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Illettrisme, l'enjeu du repérage

Illettrisme, l'enjeu du repérage | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Angélique Feniou est coordinatrice et formatrice au sein de l’association CASSIOPEE de Ruffec (Charente). La structure compte trois pôles. Un pôle accompagnement pour les allocataires du RSA, un atelier chantier d'insertion dont le support de production est un pressing blanchisserie « Couleur lavande », et un pôle formation. En 2022 ce dernier a reçu un financement de l’appel à projets régional « innover contre l'illettrisme" pour mettre en place son action « accrocher, repérer, avancer. »

 

Comment a commencé votre projet ?

En échangeant avec nos association partenaires, on s’est rendu compte qu’il y avait beaucoup d'invisibles qu'on n'arrivait pas à capter. Et qu’il était difficile de leur parler de formation, parce que ça leur faisait peur. On ne visait pas un public particulier, on voulait capter les jeunes, les adultes vulnérables, fragiles. Toute personne en situation d’illettrisme, quels que soient son âge, son genre ou sa situation. Parmi ceux-là, on sait, par le biais de nos partenaires qui reçoivent la communauté des gens du voyage, que c’est un public très en besoin, mais difficile à capter.  

 

Quand vous avez décidé de présenter votre dossier, c’était pour répondre à des besoins exprimés ?

Au moment de notre réponse, on avait l'habilitation de service public (HSP) socle de compétences. Ils se trouve que pour être bénéficiaire de ce dispositif, il faut un certain statut et avoir un projet professionnel. Du coup un retraité en situation d’illettrisme ne peut pas aller sur HSP. Mais comme notre projet associatif c’est d’ouvrir la porte à toute personne qui a besoin de formation en lecture, écriture, calcul, on leur propose de participer à une autre de nos actions qui s’appelle « le français pour chacun. »

 

En quoi consiste « accrocher, repérer, avancer. » ?

Notre premier axe consistait surtout à renforcer le partenariat existant et l’étendre à d’autres associations et structures, pour leur donner quelques clés de repérage. On a proposé des sensibilisations à l’illettrisme à des travailleurs sociaux, des secrétaires de mairie, des associations loisirs, des encadrants techniques d'ateliers et de chantiers d'insertion. Et puis des bibliothécaires qui repèrent des difficultés chez leurs usagers lorsqu'ils remplissent le document de prêt. C’est toujours délicat pour eux d’aborder le sujet avec les personnes. On a également rencontré le Secours populaire qui nous a parlé de la fiche d'entrée qu’ils font remplir à l’accueil et qui révèle parfois des besoins de formation. Notre deuxième axe, c’est de déployer des actions pour amener progressivement le public vers les formations aux savoirs de base.

 

Vous rencontrez directement le public ?

Ça nous arrive, par exemple lors des distributions des Restos du cœur. On échange avec les gens tout simplement. On aborde un sujet commun sans leur parler directement de formation, sinon on les perd. C’est avant tout un travail d'échange et d'écoute. Je me suis aussi rendue disponible pour recevoir des personnes individuellement, les rassurer, parce qu’elles ont souvent eu des traumas scolaires. Je leur explique que nous faisons de la formation pour adultes, que ça n’est pas l’école. Je les invite à visiter les locaux, voir par eux-mêmes comment ça se passe sur une séance de formation.

 

Nous avons aussi organisé des sorties hors les murs avec les personnes qu'on avait réussi à capter, afin de créer une cohésion et les sortir du papier crayon. On a notamment fait la visite d’une médiathèque de Ruffec pour leur montrer que ça n’est pas réservé aux élites, qu’on peut y trouver des CD, de la musique, des expos, des ressources jeunesse. Pour travailler sur le repérage spatio-temporel, nous avons proposé tout simplement de prendre le train de Ruffec à Angoulême. Ça commence par se demander « comment on fait ? » Il faut lire un itinéraire, trouver le bon quai, la bonne direction. Faire ça en groupe, c’est une façon de leur montrer qu’elles ne sont pas isolées, que d’autres sont dans la même situation. Et qu’elles peuvent trouver de l’entraide et de la solidarité, qu’il ne faut pas rester seul chez soi en se disant « ce n’est pas pour moi, je n’ose pas ». Alors que des solutions existent.

 

Est-ce que ce financement vous a permis de développer des choses innovantes ou différentes ?

Ça nous a surtout permis de développer des approches que nous avions avant, mais qu'on avait laissé un peu en sommeil, parce qu'on n’avait plus le temps ou la possibilité de nous en occuper. Avec ce budget, on pouvait décider d’y aller. Nous avions déjà un réseau de partenaires assez important, et ça nous a donné l’occasion de le renforcer, de contacter par exemple les communautés de communes pour leur proposer notre intervention. Malheureusement, nous aurions envie de faire pleins de choses, mais ce n’est pas toujours facile de justifier d’y passer le temps nécessaire.

 

Quelle est la nature de votre intervention ?

Certains bénévoles des structures ne sont pas à l’aise pour parler d’illettrisme tout de suite aux gens. Parce que les personnes sont en détresse, que c’est déjà compliqué de venir chercher à manger, et ça n’est pas leur priorité de régler leurs problèmes de lecture et d’écriture. Nous, on est organisme de formation, on peut leur parler, on peut rencontrer la personne avant de prendre des décisions. Celle qui a des difficultés à passer le code de la route parce que le vocabulaire est trop compliqué par exemple. On peut se présenter tout simplement, chercher à savoir pourquoi elle n’y arrive pas, discuter avec elle sans parler de la formation.

 

Qu’est-ce que vous entendez par « accrocher » ?

Chronologiquement notre démarche c'est repérer, accrocher, avancer. L’accrochage, ce sont les échanges après le repérage. On s’emploie à créer un climat de confiance et on incite les gens à oser pousser la porte de l'organisme de formation. C’est à ce moment-là qu’on crée chez eux l’envie de venir voir comment ça se passe chez nous.

 

Vous avez rencontré des difficultés particulières ou au contraire des bonnes surprises ?

La bonne surprise c’est le bouche-à-oreille qui fonctionne bien, entre amis ou connaissances, ou par l’intermédiaire des centres sociaux. Ce qui est plus compliqué, c’est quand nous avons des personnes avec des problématiques personnelles ou de santé, qui font qu’elles peuvent venir pendant deux ou trois mois et que, sans prévenir, brutalement, on n’a plus de nouvelles. Mais tant que la personne est avec nous, elle avance petit à petit.  

 

Ce projet vous a-t-il poussé à modifier vos pratiques ?

Pas vraiment de changements, mais plutôt des rapprochements, des échanges plus réguliers avec nos partenaires, qui n’osaient pas forcément nous solliciter quand ils avaient un doute ou une personne qui avait besoin d’être rassurée, par exemple en échangeant directement avec la formatrice ou la coordinatrice. Notre idée de départ c'était vraiment que les structures ou les partenaires sachent ce qu'on fait et qu’ils aient le réflexe de nous contacter. Pour cela, il faut régulièrement faire des piqûres de rappel, répéter les actions, parce que les équipes changent, qu’il y a toujours de nouvelles personnes à sensibiliser.

 

Donc on va essayer d'être plus présents auprès d'eux pour mieux expliquer, pas forcément pour faire la promotion de nos services. On n’a pas spécialement des outils à leur proposer, mais plutôt des conseils. Par exemple, comment ils peuvent se créer un support comme une petite fiche d'identité pour aider au repérage. Ou sans aller trop loin, faire un petit jeu de société avec les personnes pour évaluer leur niveau. Mais pas avec un groupe trop nombreux parce que ça les mettrait en difficulté.

 

Quels ont-été vos résultats ?  

De fin octobre 2022 à fin décembre 2023, soit environ quatorze mois, nous avons repéré dix personnes. Sur notre territoire, ça n’est pas rien. Pendant les six premiers mois, on s’est focalisé sur l’axe un, le repérage, le développement des partenariats. Ensuite, on a pu agir sur l’entrée en formation, que ce soit sur HSP ou sur d'autres actions comme « le français pour chacun. » Aujourd’hui, on poursuit les échanges avec les partenaires en leur disant de ne pas hésiter à nous appeler, à prendre contact avec nous, parce qu'il y a forcément des personnes qui passent entre les mailles du filet.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

 

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October 8, 8:45 AM
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Trouve ta voie vers la formation ou l'emploi

Trouve ta voie vers la formation ou l'emploi | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

La Croix-Rouge comprend trois entités distinctes. Le groupe Croix-Rouge, Croix-Rouge Compétences, en charge des formations, et Croix-Rouge Insertion, créée en 2012, qui s’occupe d'accompagnement professionnel. Croix-Rouge insertion a été retenue par l’AMI O2R pour son projet « Trouve ta voie ». Nacéra Ouriachi, chargée de projet et Gonzague Amyotdinville, directeur, expliquent le principe de cette action déployée depuis mars sur le territoire de l’agglomération de Pau et plus récemment sur le Pays basque intérieur.

 

Pourquoi avoir répondu à O2R ?

Notre structure principale est un atelier chantier d'insertion, nous sommes sur l'insertion par l'activité économique. Initialement, Croix-Rouge Insertion a été créée pour permettre une logique de parcours entre les personnes accueillies dans les épiceries sociales, les « vestiboutiques », pour du soutien scolaire, et qui se rendaient utiles en faisant du bénévolat. Les personnes acquéraient des compétences pendant ces activités, mais elles n'arrivaient pas suffisamment à les valoriser pour les faire figurer dans un CV ou les mentionner lors d’un entretien avec un recruteur. C’est pourquoi la Croix-Rouge a créé cette passerelle, une étape professionnalisante pour accéder à un emploi durable ou une formation qualifiante pour les personnes en grande exclusion

 

Aujourd’hui, dans le cadre O2R, on est en lien avec les unités locales de la Croix-Rouge qui sont au plus près du terrain. Ce sont elles qui font des maraudes, des accueils de jour, qui gèrent les épiceries sociales, etc. Par l'intermédiaire des bénévoles, elles repèrent des personnes susceptibles d’intégrer « Trouve ta voie. » Donc le repérage se fait via les actions de solidarité portées par la Croix-Rouge ou par d'autres acteurs de solidarité quand elle n'est pas présente, comme les Restos du cœur ou le Secours Catholique.

 

Trouve ta voie, est-ce une nouveauté pour vous ?

Avant O2R, nous avions le dispositif « Action avenir », dans le cadre du PIC 100% inclusion, qui présentait quelques similitudes avec « Trouve ta voie », mais avec un sourcing des personnes moins présentes dans des actions d’aller vers. Donc nous avions déjà expérimenté une action avec laquelle nous avons remobilisé et accompagné plus de 100 personnes en 2 ans. « Trouve ta voie » s’inscrit dans la continuité, en consortium avec l’AFPA, et en lien avec les unités locales de la Croix-Rouge.  Un des mots-clés aujourd'hui du projet associatif national de Croix-Rouge c'est « relever », et donc ça participe pleinement à ce souhait d'aider à relever des personnes par un soutien de la Croix-Rouge.

 

Pour déployer le dispositif, il a fallu d’abord le faire connaître, il y a eu toute une phase d'apprivoisement. Certains intervenants l’ont très bien accueilli, d’autres un peu moins parce qu’ils sont déjà présents sur le territoire et nous considèrent un peu nous rajoutant à des actions existantes. Il faut du temps. Maintenant nous voyons des acteurs revenir vers nous alors qu’ils ne s’étaient pas montrés intéressés au début. Notre message c’est d’expliquer au contraire que nous sommes complémentaires, que nous apportons un accompagnement renforcé.

 

Est-ce que vous visez un public particulier ?

Aujourd’hui on est sur des publics « de rue », d'où les maraudes, les accueils de jour, etc. Tous les âges sont représentés, toutes les catégories sociales, c’est un public assez large

 

Pour effectuer le repérage, avez-vous mis en place des choses particulières ? 

Nous utilisons les ressources internes à la Croix-Rouge, les bénévoles qui nous orientent des personnes. A nous de vérifier, en lien avec France Travail, si elles ont le profil pour entrer dans le dispositif. Nous avons également fait des présentations auprès de divers organismes. Et comme nous sommes mieux connus maintenant, nous faisons moins de repérage qu’au début. On reçoit aussi des personnes qui nous ont découvert avec notre flyer ou nos cartes de visite. Sur le Pays basque intérieur, on s'appuie sur les secrétariats de mairie et les élus. En zone rurale, les maires ont une connaissance assez fine de leurs administrés et de leurs besoins. Ils nous mettent des locaux à disposition pour faire nos entretiens. Nous sommes également en contact avec le Secours Catholique et son « fraternibus », un camping-car aménagé pour recevoir du public. On essaie d’aller au plus proche des gens, mais on ne va pas jusqu’au domicile, on trouve ça trop intrusif. Le repérage se fait aussi, et de plus en plus, par le bouche-à-oreille.

 

En quoi consiste la remobilisation ?

La remobilisation repose sur quatre piliers. Le premier est un partenariat avec l’AFPA qui propose des modules pour travailler sur l’estime de soi. Ensuite, nous avons voulu utiliser notre marque Croix-Rouge afin de proposer aux personnes repérées de participer à une formation aux premiers secours. Le troisième axe, c'est le bénévolat, l'engagement solidaire. Nous partons du principe que si les personnes « accrochent » avec nous, elles vont s'intéresser à ce qu'on fait et intégrer nos équipes de bénévoles. 

 

Enfin quatrième axe, c'est la dimension artistique. On pense que toutes ces personnes qui se sentent exclues, ont des talents artistiques. C'est un moyen d'expression qui est peut-être plus accessible pour eux, que ce soit par la pratique d’un instrument, de la photographie, du chant, etc. On s’est inspiré de l’unité locale de Bayonne, et du Secours Catholique qui mettent à disposition un atelier d'art aux personnes à la rue, pour qu’elles viennent s’exprimer. Tous les ans, ils organisent une exposition avec les œuvres produites

 

Comment se déroulent vos parcours ?

Notre objectif est de ramener les bénéficiaires dans le droit commun en cinq mois. À partir du repérage, puis la remobilisation et l’accompagnement, nos parcours vont de trois à six mois, en entrées sortie permanentes. Nous devons avant tout les sécuriser sur le plan administratif, avant de passer à la phase de remobilisation et d’accompagnement.  Il nous arrive de faire les deux à la fois, mais c’est toujours au cas par cas, chaque personne est différente, avance à son propre rythme. Quelqu'un qui a connu la rue pendant des années, on ne le remobilise pas en un coup de baguette magique. Il faut du temps, cinq mois c'est très court, même si c’est toujours ça de gagné pour rebondir. En revanche, on n’aura pas la possibilité de faire des parcours d’un an et plus. Au bout de six mois, on échange avec France Travail pour savoir si on maintient ou pas une partie de notre accompagnement. Si on ne va pas au bout, il y a le risque de revenir à la case départ.

 

À quel moment parlez-vous projet professionnel ?

Le premier jour quand on les reçoit, on leur présente le dispositif et on leur demande s’ils ont un projet professionnel. Mais surtout, on commence par leur demander ce qu'ils ont fait par le passé. Et on arrive petit à petit au projet professionnel. Il faut rester dans la souplesse, ne pas heurter, accompagner la personne jusqu'à ce qu'elle trouve sa posture et ce qu'elle veut réellement faire. Sans pour autant l’influencer en lui faisant des propositions. On lui laisse le temps de prendre ses marques.

 

Quelles sont les perspectives d’un tel projet ?

Il est très enthousiasmant de chercher à raccrocher des personnes qui en expriment le besoin. Pour autant, il peut y avoir quelques points de vigilance dans l’action. Le premier, c'est qu’il nous semble que des dispositifs similaires ont été portés ou restent portés par d’autres associations, et ça peut créer de la confusion sur le territoire et chez les personnes. Ensuite, chercher des “invisibles” en milieu rural est très complexe. Le troisième point, c'est un besoin de renforcer la communication avec France Travail, pour vérifier l'éligibilité des publics et la transmission des situations en fin de parcours O2R. Il y a un risque de doublon qui peut avoir comme incidence de perdre les personnes remobilisées.

 

Selon vous, que faudrait-il améliorer dans le dispositif ?

Vraisemblablement avoir davantage de souplesse dans la durée du parcours et la relation avec les institutions de droit commun qui prennent le relais. Pour certaines personnes, ça peut aller très vite, pour d’autres beaucoup moins, quand ils ont des grosses problématiques, des faibles moyens financiers, ou une mauvaise maîtrise du français… Avec les bénévoles, on a mis en place beaucoup de choses pour accélérer le rythme, mais ça n’est jamais suffisant. Il faudrait pouvoir mettre en place des parcours plus longs

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs de l'AMI O2R et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

 

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PHC, l’insertion en mode progressif

PHC, l’insertion en mode progressif | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Inser’Net est un chantier d'insertion situé à Bordeaux, qui accueille principalement des personnes sans domicile. En 2006, la mairie de Bordeaux lui a demandé de travailler à une réponse aux problématiques de la non-domiciliation. Dans ce cadre, la SIAE a accompagné un salarié qui plusieurs années après son accompagnement a travaillé comme pair aidant pour l’association laïque Le Prado. Cette dernière a par ailleurs été contactée par l’association Convergence qui voulait trouver une structure d'insertion en Gironde afin de mettre en place un dispositif « Premières Heures en Chantier » (PHC).

 

C’est donc de proche en proche qu’Inser’Net Le chantier s’est emparé de ce dispositif. « Nous étions intéressés, notamment pour une raison un peu particulière », ajoute Frédéric Peyrou, « Il existait déjà le dispositif Tapaj, né d’une réflexion menée avec le CEID, qui a développé le projet. On s'était rendu compte qu'en fait il manquait une marche avant les chantiers d'insertion pour les publics les plus en difficulté. Quand PHC nous a sollicité, on s'est dit que c’était la même marche que Tapaj, mais pour les plus de 25 ans. Pour nous c'était assez simple d'intégrer ce dispositif. »

 

Dans le cadre de PHC, la clé d'entrée prioritaire, voulue par Convergence, c'est d'être sans domicile. Il s’agit de s’adresser vraiment aux personnes qui dorment sous la tente, dans leur voiture ou dans les parkings. « On ne connaissait pas du tout le dispositif. Les publics sans domicile, nous les connaissons déjà, mais effectivement on sait que leur accompagnement est long. Le public qu’on accueille historiquement, on va lui permettre de passer par ce sas avant l'intégration dans un chantier pour solidifier un peu les démarches, essayer de mettre en place des parcours plus réussis. »

 

Un accueil inconditionnel

 

Le cahier des charges PHC comprend peu de consignes et de critères à respecter. Tout d’abord, l’accueil inconditionnel des personnes sans domicile, quel que soit leur état ou leur situation du point de vue de la justice, de l'addiction. Aucun entretien de recrutement, mais un positionnement par un travailleur social avant d’intégrer le dispositif. Enfin, il ne faut pas associer PHC à des impératifs de production et des bénéfices commerciaux. En termes d'horaires de travail, le minimum est fixé à quatre heures, mais il est possible d’aller au-delà. Pour le reste, les structures sont assez libres de fixer les emplois du temps, les locaux, l’intégration avec les salariés en parcours, etc.  

 

Dans la pratique, Inser’Net Le chantier organise une rencontre avec le travailleur social et le futur salarié. On lui présente la structure, la nature du travail, le dispositif PHC, etc. On aborde avec lui sa situation et ses difficultés afin, si nécessaire, d’adapter un peu le travail. « Le premier que nous avons embauché était en situation de forte addiction à l'alcool. Il a fallu adapter les conditions de travail et le contexte de l’activité pour lui permettre de travailler. »

 

Autre obligation du dispositif, l'accompagnement social et professionnel reste de la responsabilité du travailleur social qui accompagne la personne avant sa reprise d'emploi. Contrairement au cadre habituel d’un ACI qui se charge de cet accompagnement. Ainsi, en cas de rupture dans le travail, l’accompagnement social se poursuit. Si une personne se présente spontanément, elle sera renvoyée vers le CCAS ou la MDS afin de lui trouver un travailleur social référent, condition nécessaire pour l'embaucher sur PHC. Insert’Net Le Chantier peut ponctuellement aider un prescripteur à lever des freins en matière de logement par exemple, puisque la structure a une vraie compétence sur ce point.

 

Pour le repérage des publics, Inser’Net Le Chantier a relancé ses partenaires habituels afin de leur présenter le nouveau dispositif, de manière qu’ils orientent des publics qu’ils ne nous adressaient pas d’habitude en raison du nombre d’heures trop important d’un contrat d’insertion classique. La principale difficulté rencontrée concerne le public féminin, que PHC peine à attirer, parce que les femmes à la rue sont très difficiles à capter. D’où la nécessité d’entrer en contact avec les structures spécialisées comme les associations Toutes à l'abri, Promofemmes, ou le CIDFF.

 

« Pour l’instant sur PHC, nous avons 80% ou 85% de public masculin. Sur le reste de nos activités on est sur une proportion de 35% de femmes. On aimerait bien mixer un peu plus. Par ailleurs, la moitié de nos effectifs ne parlent pas français. Beaucoup d’Afghans, de Bulgares, d’Africains anglophones. On accueille tous les gens qui veulent travailler. Depuis quatre ans, un organisme de formation en FLE vient dans nos locaux deux demi-journées par semaine pour dispenser des cours de français à nos salariés sur leurs heures de travail. »

 

Autre principe de PHC, c’est qu’il ne devrait pas dégager de rentabilité, donc ne pas faire de production. Mais les ACI ont un modèle économique hybride, basé en partie sur des subventions, en partie sur une production qui rapporte de l'argent. « Les salariés PHC ne sont pas soumis à des obligations de production. Cela nous permet de construire un contexte de travail accessible à tous. On maintient néanmoins l'idée que les salariés PHC ont la capacité de dégager du chiffre d’affaires. Notre organisation repose sur des interventions utiles, ce ne sont pas des activités occupationnelles. Aujourd'hui, les salariés PHC peuvent assurer une partie de la production des équipes du chantier, ce qui leur permet d’alléger l’activité de ces dernières. »

 

Des salariés presque comme les autres

 

Les salariés PHC embauchent à la même heure que les autres salariés, dans les mêmes locaux, ils ont la même salle de repos. En cas d’absentéisme dans les équipes du chantier, ils peuvent y être intégrés. Potentiellement, tout le monde intervient avec tout le monde, sur les mêmes sites, avec les mêmes responsabilités. Avec cependant, des contrats plus légers pour les salariés PHC qui débutent à quatre heures hebdomadaires, puis dix, puis quinze. Ils ne sont pas présents tous les jours, mais ils ont la capacité de travailler avec les autres équipes.

 

Dans le jargon de l'insertion par l'activité économique on parle d'encadrement technique d'activité d'insertion par l'économie. Dans le cadre de PHC on parle plutôt d'éducateurs socioprofessionnels. L’encadrant technique dans l’IAE et sur PHC est en quelque sorte un mouton à cinq pattes. Pour Insert’Net, c’est une seule et même personne qui porte la responsabilité de l'encadrement de l'équipe et assure le lien avec les partenaires sociaux et prescripteurs. Cette éducatrice leur signale certaines difficultés, pour un public par nature assez volatil. « Nous abordons les choses de façon assez simple. On lui demande surtout de créer une dynamique positive, de faire en sorte que les gens soient contents de venir travailler. Sinon, on délègue beaucoup la partie sociale, soit aux prescripteurs, soit à nos équipes d'accompagnement socioprofessionnel. »

 

Le principal objectif du dispositif PHC est la résolution des problèmes. En cas de situations d'addiction, par exemple, cela consiste à mettre en place un parcours de soins. On essaie de solutionner les freins liés au logement et à la mobilité, qui empêchent la reprise d'une activité professionnelle. L’objectif n’est pas simplement l’emploi. Le but est de diagnostiquer les problèmes et de les solutionner pour permettre à la personne d'avancer.

 

Toutes les structures d’insertion peuvent a priori porter le dispositif PHC, puisqu’elles disposent en interne d’encadrants techniques d'insertion qui ont l'habitude de travailler avec des publics en situation précaire, aux comportements parfois un peu inadaptés ou une socialisation approximative. Cela dit, il faut avoir la capacité d'expliquer à tous les salariés en insertion que PHC est un dispositif un peu spécifique, avec des conditions d'accueil et de tolérance un peu particulières. « Par exemple, j’ai une tolérance très individualisée en ce qui concerne les absences. Je suis moins souple pour une absence de quelqu'un qui a un logement, qu’avec quelqu’un vivant sous une tente et qui va rater dix jours d'affilée quand il fait 45 degrés dehors… »

 

Vient ensuite la question de la pression économique. Une structure qui connait des difficultés financières et qui a déjà du mal à faire tourner ses effectifs n’a pas vraiment intérêt à envisager un PHC. « Ça peut vite devenir un caillou gênant. Mais une structure qui a bien les compétences et les capacités pour appuyer ce type de dispositif peut se lancer sans problème. De mon point de vue, ces public spécifiques ne sont pas beaucoup plus compliqués que les autres. Ils impliquent des accompagnements plus longs, parce que les difficultés sont parfois plus ancrées. Mais ce ne sont pas des gens qui ont des comportements particulièrement problématiques. »

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Apporter du REVES

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L’APEJ nait à Cognac en1986. Elle a déployé ses actions sur Cognac et l’ouest Charente jusqu’en 2008, date à laquelle la DDTEFP de Charente Maritime lui demande d’intervenir en tant qu’Atelier de Pédagogie Personnalisé (APP) sur le territoire de Saintes. En 2024, l’association répond à l’AMI O2R avec son projet « REVES », pour « Remobilisation Vers l'Emploi et la Socialisation. Enrico Malloci, adjoint de direction, supervise le consortium constitué à cette occasion.

 

D’où vient votre projet REVES ?

Avant O2R, nous avions créé une action expérimentale « Inter’actions » (voir notre article du 10 avril 2024). En 2024, on a accompagné à peu près 50 personnes sur Saintes, repérées avec les acteurs du SPE mais aussi tous les partenaires du territoire, l'épicerie sociale, les élus, etc. on a mis dans la boucle tout le monde et on a réussi à capter des personnes vraiment isolées qui aujourd'hui, grâce à cet engagement progressif basé sur leurs centres d'intérêt, ont construit des projets. Nous avons eu des résultats spectaculaires de retour à l'emploi, d’entrée en formation, de retour à la vie normale. Le cahier des charges de l’appel à manifestation O2R portait sur des axes que nous avions mis en place dans Inter’Actions, et forts des résultats de ce dernier, nous avons pensé à la mise en œuvre d’un dispositif similaire tout en tenant compte des spécificités d’O2R. 

 

Quelle est la nature de votre proposition ?

Avec l'appel à manifestation O2R, l'Etat souhaitait mettre en œuvre un dispositif qui réponde parfaitement aux contraintes et aux exigences des publics très éloignés de l’insertion sociale et professionnelle. L’APEJ, ainsi que toutes les structures du consortium, chacune avec ses spécificités, ont dans leurs missions de toujours accompagner les publics très fragiles, notamment les bénéficiaires du RSA. Nous connaissons bien leurs problématiques d'isolement, leurs freins multiples, leurs difficultés à se projeter et à aller de l'avant. On s'est positionné tout naturellement sur la Charente pour aller plus loin, pour aller chercher des invisibles, des personnes vraiment isolées qui ne sont pas forcément connues des acteurs institutionnels. Sur la Charente-Maritime, nous étions engagés sur le dispositif CEJ-JR jusqu’à la fin de l'année 2024. Pour nous c’était assez naturel de répondre à O2R, on a historiquement assuré les missions préconisées, c'est-à-dire le repérage, l'engagement progressif des personnes à partir de leurs centres d'intérêt, l’accompagnement individualisé de chaque bénéficiaire, tenant compte des spécificités de chacun.

 

Comment abordez-vous le repérage ?

Le repérage est l’étape essentielle pour le fonctionnement du dispositif O2R. Pour que le repérage soit efficace, il est essentiel que les structures soient fortement ancrées sur chaque territoire. Il est important de bien connaître son territoire d’action, ses atouts, ses problématiques, ses acteurs. Ainsi que de vivre son territoire, sa ville, d’interagir en complémentarité avec les autres acteurs. Ces éléments sont à la base d’une action de repérage réussie. Nous devons aller à la rencontre des publics les plus fragiles. C’est d’ailleurs une des spécificités de ce dispositif qui fonctionne en coopération du SPE, mais qui ne s’appuie que de manière sporadique sur la prescription directe. À cette étape le hors les murs est fondamental. Nous allons à la recherche, à la rencontre des personnes dans les lieux qui sont les leurs. On ne va pas forcément leur proposer un rendez-vous dans nos locaux. Certaines personnes isolées, loin de l’insertion, n'ont pas toujours confiance dans les institutions. Même faire un pas vers un organisme de formation, rentrer dans un bureau, peut être très compliqué. On peut ainsi leur proposer une rencontre au centre social, à la maison France service, au PMU du coin, au café solidaire, etc. L'idée est tout d’abord d’établir une vraie relation de confiance avec le futur bénéficiaire, faire en sorte que la personne se sente tout d’abord écoutée, qu’elle ne se sente pas piégée. Cela peut prendre quelques mois. Une fois cette relation de confiance est établie, bien souvent la personne va s'engager progressivement. Elle va commencer par exemple par une demi-journée par semaine, puis deux, et au bout de trois mois, elle viendra peut-être tous les jours. Les bénéficiaires apprécient d’avoir cette souplesse dans l’accompagnement. Nous essayons de leur proposer une prestation qui leur convienne, on cherche véritablement à ce que RE.V.E.S. leur apporte du rêve.

