Les participants à distance sont en quelque sorte immergés dans le dispositif. « Notre philosophie c'est « un clic ça marche » il faut que tout le système soit extrêmement simple à utiliser. Il présente l’avantage de fonctionner dans tous les contextes d’apprentissage, en formation initiale, formation continue, alternance, etc. »

 

L’ensemble s’appuie sur une suite logicielle baptisée MAIA, qui a pour objectif de faciliter la vie de l'enseignant et de l’aider à utiliser les équipements, notamment parce que le travail en groupe demande beaucoup de préparation et nécessite une connaissance de techniques d'animation. « L’intelligence artificielle que l’on intègre petit à petit, peut lui fournir des QCM générés automatiquement pendant sa session, de façon à dynamiser les cours, accroitre l’appétence des apprenants et créer de l’interaction. »

 

« Le travail collaboratif simultané, en présentiel et à distance de petits groupes est plutôt novateur. Mais cela crée des points qu'on n'avait pas forcément envisagé, et qui nous ont incités à monter un programme de recherche, par exemple sur la réduction des nuisances sonores, de façon que l'ambiance de travail ne soit pas dégradée quand les groupes travaillent en îlots. »

 

Dans l’idéal, la classe du futur doit disposer d’un espace d’environ 70 m² à 120m², de manière à offrir des zones d'activité assez variées et permettre à une trentaine d’élèves, dont certains en distanciel, de travailler tous au même endroit. Sachant qu’il est possible de « délocaliser » certains modules. Au sein d’un établissement, il s’agira plutôt d’une pièce commune à l'ensemble du corps enseignants. Elle peut s’adapter à tous les publics et à toutes sortes d’enseignements et de pratiques, du collège à l’enseignement professionnel, en passant par le lycée et l’enseignement supérieur. L’outil ouvre également des perspectives dans la lutte contre la phobie scolaire, en offrant la possibilité à certains élèves de pleinement participer aux séquences pédagogiques en distanciel, éventuellement de les motiver à vaincre leurs réticences à revenir en classe.   

 

L’enquête menée par Quietam, confortée par d’autres travaux, montre que la quasi-totalité des enseignants considèrent que le travail collaboratif entre apprenants est bénéfique pour l'apprentissage du développement personnel et l’acquisition de compétences cognitives. L’enseignant n'est plus seulement un sachant pourvoyeur de savoir, il devient animateur. Certains pratiquaient déjà le travail collaboratif, mais avec des moyens limités, et beaucoup de temps de préparation. « Notre système, notamment MAIA, répond à cette problématique. Au-delà du matériel et du mobilier, nous avons essayé de gommer tous les côtés chronophages de ce genre d'organisation. Sans cette facilitation, on voit bien que la plupart des enseignants n’y vont pas, malgré leur appétence. »

 

Faciliter le changement de pratiques

 

« Nous savions qu'il fallait surtout axer sur la simplicité. Le changement se trouve en général à un pas de sa propre habitude. Notre parti pris est d’expliquer aux futurs utilisateurs que nous leur proposons de faire ce qu’ils faisaient avant, mais en étant plus efficaces grâce à l'outil numérique, avec l'IA et une gestion intelligente des ressources. On ne fait pas le cours à leur place, mais on est présents en amont pour préparer les sessions, pendant pour les accompagner, après pour le retour d'expérience. » Le plus souvent les enseignants ne sont pas opposés à faire évoluer leurs pratiques, mais ils ignorent comment. La découverte de nouveaux outils leur permet d’avancer dans un sens qu’ils n’avaient pas forcément anticipé.

 

L'application MAIA est disponible depuis le mois de novembre, une version améliorée à la suite des expérimentations menées et aux retours des enseignants. Il s’agit maintenant de la tester à une plus grande échelle, auprès des organismes de formation qui souhaiteraient s’engager dans le développement de techniques d'apprentissage collaboratives. Car maintenant que la classe existe, le défi est d’y amener des utilisateurs peu ou pas du tout habitués à travailler en îlots. On leur propose de venir avec leurs propres supports, leurs propres séquences pédagogiques. La classe du futur va « augmenter » tous ces apports.

 

« On ne change pas leur contenu on l'améliore, on le démultiplie. On n'a pas propension à être des ingénieurs pédagogiques, on est juste des metteurs en scène de la pédagogie. L’objectif c'est qu'on ne présente rien à l’enseignant ou au formateur avant qu’il n’arrive, aucun mode d'emploi. Nous sommes là pour le guider, on lui fournit l’application, mais c’est lui qui prépare son cours et déroule sa séquence. »

 

Toute innovation prend du temps. Il y a toujours un effet de rejet au départ, et la nécessité d’y consacrer un temps d’acculturation. « Nous essayons de donner du sens c'est à dire on ne va pas mettre de la techno pour mettre de la techno. Au lancement d’un tel dispositif, il y a toujours un minimum d'accompagnement. Nous n’en sommes pas encore à ce que l’utilisateur soit complètement autonome. Aujourd'hui, il nous paraît plus raisonnable de l’accompagner au démarrage. Mais peut-être que dans quelques mois les gens seront capables de se débrouiller seuls. »

 

Pour aller vers plus d’autonomie, Quietam studio a réalisé des tutoriels interactifs pour chacun des équipements. Les enseignants peuvent utiliser les outils comme ils le souhaitent, ils ne sont pas tenus d’en respecter strictement la logique. Certains d’entre eux ont déjà évolué dans des configurations multiples et variés, par exemple en organisant des job datings.

 

Aujourd'hui une dizaine d'établissements utilisent la solution. Son déploiement ne fait que débuter. L’objectif est de multiplier les testeurs et de faire adopter cette solution auprès de d’autres organismes et d’établissements scolaires, comme récemment le lycée Václav-Havel de Bègles. 

 

 

Yannick.brudieux@quietamstudio.fr

Site web : maia-education.fr

 

 

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February 6, 2:40 AM
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Nouveau site paré au décollage

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En 2023, la mairie de Mimizan plage cherchait à monter un projet susceptible d’apporter une réponse au manque de logements destinés aux jeunes actifs et aux saisonniers. Les élus sont alors entrés en contact avec l’association « La Smalah » (Saint-Julien -en-Born) pour s’informer sur son action de formation professionnelle au métier de constructeur bois, centrée sur la fabrication de tiny houses. Ils souhaitaient monter un programme similaire sur le site d’une ancienne hélistation, successivement propriété de l’armée puis de l'office national des forêts, qui comporte un ancien hangar à hélicoptères et quelques chambres individuelles.

 

Avant de solliciter La Smalah, la municipalité s'était tournée vers un bailleur social qui envisageait de raser les bâtiments et de tout reconstruire à neuf. « À l’inverse, notre projet proposait de rénover l’existant, pour un coût moindre, » explique Vincent Péchaud, directeur. « Et à terme, de loger des jeunes actifs à des loyers modérés et de les accompagner dans leur intégration sur le territoire, en offrant des services classiques que l’on peut trouver dans des résidences d'habitat social. Nous voulions aussi y ajouter une dimension tiers-lieu, avec une programmation socioculturelle ouverte sur le village. Je crois que les élus ont été séduits par notre proposition de faire de l'accompagnement de jeunes, pas seulement de la construction de logements. »

 

Le projet a été monté en deux phases. La première consistait à rénover les bâtiments, créer trois chambres supplémentaires, une cuisine et un grand lieu de vie partagés. Dans un premier temps, il s’agissait d’y accueillir des saisonniers pour la période estivale, notamment des nageurs sauveteurs. Le principe de la démarche, avec l’aide de l'architecte Nicole Concordet et du concept de « permanences architecturales », était de mettre en œuvre une maîtrise d'usage autant qu'une maîtrise d'œuvre, c'est à dire partir du bâtiment, y vivre pour en déterminer les besoins et utilisations, ainsi que ses aménagements. Le tout en lien avec les habitants et les usagers, etc. 

 

Architecture sur site

 

Lors de cette première phase, le collectif d'architectes et scénographes bordelais Cmd+O (Commando), est venu vivre quelques mois sur le site, au cours de la rénovation. Spécialisés dans les chantiers participatifs, ils ont accueilli des jeunes en formation à La Smalah, mais aussi des habitants du territoire et des futurs salariés d'une entreprise à but d'emploi (EBE) à Mimizan. Des artisans locaux et les services techniques de la mairie ont aussi participé au chantier. C’est ainsi que 150 m² d'espace de vie et 10 chambres ont été construites ou rénovées avec 80% de matériaux de réemploi et de dons d'entreprises locales.

 

La deuxième phase, qui prendra place en 2025, prévoit la construction de dix nouveaux logements individuels, toujours en situation de formation sous forme de chantier participatif. L’ensemble se veut exemplaire architecturalement, étant soumis à la loi littorale, aux contraintes de montée des eaux, de retrait du trait de côte, etc. L'idée est de faire un bâtiment déplaçable qui pourra au besoin, être démonté et replacé plus loin à l’intérieur des terres. 

 

En cours de chantier, il ne s’agissait pas à proprement parler de formation, mais plutôt d’animation ou d’initiation.  « Dans le cadre de notre formation en construction de tiny houses, les jeunes ont un mois de stage. Trois d’entre eux ont choisi de le faire avec les architectes constructeurs de l'hélistation, ainsi que chez un artisan local qui travaillait sur le projet. Ensuite, nous avons accueilli des jeunes en remobilisation qui ont, eux aussi, fait un stage sur le site. »

 

Côté public, outre les saisonniers, le projet entend apporter une solution au manque de logements sur le territoire, notamment pour les jeunes actifs de moins de 30 ans. Cette volonté nécessite de trouver un modèle économique durable, il implique de chercher des financements, par exemple sous forme de partenariat avec un bailleur social. L’objectif est de choisir un cadre modulaire, peut-être celui de l’auberge de jeunesse ou du Foyer de Jeunes Travailleurs, pour que des jeunes en insertion ou en formation puissent être logés, ainsi que potentiellement des jeunes actifs et des saisonniers.

 

« À terme, les vingt-cinq logements prévus n’auront pas la capacité de régler le problème dans son intégralité, mais ce sera un début. Globalement nous avons une problématique d'intégration de la jeunesse sur nos territoires qui sont très vieillissants, et accaparés par des maisons secondaires. Notre réflexion porte sur la manière d’intégrer les jeunes et de les encourager à rester sur le territoire. »

 

Le projet de La Smalah comporte également une partie animation culturelle, qu’elle envisage de mettre en place dès cet hiver, pour accompagner la location des premiers logements. Elle aurait pour ambition, par l’organisation de quelques événements, de communiquer sur le lieu et de l’ouvrir aux habitants du territoire. La programmation culturelle sera complétée par un dispositif d’accompagnement pour les résidents, ou toute autre personne qui aurait besoin d’une permanence en économie sociale et familiale, en psychologie, en conseil socio professionnel.

 

« À moyen terme, si ce lieu tourne avec vingt-cinq couchages en permanence, nous aurons un bureau sur site, un directeur ou une directrice, et certainement un salarié mutualisé avec La Smalah, qui sera présent une journée par semaine par exemple. »

 

Plus que des logements

 

La philosophie tiers-lieu est revendiquée par La Smalah, même si elle ne présente pas d’emblée son projet comme tel, mais bien comme la création d’une résidence d'habitat jeunes. « Dans la dimension tiers-lieu, ce qui nous intéresse c'est le côté implication des citoyens dans un projet de développement local, le côté gouvernance partagée et d’ouverture. L’été prochain, les maitres-nageurs sauveteurs reviennent et on peut imaginer qu’à l'automne suivant les travaux commencent. Le chantier est en soi une dynamique d'ouverture. » 

 

« Le projet a été officiellement présenté aux habitants par la mairie, avec notamment des ateliers ouverts au public, des articles de presse, etc. Réussir ce projet nous intéresse beaucoup, Il pourrait illustrer notre savoir-faire, et nous offrirait la possibilité d’aller voir d’autres mairies pour leur proposer le même genre de démarche. Je sais que certaines d’entre elles veulent aussi impliquer les acteurs économiques et les employeurs, parce que ces grands projets coûtent cher. »

 

Si tout se passe bien, et dès que les derniers obstacles administratifs seront levés, le lieu devrait être complètement opérationnel courant 2026. Sa configuration finale n’est pas encore connue. Le nombre de logements dépendra des normes liées aux agréments qui seront demandés. Ainsi, pour être labellisé « résidence sociale », il faut être en mesure de proposer des logements individuels, avec une cuisine et une douche par logement.

 

« Nous savons que, pour avoir ces agréments et être à l'équilibre économiquement, il nous faudrait disposer de soixante logements, ce qui ne sera pas notre cas. Donc nous allons essayer de trouver une sorte d'agrément ou de modèle intermédiaire. Il reste beaucoup d’inconnues, un certain nombre d’éléments ne dépendent pas de nous. C'est un projet très séduisant sur le papier, mais qui dépend de plein de choses. Aujourd’hui, on ne sait pas vraiment quand on arrivera au bout, et si on arrivera au bout. »

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January 23, 8:17 AM
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Premières marches, un pas vers la formation

Premières marches, un pas vers la formation | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Olivia Costantino, chargée de projet illettrisme-illectronisme à CORAPLIS (Niort), assure la coordination du dispositif « Premières marches vers la formation », pour l’ensemble des neuf partenaires deux-sévriens et le Loudunais en Vienne. Il est financé depuis 2021 par l’appel à projets régional Illettrisme et Illectronisme.

 

Quel est le principe du projet Premières marches ?

Le projet se décline en 3 axes fondamentaux, qui sont tisser et développer les réseaux locaux, repérer et mobiliser, et accompagner vers la formation aux savoirs de base. On a désormais besoin régulièrement de personnes relais clairement identifiées pour faciliter le passage vers la formation. Au départ, nos actions d'accompagnement se faisaient plutôt sous forme de cafés numériques. Petit à petit, nous les avons diversifiées, puisque notre réseau compte des centres sociaux, des associations, des organismes de formation. Aujourd’hui nos modes d’accompagnement sont plus généraux, comme des ateliers cuisine, des actions de proximité, par exemple à l’occasion de distributions alimentaires. On s’est formés avec la Scop l’engrenage, sur les thématiques d'actions de « aller vers », qui consistent à aller chercher les publics précaires isolés, potentiellement en situation d’illettrisme et d'illectronisme.

 

A-t-il été modifié depuis son lancement en 2019 ?

 Le projet s’est étendu aux territoires du Thouarsais et du Mellois. Et dans le Loudunais dans la Vienne. CORAPLIS coordonne et mène ses propres actions sur le Niortais, mais chaque territoire a vraiment ses actions spécifiques. Les partenaires changent, en tout cas les missionnés. Ce qui est important dans notre rôle, c'est de garder le lien entre les partenaires et d'avoir un conducteur commun.

 

Dans le premier appel à projets qui s’appelait « illettrisme et illectronisme », on a proposé beaucoup de choses. Mais il y avait des travers au niveau de la réponse, certaines structures n'avaient considéré que la dimension illectronisme, et n'avaient pas ensuite orienté les publics vers la formation. A l’époque, on avait aussi répondu à un audit lancé par la Région pour connaître les freins et leviers de l'entrée des personnes en formation. Elle a affiné son approche et sorti son appel à projet « innover contre l’illettrisme » en 2021, pour lequel ils ont écarté toutes les structures qui n'avaient pas utilisé le réseau et ses accompagnements pour diriger les publics vers les savoirs de base.

 

Avez-vous pu consolider votre réseau ?

Il y a toujours des nouveaux arrivants, les réseaux changent, ils vivent aussi. Les facilitateurs coporteurs du projet Premières marches vers la formation animent ces réseaux et parfois font appel au CRIA NA pour des sessions de sensibilisation à l’illettrisme auprès des partenaires du réseau.

 

Est-ce que certaines structures sollicitées découvrent des choses ?

Oui, tout le temps. Ce ne sont pas tant les structures que les individus, les salariés. Certains sont au fait de ces questions parce qu'ils étaient intéressés par le sujet, ils avaient eu une sensibilisation, une formation. En revanche, pour certains, pas du tout, ils tombent parfois des nues. Surtout chez les conseillers numériques. Dans les structures, il y a toujours des gens qui savent et puis des gens qui ne savent pas. On ne peut pas partir avec des recettes toutes faites et des choses clé en main. Il est important de prendre en compte les spécificités des missions et des territoires.

 

Quel est le message que vous délivrez aux nouvelles structures ?

Notre message est, « Vous êtes susceptible de rencontrer des gens en situation d'illettrisme, isolées, etc. On vous propose une sensibilisation sur ces publics, comment les repérer et les aborder. Ensuite, comment les orienter vers notre permanence d'accompagnement, exemple sur le niortais, et d'orientation qui permet de répondre très vite à leurs besoins de formation. En plus de nos partenaires habituels, nous avons la volonté d'aller vers les services RH et les syndicats. L’idée est de travailler directement avec les entreprises pour repérer les personnes en situation d’illettrisme. On essaie de les convaincre de former leurs salariés concernés par petits groupes, pour que ça leur coûte moins cher, qu’il y ait moins de pertes de compétences et de temps pour l’entreprise.

 

Quelle place prend la question de l’illectronisme ?

Dans notre projet, ce sont bien des personnes en situation d'illettrisme numérique que nous visons. Certaines sont très effrayées par l'ordinateur, on évite de leur proposer de commencer par des cafés numériques. Aujourd'hui, il y a plein de leviers possibles, beaucoup basés sur la rencontre et le « faire avec », ainsi que des actions hors les murs. Le principe est de se rencontrer, de discuter de leurs centres d’intérêt, de leurs envies. Par exemple leur proposer un atelier cuisine qui sera l’occasion d’apprendre à lire, écrire et compter. Mais pour ça il faut bien se connaître, sinon les gens ne participent pas aux ateliers parce que ça les inquiète, ou ça ne fait pas sens pour eux.

 

A Niort, nous avons un collectif qui s'appelle Alpha CAN, c'est un collectif qui rassemble des structures de formation, des accompagnateurs, prescripteurs, médiateurs, des associations caritatives. Ils se retrouvent tous les deux mois pour faire l'état des lieux de la réponse de formation sur le territoire du niortais, et un peu alentour. Une permanence permet d’orienter les publics.   

 

Quelles sont les structures les plus aptes ?

Pour le repérage, je ne sais pas si certaines sont plus adaptées que d’autres. Par exemple les centres sociaux en général sont bien adaptés parce qu’ils proposent toujours un petit atelier savoirs de base. Ils ont aussi beaucoup de gens en FLE. Sur l’illettrisme on a surtout l’HSP Socle de compétences avec l’itinéraire 1 (Illettrisme). Ce qui fonctionne surtout par rapport à avant, c'est l’aller-vers. On a toujours les cafés numériques. Les gens n’y venaient plus parce qu’ils devaient à nouveau s’inscrire à quelque chose. Ça a mieux fonctionné à partir du moment où on est allés vraiment vers les gens, en répondant à leurs demandes, par exemple en tenant des permanences à la Poste, à la CAF, sur les distributions alimentaires, à l’agence Siti Interim pour le niortais située dans un des quartiers politique de la ville.

 

Existe-t-il un profil du parfait repéreur ?

A priori, n'importe qui peut être repéreur s’il rencontre du public. Quelqu’un qui travaille dans une fripe ou une épicerie solidaire peut être un bon repéreur parce que souvent les personnes en situation d’illettrisme sont aussi des personnes précaires. Mais ça n’est pas suffisant. Certains peuvent être repéreurs, mais pas prescripteurs parce que ça n’est pas leur rôle et qu’ils sont très pris par d’autres activités. Pour nous les vrais repéreurs, ce sont plus souvent les médiateurs, comme les conseillers France Travail, qui proposent des petits ateliers CV ou de remise à niveau. Mais en général ce ne sont pas des pédagogues. On a essayé beaucoup de choses depuis cinq ans, on sait aujourd’hui ce qui fonctionne ou pas. C’est pour ça qu’il est important de susciter la rencontre.

 

Quel est selon vous le chainon manquant entre le repérage et l’entrée en formation ?  

Cet entre-deux peut prendre différentes formes. En fait, ce qui fonctionne bien c’est l'accompagnement individualisé, le sur-mesure, c’est une entrée en formation rapide si la personne est prête. S’il y a trop d’attente, c’est un public que l’on peut vite perdre. Par exemple pour « la boîte à dons » à Mauzé, c'est la mairie, le centre social et le PLIE qui se sont associés pour aller à la rencontre des gens et proposer ensuite une orientation sur les ateliers de Mauzé. Aujourd’hui, dans la ruralité, il faut penser dans nos actions à pallier le problème de la mobilité pour aller en formation.  Et ça coûte de l'argent. Après le repérage, les premières marches ce sont tous les ateliers qui existent un peu partout et qui font sortir les gens de l'isolement pour faire lien, pour faire société. Ces ateliers peuvent motiver à travailler la lecture et l’écriture, parce que les gens se sentent bien dans un groupe et au centre social. Les actions d'accompagnement sont importantes aussi quand elles se fondent dans le partenariat. C’est ce que nous demande la Région, de continuer à nourrir les réseaux, à les faire travailler et monter des actions ensemble pour accompagner les personnes vers une formation de base, notamment l’HSP Socle de compétences qui est un dispositif de la Région.

 

Quelles sont les évolutions que vous observez dans votre pratique ?

