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Cap Métiers NA
December 11, 11:11 AM
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« Imaginer sa futuralité » en Aunis Sud
La Communauté de Communes Aunis Sud est un territoire situé entre Niort et La Rochelle. À dominante rurale mais attractif, avec une démographie en augmentation, des entreprises qui veulent s’implanter, proche de grands axes de circulation, elle compte 33 000 habitants et vingt-quatre communes. En 2024, elle a été retenue par l’AMI O2R pour un projet de repérage et d’accompagnement des publics éloignés de l’emploi. Gaëlle Fontaine, vous êtes coordinatrice de la Maison de l’Emploi France services Aunis Sud (MdEFs), pourquoi avoir présenté un dossier O2R ? En 2019, la Communauté de Communes Aunis Sud s’est engagée comme volontaire pour l’expérimentation du projet Territoire Zéro Chômeur de Longue Durée. Mais en 2023, le projet a été abandonné faute de financements. Nous avions constitué une entreprise à but d’emploi (EBE), et dans le travail qui avait été mené au moment de cette expérimentation, il fallait aller à la rencontre des publics fragilisés sur l’ensemble de notre territoire. Nous savions pouvoir compter sur l’engagement des élus et des partenaires associatifs. Notre projet O2R s’inscrit dans la continuité de ce travail. Quelle a été votre approche ? Nous avons fait le choix de ne pas constituer de consortium parce que nous nous appuyons sur nos services internes comme les services culture, sport, environnement, etc. Nous disposons également de plusieurs outils, et d’un maillage efficient par le biais de la Maison de l’Emploi France Services située à Surgères. Plutôt que de donner un nom à cette action, nous l’avons inscrite dans l’identité de notre territoire avec son slogan « imaginer sa futuralité ». La volonté est de permettre aux publics isolés géographiquement ou socialement, de retrouver la capacité de se projeter à nouveau. Comment avez-vous présenté votre initiative à vos partenaires ? Dans un premier temps, nous avons réalisé tout un travail de communication au sein du bureau communautaire ainsi qu’auprès des vingt-quatre communes du territoire, en rencontrant directement les secrétaires de mairie et les élus. Nous sommes ensuite allés à la rencontre des associations, des partenaires locaux, d’abord ceux qui font de l’aide alimentaire comme l’association d’aide alimentaire d’Aigrefeuille d’Aunis, le Secours Catholique, Les restos du cœur, le Centre Intercommunal d'Action Sociale. Nous avons tenu des permanences pour être au plus près du public et les informer qu’un accompagnement socio-professionnel existe sur le territoire. On continue de développer notre repérage avec d’autres acteurs comme les structures de l’IAE, le Centre d’Animation et de Citoyenneté de Surgères, etc. Avez-vous défini un profil particulier de personnes à capter ? Nous visons les personnes éloignées de l’emploi, qui ne sont pas connues du service public de l’emploi. Nous ne ciblons pas un public spécifique. Au regard de notre petit territoire, il est important de donner sa chance à toutes les personnes en difficulté. Aujourd’hui, nous rencontrons aussi bien des seniors, des femmes, des jeunes, des voyageurs, etc. Ce n’est jamais facile de capter les personnes, même si nous avons l’avantage que la MdEFs soit relativement bien identifiée sur le territoire. Beaucoup de personnes y viennent spontanément ou parce qu’elles sont orientées par des partenaires, mais ce sont des personnes mobiles, qui peuvent se déplacer. Avec O2R, nous disposons d’un moyen dédié au repérage des publics plus isolés. Notre idée est d’aller dans les communes pour faire connaître notre dispositif O2R ainsi que notre offre de services, l’ERIP, les ateliers et les évènements que nous organisons. C’est un complément à notre offre existante, avec un maillage partenarial qui fonctionne déjà très bien. Edwige Bely-Rouyer, vous êtes conseillère en insertion professionnelle et chargée de l’animation de cette action ? Comment vous adressez-vous aux publics ? Je suis présente à la MdEFs et au sein des permanences d’aides alimentaires et j’organise des rencontres au sein des villages. J’informe