 

Quel est le rôle des partenaires de votre consortium ?

L’APEJ a comme valeur historique de travailler en complémentarité des autres acteurs du territoire dans la formation et dans l’accompagnement des publics. Il faut préciser que les publics ne nous appartiennent pas. Ils se trouvent sur des territoires où agissent différents organismes, chacun avec leurs compétences et leurs actions propres. Nous sommes là pour travailler en complémentarité, sans quoi rien ne peut se faire. L’ADN de l’APEJ n’est pas de travailler seule, mais avec des acteurs fiables, qui s'impliquent dans d’autres domaines et qui portent aussi des actions différentes et complémentaires des nôtres. La formation et l'accompagnement à l'insertion sociale et professionnelle sont nos principales missions. La remobilisation et l’accompagnement à l’insertion des publics sont parmi nos activités principales. Du fait de notre ancrage, nous sommes identifiés sur le territoire ce qui nous permet de capter des publics en difficulté et isolés. Pour le repérage nous nous appuyons également sur notre réseau, nous sollicitons les partenaires pour aller à la rencontre des publics qui ne sont pas connus.

 

L’APEJ porte le consortium O2R pour RE.V.E.S. Ce consortium compte plusieurs partenaires : l’organisme de formation Hommes et Savoirs, la fondation des Diaconesses de Reuilly, le centre social de Marne-Yeuse, l’association Saint Fiacre. Ainsi que Tremplin 17 qui assure le volet repérage. Les autres opérateurs interviennent sur les volets remobilisation et accompagnement à la levée des freins dans un premier temps et vers l’insertion sociale et professionnelle par la suite.

 

A quel moment faites-vous entrer une personne dans la remobilisation ?

Dans la phase où la personne n'a pas encore signé de contrat avec nous, elle peut déjà participer à des ateliers de remobilisation. Ce qui peut contribuer à son engagement durable. En quelque sorte, on est en même temps sur la phase repérage et sur la phase de remobilisation. Au début, le plus important est qu’elle trouve des objectifs pour sortir de chez elle, qu’elle ose passer la porte pour rencontrer d’autres personnes, qu’elle participe à un atelier, en informatique par exemple. Participer à un atelier collectif peut ne pas être simple. Formaliser ses difficultés, se mesurer au regard de l’autre, peuvent être sources d’appréhension.  Mais finalement, en participant à un atelier la personne pourra se rendre compte qu’elle n’est pas seule à rencontrer des difficultés, que l’animateur ne juge pas, qu’il est dans une posture d’écoute et de bienveillance. On commence à identifier ses propres compétences, à les valoriser. Depuis 2019, nous avons aussi développé des badges numériques. Grâce à des ateliers de pratique réflexive où l’on analyse les activités que les personnes réalisent dans le cadre des ateliers de remobilisation, on travaille à l’identification des compétences. Le but est d’emmener la personne à prendre du recul, à se « regarder pédaler » à observer toutes les compétences qu’elle mobilise. À travers la constitution de dossiers de preuves, selon la forme qu’elle préfère, (écrits, photos, vidéos, un poème, etc.) la personne valide un badge, qui certifie les compétences de plus en plus complexes qu’elle a mobilisées. L’estime et la confiance sont boostées et la personne s’engage alors progressivement sur des parcours plus intenses et longs et commence à se projeter sur son avenir.

 

Faut-il comprendre que vous ne cherchez pas forcément à distinguer les différentes phases ?

Il faut qu'on soit souple, on sait qu’on va devoir s'adapter. Un groupe est fait d'individus totalement différents. La dynamique collective peut être très bonne à un moment, et redescendre à un autre. On doit avoir un plan B, même un plan Z. Deux personnes ne font pas le même parcours, n'ont pas les mêmes problématiques, les mêmes objectifs, les mêmes centres d'intérêt, le même engagement de départ. Chacune a ses spécificités, on ne va pas leur proposer de suivre le même programme.

 

Quels sont vos outils de remobilisation ?

Nous avons des ateliers collectifs de diverses sortes. Ceux qui existent déjà sur le territoire, ceux qu’on propose en interne. On peut aussi créer des projets ad hoc parce que on s'appuie sur la volonté et sur les centres d'intérêts des personnes. Certains publics en grande difficulté, n'ont souvent jamais passé le seuil d'un cinéma, d’un concert ou d'un théâtre, de peur de ne pas se sentir légitimes, ils se disent que ça n’est pas pour eux. Je pense qu’il faut agir sur ces leviers-là, pour que les personnes s'épanouissent et qu’elles vivent leur existence.

 

La seule solution est-ce de faire du cas par cas ?

Dans la remobilisation, il y a une partie d’entretien individuel. Mais on ne s'est jamais passé de la dimension collective, c'est le principe même de l’APP. On sait que participer à un collectif peut être angoissant. Cette inquiétude ne passe jamais pour certains, et n’est qu’une phase initiale pour d'autres, malgré leurs freins. Il ne faut pas forcer les étapes, l'engagement est progressif. Il faut prendre le temps de présenter la démarche, créer des liens de confiance et attendre que la personne soit prête à entrer dans un parcours complet. Lors des entretiens, on peut voir des signes. Par exemple, quand une personne, au bout de quelques rendez-vous, prend soin de sa tenue vestimentaire, de sa coiffure, ce sont des signes déterminants, autant que les mots qu’elle peut nous confier. C’est le signe d’une reprise de l’estime de soi. C'est se valoriser, dire j'existe, je suis là.

 

Vous avez une sorte de programme commun entre structures ?

On peut retrouver certains ateliers dans différents territoires du consortium. Mais nous n’avons pas de programmation commune. Cela dit, elle pourrait être envisageable. Par exemple, un atelier proposé par l’APEJ sur un territoire pourrait être mutualisé sur un autre territoire. Chacun effectue également son accompagnement en fonction de son expérience, de ses compétences, de son approche. L’accompagnement individualisé est notre base commune.

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs de l'AMI O2R et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

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Aux racines de l'insertion

Aux racines de l'insertion | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

L’Association Lieux Accueil Insertion Jardins Environnement (Alaije) est située à Brantôme en Périgord (Dordogne), dont Fabrice Suau est le directeur. Elle compte notamment le « jardin botanique d’insertion », un atelier chantier d’insertion (ACI). En 2024, elle a présenté un dossier à l’AMI O2R, pour le compte d’un consortium regroupant d’autres structures d’insertion du département. Annabelle Bravin est accompagnatrice socio-professionnelle et référente du dispositif baptisé « Mobilis'actions. »

 

Quelle est l’origine de Mobilis’actions ?

Nous faisons partie du Collectif Relais Insertion Dordogne (CO.R.I.DOR). On a l’habitude de se rencontrer régulièrement pour mettre en place des projets communs. L’ami O2R a été évoqué lors d’une de ces réunions, et plusieurs structures du collectif se sont montrées intéressées, puisque cela correspondait à des missions connexes à nos métiers. Nous avions des compétences et des savoir-faire, comme l’AFAC 24 qui menait déjà un projet similaire auprès des jeunes. On trouvait pertinent de nous engager dans ce projet pour aller toucher ces publics profil O2R, pour lesquels nous n’avions pas de solutions parce qu’ils n’étaient pas disponibles immédiatement pour un contrat d’insertion. On ne disposait pas d’une sorte de sas pour les accompagner.

 

Vous voulez dire que vous avez dû vous adapter à de nouveaux profils ?

Notre réponse se base sur des publics dont la particularité est qu’ils ne sont pas inscrits à France Travail, ni bénéficiaires du RSA. Donc d’ores et déjà, ils ne peuvent pas, en principe, être orientés chez nous. On voulait pouvoir intégrer ces personnes en fonction de leur projet. À la marge, certaines pourraient correspondre à nos profils d’ACI, mais globalement la majorité des gens que nous visons ne sont pas prêts à intégrer une structure d’insertion. Ils ont besoin d’une phase de remobilisation et de levée des freins, avant de signer un contrat.

 

Comment avez-vous abordé le repérage ?

Nous ne faisions pas du tout de repérage au sein de notre atelier chantier d’insertion. On n’allait pas chercher les salariés, puisqu’ils nous étaient orientés. Quelques candidatures spontanées nous étaient adressées, des profils non-inscrits, que l’on redirigeait vers le service public de l’emploi. Avec O2R, pour mener notre repérage, nous avons commencé par créer des supports de communication communs au consortium, pour expliquer ce qu’on proposait en matière de remobilisation et d’accompagnement. Nous avons présenté le dispositif à des partenaires qui pouvaient avoir ce type de public dans leurs effectifs, que ce soient des assistantes sociales, des communes, des associations caritatives, des centres sociaux, des accueils jeunes, des missions locales, etc.

 

Quelle est votre approche ?

Notre stratégie est plutôt basée sur les partenaires. Nous partons du principe que la relation existe déjà entre eux et leurs usagers, nous ne voulons pas nécessairement interférer. Notre souhait, c’est que le partenaire comprenne bien l’enjeu du dispositif, transmette l’information et, si possible, travaille l’adhésion de l’usager. Nous intervenons ensuite pour proposer une rencontre dans un lieu adapté, le site d’une association, un centre social, etc. Nous pensons que ça a beaucoup plus de sens de passer par la relation en cours. Dans le principe, nous préférons que ce soit la personne qui vienne vers nous, et nous nous rendons disponible pour elle. 

 

Où se déroulent vos entretiens ?

Dans un lieu neutre, une association, mais ça peut aussi être dans nos locaux. Si nécessaire, on peut aller chercher les gens chez eux. Chaque structure effectue son propre repérage. On est répartis géographiquement, sur l’ensemble de la Dordogne, on est assez éloignés les uns des autres et donc on repère sur nos territoires respectifs. Chacun gère toutes les actions sur son territoire. On partage des outils, on a des échanges, mais après chaque pro a son approche, sa méthode et gère toutes ses actions sur son territoire. Il faut surtout que ça ait du sens pour les bénéficiaires, qu’ils soient reçus par un intervenant de proximité.

 

Avez-vous des limites en matière de durée du repérage ?

Au bout de six mois de déploiement, nous n’avons pas assez de recul. Pour certains nous savons que ça peut prendre du temps, mais que potentiellement ils nous recontacteront. C’est à eux de prendre la décision. Si nous n’avons pas de nouvelles, nous les relancerons sans doute. Le plus important est de poursuivre la mise en confiance, rassurer la personne, se voir sur un autre lieu, susciter son adhésion. Il faut lui laisser le temps de maturer, on essaie d’apprécier ça en fonction de la personne.

 

Comment se fait l’accueil dans le dispositif ?

Une personne est dans le dispositif à partir du moment où il y a eu contractualisation officielle. Au début on a tâtonné parce qu’on devait composer avec des problématiques administratives O2R. Maintenant on essaie de signer avec la personne aussi rapidement que possible, après deux ou trois rendez-vous. On lui demande de se rendre disponible sur des temps réguliers, c’est la première étape. Et de se contraindre à participer à des temps collectifs coconstruits, sur la base de leurs centres d’intérêt. On essaie de faire le lien avec nos supports. S’il n’y en a pas, on propose des activités entièrement différentes.

 

Vous organisez des temps collectifs ?

Certaines structures du consortium organisent déjà des ateliers de remobilisation, elles possèdent ce savoir-faire. Ce n’est pas quelque chose qui nous est inconnu. Pour l’instant, on n’a pas eu besoin de solliciter de partenaires extérieurs. Nous proposons des temps d’ateliers communs en regroupant plusieurs bénéficiaires, sans leur imposer. Il nous paraît difficile de réfléchir à un fonctionnement de groupe sur la durée du parcours, on ne cherche pas à créer une dynamique de promo. Et compte tenu du rythme des entrées sorties, on ne peut pas juger du nombre de personnes que nous aurons à un moment donné. Le principe d’un suivi individuel, avec ponctuellement des temps collectifs, pour l’instant c’est la formule la plus adaptée.

 

Ces temps ne pourraient-ils pas être organisés au niveau du consortium ?

Avec les acteurs du territoire, on s’est questionné sur la mise en commun des ateliers de remobilisation, en fonction de ce que chacun sait faire, des besoins des gens. Mais en pratique les temps collectifs communs sont difficiles à imaginer, notamment à cause des distances. Entre Bergerac et nous, c’est un heure quinze de route. À terme, ce sont des choses qui vont peut-être émerger, nous pourrons nous appuyer sur des compétences très spécifiques de certaines structures, comme la médiation équine chez APES 24. On pourra peut-être constituer des groupes à l’échelle du département.

 

Qu’en est-il de la remobilisation ?

Pour nous, tout est remobilisation. À partir du moment où la personne vient aux premiers entretiens, elle est déjà dans la remobilisation et l’accompagnement. Même si on se rencontre pour parler d’un problème administratif. Dans notre méthodologie, on travaille tout à la fois, la levée des freins, les difficultés de santé, administratives, de logement, de mobilité. Et, en parallèle, on fait des activités ensemble. Si on voit que parler d’emploi trop vite risque de faire perdre la relation, on va un peu décaler. Si on peut réduire la durée globale d’accompagnement, ça nous permettra de recevoir plus de personnes.

 

Est-ce que vous cherchez à faire passer les bénéficiaires par vos structures d’insertion ?

Ça dépendra des cas. Pour certains, il nous semble nécessaire de profiter de cette continuité d’accompagnement que propose un chantier ou une entreprise d’insertion. Cela peut être un moyen de poursuivre la levée des freins si elle n’a pas été complétée. Et aussi de s’assurer que les personnes peuvent être à l’heure, respectent des consignes, admettent l’autorité, en travaillant ces aspects en interne pour que la personne soit la plus employable possible à l’avenir. Pour ces publics, passer d’une inactivité longue à un rythme à 35 heures, c’est compliqué. Donc le passage en SIAE permet de temporiser, et sécuriser le parcours. Mais ça ne sera pas le cas pour tout le monde.

 

Quels sont les objectifs que vous vous êtes fixés ?

Pour Alaije, on vise des volumes d’accompagnement modestes, un objectif de quatre accompagnements par an. Pour l’ensemble du consortium, on est pour l’instant sur une dizaine d’accompagnements. La remobilisation et l’accompagnement se font étape par étape, en visant la levée d’un frein en particulier, en sollicitant un partenaire hors consortium qui peut nous aider à le faire, un centre social ou autre. C’est un peu la culture que nous avons déjà avec l’ACI. On traite tout ce qui entre dans nos compétences, et dès que c’est plus de notre ressort, on oriente vers des partenaires. Ce qui nous guide dans tous les cas, c’est l’intérêt de la personne.

 

Depuis le démarrage du dispositif, avez-vous eu des surprises ?

La plupart des retours des partenaires sont positifs. C’était un peu un pari, on se demandait si on allait pouvoir repérer et capter des profils. Et si on allait pouvoir les faire adhérer à la démarche. Mais les retours sont bons, parce que ça répond à un vrai besoin.  La dimension rémunération ajoute beaucoup à la balance aussi. Sur les personnes rencontrées, au moins la moitié ont des pathologies, des difficultés cognitives, des troubles du neuro développement, ou des psycho pathologies, on ne s’y attendait pas spécialement. C’est un vrai handicap pour l’accès à l’emploi, parce que ce sont des gens très perturbés. Mais notre constat reste parcellaire, compte tenu du nombre limité de gens repérés et de ceux qui sont entrés en accompagnement.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs de l'AMI O2R et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

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Stabiliser les situations

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Le réseau creusois des structures d'insertion par l'activité économique (RCSIAE) est né en 2009 de la volonté de créer du lien entre les chantiers d'insertion du territoire. Il regroupe 22 structures, majoritairement des ateliers et chantiers d'insertion. L’association RCSIAE porte elle-même quatre chantiers. Le réseau a été retenu par l’AMI O2R pour développer une action sur l’ensemble du département.

 

Hélène Guillou vous êtes chargée de mission au RCSIAE. Pourquoi avoir répondu à O2R ?

La question des publics invisibles n’est pas nouvelle pour nous, parce que nous les voyons arriver ponctuellement sur les chantiers d'insertion, sans repérage particulier. De plus, nous avons au sein de nos directions des collègues qui travaillent dans le milieu d'insertion depuis un grand nombre d'années, qui sont en contact de ces publics, ou qui ont l'occasion de les croiser dans des cadres autres que professionnels. Il s’agit de personnes sans ressources, hors de tout radar, pas du tout à jour administrativement parlant, suivies ni par France Travail, ni par le conseil départemental. O2R était l'occasion de travailler sur leur accompagnement et les amener vers un emploi en chantier d'insertion.

 

Mais pour intégrer une SIAE, les personnes ne doivent-elles pas être employables immédiatement ?

Toutes les structures d'insertion doivent assurer leur seuil de productivité, il leur faut un minimum de salariés en capacité de travailler. Là, on a affaire à des personnes qui ont tellement de freins que même une entrée en chantier d'insertion est compliquée. Au fur et à mesure des années, nous constatons que les publics deviennent de plus en plus précaires. A la fois des plus jeunes et des plus âgés, aux deux extrémités. Du point de vue des conseillers, cela devient compliqué de travailler sur le projet professionnel, parce qu'il y a beaucoup de difficultés d'ordre social à régler en amont. En Creuse nous faisons partie des territoires qui expérimentent le RSA sous condition depuis deux ans, certaines personnes isolées ont pu entrer dans une certaine forme d'accompagnement.

 

Que vous a permis O2R ?

Grâce à O2R, nous avons pu allouer des moyens supplémentaires, recruter une nouvelle conseillère, mettre en place des actions et aller à la rencontre de ces publics. L'accompagnement que nous avons envisagé n'est pas complètement révolutionnaire, il fonctionne sur le même principe que pour nos chantiers d'insertion, à cela près que notre conseillère se déplace tout le territoire et qu'elle a plus de temps pour accompagner chaque personne. Notre idée à la base était de privilégier la ruralité, ne pas axer sur les villes parce qu’il y a déjà des structures qui effectuent ce travail.  Il y a aussi cette phase de repérage qu'on n'avait pas sur les chantiers d'insertion.

 

Comment avez-vous mis en place votre projet ?

Pour la phase de repérage, on a mené un travail de communication à base d’affiches et de dépliants. On a pris contact avec les partenaires du territoire pour leur présenter l’action. Nous avons fait des interventions devant des conseils communautaires pour que les élus relaient l’information auprès de la population et qu’ils identifient des personnes en situation compliquée. Nous avons également rencontré des acteurs de la santé, les prescripteurs classiques, les assistantes sociales du conseil départemental, les tiers lieux, différentes associations, les centres d'hébergement d'urgence, etc. Nous n’avons pas mis en place de porte-à-porte, qui est impossible géographiquement parlant parce que notre choix était d'accompagner des personnes sur toute la Creuse. On ne va pas jusqu'au domicile mais on essaie de s’approcher au plus près, par exemple en se faisant prêter un bureau ou une salle par la mairie du village.

 

Quelle a été la réaction des partenaires ou relais ?

Nous avons fait notre tour des partenaires au premier trimestre. Ceux qui nous ont répondu étaient plutôt intéressés, comme les associations caritatives. Le projet leur parlait et ils nous ont dit pouvoir nous diriger des gens. Ceux qui n’ont pas répondu, c’est sans doute parce qu’ils ne voyaient pas forcément quel rôle jouer. Ceux dont l’accompagnement n’est pas la vocation première, comme les tiers lieux. Ils voient passer du monde, mais pour autant ils ne se disent pas forcément qu'ils ont vocation à réorienter ou à s'immiscer dans la vie de ces personnes. On a eu les deux réactions, ceux qui pensent qu’il y a un besoin sur le territoire et ceux qui se demandent s’il n’y a pas une redondance dans les propositions d'accompagnement. Notre intérêt c'est justement d’éviter cet effet, on veut agir en complémentarité.

 

Rebecca Biro, vous êtes la conseillère en insertion professionnelle en charge de l’action. Comment abordez-vous ce public ?

En général, ce sont les bénéficiaires qui nous contactent eux-mêmes. C’est une donnée vraiment importante puisqu’elle révèle une attitude volontaire chez ces personnes. En quelque sorte, elles sont déjà d’emblée dans la remobilisation. Elles ont surtout besoin de trouver quelqu'un qui va leur consacrer plus de temps, les écouter, leur accorder plus de considération que dans les structures existantes. Le fait pour moi d'avoir plus de temps, plus de moyens pour me déplacer au plus près des gens, ça compte vraiment. Si c'est le bénéficiaire qui appelle, la démarche est plus facile pour lui comme pour moi. Pour l’instant, je n’ai pas eu affaire à de vrais invisibles, plutôt des gens déjà accompagnés, mais souvent peu suivis à cause de la distance géographique ou du manque de temps des conseillers.  

 

Comment menez-vous le repérage ?

En général je sens bien au premier entretien si la personne a envie de s'engager dans l'accompagnement. Le premier rendez-vous permet d’établir un état des lieux des recherches, de dresser la liste des choses à faire. Je reprends contact à partir du moment où j'ai quelque chose pour avancer sur le dossier. Pour moi ça s'enclenche assez rapidement. Si en plus la personne m'a contacté par elle-même, qu’elle a la volonté d'avancer, tout s'enchaîne assez vite finalement on se revoit dans les deux semaines qui suivent le premier rendez-vous, pour leur décrire en quoi consiste l'accompagnement. Le suivi se fait aussi par téléphone ou par courriel.

 

Avez-vous rencontré des situations où vous pensiez que tout accompagnement serait impossible ?

Je suis de nature optimiste et pour moi on peut toujours aller vers une solution. On a des durées d'accompagnement de six ou neuf mois, et quand j'arriverai au terme de cette durée, la question pourra se poser. Est-ce que je peux être encore utile à la personne ou pas ? Á mon avis il faut quand même persévérer parce que on est confronté à des personnes qui se sentent un peu abandonnées et sont tentées de baisser les bras. Mon rôle est de les remotiver, leur redonner confiance en eux. Pour l'instant je n’ai pas eu de cas extrême qui aurait nécessité de renoncer à l'accompagnement.

 

Que proposez-vous pour la remobilisation ?

La remobilisation a été pensée de manière transversale, c'est-à-dire qu'elle commence dès la phase de repérage. Et elle reste en arrière-plan en permanence. Cette phase consiste déjà à faire le point avec la personne sur ses projets, vérifier s’ils sont en adéquation avec ses compétences, son profil, etc. C’est de la veille sur les offres d'emploi les formations proposées, les financements, etc. On se repose sur tous les acteurs du réseau en Creuse et on fait le lien entre les personnes qu'on accompagne et toutes les informations dont on dispose grâce aux autres structures. On ne crée pas d'actions spécifiques, mais on a la connaissance de tous les ateliers existants sur le territoire. Ensuite on oriente la personne en fonction de son besoin.

 

En quoi consiste votre accompagnement ?  

En Creuse y a déjà beaucoup de structures qui proposent des animations, l’ERIP, France Travail, le réseau MAP pour la mobilité, certains tiers lieux, les maisons France service, etc. Connaître les besoins en recrutement des chantiers d'insertion est aussi très utile, sachant que les personnes que j'accompagne ont plus de chances de tenir le rythme d’une structure d’insertion que celui d’une entreprise, parce qu’elles sont peu qualifiées, n’ont pas travaillé depuis plusieurs années ou ont connu des parcours professionnels hachés. Le public O2R est encore plus en difficulté. Nous devons déjà résoudre certaines urgences comme le logement et les ressources. En plus, dans une structure d’insertion, elles pourront bénéficier d’une continuité de l'accompagnement pendant vingt-quatre mois, autant sur l'aspect professionnel que social. C’est un filet de sécurité.

 

Considérez-vous que l'entrée dans un chantier d'insertion soit une sortie positive ?

Pour nous c'est une sortie positive dans le sens où, enfin, la personne retrouve un emploi et une rémunération tous les mois. Elle n’est plus en situation de précarité. La case chantier c'est une possibilité, mais pas une fin en soi. On est ouvert à tout ce qui est possible et qui correspond au projet de la personne, formation ou travail. Mais notre objectif est de stabiliser sa situation, pas de la pousser à tout prix vers l’emploi, parce que tout le monde ne peut pas aller en entreprise classique et ne peut pas travailler trente-cinq heures par semaine.

Depuis le lancement de votre dispositif, qu’avez-vous constaté ?

Au début on était parti sur des personnes non inscrites au niveau du SPE. Mais pour l’instant, quasiment toutes les personnes qui ont intégré le dispositif étaient inscrites à France travail. Mais elles peu ou pas suivies parce qu’elles ne peuvent pas se déplacer. Donc on a choisi de les accompagner, parce que certaines n’avaient pas eu de contact avec leurs conseillers depuis un an.

 

On a remarqué qu'il n’y avait aucune femme qui s'orientent vers nous dans le cadre O2R. Je constate aussi beaucoup de problèmes de logement, des gens en hébergement temporaire ou d'urgence, qui peuvent se retrouver à la rue. Ça c'est une problématique que je n’avais pas forcément imaginée. Et aussi des profils des personnes qui sortent de prison, dont la sortie n'a pas été anticipée. Ces personnes n'arrivent pas à se présenter face aux employeurs. Il faut envisager des préparations aux entretiens d'embauche, un travail sur l'image que la personne a d'elle-même et qu'elle va renvoyer aux autres. Cela dit, mon accompagnement reste globalement le même pour tout le monde, même si je l’adapte à chaque profil, je fais vraiment du cas par cas.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs de l'AMI O2R et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

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June 19, 9:13 AM
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Pour un projet durable

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L’Association de Soutien de la Dordogne (ASD 24) de Périgueux lutte contre les exclusions depuis 1974 en déployant une vingtaine d'activités sur le département de la Dordogne, afin d’accompagner chaque année plus d'un millier de personnes. Avec l’association 3S de Coulounieix-Chamiers, dont l’activité est l’insertion par l’activité économique, elle a déposé un dossier à l’AMI O2R, dont elle assure la coordination.

 

Anne Marie Delafontaine, vous êtes responsable du service intégré de l’accueil et de l’orientation (SIAO), quelle était la volonté d’ASD en répondant à O2R ?

Avant O2R, nous étions lauréats du CEJ Rupture. Ce dispositif prend en quelque sorte le relais pour un public élargi au-delà des 18-25 ans. Dans notre réponse, nous avons insisté sur notre connaissance de notre territoire, et des profils en grande précarité. C’est plutôt récent dans nos pratiques professionnelles d'intégrer la dimension emploi. Pendant longtemps, dans le cadre du travail social et de l'intervention sociale, la priorité était de trouver une solution d’hébergement, l’accompagnement un peu plus stable venait après. Il nous semblait évident de répondre à cet AMI, et de nous associer avec d'autres compétences pour être complémentaires.

 

Quelle a été réflexion pour répondre à l’AMI ?

Le premier constat c'est que les personnes avec des problèmes d'hébergement n'accédaient pas à des solutions de formation ou d'emploi. Et lorsqu'elles y accèdent, elles rencontrent des difficultés pour s'y maintenir. Pour avoir un logement, il faut être solvable. C'est un peu le serpent qui se mord la queue. Avec ce public, les problématiques s'additionnent, dans le domaine de la santé, de la santé mentale, des périodes d'errance à la rue, puis en hospitalisation. Et souvent des addictions.

 

Quel est l’apport d’O2R sur le repérage ?  

Jusqu’à la mise en place du dispositif en février dernier, il n’y avait pas de repérage spécifique. A l’ASD, nous pratiquons l’aller-vers depuis longtemps, avec des maraudes pour toucher des personnes qui n'ont plus la capacité ou le désir de se diriger vers des dispositifs de droit commun. Il faut aller les chercher là où elles sont, et pour cela on s’appuie notamment sur notre dispositif de veille sociale et nos lieux d’accueil. Il y aurait quelque chose de vain à partir dans les rues, au petit bonheur la chance, pour espérer repérer des personnes éloignées de l'emploi. Il faut bien, à un moment donné, qu’il y ait un signalement par nos propres dispositifs, par les autres associations et structures du territoire, ou les institutions.

 

Vous accueillez un profil particulier de publics ?

On prend tous types de profils. L’entrée sur le dispositif est seulement conditionnée par le fait de ne pas avoir eu de suivi avec France travail. Dans les ateliers, on est là plus en posture d’animateur et régulateur que de formateur.  On rédige une charte au premier atelier, écrite par les participants, pour établir les règles de vie en collectif et définir un projet commun, comme ne pas se couper la parole, se respecter… On essaie de chercher le meilleur des compétences des uns et des autres, et ce que ça apporte au groupe. Le tout, c'est que chaque personne puisse briller pendant cinq minutes, en quelque sorte vivre leur moment de gloire.

 

Samuel Biaujaud, vous avez été recruté spécifiquement pour ce programme, quel est votre rôle ?