On doit s'adapter au terrain, aux territoires, aux acteurs locaux. S'adapter face à la baisse des financements. Il y a eu aussi un public qui en a remplacé un autre. Historiquement, on s’est adapté aux migrations. Il faut savoir que les personnes en situation d'illettrisme sont difficiles à rencontrer, beaucoup ont besoin de travailler la langue et les savoirs de base aussi. On entend certains discours selon lesquels il n’y a pas de problèmes d’illettrisme car il y a l’école obligatoire, mais l’illettrisme est un problème qui touche les personnes de manière globale pas seulement scolaire. Le travail de lutte contre l’illettrisme et pour faire accéder les personnes aux savoirs de base est continu.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

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Illettrisme, l'enjeu du repérage

Illettrisme, l'enjeu du repérage | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Angélique Feniou est coordinatrice et formatrice au sein de l’association CASSIOPEE de Ruffec (Charente). La structure compte trois pôles. Un pôle accompagnement pour les allocataires du RSA, un atelier chantier d'insertion dont le support de production est un pressing blanchisserie « Couleur lavande », et un pôle formation. En 2022 ce dernier a reçu un financement de l’appel à projets régional « innover contre l'illettrisme" pour mettre en place son action « accrocher, repérer, avancer. »

 

Comment a commencé votre projet ?

En échangeant avec nos association partenaires, on s’est rendu compte qu’il y avait beaucoup d'invisibles qu'on n'arrivait pas à capter. Et qu’il était difficile de leur parler de formation, parce que ça leur faisait peur. On ne visait pas un public particulier, on voulait capter les jeunes, les adultes vulnérables, fragiles. Toute personne en situation d’illettrisme, quels que soient son âge, son genre ou sa situation. Parmi ceux-là, on sait, par le biais de nos partenaires qui reçoivent la communauté des gens du voyage, que c’est un public très en besoin, mais difficile à capter.  

 

Quand vous avez décidé de présenter votre dossier, c’était pour répondre à des besoins exprimés ?

Au moment de notre réponse, on avait l'habilitation de service public (HSP) socle de compétences. Ils se trouve que pour être bénéficiaire de ce dispositif, il faut un certain statut et avoir un projet professionnel. Du coup un retraité en situation d’illettrisme ne peut pas aller sur HSP. Mais comme notre projet associatif c’est d’ouvrir la porte à toute personne qui a besoin de formation en lecture, écriture, calcul, on leur propose de participer à une autre de nos actions qui s’appelle « le français pour chacun. »

 

En quoi consiste « accrocher, repérer, avancer. » ?

Notre premier axe consistait surtout à renforcer le partenariat existant et l’étendre à d’autres associations et structures, pour leur donner quelques clés de repérage. On a proposé des sensibilisations à l’illettrisme à des travailleurs sociaux, des secrétaires de mairie, des associations loisirs, des encadrants techniques d'ateliers et de chantiers d'insertion. Et puis des bibliothécaires qui repèrent des difficultés chez leurs usagers lorsqu'ils remplissent le document de prêt. C’est toujours délicat pour eux d’aborder le sujet avec les personnes. On a également rencontré le Secours populaire qui nous a parlé de la fiche d'entrée qu’ils font remplir à l’accueil et qui révèle parfois des besoins de formation. Notre deuxième axe, c’est de déployer des actions pour amener progressivement le public vers les formations aux savoirs de base.

 

Vous rencontrez directement le public ?

Ça nous arrive, par exemple lors des distributions des Restos du cœur. On échange avec les gens tout simplement. On aborde un sujet commun sans leur parler directement de formation, sinon on les perd. C’est avant tout un travail d'échange et d'écoute. Je me suis aussi rendue disponible pour recevoir des personnes individuellement, les rassurer, parce qu’elles ont souvent eu des traumas scolaires. Je leur explique que nous faisons de la formation pour adultes, que ça n’est pas l’école. Je les invite à visiter les locaux, voir par eux-mêmes comment ça se passe sur une séance de formation.

 

Nous avons aussi organisé des sorties hors les murs avec les personnes qu'on avait réussi à capter, afin de créer une cohésion et les sortir du papier crayon. On a notamment fait la visite d’une médiathèque de Ruffec pour leur montrer que ça n’est pas réservé aux élites, qu’on peut y trouver des CD, de la musique, des expos, des ressources jeunesse. Pour travailler sur le repérage spatio-temporel, nous avons proposé tout simplement de prendre le train de Ruffec à Angoulême. Ça commence par se demander « comment on fait ? » Il faut lire un itinéraire, trouver le bon quai, la bonne direction. Faire ça en groupe, c’est une façon de leur montrer qu’elles ne sont pas isolées, que d’autres sont dans la même situation. Et qu’elles peuvent trouver de l’entraide et de la solidarité, qu’il ne faut pas rester seul chez soi en se disant « ce n’est pas pour moi, je n’ose pas ». Alors que des solutions existent.

 

Est-ce que ce financement vous a permis de développer des choses innovantes ou différentes ?

Ça nous a surtout permis de développer des approches que nous avions avant, mais qu'on avait laissé un peu en sommeil, parce qu'on n’avait plus le temps ou la possibilité de nous en occuper. Avec ce budget, on pouvait décider d’y aller. Nous avions déjà un réseau de partenaires assez important, et ça nous a donné l’occasion de le renforcer, de contacter par exemple les communautés de communes pour leur proposer notre intervention. Malheureusement, nous aurions envie de faire pleins de choses, mais ce n’est pas toujours facile de justifier d’y passer le temps nécessaire.

 

Quelle est la nature de votre intervention ?

Certains bénévoles des structures ne sont pas à l’aise pour parler d’illettrisme tout de suite aux gens. Parce que les personnes sont en détresse, que c’est déjà compliqué de venir chercher à manger, et ça n’est pas leur priorité de régler leurs problèmes de lecture et d’écriture. Nous, on est organisme de formation, on peut leur parler, on peut rencontrer la personne avant de prendre des décisions. Celle qui a des difficultés à passer le code de la route parce que le vocabulaire est trop compliqué par exemple. On peut se présenter tout simplement, chercher à savoir pourquoi elle n’y arrive pas, discuter avec elle sans parler de la formation.

 

Qu’est-ce que vous entendez par « accrocher » ?

Chronologiquement notre démarche c'est repérer, accrocher, avancer. L’accrochage, ce sont les échanges après le repérage. On s’emploie à créer un climat de confiance et on incite les gens à oser pousser la porte de l'organisme de formation. C’est à ce moment-là qu’on crée chez eux l’envie de venir voir comment ça se passe chez nous.

 

Vous avez rencontré des difficultés particulières ou au contraire des bonnes surprises ?

La bonne surprise c’est le bouche-à-oreille qui fonctionne bien, entre amis ou connaissances, ou par l’intermédiaire des centres sociaux. Ce qui est plus compliqué, c’est quand nous avons des personnes avec des problématiques personnelles ou de santé, qui font qu’elles peuvent venir pendant deux ou trois mois et que, sans prévenir, brutalement, on n’a plus de nouvelles. Mais tant que la personne est avec nous, elle avance petit à petit.  

 

Ce projet vous a-t-il poussé à modifier vos pratiques ?

Pas vraiment de changements, mais plutôt des rapprochements, des échanges plus réguliers avec nos partenaires, qui n’osaient pas forcément nous solliciter quand ils avaient un doute ou une personne qui avait besoin d’être rassurée, par exemple en échangeant directement avec la formatrice ou la coordinatrice. Notre idée de départ c'était vraiment que les structures ou les partenaires sachent ce qu'on fait et qu’ils aient le réflexe de nous contacter. Pour cela, il faut régulièrement faire des piqûres de rappel, répéter les actions, parce que les équipes changent, qu’il y a toujours de nouvelles personnes à sensibiliser.

 

Donc on va essayer d'être plus présents auprès d'eux pour mieux expliquer, pas forcément pour faire la promotion de nos services. On n’a pas spécialement des outils à leur proposer, mais plutôt des conseils. Par exemple, comment ils peuvent se créer un support comme une petite fiche d'identité pour aider au repérage. Ou sans aller trop loin, faire un petit jeu de société avec les personnes pour évaluer leur niveau. Mais pas avec un groupe trop nombreux parce que ça les mettrait en difficulté.

 

Quels ont-été vos résultats ?  

De fin octobre 2022 à fin décembre 2023, soit environ quatorze mois, nous avons repéré dix personnes. Sur notre territoire, ça n’est pas rien. Pendant les six premiers mois, on s’est focalisé sur l’axe un, le repérage, le développement des partenariats. Ensuite, on a pu agir sur l’entrée en formation, que ce soit sur HSP ou sur d'autres actions comme « le français pour chacun. » Aujourd’hui, on poursuit les échanges avec les partenaires en leur disant de ne pas hésiter à nous appeler, à prendre contact avec nous, parce qu'il y a forcément des personnes qui passent entre les mailles du filet.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

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Une Maison Forte de ses convictions

Une Maison Forte de ses convictions | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

La Maison Forte est un tiers-lieu associatif à vocation culturelle, situé à Monbalen (Lot-et-Garonne). Il offre toute une programmation culturelle et de réflexion populaire, propose des résidences de recherche et de création, accueille des stagiaires et favorise la coopération territoriale. Il comprend également un laboratoire d’innovation sociale et culturelle autour du rapport au vivant et des transitions écologiques, sociales et culturelles.

 

En 2022, l’association a eu le désir de se diriger vers la formation, particulièrement pour un public jeune appartenant à des milieux peu touchés par sa programmation culturelle. Après avoir pris connaissance du réseau des écoles de la transition écologique (écoles ETRE), elle a décidé de présenter sa candidature, en raison des publics concernés par cette démarche, à savoir des jeunes dits « en situation de décrochage », éloignés de l'emploi et de la formation, et plus profondément en recherche de sens.

 

Ce réseau a placé au cœur de sa pédagogie le « faire », l’apprentissage par l’expérience, dont la Maison Forte est déjà familière. L’approche ETRE s’appuie sur la constitution de petits groupes de jeunes pour des temps plutôt courts de remobilisation et préqualification, avec une attention particulière portée à l’accueil et à l’accompagnement de chacun des jeunes. Pour l’association La Maison forte, il s’agit également de fédérer autour de ce projet un réseau d'entreprises, d'élus, de citoyens, prêts à s'engager sur la question de la transition écologique et sociale, comme sur la question de la transmission.

 

« J’avais rejoint la Maison Forte depuis quelques mois, plutôt sur la dimension recherche, » explique Marion Blancher. « Du fait de mon métier d'enseignante en philosophie et de mon intérêt propre pour la pédagogie, la rencontre s'est faite assez facilement. On m'a proposé de m'investir sur ce projet, bénévolement au départ. A l’époque, c’était compatible avec mon métier d’enseignante remplaçante. Après un an de bénévolat pour cette année d'incubation, l'équipe a proposé de m'embaucher pour développer le projet d’une école ETRE en Lot-et-Garonne. »

 

Des créations accompagnées

 

Le processus de création d’une école ETRE débute toujours par une période d’incubation. En l’occurrence, elle a duré de septembre 2023 à juin 2024, pendant laquelle le réseau national a accompagné la structure, en suivant un cahier des charges précis, tout en lui laissant une grande liberté dans l’élaboration de son projet afin que l’école réponde aux besoins des jeunes et du territoire, avec les ressources de l’association et de ses partenaires. Une grande partie de ce temps d'incubation a été consacrée à une enquête de territoire sur les bassins de vie du Villeneuvois et de l’Agenais. « On s’est concentré sur ces deux territoires accessibles en transport en commun, avec l'idée, qu’à terme, il serait intéressant de proposer des sessions délocalisées, par exemple à Nérac ou à Marmande, avec des partenaires locaux, pour limiter ce frein périphérique de la mobilité. »

 

Cette enquête a consisté à rencontrer une centaine d’acteurs locaux. Des professionnels, agriculteurs, maraîchers, artisans, pour recueillir leurs expériences, leurs besoins en termes d'emploi et de dynamique économique. Ainsi que des acteurs de l'accompagnement socio-éducatif des jeunes, comme les missions locales, la Maison des Adolescents, l’association de prévention La Sauvegarde. Partir à la rencontre de tous ces interlocuteurs avec le projet d’une telle école facilite les contacts, notamment parce que la Maison Forte proposait d’ajouter une dimension à l’accompagnement des jeunes avec une école sur mesure, qui fait un pas de côté, et propose un autre avenir à des jeunes qui ne trouvent pas leur voie dans le monde tel qu’il est.

 

« Nous avons globalement reçu un très bon accueil en tout cas du côté des prescripteurs, parce qu'il y a un réel besoin. Nous avons également rencontré des jeunes, comme des stagiaires de la MFR qui fréquentaient la Maison Forte, et même quelques-uns de mes anciens élèves qui étaient en situation de décrochage. Nous avons beaucoup appris à leur contact. Cela nous tenait vraiment à cœur de les interroger et de les impliquer dans le projet, leur demander leur avis sur le programme, nous aider à diffuser l’information. Le réseau des écoles déjà existantes ainsi que la rencontre des différents prescripteurs nous a beaucoup aidé aussi. »

 

L’association considère que le terme de « décrocheur » est stigmatisant et occulte toute une partie du problème. Pour elle, le décrochage est le symptôme du dysfonctionnement d’un système plus global qui inclut les familles, les enseignants, les institutions. Son approche consiste à présenter les jeunes comme étant dans une situation de mal-être ou de recherche, ne trouvant pas leur place dans le système qui leur est proposé, que ce soit le système scolaire, de formation professionnelle ou plus globalement le système social.

 

Combattre le décrochage scolaire

 

« Un point qui nous a particulièrement frappé, c'est le constat qu'il y a de plus en plus de jeunes en décrochage scolaire pas tant en raison des freins périphériques que pour des raisons de santé mentale liée à la pression du système scolaire, pression qu’ils s’imposent aussi à eux-mêmes. On voit que cette question et celle des phobies sociales peuvent toucher des jeunes qui, par ailleurs, ont tous les moyens pour réussir. De même, les jeunes qui ne parviennent pas à répondre aux exigences scolaires révèlent de vrais talents et un profond désir quand ils expérimentent un autre cadre d’apprentissage. »

 

La phase d'incubation inclut une « session test », qui permet de voir plus concrètement si l'école en création est en mesure de se lancer. Depuis son ouverture, l’école suit un rythme de trois sessions de deux semaines et une session d’un mois par an. En 2026, seront proposées une ou deux sessions de préqualification qui durent trois mois, avec le choix de thématiques plus ciblées.

 

La Maison forte a aussi développé d’autres propositions comme des chantiers avec les centres sociaux ou des Journées découvertes pour différentes structures. Une semaine de résidence d’artistes est prévue pour une association de jeunes de Villeneuve autour du rap et de l’agro-écologie. L'idée étant de les accueillir dans le cadre habituel des résidences, mais en leur proposant d'ajouter la dimension découverte de la ruralité et des enjeux écologiques.

 

« On était assez étonné de voir que des jeunes qui vivent à Agen et à Villeneuve ne sortent pas de ces petites enclaves urbaines et qu’ils ont des représentations faussées de la campagne. En tout cas, il y a un vrai enjeu de découvrir autrement la nature et la ruralité. »

 

Au sein de l’école ETRE, chaque groupe est constitué de huit jeunes au maximum. Il s’agit d’un des critères du réseau qui cherche également à créer de la diversité dans les publics. Diversité qui, par ailleurs, s’impose d’elle-même compte tenu de l’origine des participants qui se présentent à l’école par des biais très divers. Pour exemple, un travail mené avec la Mission de Lutte contre le Décrochage Scolaire (MLDS) de l'Education nationale et avec des conseillers principaux d’éducation, reflète le choix d'aller toucher des lycéens en voie de décrochage, tout autant que des mineurs non accompagnés, hébergés dans une maison d’enfants à caractère sociale (MECS) des Apprentis d’Auteuil.

 

En matière de formations, l’école ETRE portée par la Maison forte se positionne sur quatre grandes thématiques, dont certaines déjà liés aux activités habituelles du tiers-lieu et aux besoins proches du territoire, comme l'agriculture, l'agroécologie et l'alimentation durable, ainsi que la médiation culturelle autour de la question des transitions.

 

Autres thématiques, l'écoconstruction, le réemploi et l’artisanat, qui répondent à un enjeu de restauration et de préservation du patrimoine de la Maison Forte. Pour aller plus loin, elle a la volonté de tisser des liens avec ValOrizon, le syndicat de valorisation et traitement des déchets ménagers du Lot-et-Garonne et avec l’association Tera (Tournon d’Agenais) qui projette l’ouverture d'une formation sur les métiers de l'éco construction.

 

« L'ouverture de l'école ETRE de Monbalen était une manière de faire tremplin vers tout un champ de la formation chez nous qui en fait est plus large, par exemple le projet Ecotone, un programme qui s'adresse aux étudiants et qui a vocation à mettre en valeur les savoirs, les idées et les envies d'actions des personnes en formation en leur donnant la possibilité d'agir pour leur territoire, sur leur territoire. Mon rôle c'est aussi de coordonner ces différentes dimensions, comme l'accueil de stagiaires ou les formations que nous proposons dans le domaine de l'agroécologie. La Maison forte est avant tout un lieu d’expérience, où les jeunes accueillis sont finalement tout aussi apprenants que chacune des personnes qui vit, travaille, séjourne dans ce lieu. »

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Pédagogie à l'heure espagnole

Pédagogie à l'heure espagnole | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Laurent Verdeau est responsable du pôle pédagogie CMA Formation de Saint-Germain-de-Lusignan (Charente-Maritime). Il a accompagné une équipe pédagogique qui mène depuis deux ans une expérimentation basée sur le modèle espagnol « Ethazi », dont le développement a été financé par le Fonds Régional pour l’Innovation dans la Formation (FRIF).

 

Quelle est l’origine de votre projet ?

Il y a sept ans nous avons participé à un voyage d'études en Espagne, organisé par une collègue de la direction régionale de la formation (DRF), un service qui gère toute la formation de notre réseau. Nous nous sommes rendus au centre Tknika, un organisme situé près de Saint-Sébastien, pour découvrir le modèle Ethazi, dont il est à l’origine. Sa mise en place au Pays basque espagnol relevait à la fois d’un choix politique et d’un choix pédagogique, sachant que la formation professionnelle en Espagne s'adresse principalement à des jeunes en échec scolaire. Nous avons continué à nous documenter et à nous former à travers plusieurs échanges avec des centres de formation du Pays basque et de Navarre. Nous avons décidé de déposer un dossier auprès de la Région sur l’idée que l'on pouvait promouvoir une formation différente basée sur une pédagogie active et les défis.

 

En quoi consiste la pédagogie Ethazi ?

Elle repose sur trois piliers. Le premier, c'est qu'il n’est pas question uniquement d'enseignement académique ou d'enseignement professionnel. On intègre aussi les compétences comportementales. Le deuxième pilier c'est qu'on casse totalement le modèle de formation. C'est une réponse à ce public qui est souvent en conflit avec son passé éducatif. On lui propose une approche plus transverse, c'est à dire que certains enseignements vont se faire en coanimation, par exemple un professeur de français avec un professeur de vente qui vont travailler l'expression orale et l'expression écrite en support du travail pédagogique sur une compétence professionnelle. Enfin le troisième, c'est d’impliquer les jeunes en leur demandant de relever des défis.

 

Et en quoi consiste les défis ?

On a défini trois types de défis.  Des petits défis à la séance, qui ont pour objectif de travailler les compétences comportementales. Un deuxième niveau qui consiste à préparer le travail, comme dans une pédagogie inversée, où les jeunes doivent s’informer, traiter une information pour pouvoir suivre ce qui va arriver après. Et puis un troisième qui met en œuvre un ensemble de compétences à acquérir, par exemple maîtriser la description iconographique en anglais, maîtriser les conversions en mathématiques pour travailler sur une fiche de prix, etc. La première promotion devait créer une entreprise virtuelle en quelques mois, en élaborant un cahier des charges, en identifiant un produit phare avant de le commercialiser, faire une analyse des bénéfices et pourquoi pas dans un deuxième temps créer l’entreprise de manière officielle. Bien évidemment ils sont encadrés par les enseignants qui sont dans une posture de formateur, plus d’accompagnement que de transmission descendante.

 

Comment avez-vous procédé pour la mise en place du modèle ?

Il y a deux ans, nous avons choisi un groupe de CAP équipiers polyvalents du commerce, parce que nous avions une difficulté avec ces jeunes, dont le choix d'orientation est souvent par défaut. De plus, on constate que le référentiel du diplôme ne correspond pas aux compétences attendues par les entreprises. Ce qu’elles souhaitent, c’est que l’on forme leurs apprentis à des compétences transverses, du dynamisme, une certaine capacité d'adaptation, etc. On s'est appuyé sur ce modèle Ethazi qui intègre les compétences comportementales, pour proposer une réponse pédagogique bien spécifique à ce groupe cible.

 

Avez-vous des critères de sélection des participants ?

On avait envisagé de faire des entretiens, mais ils n’ont pas pu être réalisés. Donc on s'est retrouvé à la rentrée avec des jeunes qui étaient déjà positionnés, de manière aléatoire. Ce groupe de douze avait la particularité d’être extrêmement hétérogène, avec des jeunes pour lesquels la vente était un vrai projet professionnel, d'autres qui étaient là vraiment par hasard. Certains avaient des acquis du secondaire déjà consolidés, d'autres étaient en total décrochage scolaire, quelques-uns avec des problématiques sociales, deux jeunes avec une RQTH. Il a fallu composer avec tout ça, ce qui n’a pas été simple pour s'assurer d'une certaine cohésion et que tout le groupe avance ensemble.

 

Comment a réagi le public ?

Nous avons des jeunes qui adhèrent complètement au projet parce qu’ils ont été un peu dégoûtés d'une pédagogie traditionnelle, et qu’ils ne souhaitent pas revivre ce qu'ils ont subi au collège. Cette pédagogie de projet repose sur un travail collaboratif, et tous ne trouvent pas forcément leur place dans un travail d’équipe. Mais une fois qu'ils l'ont trouvée, ils l’adoptent, au point que ce sont souvent les familles qui viennent nous dire qu’ils ne reconnaissent plus leur jeune.