par exemple les personnes qui viennent prendre leur colis alimentaire, qu’à la MdEFs nous proposons un accompagnement socio professionnel de remobilisation, afin de les aider à retrouver un emploi. Cette information peut les concerner directement ou pour leur entourage, cela permet de promouvoir le dispositif par le bouche-à-oreille. Souvent ce sont les mêmes personnes que je croise pendant les distributions alimentaires, au CIAS, au Secours Catholique, aux Restos du cœur. Du coup ils m’identifient, cela devient une habitude, mais il faut du temps pour créer un lien de confiance. Je viens avant l’ouverture, pour échanger autour d’un café, créer du lien sans essayer d’entrer immédiatement sur la présentation du dispositif. Nous avons mis en place depuis fin septembre des cafés « Ensemble Vers l’Emploi », à raison de trois par mois, à Surgères, à Aigrefeuille et à Marsais. Ces moments conviviaux permettent cette proximité avec les habitants. Comment procédez-vous pour le repérage ? Après un premier contact lors d’une action « aller vers » ou lors d’une visite spontanée, je propose un entretien individuel pour faire connaissance avec la personne. Avant d’obtenir leur adhésion au dispositif O2R, il est souvent nécessaire de se voir plusieurs fois. Les personnes que je reçois lors de la phase de repérage, et qui ont besoin d’un accompagnement, sont souvent la plupart du temps déjà inscrites et suivies par le réseau pour l’emploi. Or la logique d’O2R, c’est de repérer et mobiliser des personnes qui ne sont pas déjà accompagnées. Avant de savoir s’ils sont éligibles ou pas, il peut se passer plusieurs rencontres, afin que je sois en mesure de vérifier leur situation, notamment auprès de France Travail. Le problème c’est que lorsqu’un partenaire vous oriente une personne, que vous la recevez, qu’un lien de confiance commence à se créer, et que vous finissez par leur dire que cela n’est pas possible de se revoir, c’est difficile à gérer. Notre crainte c’est que les partenaires ne nous orientent plus de bénéficiaires. Pour l’instant, le repérage se fait plutôt à la MdEFs, à l’occasion des permanences de la CAF par exemple. Les personnes qui ont poussé la porte pour une raison ou un autre, sont déjà remobilisés en partie. Elles n’ont pas forcément un manque de confiance en elles, mais elles ont perdu pied, n’ont pas travaillé depuis un certain temps, ne savent plus trop comment s’y prendre et par quoi commencer. Jusqu’où allez-vous pour rencontrer les gens ? Nous nous déplaçons sur les 24 communes de l’Aunis Sud. Nous organisons du porte-à-porte en binôme avec un autre partenaire, comme « Popote et papote » dont l’objectif est de proposer à tous une alimentation bio et locale accessible. Nous serons prochainement avec le Solidaribus du Secours populaire sur Saint Mard. Le but est d’être présent un peu partout et d’aller à la rencontre des habitants. Si les gens ne viennent pas à la mairie, on ne peut pas les connaître, compte tenu du nombre de hameaux par commune. C’est ce qui caractérise aussi l’isolement géographique et social de certains habitants, ainsi que l’absence de mobilité. Quand abordez-vous la question du projet professionnel ? En général, les personnes signent le contrat d’adhésion au bout de deux ou trois rencontres. On ne peut pas forcer cette adhésion, il faut d’abord créer le lien de confiance. Pour elles, la porte d’entrée c’est le projet professionnel, souvent une demande de retour à l’emploi direct. On suit leurs besoins et leurs attentes, même si au fur et à mesure on détecte certains freins. Je propose du sur mesure avec chaque personne et je les rencontre chaque semaine. Parfois l’emploi est utilisé comme un levier de remobilisation, comme la réalisation de stages, d’immersions, de visites d’entreprise, etc. D’autres fois, les personnes vont avoir d’abord besoin de travailler sur la confiance et l’estime de soi. Dans ce cas, on ira plus lentement, le travail sur le projet professionnel interviendra plus tard. Ainsi, le parcours proposé ne respecte pas forcément une phase spécifique de remobilisation, puis une phase d’accompagnement social, puis une phase professionnelle. Surtout si la personne