J’interviens sur la phase de repérage, puis celle d'accompagnement individuel. Les personnes me sont orientées et je les rencontre une ou deux fois, afin d'établir un premier diagnostic de leur situation, de recueillir leurs demandes et de vérifier si elles se sentent prêtes à s'investir dans un dispositif avec un suivi individuel régulier. C’est aussi de jauger si elles sont déjà dans une certaine dynamique, surtout pour la remobilisation, avec des ateliers collectifs plusieurs jours par semaine. L'intention de la phase de repérage, c'est d'abord de ne pas mettre les personnes en difficulté, de leur apporter au moins une solution, pas seulement de les rencontrer.

 

Notre enjeu est de ne pas effrayer la personne et de la tenir mobilisée dans le temps. Dans l’idéal, le repérage n’excède pas trois semaines, mais il peut prendre plus de temps pour des personnes qui ne maîtrisent pas le français, ou qui ont des addictions, des troubles de la santé. Nous devons essayer « d’apprivoiser » ce public qui est souvent dans l’évitement.  

 

Comment sont choisis les participants ?

Toutes les deux semaines, nous avons une commission d'admission où je présente les diagnostics, et nous décidons si une personne est prête ou non à intégrer le dispositif. Ensuite, elle s’engage à être présente à chaque entretien ou bien de prévenir en cas d’absence. C’est quelque chose de très simple, mais ça établit un cadre. Durant la phase de suivi individuel, je commence par refaire un point avec la personne sur les questions de mobilité, de logement, de santé. Avant d’entamer les ateliers collectifs, je lui laisse le temps de s’adapter si elle en a besoin. Le but du dispositif, c’est de s’adapter à son rythme. Les participants ne sont pas tous au même niveau en matière d’emploi, selon qu’ils ont eu un parcours professionnel, qu’ils aient connu un accident de vie, un parcours haché, une perte de confiance dans leur capacité à maintenir un emploi. Pour certains, la perspective de l’emploi est encore un peu trop lointaine, il faut avant tout travailler sur la confiance en soi aussi vis-à-vis de l'emploi. C’est important également dans le but de préparer les personnes à travailler en équipe avec d’autres personnes dans le cadre des ateliers collectifs.

 

Marilyn Bissat, vous êtes coordinatrice et formatrice à l’association 3S, quel est le rôle de votre structure ?

3S ne se sentait pas de répondre seule. Notre savoir-faire c’est la remobilisation, l’animation d'ateliers collectifs, mais pas le repérage qui nous demanderait trop de temps. Nous sommes une petite structure, avec onze permanents sur deux établissements, dont notre association intermédiaire qui compte une conseillère en insertion professionnelle, une chargée d'accueil et moi-même. 

 

Le parcours inclut trois mois d'accompagnement collectif, à raison d'un à trois ateliers par semaine. Le collectif fait partie intégrante de la réponse, et les candidats savent qu’ils y participeront. L'une des premières compétences qu'on va évaluer, c'est la capacité à travailler avec les autres. Grâce au groupe, on peut agir sur les compétences psychosociales. Avant cela, on va pouvoir se rendre compte s'il y a des écarts ou pas, évaluer la motivation. Ces personnes sont en partie en rupture sociale, en rupture de lien. Quand on leur parle de travailler avec d'autres, c’est à la fois angoissant pour elles, et motivant parce qu’elles sont en attente de partager leurs difficultés avec des pairs.

 

Quelle est la durée du dispositif ?

La totalité du dispositif, repérage, mobilisation et accompagnement, c’est six à neuf mois. Depuis plusieurs années, on constate que les personnes sont de plus en plus éloignées de l'emploi et même de l'insertion, des personnes qui parfois sont au RSA depuis dix ans et n’ont pas quitté leur canapé toutes ces années. Reprendre un certain rythme, ne pas oublier de se lever le matin, c’est difficile pour elles. Ou elles arrivent en retard, parce qu’elles ont oublié que trois jours de travail successifs, c’est trop dur.

 

Pour nous, il est évident que dans beaucoup de cas, même pour aller sur des dispositifs de remobilisation, il manque une petite marche pour pouvoir se préparer. En fait, c'est comme si on leur faisait faire du renforcement musculaire, c'est ça notre travail. Notre but c’est de les aider à marcher toutes seules, retrouver de l'estime et de la confiance en soi. C’est très important avant d’envisager de reprendre une activité, avant même de parler d'emploi. C’est une pédagogie des petits pas, de la pédagogie détournée. Tout peut être utilisé comme support d'apprentissage.

 

En quoi consiste la sortie du dispositif ?

L’issue du dispositif c’est une prise de relais soit par France travail, soit par Cap emploi ou la mission locale. La première chose c'est de nous assurer que les gens ne soient pas lâchés dans la nature et que tout notre travail ait été réalisé en vain. Le caractère positif de la sortie dépend des objectifs qui ont été fixés à l'entrée avec chaque participant. Ça peut être d’effectuer une immersion professionnelle pour ceux qui n'ont jamais travaillé, entrer progressivement dans une structure d'insertion ou directement dans un emploi plus classique. Mais ça peut être aussi de prendre des cours de français. Dans tous les cas, il s’agit d’amorcer un projet qui ne sera pas abandonné à la suite du dispositif.

 

Dans certains cas, ça consiste aussi à déconstruire le projet d’une personne qui pensait être prête et qui finalement se rend compte qu’il lui reste des étapes à franchir avant d'arriver à l'emploi. Tout au long du parcours, l'idée c'est de les mettre en relation avec les entreprises, de les confronter à la réalité. Et de casser certaines représentations qui viennent percuter la réalité de l'emploi. On estime avoir réussi quand on a fait en sorte de ne pas mettre la personne plus en difficulté, parce qu’on sait que de si on vit échec après échec, c'est de plus en plus difficile de se relever. Là, notre but est de retrouver de la cohérence dans un parcours, et de se dire que ça va peut-être prendre un peu plus de temps mais pour déboucher sur quelque chose de bien plus pérenne. Notre enjeu c'est véritablement de les mobiliser sur le long terme. Il y a des personnes qui bouillonnent d'idées et puis le lendemain, tout retombe. C’est pour ça que nos intervenants sont épaulés par une multitude d'autres acteurs.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs de l'AMI O2R et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

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Lever les freins, briser l'isolement

Lever les freins, briser l'isolement | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Emilie Robert est coordinatrice et référente du projet E.S.C.A.L.E (Explorateurs de Solutions CIDFF64, APS, Elan Béarnais, Léo Lagrange). Ce projet est porté par l’Agence Paloise de Services (APS), en consortium avec trois autres associations paloises engagées, l’Elan Béarnais Pau Nord-Est, la Maison pour Tous Léo Lagrange et le Centre d’Information sur les Droits des Femmes et des Familles 64. Ce projet est lauréat de l’AMI de repérage et de remobilisation O2R.

 

Quel est le principe du projet Escale ?

L’AMI O2R est dans le prolongement du champ initial d’activités d’APS, cheffe de file du consortium. APS met à disposition du personnel dans les métiers de l'entretien, de la restauration collective, du jardinage ou encore de la manutention. Association Intermédiaire (AI) à but non lucratif conventionnée par les services de l'Etat, APS met à disposition un salarié dans les 24h au service des collectivités, d’associations, d’entreprises et de particuliers. APS est ainsi, depuis 1988, un acteur fort de l'insertion par l'activité économique.

 

Notre engagement auprès de l’O2R consiste à repérer, remobiliser et accompagner des personnes dites « invisibles », exclusivement sur Pau et son agglomération. Nous leur proposons un parcours individualisé et sur-mesure qui débouche, soit sur une prise en charge par le réseau pour l’emploi, France Travail ou la mission locale par exemple, soit sur une formation qualifiante ou un emploi durable adapté. Mais avant cela, nous priorisons la levée de multiples freins périphériques à l'emploi, à la vie sociale et socio-professionnelle. C’est le principe d’Escale.

 

Quel est le rôle des différents membres du consortium ?

Escale est une première collaboration entre les quatre associations. Cependant, les quatre structures étaient toutes, par leur ancrage solide sur le territoire et leur lien constant avec le grand public, très sensibles à l’insertion professionnelle et à l’accompagnement des personnes en marge des dispositifs traditionnels.

 

La MPT Léo Lagrange sensibilise à l’importance d’une bonne hygiène de vie par le biais de nombreuses thématiques, l’activité physique, le sommeil, la nutrition, les addictions, l’environnement psycho-social, etc. et propose des bilans de condition physique et moral tout au long des parcours. L’Elan Béarnais, club de Basket emblématique, vise également l’insertion professionnelle par le sport en proposant des séances sportives en collectif, des ateliers psychosociaux, des coachings individuels ou encore des mises en situation professionnelle. Les juristes expérimentées du CIDFF 64 fournissent une information juridique et une aide précieuse dans les démarches relevant du droit des familles, des violences, du droit des étrangers ou encore du droit au travail. Et enfin, APS offre les compétences d’une conseillère en insertion professionnelle qui a pour missions de lever toutes les problématiques faisant obstacles à l’insertion, incluant l’accès aux droits, le logement, la santé, la mobilité, etc. Un accompagnement pluridisciplinaire est essentiel. La complémentarité des compétences au sein de notre consortium est véritablement l’essence d’Escale.

 

Comment organisez-vous le repérage ?

Chaque association membre du consortium Escale repère du public invisible. APS s’appuie sur son fort réseau de partenaires que nous développons constamment et auquel nous avons présenté Escale. Ces partenaires nous adressent des personnes que nous recevons ensuite dans nos locaux pour leur proposer, sous conditions, un accompagnement. Pour les trois autres associations, elles sont en contact direct avec le public au quotidien. Elles sont ainsi à même d’identifier des personnes, des familles, les plus vulnérables qui pourraient intégrer Escale. Nous pensons en effet que le plus important est d’être visible sur le terrain, « d’aller-vers », pour créer un lien de confiance. Nous animons également des permanences dans les écoles et différentes associations comme les Restos du cœur, les centres sociaux, la MJC, où l’on ne touche pas notre public habituel. Nous comptons également, dans une moindre mesure, sur du bouche-à-oreille et les échanges informels de pair à pair : les bénéficiaires parlent du dispositif à leur entourage, et cela crée un effet boule de neige.

 

Quel public visez-vous ?

Notre public cible est un public « invisible » qui connait des situations d’isolement et/ou de vulnérabilités diverses. Chaque situation est différente, mais leur point commun est d’être sans contact avec un opérateur de l’emploi, en rupture avec les institutions, et de rencontrer un cumul de difficultés comme la précarité financière ou dans le logement, une santé fragilisée, une famille à charge, violences, une situation de handicap ou d’illettrisme, un faible niveau de français, etc. Aussi, pour intégrer Escale, les personnes sont soumises à quelques critères d'éligibilité et doivent impérativement être en âge de travailler, habiter sur la communauté d'agglomération de Pau, et avoir l’autorisation de travailler sur le territoire français. Nous n’accompagnons pas les personnes déjà inscrites auprès de France Travail, la mission locale ou Cap emploi.

 

Que se passe-t-il quand une personne est repérée ?  

Le premier contact est vraiment décisif. Lorsque nous identifions un candidat potentiel, nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre. Il faut agir rapidement pour ne pas perdre le contact, ni la confiance difficilement accordée. Quand une personne vient me voir ou qu'elle m’est orientée, je m'assure que tous les critères soient valides et qu’elle soit éligible. Ensuite, je lui propose un référent de l’une des associations du consortium qui la suivra de façon individualisée tout au long de son parcours. Il est important d’établir des entretiens physiques réguliers, surtout si elle rencontre des difficultés avec la langue française. Le référent de parcours la reçoit très vite, en quelques jours seulement, pour lui présenter Escale en détails, s’assurer de la bonne compréhension du dispositif et de la motivation de la personne. Ensuite, elle peut décider librement de s’engager ou non.

 

A quoi s’engage une personne qui intègre Escale ?

Si elle est intéressée, nous lui donnons un livret d'accueil dans lequel son référent de parcours et elle-même signent leurs engagements respectifs, un engagement de confiance, de confidentialité et de ponctualité. Ce livret rend le programme plus palpable, c'est un peu symbolique en début du programme et un support pratique par la suite. Il contient toutes les rencontres, les évolutions et les appréciations du référent de parcours pour limiter les oublis ou les confusions. Chaque mois, nous leur imprimons le planning coconstruit entre le référent de parcours, moi-même et le bénéficiaire.

 

En quoi consiste un planning ?

Le programme de chaque participant est préparé en tenant compte de ses problématiques de santé, des personnes à sa charge, de ses disponibilités et de ses envies. Le référent de parcours est chargé de lui proposer différents ateliers sur le mois, et de faire un maximum d'activités au sein des quatre associations du consortium mais aussi des associations partenaires à raison d’environ quinze heures par semaine. Nous n’imposons rien et nous adaptons beaucoup. Si une personne n’a pas fait de sport depuis vingt ans, qu’elle a des problèmes de dos, nous ne la forçons pas à pratiquer l’escalade, nous adaptons son programme en fonction de ses capacités. C’est comme cela que l’on gagne sa confiance, en l’écoutant et en y allant à son rythme.

 

Quelle est la durée d’un parcours ?   

Le parcours de mobilisation et d’accompagnement dure six mois. Une personne peut toutefois sortir du dispositif à tout moment. Il peut arriver qu’elle accède à un certain nombre de droits rapidement, l’aidant ainsi à accéder au marché du travail, ou qu’elle s’inscrive à France Travail pour bénéficier d’un autre modèle d’accompagnement. Dans ce cas, le relais est pris par France Travail. Un parcours peut durer plus longtemps, mais de manière extrêmement cadrée, et sous conditions.

 

Quel type d’ateliers organisez-vous ?

Ils sont très variés. Du sport, de l’accès aux droits, les addictions, l’illettrisme, la nutrition, l’alimentation, etc. Nous avons des ateliers pour réapprendre à cuisiner, à prendre soin de soi, apprendre à respirer, mettre en pratique la communication non violente et un peu de sophrologie également. Et surtout, de la reprise de confiance. Nous proposons aussi simplement de la marche à l'extérieur encadrée, afin de reprendre contact avec la nature. On propose des activités très concrètes comme des ateliers individuels numériques. Sans oublier la dimension ludique et culturelle. Ce sont des personnes qui n'ont absolument pas accès à tout ça, ce n’est pas dans leurs priorités. On les aide à remettre un pied dans la vie, afin de les sortir de leur cadre extrêmement fragile.

 

L’autre aspect très important, c’est le collectif. De reprendre contact avec d'autres personnes, se lever le matin pour un objectif. Ça n’est pas uniquement de résoudre les problèmes d'une personne, mais aussi de lui redonner goût à la vie en collectivité à l'aspect social, la confiance en soi, l'estime…

 

Est-ce que vous travaillez sur le projet professionnel ?  

Le projet professionnel arrive souvent plus tard dans l'accompagnement. En moins de six mois, il est extrêmement difficile d’orienter notre public vers le marché du travail traditionnel. Cependant si, à mi-parcours ou en fin de parcours, un participant nous fait part de son souhait de travailler, qu’il a levé des freins importants, par exemple, s’il vit dans un logement décent ou qu’il a obtenu une couverture maladie, on peut entièrement lui proposer de découvrir des métiers ou des formations qui pourraient l’intéresser et lui convenir. Nous avons d’ailleurs notre tout premier bénéficiaire qui a signé un contrat de travail au bout de quatre mois, et nous en sommes très fiers. Mais notre but n’est pas de nous hâter à positionner des personnes en emploi. Cela se résulterait par un échec, nous le savons.

 

Quels objectifs vous êtes-vous fixé ?

Nous faisons au mieux avec une énergie débordante. Nous avons pour objectif de repérer, remobiliser et accompagner cinquante personnes par an et de les raccrocher au réseau pour l’emploi pour la grande majorité. Plus une personne participe à des ateliers différents, plus elle se remobilise et mieux c’est. Aujourd’hui, nous sommes toujours en rodage. Nous voyons que le projet est diffusé à l’extérieur de nos structures. Escale prend peu à peu de l’ampleur, il est de plus en plus connu et reconnu par nos partenaires. Je crois beaucoup au collectif, à la force de travailler ensemble de façon constructive et à l’échange.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs de l'AMI O2R et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

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Fer Ensemble, prendre en main son métier

Fer Ensemble, prendre en main son métier | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

L’idée de la création d’une école de production à Cognac existe depuis 2019, date de la création de celle de Limoges (notre article de mai 2019). Cette réflexion, alors tout juste entamée, a été mise en sommeil pendant la crise sanitaire. Elle a repris en raison des attentes exprimées par les industriels et du manque de solutions locales offertes aux jeunes. En octobre 2023, elle a débouché sur la création de l'association Ecole de Production de Chaudronnerie de Cognac, qui donne corps au projet « Fer ensemble » avec toutes les parties prenantes, sous l’impulsion de Grand Cognac et de l’UIMM, suivis par l’État et la Région.

 

Le choix a été fait par les partenaires de consacrer l’école au métier de chaudronnier, pour s’aligner sur les besoins des entreprises dont les carnets de commande justifieraient l’embauche de dizaines de chaudronniers dans l’industrie, notamment aéronautique. Mais aussi dans l'agroalimentaire, particulièrement les spiritueux pour la fabrication des cuves et d’alambics, des échangeurs des chaudières, etc. Les besoins résident également dans la chaudronnerie agricole, notamment la fabrication de remorques et pulvérisateurs.

 

« Le problème avec la formation en chaudronnerie, c'est qu’à l’issue de leur cursus, les jeunes ne sont pas opérationnels » explique Maxime Gacher, directeur de « Fer ensemble ». « Les industriels sont prêts à embaucher des jeunes, mais ils estiment qu’ils manquent de pratique. Et comme nous n’avions pas de formation sur le territoire, il fallait trouver une solution hors apprentissage, parce que les entreprises n'avaient pas forcément l’intention de prendre des mineurs. » Une formation hors apprentissage, basée sur la pratique et les activités concrètes, la solution école de production apparaissait comme le choix le plus adapté.

 

« Ma première mission était de monter le dossier de « pré label », sorte d’autorisation à ouvrir une école. Ensuite on a recruté Julien Delagarde, notre professeur d’atelier. Nous avons récupéré un bâtiment qu'il a fallu modifier, commander les machines, expliquer le concept, etc. Finalement le montage de l'école s’est fait très rapidement, entre mai et octobre. » Le plateau technique, composé de machines de dernière génération, a été financé par la fondation Total Énergies. L’UIMM et l'Union Patronale de la Charente apportent leur appui juridique sur la rédaction de contrats, ainsi qu’un complément de financement.

 

Mobiliser des partenaires

 

L’association a également été accompagnée par la banque des territoires et par l’entreprise Verallia qui lui a fait bénéficier d'une convention de revitalisation. En tout, elle disposait d’une enveloppe suffisante pour effectuer les travaux nécessaires et assurer le fonctionnement de sa première année. « Pour réussir, on sait que la mobilisation des entreprises et des collectivités est indispensable. Les trois premières années sont des années d'amorçage et de stabilisation. En fin de cinquième année, on pourra envisager de poursuivre notre développement et ouvrir un nouveau métier. »

 

Le message que veut faire passer « Fer ensemble », c’est qu’elle est un outil de territoire, que son ambition est d’accompagner des jeunes à qui l'école ne convient plus et qui ont besoin de travailler avec leurs mains, d’apprendre différemment. Les partenaires sont intéressés parce qu’ils voient des portes de sortie pour leurs jeunes, par exemple des classes de Segpa.

 

Au départ, le nombre de places avait été évalué à huit, un chiffre raisonnable pour une première année d'enseignement et pour éviter les problèmes de discipline. La première promotion d’octobre dernier était finalement constituée de onze jeunes, pas toujours initialement intéressés par la chaudronnerie, ni particulièrement motivés, mais qui n’avaient plus envie d’aller en classe. Environ la moitié sont issus de QPV, déscolarisés pour l’essentiel. D’autres pouvaient poursuivre une scolarité classique en lycée, mais ils auraient probablement décroché eux aussi. Quelques places ont été volontairement gardées pour des mineurs non accompagnés.

 

Le repérage est effectué en lien avec la mission de lutte contre le décrochage scolaire du rectorat et le CIO, qui vont détecter des candidats en classe de 3e. Le public mission locale est un peu trop âgé, mais il peut venir découvrir le métier dans le cadre de visites avant d’être dirigé vers des organismes comme le Greta. « Aujourd'hui notre processus de recrutement est un peu différent. Les élèves que nous aurons l'année prochaine, nous les accueillerons en stage avant, ce qui nous permettra de juger leur motivation, qui est notre unique critère d’admission. Ils auront été informés, et seront déjà un minimum intéressés par la chaudronnerie. »

 

Les jeunes préparent un CAP en deux ans avec un programme mixte, un tiers de théorie (maths, langues, arts appliqués, français) et deux tiers de pratique. Sept semaines sont consacrées aux stages, quatre à l'extérieur, trois à l'intérieur de l'école.  Ils passent donc l’essentiel de leur temps en atelier, n’étant pas très réceptifs au format scolaire. « Fer ensemble » ressemble trait pour trait à une entreprise, dans laquelle les jeunes disent se sentir bien.

 

La théorie a tout de même sa place, mais elle est limitée à des notions immédiatement utiles, de manière que les élèves connectent peu à peu les différentes notions et créent leurs propres cartes mentales. L’école s’efforce de mettre en place des parcours individuels adaptés en maths, en français, en fonction des lacunes de chacun. Elle a l'obligation de remplir le socle commun de compétences, de leur assurer un niveau minimal équivalent à un niveau seconde, pour qu'ils puissent éventuellement intégrer ensuite une première en bac pro.

 

Partir des besoins des entreprises

 

L’élaboration de la pédagogie a consisté d’abord à recueillir les besoins d’une dizaine de chaudronneries locales, et d’intégrer des compétences supplémentaires au référentiel existant, d’en faire un référentiel métier propre au territoire, une sorte de « surcouche locale », notamment sur la fabrication d'alambics qui est un vrai savoir-faire local. Son idée générale est de travailler de manière inversée : on fait, ensuite on explique.  « Les jeunes qui sont rentrés en octobre, dès le premier jour, ils étaient sur les machines. Nous commençons par leur donner la culture de la matière. Il faut qu'ils puissent expérimenter des choses, se tromper, recommencer. En tant qu’enseignants, on leur apporte une petite bribe de théorie par-dessus. On est vraiment sur un cycle : vous essayez, on vous communique une information, on assemble tout ça et on essaie à nouveau. Au quotidien, on cherche à s’affranchir complètement du référentiel. En apprenant aux jeunes à évoluer en entreprise de manière déconnectée de l'école, nous faisons déjà la moitié du travail. »

 

Une des difficultés des écoles de production est de prévoir les commandes à venir. Les « temps creux » sont alors consacrés à faire du renforcement. Le discours tenu aux entreprises est que la formation prépare des jeunes à être des chaudronniers généralistes, charge aux entreprises de les spécialiser après les avoir embauchés. « Nos jeunes entrent en première année et restent au minimum deux ans. Le problème c’est qu’à dix-sept ans, ils ne sont toujours pas employables dans l'industrie. On voudrait leur proposer un parcours avec au moins une année de plus, peut-être un deuxième CAP sur un titre pro. On les garderait entre deux et trois ans chez nous. »

 

L’apprentissage des savoir-être fait aussi partie du programme. Dans le fonctionnement de l'école, les jeunes ont différentes tâches à effectuer, par exemple le ménage. Au début, cela nécessite de leur imposer une certaine discipline pour avoir des ateliers propres, pour qu’ils s’expriment correctement, disent bonjour en arrivant le matin, toutes choses que l’on attendra d’eux dans une entreprise.

 

Ensuite vient l’emploi qui les attend en fin de parcours. « Les employeurs viennent toujours un peu avant la séquence de stages à l'extérieur pour détecter les jeunes qu’ils accueilleront. Les entreprises qui nous accompagnent depuis le début participent en nous passant des commandes, elles nous proposent des visites, nous mettent à disposition des véhicules. Elles sont vraiment impliquées dans le projet. »

 

Pour le futur, l’association réfléchit à plusieurs formules, comme des parcours sur quatre ans, en multi diplômes. Peut-être aussi proposer une quatrième année en apprentissage pour les 17-18 ans qui ont besoin de gagner de l’argent tout en étant formés correctement. Le fait d’avoir des équipes multi niveaux et polyvalentes permettrait également de répondre à des demandes plus complexes.

 

« Notre idée est de négocier comme il faut la montée en charge. Ce qui implique de changer de bâtiment à un moment, parce qu'aujourd'hui on est un peu à l’étroit si on veut à terme accueillir quarante chaudronniers. C'est un projet qu'on est en train de travailler avec le Grand Cognac. Le deuxième projet, c'est de réunir des professionnels pour identifier un autre métier en tension sur le territoire, afin d’essayer de voir comment on pourrait apporter des solutions. C'est un chantier qu’on envisage à l’horizon 2028. »

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April 24, 6:01 AM
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Une solution inclusion pour tous les jeunes

Une solution inclusion pour tous les jeunes | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

En 2024, l’association OHÉ-PROMÉTHÉE Charente a répondu à l’AMI O2R afin de déployer le dispositif « Cap’inclusion » dont l’objectif est de sécuriser le parcours socio-professionnel des jeunes en situation de handicap en fin de scolarisation et/ou sans solution d’accompagnement adapté à leur situation. L’équipe de Cap’inclusion est composée principalement d’une chargée de mission inclusion (Florence Ilboudo) et d’un animateur (Wilfrid Andrieux).

 

Quel est l’historique de votre dispositif ?

Cap’inclusion vient surtout d’un partenariat de longue date entre Ohé Prométhée Charente et l’Education nationale, avec le soutien des coordonnateurs des Unités localisées pour l'inclusion scolaire (Ulis) des lycées professionnels du département de la Charente. Certains jeunes sortaient du parcours scolaire sans solution d’accompagnement adaptée à leur situation.

 

Avec le soutien de la DDETSPP nous avons alors mis en place une mission inclusion jeunes qui nous a permis durant quatre ans d’accompagner les jeunes et leurs familles dans le travail de projet professionnel, et de les informer sur les dispositifs existant via les partenaires, mission locale, Ecole de la deuxième chance, Promo 16 18, Structures spécialisées comme les Institut Médico Professionnels (IMPro, Plateforme Emploi Accompagné…).  L’étroite collaboration avec les enseignants a mis en évidence les besoins d’intervenir précocement auprès des élèves en fin de scolarisation pour sécuriser leur parcours d’orientation socio-professionnel. C’est comme ça qu’est né Cap’inclusion, une façon de pérenniser notre mission inclusion.

 

Quel est le profil des jeunes que vous visez ?

Ce sont des jeunes très éloignés de l’emploi, avec tous types de handicaps et qui manquent d’autonomie. Beaucoup souffrent de phobies sociales, c’est surtout ça qui fait que les jeunes sont reclus chez eux. Il faut qu’ils soient sans solution d’accompagnement adapté, qu’ils aient une notification de la MDPH (RQTH, AAH…), et surtout qu’ils ne soient pas suivis dans un parcours d’insertion suivi par un organisme du réseau public de l’emploi (mission locale, France Travail, Cap emploi...). Nous leur proposons un accompagnement renforcé, parfois en les prenant par la main, comme avec les jeunes ayant des difficultés d’élocution qui ont besoin que l’on soit présent lors des entretiens avec des employeurs.

 

On pourrait penser que ce public est déjà repéré par différents acteurs ? Ce n’est pas le cas ?

En fait aujourd’hui ces jeunes sont repérés par différentes institutions, mais il n’y a aucune structure pour les accompagner dans leur projet socio-professionnel. Leurs parents sont démunis et ne savent pas du tout quoi faire. Ils peuvent toujours être scolarisés, ou être en rupture parce que leur handicap a pris le dessus, ou qu’ils subissent des freins sociaux importants. Notre objectif est de repérer ces situations-là.

 

Notre repérage consiste surtout à faire le lien avec les partenaires du territoire, l’école, le CIO, ou encore les parents. Nos partenaires nous les envoient, on a des fiches de repérage. On les reçoit pour vérifier qu’ils ne sont pas déjà accompagnés par une structure, même s’ils nous disent que non. On essaie de savoir depuis quand ils sont chez eux, ce qui a été fait dans leur parcours. Nous organisons des entretiens avec les familles pour comprendre la situation, comment ils peuvent rejoindre le dispositif et les informer sur les dispositifs existants.

 

Selon vous, quelles sont les causes du manque d’informations ?

La Charente est très rurale, il y a beaucoup de parents qui ne connaissent pas les dispositifs, ils sont souvent perdus. Ils tentent des choses mais sont démunis, et ne savent plus quoi proposer à leurs enfants. Les jeunes qu’on repère sont souvent avec un statut scolaire, donc il y a du monde autour d’eux (AESH, orthophoniste, souvent le SESSAD...) La difficulté vient quand il faut passer du milieu scolaire au monde professionnel. Pour certains, il est trop précoce d’envisager le milieu ordinaire, il faut plutôt les diriger avant vers un IMPro. Parfois il y a vraiment besoin d’une structure médicosociale pour travailler les comportements, avant d’aller vers le milieu ordinaire. Ça n’est pas toujours compris par les familles. C’est cette transition qui est la plus difficile.

 

Cap’inclusion, c’est la continuité de ce que vous faisiez avant, ou vous avez modifié votre approche ?