 

Est-ce que vous expliquez aux participants ce qu’est la pédagogie Ethazi ?

Pour eux, nous avons mis en place une semaine d'intégration avec des activités de cohésion de groupe. Par exemple un escape game qui nous a permis d'identifier assez rapidement les profils d'apprentissage, la manière dont chacun évoluait au sein du groupe. Nous leur avons présenté longuement les objectifs pédagogiques, la manière de travailler et ce qui allait se passer pendant les deux ans du parcours. Cela nous a permis également de montrer nos outils spécifiques, qui ne sont pas du tout ceux qu'on utilise habituellement, comme un livret d'apprentissage qui intègre tous les soft skills et des grilles d'évaluation des compétences comportementales.

 

Quel est le rôle des entreprises dans ce modèle ?

Á priori les entreprises ne sont pas forcément directement concernées par la pédagogie utilisée. Mais il me parait important de les intégrer, au moins dans la logique, notamment en les invitant à participer à la semaine d’intégration. Nous sommes dans une logique de pédagogie inversée, c’est-à-dire qu’on prépare en entreprise ce qui va être réalisé ensuite au centre. Certaines entreprises jouent bien le jeu, elles s'intéressent de près à ce que font leurs apprentis, et demandent aux jeunes transposer chez elles ce qu’ils apprennent au centre. Pour nous, cela implique des visites un peu plus fréquentes et surtout ça nous oblige à un lien fonctionnel, qu'il soit téléphonique ou au travers de nos outils de l'alternance beaucoup plus importants qu'avec les groupes classiques. Aujourd’hui, certaines des entreprises qui avaient des apprentis lors de la première expérimentation ont demandé que les suivants soient spécifiquement dans ce groupe.

 

Quel est le message que vous avez tenu aux formateurs pour les convaincre ?

Avec la direction du CFA, nous avons travaillé au choix d’une équipe pédagogique, des collègues qui avaient peut-être besoin d'un nouveau souffle, mais aussi dont nous étions certains de la capacité à s’approprier le projet et la démarche pédagogique. Pour les convaincre, bien souvent il faut les emmener sur le terrain. Nous avons visité plusieurs centres d’information de Navarre, nous avons pu observer dans les classes comment travaillaient concrètement les formateurs. Ils nous ont expliqué les avantages du modèle, comment ils avaient dû s'y adapter. Ces rencontres ont été le déclic qui m'a permis de gagner l'équipe et de la rallier à ma cause. J’espère tout du moins qu’ils le sont. En tout cas, je les remercie infiniment pour le travail réalisé. Si ce modèle porte ses fruits, le mérite leur en revient. Parce que ça les a amenés aussi à s'interroger sur leur propre pratique. Je pense qu'aujourd'hui ils envisagent leur travail d'une autre manière et ils en parlent de manière très convaincue. De toute façon, notre métier est un métier de remise en question perpétuelle.

 

Pour un formateur quels changements de pratiques cela implique ?

D’abord on décortique le référentiel pour identifier toutes les compétences nécessaires à l'obtention du diplôme, et pour trouver des points de convergence entre l'enseignement professionnel et l'enseignement général. L’autre chose qui change fondamentalement, c'est que les formateurs doivent travailler en équipe. Il a fallu vraiment les sortir de leur zone de confort et qu'ils acceptent l'idée que leur travail allait être confronté à la vision d'un collègue, qu'il allait falloir retravailler ses propres progressions en tenant compte des objectifs définis par un autre. Et puis le rapport à nos apprenants n’est plus le même. Ils ne sont pas de simples élèves mais deviennent acteurs de leur formation. On est vraiment sur une pédagogie de projet. Eux aussi doivent travailler en équipe, on n’est plus sur une logique d’acquisition individuelle. Je pense qu'il y a des enseignants qui peuvent se reconnaître dans ce modèle qui leur permet de travailler sur la motivation des jeunes. Et d'autres ne s'y retrouveront pas et ne souhaiteront jamais intégrer une pédagogie de projet qui implique de travailler en équipe.

 

Comment envisagez-vous la suite ?  

Une nouvelle promotion de deux ans vient de démarrer. Et l'an prochain, nous déployons le modèle sur un deuxième site, à Saint-Germain de Lusignan. A terme, nous aurons deux groupes en simultané, un en ponctuel et l'autre en contrôle en cours de formation (CCF). Toujours dans le domaine du commerce et sur le même diplôme, de manière à capitaliser sur le travail qui a été réalisé. Des collègues d'autres filières professionnelles, notamment la mécanique, nous ont dit qu’ils étaient intéressés. Avant cela, je veux qu'on aille jusqu'au bout de l'expérimentation pour en tirer tous les enseignements.  

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

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November 14, 2024 7:44 AM
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Les tiers-lieux, si ressemblants, si différents

Les tiers-lieux, si ressemblants, si différents | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Pour Chloé Rivolet, codirectrice et responsable animation territoriale de La Coopérative Tiers-Lieux, « un tiers-lieu c’est avant tout une démarche, un processus qui consiste à créer un bien commun à l’échelle d’un territoire, avec un collectif. » Les structures qui répondent à cette définition sont aujourd’hui très variées, mais elles possèdent toutes les mêmes particularités.

 

La première consiste à proposer un parcours d’émancipation individuelle, ou comment le lieu permet aux personnes de développer leurs compétences, de tester leur projet, etc. La deuxième, l’animation d’une dynamique collective qui permet de valoriser chacun, notamment grâce à la notion d’accueil inconditionnel. « Cela ne veut pas dire qu'une réponse est apportée à tous, mais que le lieu est en mesure de donner des renseignements aux personnes qui poussent leurs portes, de leur faire une place et leur proposer des projets. Tout cela est permis par la dynamique collective. » Enfin, dernier point, le territoire, qui fait qu’un tiers-lieu ne ressemblera pas à un autre, en fonction des réalités et besoins locaux, des activités, de l'animation du modèle économique, des objectifs des partenaires et des acteurs de proximité.  

 

Chaque tiers-lieu définit les leviers qu’il veut actionner, place ses propres curseurs. Certains vont être très impliqués sur la dynamique collective, un peu moins dans l’émancipation individuelle. Mais chacune des trois dimensions doit être présente. « A noter que certaines organisations répondent à ces caractéristiques, sans pour autant être identifiées en tant que tiers-lieu. Ce sont notamment des structures du médicosocial qui cherchent à se réinventer et qu’on accompagne pour aboutir à une démarche plus ouverte, plus participative. »

 

Adopter cette démarche, c’est faire partie d’un réseau très dynamique, qui s’appuie sur les expériences précédentes pour faire de la recherche action, trouver de l’inspiration, être reconnu auprès des institutions et s'exprimer. Plus prosaïquement, il ouvre accès à certains dispositifs d'aide, notamment ceux de la Région Nouvelle-Aquitaine qui soutient la création de tiers-lieux depuis plusieurs années.

 

Un outil de localisation

 

Pour prétendre à des aides régionales, il faut être référencé sur la cartographie coproduite par la Coopérative Tiers-Lieux et par la Région, au regard d’un certain nombre de critères. Aujourd’hui la Nouvelle-Aquitaine en compte environ 250, selon un système de modération qui a pour but de mieux référencer les structures. « Au début, c’était juste du déclaratif, n’importe quel lieu pouvait être référencé. Mais nous avons un peu affiné notre approche afin d’évaluer les initiatives de manière plus précise et qualitative. »

 

Pour faire tiers-lieu, il n’est pas nécessaire de proposer un grand éventail d’activités différentes. L'accessibilité en termes de tarif, d’horaires, de programmation, constitue le point essentiel. Un bureau qui n’a qu’une activité de coworking peut être référencé, sous réserve qu’il développe une vraie dynamique qui s’inscrit dans la démarche. Mais cela reste assez rare, puisqu’une activité de coworking, notamment en agglomération, se présente la plupart du temps comme une offre de services. Les utilisateurs consomment le lieu, sans être forcément contributeurs.

 

« Un tiers-lieu ne peut pas être un espace de colocation d’entreprises, pas plus qu’une pépinière ou un incubateur, qui s’adressent souvent à une seule typologie de public, des entrepreneurs dont la durée de présence est assez limitée dans la structure. Alors que dans les tiers-lieux, la volonté est que les contrats soient à durée indéterminée, même si on peut partir un peu comme on veut. » A noter que les tiers-lieux s’inscrivent forcément dans le champ de l’économie sociale et solidaire, même s’il ne s’agit pas d’un critère exigé. Assez naturellement, ils se reconnaissent dans ces valeurs, principalement parce qu’ils sont majoritairement portés par des associations.

 

La Coopérative Tiers-Lieux, en tant que tête de réseau régionale, déploie différents formats de rencontre et d'accompagnement gratuit, donne de la visibilité aux tiers-lieux à travers des actions collectives et des productions de cartographie. Elle remplit par ailleurs deux autres grandes missions. D’abord un laboratoire d’innovation sociale, qui intervient à l’échelle nationale auprès de structures assez variées, médicosociales ou caritatives, qui cherchent à modifier leurs pratiques et modes d’intervention auprès de leurs publics. Ensuite, une activité de formation professionnalisante qui dépasse les frontières de la Nouvelle-Aquitaine puisque, en coopération avec d’autres réseaux régionaux, elle intervient dans dix régions différentes pour des formations de facilitateurs ou de transformation des organisations, notamment sur la base de l’intelligence collective.

 

La Coopérative accompagne des tiers-lieux en création ou des structures existantes qui ont envie de se transformer et rejoindre le réseau, qu’ils aient besoin d’un appui à la gouvernance ou au développement d'une nouvelle activité. Elle intervient également auprès d'organisations diverses, notamment des centres sociaux qui s’intéressent à la démarche.

 

« Nous travaillons aussi auprès de collectivités qui disposent de locaux vacants, avec un enjeu de redynamisation de leur localité et de développement de nouvelles activités pour leurs habitants, mais qui n’ont pas l’ingénierie des compétences pour donner forme à un tel projet. Notre rôle est de mettre en ordre de marche les acteurs, de faire émerger des dynamiques dans un local qui bien souvent appartient à la collectivité, mais qui est géré par un collectif d’habitants. Si la finalité pour la collectivité est de rester à la manœuvre, cela ne nous intéresse pas. Nous estimons qu’il est trop dangereux pour un lieu, in fine pour les utilisateurs, qu’il soit potentiellement remis en cause à chaque mandature. »

 

Elaborer un modèle économique

 

Les structures s’adressent à la Coopérative pour recevoir une aide sur les questions de gouvernance, de modèle économique, d’organisation de l'accueil. Le thème de l’organisation interne, du recrutement, revient régulièrement, ainsi que la gestion du binôme salarié-bénévoles dans les associations, qui n’est pas toujours simple. Les entreprises et les organisations qui cherchent à se transformer, à se réinventer afin d’être plus attractifs vis-à-vis de leurs bénéficiaires, font aussi face à un enjeu financier.

 

D’un territoire à l’autre, on retrouve les mêmes problématiques, mais les spécificités locales conditionnent les outils qui sont fournis aux acteurs des différentes structures, charge à eux de mettre en place la méthodologie et l’approche la plus pertinente pour leur projet. « Notre rôle est plutôt de faire la promotion du modèle. On se rend sur les territoires pour évaluer la situation, repérer si la fonction de tiers-lieux au sens social du terme est déjà remplie par d’autres acteurs, ou si le territoire aurait besoin d’un tiers-lieu estampillé. »

 

Il est assez rare qu’une nouvelle initiative se monte s’il en existe déjà d’autres à proximité. La Région a pour principe de ne pas financer un lieu qui se créerait à moins de vingt minutes d’une autre structure. Dans ce cas, il est suggéré aux porteurs de projet de se rapprocher de l’existant, d’essayer de proposer une approche complémentaire, afin que le projet ait un sens. Ainsi des ponts et des partenariats peuvent se créer, par exemple en associant un atelier partagé, un café associatif et une activité culturelle

 

La Coopérative Tiers-Lieux se trouve aujourd’hui dans une phase de stabilisation. Depuis plusieurs années, elle a opéré un renforcement de ses fonds propres. Cependant ses activités ont nécessairement besoin du soutien des collectivités. Elle cherche désormais à maintenir une dynamique de réseau dans un contexte budgétaire assez changeant.  

 

« La bonne nouvelle c'est que, depuis cinq ou six ans, il existe une association nationale des tiers-lieux. Il y a aussi France Tiers-Lieux, un Groupement d'Intérêt Public constitué de cinq ministères et de l'Association Nationale des Tiers-Lieux. Nous n’avons aucune certitude sur la continuité des aides et des politiques publiques, mais comme les acteurs nationaux se sont fédérés, nous essayons ensemble de plaider la cause des tiers-lieux, en plus de nous rencontrer régulièrement et de s'inspirer des modèles économiques des uns et des autres. »

 

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October 17, 2024 7:39 AM
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Illettrisme, une affaire de réseau

Illettrisme, une affaire de réseau | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Christophe Clerc-Pape, est le référent de la Plateforme Linguistique et Numérique du centre social Le Roseau, situé à Biganos dans les Landes. Son action « cap sur l'autonomie linguistique et numérique », a été financée par l’appel à projets régional « innover contre l’illettrisme. »

 

Le roseau s'est positionné sur les questions d’illettrisme, pourquoi ?

L’illettrisme s'est installé dans la démarche globale du centre social Le Roseau il y a plus d'une dizaine d'années. Sachant que l’association précédente, L'encrier, agissait beaucoup dans le domaine de la pratique de la langue et de la maîtrise du français. En 2015, se sont tenus les premiers cours destinés à des personnes en situation d'illettrisme et pour les allophones. Finalement, décision a été prise de créer une plateforme au sein du Roseau, pour répondre à une demande assez importante.

 

 À la même époque, des repéreurs ont été formés sur l’ensemble du bassin d’Arcachon en lien avec le CRIA Nouvelle-Aquitaine qui s'est impliqué très rapidement. Les premiers étaient plutôt des personnes en lien direct avec des publics fragilisés, des assistantes sociales, des conseillers Pôle emploi, des CCAS, des associations caritatives comme le Secours Populaire, le Secours Catholique, etc. Aujourd’hui, la plateforme intervient sur l'ensemble du territoire que l'on appelle le pays BARVAL, pour pays du Bassin d’Arcachon et du Val de l’Eyre.

 

Quelle est la situation de l’illettrisme sur ce territoire ?

Lorsque l’on parle illettrisme, il y a toujours le risque de se confronter à des préjugés et à une certaine méconnaissance. Les maires du bassin se sont progressivement aperçus que certains de leurs habitants sont concernés, et ils apprécient de trouver la plateforme pour les accueillir, les évaluer, les orienter vers des formations adaptées. Il a fallu trois à quatre ans de rodage pour que la plateforme sache comment opérer au mieux sur le territoire. Mais le CRIA nous a bien aidés à structurer les choses. Il fallait aussi recruter des personnes compétentes. Au départ, les intervenants étaient des gens du centre social qui se sont un peu improvisés repéreurs, puis il a fallu les professionnaliser étant donné l'ampleur que ça pouvait prendre.

 

Y-avait-il déjà des intervenants spécialisés ?

Il existait des organismes de formation et des associations axées sur l'apprentissage linguistique. Le grand défi c'est que l'illettrisme est très difficile à identifier dans la mesure où les publics ont beaucoup de mal à communiquer sur ce sujet. Maintenant sur le bassin d'Arcachon, on arrive à capter beaucoup plus de personnes que dans des grandes villes où elles sont plus anonymes et peuvent plus facilement cacher leurs difficultés.

 

Quelles sont exactement les missions de la plateforme ?

La plateforme doit tout d’abord animer ce réseau de repéreurs, et donc mettre en place des partenariats avec les CCAS, les services sociaux, les associations caritatives, les services du Département qui reçoivent les personnes au RSA, etc. Elle doit les faire vivre, parce que chacun est pris par son quotidien, et s’il n’y a pas régulièrement des rencontres, des échanges entre la plateforme et les repéreurs, la dynamique peut rapidement s'émousser et tomber dans l'oubli. Par ailleurs, elle accueille des personnes repérées afin de les évaluer et leur permettre de rentrer dans un parcours de réapprentissage.

 

Notre défi pour l'année à venir, c'est de trouver, à travers les centres sociaux, les espaces de vie sociale, les associations, des possibilités d'ateliers qu'on appelle « première marche ». C'est à dire qu’on ne cherche pas à faire rentrer directement les personnes en formation, compte tenu des mauvais souvenirs qu’ils ont parfois de leur scolarité. Certains sont réticents à entrer dans une salle de classe. Alors on leur propose ces ateliers première marche en petit groupe, animés d'une façon très empathique par des bénévoles. C'est le travail que je suis en train de mener à l'heure actuelle et qui va faire partie des gros chantiers pour 2024-2025.

 

Avez-vous défini un profil « idéal » pour les repéreurs ?

Au départ, toute personne en situation d’accueillir du public, par exemple dans les mairies. Mais on s'est vite aperçu que ce n’était pas forcément très efficace, que ça demandait beaucoup d'énergie à la plateforme pour les former et les animer. On a préféré se concentrer sur des personnes comme les assistantes sociales des CCAS qui ont du temps pour identifier les difficultés dans la maîtrise du français. Même chose avec les conseillers en insertion professionnelle, ou encore les médecins et infirmières qui travaillent dans les centres médico psychologiques.

 

Ces dernières années, nous avons effectué un travail de ciblage un peu plus fin pour privilégier des repéreurs au plus près des publics. Par exemple, les structures de l'insertion par l'activité économique nous disent que 10 à 15% de leurs publics sont concernés par l’illettrisme, mais qu’ils ne sont pas forcément prêts à entrer dans un parcours de formation. Pour beaucoup, l’objectif est de travailler, ramener de l'argent à la maison, donc ils se débrouillent depuis un certain nombre d'années avec leurs difficultés.

 

Est-ce que les repéreurs ont toujours besoins d’être formés ?

Certains ont naturellement la fibre, ils n'ont pas forcément besoin de formation pour aborder les difficultés d’une personne, sans la stigmatiser.  Ce qu’apportent nos formations, c’est une vision un peu globale de l'illettrisme, des chiffres, des profils types. En pratique, c’est plutôt une sorte de sensibilisation. Aussi doués soient-ils, les futurs repéreurs peuvent passer à côté de certains cas, parce qu'ils font face à des stratégies d'évitement et de contournement qui sont parfois très subtiles. Ce que nous voulons leur apporter, c’est une boîte à outils générale, des outils simples et le moins chronophages possible, afin qu'ils mettent en place des sortes de petits process.

 

Combien le réseau compte-t-il de repéreurs ?  

Nous avons 65 repéreurs répartis sur l'ensemble du territoire. Dans l’idéal, il faudrait qu’on en ait le double parce que certains sont « muets », ils n’ont pas l'occasion de rencontrer des personnes en situation d’illettrisme, ou pas le temps. D’autres ont souhaité se sensibiliser mais ensuite ils s’aperçoivent que, sur leur poste de travail, ils n’ont que très peu l’occasion d’effectuer un repérage.

 

Quelle est l’étape qui suit le repérage ?

À partir du moment où une personne est repérée et souhaite aller plus loin, nous recevons une prescription qui contient quelques informations sur elle et ses attentes. On la contacte dans les dix jours parce que c'est un public assez volatil, et nous fixons un rendez-vous pour un accueil administratif et une évaluation de son niveau en français. Certains se pensent en illettrisme grave, alors que ça n’est pas du tout le cas. Nous les rassurons et on les oriente vers les organismes de formation pour une remise à niveau. En revanche, en présence de situations d'illettrisme sévère, nous proposons de passer par les ateliers premières marche, de façon que la personne reprenne confiance en elle. Dans tous les cas, le défi c’est l’offre de formation, parce que nous avons un gros problème de mobilité sur le territoire. Il nous faut trouver des points de formation un peu partout pour accueillir les personnes au plus près de chez elles.

 

Les repéreurs ne sont-ils pas surtout des « mobilisateurs » ?

Le repérage est finalement la partie la plus simple. Le plus gros du travail vient après, dans la sensibilisation sans stigmatisation et la manière de convaincre la personne en situation d'illettrisme de tous les avantages qu'elle tirerait à améliorer sa maîtrise du français. J’ai l'impression qu’il y a un déficit au niveau de la mobilisation, c'est-à-dire qu'il semble difficile pour les repéreurs de passer à cette phase de mobilisation pour des raisons que je n'arrive pas,  pour l'instant, à identifier. Les formations existent pour leur permettre d’acquérir tous les savoir-faire. Autre élément important, c'est que nous avons la chance d'avoir la présence d’un maillon de la Chaîne des Savoirs. Il n'y a rien de mieux que le témoignage d’un ancien illettré pour parler aux autres des problèmes qu'il a rencontrés, et de la manière dont il a vécu son réapprentissage.

 

Quelles sont vos perspectives ?

La plateforme, avec le réseau des repéreurs qu'elle anime, a permis de passer d’une douzaine de personnes repérées, à 20 ou 25 par an. Nous envisageons de changer son nom, pour faire disparaître le terme illettrisme, parce qu’il est stigmatisant d’entrée. Peut-être « passerelle des savoirs » pour insister sur les savoirs de base. Ce serait plus positif et globalisant, parce qu’on vient apprendre le français, mais aussi le calcul pour la vie de tous les jours, l’utilisation des outils numériques. Pas seulement la langue, mais aussi toutes ces choses importantes, voire indispensables à la vie quotidienne.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

 

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October 3, 2024 9:23 AM
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Prépa projet professionnel

Prépa projet professionnel | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Depuis fin 2019, la Chambre de Métiers Nouvelle-Aquitaine des Deux-Sèvres anime une Prépa apprentissage sur l’ensemble du département. David Thouvenin, coordonnateur des dispositifs en alternance au niveau régional, participe à sa mise en œuvre dans le département jusqu’à la fin de l’année.