parle directement de retour à l’emploi. Dans ce cas, on s’appuie sur son envie, on ne lui impose pas de passer par une phase de remobilisation. On se concentre sur le besoin immédiat de la personne, on lui propose de participer à des ateliers que nous organisons à la MdEFs dans le cadre de l’ERIP ou par nos partenaires, de la préparation à des job datings. Sur le territoire, nous disposons de nombreux ateliers socio-professionnels. Faut-il comprendre que vous n’avez pas à proprement parler de programme ? C’est surtout que le parcours O2R est individualisé. C’est tout l’intérêt du dispositif, on peut s’adapter à chaque personne. Le parcours dure jusqu’à neuf mois maximum, nous proposons un entretien hebdomadaire de remobilisation, et entre deux rendez-vous des actions à mener, des ateliers, etc. Pour l’instant, on a peu de recul sur nos pratiques. Notre projet, au-delà de raccrocher les personnes au droit commun, c’est de travailler le volet socio-professionnel autant que possible pour passer le relais en fin de parcours, dans les meilleures conditions à France Travail ou à la mission locale, une fois que des actions ont été amorcées, avec méthode. Pensez-vous que c’est la personne elle-même qui est la mieux placée pour définir ses vrais besoins ? Nous pensons que la personne est souvent la mieux placée pour identifier ses propres besoins. L’expérience lui permet progressivement de préciser ses projets et de vérifier par elle-même ceux qui correspondent réellement à sa situation. En l’accompagnant dans cette exploration, elle peut ajuster son orientation de façon constructive en identifiant elle-même ses freins. De manière générale, ce sont surtout les techniques de recherche d’emploi qui nécessitent un appui particulier pour renforcer ses chances de réussite. Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs de l'AMI O2R et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine : https://pro.cap-metiers.fr/politiques-publiques/la-place-nouvelle-aquitaine/
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Cap Métiers NA
October 23, 11:23 AM
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La mobilité pour plus de proximité
Paré de ses couleurs bleue et blanche, il arbore un grand logo « Smile ». Smile, c’est un fourgon, le nouveau Service Mobile d’Informations Locales pour l’Emploi de la communauté d’agglomération de La Rochelle, financé par la CDA, France Travail et la mission locale La Rochelle Ré Pays d'Aunis. Sous cette identité, des structures, qui mettent leurs outils et énergies en commun. Avant lui, la CDA de La Rochelle disposait de quatre points emploi de quartier, qui ont cessé leur activité il y a deux ans, après quoi une réflexion a été menée pour mettre en place un nouveau système plus mobile, pouvant s’adresser à un nombre croissant d’habitants de la CDA dont le territoire s’est étendu ces dernières années. Le nouveau service a débuté ses activités en janvier 2025, et ses permanences en février, dans un premier temps sans véhicule dédié. L’équipe est constituée de deux conseillers expérimentés, respectivement détachés à mi-temps par la Mission Locale La Rochelle Ré Pays d’Aunis et France Travail. « On se place dans la dynamique de l’aller vers, explique Michel Schreiner, conseiller France Travail. On sort de nos structures pour aller au-devant des populations des habitants des communes de l’agglo, pour leur apporter une réponse de premier niveau. À La Rochelle même, nous faisons une focale sur les QPV et les publics les plus en difficulté. Le calendrier des interventions est co construit avec les communes, qui s’inscrivent sur nos permanences. » Le camion Smile est surtout un moyen de transport pour l’équipe et un vecteur de communication. Mais il n’a pas été aménagé pour recevoir des personnes en entretien. Sa première mission est de s‘approcher autant que possible des publics les plus fragiles, qui ne se rendent plus dans le réseau pour l’emploi, soit qu’ils ont perdu confiance, soit qu’ils n’osent plus franchir les portes des agences France Travail ou de la mission locale. Le service couvre les 28 communes de la communauté d’agglomération, afin de rendre une équité de services