On a dû se réinventer, parce qu’on s’est rendu compte qu’il fallait vraiment avoir un animateur dédié pendant quatre semaines, pour prendre les jeunes en main, leur redonner confiance, les sécuriser. C’est le plus de ce dispositif. Durant les quatre dernières années, notre rôle principal auprès des jeunes, des familles et des enseignants était d’informer, d’accompagner et de réorienter vers les dispositifs existants. À présent, avec la phase de remobilisation, nouvelle pour nous, il a fallu tout construire, déterminer de quoi les jeunes ont besoin, comment les faire se lever le matin, leur donner l’envie de venir vers nous, de bouger en fait. On ne le faisait pas avant, ou plutôt par l’intermédiaire d’autres partenaires. Depuis avril 2025, nous sommes en période d’expérimentation avec un premier groupe de jeunes.

 

Comment se déroule la phase de remobilisation ?

La remobilisation dure quatre semaines. Chaque mois, nous avons un nouveau groupe d’une dizaine de jeunes. L’objectif est de les faire sortir de chez eux. Au travers d’ateliers collectifs, d’activités culturelles et sportives, on amorce le projet socioprofessionnel. Nous sommes deux à mener ce projet dans la structure, et on s’appuie sur un réseau de partenaires.

 

Qui sont les partenaires qui interviennent dans le dispositif ?

Nous avons des entreprises engagées comme TRANSDEV qui permet le déplacement des jeunes vers les évènements culturels et sportifs (comme l’action Equitation avec UPCA). La STGA (Société de transport du Grand Angoulême) vient faire de la sensibilisation à la mobilité, nous accompagner pour apprendre à faire un trajet en bus. Avec la CPAM, nous pouvons proposer des bilans santé, mais aussi des ateliers thématiques sur l’alimentation, la vie sexuelle et affective, les addictions. Le CIJ et L’ERIP sont sollicités pour travailler le projet professionnel. Pour les sorties culturelles, nous avons la médiathèque d’Angoulême (l’Alpha) et l’office de tourisme. Au démarrage nous déterminons le programme, mais par la suite, nous voulons que les jeunes choisissent ce qu’ils veulent faire.

 

L’Education nationale nous met aussi à disposition une enseignante qui assure des temps de soutien en individuel. Au besoin, on peut orienter un jeune vers les associations de lutte contre l’illettrisme. Beaucoup de nos partenaires savent que cette mission est importante. Ils ne peuvent pas nous attribuer des budgets, mais sont prêts à nous fournir des moyens humains ou matériels.

 

À quoi s’engagent les jeunes quand ils participent à Cap’Inclusion ?

Ils signent un contrat d’adhésion de six mois maximums, dans lequel ils s’engagent à participer activement à toutes les phases, à être présents aux activités et ateliers proposés par l’animateur pendant la remobilisation. Ils ont des rendez-vous individuels pour travailler leur projet et leur CV. Et puis aussi des actions en autonomie, par exemple pour la recherche de lieux de stages. Si certains jeunes ont déjà des projets en tête, on n’attendra pas quatre semaines pour les travailler avec eux. Surtout, on s’assure que ces projets soient réalistes et réalisables, on les confronte à la réalité. S’ils trouvent une formation qui les intéresse, ils peuvent partir avant le délai maximum. Le but c’est avant tout de leur remettre le pied à l’étrier.

 

En quoi consiste votre accompagnement au projet professionnel ?

Notre approche c’est la découverte des métiers, sous la forme « un jour, un métier en action », par des immersions, mais aussi le bénévolat, le service civique… l’école ne les intéresse plus ou leur fait peur. On peut aussi multiplier les mini stages dans les organismes de formation. C’est la mise en action de ces jeunes que nous recherchons, les confronter à la réalité du milieu ordinaire. Ils veulent tous travailler, mais il faut leur montrer des réalités comme se lever le matin, mettre ses EPI, passer une journée dehors à tondre le gazon, etc. C’est ce qu’on va mettre en avant dans l’accompagnement pour valider un projet.

 

Est-ce qu’il y a des métiers à éviter ? Ou plus adaptés que d’autres ?

On tient vraiment à ouvrir le champ des possibles. On s’interdit de considérer que tel profil ne peut pas, par principe, aller à tel endroit. Le mieux c’est de se confronter à la réalité, par exemple lors de visites d’entreprise. C’est souvent comme ça que le jeune voit si ça peut lui convenir. En faisant des petits pas, on arrive à définir ce qui leur correspond. C’est l’environnement de travail qui va véritablement jouer. Ils rêvent tous de travailler dans certaines entreprises, mais une visite suffit parfois à leur faire changer d’avis.

 

Il faut d’abord déterminer ce qui leur plait, ce qui leur donnera la force de se lever tous les matins. Mais on ne ferme la porte à aucune envie. Evidemment, la marche peut être plus ou moins haute en fonction de chaque situation individuelle. S’ils trouvent un emploi (CDD, contrat d’apprentissage, service civique…), on peut faire intervenir un ergonome de Cap emploi 16 pour évaluer les besoins éventuels en compensation du handicap au poste de travail (aménagement technique, organisationnels, humain…).

 

Que se passe-t-il quand ils quittent le parcours après les six mois ?

Pour certains jeunes, ils auront l’occasion d’aller vers une formation, pour d’autres d’aller vers l’emploi (contrat d’apprentissage, service civique, CDD…). Pour ceux qui auront besoin de plus de temps, un comité local de suivi avec le réseau public de l’emploi, est organisé pour évaluer l’évolution socio-professionnel du jeune afin de l’orienter vers le partenaire le plus adapté avec inscription auprès du Réseau public de l’emploi (France Travail, Cap emploi, mission locale…).

 

 

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Ephémères mais bien réelles

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Comme son nom le laisse entendre, une « Flashcoop » est une entreprise éphémère, qui propose à un petit groupe d’environ huit personnes de gérer une coopérative pendant une semaine. Le concept a été créé et déposé sous forme de label par des Coopératives d'Activité et d'Emploi (CAE) de Mayenne, pour lequel elles ont élaboré un cahier des charges très précis. C’est auprès de l’une d’entre elles, Coodem, qu’une CAE de Poitiers, Aceascop, s’est formée à la mise en place du dispositif et a mené les premières expérimentations sur le territoire de l’agglomération de Poitiers.

 

Ce projet a été porté par le groupement des CAE de Grand Poitiers dans le cadre de projets collectifs. Il a reçu un soutien important de la communauté d’agglomération, dont les élus ont immédiatement adhéré au principe. Trois actions ont été financées en 2023 et 2024, grâce également à des financements de l'Etat, de la Région Nouvelle-Aquitaine, et de la fondation du Crédit coopératif. C’est en raison de sa bonne connaissance du dispositif, qu’Aceascop a porté et animé ces trois Flashcoops au nom du groupement.

 

La première a rassemblé des jeunes décrocheurs scolaires de 16 à 25 ans, la deuxième des femmes éloignées de l’emploi, la dernière un groupe mixte. « Les publics accueillis sont des gens qui étaient sur le bord du chemin ou qui sont suivis par différentes structures d'accompagnement à l'insertion professionnelle, » précise Benoît Furelaud, directeur. « On sait très bien que, parmi eux, beaucoup souhaitent créer leur activité. La Flashcoop permet de tester en condition réelle, en accéléré, tout ce qu’il y a à faire quand on est son propre patron. Dans tous les cas, c’est une expérience qui permet une reprise de confiance et une remobilisation par le biais d’un projet tangible. »

 

Seule condition, la motivation

 

Chaque coopérative éphémère est mise en place et animée en collaboration avec des structures partenaires (mission locale, atelier de pédagogie personnalisée, collectivités, etc.), qui se chargent de mobiliser les publics en amont. Elles sont complètement libres de fixer des prérequis. Seule condition, que les candidats soient extrêmement motivés, parce que l’expérience dans laquelle ils s’engagent est très intense. Il faut également qu’ils n’aient aucun problème de mobilité. L'inscription se fait quasiment au dernier moment, les participants n'ont rien à préparer avant le premier jour. Ils signent un contrat d'appui au projet d'entreprise (Cape), comme s’ils intégraient une véritable CAE en tant que créateur d'entreprise.

 

Le choix du produit à fabriquer et à commercialiser est fixé lors des comités techniques rassemblant les partenaires mobilisés, qui s’efforcent de trouver une marchandise agréable à créer (exemple avec les kokédamas de la Flashcoop 3) et qui permettra de découvrir plusieurs métiers différents. Le dernier mois est consacré à l’étude de faisabilité, à fixer les horaires, le lieu de commercialisation, etc. « Tout cela se décide vraiment en fonction de l'appétence des personnes constituant la structure partenaire. L’activité est imposée aux coopérateurs, qui la découvre le premier jour de participation. »

 

Juste après la découverte du produit, les coopérateurs doivent rapidement enchaîner les étapes : rendez-vous chez le banquier ou l'assureur, présentation de ce qu’est un modèle économique, comment on fixe ses prix avec les notions de marge et de chiffre d’affaires, puis la production, la commercialisation, et pour finir, le bilan comptable. Tout cela en sept jours.

 

« Compte tenu du calendrier très court, ils ne peuvent pas se permettre de moment d'hésitation. Le rythme soutenu ne laisse pas aux gens le temps de se regarder pendant des heures avant qu'il se passe quelque chose. Il faut tout de suite entrer dans le concret. L’entente doit être bonne au sein du groupe, pour s’accorder sur le nom de la marque, fixer les prix, gérer la fabrication et la vente, la répartition des bénéfices, etc. Nous choisissons le produit et le lieu de commercialisation, mais tous les autres aspects, ce sont les associés qui les déterminent ensemble. » Les participants ont également conscience qu'ils sont sur un format très particulier et que les impératifs de production et de commercialisation peuvent les amener à travailler plus de 35 heures, que ce soit pour assurer l’objectif de fabrication ou la vente sur un marché qui implique de commencer tôt.

 

« Tout va très vite. Plus ça va vite, moins les gens ont le temps de se poser des questions. En général, dans nos activités d'insertion, le pire ce sont les temps morts, qui présentent toujours le risque de mettre en péril la dynamique de mobilisation. Donc le risque de perdre des gens. À l’issue, ils obtiennent une rétribution, certes symbolique, mais qui leur donne la preuve qu’ils ont vraiment mené une activité à son terme. »

 

Tout au long de la semaine, des intervenants extérieurs accompagnent les groupes dans la conception de leur offre, la production et la commercialisation. Ainsi ce sont des banquiers qui proposent de simuler un rendez-vous avec la banque, et des graphistes apportent leurs compétences pour la partie communication, la création du logo et du nom de marque. Des professionnels de l’activité choisie (boulangerie, couture, pâtisserie…) aident à la production. Tous sont sollicités plusieurs semaines avant le début de la coopérative, afin de s’assurer qu’ils soient bien disponibles

 

« Parmi nos contacts, nous avons des professionnels qui adhèrent à ce projet, auxquels nous faisons régulièrement appel, » explique Imane Guarraz, chargée de communication.  « Par exemple, dans le cadre de la troisième Flashcoop fin 2024, nous avons sollicité l'Atelier du Soleil et du Vent, structure d’éducation au développement durable, qui a accueilli le groupe dans ses locaux pour la journée de production. Et puis deux graphistes qui font partie d'une CAE. Pour nous, c’est très intéressant de mobiliser des personnes qui croient au modèle coopératif et qui connaissent l'entrepreneuriat. »

 

Favoriser la mixité

 

En fonction des Flashcoops, l'ambiance et le fonctionnement dans le groupe ont été à chaque fois différents. Lors de la dernière édition, la dynamique s’est révélée la meilleure, en raison de la mixité, en termes d’âges et de genres. « Animer un groupe avec des profils très divers est plus facile que lorsque le groupe est homogène, par exemple des jeunes de mission locale. La diversité est gage de réussite dans la construction du commun. À la fin du premier jour, tout le monde avait un sentiment d'appartenance et la motivation pour aller au bout. » 

 

« Nous avons constaté un vrai engagement de la part des participants notamment en raison de leur différence d'âge. À la fin, ils parlaient même de créer leur entreprise ensemble. Pour nous, ça a été une véritable surprise. Sinon, on s'est rendu compte qu’ils étaient tous très curieux de tout, qu’il y avait une vraie envie de découvrir un grand éventail métiers. L'adhésion des structures et de Grand Poitiers s’est révélée aussi très précieuse. »

 

Même si la forme est très cadrée, chaque groupe a dû s'adapter aux circonstances, par exemple en modifiant leur mode de commercialisation, et passer d’un petit marché rural à de la commercialisation en ligne. Comme ce fut le cas pour le groupe qui a fabriqué beaucoup plus de kokédamas que prévu. L’objectif était de tout vendre, les associés ont dû adapter leurs prix. Ils ont réussi à rebondir et à trouver des solutions pour ne pas rester sur une demi-réussite, preuve de leur réactivité.

 

Une Flashcoop peut avoir comme effet de bousculer certaines certitudes chez les participants, notamment ceux qui avaient un projet professionnel déjà bien déterminé. Car il arrive qu’ils se rendent compte que le champ des possibles est complètement ouvert. S’ils se découvrent une appétence pour les chiffres et la comptabilité, ils se mettent à envisager de s'intéresser aux métiers de la gestion, chose qui n’était pas apparue au cours de leur accompagnement préalable. D’autres réalisent que l'entrepreneuriat n’est pas pour eux, qu’ils préfèrent recevoir un salaire régulier.

 

Aceascop envisage de continuer à développer des actions autour de l'entrepreneuriat sous forme coopérative. Les élus de Grand Poitiers sont prêts à renouveler leur soutien, ce qui facilite la recherche de nouveaux territoires et partenaires. « Pour organiser de nouvelles Flashcoops sur d’autres territoires, il faut toujours bien en expliquer le principe, parce qu’il est peu connu. C’est pareil pour les CAE, une fois qu’on a compris leur fonctionnement, on se demande pourquoi un créateur d'entreprise ne commence pas toujours par tester son activité dans ce cadre, quitte ensuite à choisir un statut d'entrepreneuriat individuel ou de société. Pour convaincre, notre message c’est, la formule que nous vous proposons permet de remotiver et mobiliser vos publics, et de valoriser votre territoire. En plus le plan de financement est clos, donc ça ne va rien vous coûter. »

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March 27, 9:45 AM
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De l’insertion à la formation

De l’insertion à la formation | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Altea Cabestan est une association rochelaise employant 170 salariés. Elle comprend un pôle social, avec notamment des centres d’hébergement, et un pôle insertion disposant d’un chantier et d’un restaurant d’insertion, ainsi que d’une agence immobilière à vocation sociale. Elle propose également des actions de formation et un accompagnement vers l’emploi, notamment depuis 2022 avec son projet Connexions, financé par l’appel à projets régional « Mobilisation Formation ».

 

Les activités de formation de l’association existent depuis 1984. Leur principe est d’être accessible aux habitants des quartiers de La Rochelle. Elles sont complétées par des actions d'accompagnement vers la formation, menées en amont. Elles ont pris différentes formes, parfois plus axées sur l'accès aux droits, ou sur le numérique, en dirigeant les publics vers les partenaires pour l’insertion professionnelle ou vers les centres sociaux pour les questions familiales.  

 

Pour Christophe Petit-Clair, responsable des services insertion et formation, « tout ce travail en amont est invisible. Il se fait de toute façon déjà autour des actions illettrisme et de l’HSP socle. Si nous pouvons développer des actions comme Connexions, qui se concentrent sur ces aspects, c’est un plus. Et s’il y a la volonté d'aller au plus près des publics, c'est encore mieux parce que c’est aussi ce que nous recherchons. »

 

La réponse déposée par Altea Cabestan comporte trois axes de travail. Le premier, l'animation du réseau local. De fait, l’HSP socle repose déjà sur un réseau, plutôt lié aux prescripteurs habituels. L’ambition était d’élargir le réseau, d’y inclure des structures qui orientent moins, mais rencontrent tout autant les publics. « Nous avons pris le temps de contacter des associations caritatives, les maisons France service, le CCAS, l’ADEI, le service militaire volontaire, des structures que l'on connaissait, mais que l’on croise beaucoup plus ponctuellement, parce qu’elles travaillent moins directement sur l’HSP. Notre idée était d’en voir le maximum. »

 

« D'ailleurs plutôt que de réseau on parle beaucoup de lien partenarial, précise Hélène Syrot, coordinatrice formation. « En fait c'est une extension du lien partenarial. Développer l'information permet de travailler dans un premier temps sur le repérage, puis sur l'orientation et ses modalités. »

 

De voisin à parrain

 

L’axe deux est celui du parrainage, du pair à pair, en complément du travail de « aller-vers » déjà mené parfois sur l'espace public ou en pied d’immeuble. Partant du principe que les personnes qui connaissent déjà la structure, parce qu’elles y ont suivi une formation, vont parler de leur expérience et accompagner leurs connaissances, voisins, amis, famille. Il s’agit en quelque sorte d’une autre modalité d’accueil, ne reposant pas sur un entretien individuel, mais qui se fait dans un cadre convivial, un goûter ou un « café discute ». L’axe deux propose également les ateliers « Premières marches ». Ils permettent, lorsque les personnes sont repérées ou orientées, de les recevoir rapidement et simplement sur une solution de démarrage des apprentissages, tout en travaillant l’accès aux dispositifs de formation.

 

Troisième axe, la sensibilisation à la question de l’illettrisme qui vise en priorité les médiateurs numériques de l’agglomération, mais concerne également tous les autres partenaires. Qu’est-ce qu’est l’illettrisme, comment en parler, comment orienter et vers quel intervenant ? Ces interventions permettent de décomplexer le sujet, de le clarifier, de proposer un panel de solutions. Le constat de l’association est que les professionnels repèrent déjà. Ce qui leur manque ce sont les outils pour aller plus loin. « La sensibilisation, nous n’en faisions pas avant sous cette formule. Nous avons pris conscience du besoin qui pouvait exister autour de cette question. Ces séquences demandent autant de temps que les actions menées directement avec le public. »

 

Dans ce domaine, c’est la récurrence dans les échanges entre partenaires qui est susceptible de produire des effets.  Plus ils travaillent ensemble, moins il est compliqué de repérer et d'orienter. Le problème est le turnover que connaissent les structures, qui oblige à relancer les sensibilisations régulièrement. Afin de proposer une réponse rapide, Altea Cabestan fait la promotion de son numéro de téléphone unique. Son but est d’inciter les personnes à franchir la porte et à entamer une démarche, quitte à ce qu’elle se poursuive ailleurs.  

 

« Nous avons décidé de mener nos trois axes de front. L'animation du réseau c’est un travail en continu. Comme les actions de formation, en entrée sortie permanente. Notre volonté est d’orienter aussi vite que possible toutes les personnes en demande d'apprentissage, qui sont en attente d’une réponse immédiate. On tire toutes les ficelles possibles. Avec chaque personne, on définit d'où elle préfère partir et vers où elle veut aller. » Rentrer sur un dispositif de formation comme l’HSP demande du temps, et un peu d'organisation personnelle. C’est là que les ateliers Première marches se révèlent utiles, accessibles immédiatement et sans condition, en attendant d’engager une formation.

 

Côté personnes éloignées de l’emploi, la tendance depuis deux ans est à l’augmentation des problèmes de santé, physiques ou psychologiques, ainsi qu’au cumul de difficultés. Et ce, quels que soient les types de public. « Sur la formation on a vu arriver depuis quelques années un public en reconversion suite à des problématiques de santé, et qui doit se reconvertir dans des métiers plus administratifs. Souvent, l'accès au numérique, par exemple, devient un problème. Ces personnes qui ont été qualifiées et diplômées dans les années 80 se retrouvent assez démunies face à une reconversion professionnelle, et doivent se remettre dans les apprentissages. »

 

Le public en situation d’illettrisme a lui aussi évolué. Les personnes qui n’avaient pas appris à lire et écrire, fréquents il y a une vingtaine d'années, n’existent quasiment plus. Aujourd’hui en majorité, il s’agit de personnes « installées », qui ont occupé longtemps le même poste, ont développé des stratégies d’évitement, et pour qui la question de l’illettrisme ne s’est jamais véritablement posée. Jusqu’au jour où elles sont confrontées à des évolutions brutales (changement de poste, de machine, de process, licenciement…) ou des problèmes de santé. 

 

Faciliter l'accès aux dispositifs

 

« On sait qu’on ne captera jamais tout le monde, ça c'est une certitude. En revanche, Connexions nous permet effectivement de repérer les personnes à côté desquelles nous serions passées. Il existe de nombreux dispositifs divers et variés, mais l’enjeu c’est que les publics y accèdent facilement, sinon on prend le risque de n’accueillir que les plus autonomes. Ce que nous constatons également, c'est le besoin du public de trouver des lieux et des actions dont l’accès est facile (sans conditionnalité et prérequis) et sans jugement. »

 

L’association fonde ses actions sur ce principe de non-jugement, ainsi que sur la mixité des publics, qui facilite les échanges entre personnes de différents horizons et niveaux. Elle privilégie le travail sur l’autonomie et l’instauration d’une relation de confiance. Au-delà de la formation, le lien social est primordial, au sein d’un espace où les personnes se sentent bien et peuvent reprendre confiance en elles.

 

« C’est une demande récurrente, celle d’avoir le temps de se poser et de reprendre un parcours concret, efficace avec des objectifs atteignables et mesurables. Nous sommes toujours disponibles, mais le but n’est pas d'accompagner les gens pour tout et n'importe quoi, toute leur vie. Ce qu’on fait ne porte pas ses fruits immédiatement, cela peut être des mois ou des années plus tard. Il ne faut pas que ce soit frustrant, parce que ça fait partie du jeu. »

 

En 2025, Altea Cabestan a décidé d’étendre l’action du projet « Connexions » au public accueilli par l’association à Rochefort, en Centre d'Hébergement de Réinsertion Sociale et en Maison Relais. Elle va mettre en place des ateliers Premières marches pour franchir le palier, parfois très grand, entre la structure d'hébergement et une entrée en formation.

 

« Pour nous, tout est question de temps disponible. Temps nécessaire pour entretenir le réseau de partenaires, temps nécessaire pour accompagner les publics vers les dispositifs. Une partie d'entre eux arrivent directement sur l’HSP, mais les autres ont besoin de ce temps-là.  Nous voudrions aussi aller à la rencontre des entreprises, pour y mener des sensibilisations. »

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March 6, 12:31 PM
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Un campus dans un campus

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À Tulle, le quartier de Souilhac a longtemps été le siège de la manufacture d'armes qui a fait la prospérité de la ville durant des décennies. Le site a périclité progressivement jusqu’à sa fermeture au milieu des années 2000. Depuis 2016, la communauté d'agglomération de Tulle réfléchissait à l’implantation d’un campus destiné à rassembler la majorité de l’offre de formation post-bac locale sur un site unique. Un restaurant universitaire et inter-entreprises y a ouvert ses portes en 2019, précédant le regroupement des organismes de formation en 2021.

 

C’est dans le cadre de cette stratégie, qu’un Campus connecté a vu le jour en septembre 2021. Sa création a été rendue possible grâce à la labellisation obtenue dans le cadre d’un appel à projet national lancé en 2020. Ce projet est ainsi financé sur 5 ans par le Secrétariat Général pour l’Investissement dans le cadre du PIA 3 – Territoires d’Innovation pédagogique sous l’égide de France 2030, opéré par la Caisse des Dépôts.

 

« De mars à juin 2020, une grande campagne de concertation a été menée dans le cadre du programme Action Coeur de Ville à l’échelle du territoire de l’agglomération de Tulle, » explique Caroline Monteil, cheffe de projet à Tulle agglo. « Les collégiens et lycéens, mais aussi les acteurs économiques, se sont exprimés afin de mieux comprendre ce qui faisait rester ou partir les jeunes étudiants et travailleurs. Ils ont évoqué leurs difficultés à poursuivre des études supérieures en raison de différentes contraintes, que ce soient des problèmes financiers, de mobilité ou de santé, mais aussi des difficultés à recruter des personnes diplômées ou inciter à l’esprit entrepreneurial »

 

« Quand on a réalisé le diagnostic, on s'est bien rendu compte que le concept du Campus connecté était une solution très intéressante pour nos jeunes, que de pouvoir continuer leurs études localement. Pour concevoir notre offre, nous nous sommes notamment appuyés sur l’expérience des Campus connectés déjà existants, comme celui de Cahors. »

 

C’est Sylvain Domenger, tuteur du Campus connecté Tulle Corrèze, qui a géré la première rentrée avec cinq étudiants. « Dans un premier temps, j’ai dû m’approprier l’outil, interroger les autres tuteurs, observer un dispositif né juste avant les Campus connectés qui s'appelle la Digital Académie, afin d’être capable de l'expliquer et de le vendre auprès des personnes intéressées. » Des actions de communication ont été entreprises, les établissements locaux contactés pour les informer et les convaincre que le nouveau dispositif n’entrait pas en concurrence avec eux, et qu’ils pouvaient lui adresser des candidats. Avec l'université de Limoges, des comités de sites ont été mis en place à Brive, Tulle et Guéret, afin de rapprocher l'enseignement supérieur des territoires.

 

Le cahier des charges national des Campus connectés indique que l’offre s’adresse aux néo bacheliers. Mais Tulle a voulu d’emblée toucher un public plus large, comprenant aussi des adultes en reconversion ou des jeunes suivis par la mission locale ou France Travail. En fait, toute personne exprimant son intérêt à faire des études, et ayant la capacité de suivre des enseignements à distance, qui nécessitent un certain degré d’autonomie. L’idée était également de s’adapter au territoire, de répondre aux besoins des entreprises en restructuration, notamment en matière de reconversion professionnelle.

 

Les études c'est aussi à distance

 

Le message du Campus connecté consistait à promouvoir les études supérieures pour tous, à expliquer qu’il était possible de suivre des études à distance proche de chez soi, que le manque de moyens ou d’envie de quitter son territoire ne devait pas faire renoncer quelqu’un à une formation. La dimension « campus » a été valorisée dès le départ, elle qui offre un environnement étudiant et des solutions pour rompre l’isolement.

 

Les candidats se présentent eux-mêmes, ou sont aiguillés par une mission locale, France Travail, le CIO, un lycée.  Ils sont reçus en rendez-vous, pendant lequel le tuteur passe en revue leurs motivations, leur explique les règles de fonctionnement, leur fait visiter les locaux, évalue leurs connaissances en informatique pour voir s’ils sont à même d’être autonomes devant un écran. Seule véritable condition pour être accepté, avoir trouvé une formation à distance.

 

Chaque candidat signe un contrat d'accueil et un règlement intérieur. Il s’engage à être présent douze heures par semaine en moyenne sur l’année. « On fait du cas par cas, on ne va pas sanctionner quelqu’un et rompre son contrat parce qu’il a eu un empêchement d’ordre familial. Chacun a un mode de vie et des contraintes différents.  Certains sont en service civique ou travaillent à mi-temps, ils ont parfois des rythmes différents d’une semaine à l’autre. C'est à moi de m'adapter, d’essayer de trouver un créneau pour mettre en place des activités avec le maximum de personnes. »

 

La date de rentrée est liée au cursus universitaire ou privé. Les néo bacheliers démarrent plutôt en septembre après les résultats de bac ainsi que les retours de leurs vœux sur Parcoursup. Le processus de sélection s’étend globalement de juillet à septembre, et c’est le plus souvent à ce moment là qu’intervient un temps d’intégration. D’autres jeunes ou adultes arrivent plus tard, en fonction de leur calendrier d’entrée en formation respectif.

 

La nature de l’accompagnement du tuteur dépend de chaque individu et de son degré d’autonomie. Le contrat passé entre l’agglomération et l’étudiant est finalement assez simple : réussir son année. Pour cela, il faut qu’il prouve qu’il s’en donne les moyens. « Je leur impose un entretien mensuel, en face à face, ça fait partie de leur engagement. J’adopte un peu la posture d’un manager, l’étudiant vient me présenter son travail du mois, je lui demande des comptes sur les objectifs fixés au préalable, on étudie son planning de cours, on y intègre du temps de révisions avant ses examens. »

 

 « Une fois que nous avons fait le tour des questions « scolaires », nous échangeons sur sa situation personnelle, son intégration au sein du Campus, son envie de participer aux activités, ou d’en proposer de nouvelles. C’est la dimension psychologique de mon poste. Les étudiants ont besoin d'une écoute, d'une personne présente à leur côté pour les rassurer, les rebooster parfois. Certains ont plus besoin de moi donc je vais vraiment être derrière eux régulièrement. »

 

« Il n’existe pas de règles générales, de logiques d'âge ou de genre. Chaque individu a des besoins propres. Je suis beaucoup plus sollicitant dans les premiers temps, je crée les liens pour que ça se passe bien entre eux, ensuite je m'efface petit à petit. Dans tous les cas, ils restent entièrement responsables de leurs objectifs et de leurs résultats. »

 

Une dynamique collective

 

La fréquentation d’un Campus connecté présente plusieurs avantages, en premier lieu une vie étudiante qui permet de rompre l’isolement, de rencontrer des pairs de différents âges, dans diverses situations, qui suivent des formations différentes. De plus l'accompagnement du tuteur est un avantage indéniable pour l’accompagnement vers la réussite. Ce dernier joue également un rôle important en matière d’orientation.