 

Comment s’est déroulée la mise en place de votre Prépa ?

Nous avons commencé avec des petits groupes de huit à quinze jeunes, le temps que les habitudes se mettent en place avec les prescripteurs. En 2020, le covid nous a inquiété, mais finalement nous a moyennement impacté. Nous avions mis en place un système à distance qui permettait de faire des visios et des vidéos avec les jeunes, de mener des entretiens réguliers avec la formatrice sur l'accompagnement au projet. Les stages ont été mis en pause bien sûr, mais on a travaillé les fondamentaux à distance. Malgré le stress chez les jeunes et les inquiétudes sur leurs contrats avec les entreprises, notre accompagnement de proximité leur a permis de trouver des solutions.

 

Avant la Prépa vous aviez un DIMA (Dispositif d'Initiation aux Métiers en Alternance), quelle est la différence ?

Le DIMA c’est l’ancêtre de la Prépa ou des 3e « prépa-métier ». Son principal avantage était de disposer des jeunes pour une année scolaire entière, dont la moitié en stage. La Prépa apprentissage est différente, parce qu’on n’est pas sur une scolarité, mais sur un dispositif d'accompagnement. Le but était de reprendre les éléments qui fonctionnaient en DIMA, en s'adaptant à un public prescrit à 90% par les missions locales. Les 10% qui restent viennent des CIO.

 

Notre Prépa apprentissage est en entrée sortie permanente. Un jeune peut à tout moment l’intégrer ou en sortir. Les jeunes sont stagiaires de la formation professionnelle. On essaie de s’adapter au maximum aux freins de chaque jeune : par exemple, je sais que, pour certains, venir deux jours par semaine, c'est beaucoup. Donc je valorise le fait qu’ils soient présents régulièrement. C'est un public que je trouve assez mûr, pas tellement à cause de l'âge, mais parce qu’ils sont sortis du scolaire, ils commencent à avoir un pied dans le milieu professionnel.

 

Avez-vous une spécificité par rapport à une autre Prépa ?

Dans notre réponse à l’appel à projets, nous avons choisi de présenter des « sas », des périodes de trois mois renouvelables deux fois.  Pour les jeunes, il est plus facile de se projeter sur trois mois, puis à nouveau 3 mois, que directement sur neuf mois. Tous les jeunes n'ont pas les mêmes besoins, ou n’ont pas les mêmes attentes pour accéder à l'apprentissage. Le plus souvent, il y a d’abord un gros travail à faire sur la situation personnelle et le projet professionnel avant d'envisager un contrat d'apprentissage. C’est pour cela que nous proposons des parcours évolutifs personnels.

 

Comment se déroule un sas ?

Un sas, c’est treize semaines, dont huit en CFA et cinq d'immersion en entreprise. Dans une semaine type au CFA, ils ont deux jours de recherche de stages ou d’immersion sur nos plateaux techniques. Le reste du temps, il y a du FLE pour ceux qui en ont besoin, de l'accompagnement au projet, de la remédiation sur les savoirs de base, des sports innovants pour que cela reste dynamique. Au début, il faut compter deux à trois semaines pour bien travailler le projet, le CV, la lettre de motivation, la recherche de stage. On leur propose aussi de mener un projet collectif. Les deux groupes, d’une dizaine de jeunes chacun, travaillent ensemble sur un projet commun. A Parthenay par exemple, ils ont fait un clip de rap qui parlait de la Prépa, d’autres ont fait une marque de tee-shirt. Cela nous permet de travailler des notions un peu transverses, le travail en équipe, un peu de maths, etc.

 

Quel est votre public ?

Des jeunes de 16 à 23 ans, en majorité des 16 18 qui nous sont orientés par les conseillers de mission locale et de CIO. Un parcours de mobilisation en amont peut être recommandé par le prescripteur pour les mettre en confiance. Nous recevons aussi un public MNA, qui est dans une forme d’urgence. On les accompagne sur le FLE, ainsi que sur l’attitude et les codes en entreprise bien différents de ceux de leur pays d’origine. Mais ils sont souvent pressés de trouver un contrat pour faciliter leur intégration. Leur implication est à souligner, ils ont juste besoin que l’on croie en eux. Quand ils signent un contrat, les employeurs mettent en avant leur sérieux. C'est le public qui trouve le plus de contrats, c'est impressionnant. 

 

Avez-vous des critères pour intégrer un jeune ?

Les prescripteurs ont l’habitude de nous envoyer des jeunes qui ont un minimum de motivation et dont le projet est un peu avancé, mais il peut y avoir des erreurs d'orientation. Dès la réunion d’information collective, je m’assure qu’un jeune ne vienne pas à reculons, parce que la Prépa ne peut pas convenir à tout le monde. Et surtout, il faut que le jeune adhère s’il veut que la Prépa ait du sens et du résultat. Nous sommes des « outils » à disposition du jeune mais 90% du « travail » c’est lui qui va le faire avec nos conseils, etc. Si un stagiaire veut arrêter, on cherche à savoir pourquoi. S’il a du mal à évoluer avec un collectif, dans ce cas on peut faire un peu plus d’individuel. Certains ne sont pas du tout prêts à entrer dans la vie active, ils préfèrent ne pas venir. En cas de refus de poursuivre, je prends contact avec le conseiller pour qu’il reprenne les choses avec lui afin qu’il ne reste pas sans solution.

 

Comment menez-vous les entretiens ?

Une fois que le jeune est retenu, je lui fais passer un entretien sans son conseiller ni ses parents, pour que la parole soit libre. J’ai envie d'entendre son souhait, son projet de devenir coiffeur ou pâtissier. C’est son projet, pas celui de la famille. J’ai eu des jeunes qui commençaient l’entretien en m’indiquant qu’ils voulaient être maçon car dans leur famille, ils sont maçons de père et fils, mais ce n’était pas son projet.

 

Quelles sont les raisons pour lesquelles un jeune participe à plusieurs sas de suite ?

Il y a plein de cas différents. Parfois c'est parce que le secteur d'activité est bouché. Je prends l'exemple de la mécanique, secteur dans lequel les places en apprentissage sont difficiles à trouver sur un premier niveau de qualification. D’autres fois, le jeune ne sait pas vraiment ce qu’il veut faire. On lui conseille, pendant le premier sas, de suivre des stages dans un maximum de domaines qui l'intéressent, pour affiner son projet au fur et à mesure. Il arrive également que des jeunes ne fassent même pas un sas entier, car ils trouvent très vite un contrat. Mais nous sommes vigilants parce que le projet n’est pas forcément validé. Pour certains jeunes migrants c'est le français qui bloque, et on sait que le FLE sur un sas n’est pas suffisant pour lever ce frein, permettre à une entreprise de se sentir en sécurité si elle l’intègre.

 

Nous tenons vraiment à faire de l'orientation choisie. Nous accompagnons les jeunes quel que soient leurs projets. Cependant, ce sont d’autres organismes qui prendront le relais sur la formation. Mais 90% des contrats signés sont dans des formations que nos centres proposent, parce que nous disposons de beaucoup de plateaux techniques pour leur faire découvrir le métier. Ne proposer que du face à face, je pense que cela ne répond pas à leurs attentes. Ils ont besoin de concret et l’avantage des CMA formation de Niort et de Parthenay c'est qu'on couvre près de 30 métiers dans 11 filières, ce qui n’est pas le cas d’autres CFA. Cela nous a permis aussi de mettre en place d'autres choses comme un CAP d'intégration, un CAP en 3 ans pour les jeunes MNA. La première année de contrat, ils sont dans un groupe spécifique où ils font du renforcement en français. Cela rassure les entreprises.

 

Pour vous, une sortie positive, c’est forcément décrocher un contrat d’apprentissage ?

En majorité, les jeunes visent l’apprentissage. Mais ils viennent aussi pour travailler leur projet, découvrir des métiers. Je dis souvent que la Prépa apprentissage, c'est un dispositif d'accompagnement vers l'apprentissage… ou pas. Nous avons des jeunes qui s’aperçoivent que l’alternance n’est pas pour eux, qui repartent sur un cursus scolaire, sur des petites formations, des titres, un service civique, etc. Souvent avant de venir, ils ne connaissent pas les contraintes de l’apprentissage, ils ne sont pas prêts pour le monde du travail. Pour autant, on ne les renvoie pas à la mission locale. On continue à travailler leur projet, ce qui peut déboucher sur un service civique ou le retour dans une scolarité.

 

Quel rôle jouent les entreprises ?

Notre avantage est d’avoir un réseau d'entreprises privilégiées prêtes à faire le pari d’accueillir un jeune afin de découvrir tel ou tel métier, même s’il rencontre des difficultés à être ponctuel par exemple. Par ailleurs, nous avons des entreprises qui prennent des stagiaires, mais les salariés ne sont pas forcément formés à les accompagner. Tous les profils existent. L’important c’est qu’ils puissent découvrir, expérimenter et appréhender le métier.

 

Selon vous, quels sont les freins et difficultés les plus importants pour les jeunes ?

Si un jeune est dans une situation instable, il ne peut pas faire avancer son projet professionnel. Cela reviendrait à poser un pansement sur une hémorragie. Finalement, la plus grosse difficulté, qu’on n’arrive pas toujours à résoudre, c’est la mobilité. Cette problématique peut même remettre en cause un contrat mais des entreprises réfléchissent à des solutions. Dans tous les cas, ce qui fonctionne le mieux, c’est quand le jeune sait où il veut aller et que son projet est validé.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

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April 17, 9:07 AM
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Convergence, à l’appui des chantiers

Convergence, à l’appui des chantiers | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

L’histoire de Convergence débute en 2007 sur les quais du canal Saint-Martin à Paris, avec l’opération très médiatisée d’installation de tentes destinées à loger des sans-abris. À l’époque, la ville de Paris a accepté la proposition d’Emmaüs France d’accompagner ces personnes via un dispositif d'insertion par l'activité économique, dans le but de trouver une place dans la société. Au regard des résultat de cette action, l’État a aussi manifesté son intérêt d’essaimer le même programme sur d’autres territoires. L’association Convergence France est née de cette volonté.

 

Aujourd’hui, cette approche est développée sur une douzaine de territoires. Au démarrage, c’étaient des territoires urbains à l’image de l’expérimentation parisienne. Puis l’État a sollicité l'association nationale pour savoir si le programme pourrait être déployé sur un territoire « moins dense » sous réserve de l’accord des acteurs locaux. La Charente a été sélectionnée pour porter la première expérimentation Convergence et Premières heures en chantier sur ce type de territoire.

 

Territoire moins dense ne rime pas exclusivement avec ruralité. Aujourd’hui, le collectif Convergence Charente couvre tout le département, y compris des zones urbaines. La précarité sur ces territoires ne passe pas entièrement par le sans-abrisme, la raison d'être de Convergence est de se tourner vers les plus fragiles, qu’ils soient à la rue ou en habitat très précaires.

 

S'adresser aux plus précaires

 

Convergence Charente a débuté ses actions en 2021. Le collectif s'est construit au fur et à mesure. Il compte aujourd’hui sept chantiers d’insertion pour 280 salariés accompagnés. En entrant dans ce collectif, les structures bénéficient d’un renfort et de budgets pour accompagner au mieux leur public. En échange de cela, elles s'engagent à mobiliser des personnes plus précarisées que celles qu’elles reçoivent habituellement.  Pour Brigitte Stroh, coordinatrice, « ce sont des gens très éloignés de l'emploi, avec de nombreux freins. Ils ont parfois des addictions, des problématiques de santé mentale, des problématiques de handicap plus fortes que dans la population qu'elles ont en temps normal. En résumé, un public plus en désinsertion sociale. »

 

L’apport de Convergence prend différentes formes. D’abord, l’association alloue un budget à chaque chantier pour qu’il renforce ses moyens d’accompagnement. En général, un ASP accompagne entre 30 et 40 personnes. Sauf dans les plus petits chantiers. Grâce à cette aide, le ratio de salariés suivis par accompagnateur est divisé par deux. « À partir du moment où un accompagnateur diminue d’à peu près 50% le nombre de gens accompagnés, cela veut dire qu'il a plus de temps à accorder à chaque personne. C’est obligatoire compte tenu du public visé, qui rencontre beaucoup de freins à l'insertion professionnelle. L’autre idée est d’effectuer un accompagnement global et concerté avec l'intégralité des acteurs, par exemple des entretiens tripartites avec le prescripteur, le Centre d'hébergement et de réinsertion sociale, l'assistante sociale et France travail. »

 

Deuxième type de renfort, l’équipe Convergence Charente, portée par l’Association Régie Urbaine d’Angoulême. En plus de sa coordinatrice, elle est composée de trois chargées de partenariats qui interviennent en appui des chantiers pour les aider à initier des partenariats avec des acteurs locaux et des entreprises, une prospection qu’ils n'ont pas toujours le temps d’effectuer. Une chargée de partenariat peut faire l’interface entre un employeur qui cherche à recruter, et les chantiers qui peuvent avoir des profils à leur présenter. L’équipe Convergence Charente n’interfère pas dans le fonctionnement des structures, qui gardent leur autonomie.

 

« Tous les mois, nous organisons une réunion des directions des chantiers. On évoque différents sujets, des actions à mettre en place, des ajustements, des bonnes pratiques. On communique aussi avec les autres territoires de France pour éventuellement s’inspirer de ce qu’ils mettent en place. De la même manière les chargées de partenariats animent des réunions entre ASP, pour des échanges de pratiques, pour rencontrer un autre partenaire, etc. »

 

Les principes de Convergence France qui consistent à aller chercher les publics les plus précarisés et leur proposer un accompagnement global et concerté, incluent aussi la possibilité pour un salarié de rester sur un chantier d'insertion pendant cinq ans au lieu de deux.  Quelle que soit la durée de sa présence, il bénéficie d’un an de « post-parcours », pendant lequel il reste en contact avec son ASP afin de poursuivre la levée des freins qui ne l’auraient pas complètement été à la sortie du chantier.  

 

Autre programme proposé, baptisé « Premières heures en chantier. » Il est porté par l’Association Régie Urbaine d’Angoulême et Croix-Rouge insertion (Maia et Charente). Il s’agit d’un programme très particulier qui consiste à proposer à des personnes en situation de sans abrisme ou en habitat précaire, de franchir une première marche vers l'insertion professionnelle par quelques heures en immersion dans un chantier. Ils commencent par quatre heures de présence, sans objectif de productivité mais en étant associés à la production. Le but est qu’ils renouent un lien social et professionnel. Pendant un an, la personne augmente progressivement ses heures, idéalement jusqu'à une vingtaine par semaine.  

 

Un engagement fort des chantiers

 

« Pour que les principes des programmes soient appliqués, c'est toute la structure qui doit s’engager, la direction, les ASP, les administratifs. Si tout le monde n'est pas « embarqué », il peut y avoir des tiraillements entre la production, les encadrants techniques et les ASP, parce que ces derniers vont venir plus souvent qu'à l'habitude enlever les salariés de l'outil de production. Nous savons que c'est très exigeant pour les gens qui sont en opérationnel. »

 

« Si ça n’est pas accepté, en général le chantier finit par sortir du dispositif ». En effet, une structure qui s’engage sur les programmes de Convergence France doit modifier ses pratiques d'accompagnement et d’encadrement, afin d’accompagner un public sans-abri, ayant connu la rue ou en situation de grande précarité. Cet attachement à cibler ce public, qui n’a généralement pas accès aux structures d’insertion, est une des raisons d’être de Convergence France, ce que revendique l’association.

 

L’engagement des chantiers d'insertion va bien au-delà de l'attribution d'un budget supplémentaire. Ils reçoivent du soutien mais en contrepartie d’un volume d’accompagnement. Selon leurs dires, les plus anciens chantiers ont eu la sensation de revenir aux fondamentaux de l'insertion par l'activité économique. Ils constataient une certaine dérive vers beaucoup plus de production, ce qui les rendaient un peu trop proches du milieu ordinaire. Intégrer le collectif Convergence, c’est revenir aux fondamentaux, investir à nouveau la dimension sociale de l'insertion économique.

 

La méthode Convergence vise la transformation des pratiques au service d’une transformation du public accompagné. Chaque chantier garde son identité et conserve la maîtrise de ses actions. En revanche, la posture et la manière de travailler se doivent de converger. Cela n’implique pas un changement complet de leur culture mais la nécessité d’intégrer un nouveau mode de fonctionnement. C'est le collectif qui décide de la meilleure façon d'avancer ensemble pour respecter les objectifs. Chaque chantier utilise ses propres supports d'activité, mais a toujours la possibilité d’intégrer les pratiques des autres.

 

« Nos chantiers partenaires ont la sensation de pouvoir faire un accompagnement de qualité y compris avec les plus éloignés de l’emploi. Ils mettent également en avant la rupture de l'isolement professionnel. C’est surtout vrai pour ceux qui sont situés en ruralité, ils disent que c’est un gain énorme pour eux. Ils apprécient d’avoir ces points de rencontre avec les autres structures, et de bénéficier du soutien des chargées de partenariats quand ils rencontrent un problème ou qu’ils ont un dossier bloqué. »  

 

Convergence Charente est en expérimentation jusqu’à la fin 2027, dans le cadre du Pacte des Solidarités. Le collectif reste confiant ce sur le fait que le programme sera pérennisé dans le cadre de la loi contre la très grande pauvreté.

 

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Projet découverte des métiers

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Ingrid Berghman est directrice de l’association bordelaise « WeJob ». WeJob a répondu à l’AMI O2R, dans le but de mettre en place le projet « Connexion des possibles ». Ce dispositif, lancé en janvier dernier, a été élaboré avec une quinzaine de partenaires dans le cadre d’un consortium. Les deux premiers groupes de participants, un à Bordeaux, l’autre à Talence, ont débuté leurs parcours au début du mois de mars.

 

D’où vient « Connexion des possibles » ?

Notre objectif en tant qu’association est de travailler pour l’emploi. Beaucoup de publics n'ont pas les compétences attendues sur le marché du travail, il est nécessaire d’agir sur le projet professionnel et les compétences des personnes. Le problème, c’est que les publics les plus éloignés ont beaucoup de difficultés à se repérer dans les métiers et les formations. Pour les aider, nous avons créé plusieurs dispositifs, par exemple un qui s’adresse aux femmes de quartiers prioritaires. Nous travaillons à la fois sur leur projet professionnel et sur leur problématique de garde d'enfants. Une autre de nos actions, un CEJ Rupture, vise les jeunes décrocheurs qui rencontrent des difficultés à se projeter. On leur propose notamment de réaliser un projet vidéo. Avec Connexion des possibles, nous avons eu envie de créer un nouveau programme, tout en en nous basant sur les briques de nos dispositifs précédentes, en les combinant dans la même démarche.

 

Vous visez un public particulier ?

Il existe deux catégories de publics. Celui qui est visible du service public de l'emploi mais qui rencontre des grosses difficultés, et celui qui est invisible. Notre objectif est de porter ceux qui ne s'inscrivent pas facilement dans un dispositif existant. Le plus souvent, les personnes dites « invisibles » le sont parce qu’elles ne savent même pas que le service public existe ou qu’elles pensent qu'il ne sert à rien. Sans compter la barrière de langue et la barrière du numérique. Ça peut expliquer leur situation.

 

Connexion des possibles, c'est un programme qui est relativement large, très lié au projet professionnel et à la remobilisation des personnes. On va être un peu moins sur le traitement des problèmes du quotidien, de logement par exemple. Dans la plupart des cas, on va plutôt orienter vers des partenaires. Mais on peut tout de même s’occuper de trouver une place dans un foyer de jeunes travailleurs, ou un audit santé avec la CPAM.

 

Quel est son principe ?

On avait envie d'aller plus loin que ce qu'on faisait jusqu'à aujourd'hui, en ayant plusieurs publics dans le même programme. Et en utilisant ce qu'on sait faire ailleurs pour le démultiplier. On a voulu que ce projet soit pluriel, pour que les participants aient le choix, que nous ne leur imposions rien.  Et qu’il soit accessible à un public aussi large que possible. Trop souvent on segmente les populations en mettant les jeunes d'un côté, les seniors de l'autre, les femmes encore ailleurs, etc. Nous prévoyons quatre sessions par an, deux à Bordeaux, une à Talence, une à Pessac. Chaque session pour un groupe d’une douzaine personnes. Les participants choisissent une des quatre activités proposées, et on leur demande également de se positionner sur une ou plusieurs filières métiers.

 

Quelles sont les quatre activités que vous proposez ?

La première tourne autour de la réalisation d’un podcast vidéo, avec notre partenaire Energie Prod. La deuxième a pour thème la cuisine, et la préparation d’un repas, sous la houlette de l’association « Vision mêlée », spécialisée dans l'insertion par le sport et la cuisine. On y aborde les questions d’approvisionnement, de coût de revient, pour ceux qui envisageraient de lancer leur propre activité dans ce domaine. Nous avons aussi une proposition de mobilisation par le sport, encadrée par « On catalyse ». Il s’agit d’un programme de remise en forme pour que les personnes prennent confiance en elles. L’action se termine par un petit match avec des entreprises, pour nouer des contacts dans un cadre inhabituel. Enfin une activité théâtre d'impro avec « Décalez ! ». Le théâtre d'improvisation est accessible à tout le monde, pas besoin de retenir des textes. Il permet aux gens d’être plus à l’aise à l’oral, en créant des petits sketchs pour parler des métiers et du monde du travail.