 

Par ailleurs, les animations et activités proposées toute l’année, ont pour principe de sortir les étudiants du cadre de leurs études, et de créer du lien entre eux. Elles peuvent être ludiques (faire son savon, atelier cuisine), artistiques (ateliers sculptures) ou culturelles (visite d’un théâtre ou d’un musée), ainsi que méthodologiques, pour travailler sur la prise de notes, rédiger son CV et sa lettre de motivation, s’entrainer à la prise de parole, rencontrer des entrepreneurs qui viennent présenter leur métier. Chaque année un des Campus connectés reçoit les étudiants de tous les autres sites, l’occasion pour eux de se rendre compte qu'ils ne sont pas les seuls et peuvent être solidaires. « Je leur dis à chaque fois, venez comme vous êtes. Vous pourrez faire plein de choses que vous ne pourriez pas faire dans un cursus universitaire classique, donc à vous de me proposer des idées ».

 

Les retours sont essentiellement positifs et on constate que les Campus connectés entraînent des résultats bénéfiques pour les territoires, tant au niveau démographique qu’économique. Certains étudiants ou adultes en reconversion créent, par exemple, leur propre activité après leur formation, des entreprises qui ont vocation à rester et à se développer sur leur territoire.

 

À Tulle, le Campus connecté a su enclencher une belle dynamique sur le territoire grâce à une implication remarquable de l'ensemble des parties prenantes du projet. La recherche de nouveaux partenariats est désormais une des priorités pour pérenniser le dispositif, en multipliant les contacts directs, lors de salons, de forums, etc. Les réflexions portent également sur la rentabilité du dispositif pour le maintenir et le faire croître. « Nous travaillons pour asseoir le fonctionnement et ainsi prouver aux élus qu’ils ont eu raison de le mettre en place, et que la dynamique doit se poursuivre. Petit à petit les choses évoluent, de nouvelles portes s’ouvrent. Le dispositif s’intègre localement dans le paysage universitaire et les partenariats s’étoffent pour maintenir ce service localement »

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February 20, 9:48 AM
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Le futur a sa classe

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Quietam studio est une filiale dédiée à l'innovation pédagogique du groupe Magellan PSI (Bruges), dont la mission est de déployer des projets numériques dans le monde de l'éducation. Yannick Brudieux, son directeur de l'innovation, précise son objectif. « Nous voulons que le matériel et les dispositifs numériques que l’on implante au sein des établissements scolaires et de formation, aient du sens. C'est-à-dire que les usages soient associés à l'utilisation de ces nouvelles technologies. Il y a une grande tendance à équiper les classes, mais nous avons constaté que les enseignants n'arrivaient pas à s’emparer de toutes ces solutions techniques, faute d’accompagnement. »

 

En 2021, Quietam Studio a déposé un dossier baptisé « classe du futur » auprès de la Région Nouvelle-Aquitaine. Le projet était celui d’une classe flexible et comodale, équipée de mobiliers adaptés, de technologies diverses et de solutions logicielles. Le prototype est installé depuis l’été 2024 au sein de Aérocampus Aquitaine, plus précisément au lycée Flora Tristan de Camblanes-et-Meynac. Il est mis à disposition de tous les enseignants, qui l’ont intégré dans leurs plannings afin d’y pratiquer de nouvelles techniques d'apprentissage.

 

Pour imaginer ce dispositif, les enseignants ont été sollicités pendant quelques mois, et leurs avis rassemblés afin de définir ce que serait le type de mobilier idéal pour transformer une salle de classe en mode « autobus » classique, en un lieu aménagé pour le travail par groupe, plus propice à l’engagement des élèves, la collaboration, le développement des compétences cognitives. Le choix final s’est porté sur des tables amovibles, de forme trapézoïdale, faciles à agencer en ilots, pour que les apprenants s'approprient l’espace.

 

Travail collaboratif et interactivité

 

Du côté des technologies, un mur interactif grand format permet de faire de la collaboration entre apprenants, par exemple pour construire des séquences pédagogiques, des tutoriels ou une carte mentale. Des outils sont utilisables par l'enseignant, comme un écran numérique interactif, et un réseau de caméras et de système audio qui lui donnent la possibilité de s’adresser à la fois aux élèves en présentiel et à distance. Les participants à distance sont en quelque sorte immergés dans le dispositif. « Notre philosophie c'est « un clic ça marche » il faut que tout le système soit extrêmement simple à utiliser. Il présente l’avantage de fonctionner dans tous les contextes d’apprentissage, en formation initiale, formation continue, alternance, etc. »

 

L’ensemble s’appuie sur une suite logicielle baptisée MAIA, qui a pour objectif de faciliter la vie de l'enseignant et de l’aider à utiliser les équipements, notamment parce que le travail en groupe demande beaucoup de préparation et nécessite une connaissance de techniques d'animation. « L’intelligence artificielle que l’on intègre petit à petit, peut lui fournir des QCM générés automatiquement pendant sa session, de façon à dynamiser les cours, accroitre l’appétence des apprenants et créer de l’interaction. »

 

« Le travail collaboratif simultané, en présentiel et à distance de petits groupes est plutôt novateur. Mais cela crée des points qu'on n'avait pas forcément envisagé, et qui nous ont incités à monter un programme de recherche, par exemple sur la réduction des nuisances sonores, de façon que l'ambiance de travail ne soit pas dégradée quand les groupes travaillent en îlots. »

 

Dans l’idéal, la classe du futur doit disposer d’un espace d’environ 70 m² à 120m², de manière à offrir des zones d'activité assez variées et permettre à une trentaine d’élèves, dont certains en distanciel, de travailler tous au même endroit. Sachant qu’il est possible de « délocaliser » certains modules. Au sein d’un établissement, il s’agira plutôt d’une pièce commune à l'ensemble du corps enseignants. Elle peut s’adapter à tous les publics et à toutes sortes d’enseignements et de pratiques, du collège à l’enseignement professionnel, en passant par le lycée et l’enseignement supérieur. L’outil ouvre également des perspectives dans la lutte contre la phobie scolaire, en offrant la possibilité à certains élèves de pleinement participer aux séquences pédagogiques en distanciel, éventuellement de les motiver à vaincre leurs réticences à revenir en classe.   

 

L’enquête menée par Quietam, confortée par d’autres travaux, montre que la quasi-totalité des enseignants considèrent que le travail collaboratif entre apprenants est bénéfique pour l'apprentissage du développement personnel et l’acquisition de compétences cognitives. L’enseignant n'est plus seulement un sachant pourvoyeur de savoir, il devient animateur. Certains pratiquaient déjà le travail collaboratif, mais avec des moyens limités, et beaucoup de temps de préparation. « Notre système, notamment MAIA, répond à cette problématique. Au-delà du matériel et du mobilier, nous avons essayé de gommer tous les côtés chronophages de ce genre d'organisation. Sans cette facilitation, on voit bien que la plupart des enseignants n’y vont pas, malgré leur appétence. »

 

Faciliter le changement de pratiques

 

« Nous savions qu'il fallait surtout axer sur la simplicité. Le changement se trouve en général à un pas de sa propre habitude. Notre parti pris est d’expliquer aux futurs utilisateurs que nous leur proposons de faire ce qu’ils faisaient avant, mais en étant plus efficaces grâce à l'outil numérique, avec l'IA et une gestion intelligente des ressources. On ne fait pas le cours à leur place, mais on est présents en amont pour préparer les sessions, pendant pour les accompagner, après pour le retour d'expérience. » Le plus souvent les enseignants ne sont pas opposés à faire évoluer leurs pratiques, mais ils ignorent comment. La découverte de nouveaux outils leur permet d’avancer dans un sens qu’ils n’avaient pas forcément anticipé.

 

L'application MAIA est disponible depuis le mois de novembre, une version améliorée à la suite des expérimentations menées et aux retours des enseignants. Il s’agit maintenant de la tester à une plus grande échelle, auprès des organismes de formation qui souhaiteraient s’engager dans le développement de techniques d'apprentissage collaboratives. Car maintenant que la classe existe, le défi est d’y amener des utilisateurs peu ou pas du tout habitués à travailler en îlots. On leur propose de venir avec leurs propres supports, leurs propres séquences pédagogiques. La classe du futur va « augmenter » tous ces apports.

 

« On ne change pas leur contenu on l'améliore, on le démultiplie. On n'a pas propension à être des ingénieurs pédagogiques, on est juste des metteurs en scène de la pédagogie. L’objectif c'est qu'on ne présente rien à l’enseignant ou au formateur avant qu’il n’arrive, aucun mode d'emploi. Nous sommes là pour le guider, on lui fournit l’application, mais c’est lui qui prépare son cours et déroule sa séquence. »

 

Toute innovation prend du temps. Il y a toujours un effet de rejet au départ, et la nécessité d’y consacrer un temps d’acculturation. « Nous essayons de donner du sens c'est à dire on ne va pas mettre de la techno pour mettre de la techno. Au lancement d’un tel dispositif, il y a toujours un minimum d'accompagnement. Nous n’en sommes pas encore à ce que l’utilisateur soit complètement autonome. Aujourd'hui, il nous paraît plus raisonnable de l’accompagner au démarrage. Mais peut-être que dans quelques mois les gens seront capables de se débrouiller seuls. »

 

Pour aller vers plus d’autonomie, Quietam studio a réalisé des tutoriels interactifs pour chacun des équipements. Les enseignants peuvent utiliser les outils comme ils le souhaitent, ils ne sont pas tenus d’en respecter strictement la logique. Certains d’entre eux ont déjà évolué dans des configurations multiples et variés, par exemple en organisant des job datings.

 

Aujourd'hui une dizaine d'établissements utilisent la solution. Son déploiement ne fait que débuter. L’objectif est de multiplier les testeurs et de faire adopter cette solution auprès de d’autres organismes et d’établissements scolaires, comme récemment le lycée Václav-Havel de Bègles. 

 

 

Yannick.brudieux@quietamstudio.fr

Site web : maia-education.fr

 

 

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October 2, 9:00 AM
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L'IAE, une mine de compétences

L'IAE, une mine de compétences | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

PEPITES est un projet IFPAI (pour Ingénierie de Formation Professionnelle et d'offres d'Accompagnement Innovantes) porté par l'Etat et la Région à travers la banque des territoires, complété par un financement FSE. À la tête d’un consortium, INAE en assure la coordination, avec pour objectif global d’améliorer l’attractivité du secteur de l'IAE, de renforcer la montée en compétence et la professionnalisation des permanents des structures et des salariés en parcours. Au travers de trois axes, la plupart des actions ont été imaginées et sont portées conjointement par INAE et ses partenaires.

 

Le premier axe concerne l'attractivité des métiers de l'IAE, encore peu connus et insuffisamment valorisés que ce soient les métiers de direction, d’encadrement technique, d'accompagnement socio-professionnel, ou ceux de chargé de mise à disposition. Pour en faire la promotion, les actions ont pris la forme de vidéos de présentation, de partenariats et d’événements avec le monde des entreprises pour favoriser les passerelles et les recrutements.

 

« Depuis trois ans, nous menons également une action pour faciliter les mobilités professionnelles, en partenariat avec Avenir Actifs, le réseau qui met en place le Conseil en Evolution Professionnelle, » explique Oana Costachescu, coordinatrice de Pépites. « L’idée c’est de mieux faire connaître l’IAE aux conseillers en évolution professionnelle, afin qu'ils orientent les personnes en reconversion. En retour, nous présentons le CEP au sein de notre réseau, pour les salariés en fin de parcours. » Plus récemment un événement organisé à Dax a réuni une cinquantaine de personnes pour un « brunch inclusif », une rencontre entre entreprises et structures de l'IAE, occasion de mettre en avant des parcours réussis d'insertion autour de thématiques communes.

 

La spécificité de l'environnement IAE, qui varie selon la typologie des structures, c’est qu’il fonctionne différemment selon les publics, plus ou moins éloignés de l'emploi. Ainsi la fonction de direction, qui implique la capacité à gérer une structure quelle qu'elle soit, doit composer avec un cadre légal particulier, les aides au poste, le rapport aux financeurs publics, etc. De leur côté, les métiers d’Accompagnant Socio-Professionnel (ASP) et de Conseiller en Insertion Professionnelle (CIP) suivent une formation qui n’est pas spécifique au secteur, ils peuvent être exercés dans différents types de structures. En poste, la pratique doit donc s’adapter aux particularités et attendus du secteur.

 

Des métiers en tension

 

Les ASP / CIP sont des postes plus connus et beaucoup plus accessibles puisque la formation est plus répandue. En revanche, les métiers d'encadrement technique, assez polyvalents, demandent à la fois une certaine technicité, une certaine aisance en matière de gestion de la production et une fibre particulière dans l’accompagnement et l’insertion de publics éloignés de l’emploi. Ce sont les métiers les plus en tension aujourd'hui. « Ils ont une forte valeur ajoutée en termes de sens, mais souffrent d’un déficit d’attractivité. L’autre obstacle, c’est la difficulté que peuvent rencontrer les structures à accompagner la montée en compétence des encadrants pour les professionnaliser et les fidéliser. Favoriser l'accès aux titres et à la certification, c'est aussi un des enjeux forts du projet PEPITES. »

 

L’axe deux concerne justement la montée en compétence des permanents. Il inclut les open badges (voir notre article du 16 janvier 2025) qui ont vocation à valoriser et professionnaliser les salariés permanents, autant que les salariés en parcours. Afin de se retrouver dans l’univers des certifications existantes pour devenir encadrant technique, une cartographie a été élaborée, montrant les voies de formation et les trajectoires possibles pour les personnes en reconversion, les salariés en parcours qui veulent progresser dans leur structure. Cette cartographie sera consultable en ligne sur le site INAE fin 2025.

 

Le développement des compétences des encadrants se heurte souvent au manque de temps disponible dans les entreprises d’insertion, tandis que les formations classiques en centre ne répondent plus aux attentes ni aux contraintes. Pour y remédier, plusieurs dispositifs ont été repensés dans le cadre de PEPITES.

 

Le titre d’Encadrant Technique d’Insertion (ETI), initialement proposé en alternance mixte par l’AFPA, est désormais disponible en 100 % à distance, plus modulable et adapté aux réalités du terrain. Le titre ETAIE de la FAS a lui aussi évolué, avec l’appui de l’ARACT, pour intégrer davantage de pratiques d’AFEST, centrées sur le partage d’expériences et les mises en situation.

 

De nouvelles formations ont également vu le jour pour répondre à des besoins spécifiques : le poste de Chargé de mise à disposition en AI (avec CORACE), ou encore d’Assistant technique d’insertion, via une formation courte intégrée au catalogue INAE. Enfin, une formation dédiée aux encadrants en maraîchage, initiée en partenariat avec le Département de la Charente, connaît aujourd’hui un essaimage sur d’autres territoires.

 

« La donne a beaucoup changé depuis le début du projet puisque le secteur a connu des restrictions et des baisses de financement. Mais les besoins demeurent. Les structures aujourd'hui ont plus de difficultés à recruter et à assurer les montées en compétence, alors qu’elles continuent à faire face à de fortes pressions économiques, et doivent accompagner des salariés de plus en plus précaires qui présentent de nouvelles problématiques. Plus que jamais, il y a besoin de soutenir la professionnalisation des permanents de l’accompagnement et de l’encadrement et c’est ce que nous cherchons à faire avec le projet PEPITES.

 

Ainsi, une des dernières actions consiste à construire des parcours de montée en compétences innovants et modulaires au plus près des besoins du terrain et pouvant être acquis tout au long du parcours professionnel. ​ « On sait aujourd'hui que les permanents se forment aussi par de l'échange entre pairs, des webconférences, des événements, donc nous allons faire de la reconnaissance des différentes typologies de montée en compétences. Nous voulons déployer des parcours modulaires et leur validation par open badges. »

 

Objectif montée en compétences

 

Enfin, l’ambition de l’axe trois est de travailler sur la montée en compétences et la valorisation des salariés en parcours. Les open badges interviennent là aussi, en tant qu’outil de reconnaissance et de lien vers l'entreprise. Dans les dernières actions du projet Pépites, on trouve le développement d’une formation sur le numérique adressée aux permanents dans le but de mieux accompagner et transmettre ces usages et cette acculturation aux salariés en parcours. A partir de début 2026, elle se déroulera en présentiel ainsi que par le biais de capsules e-learning, des temps courts de remise à niveau. Un centre de ressources au service des structures sera aussi mis en place sur le site d’INAE (ressources en ligne, formations, ateliers collectifs, etc.).

 

Nous avons également développé des actions sur des métiers et des usages innovants. « La SIAE Essaimons a été assez précurseur dans l'usage des open badges puisqu’elle a été une des premières structures d'insertion à se les approprier comme un outil interne de suivi des salariés en parcours après avoir développé une formation courte et pratique sur le délissage de déchets textiles. Pour souligner cela, nous allons créer un événement à la rentrée autour de cette question : comment les open badges peuvent être mis au service d'une filière (la filière textile) pour développer une compétence spécifique dans une dimension de chaîne de valeur ? »

 

Avec la Coopérative Tiers-Lieux, INAE a développé des TSF (transferts de savoir-faire), qui consistent en un jumelage entre une SIAE et un tiers-lieu ou un fablab. Pendant quatre journées, les salariés et les permanents testent de nouvelles approches, des machines, développent des nouvelles compétences, des nouveaux usages sur le réemploi, la réparabilité des objets, etc. Enfin, un dernier partenariat avec « Bâti » une structure d'insertion située à Pessac, permet de former en interne sur la maintenance de petit matériel d’entretien d’espaces verts plutôt que d'aller externaliser cette fonction.

 

PEPITES se termine fin juin 2026. L’enjeu des prochains mois est de transformer ces expérimentations en acquis durables, via la capitalisation, la diffusion élargie et la reconnaissance institutionnelle le plus large possible. Un évènement final visant à mettre à l’honneur les partenaires et SIAE du projet sera organisé au printemps 2026.

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September 18, 4:00 AM
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Un village, des solutions

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Après avoir été une association pendant 70 ans, l’AFPA est depuis 2017 un établissement public industriel et commercial (EPIC) avec le statut d'agence sous tutelle conjointe du ministère du Travail et du ministère des Finances. À horizon fin 2025, tous les centres AFPA devront avoir été labellisés « village des solutions ». C’est du moins le projet de l’AFPA national. En nouvelle Aquitaine, la démarche a été engagée début 2024, elle concerne la majeure partie des dix-huit centres AFPA, comme Pau et Bayonne dont Vincent Pomes est directeur.

 

« En fait, l'orientation qui est la nôtre, c'est d'être un facilitateur en termes d'insertion sociale et d'inclusion professionnelle. Notre cœur de métier reste la formation professionnelle. Mais maintenant, quasiment à parts égales, nous faisons de l'accompagnement global des publics. » C’est le cas par le biais de différents programmes nationaux comme Prépa compétences, un accompagnement des demandeurs d’emploi prescrits par France travail, la promo 16.18 qui s’adresse aux jeunes décrocheurs, les ateliers Déclic de découverte des métiers, ou encore HOPE, le programme d’hébergement et d’orientation pour un public réfugié ou bénéficiaire de la protection individuelle internationale.

 

Le deuxième volet comprend les missions nationales de service public gérés par l’AFPA, comme la création des certifications et des titres professionnels, ainsi que la professionnalisation des jurys VAE en lien avec les titres professionnels. « Dans l'accompagnement, j’ajouterai la nouvelle tendance en Nouvelle-Aquitaine, avec l'habilitation de service public (HSP), qui a ouvert la voie à l’intégration de l'accompagnement dans les parcours qualifiants. Les stagiaires viennent comme ils sont, et on s'occupe de tout, c'est-à-dire les freins professionnels que sont la mobilité, le logement, la parentalité, la fracture numérique, la santé. »

 

Réunir les acteurs

 

Le village des solutions, est en quelque sorte une labellisation « interne », dont le principe consiste à réunir des acteurs de tout horizon qui sont animés par l’insertion sociale et professionnelle et de favoriser la réunion de ces acteurs. En tant que chef de file, l’Afpa trouvera des alternatives de coopération et d’accompagnement. « La Région Nouvelle-Aquitaine croit en la formation professionnelle et le village des solutions, on le voit plus comme l’occasion d'avoir des partenaires qui nous rejoignent dans l'ambition d'inclusion sociale et d'insertion professionnelle, et qui nous permettent d'apporter des solutions concrètes à nos ressortissants. »

 

À Bayonne et Pau, la recherche de partenariats a commencé il y a un peu plus d’un an et demi. La CPAM et la CAF, deux nouveaux partenaires, proposent des réunions d’information collective sur l'accès aux droits, et permettent à tous les publics de trouver une réponse à leurs problématiques liées à la santé, à commencer par un accès facilité aux bilans de santé, ainsi que sur la parentalité, le logement, etc. Autres exemples, Idelis apporte son aide sur la question de la mobilité, et l’entreprise Orange anime des ateliers numériques.

 

« Le village des solutions, c'est en fait imaginer une communication et une organisation fluide entre partenaires du territoire. Ils gardent leurs objectifs propres, mais ensemble nous sommes plus forts pour répondre au mieux aux besoins de nos publics. Les partenaires ont tout à gagner à venir au village des solutions, ce n’est pas payant, et cela nous ouvre la possibilité de proposer des alternatives concrètes aux bénéficiaires, en coordonnant un parcours d'accompagnement intégré. »

 

Cette appellation n’est en soi pas une révolution, l’AFPA reste d’abord considérée comme l'organisme de formation des demandeurs d'emploi. Pendant longtemps les centres AFPA attendaient les publics prescrits par d’autres, mais elle a toujours travaillé avec un réseau de partenaires, d'associations, de structures d'insertion, etc. Avec le village des solutions, elle ambitionne de dépasser les organisations un peu archaïques, elle intervient beaucoup plus en agilité et en fluidité, avec des opérateurs de tous ordres qui se retrouvent sur les valeurs de la formation de l'insertion et de l'emploi et apportent leur expertise particulière.

 

« Ce qui a changé, c’est que l’Etat et les Régions nous attendent sur un accompagnement global. Cela nous oblige à intervenir bien en amont de la formation professionnelle, avec toute la diversité des questions à traiter que cela implique. La remobilisation, la resociabilisation, sont des sujets qui dépassent le seul sujet de formation professionnelle. Le village des solutions nous place dans une dynamique beaucoup plus large en tant qu’opérateur ensemblier sur le territoire. Réunir des partenaires va justement nous donner encore plus de légitimité sur cet enjeu d'insertion sociale et professionnelle, mais surtout nous apporter du concret. Tout le monde ne conventionnera pas avec l’AFPA, mais en tout cas nous proposons, grâce à cet outil, de coopérer et d’échanger, pour mieux accompagner les publics dont on a la responsabilité. »

 

Un label qui résulte d'une évolution

 

L’arrivée de ce label n’implique pas un changement d’organisation, puisque l’évolution de l’AFPA a débuté il y a déjà quelques années, avec l’introduction de la dimension d’accompagnement global des programmes nationaux et les missions de service public. Le village des solutions vient en quelque sorte matérialiser cette évolution et l’ouverture de l’opérateur AFPA sur son écosystème pour la réussite du territoire. La seule véritable différence, c’est qu’il aura fallu aller chercher de nouvelles compétences, des profils de CIP, d'éducateurs, d'accompagnateurs socio-éducatifs, de formateurs pré insertion, et des partenaires spécialisés. « Le modèle dépassé de l’Afpa, c'était un formateur référent métier qui accompagnait les stagiaires, avec l’appui des services support et des équipes techniques. La réalité de l’accompagnement global et coordonné passe par une organisation plus fluide et pluri disciplinaire. »

 

Il y a trente ans, un stagiaire venait à l’AFPA pour apprendre le métier de comptable, de soudeur, de mécanicien ou de plaquiste. Il rentrait en formation du premier au dernier jour, développait des compétences, passait un titre pro avant d’aller à l'emploi. « Depuis bon nombre d'années, il y a une évolution des publics qui nous arrivent. Des mineurs que l’on accueille à partir de seize ans, jusqu’à ceux qui sont proches de la retraite. Nous avons toutes les catégories sociales et professionnelles. Mais avant d’emmener les personnes dans la réalité métier et dans la dynamique d'acquisition des compétences, il y a plein d'autres choses à travailler. Donc, quelque part, la formation professionnelle a changé. Idéalement, tous les parcours devraient mener à une formation, une certification puis à l’emploi, c’est un schéma classique. Simplement, il faut désormais intégrer d'autres choses dans les parcours. Les modules transverses prônés par la Région Nouvelle-Aquitaine sur la solidarité, le développement durable, en sont le meilleur exemple. »

 

Le village de Pau regroupe déjà une dizaine de partenaires qui se retrouvent lors d’un conseil trois fois par an. On y compte des associations, des structures d'insertion, des établissements publics, des entreprises, des institutionnels… L'AFPA crée le champ des possibles, donne une vision de coopération mais c’est le collectif « village des solutions » qui sert le territoire et doit être animé par l'ensemble de ses acteurs. L’AFPA est ensemblier mais n’en est pas propriétaire.

 

Pour qu’un village des solutions fonctionne, il faut qu’il soit porté par l'équipe locale de direction, et que tous les collaborateurs AFPA soient « embarqués ». Il vit grâce aux partenaires, mais il faut d'abord que tous les formateurs, les personnels d’accompagnement, les métiers support, soient mobilisés. « Un formateur qui a une section de douze stagiaires à gérer, dont certains connaissent des freins à l'emploi, doit voir le village des solutions comme une possibilité, un outil facilitateur, parce qu’il n’est pas éducateur, assistante sociale ou agent immobilier. Le village doit le rassurer sur le fait que les problématiques de certains de ses apprenants vont être résolues. Il pourra se concentrer sur l'acquisition de compétences. Si c'est vécu comme cela par l'ensemble des collaborateurs, nous pouvons ensuite travailler au développement à l'externe. L'idée c'est qu'à partir d’un moment, on ne nous voit plus comme un simple organisme de formation, mais comme un atout qui vient faciliter les enjeux d'insertion sociale et professionnelle de tous sur le territoire. »

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September 4, 9:16 AM
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Rendez-vous à la machine à café  

Rendez-vous à la machine à café   | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Entre 2021 et 2023, le service emploi de la régie de quartier Diagonales de La Rochelle a mené une expérimentation nommée « Transition compétences » sur les quartiers de Mireuil, Villeneuve et Port Neuf. L’action consistait à accompagner l'habitant depuis le domicile jusqu'à l'emploi, en lien avec un réseau d’entreprises. Elle impliquait de mener un travail important vers l’extérieur pour remobiliser les partenaires, expliquer la démarche et surtout repérer du public dans les quartiers, les centres commerciaux, les commerces, etc.

 

« L’avantage de transition compétence, c'est qu'on était dans un cadre expérimental, » explique Aude Ambert, coordinatrice du service emploi de la régie de quartier. « La personne était au centre, avec l'objectif de la ramener vers l'autonomie, d'être dans le pouvoir d'agir et d’avoir la possibilité de mailler avec les différents partenaires en fonction des besoins. »

 

L’Espresso de l'emploi, lancé en début d’année 2022, s’inscrit dans la continuité de cette action, avec la même volonté d’agir hors les murs, de partir au contact de l'habitant. Ce que ne faisait pas le service emploi auparavant même si la régie mène depuis 1993 des actions hors les murs et d’aller-vers. À cette époque, la mairie de proximité avait repris la main sur un bâtiment situé dans le quartier de Mireuil. Elle a sollicité différents partenaires locaux pour savoir s'ils étaient désireux d’intégrer le lieu, afin d’y mener des actions originales. Occasion pour la régie de poursuivre ce qui avait déjà été expérimenté et de mobiliser des partenaires de l'emploi pour mettre en place des actions communes. 

 

Au démarrage, il a été pensé comme un atelier autour du numérique et l'emploi, avec pour objectif de permettre à l'habitant d’acquérir une certaine autonomie face au numérique à la dématérialisation. « Nous nous sommes dit qu’il fallait essayer de proposer quelque chose de plus attractif, un temps de convivialité avec tout habitant qui peut pousser la porte pour s'informer, qu'on puisse échanger autour d'un petit café, de façon très informelle. Eventuellement d’aller plus loin, jusqu’aux questions d'emploi et de devenir professionnel. En qualité d’accompagnateur à l'emploi, on a aussi le rôle et le devoir d’aborder tous les freins périphériques qui touchent la personne, de l'aider à avancer dans ses démarches, ainsi que de l'informer sur les ressources qu'elle peut trouver au sein de son quartier. »

 

Le lien de confiance

 

La convivialité est un prétexte pour déclencher un premier contact, établir un premier lien de confiance, même si la confiance prend du temps à s'installer. La posture du professionnel n’est pas la même que s’il se trouve derrière un bureau et qu’il accueille les personnes en position de sachant, quelque part un peu dominant. Le faire sortir de son bureau et aller au-devant de la personne permet d’établir une posture de proximité, plus d'égal à égal, de rentrer dans une relation beaucoup plus appropriée.