 

Et quelles sont les filières que vous présentez ?

Nous accompagnons les stagiaires pendant trois mois, à raison de deux jours par semaine, les lundis et mardis. En parallèle de leur projet, nous animons des ateliers sur le projet professionnel et la recherche d’emploi. Une fois par semaine, les stagiaires se rendent chez un de nos partenaires, notamment sur les plateaux techniques d’organismes de formation, pour faire la découverte des métiers du numérique, du bâtiment, du sanitaire et social, ou encore de l’industrie, du commerce et de l’esthétique. En tout treize filières. À la suite de ces visites, les personnes qui se déclarent intéressées peuvent demander une immersion de quelques jours afin de se frotter à la réalité de tel ou tel métier. Souvent, tant que les gens ne vivent pas cette expérience, ils ont du mal à se représenter ce que ça peut être, et ils restent sur des préjugés. C’est une bonne façon de savoir si ça leur plaît ou pas. Nous pouvons mettre en place ces immersions parce que France travail nous a donné délégation pour être opérateur PMSMP.

 

Comment les participants font-ils leur choix ?

On leur propose un parcours en forme de rallye. Ils ne vont pas tous faire tous les métiers, parce que certains n’ont aucune appétence pour le BTP ou le commerce. Nous leur disons qu’il faut s'ouvrir à différentes options et d’en choisir cinq ou six, ça nous permet de construire avec eux la suite de leur évolution professionnelle. Il y a déjà treize filières à découvrir, avec à chaque fois plusieurs métiers. Mais s’ils veulent en découvrir un qui ne figure pas dans notre éventail, par exemple un métier du bois, dans ce cas nous sommes en lien avec des entreprises du bois à la Cité Bleue dans le quartier de Bacalan, qui peuvent les accueillir pour une découverte.

 

On ne leur impose rien, ils vont vers les métiers qui les intéressent. Un conseiller accompagne chaque groupe de douze personnes. Il coordonne l’activité, ainsi que les partenaires. Il suit son groupe au quotidien, et chaque personne individuellement. Son rôle est d’accompagner les participants et de les guider tout au long de leur parcours. Avec lui, chaque personne construit son projet. Ils décident ensemble de ce qu’elle va faire, réaliser une enquête métier avec une entreprise, chercher une immersion sur tel métier, chercher une formation…

 

Quel est le rythme ?

Les stagiaires participent à des sessions de douze semaines en collectif. Ils sont également suivis individuellement. Au bout des trois mois, on les confronte à leur projet après qu’ils ont fait un premier choix de métiers, un CV, un pitch de présentation. On leur propose un job dating, qui leur permet d’envisager comment ils s’y prendront pour la suite. Les trois mois suivants, nous finalisons les démarches avec eux, par exemple trouver un organisme de formation, ou si c’est pour l’emploi comment faire les démarches entreprise. Donc notre accompagnement est prévu pour six mois minimum, douze mois au plus. Ça peut être plus ou moins long selon les personnes, en fonction de leurs freins, si elles ont une RQTH, si elles font une immersion, etc.

 

Quelles sont les conditions pour entrer dans le dispositif ?

Il n’y a pas vraiment de conditions, mais nous voulons que les participants soient motivés pour trouver un métier, faire une formation ou prendre un emploi. Il faut aussi qu'ils soient capables de comprendre le dispositif, donc on demande un niveau de langue type A2. Le cas échéant, pour aider les gens à monter en charge sur le numérique, nous leur prêtons des ordinateurs. Le plus important, c’est d’évaluer quel est l’éloignement vis-à-vis de l’emploi. La seule vraie limite, c’est qu'il ne faut pas que la personne soit déjà accompagnée par d'autres acteurs en parallèle.

 

Comment les candidats arrivent-ils dans le programme ?

Comme nous cherchons des personnes qui ne sont pas accompagnées par la mission locale ou par France Travail, nous ne sommes pas dans la prescription classique. Une banque alimentaire ou un centre social qui reçoit quelqu'un en difficulté peut nous l'orienter. On va aussi beaucoup sur le terrain, chez les commerçants. Ou même échanger avec les gens dans la rue, dans les parcs, aux arrêts de tram. En fait partout où on peut être au contact des habitants des quartiers. Avec certains de nos partenaires, on organise des micros-trottoirs ou des goûters sportifs. Et des ateliers de socio-esthétique pour les femmes qui n’ont pas forcément les moyens de prendre soin d'elles. Ce sont des ateliers gratuits qui nous donnent l’occasion d’échanger sur leur situation professionnelle.

 

À partir de quand parlez-vous projet professionnel avec les participants ?

On leur en parle dès le début. C’est un dispositif où on va d’emblée parler des métiers qui les intéressent ou pas. S’ils ne sont pas déjà dans cette réflexion, ça ne sert à rien qu’ils viennent. On ne leur parle pas que de ça, on aborde également leurs différentes difficultés, en santé, logement, etc. Si la personne a confiance en nous à la fin de l’échange, on lui propose de venir dans nos locaux pour une réunion de présentation du dispositif. Comme les participants vont faire partie d’un groupe, c’est important qu’ils voient d’emblée la dynamique collective, et qu’ils y adhèrent. De toute manière, ils seront en collectif dans les entreprises ou en formation, et il faut qu’ils s’y habituent le plus vite possible.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs de l'AMI O2R et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

 

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Voyageurs avant tout

Voyageurs avant tout | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Lisbeth Spanjers et Ascension Garcia Robles sont respectivement directrices du centre social le Chemin du Hérisson (Terres-de-Haute-Charente) et du centre social les Alliers (Angoulême). En consortium avec le centre social Les Quatre Routes (Cognac), ces trois structures ont été retenues par l’AMI O2R pour des actions d'accompagnement vers et dans l'emploi destinées au public « gens du voyage. »

 

Qui sont les Gens du voyage ?

« Gens du voyage », c'est vraiment une appellation administrative qui regroupe plein de populations très différentes. Il n'existe pas de communauté de gens du voyage, ce sont des voyageurs avec des origines et des caractéristiques diverses. Le public de nos structures et composé majoritairement de voyageurs, un public que nous connaissons bien, et qui nous connaît bien, parce que nous émanons aussi d'associations créées avec des voyageurs. Mais nous sommes tout de même des centres sociaux de droit commun, nous accueillons tous les autres publics autour des questions d’emploi, d'habitat, d’accès aux droits, de scolarisation, de parentalité, de culture, etc. D’ailleurs nous tendons vers la mixité dans tous nos projets, c'est à dire que lorsqu’on intervient dans des établissements scolaires on n'intervient pas qu'avec des enfants de voyageurs.

 

Ce public présente-t-il des spécificités, et si oui lesquelles ?

Les voyageurs ont une relation au travail un peu particulière, majoritairement ancrée autour de l’auto-entreprise. Ils veulent plutôt être leur propre chef, le salariat n'est pas forcément un univers qui leur parle, parce qu’il engendre des contraintes incompatibles avec certains modes de vie ou certains fonctionnements familiaux. Ils n’ont pas vraiment de perspective de carrière ou de projets à long terme. Ils rencontrent des difficultés à se projeter. S’ils cherchent à travailler, c'est pour satisfaire un besoin immédiat, par exemple changer une caravane. Et puis les voyageurs s'identifient et se caractérisent d’abord par leur relation à la famille, pas en fonction de leur emploi comme c’est le cas dans le reste de la société.

 

Qu’en est-il de leur mobilité ?

Leur mode de vie est marqué par un certain rapport au temps et à la liberté. Il n'est pas centré sur le déplacement, c'est plutôt une identité culturelle, qui tourne autour de la famille et des activités économiques. Beaucoup de voyageurs ne sont plus dans un mode de vie en caravane. Nous sommes sur un public habitant du territoire, qui s'identifie tout de même comme étant voyageur, que leur voyage soit réel ou fantasmé. Plus les gens sont précaires, moins ils bougent, moins ils sont précaires plus ils bougent. Il existe aussi des aléas et des contraintes qui les en empêche, comme le manque de moyens ou de lieux d'accueil.

 

Quel est leur profil ?

Nous avons surtout des personnes de 30 à 40 ans, une majorité d'hommes mais de plus en plus de femmes. Nous constatons une forte évolution de la part des familles, des femmes de plus en plus jeunes qui n’attendent plus que leurs enfants soient grands pour chercher à travailler. La demande féminine augmente, nous avons plus de sollicitations pour des renseignements et de l'accompagnement vers l’emploi. Cela dit, leur profil reste aléatoire, il peut être différent d’une année à l’autre, parce que nous avons aussi des « grands » voyageurs qui partent pendant quelques mois et ne reviennent que l’année d’après. L’action s’adresse ici aux personnes prêtes à s’engager avec nous dans une démarche d’accompagnement sur plusieurs mois, sur le principe de libre adhésion, qui est la base des centres sociaux.

 

Dans votre dispositif, vous avez une phase de repérage ?  

Notre repérage consiste à aller vers des jeunes non connus ou invisibles d’un point de vue administratif. Cette phase est essentielle parce que on ne connaît pas forcément tous les voyageurs. Nous allons sur le terrain, dans les lieux de vie, les lieux fréquentés par les personnes, qui peuvent aussi venir nous voir dans nos lieux de permanence, par exemple pour une démarche administrative.  Il faut que le repérage soit mutuel, c'est-à-dire nous on repère mais le public nous repère aussi. Nous ne recevons pas beaucoup de demandes spontanées, on va chercher sur ces dispositifs les personnes qui ne se mobilisent pas, ou parce que le fonctionnement des autres services publics ne leur correspond pas. Le repérage c'est aussi faire le lien vers les autres acteurs, c’est de « l’aller vers pour ramener vers » les autres structures.

 

Est-ce difficile d’instaurer la confiance ?

La notion de relation de confiance est primordiale, elle se travaille encore plus qu’avec un autre type de public. Pour la majorité des voyageurs, plus on est invisible et mieux c’est, parce qu’ils se sentent très rapidement stigmatisés. Le lien de confiance n’est jamais totalement acquis, c’est une relation qui se construit dans le temps et ce n’est pas par ce qu’on s’appelle le Chemin du hérisson, les Alliers ou les Quatre Routes que les personnes viennent spontanément sur nos actions. Elles doivent avant tout répondre à un besoin. Ce qui est déclencheur c’est la démarche d’aller vers. On n’attend pas qu’ils viennent vers nous, on va à leur rencontre. On connait leur fonctionnement familial, leur problématique liée au déplacement, leur rapport au travail qui nous permet d’utiliser le bon vocabulaire. Il faut aussi qu’on se rende disponible, que l’on puisse répondre à leurs demandes rapidement. Ça les rassure d’avoir la possibilité de nous contacter très régulièrement.

 

Quelle est la phase suivante ?

La suite consiste à essayer de remobiliser les personnes. C'est le référent emploi qui va, de manière individuelle ou collective, proposer des activités, peut-être déjà de venir au centre, se remettre dans une dynamique, sortir d'un isolement, créer du lien, participer à des activités de loisirs ou de discussion. La remobilisation plus collective est plutôt à destination de femmes. Les hommes sont moins dans cette attente. Ensuite seulement, nous proposons un accompagnement. Mais il faut ce temps de reconnaissance mutuelle, voir avec chaque personne quel est son besoin, si on a bien compris sa demande. L’aller vers reste transversal à toutes les étapes du projet, y compris sur cette deuxième phase. La remobilisation passe par l’écoute et montrer qu’on s’intéresse à la personne, valoriser les compétences et permettre, notamment aux femmes, de se projeter sur un emploi. Dès qu’elle l’exprime, ou se pose une question liée à l'emploi, le but du jeu c'est de la saisir au vol et de répondre à cette attente. On crée alors une dynamique. Réactivité et adaptabilité sont les deux qualités essentielles des salariées en charge de l’action.

 

Quelle est la forme de votre accompagnement ? 

Une des modalités essentielles de la notion de pouvoir d'agir, c'est vraiment de partir de la demande, du souhait de l'habitant. On part de ce que verbalise la personne, mais il faut rentrer dans le vif du sujet assez concrètement parce qu’elle attend qu’on traite rapidement de sa situation et de ses difficultés propres. L’accompagnement proposé se place bien dans une démarche de co-construction. Faire avec et mobiliser les savoirs et ressources des personnes. C’est ce qui permet l’implication. C’est un accompagnement que l'on dit très renforcé, puisque nous avons des contacts hebdomadaires voire quotidiens, en physique, via des SMS ou sur les réseaux.

 

Puisque l’on vise un public très éloigné de l’emploi, il y a plein de freins périphériques, psychologiques ou physiques. Sans oublier l’illettrisme pour certains. Il y a également une réalité au niveau des d'offres d'emploi, plus ou moins présentes sur les territoires. Nous travaillons par exemple avec les structures d’insertion par l’activité économique.  Le partenariat tissé depuis plusieurs années, permet de s’adapter et de proposer des solutions adaptées aux personnes, comme par exemple des premiers contrats de quelques heures, dont le rythme monte progressivement, ou dans des domaines d’activités différents de la demande initiale, pour faire découvrir de nouveaux métiers et s’adapter à l’offre existante sur les territoires.

 

En plus, trouver un emploi, cela veut dire qu'on remet en cause toute l'organisation familiale (contraintes de mobilité, garde des enfants…), sujet important et sensible. Les personnes se construisent plus sur leur relation familiale que sur un projet professionnel. Notre accompagnement est individuel, mais il prend en compte les autres membres de la famille, que l’on rencontre, pour s'assurer de leur adhésion. C’est là où on se distingue des autres structures.

 

Combien de temps dure un parcours ?

Certaines situations nécessitent énormément de remobilisation parce que souvent les voyageurs ont perdu toute confiance dans le droit commun. Avant de les convaincre de prendre un engagement, même seulement s’inscrire à une activité ou prendre une adhésion à un centre social, ça nécessite du temps. La durée d’un parcours ne répond pas à une matrice figée, c'est en fonction des situations. Et comme la particularité de notre public, c’est que la famille est prioritaire sur l'emploi, on peut très bien mener des accompagnements qui sont abandonnés ou mis en suspens pendant des semaines ou des mois pour raisons familiales, et être repris après. C’est très aléatoire. Même et y compris pour les voyageurs qui se déplacent le moins.

 

Que faudrait-il améliorer selon vous ?

Six mois à un an c’est peut-être trop court pour les personnes vraiment éloignées de l'emploi, ou alors on continue à les suivre sur d'autres dispositifs. Il y a aussi l'insécurité liée à la non-résidentialisation, c'est-à-dire le manque de solutions d’habitat, qui est prégnant au niveau de notre public. Ça engendre pas mal d'inquiétudes et d'insécurité, quand on veut tendre vers des projets professionnels ou autres. Et ça n’est pas un frein facile à lever. Il existe assez peu de solutions en Charente.

 

Qu’est-ce qu’apporte ce dispositif selon vous ?

Le gros point positif, c’est la prise en charge globale, c'est-à-dire qu’on peut travailler à plusieurs acteurs et à plusieurs salariés en prenant en charge à la fois les différents volets, habitat, santé, famille, scolarité et emploi. C’est par cette approche globale qu’on arrive à avancer. Cela étant, on ne peut pas faire de miracles sur quelques mois, mais la démarche nous donne assez de temps pour effectuer le repérage et la remobilisation.

 

De plus, la complémentarité avec les autres acteurs du territoire et le monde de l'entreprise, que ce soit par le biais de l'insertion par l'activité économique ou autre, nous donne l’occasion de prospecter et d’établir des liens avec l'entreprise. Enfin, la particularité de nos structures est la connaissance des voyageurs, habitants du territoire, qui nous permet de proposer des actions adaptées, coconstruites. Mais également de travailler avec les acteurs locaux et institutionnels pour rendre effectif une prise en compte de ce public, créer le lien, aller vers pour ramener vers.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

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February 27, 11:04 AM
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Un territoire, un public

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Depuis 2021 Axe et Cible anime « la Forge des compétences » (notre article du 11 janvier 2024). Plus récemment, son projet Cap Echo a été retenu par l’AMI O2R de la DREETS, en consortium avec AKSIS TB, Konexio, Activ’Action, La Cravate Solidaire de Bordeaux, Entreprendre pour Apprendre Nouvelle Aquitaine. Marylène Costa, avec une équipe dédiée, a la responsabilité de ce dispositif, financé jusque fin 2027, qui a pour objet d’accompagner des publics jeunes et adultes éloignés de l’emploi dans quatre territoires girondins.

 

En quoi consiste Cap Echo ?

L’idée de la Forge des compétences est d’essaimer des modèles d’accompagnement pour des publics sur différents territoires. Les accompagner autrement, ou plutôt aller les chercher autrement. Dans cette logique, nous avons développé « Talent’co² », un pur produit CEJ Jeunes en rupture de la DREETS, sur les territoires ruraux de Sainte-Foy-la-Grande et de Coutras. Nous avons déjà fait plusieurs promotions et nous poursuivons cette action en 2025. Nous avons ensuite créé Cap Echo, en réponse à l’AMI O2R, toujours avec les notions de « aller-vers » et de communauté de pairs. Dans ce cadre, nous décidons de faire un focus sur certains quartiers et territoires. Cela fait de Cap Echo un dispositif qui vise quatre publics différents, selon quatre modalités différentes, puisque nos partenaires ne sont pas les mêmes sur chaque territoire.

 

Comment avez-vous choisi vos territoires d’intervention ?

Nous intervenons d’abord dans des lieux que nous connaissons déjà, pour y avoir déjà mené des expérimentations, comme à Coutras et le pays Foyen. Sur chacun des territoires retenus, nous avons zoomé sur des publics spécifiques. Par exemple à Lesparre-Médoc et Bordeaux maritime nous ciblons plus la problématique des femmes et des publics issus de bidonvilles de Saint-Laurent-Médoc.

 

Comment procédez-vous pour vous implanter ?

À chaque fois que nous sommes arrivés sur un territoire, nous rencontrons les décideurs, les communautés de communes, les services de la ville, toutes les instances collectives. Notre approche, outre de cibler certains publics, c’est de travailler avec plusieurs acteurs. Pour certains, ce sont des partenariats historiques. On n’est pas des experts en tout, donc on travaille à plusieurs. Et nous ne cherchons pas à faire du chiffre.

 

Quel est le rôle de vos partenaires ?  

Nous testons des modèles différents, par exemple à Bordeaux maritime, Activ’Action travaille plutôt sur le collectif intensif au travers de « Bootcamp ». Sur Lesparre, nous travaillons sur la problématique de l’’illectronisme avec l’acteur Konexio qui intervient. À Coutras, avec Entreprendre pour Apprendre, nous traitons de la question de l’entrepreneuriat avec la création de mini entreprise. AKSIS TB, soutien sur l’accompagnement à l’entreprise. Et la Cravate Solidaire, son pitch emploi, sa cravate mobile, est avec nous sur tous les territoires ruraux.

 

Comment recueillez-vous les besoins des participants ?

Le préalable à l’entrée dans un parcours, c’est l’accueil inconditionnel dans nos espaces. Les gens entrent et sortent, ils observent. Et nous faisons pareil, on regarde, on observe. Nous pouvons nous rendre au domicile, par exemple si un jeune ne sort plus de chez lui. Nous avons aussi la possibilité de faire des entretiens dans des cafés, des bibliothèques, des médiathèques. Nous sommes hors et dans les murs avec eux, on s’apprivoise. Sur la partie accueil, nous utilisons la roue des besoins, avec laquelle nous travaillons le diagnostic, nous mettons en exergue les obstacles, puis c’est la mise en place des parades avec les accompagnateurs au travers d’un parcours co-construit.

 

Quels sont vos outils de repérage ?

Nous utilisons plusieurs modèles. Nous nous sommes professionnalisés pour apprendre à questionner les gens, les aborder. Nous avons appris à diagnostiquer en marchant. Quand nous repérons une personne, nous ne lui parlons pas d’emblée de notre accompagnement. C’est une erreur qu’on a pu faire par le passé. On discute, on échange, on recueille les besoins. Par exemple, nous avons une action qui s’appelle porte à porte, que l’on mène en binôme. Il y a une manière de les interroger, sans être insistant. Nous faisons aussi de l’accompagnement à domicile. Notre but est d’informer les gens, pas de faire la promotion du dispositif.

 

Ensuite, nous avons ce qu’on appelle le porteur de parole. Nous installons des écriteaux dans la rue, on écrit une question et les gens en discutent avec nous. C’est un média vraiment puissant. Nous avons aussi une tente information Proximité (TIPS) avec des zones à partager, des photos langages, des médias d’éducation populaire, que l’on installe en marge d’événements, de marchés, etc. Les gens s’y arrêtent, Ils se livrent et ils racontent leurs récits.

 

Qu’est-ce qui fonctionne le mieux pour capter les invisibles ?

Plutôt que d’invisibles, nous parlons de « non recourants. » Parce qu’ils n’ont pas recours au droit commun. Il y en a trois types : celui qui n’est pas informé, celui qui n’a pas envie d’y aller, celui qui ne sait pas lire ni écrire.

 

Par définition, les publics non captifs ne veulent pas être captés. Un stand classique ne fonctionne pas. Mais quand nous utilisons un média comme le porteur de paroles, une exposition, la personne la regarde et nous, à côté, on questionne l’exposition, pas la personne. Du coup elle entre dans le jeu sans le savoir, elle participe sans participer. C’est inconscient. Nous n’utilisons pas le même média sur tous les territoires. Pas de porteur de paroles à Coutras par exemple, ça ne marche pas, parce qu’il n’y a pas assez de passants. Il faut qu’il y ait un marché, un évènement. Mais en zone urbaine, c’est un support qui marche très bien.