 

L’Espresso de l’emploi ambitionne d’être cet « autre endroit », un environnement différent. Ses objectifs sont multiples, à commencer par apporter un premier niveau d'information au sens large du terme, quels que soient les besoins d’une personne, ce qu'elle recherche. Mais aussi de lui proposer une aide dans ses démarches, de prendre contact ou de revenir vers des institutions dont elle s’est coupée à un moment donné. Il s’adresse autant à ceux qui ont besoin d'un accompagnement renforcé, avec une présence régulière, qu’à la demande ponctuelle de l'habitant qui attend une réponse quasi immédiate. La porte d'entrée est l'insertion professionnelle, mais une régie de quartier est faite pour créer du lien social et répondre aux besoins des habitants au sens large du terme. C’est l’esprit de l'accompagnement global, qui consiste à traiter tous les freins périphériques de la personne.

 

« Aujourd’hui, on a le sentiment que les habitants ont beaucoup plus de difficultés à se projeter. On est de plus en plus sur l'immédiateté, plus prégnante qu’avant. Et donc nous rencontrons plus de difficultés à les mobiliser, sur de l'individuel, et encore plus sur du collectif. » Il existe une véritable méconnaissance des possibilités, d'autant plus avec une population qui n'est pas toujours à l'aise avec le numérique et plus largement avec la dématérialisation. Les personnes ne connaissent pas leurs droits, elles ont tendance à abandonner si elles n’arrivent pas à joindre quelqu’un au téléphone. Beaucoup sont en souffrance, isolées, avec des problématiques de santé.

 

« Avec elles, il faut qu'on remette en route un certain nombre de choses, y compris dans nos mesures d'accompagnement. D’autant que les besoins et demandes ne sont pas toujours exprimées, parce que les gens n'osent plus pousser la porte, ne savent pas où aller ou parce que lorsqu’elles s’adressent à une structure, on leur dit d’aller s’adresser à un autre interlocuteur. À force d’allonger les circuits, au bout d'un moment, elles abandonnent. L'engagement peut aussi être un peu plus compliqué parce qu’elles sont déjà rentrées dans le circuit, et n’ont pas forcément eu satisfaction ou trouvé la réponse attendue. »

 

L’Espresso de l’emploi est ouvert tous les mardis de 14 à 16 heures. Au démarrage, le seul créneau horaire disponible était le mercredi matin, mais il n’était pas très adapté au public féminin sans solution de garde d’enfant. « Le matin n’est pas une bonne idée, parce que quand on a perdu l’habitude de se lever tôt, ça peut être compliqué de venir, surtout s’il faut déposer les enfants à l'école. On a également expérimenté un créneau le soir, jusque 21 heures, en espérant toucher des habitants un peu plus disponibles. En fait ce sont essentiellement les jeunes du quartier, quatorze à seize ans, qui fréquentaient l'espace. Mais ça n’est pas le public qu'on souhaitait mobiliser. »

 

Un accueil, des évènements

 

L’équipe d’accueil est composée des quatre conseillers en insertion du service emploi de la régie, en alternance, ainsi qu’un agent de France travail, du CCAS pour les questions d’accès au droit, et des agences intérim d'insertion, ADEF, Adef+, Cohésion 17. Au moins une fois par mois un événement est organisé autour des métiers ou des formations financées par la Région Nouvelle-Aquitaine, sur la mobilité avec l’opérateur de transport en commun de l’agglomération, qui attire jusqu’à une trentaine de personnes.

 

« Cette complémentarité est importante. Nous ne savons pas tout sur tout, il faut aller chercher les professionnels qui ont une spécialité, qui peuvent décanter un certain nombre de choses. Et surtout ne pas faire tout et n'importe quoi, chacun de son côté. » Par ailleurs, depuis le mois de juin, la régie a recruté une médiatrice à l'emploi dont le rôle est d’aller au contact des habitants sur les deux quartiers de Villeneuve et de Mireuil pour pouvoir se faire repérer, informer l'habitant de l'existant et promouvoir l’Espresso et ses permanences.

 

L’intérêt d’un travail de médiation est d’être beaucoup plus présent sur le terrain, afin d’arriver à capter plus de de personnes, parce que les missions et les exigences des structures ne le permettent pas toujours. Même s’ils viennent avant tout chercher du lien social, qu’ils sont parfois isolés, les habitants disposent de leur propre réseau de connaissances. Ils peuvent également agir comme un relais pour faire circuler des informations par le bouche-à-oreille, qui fonctionne très bien au sein des quartiers.

 

L’important est de partir de la réalité de l'habitant, de l’orienter et le guider vers les interlocuteurs les plus appropriés au regard de la situation. Collectivement, c’est aux professionnels de détecter quelle est la porte d'entrée qui correspond le mieux à ses demande et besoins. « Il ne faut pas se rater à cette étape. D’ailleurs il ne faut pas se rater en règle générale quand on fait de l’accompagnement. L’accompagnement ce n’est pas aller là où on veut emmener la personne, c'est bien de partir de la personne pour l'emmener là où elle souhaite aller. Ce n’est pas à nous de définir que la priorité est vers l'emploi, mais de s’occuper d’abord des besoins intermédiaires à mettre en place. Et à nous de tirer les bonnes ficelles. »

 

 « On a changé notre façon d'être et de faire avec l'habitant au travers des différentes expérimentations que nous avons menées. On mettait déjà la personne au centre, mais peut-être pas encore de la même façon. Aujourd'hui les demandes des publics ont évolué aussi, ils ne se projettent pas de la même façon qu’avant. Ce n’est pas à eux de s'adapter à nous, c'est à nous de nous adapter à eux. »

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July 10, 4:21 AM
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Accompagner et soigner

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TAPAJ, pour « Travail Alternatif Payé à la Journée », est un dispositif québécois qui consiste à proposer à des jeunes de 16 à 25 ans en rupture, consommateurs de produits psychotropes, une activité payée à la journée sans engagement sur la durée. En France, il existe à peu près 75 programmes TAPAJ systématiquement portés par une structure de soins. À Libourne, le Comité d'Étude et d'Information sur la Drogue et les Addictions (CEID) l’a mis en place depuis 2021. Retenu en 2024 par l’AMI O2R, sa coordination est assurée par Amandine Chancellé, éducatrice spécialisée.

 

Pour vous, en quoi consiste TAPAJ ?

Nous voyons TAPAJ comme un outil de réduction des risques, presque comme un vecteur de soins. Notre focus, c’est la santé des jeunes. Pendant qu’ils travaillent, ils ne sont pas en danger, ils ne sont pas dans la consommation, on peut échanger avec eux, etc. Je me concentre davantage sur la question de la santé et la stabilisation de situation, l'ouverture des droits, la santé somatique et psychique. Si on ne lève pas les freins qu’ils rencontrent quotidiennement, ces jeunes ne peuvent pas aller en emploi. On cherche à changer leur logique de survie par une logique d'inclusion. Les plateaux de travail sont un support de relation, et surtout la première marche de l'émergence d'un projet quel qu'il soit, et de reprise de contact avec le réseau pour l'emploi classique, notamment la mission locale.

 

Pourquoi avoir répondu à l’AMI O2R ?

Il y a deux ans, nous nous sommes positionnés sur le contrat d'engagement jeune rupture (CEJR), qui nous a permis d’accompagner pas mal de jeunes avec des résultats plutôt intéressants, notamment en termes de santé et d'emploi. O2R s’inscrit dans la continuité puisqu’on reste dans la logique de réduction des risques et de levée d’un maximum de freins.

 

En quoi TAPAJ est-il particulier ?  

Il s’agit vraiment d’un programme d'innovation sociale, une approche qui n’existait pas sur le territoire français il y a de cela dix ans. Bien sûr il y avait des structures d’insertion, mais rien de similaire à des jeunes payés à la journée sur des temps adaptés. La question de l'emploi n’est pas forcément la première préoccupation des personnes qu'on accompagne. Elles ne viennent au CEID d’abord pour se faire soigner. Cela dit, dans le cadre d'un processus de rétablissement, la question de l'emploi peut effectivement émerger. Pour cela, on prend appui sur les partenaires dont l’insertion professionnelle est le cœur de métier.

 

Quels sont les profils visés ?

Nous sommes restés dans le cahier des charges initial de TAPAJ, à savoir les 16-25 ans. Ils sont tous consommateurs de produits. On n’a pas vu pour l'instant de jeunes qui étaient uniquement sur un seul type de d'addiction, sans drogue ou médicaments. On accompagne aussi des jeunes consommateurs de produits, qui peuvent avoir d’autres problématiques de consommation sans substance (jeux d’argent, écrans… ). Mais la première porte d’entrée reste la consommation avec objet. Du moment où on propose des alternatives à des pratiques addictives on reste dans le soin. Même s'il y a maintien de la consommation il y a déjà un premier pas, ne serait que consommer des produits de manière plus sécure. Nous avons quelques collègues spécialisés dans la question des écrans, du jeu pathologique, mais pour nous ça reste très marginal dans notre accompagnement au quotidien.

 

Comment menez-vous le repérage ?

Majoritairement, notre système de repérage consiste à aller dans la rue. On prend notre sac à dos, nos tennis, et on va physiquement dans des squats, dans des cités, en pied d’immeuble, on rencontre les jeunes là où ils sont. On a beaucoup travaillé la connaissance du territoire avec la prévention spécialisée, des éducateurs de rue qui font ça toute la semaine. Pour un acteur de première ligne comme nous, maîtriser et connaitre son territoire c'est essentiel. On fait aussi partie du plan local de lutte contre la délinquance, Parfois lors d'une instance de prévention, nous avons des signalements par les gendarmes ou les policiers, qui nous permet d'aller à la rencontre de certains jeunes que nous ne connaissions pas. Mais nous n’attendons pas de nos partenaires qu’ils repèrent à notre place.

 

Il y a aussi le bouche-à-oreille et l'orientation partenariale des différentes structures du territoire. Aujourd’hui, sur ma file d’actifs j'ai à peu près 40 jeunes, dont 40% rencontrés dans le cadre du travail de rue, 40% sur l'orientation partenariale et 20% sur de du bouche-à-oreille. On a principalement deux types de profils. Des jeunes avec de vraies souffrances psychiques sans domicile, en squat et ou en hébergement extrêmement précaire. D’autres qui ne sont pas dans cette notion d'errance au sens littéral, qui vivent parfois encore chez leurs parents, mais qui n’ont plus aucun rapport avec le milieu ordinaire.

 

Quels sont vos objectifs ?

Notre objectif c'est de repérer 40 jeunes par an. En 3 mois nous en sommes déjà à 46. Bien sûr nous avons des défections, mais on s'était dit au départ que si on fait 10 accompagnements c'était déjà pas mal. On se rend compte qu'il y a beaucoup plus de besoins que ce qu'on avait envisagé. Si on arrive à faire en sorte qu’un jeune sache où dormir, quoi manger, peut-être même quelle formation il va faire, c’est un résultat positif.

 

En fait on se rend compte, est-ce que c'est la période qui veut ça, qu'on a davantage de gens en souffrance en ce moment. Je parle vraiment de maladies psychiques qui n’ont pas été diagnostiquées ou traitées, qui ont amené des ruptures de prise en charge. J'ai aussi beaucoup de jeunes qui ont des parcours ASE, des traumas des violences, etc. Depuis quatre ans c'est la première fois que j'ai autant de jeunes en errance.

 

Quand vous captez une personne, quelle est la suite ?

On lui présente le dispositif TAPAJ classique avec cette possibilité de travailler assez rapidement sans trop de papiers nécessaires, une carte d'identité une carte de sécu. C’est une association intermédiaire qui porte le contrat et la rémunération. Avec O2R nous avons également pensé à mettre en place des temps de remobilisation sur les thèmes de mobilité ou l’alimentation, des enjeux un peu compliqués pour eux au quotidien. Comment être dans la planification, l'organisation, quand on a des troubles psy qui ne sont pas traités, quand on vit à la rue ? C'est un peu compliqué de faire face. Mais nous n’avons pas encore assez de jeunes pour créer une dynamique de groupe. J'espère que l'année prochaine nous pourrons faire des temps en collectif autour de la mobilité, de la citoyenneté, de la culture, ou encore du permis de conduire et de la préparation au code.

 

À quel moment commencez-vous l’accompagnement ?

Pour le projet professionnel, on n’a pas d’intervenants spécialisés sur TAPAJ Libourne. Dans un premier temps, on travaille sur choses très basiques, comme la capacité du jeune à se lever le matin, ne pas consommer de produits sur un temps donné. On essaie de lui proposer des plateaux un peu différents quand c'est possible, des espaces verts, du nettoyage. Parfois il se projettent dans un temps plein bien payé, sauf qu’au bout de trois heures, ils n’en pleuvent plus. On leur dit que s’ils veulent travailler 35 heures, il faut commencer par en travailler quatre. Nous essayons de les confronter à cette réalité.  En lien avec la mission locale, on coconstruit avec les jeunes leur projet professionnel. Inversement on invite les CIP à venir sur des plateaux de travail ou sur certains ateliers collectifs.

 

Faut-il comprendre que pour vous, TAPAJ version O2R est une sorte de TAPAJ classique renforcé ?

En fait le TAPAJ O2R c’est en quelque sorte un TAPAJ avec possibilité de rémunération, ce qui change notre paradigme sur les priorités à traiter. En sortant de la logique de survie, et de celle des plateaux de travail qui ne peut pas durer éternellement, on arrive à dégager du temps pour construire un véritable projet d'insertion sociale et professionnelle. Si les jeunes ne se posent plus la question de trouver à manger, un logement pour le soir, on peut mettre en place un accompagnement plus global. TAPAJ est déjà un programme en plusieurs phases. D’abord le jeune vient travailler, il touche sa paie, il s’en va. Ensuite il a envie de travailler davantage et de bénéficier d'un accompagnement. Enfin, il vient gagner son autonomie. Le schéma n’est pas tout à fait celui d’O2R, avec repérage, remobilisation, accompagnement, mais on est déjà sur une logique progressive, un premier marchepied à l'inscription dans une vie sociale.

 

Qu’est-ce qui vous parait le plus important ? 

Pour moi c’est la question du lien. Avec un jeune il faut trouver une accroche, établir la confiance, une véritable alliance. Arriver à cette alliance, ça peut aller très vite ou prendre beaucoup de temps. L'accompagnement commence quand le jeune est capable d'être dans la demande et moi dans la proposition, et qu’on peut construire quelque chose. Je sais par expérience que si je ne construis pas d'alliance avec les jeunes qu'on accompagne, il ne se passera rien. On travaille aussi la question de la non-demande, ça c'est du travail d'orfèvre qui prend du temps.

 

Dans votre réflexion que faudrait-il améliorer dans le dispositif ?

Ce qui manquait au début, c’était la rémunération. Mais c’est rentré dans l’ordre. Il y a aussi celle du seuil d'exigence. Selon moi, on ne peut pas exiger ce mot d’ordre « tous vers l'emploi » si on ne nous laisse pas une marge d’adaptation, et la possibilité de faire du bas seuil d'exigence. Lorsque que quelqu’un ne sait pas où dormir, on ne peut pas envisager de signer un CDI à temps plein tout de suite, ça n’est pas possible. Il y a deux cultures différentes, entre celle du projet professionnel et celle de l’accompagnement social. Mon expertise va plus être de l'ordre de la levée des freins. Et pour l'expertise professionnelle, je prends appui sur des gens dont c'est le cœur de métier. Heureusement, il y a une vraie porosité, je le vois au quotidien avec nos collègues de la mission locale et par l'expérience du CEJR. Nous avons extrêmement bien travaillé ensemble, c'était très fluide donc vraiment je pense que c'est possible. C'est pour ça qu'on est reparti avec O2R, parce qu'on avait ce lien partenarial de qualité. Ce n’est pas toujours le cas.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs de l'AMI O2R et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

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June 26, 3:37 AM
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Opération Petite enfance

Opération Petite enfance | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

L’association poitevine LE-CENTRE est, comme son nom peut le laisser penser, un centre de ressources et d’information, spécialisé dans les domaines des services à la personne, du médico-social et la petite enfance. Depuis sept ans, il organise des « Rallyes des métiers de services à la personne » ou « des métiers de l’Autonomie » sur différents territoires de l’ex Poitou-Charentes. Une formule différente d’un classique forum emploi, en cela qu’il vise à faire connaître de l’intérieur des métiers en tension, à travers des ateliers proposés sur site.

 

En mai 2025, LE-CENTRE a décidé de se focaliser sur une thématique spécifique pour organiser une manifestation dans la Vienne. « Ce que nous avons lancé est une approche nouvelle, un rallye uniquement dédié à la petite enfance, » décrit David Hamelin, directeur.  « Donc nous avons écarté les métiers du grand âge et du handicap pour se concentrer sur ce secteur spécifique, avec un focus sur les métiers de la crèche, les assistantes maternelles et les lieux comme les relais petite enfance. »

 

Cette première édition s'est tenue du 12 au 16 mai derniers, en collaboration étroite avec la CAF de la Vienne et le service de protection maternelle et infantile (PMI) du conseil départemental, ainsi qu’en lien avec plusieurs communes volontaires. Cet événement intitulé « Petite enfance, grands métiers, belles vocations ! » avait pour objectif de mettre en lumière les différentes professions liées à l’accueil des jeunes enfants, en milieu individuel comme collectif, pour susciter d’éventuelles vocations grâce notamment à des témoignages de professionnels et à la rencontre entre structures et publics.


 

Une baisse régulière

 

La Nouvelle-Aquitaine se classe en troisième position des régions française connaissant le plus de difficultés de recrutement. Si l’on prend l’exemple des assistantes maternelles, dont 99% sont des femmes, leur moyenne d’âge est de 48 ans, et le nombre ne cesse de baisser depuis une dizaine d’années. La moitié d’entre elles partiront à la retraite à l’horizon 2032. Certes, il y a toujours de nouveaux agréments délivrés, mais ils ne viennent pas compenser cette baisse. « Les professionnels savent très bien que l'effort à consentir, il va falloir le faire sur des années. Même chose pour les crèches. Mais ils n’ont pas beaucoup de moyens pour agir. Il y a aussi la question de la dégradation des conditions et de la qualité de vie au travail. Le Covid n’a pas arrangé les choses, mais il y a toujours un turnover important et un nombre d'arrêts maladie exponentiel. »

 

Le rallye petite enfance tient son origine d'échanges avec les employeurs qui estimaient que LE-CENTRE faisait beaucoup sur les métiers d'aide à domicile et du médico-social, mais que ceux de la petite enfance n’avaient pas assez de visibilité. En réponse à ces remarques, l’association avait mis en place à deux reprises, en 2023 et 2024, une semaine sur les métiers de la petite enfance, qui consistait à proposer quelques événements concentrés à Poitiers.

 

La CAF de la Vienne a su que certaines structures étaient partie prenante de ces premières semaines et en avaient apprécié le principe. « La CAF ne nous connaissait pas à proprement parler. Ils nous ont alors contactés pour évoquer des problématiques d'attractivité des métiers au sens large. Cela peut paraître surprenant que la CAF s’empare de ce problème, peut être par abandon d'autres acteurs. Leur questionnement, pour faire simple, était « comment faire venir des gens dans notre secteur ? »

 

Un plan de travail a été élaboré, incluant une campagne de promotion relayée par le service public de l’emploi et une quarantaine de petites municipalités de la Vienne, des portraits vidéo de professionnels, divers supports souvent utilisés dans les actions de promotion des métiers. Après sollicitations des professionnels par LE-CENTRE, des propositions d'ateliers, d’animations, d’expositions et d’immersions ont émergé de Loudun, Montmorillon, Civray, un peu partout où sont implantés des relais petite enfance et des crèches.

 

« Nous avons été obligés de refuser certains ateliers ou animations pas toujours suffisamment abouties, parfois parce que les professionnels ne sont pas très habitués à faire eux-mêmes la promotion de leurs métiers, ils ne sont pas organisés pour. Nous avons recueilli un peu plus de quarante projets, qu'on a essayé parfois de rassembler dans un même lieu, afin d’homogénéiser le programme. Nous sommes aussi intervenus sur les titres, certains n’étant pas vraiment explicites. Le seul élément qui n’a pas été retenu pour cette édition, c’est l’intégration d’un job dating, ce qui ne veut pas dire qu'il ne faudrait pas en faire la prochaine fois. Mais, globalement, tout s’est harmonisé assez naturellement. »

 

Donc au total, trente-huit ateliers répartis sur la Vienne qui ont mobilisé différentes structures, relais petite enfance, crèches, gardes d'enfants à domicile, organismes de formation. Occasion pour un public de collégiens, lycéens, étudiants, personnes en recherche d’emploi ou en reconversion professionnelle, de découvrir les métiers d’auxiliaire de puériculture, d’éducateur de jeunes enfants, d’assistante maternelle… et pourquoi pas, de susciter des vocations.

 

En termes de bilan, ce rallye a attiré environ quatre-vingts personnes. Donc en moyenne, deux personnes par atelier. « Si on se réfère aux premiers rallyes organisés, on avait plus de 200 visiteurs. Aujourd'hui, quand on atteint la centaine, on est contents. Il y a encore moins de fréquentation sur la petite enfance. Nous n’avions pas vraiment de repère, à part les semaines que nous avions organisées précédemment qui avaient bien marché au regard de la communication assez faible que nous avions effectuée. Là, ce sont quelques ateliers en zone rurale qui n’ont pas pu avoir lieu faute de participants. »

 

Attirer les futurs professionnels

 

Les participants au rallye étaient presque uniquement des femmes, pour un secteur où la mixité est virtuellement inexistante, sans doute en raison de préjugés et de stéréotypes profondément ancrés. Parmi elles, deux profils majeurs. D’abord des femmes plutôt jeunes, moins de vingt-cinq ans, avec ou sans formation. Ensuite des personnes d’un peu plus de quarante ans, qui ont déjà travaillé au noir, ou qui sont en deuxième partie de carrière. Ce qui les distingue le plus, c’est la question de l’employabilité immédiate. Beaucoup de ces profils, parfois surdiplômés, sont dans une logique d'intégration.

 

« Si on ne s’en tient qu'aux chiffres, la question peut se poser de l’intérêt de maintenir ce genre de manifestations. Sachant qu’un rallye, en termes de coût, est très raisonnable, de l’ordre de 2 500 euros. Cela étant, les retours des professionnels ont tous été bons. Je crois qu’ils sont conscients de la difficulté à attirer des gens. Arriver à capter l’attention, même seulement d’une ou deux personnes, c’est déjà énorme. Au-delà de son efficacité immédiate, un rallye sait fédérer les acteurs autour d'une thématique commune. Les professionnels n’ont pas tant d’occasions que ça de faire des choses ensemble, de se croiser dans le cadre d’une action collective. Ils sont lucides sur le fait qu’il n’existe pas de baguette magique, et que la situation nécessite d’effectuer un travail de fond.  Beaucoup ont envie de refaire une édition le plus tôt possible. »

 

LE-CENTRE envisage de renouveler l’expérience d’ici la fin de l’année, peut être sur un format plus léger, avec pour ambition de mettre en lumière le sujet de la petite enfance. Et l’envie d’y associer les publics scolaires, même s’ils ne sont pas immédiatement employables. Mais ce serait une façon de dessiner de futures voies professionnelles.

 

Dans un futur proche, l’association prépare son déménagement. Son projet étant d’investir de nouveaux locaux, et d’en faire une vitrine, un lieu facile d’accès et ouvert autant aux habitants qu’aux professionnels, afin qu’ils puissent y trouver tout renseignement utile sur l'habitat et la santé. En incluant tout ce que LE-CENTRE propose habituellement sur la prévention des chutes, l'aménagement de l'habitat, les aides techniques, etc. Viendraient s’y ajouter les questions liées à la santé environnementale, la précarité énergétique.   

 

« Notre idée, c’est que nous ne serions pas les seuls à animer ce lieu. Nous voulons y associer très largement des énergéticiens, des mutuelles, des assurances, etc. Notre ambition c’est que cet endroit soit véritablement unique, ouvert vraiment cinq à six jours par semaine et dans lequel on n'est pas obligés de découper la réalité en tranches pour que les gens arrivent à se projeter dans un habitat santé et sécurité. »

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June 12, 5:28 AM
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Être mini entrepreneur un jour, une semaine, une année

Être mini entrepreneur un jour, une semaine, une année | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Entreprendre Pour Apprendre (EPA) est une association en développement qui, depuis plusieurs années, propose aux établissements scolaires des projets destinés à faire vivre aux jeunes et à leurs enseignants une « aventure entrepreneuriale collective ». Ces programmes ont pour nom « Mini-Entreprise », en format « S », « M » ou « L » en fonction de leur durée et de leur ambition. Ils sont mis en place avec les établissements en collaboration avec le rectorat et la mission académique école entreprise. Par ailleurs, EPA est labellisé « tiers de confiance » par la Région Nouvelle-Aquitaine ce qui lui donne une légitimité certaine vis-à-vis de tous les acteurs.  

 

Son public est composé de collégiens et lycéens, dans des proportions qui varient d’une année sur l’autre. Les établissements relèvent pour l’essentiel de l’Éducation nationale ou de l’enseignement agricole, situés à Bordeaux, mais également en zone rurale où ils ont moins de propositions d’animations de projets. L’association intervient également dans des écoles d’ingénieurs, des facultés, certaines missions locales, et mène quelques actions ponctuelles pour des publics mixtes. Plus des deux tiers des établissements restent fidèles aux programmes, et les reconduisent chaque année. Ce ne sont pas toujours les mêmes enseignants qui les portent, pas toujours selon le même fonctionnement.

 

Les différentes formules se distinguent par leur durée et leurs modalités. Les plus courtes, les « Mini S », se déroulent sur une journée. Elles ne nécessitent aucune préparation particulière et sont donc faciles à mettre en œuvre. Selon Anaïck Jusy, directrice d’EPA, « à partir du moment où les enseignants voient la façon dont on travaille sur une journée, ils ont souvent envie d'aller un peu plus loin et de mettre en place des programmes un peu plus longs. » Plus généralement, tout dépend de la volonté des enseignants d’investir du temps avec leurs élèves. EPA les accompagne dans cet exercice, les forme, leur propose des réunions régulières en visioconférence, des visites, etc. Gérer de tels projets leur demande du temps, surtout la première année, quand ils découvrent le concept.

 

« Le but de nos programmes est avant tout de révéler le potentiel des jeunes, on n'est pas strictement sur la culture de l'entrepreneuriat. Notre objectif est vraiment l'orientation et l'insertion professionnelle à travers la connaissance de l'entreprise. On est dans la pédagogie active, les jeunes découvrent des métiers en les pratiquant réellement. Certains se découvrent des talents en communication, en commercial, dans la prise de parole en public. Ils développent leur confiance en eux. »  La relation avec l'enseignant est différente, puisqu’il devient en quelque sorte une ressource mobilisable. Il n’est plus en face des élèves, mais à leur niveau et apprennent en même temps. Ce n’est pas forcément une posture naturelle pour eux.

 

Des programmes en taille S, M ou L

 

Les « Mini S » sont mises en place sur sollicitation des entreprises partenaires. Si les demandes venaient des établissements, elles seraient trop nombreuses pour que l’équipe EPA y réponde. Elles se déroulent en une journée, sur une thématique choisie. Ainsi, en partenariat avec la Délégation régionale aux droits des femmes et à l'égalité (DRDFE), une session est prévue cette année dans chaque département, sur le thème de l’égalité femmes-hommes. « L’égalité femmes-hommes est un sujet inclut de façon systématique dans tous nos programmes. On leur propose une séance pour que, lorsqu’ils font la répartition des rôles dans l'entreprise, ils se positionnent et se questionnent par rapport à cette égalité. »

 

Autre exemple, « l’usine du futur » avec la communauté d'agglomération Rochefort océan et Airbus pendant la semaine de l'industrie 2024. Dix groupes de six collégiens, nombre idéal, de classes de 4e et de seconde, ont été invités à trouver des façons d’améliorer l’usine de façon durable (transports, énergies renouvelables…). A la fin de la journée, les groupes ont présenté leurs solutions à l’oral.

 

Les programmes longs, « M » ou « L » démarrent à la rentrée et finissent à la fin de l'année scolaire. Ils se déroulent parfois deux ans. Leur principe est la découverte de l'entreprise avec une idéation, une étude de marché. Les élèves se répartissent les rôles dans l'équipe et vont jusqu’à la commercialisation de leur bien ou service. Des visites d’entreprises du territoire peuvent leur permettre de valider leurs idées et leur organisation. Les programmes « mini M » sont le plus souvent « généralistes », mais ils peuvent aborder certaines thématiques, sur proposition des partenaires ou à la demande des établissements par rapport à leur projet, comme le numérique, l'intelligence artificielle, l’innovation, l'agroalimentaire, le BTP de demain, la banque, avec un focus plus ciblé sur certains métiers. EPA a pour l’instant assez peu de partenaires industriels dans l’aéronautique, la plasturgie l'industrie pharmaceutique mais cela reste marginal. Son idée pour l’avenir est aussi de développer des partenariats plus régionaux.

 

Quand les enseignants ont un peu moins de temps à consacrer à un programme long, ils peuvent l’organiser  sur une ou deux semaines de façon intensive, ou dans le cadre de stages de seconde et de 3e. Les établissements s'inscrivent directement ou demandent d’aborder un sujet particulier. Il arrive aussi que les partenaires d’EPA souhaitent travailler avec un certain type d'élèves, principalement les lycées, voire les post-bac, notamment sur tout ce qui est intelligence artificielle.