 

Comment se déroule un parcours type ?

La personne signe un contrat de participation avec nous, comprenant quelques objectifs, mais on n’y met pas trop d’enjeux non plus. Les parcours durent six mois, avec un contenu très individualisé. Le calendrier comporte trois phases. D’abord le repérage, un à trois mois, avec un sas d’accueil, la sécurisation du parcours, les questions administratives et de rémunération. Après la phase de remobilisation, à partir du quatrième mois, on passe à la phase « action accompagnement. » À ce moment-là, le projet de la personne est mieux déterminé. Là on peut retrouver la cravate solidaire de Bordeaux, son soutien au pitch emploi, AKSIS TB et son soutien à la relation employeur. Et à six mois, le parcours « institutionnel », normé, s’arrête. Mais il peut durer jusqu’à douze mois, puisque nous effectuons des accompagnements plus longs et un suivi post promotion.

 

Que proposez-vous aux participants ?

Au bout de deux mois, nous commençons des ateliers coopératifs, comme « la fabrique à solutions » et le suivi se poursuit en parallèle avec les accompagnateurs et accompagnatrices lors de cette étape « inspiration », ou remobilisation, les partenaires démarrent également leurs actions collectives. Chaque participant est libre d’aller sur telle ou telle action collective. Ce ne sont pas toujours les mêmes groupes, cependant on constate qu’il y a le plus souvent un « noyau dur » qui se met en place. Des personnes qui vont inspirer les autres. Dans ces ateliers, on travaille la confiance en soi, on trouve des solutions aux différents freins, on développe des compétences, tout cela en s’appuyant sur des démarches d’intelligence collective. Dès cette phase, nous inscrivons les bénéficiaires auprès du réseau pour l’emploi.

 

Nous ne nous contentons pas de leur délivrer du contenu descendant. Nous créons des communautés de pairs, où tous les publics sont mélangés, nous parions sur le fait que ça va fonctionner. Nous nous mettons en posture de facilitateur. La mixité est puissante dans le vivre ensemble. Souvent les personnes ont aussi besoin de sortir de leur milieu, de rencontrer d’autres gens, de partager leurs expériences. Nous ne forçons personne, elles sont volontaires pour aller vers l’emploi. Jeunes, mamans, l’objectif est le même pour tous. 

 

Quand estimez-vous qu’un parcours soit réussi ?

Nous avons des indicateurs classiques pour les sorties en emploi et en formation. Mais nous parlons de « sorties favorables » dès lors que la personne est en mouvement, en action, en pouvoir d’agir, qu’elle a acquis une certaine autonomie. Nous regardons également si la motivation a été augmentée, si elle a pu développer des compétences transférables. Si et comment les bénéficiaires se sont inscrits auprès du réseau pour l’emploi. Parfois, nous partons de loin. Le plus important pour nous, c’est que les personnes ne restent pas isolées.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

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February 13, 4:27 AM
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La surface de remobilisation

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Remise en jeu est, à l’origine, une histoire bretonne. Créée à Lorient en 2012, puis étendue un peu partout en Bretagne, l’objet de cette association est d’utiliser le sport pour remobiliser les jeunes en difficulté et leur redonner l’envie de se construire un avenir. Son fondateur Robert Salaün, a mené une longue carrière de professeur d’EPS et de footballeur, ainsi que d’éducateur sportif au sein d’un IME à Poitiers, auprès d’un public connaissant des difficultés à la fois psychologiques et mentales. Cette expérience de plusieurs années l’a convaincu que malgré leur handicap, ces jeunes avaient du potentiel et que ceux qui réussissaient en sport collectif s’en sortaient mieux dans la vie professionnelle.

 

« Quand vous faites du sport collectif tous les jours, il y a plein de choses que vous arrivez à gérer. Déjà, physiquement, vous êtes mieux. Un match de foot, c'est un travail psychomoteur qui agit au niveau de l’équilibre, de la coordination, de l'orientation dans l'espace et dans le temps. Tous ces éléments, vous les travaillez en permanence. De plus, quand vous voulez faire du sport collectif, vous devez savoir gérer vos émotions et votre frustration, parce que ça ne se passe jamais comme vous avez envie. »

 

C‘est après son départ à la retraite que Robert Salaün a décidé de passer de la théorie à la pratique en créant Remise en jeu. Son principe, partir de l'intérêt du jeune pour le football afin de le mobiliser et lui faire travailler tous les éléments nécessaires à une entrée dans la vie professionnelle. Alors qu’il n’a a priori que peu de motivation pour le monde du travail.

 

Le football comme matière principale

 

Toute la partie physique est basée sur le football, mais également les cours de français (les articles de l’Equipe et de France football), de mathématiques (les classements, la durée des matches), de géographie (où se trouvent les clubs français et européens ?). Il existe une corrélation entre ce qui se passe sur un terrain et ce qui se passe en cours. « Un gamin qui a un ballon dans les pieds et qui veut faire une passe a le même problème, sur le plan mental et psychomoteur, que celui qui tient un crayon et qui veut tracer des lettres. La trajectoire de la passe ou la lettre est déjà dans sa tête, avant qu’il réalise l’action ».

 

La formation dure huit mois, elle est suivie par des groupes d’une quinzaine de jeunes de 16 à 25 ans, et débute généralement en octobre-novembre, pour se terminer en mai.  Le parcours compte deux grandes périodes distinctes. Les quatre premiers mois consistent en une immersion complète, avec une discipline de vie assez stricte pour des jeunes plus habitués à se coucher à trois heures du matin qu’à être présents sur un terrain à neuf heures. La journée est consacrée à la remise à niveau scolaire et à un premier travail sur le projet professionnel.

 

À partir du quatrième mois est abordée plus en profondeur la dimension professionnelle, avec des visites et des stages en entreprise. « La grande majorité des jeunes qui sortent de chez nous sont envoyés vers les métiers du bâtiment ou de la vente. On en a aussi beaucoup qui s’orientent vers les métiers du sport, à qui on fait passer ou un CQP sport, ou un BPJES en alternance. En Bretagne, quelques-uns de nos éducateurs ont suivi toute la filière chez nous. Ils ont été stagiaires, ont fait un CQP sport en alternance puis un BPJEPS, avant d’être embauchés par l’association. »

 

Aucun profil type, les participants vont du MNA originaire d’Afghanistan ou d’Ukraine, au jeune de Guéret ou de Limoges qui a échoué à la faculté de sport et vient préparer un BPJEPS. Tous les parcours sont individualisés, le seul critère d'entrée est d’être un jeune en grande difficulté. Sur le plan sportif, pas de prérequis non plus, aucune obligation de savoir jouer au football ou même de pratiquer un sport régulièrement. Chaque plateforme constitue une équipe, dans laquelle il peut y avoir des footballeurs de très bon niveau et des jeunes qui n’ont jamais tapé dans un ballon. Le but est de créer un groupe où chacun trouve sa place.

 

« Dans ma carrière d'éducateur j'ai rencontré pas mal de gamins, et je n’en ai jamais vu deux pareils. Quand on a débuté, l'âge moyen des participants chez nous était autour de 21-22 ans. Aujourd’hui c'est plutôt de 17-18 ans. C’est peut-être dû au fait que les dispositifs d’accompagnement, par exemple à la mission locale, ont moins de problèmes à placer les publics avec une certaine maturité. Dans ce cas, ils ont moins besoin de nous, mais davantage pour les plus jeunes. C’est aussi le reflet de ce qui se passe ailleurs, y compris dans les lycées. »

 

Les filles représentent entre 10 et 15% des effectifs, à peu près la proportion des licenciées à la fédération de football. Si elles ne sont pas plus présentes, c’est en partie en raison d’obstacles culturels. Dans certaines cités à dominante étrangère, il leur est difficile de fréquenter des structures où se trouvent une majorité de garçons. L’association a tenté de trouver une solution, en mixant le football et l’équitation, pratique à dominante féminine. Mais sans succès. Cela dit, ses actions restent ouvertes aux filles, qui y réussissent très bien.

 

Quand l’association envisage de s’implanter sur un territoire, elle commence par contacter tous les clubs sportifs et leurs dirigeants, pas forcément que dans le domaine du football. Ensuite, elle contacte les CCAS, les éducateurs de rue, surtout dans les grandes villes, où il existe une proportion assez importante de jeunes suivis par les services judiciaires, SPIP et PJJ.  

 

Remettre les jeunes sur de bons rails

 

Le repérage effectué par ces partenaires permet de toucher les publics qui ne sont pas déjà suivis par d’autres opérateurs. Sur l'ensemble des plateformes Remise en jeu, un peu plus de 60% des participants sont inconnus des dispositifs d'insertion. Initialement, les missions locales, qui sont toujours associées, envoyaient des jeunes à Remise en jeu. Aujourd’hui, le circuit est en quelque sorte inversé, puisque les jeunes qui ne sont pas retenus par l’association sont redirigés vers une mission locale.

 

« Pour monter un groupe nous avons procédé de diverses façons. À une époque, on annonçait notre arrivée, on tenait des informations collectives, puis on recevait une trentaine de jeunes en entretiens individuels. Quand il fallait en choisir une quinzaine, nous n’avions pas de critères d'entrée. Maintenant, nous annonçons notre arrivée et nous prenons les quinze premiers inscrits. » Ce processus est plutôt efficace, puisque la présence en formation dépasse les 90%. Lorsqu’il y a abandon, c’est au tout début du parcours, parce que le jeune s'aperçoit que ce n’est pas un club de vacances, mais qu’on lui demande de travailler son endurance, sa vitesse, sa technique. Et ça n’est pas de tout repos, le rythme est parfois trop soutenu.

 

En Nouvelle-Aquitaine, Remise en jeu se déploie depuis 2023. Elle est présente à La Rochelle, Niort, Poitiers, Angoulême, Limoges et Guéret. Chaque structure compte au moins deux salariés, des encadrants titulaires d’un brevet d'état, pour accueillir une quinzaine de jeunes par promotion. De plus, un coordinateur est attaché à des trios de structures, il passe une journée par semaine sur chaque site. Il se charge du suivi individuel des jeunes, de leur évolution, des problèmes qu’ils peuvent rencontrer. Il effectue également la recherche des stages. Tous sont des permanents de l'association, qui compte aujourd’hui une cinquantaine de salariés.

 

L’association compte poursuivre son développement, en fonction des sollicitations. « Nous sommes en train de chercher d'autres approches. Par exemple, certains clubs importants de la Région nous ont contacté pour monter une structure en interne. Ils mettraient à disposition les deux éducateurs, et nous fournirions le contenu et la pédagogie. Et puis financièrement nous pourrions trouver un arrangement. Nous aurions très bien pu aller en Normandie ou en PACA, nous avons eu des demandes un peu partout. Mais nous restons une petite association, et pour aller plus loin, il faudrait qu’un opérateur plus important prenne la main. »

 

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Sortir de l'illettrisme par la formation

Sortir de l'illettrisme par la formation | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Christine Chartier et Élisabeth Rattier sont respectivement directrice régionale et responsable de projets du CLAP Sud-Ouest (Comité de Liaison des Acteurs de la Promotion), dont le projet « PASS R.E.L », centré sur la lutte contre l’illettrisme, s’est déroulé de fin 2022 à fin 2023. Il a été financé par l’appel à projets régional « innover contre l’illettrisme en Nouvelle-Aquitaine ».

 

Comment avez-vous élaboré PASS R.E.L. ?

Notre projet est parti du constat de la difficulté à toucher les personnes en situation d’illettrisme et à les envoyer en formation. Ainsi que d’un décalage entre le nombre de personnes en situation d’illettrisme déclaré et celui des personnes reçues sur la plateforme, soit un peu plus de 2 000 par an sur la Gironde. Avec le groupement des organismes de formation de Bordeaux proposant l’HSP Socle – parcours 1 (illettrisme), nous avons convenu qu'il valait mieux unir nos forces pour répondre à cet appel à projets. Le CLAP, porteur du projet, a répondu sur l’axe réseau et sensibilisations, les organismes de formation pour la mise en place d’actions Premières marches.

 

Le principe était de couvrir toutes les étapes amenant le public en situation d'illettrisme vers les organismes de formation ou d’autres structures. Cela implique de sensibiliser les acteurs du territoire, leur donner des outils de repérage et de faire en sorte de faciliter le parcours des personnes. En agissant en amont, en aval, pendant et jusqu'à l'arrivée des publics sur les dispositifs de formation.

 

Par quel biais les publics arrivent-ils à votre plateforme ?

Par les prescripteurs traditionnels, mais aussi toutes les structures de proximité. En fait, tout partenaire peut nous envoyer du public. Il y a aussi des personnes qui viennent directement prendre rendez-vous. Le public en difficulté avec la langue française va vite exprimer son besoin, spontanément. C’est plus difficile pour une personne en situation d'illettrisme, qui a souvent un sentiment de honte, de déni, et qui met en place des stratégies de contournement. C'est un public qui souhaite se former pour gagner en autonomie, il faut le rassurer dans sa capacité de réapprentissage.

 

Quel a été l’apport du projet PASS R.E.L ?  

Nous avons pu sensibiliser plus de 300 professionnels dans une centaine de structures. Ainsi que le grand public avec deux soirées événementielles organisées dans le cadre des JNAI. Une soirée ciné débat, et une soirée théâtre avec une troupe composée de personnes en situation d'illettrisme qui ont pu échanger avec le public. Ces actions ont permis de créer un réseau d’une dizaine de référents illettrisme au sein des structures, ainsi que d’élaborer une charte du référent illettrisme et un kit communication, avec notamment une fiche d'accueil et de repérage.

 

Tout ce travail a perduré après PASS R.E.L., sous forme de partenariat renforcé entre la plateforme et les organismes de formation. On a mis en place de nouvelles modalités d'accueil du public et un suivi renforcé, notamment dans le cadre des HSP. Au besoin, on accompagne les personnes dans les structures de formation, qui sont parfois situées au sein d’établissements scolaires. C’est une situation qui peut être angoissante pour elles.

 

Le rapport négatif à la formation qu’ont ces publics est souvent évoqué, est-ce qu’il est systématique ?

Non, pas toujours. Il y a plusieurs facteurs qui se combinent, le parcours scolaire en fait partie. Ce n'est pas forcément lié à la scolarité en soi, ça peut être dû à l'environnement familial et social qui fait que la scolarité est segmentée.  Ça peut aussi être une question de santé. En tout cas, certaines personnes n'ont pas bénéficié de conditions familiales, personnelles, sociales, très favorables à leur apprentissage.

 

Constatez-vous une différence dans les situations d'illettrisme entre milieu urbain et milieu rural ?

En fait on retrouve exactement le même type de profil, même si en ruralité ses posent des questions particulières comme celle de la mobilité. Nous avons l'impression que l’approche des partenaires et des prescripteurs est la même dans ces deux types de territoires. Cela dit, il nous semble que c'est plus difficile en milieu urbain parce que les réseaux sont complexes, il y a plus d’anonymat. Le travail partenarial est plus simple en secteur rural, parce qu'on arrive mieux à mobiliser tous les intervenants afin d’avoir un plan d'action partagé. En ville, le nombre de partenaires est plus important, c’est délicat d'entraîner tout le monde dans la danse de l'illettrisme, sachant que leurs priorités se portent plutôt sur les besoins en FLE. De plus, les publics en milieu rural ont moins de référents, un ou deux, alors que sur la métropole ils en ont plusieurs, et c’est parfois compliqué de s'y retrouver.

 

Qu’en est-il des décideurs locaux ?  

Nous rayonnons sur la Nouvelle-Aquitaine, on est confrontés à différents environnements. Chez les élus, c’est un peu comme sur la question du handicap. Certains, pour des raisons de parcours personnel ou selon leur territoire, s’emparent vraiment du sujet. D’autres ont moins cette prise de conscience, ils font partie des acteurs que nous devons sensibiliser. Comme les agents des collectivités territoriales qui sont en première ligne sur toutes les démarches d’état civil. Ils voient surtout des personnes venant d'autres pays, qui parlent mal le français. Mais le public en situation d'illettrisme reste la grande inconnue.

 

Quelles conclusions tirez-vous de la mise en place de ce projet ?

Notre difficulté, c'est qu’il était tout de même particulièrement ambitieux, entre les sensibilisations, la création du réseau, la coordination avec neuf organismes de formation.  Plus il y a du monde, moins c'est simple, et c’est beaucoup d’énergie. Nous avons été agréablement surpris par l'implication des partenaires et l'intérêt suscité par cette problématique de l'illettrisme.

 

Ce qui est positif aussi, c'est que certaines actions perdurent, la dynamique partenariale est maintenue avec les organismes qui continuent à nous envoyer des personnes avant l'entrée en formation, notamment grâce au réseau de référents constitué d'un noyau dur. On peut citer la mission locale Hauts de Garonne, avec laquelle on entretient un partenariat renforcé et de qualité. Nous y tenons une permanence. Et une professionnelle de l’équipe est plus particulièrement référente du sujet auprès de ses collègues.

 

Il arrive aussi qu’une fois que nous avons sensibilisé des conseillers, au niveau des structures, ça ne suit pas. Ce n’est pas dû à un manque d'intérêt, mais ils sont souvent happés par d'autres priorités. C'est pour ça qu'on milite pour avoir des référents illettrisme qui soient un vrai relais et poussent leurs collègues à rester vigilants. Donc, il nous faut continuer à porter cette cause pour qu'elle devienne un vrai sujet partout. Nous pensons qu'il y a une carte à jouer au niveau des entreprises. Aujourd'hui, nous n’y allons peut-être pas assez.

 

Quelle est la situation dans les entreprises ?  

On retrouve plus particulièrement ces publics dans certains secteurs professionnels ou bien souvent s’ajoute la pénibilité. Le risque est qu’ils peuvent se trouver en incapacité d'exercer leur activité, et que leur reclassement peut s’avérer très complexe. À partir du moment où une personne a été stabilisée sur un poste, elle arrive à le maîtriser par différentes mécaniques, des stratégies de contournement ou des systèmes aménagés par l'entreprise. Le problème, c'est lorsqu’un changement de process intervient, une difficulté de santé, voire une proposition de promotion ou de formation en interne. Dans ces situations, la personne se retrouve en difficulté, et c'est là que l'illettrisme se voit le mieux. Mais de la même manière dans la vie quotidienne, dans la vie sociale, à chaque fois qu’elle est dépendante de quelqu’un d’autre. 

 

Tout cela relève de la responsabilité sociale de l'entreprise. Aujourd’hui, beaucoup de secteurs se trouvent en difficulté de main-d'œuvre, donc ils ont aussi intérêt à faire en sorte que ces personnes ne partent pas. Au niveau des entreprises, nous avons un vrai chantier, notamment celui de leur faire mesurer ce que « coûte » une personne en situation d'illettrisme en termes de risques ou de rentabilité. Ne serait-ce que parce qu’une chaîne de production peut très bien s’arrêter brutalement en raison du dysfonctionnement d'une seule personne.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

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Projet Pépites, une mine à open badges

Projet Pépites, une mine à open badges | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Pépites est un programme porté par INAE (l’association dédiée au développement de l’Insertion par l’Activité Économique sur les territoires de la Nouvelle-Aquitaine), pour un consortium de plusieurs partenaires, dont l’idée est de déployer des solutions, renforcer l'existant en formation et mener des expérimentations. Le projet compte plusieurs axes, dont un sur la montée en compétence des permanents des structures, un autre sur des modalités de formation innovantes pour les salariés en parcours.

 

Les open badges font le lien entre ces deux axes. Ils ont été inclus au projet à la suite d’un rapport de l’IGAS de 2023 qui préconisait leur usage dans la reconnaissance des salariés en insertion. Pour Fanny Alexandre, chargé de mission, le but est de créer des communautés de pratiques, les amener à reconnaître la montée en compétence des publics via les open badges et de créer du partage entre pairs. « Les open badges sont à la fois un moyen et une fin en soi. Notre idée, à terme, c'est d'en faire vraiment un élément pérenne de notre offre de services, et de continuer à les déployer au sein des structures. »

 

L’approche choisie par INAE est celle de la reconnaissance ouverte, à savoir rendre visibles et documenter des compétences, plutôt qu’une entrée « micro certifiante » qui vise à faire de la validation de compétences. « Notre enjeu était de proposer un ensemble d’open badges communs à toutes les structures. Notre approche se démarque d’autres projets qui consistent souvent à ce que des structures individuelles soient accompagnées pour créer leurs badges sur des compétences bien précises, dans leur contexte propre. » Par ailleurs, INAE n’est en mesure d’évaluer ce qui se fait dans les 500 structures de la région. Et surtout n’a pas vocation à réguler la validation des compétences des SIAE.

 

Au carrefour des compétences

 

La conception des badges s’est appuyée sur le parcours de deux ans en insertion, qui peut être divisé en trois grandes étapes. La première est l'acquisition des bases d’une posture professionnelle. La deuxième est relative à la montée en autonomie et la levée des freins, considérant que chaque action vers l'emploi constitue une montée en compétence. La dernière concerne l'accès à l'entreprise, avec des compétences beaucoup plus « cadrées » (« j’ai validé mon projet professionnel », « j'ai fait mon CV », « j'ai cherché des offres d'emploi », etc.). L'idée générale est de se placer au carrefour des compétences informelles et des éléments un peu plus techniques et précis.