 

« Si un établissement nous demande une « Mini L », mais qu’il ne dispose que d’une heure par semaine, on va plutôt lui conseiller une « Mini M », quitte à la transformer ensuite. On a mis en place un questionnaire assez précis avec l'enseignant qui chapeaute le projet, afin de savoir s’il a déjà fait des projets similaires, s’il a l'habitude de l'entreprise, s’il a déjà un réseau. En fonction de ses réponses, on lui propose un accompagnement différencié. S’il est déjà familiarisé avec les mini entreprises, il n’aura pas besoin d'une aide tous les mois. En revanche, s’il débute, on va l'accompagner de façon un peu plus spécifique. »

 

Les jeunes travaillent minimum deux heures par semaine sur leur projet, parfois en dehors de l’école. C’est à la carte, en fonction de l'établissement, des disponibilités des élèves et des encadrants. Les « Mini M » et les « Mini L » se font plutôt en groupe classe avec quinze à vingt participants, deux projets par classe si l’effectif est important. Dans chaque projet, un mentor accompagne l'enseignant. Soit ce dernier connaît déjà des professionnels avec lesquels il a l'habitude de travailler, soit EPA en trouve un dans son réseau. Le plus souvent, le mentor arrive en début d'année, avant que les élèves déterminent le projet.

 

Le rôle des mentors

 

Il est important qu’un mentor suive le programme tout au long de l'année. Son rôle est de l’accompagner sur la gestion de projets et de mettre à contribution ses contacts s'il a besoin d'un appui sur la communication ou les RH. On lui demande d'intervenir au moins une fois par mois, afin de créer un lien avec le groupe. Certains interviennent chaque semaine, parce qu’ils y trouvent un intérêt et qu’ils estiment que c'est une source d'énergie d'être en contact avec les jeunes.

 

« Nous avons des mentors qui trouvent facilement leur place avec les élèves et leur enseignant, ce qui n’est pas évident. L’entente dans le binôme est très importante, et c’est pour cela qu’on demande que mentor et enseignant se rencontrent avant la mise en place. On voit très bien si un projet a bien été accompagné ou non par un mentor, la différence est très significative. Il faut également que l’intervenant s'y retrouve. Notre objectif l'année prochaine est d’animer ce réseau qui constitue une richesse pour nous. Nous envisageons notamment de créer des événementiels, des conférences, etc. »

 

Les programmes longs sont toujours plus compliqués à mettre en place. Grâce à l’attribution du label « tiers de confiance » par la Région, cette dernière a décidé de prendre en charge la cotisation demandée aux établissements, rendant ainsi possible la gratuité des programmes. Autre obstacle, les heures à disposition des enseignants ont tendance à se réduire, avec notamment la fin de l’option DP3 "découverte professionnelle 3 heures", ou la réalisation d’un chef-d’œuvre, deux temps où il était possible de mettre en place des programmes. D’où une plus grande réticence de leur part à envisager des programmes longs,

 

L’apport aux élèves est nettement visible, même sur une journée. En début de séance, on leur demande dans quelle position ils arrivent : en mode explorateur avec envie de tout apprendre, en mode vacancier, mieux vaut être là qu’en cours, ou en mode prisonnier. Même question à la fin de la journée, et souvent les prisonniers et les vacanciers sont devenus explorateurs. Alors que la perspective de présenter leur projet à l’oral les inquiète initialement, ils se battent littéralement pour passer en premier en fin de séance.

 

Travailler ensemble, c’est apprendre à se connaître, ce qui les oblige à développer la cohésion et l’esprit d’équipe. Cela redonne aussi du sens aux apprentissages parce qu’ils s’aperçoivent de ce dont ils ont besoin, comme un certain niveau de français pour faire un bon discours. En fin d’action, quand il y en a, les bénéfices sont remis à une association, un acte citoyen qui fait partie du programme, d’autant qu’avant de parler de projets, de produits et services, les jeunes sont incités à définir les valeurs qu'ils veulent mettre dans leur mini-entreprise.

 

« Aujourd’hui, on ne touche pas les 9-12 ans, mais c'est un programme qu'on aimerait développer dans l'avenir. C’est vraiment un public différent une pédagogie complètement différente. Jusqu’ici, en 2024 et 2025, nous avons mis en place 160 programmes dont une trentaine de « Mini S », soixante-dix « Mini L », le reste en parcours « M. » Nous organisons également des actions plus ponctuelles, comme des mini job datings avec simulations d'entretien par des professionnels. Ou encore, une action de validation de compétences sur l'intelligence artificielle avec notre partenaire Accenture. »

 

Entreprendre pour apprendre s’apprête à fusionner avec l’association « 100 000 entrepreneurs ». À partir de la rentrée 2025, EPA continuera à porter les programmes mini entreprises et intègrera les parcours de sensibilisation des jeunes à l’esprit d’entreprendre. Ce panel d'interventions et d’actions en commun lui permettra de toucher plus d'établissements, donc plus de jeunes. Et d’étendre le nombre d'entrepreneurs de son réseau.

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May 22, 9:11 AM
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Partenaires pour les invisibles

Partenaires pour les invisibles | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

La Maison de l'Emploi et de la Formation du Thouarsais (MEF) regroupe la mission locale, la Maison de l’Emploi et le Comité de Bassin d’Emploi. En 2024, elle a répondu à l’AMI O2R en consortium avec le CCAS, Porte Ouverte Emplois (POE) et la Communauté Professionnelle Territoriale de Santé (CPTS). Trois conseillers (MEF, CCAS, POE) travaillent ensemble sur le projet, dont Emmanuelle Renard pour la MEF.

 

Comment s’est faite la mise en place de votre projet ?

Sur notre territoire, il y a énormément de partenaires, beaucoup d'actions qui sont menées. L'idée c'était de pouvoir faire le lien entre ces partenaires. Le dispositif a été vraiment très bien accueilli, puisqu’il répond bien aux besoins du territoire sur le logement, la mobilité, la santé et les freins vers l'emploi. Début décembre, on a commencé par trois mois de construction d'équipe parce qu’on ne se connaissait pas, et on voulait se mettre d’accord sur notre fonctionnement. On a lu la convention pour comprendre exactement ce qu'on attendait de nous. Cette période nous a servi à travailler le partenariat, créer des groupes de travail et des ateliers de remobilisation, imaginer quels outils mettre en place. Mais aussi de rencontrer des gens, invisibles ou décrocheurs, qui pourraient être amenés à rentrer sur le dispositif.

 

Quel type de questions vous posiez-vous au départ ?

Nos plus grosses interrogations tournaient autour du profil du public. On se demandait si des jeunes de seize ans pourraient intégrer un groupe avec des personnes de quarante. Pareil au niveau de la rémunération spécifique à ce dispositif, on a encore beaucoup de questions. Également pour les personnes étrangères, à savoir est-ce qu'on allait pouvoir faire entrer des personnes qui avaient juste un récépissé ou est-ce qu'il fallait attendre qu'elles aient vraiment l'autorisation de rester sur le territoire. Sinon, est-il possible de faire entrer des personnes qui ont déjà un accompagnement ?

 

Vous êtes partis sur quelle base ?

Notre discours c’est que nous accompagnons tous publics à partir de 16 ans, très éloignés de l'emploi, qui n'ont pas d'accompagnement, ou qui sont décrocheurs de leur accompagnement. Par exemple, ils peuvent être connus de la mission locale, mais leur conseiller ne les a pas vus depuis quelques mois. On vérifie si les personnes sont prêtes à venir à trois rendez-vous par semaine, un entretien individuel et deux ateliers collectifs.

 

Sur la convention on a un objectif de trente à trente-cinq personnes sur l'année, on n'avait pas vraiment de chiffre, à part cet objectif, mais on s'est rendu compte très rapidement que très peu de gens ne sont pas du tout accompagnés. Il en existe tout de même, on fait du repérage d'invisibles, mais pas au tant qu'on aurait pu le penser. Cela dit, nous n’en sommes qu’au début.

 

A quoi ressemble votre repérage ?

Mes collègues n’ont pas assez de temps pour se rendre sur le terrain. Ils n’ont qu’une journée par semaine à consacrer au projet. Une fois par mois, j'interviens auprès d’associations caritatives comme les Restos du Cœur, le Secours populaire, la halte du cœur, le CAARUD Aides. Je vais sur le quartier prioritaire pour participer à des « cafés parents. » J’essaie de toucher un maximum de personnes. Je suis souvent avec un collègue de la mission locale qui s’occupe des jeunes, et moi des adultes. On fait aussi des permanences sur les aires des gens du voyage.

 

Comment vous vous adressez aux personnes que vous repérez ?  Nous accompagnons des personnes vers l’emploi, mais elles ne croient pas du tout en elles. Dès qu'on leur parle emploi et travail, leur regard se ferme, elles se détournent, elles disent que ce n’est pas pour elles. Je préfère leur expliquer que je suis là pour les accompagner dans leur projet de vie, leurs besoins, leurs envies, dans les domaines de la santé, de la mobilité, du logement. Dans ces moments de repérage, on cherche d’abord à créer du lien. 

 

Ceux qui sont partants pour le projet me contactent et je les reçois dans mon bureau. S’ils ne sont pas prêts à venir dans une institution, on peut se retrouver ailleurs, dans un lieu public. Lors de ce premier rendez-vous, ils me parlent de leur parcours, de ce qu'ils ont envie de faire. On se voit une deuxième fois pour que je leur réexplique O2R et ce qu'on peut faire ensemble, parce qu'en fait la première fois ils ne m’écoutent pas vraiment. On se voit une troisième fois pour la partie administrative. Chaque mois on organise un petit déjeuner qui officialise l'entrée sur le dispositif. Dans l'idéal les anciens O2R entrés le mois d'avant y participent pour un moment de partage d'échanges avec les nouveaux, pendant lequel ils peuvent reposer des questions, faire mieux connaissance avec nous, exprimer leurs attentes.

 

À quel moment vous sentez qu’une personne est prête à continuer ?

Une personne est mûre à partir du moment où elle vient aux trois rendez-vous. Si elle arrive à l’heure, c'est déjà un signe qu'elle est motivée. À tout moment, elle peut nous dire que finalement, elle n’est pas encore prête. Ce qui est bien avec O2R c'est que on peut vraiment adapter à chaque situation de vie, à chaque environnement familial.

 

Comment organisez-vous la période de mobilisation ?

La période de remobilisation dure cinq mois au plus. Pendant ce parcours, on s’efforce de faire acquérir aux participants un minimum de savoir-être. On leur propose des ateliers de jardinage, des ateliers de gestion de budget, des balades culturelles, etc. Beaucoup nous demandent aussi de travailler la mobilité et la santé. Nous avons également un atelier « bouge avec O2R » dont le principe est de montrer que dans sa vie quotidienne, lorsqu’on fait des courses ou du ménage, on se met déjà en action. Nous n’avons pas l’ambition d’être des coachs sportifs, ou des diététiciens. Le principe est d’être ensemble, d’échanger. Certaines personnes ont juste besoin de reprendre confiance en elles avant de repartir. Au cas où la personne n’est pas prête au bout des cinq mois, on imagine qu’il sera possible de continuer le parcours jusqu'à douze mois. Donc on a tout de même une petite marge.

 

Vous avez prévu de constituer des groupes ?

On va tester de les intégrer à des groupes existants, mais je ne pense pas que tout le monde soit prêt à intégrer un collectif. On sera probablement obligés de revenir à du suivi purement individuel, ou seulement des ateliers O2R. Quand on organise nos petits déjeuners, on observe comment se comportent les gens. Notre public ce sont vraiment des personnes très éloignées de l'emploi et de la vie sociale, on ne sait pas trop comment elles peuvent réagir. On pense que mixer les groupes pour des activités comme le jardin ou le sport, ça peut fonctionner. 

 

Quand parlez-vous du projet professionnel ?

J'en parle déjà lors des trois premiers rendez-vous. Souvent ce sont les gens qui abordent le sujet. Quand on parle de mobilité, de logement ou d'aller voir un médecin, de prendre soin de soi, ils finissent souvent par me dire qu’ils veulent travailler. Dès ce moment-là, je leur demande ce qu'ils veulent faire, en essayant dans un premier temps de ne pas prendre en compte leurs freins en termes de mobilité ou de garde d'enfants, etc. En fait il faut faire émerger les compétences, ça se fera par le biais de la remobilisation parce que tout est transversal. On parle du projet pendant la phase de repérage, mais c'est vrai que les premiers ateliers de remobilisation ne sont pas du tout axés emploi, seulement sur la vie quotidienne. On échange beaucoup sur l'hygiène de vie.

 

Vous avez rencontré des choses surprenantes ?

Avant j’étais commerçante. Au début ça a été un petit peu difficile, aussi bien pour eux que pour moi, parce qu’il y a beaucoup de gens que je connais. Certains étaient un peu gênés, et n’avaient pas envie qu'on sache qu’ils venaient à la banque alimentaire. Petit à petit, ils viennent vers moi, je suis mieux identifiée. J'avais imaginé rencontrer surtout des personnes en grande détresse et en grande précarité, mais je vois plutôt des personnes, certes éloignées de l'emploi, mais qui se débrouillent, sont insérées, ont un logement. On a aussi beaucoup de familles avec des enfants en situation de handicap, je ne m'y attendais pas du tout.

 

L’accompagnement va consister en quoi ?

Au bout des cinq mois de remobilisation, ils s’inscrivent à France travail qui les formera aux techniques de recherche d'emploi, à la création d’un CV, puis qui les orientera vers la structure la plus adaptée à leur accompagnement. On reste présent, on ne les lâche pas d’un coup. Cependant on ne se substitue pas à l'accompagnement. L'idée générale est de poursuivre ce suivi peut être une fois par mois ou tous les quinze jours, et ça pendant quatre mois. Nous prévoyons même, vers la fin du parcours de remobilisation, de leur proposer des visites et des stages en entreprise, des immersions, des rencontres avec des recruteurs.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs de l'AMI O2R et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

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May 6, 5:46 AM
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En route pour la rencontre

En route pour la rencontre | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

Elsa Payri-Chinanou est chargée de projets pour l’association Insertion Emploi Bearn Adour (IEBA) qui a participé de 2019 à 2021 au projet « in system. » En 2023, IEBA a répondu à un appel à projets du plan pauvreté de l'État pour s'équiper d'un fourgon aménagé en bureau d’accueil mobile, le BAM dont Mathilde Lubrano est l’animatrice. Son fonctionnement est assuré depuis décembre 2024 grâce au soutien de l’AMI O2R.

 

Que pouvez-vous nous dire sur le BAM ?  

Initialement, notre camion était dédié à nos bénéficiaires, des personnes déjà en accompagnement par la mission locale ou le PLIE. Nous allions vers nos bénéficiaires, mais pas forcément vers ceux qu'on ne connaissait pas encore. Par la suite, on a décidé de positionner le BAM sur le repérage de ces invisibles, ceux qui ne relèvent pas d'un accompagnement renforcé. O2R nous permet d’assurer la continuité de l’utilisation du camion et toute la relation partenariale que nous avons développé, notamment avec le Service Départemental des Solidarités Et de l'Insertion (SDSEI) et les assistantes sociales de notre secteur pour qu'elles puissent assurer les accompagnements de leurs participants et bénéficiaires. Notre animatrice circule tous les jours avec le véhicule, les conseillères mission locale peuvent aussi aller à la rencontre des jeunes bénéficiaires sur les territoires, les conseillères PLIE et notre service logement aussi. Par ailleurs, on prête le BAM à pas mal de partenaires, à condition qu'il soit utilisé sur notre territoire.  


Pourquoi avoir choisi cette solution ?

IEBA couvre 179 communes situées au nord de Pau et au sud du département, dans quatre communautés de communes du Béarn assez rurales. Notre siège social est à Morlaàs et nous avons douze lieux de permanence sur tout le territoire. Malgré cela, des zones blanches subsistent, qui ne sont couvertes ni par nos services, ni par les services publics en général. L’un des premiers freins à l’accès à l'emploi c'est la mobilité. Pouvoir se rendre au plus près du lieu d'habitation des bénéficiaires, ça fait partie de la réponse. Même si ça ne règle pas tout.

 

Vous vous êtes fixé un objectif quantitatif ?

Notre objectif est de toucher cinquante personnes par an. Maintenant que l’action de terrain a démarré et que nous avons les premières données, on se rend compte que certaines personnes rencontrées ne pourront pas être comptabilisées. On s’attend à avoir un nombre important de déperditions. On sait que par principe, il faut rencontrer beaucoup de potentiels bénéficiaires.


Pour vous Mathilde, à quoi ressemble une semaine type avec le BAM ?

Je fonctionne vraiment au cas par cas, selon les besoins. Je n’ai pas d'itinéraire prévu, pas de permanences dans des villages. Peut-être que ça se mettra en place plus tard. Chaque jour est différent et je m'adapte aux demandes. A mon arrivée, mon premier objectif était de faire de la prospection auprès des commerces, de la boulangerie au salon de coiffure en passant par la pharmacie. Et des collectivités qui étaient déjà informées du projet O2R grâce à notre communication. Mais je préfère toujours me présenter physiquement. Je suis aussi allée à la rencontre des associations sociales et culturelles qu’IEBA connaissaient déjà. On compte beaucoup sur ces partenaires pour repérer des personnes invisibles. On mise aussi sur le bouche-à-oreille et la rencontre spontanée, parce que je ne vais pas jusqu’au domicile des gens.


Quel est exactement le discours que vous tenez à ces repéreurs ?  

Ça a été un grand questionnement dès le début. Sachant que le dispositif O2R n’est pas simple à comprendre. Et qu’en plus, on est une structure multi multiservices, c'est compliqué aussi. Quand j'arrive dans un lieu, je me présente en tant qu’association IEBA. Je fais très simple, j’explique qu'on accompagne tous les publics dans la recherche d'emploi ou d'orientation, mais je ne rentre pas trop dans les détails. Je leur demande de revenir vers moi s’ils rencontrent ou qu'ils entendent parler de personnes qui auraient besoin d'aide.

 

Vous procédez toujours de la même manière ?

Je me déplace avec le camion pour rencontrer chaque personne de manière très réactive. Ça peut se faire du jour au lendemain. J’essaie de comprendre son parcours, son projet et savoir de quoi elle aurait besoin. Et en fonction de ça, je l'oriente rapidement vers les bons intervenants. Si elle a besoin d’être remise en confiance, je peux me déplacer à plusieurs reprises. Lors de mon recrutement, on m'a fait comprendre que je n’avais pas de limites et que je devais tout tenter. Je pense qu’il n’y a pas de petite ou de grosse victoire. Tant qu'on arrive à raccrocher une personne, c'est toujours ça de pris. Repérer les invisibles, c’est vraiment faire de la dentelle.

 

On peut mettre en place d’autres actions, par exemple être présent sur un marché un samedi matin. On saura plus tard si c’est efficace. On est toujours prêts à essayer de se greffer sur des événements existants, organisés par d'autres associations, comme des forums d'emploi, des distributions de colis alimentaire avec les Restos du Cœur. On a aussi beaucoup de prescriptions qui viennent d'élus et des secrétaires de mairie. Et puis comme IEBA est aussi mission locale, je récupère des listes de jeunes qui n'auraient pas été vus depuis plus de 6 mois. Ils rentrent aussi dans le cadre des invisibles.


A quel moment débute la phase de mobilisation ?

La période de repérage peut durer jusqu'à un mois et demi. Je rencontre chaque personne plusieurs fois, pour affiner le bilan, voir si elle adhère au dispositif. Ensuite la période de remobilisation est de quatre mois maximums. Cela dit, si un jeune va au-delà des quatre mois, on continue à l’encadrer. Mais on ne va pas jusqu’à l’accompagnement. D’ailleurs on a commencé à toucher les premières limites du projet, avec cette frontière entre remobilisation et accompagnement qui n’est pas toujours très claire.

 

En quoi consiste-t-elle ?

En remobilisation, on est vraiment en individuel plus qu’en collectif. Pour l’essentiel, c’est de la remise en confiance, du coaching, de l’écoute. Pour créer une dynamique, avec nos partenaires nous proposons tout un éventail d’activités culturelles, sportives, des événements, des visites de centres de formation, des ateliers sur l'orientation et les métiers, via l’ERIP. On a aussi un partenariat avec la CPAM pour bénéficier d'un bilan de santé gratuit. On utilise des outils comme des casques de réalité virtuelle, un simulateur de conduite pour réviser le code, des petits jeux de société qu'on utilise souvent dans les ateliers, ainsi qu’en individuel. Ce genre de choses, ça peut se faire dans l’espace clos du camion.

 

Ce qui est sûr, c'est que ce qui fonctionne en remobilisation, c'est le cas par cas. Le principe est de s’adapter à la personne et à son rythme. Il y a des jeunes qui vont avoir besoin d'être vus une fois par semaine. Alors que pour d’autres, notamment les plus désociabilisés, une fois tous les quinze jours, c’est déjà beaucoup. Souvent je constate qu’ils ne savent pas réellement ce dont ils ont besoin, donc c'est à moi de proposer des choses. Ensuite, ils adhèrent ou pas.


Quel est le premier bilan que vous tirez de cette action, et que faudrait-il pour l’améliorer ?

La première chose que nous avons remarqué, c’est que des vrais invisibles, il n’y en a pas tant que ça. Finalement, le territoire est bien maillé par les partenaires et les associations. La mission locale et le PLIE sont bien identifiés, les publics connaissent les structures. Il n’y a pas de zones totalement déconnectées, totalement perdues.


On sait qu’on ne pourra pas régler le problème de la mobilité à la fin de la remobilisation. Certains de nos ateliers ne sont organisés qu’au siège de la mission locale et ne peuvent pas être délocalisés. Ça peut être un frein. Nous avons tout de même la chance d'avoir des permanences sur le territoire. Mais la mobilité reste le problème le plus important. Pour un jeune sans permis, sans voiture, des parents non disponibles, aucun moyen de transport collectif sur le territoire, ça reste très compliqué.

 

 

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April 17, 9:07 AM
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Convergence, à l’appui des chantiers

Convergence, à l’appui des chantiers | Initiatives locales et paroles d'acteurs | Scoop.it

L’histoire de Convergence débute en 2007 sur les quais du canal Saint-Martin à Paris, avec l’opération très médiatisée d’installation de tentes destinées à loger des sans-abris. À l’époque, la ville de Paris a accepté la proposition d’Emmaüs France d’accompagner ces personnes via un dispositif d'insertion par l'activité économique, dans le but de trouver une place dans la société. Au regard des résultat de cette action, l’État a aussi manifesté son intérêt d’essaimer le même programme sur d’autres territoires. L’association Convergence France est née de cette volonté.

 

Aujourd’hui, cette approche est développée sur une douzaine de territoires. Au démarrage, c’étaient des territoires urbains à l’image de l’expérimentation parisienne. Puis l’État a sollicité l'association nationale pour savoir si le programme pourrait être déployé sur un territoire « moins dense » sous réserve de l’accord des acteurs locaux. La Charente a été sélectionnée pour porter la première expérimentation Convergence et Premières heures en chantier sur ce type de territoire.

 

Territoire moins dense ne rime pas exclusivement avec ruralité. Aujourd’hui, le collectif Convergence Charente couvre tout le département, y compris des zones urbaines. La précarité sur ces territoires ne passe pas entièrement par le sans-abrisme, la raison d'être de Convergence est de se tourner vers les plus fragiles, qu’ils soient à la rue ou en habitat très précaires.

 

S'adresser aux plus précaires

 

Convergence Charente a débuté ses actions en 2021. Le collectif s'est construit au fur et à mesure. Il compte aujourd’hui sept chantiers d’insertion pour 280 salariés accompagnés. En entrant dans ce collectif, les structures bénéficient d’un renfort et de budgets pour accompagner au mieux leur public. En échange de cela, elles s'engagent à mobiliser des personnes plus précarisées que celles qu’elles reçoivent habituellement.  Pour Brigitte Stroh, coordinatrice, « ce sont des gens très éloignés de l'emploi, avec de nombreux freins. Ils ont parfois des addictions, des problématiques de santé mentale, des problématiques de handicap plus fortes que dans la population qu'elles ont en temps normal. En résumé, un public plus en désinsertion sociale. »

 

L’apport de Convergence prend différentes formes. D’abord, l’association alloue un budget à chaque chantier pour qu’il renforce ses moyens d’accompagnement. En général, un ASP accompagne entre 30 et 40 personnes. Sauf dans les plus petits chantiers. Grâce à cette aide, le ratio de salariés suivis par accompagnateur est divisé par deux. « À partir du moment où un accompagnateur diminue d’à peu près 50% le nombre de gens accompagnés, cela veut dire qu'il a plus de temps à accorder à chaque personne. C’est obligatoire compte tenu du public visé, qui rencontre beaucoup de freins à l'insertion professionnelle. L’autre idée est d’effectuer un accompagnement global et concerté avec l'intégralité des acteurs, par exemple des entretiens tripartites avec le prescripteur, le Centre d'hébergement et de réinsertion sociale, l'assistante sociale et France travail. »

 

Deuxième type de renfort, l’équipe Convergence Charente, portée par l’Association Régie Urbaine d’Angoulême. En plus de sa coordinatrice, elle est composée de trois chargées de partenariats qui interviennent en appui des chantiers pour les aider à initier des partenariats avec des acteurs locaux et des entreprises, une prospection qu’ils n'ont pas toujours le temps d’effectuer. Une chargée de partenariat peut faire l’interface entre un employeur qui cherche à recruter, et les chantiers qui peuvent avoir des profils à leur présenter. L’équipe Convergence Charente n’interfère pas dans le fonctionnement des structures, qui gardent leur autonomie.

 

« Tous les mois, nous organisons une réunion des directions des chantiers. On évoque différents sujets, des actions à mettre en place, des ajustements, des bonnes pratiques. On communique aussi avec les autres territoires de France pour éventuellement s’inspirer de ce qu’ils mettent en place. De la même manière les chargées de partenariats animent des réunions entre ASP, pour des échanges de pratiques, pour rencontrer un autre partenaire, etc. »

 

Les principes de Convergence France qui consistent à aller chercher les publics les plus précarisés et leur proposer un accompagnement global et concerté, incluent aussi la possibilité pour un salarié de rester sur un chantier d'insertion pendant cinq ans au lieu de deux.  Quelle que soit la durée de sa présence, il bénéficie d’un an de « post-parcours », pendant lequel il reste en contact avec son ASP afin de poursuivre la levée des freins qui ne l’auraient pas complètement été à la sortie du chantier.  

 

Autre programme proposé, baptisé « Premières heures en chantier. » Il est porté par l’Association Régie Urbaine d’Angoulême et Croix-Rouge insertion (Maia et Charente). Il s’agit d’un programme très particulier qui consiste à proposer à des personnes en situation de sans abrisme ou en habitat précaire, de franchir une première marche vers l'insertion professionnelle par quelques heures en immersion dans un chantier. Ils commencent par quatre heures de présence, sans objectif de productivité mais en étant associés à la production. Le but est qu’ils renouent un lien social et professionnel. Pendant un an, la personne augmente progressivement ses heures, idéalement jusqu'à une vingtaine par semaine.  

 

Un engagement fort des chantiers

 

« Pour que les principes des programmes soient appliqués, c'est toute la structure qui doit s’engager, la direction, les ASP, les administratifs. Si tout le monde n'est pas « embarqué », il peut y avoir des tiraillements entre la production, les encadrants techniques et les ASP, parce que ces derniers vont venir plus souvent qu'à l'habitude enlever les salariés de l'outil de production. Nous savons que c'est très exigeant pour les gens qui sont en opérationnel. »

 

« Si ça n’est pas accepté, en général le chantier finit par sortir du dispositif ». En effet, une structure qui s’engage sur les programmes de Convergence France doit modifier ses pratiques d'accompagnement et d’encadrement, afin d’accompagner un public sans-abri, ayant connu la rue ou en situation de grande précarité. Cet attachement à cibler ce public, qui n’a généralement pas accès aux structures d’insertion, est une des raisons d’être de Convergence France, ce que revendique l’association.

 

L’engagement des chantiers d'insertion va bien au-delà de l'attribution d'un budget supplémentaire. Ils reçoivent du soutien mais en contrepartie d’un volume d’accompagnement. Selon leurs dires, les plus anciens chantiers ont eu la sensation de revenir aux fondamentaux de l'insertion par l'activité économique. Ils constataient une certaine dérive vers beaucoup plus de production, ce qui les rendaient un peu trop proches du milieu ordinaire. Intégrer le collectif Convergence, c’est revenir aux fondamentaux, investir à nouveau la dimension sociale de l'insertion économique.

 

La méthode Convergence vise la transformation des pratiques au service d’une transformation du public accompagné. Chaque chantier garde son identité et conserve la maîtrise de ses actions. En revanche, la posture et la manière de travailler se doivent de converger. Cela n’implique pas un changement complet de leur culture mais la nécessité d’intégrer un nouveau mode de fonctionnement. C'est le collectif qui décide de la meilleure façon d'avancer ensemble pour respecter les objectifs. Chaque chantier utilise ses propres supports d'activité, mais a toujours la possibilité d’intégrer les pratiques des autres.