 

Le catalogue d’INAE comporte actuellement 14 badges pour les salariés en parcours. Ils sont accessibles gratuitement à toutes les structures de Nouvelle-Aquitaine. INAE en est l’émetteur et a défini des critères qui restent suffisamment vagues pour que chacune des 500 structures que compte la Nouvelle-Aquitaine puisse se les approprier en fonction de ses pratiques. « Les badges ont été conçus en co-construction avec des structures, des prescripteurs, des entreprises ou des réseaux d'entreprises, ainsi que par notre expertise interne. Cela nous a pris un an, une durée assez normale pour un tel déploiement. Maintenant il faut que les structures s'y mettent. Le mot d'ordre, c'est qu’il s’agit d’un outil qui s'adapte véritablement aux structures et pas le contraire. Ça vient outiller des pratiques déjà existantes. »

 

Autre enjeu pour l’avenir, faire reconnaître les nouveaux badges par les prescripteurs, les services publics de l'emploi, les collectivités. De fait créer un écosystème et montrer que l’IAE est un secteur professionnalisé et professionnalisant qui applique des pratiques innovantes. Utiliser les open badges est un moyen de parler de toutes ces compétences qui relèvent du « apprendre à travailler. » Parce que parler de badges, c’est parler du recrutement en entreprise. Certaines structures abordent très vite la question de la reconnaissance par les entreprises, pour d’autres la question du recrutement est moins importante que de montrer aux salariés qu’ils ont évolué sur tel ou tel aspect. Par ailleurs, rien ne garantit qu’un recruteur prendra le temps de cliquer sur un badge, d'accéder au profil, de regarder les preuves et les documentations.

 

Il existe un grand nombre de supports d'activités différents, de consignes techniques en fonction de chaque support, et surtout de nombreuses façons de monter en compétence, par la formation, directement sur le terrain, en AFEST… C'est plutôt dans ces preuves et ces documentations attachées à chaque badge que les structures adaptent les compétences reconnues en fonction de leurs pratiques. « Ce qui compte, ce n'est absolument pas le nombre de badges qu'une personne va pouvoir mettre sur son CV. Ce qui est important c'est la démarche, comment elle identifie ses compétences, comment elle en parle et met des mots dessus. Nos badges ne sont pas attribués par les structures, ce sont les personnes qui les demandent. Pour chacun d’entre eux, on attend de la personne qu’elle prenne un petit temps d'auto-évaluation et de réflexion. C’est ça l’approche compétence, ou comment je réalise que j’ai des compétences. »

 

« Je fais parler les gens sur le sujet de la reconnaissance, ce qu’elle signifie pour eux. Très souvent, ils abordent la question des diplômes. Mais quand je parle à des salariés en parcours, je m’efforce de leur faire prendre conscience de tout ce qu'ils savent faire, et de tout ce qu'ils ont pu apprendre dans d'autres contextes. Je leur dis, prenez conscience de vos compétences, vous savez faire des choses même si ça ne fait que huit jours que vous êtes sur ce chantier, vous aviez des savoir-faire. D’ailleurs pour pousser la porte de cette SIAE, il fallait déjà que vous sachiez faire des choses. Cette entrée-là est vraiment très précieuse pour moi. »

 

Un outil de dialogue

 

Pour Fanny Alexandre, l’open badge n’est pas un mini diplôme, mais une illustration de compétences plutôt qu'une validation, parce qu’il ne repose pas sur un référentiel. Les entreprises ont du mal à recruter sur certains postes, elles attendent plus de savoir-être que de savoir-faire, comme la ponctualité, le respect de la hiérarchie, le travail en équipe, comprendre une consigne, etc. INAE entend mettre en valeur tous ces éléments. Les badges constituent un outil de dialogue et de médiation avec les entreprises, ainsi qu’un prétexte à mener une réflexion sur leurs méthodes de recrutement.

 

Une micro-certification des savoir-être n'a pas véritablement de sens, puisqu’il est difficile de les formaliser. Par exemple, la prise de parole en public ne répond pas à un référentiel, deux personnes compétentes dans ce domaine ne le feront pas de la même manière. Ce n’est pas en créant des référentiels que l’on permet à chacun de trouver sa place, puisque c’est la méthode habituelle, et qu’elle crée de l'exclusion.

 

En pratique, c’est le rapport au diplôme et à la compétence qui est interrogé, un sujet profondément sensible. Exemple avec c'est la fameuse ponctualité. Dans le catalogue INAE, il n’existe pas de badge « je suis à l’heure », parce que cette notion de ponctualité est inégale en fonction du statut social et professionnel. Plus on est au bas dans l'échelle de responsabilité, plus elle est importante et contrôlée.

 

« Je me sers de mon exemple personnel comme outil de dialogue. Par principe, je suis quelqu'un de ponctuel. Mais dans certaines circonstances, il m’arrive d’arriver en retard. Est-ce que pour autant j’ai arrêté de comprendre pourquoi il est important d’être à l'heure ? C'est cela que j'essaie d'amener dans les structures, leur faire prendre conscience que ce qui est essentiel c'est d'avoir compris à quoi sert d’être ponctuel dans une société, dans une entreprise, dans un groupe social. Même dans l'IAE, il y a un enjeu normatif et c'est très compliqué d'en sortir pour faire évoluer les pratiques et le monde du travail. »

 

Toute la difficulté de la mise en place d'un tel dispositif réside dans le fait de conserver un sens à l’outil open badge, de ne pas le diluer par des règles d’attribution trop souples.  À l’échelle de la Nouvelle-Aquitaine, INAE souhaite créer un langage commun dans son réseau, dans un premier temps celui de la reconnaissance des compétences de salariés en parcours, puis du développement de communautés de pratique des permanents des SIAE. « Tout cela va demander un travail de très longue haleine, sachant que le problème en France c'est que l’on reste très attachés au diplôme dans le recrutement et que l'approche compétence n’est pas encore assez considérée. »

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December 19, 2024 4:53 AM
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Gironde, partenaires contre l'illettrisme

Gironde, partenaires contre l'illettrisme | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Fabrice Lantoine est directeur de l’association ADAV 33, une association départementale qui s'adresse aux Gens du Voyage de la Gironde. Elle compte une trentaine de salariés et anime deux centres sociaux, dont celui de Toulenne, qui a la particularité d’être ouvert à tous publics. Le centre coordonne depuis trois ans un collectif de lutte contre l’illettrisme sur le Sud Gironde, initialement financé par l’appel à projets régional « Innover contre l'illettrisme. »

 

Comment est né votre projet de collectif ?

Il a commencé en 2017 par une initiative née d'une rencontre d’élus, d'acteurs de la société civile, d'associations et d’organismes de formation impliqués dans les Habilitations de Service Public (HSP). Nous avons pensé qu’il serait bien de monter un collectif de lutte contre l’illettrisme, et que l’on fédère des gens autour d’actions dans le cadre de la semaine nationale de lutte contre l’illettrisme. Nous avons répondu à l’appel à projet régional pour aller plus loin et avoir une force de frappe plus conséquente. Comme le centre social Sud Gironde de Toulenne, dont j’étais directeur à l’époque, était le seul acteur qui ne faisait pas directement de la formation type HSP ou d’actions de lutte contre l’Illettrisme, nous avions une sorte de neutralité, et nous avons accepté de porter le projet. En parallèle nous menions un travail autour de la médiation par le numérique, c’est tout naturellement qu’on est passé à un collectif de lutte contre l'illettrisme et l’illectronisme en Sud Gironde.  

 

Avez-vous réalisé une étude de territoire pour recenser les besoins ?

Nous n’avons pas fait d’étude des besoins à proprement parler. Mais dans le collectif il y a un centre social et deux établissements de vie sociale qui ont l'habitude d’effectuer des diagnostics de territoire, puisque ça fait partie de leurs commandes habituelles. Et puis nous entretenons des liens suivis avec des grands acteurs sociaux comme le Département, France travail, la mission locale, etc. Donc on savait tout de même à peu près à quel type de public ça pouvait être utile.

 

Justement, à quel public vous adressez-vous ?

Le Sud Gironde fait partie de ce qu'on appelle l'arc de la pauvreté en Gironde. Il y a beaucoup de personnes de tous âges sous le seuil de pauvreté, qui exercent des métiers souvent pénibles et qui peuvent être concernés par des problématiques d'illettrisme. Nous avons essayé de fixer le moins de barrières possibles. L'idée c'est que les personnes soient repérées et orientées par les grands acteurs sociaux et par nos repéreurs, qu'ensuite elles participent à nos actions, par exemple les ateliers de territoire. On lutte contre beaucoup de fatalisme et d'absence de projection chez les personnes. La résignation est assez terrible. Notre projet c'est aussi d’essayer de favoriser la mixité, de faire en sorte que les publics, par exemple gens du voyage ne restent pas qu’entre eux.

 

Les partenaires du collectif œuvraient-t-ils déjà dans le domaine de l’illettrisme ?  

Ils étaient déjà engagés. Le fait d'être ensemble leur a permis de trouver des moyens, mais aussi une dynamique partenariale et une caisse de résonance pour mieux dérouler leurs actions. Ce qui m'intéresse le plus, c'est que le collectif de lutte contre l’illettrisme en Sud Gironde est un groupe finalement informel de gens qui se réunissent plus ou moins régulièrement pour travailler sur cette question. Nous organisons trois à quatre rencontres par an, on essaie de confronter nos pratiques et de les faire évoluer. Le projet nous a apporté des moyens suffisant pour financer nos ateliers.

 

Le collectif rassemble quatre associations qui sont des espaces de vie sociale et un organisme de formation. Chacun couvre une partie du territoire et met en place une ou plusieurs actions. Notre territoire est assez étendu, et le collectif permet de le mailler et de créer des lieux de proximité de lutte contre l’illettrisme. Ce sont des premières marches pour ensuite, pourquoi pas, permettre aux publics d’intégrer une formation type HSP. Le cœur de notre action, ce sont les fils rouges pendant la journée nationale de l'illettrisme, les rencontres de formateurs et les ateliers disséminés dans tout le sud Gironde.

 

Que sont les ateliers de territoire ? 

C'est une action qui a été imaginée par le collectif. Ils ont été déployés à Captieux, Bazas, Monségur, La Réole, Cadillac, par l'établissement de vie social La Boussole à Captieux, l'association Passerelle de Monségur, l'association Orfie de Podensac. Il nous reste une sorte de zone blanche vers Villandraut et Saint-Symphorien, où il y a sans doute des besoins, mais il faut que déjà faut qu'on trouve des lieux et une association porteuse, ce qui n’est jamais simple. On essaie de faire des ateliers d’une durée minimale de 6 mois. En gros on s'était donné comme objectif de mettre en place six ateliers de territoire, qui ont accueillis une cinquantaine de personnes. L’idée est que l’on fasse de l'action socio linguistique, c'est-à-dire que l’on travaille sur l’illettrisme à partir de supports qui peuvent être détournés, avec des thématiques qui touchent souvent à la vie sociale.

 

Et vos autres actions ?

Afin de préparer la journée nationale de lutte contre l’illettrisme on a eu l’idée de faire un fil rouge à visée culturelle. La première année par exemple on avait choisi la thématique « à quoi ça sert d'écrire ? ». On l’avait proposé à plusieurs associations, certaines ont produit des choses, par exemple un groupe de collégiens a écrit une chanson et ils sont venus l’interpréter lors de la journée nationale. Ou des personnes âgées qui ont fait des collages à partir d’un atelier d'écriture. Cette année nous avons fait intervenir une artiste plasticienne qui a mené des ateliers dans plusieurs structures et nous avons rassemblé les travaux dans un ouvrage.

 

Avez-vous eu des surprises ?

La première bonne surprise c'est que le conseil régional ait accepté de pérenniser le financement, même s’il est un peu réduit. Nous avons aussi un peu de financement du conseil départemental. Pour moi, les actions ne peuvent se construire que dans le temps. Par exemple il nous a fallu deux ans pour trouver un lieu à Cadillac, et suffisamment de personnes pour démarrer. On a bien fait de ne pas lâcher, parce qu'aujourd'hui il est en place et fonctionne bien.

 

Sinon, il y a un public qui participe à nos ateliers, auquel je ne m'attendais pas. Ce sont les adultes en situation de handicap qui viennent d'institutions Je pensais que ces personnes allaient être prises en charge au sein de leurs structures, dans les activités de soutien médico-social. Je pensais que nous aurions surtout du public allophone ou FLE qui sont toujours un peu à la frontière de l’illettrisme.

 

A contrario, avez-vous rencontré des difficultés particulières ?

C'est toujours un peu compliqué de travailler avec plusieurs partenaires. Les structures, avec leur autonomie de gestion, sont liées au projet par un engagement philosophique et une convention de financement. Mais chacune garde son indépendance, je pense que c’est important. Il faut arriver à se mettre d'accord sur des objectifs, et qu’un porteur de projet coordonne l’ensemble. C’est un subtil mélange entre le travail mené ensemble, et une part d'autonomie. L’autre problème est que, lorsqu’un partenaire est fragilisé à cause de difficultés financières ou managériales, ce qui arrive régulièrement, les projets font des vagues. Je pense qu’il faut l'accepter, prendre du recul et avoir un peu de détachement.

 

Que faudrait-il améliorer selon vous ?  

Je pense que nous avons une marge de progrès, dans nos relations avec les prescripteurs qui ne nous orientent pas suffisamment de publics, parfois parce qu’ils s'interdisent de penser que les gens sont en situation d’illettrisme. Pourtant le travail de communication a été fait, et nous sommes toujours en lien avec France travail, les Maisons du Département des Solidarités, notamment pour leur proposer des formations de sensibilisation à la question de l'illettrisme avec le CRIA. Mais les prescriptions n’augmentent pas vraiment.

 

Qu’envisagez-vous pour le futur ?

Nous venons d’entamer notre troisième année. Nous allons surtout reconduire ce qui a déjà été mis en place. On essaie de monter des événements, comme une séance de ciné débat que nous avons récemment organisé. Dans le cadre de la journée nationale, nous avons présenté un spectacle de théâtre. Et avec la chaîne des savoirs, des « ambassadeurs » sont venus témoigner. Une bénévole qui les accompagnait a dit quelque chose qui m'a marqué, que ce n'est pas aux illettrés d’avoir honte, c'est à la société. Le fait que les gens témoignent, ça renverse un peu les rôles, c’est une façon de demander à la société de prendre ses responsabilités et de faire en sorte qu’on évite au maximum ces situations.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

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December 5, 2024 7:57 AM
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Un accompagnement cousu main

Un accompagnement cousu main | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Comme son nom l’indique, le Contrat d'Engagement Jeune « Rupture » (CEJR) s’adresse aux jeunes en rupture, c’est-à-dire à un public qui connaît plus de difficultés que celui accompagné par les missions locales dans le cadre du CEJ classique. Son ambition est de les repérer, d’aller à leur rencontre, de lever les freins qui les empêchent de signer un contrat. Lancé début 2023, ce dispositif consiste en un accompagnement social renforcé et n’a pas de limite de temps.

 

A Brive, le CCAS de la ville a souhaité se positionner sur l’appel à projet CEJR en partenariat avec la mission locale et le service cohésion sociale de l’agglomération. L'analyse des besoins sociaux réalisé au préalable, avait révélé, entre autres, une augmentation du nombre de jeunes sans solution d'hébergement.

 

Les deux éducateurs qui animent le dispositif interviennent à mi-temps chacun dans le cadre de « Pass Pro », puisque c’est le nom qui lui a été choisi. Ils effectuent un travail en amont qui consiste à repérer les jeunes, les accompagner dans leurs démarches et les orienter.

 

Un dispositif partenarial

 

Manon Semblat est référente du Pass Pro à la fois pour l’agglomération et le CCAS de Brive. « Le projet a été lancé conjointement par le CCAS, l’agglomération et la mission locale. Nous travaillons en partenariat avec la mission locale parce que, qui dit jeune, dit mission locale au niveau de l'accompagnement vers l’emploi. Mon collègue Pascal Morteyrol travaille à la mission locale, il est à disposition pour 50% de son temps auprès du CCAS »

 

C’était aussi l’objectif de l’appel à projet, de les orienter vers la mission locale pour signer un CEJ.  « Dans la réalité ce n’est pas si simple, le CEJ n’est pas toujours une finalité, cette solution n’est pas toujours adaptée pour diverses raisons. Le jeune peut vouloir accéder à l’emploi ou à une formation directement, ou il est parfois trop éloigné de l’emploi. »

 

Pour qu’un jeune soit accompagné dans le cadre de Pass Pro, il faut qu’il habite l’agglomération, qu’il ne soit pas inscrit à la mission locale ou n’avoir pas eu de contact avec son conseiller depuis au moins 5 mois. Les orientations peuvent venir de n’importe quels partenaires ou pairs. « On arrive à repérer ceux qui connaissent une difficulté à un moment donné, par exemple ce qui ont fait un séjour à l'hôpital, par le biais du Département parce que les parents sont suivis. Là où c’est plus compliqué, ce sont les jeunes qui vivent chez leurs parents, qui ne sortent pas, qui ne savent pas à qui s’adresser, qui ont peut-être une addiction ou, de manière plus générale, une problématique de santé mentale. » 

 

Actuellement, une vingtaine de jeunes sont suivis dans le cadre de ce dispositif, l’idée étant de proposer un accompagnement renforcé et réactif. Il est nécessaire de pouvoir se rendre disponible à chaque sollicitation pour éviter les ruptures. « Si un jeune m'appelle un après-midi, il faut que je puisse le recevoir tout de suite, au pire le lendemain. En fait on est vraiment sur du cousu main, tout dépend vraiment de là où on part. »

 

« Dans la première phase de l’accompagnement, on ne contractualise rien pour ne pas faire peur au public. On s'adapte à chaque jeune, à ses besoins, et ses objectifs, c'est vraiment le cœur de notre travail. Nous ne suivons pas de programme précis. La porte d'entrée peut être de faire une carte d’identité ou une carte Vitale. Notre but, c'est d’abord de créer une relation de confiance. De toute façon, lorsqu’un jeune est à la rue, sa priorité n'est pas de signer un CEJ, mais de trouver un toit, de trouver à manger. Le reste est secondaire. Tant qu’on n’a pas réglé ses problèmes, on ne peut pas engager un autre travail avec lui. »

 

« Lorsqu’il est prêt à aller plus loin, on reste à ses côtés pour l’aider à trouver des stages, appeler des employeurs, aller déposer leur CV. Toutes ces démarches qu’il n’est pas toujours capable de faire seul. Côté emploi, on va l'aider à chercher les employeurs, être là quand il va les appeler.  Cependant, nous ne faisons pas tout à sa place, le but est qu’il devienne autonome. En quelque sorte, nous endossons le rôle qu'un parent jouerait avec son enfant qui cherche du travail pour la première fois. »

 

Accompagner sans conditions

 

Pas de règle dans l’accompagnement, ni en matière de durée, ni en matière de rythme de rencontres. Au départ, si une situation est un peu compliquée, les rencontres peuvent être quotidiennes. Pour d’autres, ce sera une fois par mois. Combien de temps et comment procèdent les éducateurs, tout cela dépend de chaque jeune.

 

Les questions de logement constituent un des principaux freins à l’insertion des jeunes, avec la mobilité qui est aussi un obstacle majeur à l’insertion sur un territoire très majoritairement rural. Au point de parler de « parcours d'errance » pour certains qui n’ont pas eu de cadre dans leur vie, ce qui rend leur rapport à la formation et au travail d’autant plus compliqué.

 

« Autre difficulté, certains de nos jeunes, du fait de leurs histoires de vie, n’ont pas autour d’eux les ressources familiales pour les accompagner dans l’entrée dans la vie active. Souvent très immatures, il faut avec eux réaliser des accompagnements de proximité. Dans ces cas-là, le « faire-avec » va primer »

 

Depuis le début de Pass Pro, ce sont environ 60 jeunes qui ont été accompagnés. Certains ont accédé à l’emploi, d’autres à la formation. Ceux qui l’ont fait se sortent de ces difficultés assez vite. « On leur a juste permis d’accéder plus vite à leur parcours d’insertion. »

 

Pour la plupart, les accompagnements sont longs. Quand ils ne durent pas, c’est à l’initiative du jeune, soit qu’il ne donne plus de nouvelles, soit qu’il ait déménagé malgré les relances et sollicitations dans les périodes de ruptures. Le dispositif qui était expérimental sur deux ans est reconduit pour une année supplémentaire. Il s’arrêtera avec la fin des financements, peut-être au profit d’autres actions à venir.

 

 

 

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November 21, 2024 7:43 AM
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Mécanique à vocation solidaire  

Mécanique à vocation solidaire   | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Le département de la Vienne dispose de plusieurs offres de mobilité solidaire, sous forme de location de deux-roues, d’une auto-école sociale, d’organismes qui proposent du conseil en mobilité (Mobi’Vienne, le pôle mobilité de Châtellerault et le Centre Socioculturel de la Blaiserie à Poitiers). Pour compléter cet éventail, les acteurs locaux comme le Département, les structures d'insertion du territoire et les différents référents sociaux qui accompagnent des personnes dans le cadre de la mobilité à l'emploi, réfléchissaient depuis une dizaine d’année à implanter un garage solidaire.

 

À la sortie de la crise sanitaire, une étude de faisabilité a été lancée, financée par le Département de la Vienne, qui incluait tous les intervenants, pour valider ce futur service de réparation et en définir la forme. Cette étude, réalisée en 2022 par le cabinet bordelais Ellyx, a confirmé ce besoin. Elle a aussi déterminé qu’il serait pertinent de l'ouvrir sous forme de chantier d'insertion pour lui donner une vocation sociale et d'insertion.