 

« Nos chantiers partenaires ont la sensation de pouvoir faire un accompagnement de qualité y compris avec les plus éloignés de l’emploi. Ils mettent également en avant la rupture de l'isolement professionnel. C’est surtout vrai pour ceux qui sont situés en ruralité, ils disent que c’est un gain énorme pour eux. Ils apprécient d’avoir ces points de rencontre avec les autres structures, et de bénéficier du soutien des chargées de partenariats quand ils rencontrent un problème ou qu’ils ont un dossier bloqué. »  

 

Convergence Charente est en expérimentation jusqu’à la fin 2027, dans le cadre du Pacte des Solidarités. Le collectif reste confiant ce sur le fait que le programme sera pérennisé dans le cadre de la loi contre la très grande pauvreté.

 

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April 3, 9:39 AM
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Projet découverte des métiers

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Ingrid Berghman est directrice de l’association bordelaise « WeJob ». WeJob a répondu à l’AMI O2R, dans le but de mettre en place le projet « Connexion des possibles ». Ce dispositif, lancé en janvier dernier, a été élaboré avec une quinzaine de partenaires dans le cadre d’un consortium. Les deux premiers groupes de participants, un à Bordeaux, l’autre à Talence, ont débuté leurs parcours au début du mois de mars.

 

D’où vient « Connexion des possibles » ?

Notre objectif en tant qu’association est de travailler pour l’emploi. Beaucoup de publics n'ont pas les compétences attendues sur le marché du travail, il est nécessaire d’agir sur le projet professionnel et les compétences des personnes. Le problème, c’est que les publics les plus éloignés ont beaucoup de difficultés à se repérer dans les métiers et les formations. Pour les aider, nous avons créé plusieurs dispositifs, par exemple un qui s’adresse aux femmes de quartiers prioritaires. Nous travaillons à la fois sur leur projet professionnel et sur leur problématique de garde d'enfants. Une autre de nos actions, un CEJ Rupture, vise les jeunes décrocheurs qui rencontrent des difficultés à se projeter. On leur propose notamment de réaliser un projet vidéo. Avec Connexion des possibles, nous avons eu envie de créer un nouveau programme, tout en en nous basant sur les briques de nos dispositifs précédentes, en les combinant dans la même démarche.

 

Vous visez un public particulier ?

Il existe deux catégories de publics. Celui qui est visible du service public de l'emploi mais qui rencontre des grosses difficultés, et celui qui est invisible. Notre objectif est de porter ceux qui ne s'inscrivent pas facilement dans un dispositif existant. Le plus souvent, les personnes dites « invisibles » le sont parce qu’elles ne savent même pas que le service public existe ou qu’elles pensent qu'il ne sert à rien. Sans compter la barrière de langue et la barrière du numérique. Ça peut expliquer leur situation.

 

Connexion des possibles, c'est un programme qui est relativement large, très lié au projet professionnel et à la remobilisation des personnes. On va être un peu moins sur le traitement des problèmes du quotidien, de logement par exemple. Dans la plupart des cas, on va plutôt orienter vers des partenaires. Mais on peut tout de même s’occuper de trouver une place dans un foyer de jeunes travailleurs, ou un audit santé avec la CPAM.

 

Quel est son principe ?

On avait envie d'aller plus loin que ce qu'on faisait jusqu'à aujourd'hui, en ayant plusieurs publics dans le même programme. Et en utilisant ce qu'on sait faire ailleurs pour le démultiplier. On a voulu que ce projet soit pluriel, pour que les participants aient le choix, que nous ne leur imposions rien.  Et qu’il soit accessible à un public aussi large que possible. Trop souvent on segmente les populations en mettant les jeunes d'un côté, les seniors de l'autre, les femmes encore ailleurs, etc. Nous prévoyons quatre sessions par an, deux à Bordeaux, une à Talence, une à Pessac. Chaque session pour un groupe d’une douzaine personnes. Les participants choisissent une des quatre activités proposées, et on leur demande également de se positionner sur une ou plusieurs filières métiers.

 

Quelles sont les quatre activités que vous proposez ?

La première tourne autour de la réalisation d’un podcast vidéo, avec notre partenaire Energie Prod. La deuxième a pour thème la cuisine, et la préparation d’un repas, sous la houlette de l’association « Vision mêlée », spécialisée dans l'insertion par le sport et la cuisine. On y aborde les questions d’approvisionnement, de coût de revient, pour ceux qui envisageraient de lancer leur propre activité dans ce domaine. Nous avons aussi une proposition de mobilisation par le sport, encadrée par « On catalyse ». Il s’agit d’un programme de remise en forme pour que les personnes prennent confiance en elles. L’action se termine par un petit match avec des entreprises, pour nouer des contacts dans un cadre inhabituel. Enfin une activité théâtre d'impro avec « Décalez ! ». Le théâtre d'improvisation est accessible à tout le monde, pas besoin de retenir des textes. Il permet aux gens d’être plus à l’aise à l’oral, en créant des petits sketchs pour parler des métiers et du monde du travail.

 

Et quelles sont les filières que vous présentez ?

Nous accompagnons les stagiaires pendant trois mois, à raison de deux jours par semaine, les lundis et mardis. En parallèle de leur projet, nous animons des ateliers sur le projet professionnel et la recherche d’emploi. Une fois par semaine, les stagiaires se rendent chez un de nos partenaires, notamment sur les plateaux techniques d’organismes de formation, pour faire la découverte des métiers du numérique, du bâtiment, du sanitaire et social, ou encore de l’industrie, du commerce et de l’esthétique. En tout treize filières. À la suite de ces visites, les personnes qui se déclarent intéressées peuvent demander une immersion de quelques jours afin de se frotter à la réalité de tel ou tel métier. Souvent, tant que les gens ne vivent pas cette expérience, ils ont du mal à se représenter ce que ça peut être, et ils restent sur des préjugés. C’est une bonne façon de savoir si ça leur plaît ou pas. Nous pouvons mettre en place ces immersions parce que France travail nous a donné délégation pour être opérateur PMSMP.

 

Comment les participants font-ils leur choix ?

On leur propose un parcours en forme de rallye. Ils ne vont pas tous faire tous les métiers, parce que certains n’ont aucune appétence pour le BTP ou le commerce. Nous leur disons qu’il faut s'ouvrir à différentes options et d’en choisir cinq ou six, ça nous permet de construire avec eux la suite de leur évolution professionnelle. Il y a déjà treize filières à découvrir, avec à chaque fois plusieurs métiers. Mais s’ils veulent en découvrir un qui ne figure pas dans notre éventail, par exemple un métier du bois, dans ce cas nous sommes en lien avec des entreprises du bois à la Cité Bleue dans le quartier de Bacalan, qui peuvent les accueillir pour une découverte.

 

On ne leur impose rien, ils vont vers les métiers qui les intéressent. Un conseiller accompagne chaque groupe de douze personnes. Il coordonne l’activité, ainsi que les partenaires. Il suit son groupe au quotidien, et chaque personne individuellement. Son rôle est d’accompagner les participants et de les guider tout au long de leur parcours. Avec lui, chaque personne construit son projet. Ils décident ensemble de ce qu’elle va faire, réaliser une enquête métier avec une entreprise, chercher une immersion sur tel métier, chercher une formation…

 

Quel est le rythme ?

Les stagiaires participent à des sessions de douze semaines en collectif. Ils sont également suivis individuellement. Au bout des trois mois, on les confronte à leur projet après qu’ils ont fait un premier choix de métiers, un CV, un pitch de présentation. On leur propose un job dating, qui leur permet d’envisager comment ils s’y prendront pour la suite. Les trois mois suivants, nous finalisons les démarches avec eux, par exemple trouver un organisme de formation, ou si c’est pour l’emploi comment faire les démarches entreprise. Donc notre accompagnement est prévu pour six mois minimum, douze mois au plus. Ça peut être plus ou moins long selon les personnes, en fonction de leurs freins, si elles ont une RQTH, si elles font une immersion, etc.

 

Quelles sont les conditions pour entrer dans le dispositif ?

Il n’y a pas vraiment de conditions, mais nous voulons que les participants soient motivés pour trouver un métier, faire une formation ou prendre un emploi. Il faut aussi qu'ils soient capables de comprendre le dispositif, donc on demande un niveau de langue type A2. Le cas échéant, pour aider les gens à monter en charge sur le numérique, nous leur prêtons des ordinateurs. Le plus important, c’est d’évaluer quel est l’éloignement vis-à-vis de l’emploi. La seule vraie limite, c’est qu'il ne faut pas que la personne soit déjà accompagnée par d'autres acteurs en parallèle.

 

Comment les candidats arrivent-ils dans le programme ?

Comme nous cherchons des personnes qui ne sont pas accompagnées par la mission locale ou par France Travail, nous ne sommes pas dans la prescription classique. Une banque alimentaire ou un centre social qui reçoit quelqu'un en difficulté peut nous l'orienter. On va aussi beaucoup sur le terrain, chez les commerçants. Ou même échanger avec les gens dans la rue, dans les parcs, aux arrêts de tram. En fait partout où on peut être au contact des habitants des quartiers. Avec certains de nos partenaires, on organise des micros-trottoirs ou des goûters sportifs. Et des ateliers de socio-esthétique pour les femmes qui n’ont pas forcément les moyens de prendre soin d'elles. Ce sont des ateliers gratuits qui nous donnent l’occasion d’échanger sur leur situation professionnelle.

 

À partir de quand parlez-vous projet professionnel avec les participants ?

On leur en parle dès le début. C’est un dispositif où on va d’emblée parler des métiers qui les intéressent ou pas. S’ils ne sont pas déjà dans cette réflexion, ça ne sert à rien qu’ils viennent. On ne leur parle pas que de ça, on aborde également leurs différentes difficultés, en santé, logement, etc. Si la personne a confiance en nous à la fin de l’échange, on lui propose de venir dans nos locaux pour une réunion de présentation du dispositif. Comme les participants vont faire partie d’un groupe, c’est important qu’ils voient d’emblée la dynamique collective, et qu’ils y adhèrent. De toute manière, ils seront en collectif dans les entreprises ou en formation, et il faut qu’ils s’y habituent le plus vite possible.

 

 

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March 20, 10:10 AM
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Voyageurs avant tout

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Lisbeth Spanjers et Ascension Garcia Robles sont respectivement directrices du centre social le Chemin du Hérisson (Terres-de-Haute-Charente) et du centre social les Alliers (Angoulême). En consortium avec le centre social Les Quatre Routes (Cognac), ces trois structures ont été retenues par l’AMI O2R pour des actions d'accompagnement vers et dans l'emploi destinées au public « gens du voyage. »

 

Qui sont les Gens du voyage ?

« Gens du voyage », c'est vraiment une appellation administrative qui regroupe plein de populations très différentes. Il n'existe pas de communauté de gens du voyage, ce sont des voyageurs avec des origines et des caractéristiques diverses. Le public de nos structures et composé majoritairement de voyageurs, un public que nous connaissons bien, et qui nous connaît bien, parce que nous émanons aussi d'associations créées avec des voyageurs. Mais nous sommes tout de même des centres sociaux de droit commun, nous accueillons tous les autres publics autour des questions d’emploi, d'habitat, d’accès aux droits, de scolarisation, de parentalité, de culture, etc. D’ailleurs nous tendons vers la mixité dans tous nos projets, c'est à dire que lorsqu’on intervient dans des établissements scolaires on n'intervient pas qu'avec des enfants de voyageurs.

 

Ce public présente-t-il des spécificités, et si oui lesquelles ?

Les voyageurs ont une relation au travail un peu particulière, majoritairement ancrée autour de l’auto-entreprise. Ils veulent plutôt être leur propre chef, le salariat n'est pas forcément un univers qui leur parle, parce qu’il engendre des contraintes incompatibles avec certains modes de vie ou certains fonctionnements familiaux. Ils n’ont pas vraiment de perspective de carrière ou de projets à long terme. Ils rencontrent des difficultés à se projeter. S’ils cherchent à travailler, c'est pour satisfaire un besoin immédiat, par exemple changer une caravane. Et puis les voyageurs s'identifient et se caractérisent d’abord par leur relation à la famille, pas en fonction de leur emploi comme c’est le cas dans le reste de la société.

 

Qu’en est-il de leur mobilité ?

Leur mode de vie est marqué par un certain rapport au temps et à la liberté. Il n'est pas centré sur le déplacement, c'est plutôt une identité culturelle, qui tourne autour de la famille et des activités économiques. Beaucoup de voyageurs ne sont plus dans un mode de vie en caravane. Nous sommes sur un public habitant du territoire, qui s'identifie tout de même comme étant voyageur, que leur voyage soit réel ou fantasmé. Plus les gens sont précaires, moins ils bougent, moins ils sont précaires plus ils bougent. Il existe aussi des aléas et des contraintes qui les en empêche, comme le manque de moyens ou de lieux d'accueil.

 

Quel est leur profil ?

Nous avons surtout des personnes de 30 à 40 ans, une majorité d'hommes mais de plus en plus de femmes. Nous constatons une forte évolution de la part des familles, des femmes de plus en plus jeunes qui n’attendent plus que leurs enfants soient grands pour chercher à travailler. La demande féminine augmente, nous avons plus de sollicitations pour des renseignements et de l'accompagnement vers l’emploi. Cela dit, leur profil reste aléatoire, il peut être différent d’une année à l’autre, parce que nous avons aussi des « grands » voyageurs qui partent pendant quelques mois et ne reviennent que l’année d’après. L’action s’adresse ici aux personnes prêtes à s’engager avec nous dans une démarche d’accompagnement sur plusieurs mois, sur le principe de libre adhésion, qui est la base des centres sociaux.

 

Dans votre dispositif, vous avez une phase de repérage ?  

Notre repérage consiste à aller vers des jeunes non connus ou invisibles d’un point de vue administratif. Cette phase est essentielle parce que on ne connaît pas forcément tous les voyageurs. Nous allons sur le terrain, dans les lieux de vie, les lieux fréquentés par les personnes, qui peuvent aussi venir nous voir dans nos lieux de permanence, par exemple pour une démarche administrative.  Il faut que le repérage soit mutuel, c'est-à-dire nous on repère mais le public nous repère aussi. Nous ne recevons pas beaucoup de demandes spontanées, on va chercher sur ces dispositifs les personnes qui ne se mobilisent pas, ou parce que le fonctionnement des autres services publics ne leur correspond pas. Le repérage c'est aussi faire le lien vers les autres acteurs, c’est de « l’aller vers pour ramener vers » les autres structures.

 

Est-ce difficile d’instaurer la confiance ?

La notion de relation de confiance est primordiale, elle se travaille encore plus qu’avec un autre type de public. Pour la majorité des voyageurs, plus on est invisible et mieux c’est, parce qu’ils se sentent très rapidement stigmatisés. Le lien de confiance n’est jamais totalement acquis, c’est une relation qui se construit dans le temps et ce n’est pas par ce qu’on s’appelle le Chemin du hérisson, les Alliers ou les Quatre Routes que les personnes viennent spontanément sur nos actions. Elles doivent avant tout répondre à un besoin. Ce qui est déclencheur c’est la démarche d’aller vers. On n’attend pas qu’ils viennent vers nous, on va à leur rencontre. On connait leur fonctionnement familial, leur problématique liée au déplacement, leur rapport au travail qui nous permet d’utiliser le bon vocabulaire. Il faut aussi qu’on se rende disponible, que l’on puisse répondre à leurs demandes rapidement. Ça les rassure d’avoir la possibilité de nous contacter très régulièrement.

 

Quelle est la phase suivante ?

La suite consiste à essayer de remobiliser les personnes. C'est le référent emploi qui va, de manière individuelle ou collective, proposer des activités, peut-être déjà de venir au centre, se remettre dans une dynamique, sortir d'un isolement, créer du lien, participer à des activités de loisirs ou de discussion. La remobilisation plus collective est plutôt à destination de femmes. Les hommes sont moins dans cette attente. Ensuite seulement, nous proposons un accompagnement. Mais il faut ce temps de reconnaissance mutuelle, voir avec chaque personne quel est son besoin, si on a bien compris sa demande. L’aller vers reste transversal à toutes les étapes du projet, y compris sur cette deuxième phase. La remobilisation passe par l’écoute et montrer qu’on s’intéresse à la personne, valoriser les compétences et permettre, notamment aux femmes, de se projeter sur un emploi. Dès qu’elle l’exprime, ou se pose une question liée à l'emploi, le but du jeu c'est de la saisir au vol et de répondre à cette attente. On crée alors une dynamique. Réactivité et adaptabilité sont les deux qualités essentielles des salariées en charge de l’action.

 

Quelle est la forme de votre accompagnement ? 

Une des modalités essentielles de la notion de pouvoir d'agir, c'est vraiment de partir de la demande, du souhait de l'habitant. On part de ce que verbalise la personne, mais il faut rentrer dans le vif du sujet assez concrètement parce qu’elle attend qu’on traite rapidement de sa situation et de ses difficultés propres. L’accompagnement proposé se place bien dans une démarche de co-construction. Faire avec et mobiliser les savoirs et ressources des personnes. C’est ce qui permet l’implication. C’est un accompagnement que l'on dit très renforcé, puisque nous avons des contacts hebdomadaires voire quotidiens, en physique, via des SMS ou sur les réseaux.

 

Puisque l’on vise un public très éloigné de l’emploi, il y a plein de freins périphériques, psychologiques ou physiques. Sans oublier l’illettrisme pour certains. Il y a également une réalité au niveau des d'offres d'emploi, plus ou moins présentes sur les territoires. Nous travaillons par exemple avec les structures d’insertion par l’activité économique.  Le partenariat tissé depuis plusieurs années, permet de s’adapter et de proposer des solutions adaptées aux personnes, comme par exemple des premiers contrats de quelques heures, dont le rythme monte progressivement, ou dans des domaines d’activités différents de la demande initiale, pour faire découvrir de nouveaux métiers et s’adapter à l’offre existante sur les territoires.

 

En plus, trouver un emploi, cela veut dire qu'on remet en cause toute l'organisation familiale (contraintes de mobilité, garde des enfants…), sujet important et sensible. Les personnes se construisent plus sur leur relation familiale que sur un projet professionnel. Notre accompagnement est individuel, mais il prend en compte les autres membres de la famille, que l’on rencontre, pour s'assurer de leur adhésion. C’est là où on se distingue des autres structures.

 

Combien de temps dure un parcours ?

Certaines situations nécessitent énormément de remobilisation parce que souvent les voyageurs ont perdu toute confiance dans le droit commun. Avant de les convaincre de prendre un engagement, même seulement s’inscrire à une activité ou prendre une adhésion à un centre social, ça nécessite du temps. La durée d’un parcours ne répond pas à une matrice figée, c'est en fonction des situations. Et comme la particularité de notre public, c’est que la famille est prioritaire sur l'emploi, on peut très bien mener des accompagnements qui sont abandonnés ou mis en suspens pendant des semaines ou des mois pour raisons familiales, et être repris après. C’est très aléatoire. Même et y compris pour les voyageurs qui se déplacent le moins.

 

Que faudrait-il améliorer selon vous ?

Six mois à un an c’est peut-être trop court pour les personnes vraiment éloignées de l'emploi, ou alors on continue à les suivre sur d'autres dispositifs. Il y a aussi l'insécurité liée à la non-résidentialisation, c'est-à-dire le manque de solutions d’habitat, qui est prégnant au niveau de notre public. Ça engendre pas mal d'inquiétudes et d'insécurité, quand on veut tendre vers des projets professionnels ou autres. Et ça n’est pas un frein facile à lever. Il existe assez peu de solutions en Charente.

 

Qu’est-ce qu’apporte ce dispositif selon vous ?

Le gros point positif, c’est la prise en charge globale, c'est-à-dire qu’on peut travailler à plusieurs acteurs et à plusieurs salariés en prenant en charge à la fois les différents volets, habitat, santé, famille, scolarité et emploi. C’est par cette approche globale qu’on arrive à avancer. Cela étant, on ne peut pas faire de miracles sur quelques mois, mais la démarche nous donne assez de temps pour effectuer le repérage et la remobilisation.

 

De plus, la complémentarité avec les autres acteurs du territoire et le monde de l'entreprise, que ce soit par le biais de l'insertion par l'activité économique ou autre, nous donne l’occasion de prospecter et d’établir des liens avec l'entreprise. Enfin, la particularité de nos structures est la connaissance des voyageurs, habitants du territoire, qui nous permet de proposer des actions adaptées, coconstruites. Mais également de travailler avec les acteurs locaux et institutionnels pour rendre effectif une prise en compte de ce public, créer le lien, aller vers pour ramener vers.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

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Un territoire, un public

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Depuis 2021 Axe et Cible anime « la Forge des compétences » (notre article du 11 janvier 2024). Plus récemment, son projet Cap Echo a été retenu par l’AMI O2R de la DREETS, en consortium avec AKSIS TB, Konexio, Activ’Action, La Cravate Solidaire de Bordeaux, Entreprendre pour Apprendre Nouvelle Aquitaine. Marylène Costa, avec une équipe dédiée, a la responsabilité de ce dispositif, financé jusque fin 2027, qui a pour objet d’accompagner des publics jeunes et adultes éloignés de l’emploi dans quatre territoires girondins.

 

En quoi consiste Cap Echo ?

L’idée de la Forge des compétences est d’essaimer des modèles d’accompagnement pour des publics sur différents territoires. Les accompagner autrement, ou plutôt aller les chercher autrement. Dans cette logique, nous avons développé « Talent’co² », un pur produit CEJ Jeunes en rupture de la DREETS, sur les territoires ruraux de Sainte-Foy-la-Grande et de Coutras. Nous avons déjà fait plusieurs promotions et nous poursuivons cette action en 2025. Nous avons ensuite créé Cap Echo, en réponse à l’AMI O2R, toujours avec les notions de « aller-vers » et de communauté de pairs. Dans ce cadre, nous décidons de faire un focus sur certains quartiers et territoires. Cela fait de Cap Echo un dispositif qui vise quatre publics différents, selon quatre modalités différentes, puisque nos partenaires ne sont pas les mêmes sur chaque territoire.

 

Comment avez-vous choisi vos territoires d’intervention ?

Nous intervenons d’abord dans des lieux que nous connaissons déjà, pour y avoir déjà mené des expérimentations, comme à Coutras et le pays Foyen. Sur chacun des territoires retenus, nous avons zoomé sur des publics spécifiques. Par exemple à Lesparre-Médoc et Bordeaux maritime nous ciblons plus la problématique des femmes et des publics issus de bidonvilles de Saint-Laurent-Médoc.

 

Comment procédez-vous pour vous implanter ?

À chaque fois que nous sommes arrivés sur un territoire, nous rencontrons les décideurs, les communautés de communes, les services de la ville, toutes les instances collectives. Notre approche, outre de cibler certains publics, c’est de travailler avec plusieurs acteurs. Pour certains, ce sont des partenariats historiques. On n’est pas des experts en tout, donc on travaille à plusieurs. Et nous ne cherchons pas à faire du chiffre.

 

Quel est le rôle de vos partenaires ?  

Nous testons des modèles différents, par exemple à Bordeaux maritime, Activ’Action travaille plutôt sur le collectif intensif au travers de « Bootcamp ». Sur Lesparre, nous travaillons sur la problématique de l’’illectronisme avec l’acteur Konexio qui intervient. À Coutras, avec Entreprendre pour Apprendre, nous traitons de la question de l’entrepreneuriat avec la création de mini entreprise. AKSIS TB, soutien sur l’accompagnement à l’entreprise. Et la Cravate Solidaire, son pitch emploi, sa cravate mobile, est avec nous sur tous les territoires ruraux.

 

Comment recueillez-vous les besoins des participants ?

Le préalable à l’entrée dans un parcours, c’est l’accueil inconditionnel dans nos espaces. Les gens entrent et sortent, ils observent. Et nous faisons pareil, on regarde, on observe. Nous pouvons nous rendre au domicile, par exemple si un jeune ne sort plus de chez lui. Nous avons aussi la possibilité de faire des entretiens dans des cafés, des bibliothèques, des médiathèques. Nous sommes hors et dans les murs avec eux, on s’apprivoise. Sur la partie accueil, nous utilisons la roue des besoins, avec laquelle nous travaillons le diagnostic, nous mettons en exergue les obstacles, puis c’est la mise en place des parades avec les accompagnateurs au travers d’un parcours co-construit.

 

Quels sont vos outils de repérage ?

Nous utilisons plusieurs modèles. Nous nous sommes professionnalisés pour apprendre à questionner les gens, les aborder. Nous avons appris à diagnostiquer en marchant. Quand nous repérons une personne, nous ne lui parlons pas d’emblée de notre accompagnement. C’est une erreur qu’on a pu faire par le passé. On discute, on échange, on recueille les besoins. Par exemple, nous avons une action qui s’appelle porte à porte, que l’on mène en binôme. Il y a une manière de les interroger, sans être insistant. Nous faisons aussi de l’accompagnement à domicile. Notre but est d’informer les gens, pas de faire la promotion du dispositif.

 

Ensuite, nous avons ce qu’on appelle le porteur de parole. Nous installons des écriteaux dans la rue, on écrit une question et les gens en discutent avec nous. C’est un média vraiment puissant. Nous avons aussi une tente information Proximité (TIPS) avec des zones à partager, des photos langages, des médias d’éducation populaire, que l’on installe en marge d’événements, de marchés, etc. Les gens s’y arrêtent, Ils se livrent et ils racontent leurs récits.

 

Qu’est-ce qui fonctionne le mieux pour capter les invisibles ?

Plutôt que d’invisibles, nous parlons de « non recourants. » Parce qu’ils n’ont pas recours au droit commun. Il y en a trois types : celui qui n’est pas informé, celui qui n’a pas envie d’y aller, celui qui ne sait pas lire ni écrire.

 

Par définition, les publics non captifs ne veulent pas être captés. Un stand classique ne fonctionne pas. Mais quand nous utilisons un média comme le porteur de paroles, une exposition, la personne la regarde et nous, à côté, on questionne l’exposition, pas la personne. Du coup elle entre dans le jeu sans le savoir, elle participe sans participer. C’est inconscient. Nous n’utilisons pas le même média sur tous les territoires. Pas de porteur de paroles à Coutras par exemple, ça ne marche pas, parce qu’il n’y a pas assez de passants. Il faut qu’il y ait un marché, un évènement. Mais en zone urbaine, c’est un support qui marche très bien.

 

Comment se déroule un parcours type ?

La personne signe un contrat de participation avec nous, comprenant quelques objectifs, mais on n’y met pas trop d’enjeux non plus. Les parcours durent six mois, avec un contenu très individualisé. Le calendrier comporte trois phases. D’abord le repérage, un à trois mois, avec un sas d’accueil, la sécurisation du parcours, les questions administratives et de rémunération. Après la phase de remobilisation, à partir du quatrième mois, on passe à la phase « action accompagnement. » À ce moment-là, le projet de la personne est mieux déterminé. Là on peut retrouver la cravate solidaire de Bordeaux, son soutien au pitch emploi, AKSIS TB et son soutien à la relation employeur. Et à six mois, le parcours « institutionnel », normé, s’arrête. Mais il peut durer jusqu’à douze mois, puisque nous effectuons des accompagnements plus longs et un suivi post promotion.

 

Que proposez-vous aux participants ?

Au bout de deux mois, nous commençons des ateliers coopératifs, comme « la fabrique à solutions » et le suivi se poursuit en parallèle avec les accompagnateurs et accompagnatrices lors de cette étape « inspiration », ou remobilisation, les partenaires démarrent également leurs actions collectives. Chaque participant est libre d’aller sur telle ou telle action collective. Ce ne sont pas toujours les mêmes groupes, cependant on constate qu’il y a le plus souvent un « noyau dur » qui se met en place. Des personnes qui vont inspirer les autres. Dans ces ateliers, on travaille la confiance en soi, on trouve des solutions aux différents freins, on développe des compétences, tout cela en s’appuyant sur des démarches d’intelligence collective. Dès cette phase, nous inscrivons les bénéficiaires auprès du réseau pour l’emploi.

 

Nous ne nous contentons pas de leur délivrer du contenu descendant. Nous créons des communautés de pairs, où tous les publics sont mélangés, nous parions sur le fait que ça va fonctionner. Nous nous mettons en posture de facilitateur. La mixité est puissante dans le vivre ensemble. Souvent les personnes ont aussi besoin de sortir de leur milieu, de rencontrer d’autres gens, de partager leurs expériences. Nous ne forçons personne, elles sont volontaires pour aller vers l’emploi. Jeunes, mamans, l’objectif est le même pour tous. 

 

Quand estimez-vous qu’un parcours soit réussi ?

Nous avons des indicateurs classiques pour les sorties en emploi et en formation. Mais nous parlons de « sorties favorables » dès lors que la personne est en mouvement, en action, en pouvoir d’agir, qu’elle a acquis une certaine autonomie. Nous regardons également si la motivation a été augmentée, si elle a pu développer des compétences transférables. Si et comment les bénéficiaires se sont inscrits auprès du réseau pour l’emploi. Parfois, nous partons de loin. Le plus important pour nous, c’est que les personnes ne restent pas isolées.

 

 

Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine :

https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx

 

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