 

Soligo 79, garage solidaire à Niort, s’est alors positionné sur le portage du projet. C’est à ce moment qu’a été recrutée Clothilde Chachay en tant que chargée de développement, avant d’être nommée directrice adjointe à l'ouverture du garage en janvier 2024. Son rôle était de lancer la structure et d’embaucher les premiers salariés en parcours. L’appel à projets national « Lutte contre la pauvreté » a permis à l’association en création de bénéficier d’un financement de 125 000€ pour les équipements du garage. De son côté, le Département en a financé les six premiers mois de fonctionnement.

 

« Nous sommes partis du modèle de Niort, avec une tarification similaire, à savoir 35€ l'heure de main d'œuvre, et les mêmes conditions d'accès sur prescription ou sur quotient familial inférieur à 900€. Nous avons constaté qu'à Niort, nous avions beaucoup de demandes de public senior qui ne répondent pas forcément aux critères sociaux. Nous sommes en train d’essayer de faire évoluer les conditions, pour permettre aux publics qui ne sont pas allocataires de la CAF d’accéder tout de même au garage. »

 

Des critères sociaux

 

Initialement, le nombre de clients potentiels a été évalué à 350 par an. Bénéficiaires du RSA, demandeurs d’emploi, actifs suivis par un référent social, ils sont orientés vers le garage par France travail ou par les assistants sociaux. Beaucoup sont allocataires de la CAF. Leurs véhicules sont plutôt vieillissants, une dizaine d'années en moyenne, et nécessitent souvent beaucoup de travaux à faire parce qu’ils n’ont pas toujours été très bien entretenus.

 

L’équipe de Soligo 79 est intervenue en soutien de la nouvelle structure, baptisée Soligo 86, notamment dans la recherche d’un bâtiment, qui devait être situé sur le territoire de Grand Poitiers, afin de ne pas être trop isolé et bénéficier de l'attractivité de l’agglomération. C’est finalement à Saint-Georges-lès-Baillargeaux, une commune située à côté du Futuroscope, que le garage s’est implanté. « Ça nous a vraiment beaucoup aidé dans le montage du projet, sur pas mal d'éléments. Par exemple sur la recherche de financements, ce qui m’a permis de convaincre plus facilement les financeurs et les banques. Si j’avais dû porter le projet ex nihilo je pense que j'aurais eu plus de difficultés. »

 

À terme, le garage envisage d’accueillir cinq salariés en insertion. Ils sont aujourd’hui trois, tous issus d’une prescription. La plupart du temps ils sont suivis par un référent social, France Travail, une mission locale, et doivent candidater sur la plateforme de l'inclusion. Ils sont encadrés par deux mécaniciens professionnels choisis en raison de leur appétence pour la transmission, et de leur expérience précédente d’accompagnement de stagiaires ou d’alternants.

 

En complément, ces salariés permanents suivent la formation « encadrer et manager des profils en parcours d'insertion » de l’association INAE. Par ailleurs, une accompagnatrice socioprofessionnelle, en quelque sorte l’assistante sociale du garage, intervient aux côtés de la direction pour épauler, conseiller les permanents et les accompagner au mieux dans leur mission d’encadrement.

 

Associer différents niveaux de compétences

 

Pour les salariés, la durée de contrat d’insertion dépend de chaque profil, au minimum 4 mois, renouvelables jusqu'à 24 mois. Tout au long du parcours se tiennent des points d'étape pour avancer sur leur projet professionnel et trouver des solutions à leurs freins périphériques, en matière de logement, de santé, etc. Soligo 86 associe volontairement des salariés qui ont déjà pratiqué la mécanique, dans un cadre professionnel ou en dehors, et d’autres qui n’ont aucune compétence dans ce domaine, de manière à créer des binômes « mixtes » dans une logique d'apprentissage mutuel. En fonction des missions, un binôme peut travailler en autonomie ou, s’il s’agit de travaux plus importants, sous la supervision d’un permanent.

 

« On peut avoir des profils qui sont proches de l'emploi, d'autres publics qui vont suivre des parcours beaucoup plus longs avant de pouvoir intégrer une formation ou un emploi durable. La démarche nécessite une véritable implication de la part des salariés. Si une personne n’est pas assez investie, nous préférons mettre un terme à son contrat. »

 

Aujourd’hui, la première activité du garage solidaire est d’effectuer des réparations, mais comme son homologue niortais, il travaille en lien avec la Plateforme Régionale d’Accès à la Mobilité sur la vente de véhicules d'occasion et du conseil à l'achat. L’association envisage également, par exemple, de répondre à une volonté de l’agglomération de lutter contre la mécanique sauvage, notamment dans les quartiers prioritaires de Poitiers.

 

C’est pourquoi, parmi ses perspectives de développement elle pense monter des ateliers simples, éventuellement mobiles, qui proposeraient aux habitants d’apprendre à vérifier les liquides de leur véhicule, changer un pneu, savoir quand faire sa vidange, etc. 

 

« Mais nous voulons, avant cela, développer la location solidaire de voitures. Nous avons lancé une campagne de financement participatif pour assurer le lancement des premières locations. Notre priorité 2025 est de développer cette flotte qui commencerait avec trois ou quatre voitures, pour atteindre la quinzaine à terme. Nous sommes un petit garage, qui dispose de trois ponts et pour l'instant de 5 salariés mécaniciens, donc nos ambitions doivent rester limitées. »  

 

 

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November 7, 2024 5:25 AM
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La coopération comme moteur de l’entrepreneuriat

La coopération comme moteur de l’entrepreneuriat | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

A La Rochelle, Osmose entre dans sa troisième année d'expérimentation. Financée par la Fondation de France, cette action, coordonnée par l’association KPA La Rochelle, regroupe plusieurs partenaires, dont le CFA de la chambre de métiers et d’artisanat à Lagord, l’association la Matière (économie circulaire) et la fondation Fier de nos quartiers. « Osmose est le résultat d’une réflexion partenariale. C’est comme ça que KPA construit ses projets, » explique Sébastien Osorio, coordinateur et accompagnateur. « C’est de cette manière que nos méthodes et celles de nos partenaires évoluent, c'est ça qui est passionnant. »

 

Osmose est un programme à plusieurs dimensions, une « form’action » qui mobilise des jeunes autour de l'entrepreneuriat coopératif.  Il s’inscrit dans la même logique que les Coopains (voir notre article), mais sur une durée plus longue, entre cinq et six mois. Son leitmotiv est « expérimenter pour mieux se découvrir. » Trois grands profils de jeunes fréquentent KPA. Les lycéens, les porteurs de projets, et ceux qui sont en année de césure, en pause, ou déscolarisés. C’est à ces derniers qu’Osmose s’adresse particulièrement.

 

Pour trouver les participants, KPA s’appuie essentiellement sur différents prescripteurs. Mais elle diversifie ses sources, en se rendant sur des évènements, dans les lycées, plus récemment en participant à des maraudes avec la ville de La Rochelle. En fin d’année, l’association organise deux réunions d’information collective, suivies de deux journées d'immersion à KPA, au CFA ou à la Matière, pour que les jeunes découvrent ce qui leur est proposé. Elles permettent également de voir comment les jeunes évoluent au sein d’un groupe.

 

« Nos informations collectives durent au moins deux heures, parce que le parcours est riche, on passe en revue énormément de choses. Et il y a beaucoup d'acteurs, dont certains sont présents aux réunions. On fait aussi intervenir des anciens. Rien ne vaut le témoignage de quelqu'un qui a suivi le programme et qui peut parler des joies qu’il a vécues, mais aussi des peines, parce que tout n'est pas rose non plus. »

 

D'abord la motivation

 

A raison d’une promotion par an, un groupe est constitué en début d’année avec douze participants, qui vont gérer ensemble une entreprise de manière coopérative. Aucun niveau requis, le seul critère d’admission est la motivation, l’envie de participer à une aventure collective et d’intégrer le groupe. Pendant six mois, ils vont répondre à des commandes, organiser des prestations, en suivant une méthodologie semblable à de la gestion de projet. Ils ne seront pas toujours d’accord entre eux, mais c’est tout l’intérêt de l’action, puisqu’ils vont apprendre à discuter, à communiquer. Ils découvrent le groupe et se découvrent eux-mêmes.

 

« On est sur une logique d’entonnoir inversé. Au départ, les jeunes sont autocentrés. On ne va pas leur parler du monde alors que certains ne se connaissent pas eux-mêmes. On fonctionne beaucoup avec la philosophie de l’Ubuntu, « je suis parce que nous sommes. » On les emmène progressivement à prendre conscience de leur place au sein du groupe, puis au sein de KPA, au sein d’Horizon Habitat, au sein du quartier de Mireuil, ensuite la ville de La Rochelle, etc. »

 

Les jeunes signent un Contrat d'Appui au Projet d'Entreprise (CAPE), sous une forme simplifiée, dans le sens où ils deviennent coopérants et sont rattachés à l’association KPA et l'opération Osmose. Ils sont rémunérés à hauteur des prestations qu'ils réalisent. Ils sont également, en général, en Contrat Engagement Jeune (CEJ), ce qui rend la présence de la mission locale indispensable pour que tout fonctionne.  « On se doute qu’il peut y avoir des abandons, parce que c'est un rythme qui peut être intense, parfois même éprouvant. Les missions ne sont pas reposantes, et parfois assez complexes. »

 

« Le cadre d’Osmose, ce sont nos valeurs : la bienveillance, la libre circulation, la libre participation. Personne n’est obligé de participer aux activités et ateliers, mais on va toujours les pousser à essayer. Les autres partenaires apportent leur patte, la Matière avec l'exploration de la transition écologique, et le CFA pour la découverte des métiers et la construction du projet de vie et professionnel. »

 

Les « chimistes » d'Osmose, tels qu’ils se présentent, sont toujours dans l’expérimentation. Pour qu’ils puissent accepter une commande, il faut que les jeunes puissent rapidement passer à l’action. Inauguration des locaux de la Société Générale, organisation d’une exposition au Port Atlantique, déménagement pour Enedis, les missions sont très diverses.  C’est l’occasion pour les jeunes de se former à la prise de parole en public, à l’accueil, à l’animation d’ateliers, à la logistique, etc. Ils découvrent l’organisation d’évènementiels, la communication, et se forment à des outils qu’ils n’auraient pas rencontrés ailleurs.

 

Organiser la rencontre entre jeunes et entreprises

 

La relation avec les entreprises a pour ambition de faire évoluer le regard des jeunes vis-à-vis des entreprises et, en retour, de changer celui des entreprises vis-à-vis des jeunes, un public qu’elles ont parfois du mal à rencontrer et à recruter. « Avec les entreprises, quelquefois ça coince, c'est normal. Tout n’est pas lisse et facile. C’est justement dans ces situations qu’on peut faire évoluer les approches des deux côtés. »

 

Afin d’évaluer la progression des membres du groupe, KPA a créé « le journal des pouvoirs », un outil basé sur les compétences Rectec adaptées à l'entrepreneuriat coopératif. De plus, le cabinet bordelais Ellyx effectue un travail de « mesure d'impact », pour savoir à quel point expérimenter et apprendre de manière différente influence chaque jeune. « La mesure d’impact consiste à suivre le parcours du jeune d’un point A à un point B. C'est son point B, nous ne lui imposons pas. Nous l’accompagnons à construire son projet de vie et nous mettons tout notre réseau à sa disposition pour lui ouvrir des portes. »

 

« Nous avons aussi notre propre ressenti. Quand on reçoit un jeune la première fois, qu’il est recroquevillé sur lui-même, timide, n’osant pas s’exprimer, et qu’on le voit finalement prendre la parole, animer un atelier avec des étrangers, des adultes en plus, son évolution est évidente pour nous. On utilise aussi des questionnaires pour mesurer l’impact. Il en ressort surtout l’amélioration de la confiance en soi, la confiance vis-à-vis des adultes, vis-à-vis de la société, vis-à-vis tout ce qui nous entoure. »

 

Autre sujet central pour Osmose, la dimension de transition écologique et sociale. « Les questions d’écologie nous tiennent à cœur. Si les jeunes ont cette sensibilité, c'est génial. S’ils ne l’ont pas, on s’occupe de la créer. » A cette fin, des immersions sont organisées chaque semaine dans une associations comme la Matière pour découvrir les circuits courts, l’économie sociale et solidaire et le recyclage de matériaux, ou TEO, qui œuvre pour la préservation maritime, ou encore Müe Dada dont la raison d’être est l’expérimentation artistique.

 

« Notre rôle est celui d’insuffler de l'énergie pour que ça bouge. On est à la fois coordinateur, facilitateur, animateur. Mais on n'est pas éducateur, on travaille avec des éducateurs partenaires pour nous soutenir et soutenir les jeunes qui en ont besoin. D’une année sur l'autre on expérimente, on prend les retours des jeunes. Le parcours n'est pas figé, il évolue constamment. Par exemple, avec les entreprises, nous pensons abandonner les stages, au profit de rendez-vous clients, des visites immersives directement en lien avec la prestation demandée et avec le service concerné. »

 

Parmi les chantiers ouverts pour la saison trois, les compétences psychosociales seront progressivement intégrées au journal des pouvoirs. « L’année dernière nous avons déjà intégré une treizième compétence transversale, celle d’être « ambassadeur de la transition écologique et sociale. »

 

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October 10, 2024 9:12 AM
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HyPE-13, l’enjeu de l’hybridation à l’université

HyPE-13, l’enjeu de l’hybridation à l’université | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

C’est en 2020, que douze universités françaises ont formé un consortium pour répondre à un appel à projet lancé par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Le projet HyPE-13 pour « Hybrider et Partager les Enseignements » avait pour ambition de promouvoir l’hybridation des formations dans l’enseignement supérieur à destination des enseignants et des étudiants. Les ressources numériques accessibles en ligne n’étaient pas tout à fait une nouveauté. Mais les universités n’en faisaient pas toutes usage au même niveau. Certaines étaient déjà bien avancées sur les formations à distance, mais encore très loin d'avoir des pratiques hybrides.

 

Avec la crise sanitaire, la plupart des établissements ont dû mettre en place des modes distanciels, chacun avec des outils différents, forçant les équipes pédagogiques et les étudiants à s’adapter rapidement pour poursuivre les enseignements, sans que ce soit au détriment de la qualité. L’idée a dès lors émergé de se rassembler pour essayer de répondre aux problématiques et de trouver des solutions communes.

 

A l’université de Pau et des Pays de l'Adour, c’est Frédéric Tesson, géographe, qui a coordonné l’ensemble du projet.  « Le rapprochement s’est fait entre universités de taille moyenne, les plus grosses étant Lyon 2 et Cergy.  Dans des universités comme Pau, Reims, La Rochelle, Caen, on n’avait pas la force de frappe pour vraiment répondre seul aux problématiques d’hybridation posées par la crise sanitaire. C'est-à-dire que nous disposions d’une ingénierie pédagogique avec un accompagnement assez classique, mais nous n’avions pas les moyens de recruter des ingénieurs pédagogiques pour développer des choses dans le domaine de l’hybridation. » 

 

Le projet HyPE-13 a été organisé en quatre lots thématiques, avec un pilotage réparti entre les douze établissements. Quatre lots étaient divisés en 19 groupes de travail. Parmi les thématiques choisies, les outils de Learning Analytics, ou analyse de l’apprentissage (mesure, collecte, examen des données d’apprentissage), la création d’un observatoire de la transformation pédagogique, les questions de RGPD, de sécurité des données et des évaluations, la sensibilisation à l’enseignement hybride, la cartographie des ressources du consortium, etc.

 

Partager les ressources

 

Chaque université était porteuse d’un ou plusieurs de ces livrables, s’articulant autour de trois axes principaux, à savoir le partage et la dissémination des ressources, la formation des équipes pédagogiques pour la mise en place de l’hybridation, la conception et de déploiement d’outils de Learning Analytics dans une logique d’amélioration continue. Les partenaires n’étaient pas forcément à l’œuvre dans tous les programmes, mais ils en ont finalement tous bénéficié. D’ailleurs toutes les productions sont encore accessibles aujourd’hui aux universités qui en font la demande.

 

Les travaux ont pris différentes formes, des enquêtes, des webinaires, des MOOC, des ateliers, des guides et d’autres outils comme « Fenêtre sur cours », une application-agenda élaborée par l’université d’Angers afin que des enseignants assistent aux cours d’autres collègues. « Nous ne pouvions pas nous contenter de trouver quelques recettes pour se débrouiller, nous devions mettre en place le cadre pour apporter de vraies solutions à ceux qui cherchaient à créer de la pédagogie autrement. Nous avons fait le choix d’utiliser une grosse partie du budget de trois millions d’euros pour recruter un ingénieur pédagogique par université, afin qu’il soit le chef de file technique du programme et l’incarne. »

 

Les réticences étaient nombreuses au départ. Pour exemple, lorsqu’ont été évoquées la mise en place de « bourses d’enseignements », la crainte était que les professeurs ne veuillent pas partager leurs ressources en ligne. Une réflexion a été menée sur les freins et les modalités de partage, qui a débouché sur guide de la propriété intellectuelle et la question de la propriété collective. Autre inquiétude, qu’on aboutisse à un système où un grand professeur de la Sorbonne donnerait un cours suivi par l'ensemble des étudiants français, et que les universités ne conservent que des travaux dirigés. Les enseignants chercheurs craignaient de se voir dépossédés de la matière enseignée.

 

L’hybridation à l'université implique de mixer toutes les modalités pédagogiques de façon intelligente et consciente. Du distanciel, du présentiel, du synchrone, de l’asynchrone, mais également du projet et du magistral, des travaux pratiques, des travaux dirigés, des enseignements hors les murs pour amener les étudiants à observer le réel. « L’hybridation d’une formation se joue dans sa globalité et non uniquement sur un enseignement. Une formation est hybride lorsqu’on peut y trouver des modules qui sont en asynchrone à distance, des modules en présentiel, des modules en synchrone à distance. Ça c'est la formation hybridée. »

 

« Nous avons voulu travailler sur toutes les modalités d’enseignement. Avant, nos formations à distance et toutes nos ressources électroniques étaient en ligne sur un modèle basique. Notre ambition était de rendre ces modèles interopérables, de créer des plateformes permettant d'accéder aux cours d’autres universités. Mais ce n’étaient pas tant les contenus que nous souhaitions partager, que des modèles d’enseignements au sein desquels chaque enseignant pouvait injecter son propre contenu. Pour cela, il nous fallait des masques pédagogiques communs pour construire des configurations pédagogiques avec tel type de problème, tel type d'exercices. C’était un programme extrêmement vaste, capable de répondre à peu près à toutes les problématiques. »

 

Au-delà des supports et des outils, l’hybridation provoque des changements majeurs. Elle implique d’avoir la capacité de renouveler les savoirs, de repenser la manière de les transmettre. C’est tout l'enjeu qui se présente à l'ingénieur pédagogique, apporter de nouvelles activités, accompagner les enseignants dans ces nouvelles modalités. Encore faut-il convaincre les enseignants chercheurs. « Ce que j'ai observé c'est que, finalement, sur l’hybridation, ça marche bien dans les sciences dures, là où les intervenants sont d’abord chercheurs. Ils acceptent plus facilement de faire un pas de côté pour intégrer quelque chose qui peut faciliter leur tâche d’enseignement, qui apporte plus d’efficacité. C’est plus difficile dans les disciplines « littéraires », les enseignants sont plus frileux à modifier leurs habitudes. »

 

Les étudiants, un public hétérogène

 

Autre enjeu important, améliorer l’expérience des étudiants. A l’ère de l’intelligence artificielle, ils n’ont pas le même rapport aux savoirs que leurs ainés. Aujourd’hui, les programmes prétendent toucher des étudiants extrêmement hétérogènes, des profils très divers, de celui qui est arrivé un peu par hasard, à celui qui poussera son cursus jusqu’au doctorat. L’intérêt de l’université, c’est de gérer cette diversité, sachant qu’un étudiant peut accrocher sur une modalité, et moins sur une autre.

 

L'hybridation c'est apporter des ressources différentes à des publics qui vont apprendre et comprendre par des moyens différents. Et de faciliter cet apprentissage à ceux qui rencontrent des difficultés avec les modalités pédagogiques classiques ou qui s'ennuient à l'université. « En première et deuxième année, nous avons des étudiants qui s'ennuient parce qu'ils ont un niveau excellent et qu’ils trouvent que ça n’avance pas assez vite, l'hybridation permet de leur proposer des ressources supplémentaires, de les maintenir en éveil tout en les laissant avec leurs camarades de promotion plus en difficulté. »

 

« Pour les universités, ça a été aussi l’occasion d’acquérir un véritable système de visioconférence pour organiser le distanciel synchrone. La débrouille pendant la crise sanitaire avait montré ses limites avec parfois des outils peu sécurisés utilisés dans les jeux vidéo pour assurer des cours à distance. Il y a eu une prise de conscience de chacun des établissements de la nécessité d'avoir des outils communs et cohérents. »

 

Le projet HyPE-13 a pris fin en octobre 2022, après deux ans d’exercice. De fait, le consortium a cessé d’exister parce qu’il était juridiquement compliqué de continuer à le faire fonctionner en dehors du projet sans financement. Certains partenaires ont gardé des liens ils échangent sur des problèmes liés à la pédagogie. Les ingénieurs pédagogiques sont restés en contact. Le site Internet, créé pour l’ensemble du consortium, est toujours accessible.

 

« HyPE a été un accélérateur dans le sens où chaque université s’est dotée d’outils performants et que les collaborations entre ingénieurs pédagogiques ont permis une montée en compétences collective des équipes. Après, les enseignants se sont formés au mieux, au moins pour être en mesure de déposer des éléments en ligne. C'est déjà une belle avancée, ils en ont compris l'intérêt et ils sont accompagnés. Sans cela, je pense que nous aurions toujours 20 à 30% d'enseignants qui ne se serviraient pas de ces outils. »

 

 

https://hype13.fr/

 

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