partout. L’ensemble du territoire a été découpé en quatre grandes zones, chacune d’entre elles accueille quatre à huit demi-journées de permanence par mois. La relation humaine en priorité Pour Philippe Rouger, conseiller de la mission locale, il s’agit de remettre de l’humain dans la relation entre les institutions et les habitants. « On est sur un premier niveau d’information, mais on a dans nos bagages toute la panoplie des outils des partenaires du réseau pour l’emploi. Quand on va dans une commune, on arrive avec des solutions formation, des accompagnements plus poussés avec le PLIE, toutes les techniques de recherche d’emploi, etc. On réoriente vers les bons partenaires, on essaie de faire gagner du temps, de l’énergie, de remettre de la confiance, du lien. Et on réajuste. Mais on ne remplace pas les accompagnements qui sont fait dans nos agences, le PLIE ou la mission locale. On accorde le temps nécessaire aux gens pour échanger sur l’ensemble de leur situation. Même si on ne prétend pas apporter des solutions miracles. En fait, on joue le rôle de facilitateur, » Le service Smile a trois modalités de fonctionnement, qui permettent de toucher tous les publics. « Un jour, une commune », qui consiste à tenir une quinzaine de permanence par mois. Ensuite, une modalité plutôt réservée aux « étapes pro » dédiées aux secteurs d’activité, avec des jobs datings, des visites d’entreprises, des interventions auprès des clubs d’entreprises et des services RH pour présenter l’offre de services. Le troisième type d’interventions, c’est la participation à des évènements, comme le Grand Pavois ou la semaine du nautisme, afin de faire connaître Smile et de répondre aux questions des visiteurs. L’idée n’est pas de de complexifier l’accès au service public pour les demandeurs d’emploi et les habitants. Il s’agit au contraire de jouer un rôle de facilitateur, de rassembler les outils, les expériences et compétences de tous les acteurs, pour apporter des réponses pertinentes. Tous les intervenants de terrain qui ont un contact direct avec les populations, comme les CCAS, les associations, les éducateurs et les médiateurs, l’office HLM, sont des partenaires qui peuvent relayer les informations et rediriger des gens vers notre service. Au fil du temps, les partenariats se sont renforcés pour aboutir à un travail en synergie vers des objectifs convergents. « Avec ces trois modalités, nous avons repéré des gens qui était invisibles, qui n'étaient pas inscrits à France travail, qui passaient sous les radars et qu'on a ramené sur un parcours vers l'emploi. On essaie de recréer un lien social, une confiance dans les institutions. On a beaucoup d’attentes orientées essentiellement sur la recherche d'emploi et les possibilités immédiates, mais aussi pas mal de demandes de salariés en reconversion qui ne connaissent pas les procédures, qui ont besoin d'avoir quelques éléments de réponse sur tout le parcours CEP. Notre message c’est, on vient, on vous écoute, racontez-nous votre parcours et on voit ensemble comment on peut avancer." Proposer un premier niveau d'information Le cadre d'intervention de Smile, c'est l'information de premier niveau. Mais aussi d’orienter les personnes vers le bon interlocuteur. Sans une bonne connaissance des dispositifs des partenaires et de l'offre de services globale, la réponse risque d’être partielle. L’enjeu est de pouvoir traiter les cas les plus simples, ainsi que des situations plus complexes. « On ne vas pas jusqu’au domicile, on fait venir les gens sur nos permanences, c’est pour ça que le véhicule n’est pas aménagé pour recevoir. Et puis la démarche est territoriale, c’est-à-dire que nous voulons que les communes et les structures jouent le jeu, en mettant des locaux à notre disposition, dans une mairie, une association, ou encore sur les marchés. Le dispositif Smile n’en est qu’à ses débuts, 2025 est une année d'expérimentation, de mise en place, qui permet de tester des modalités, des modes de fonctionnement, des lieux d’intervention. Certaines approches fonctionnent bien dans une commune et doivent s’adapter dans les autres. Certaines se définissent elles-mêmes comme des « communes dortoirs », qui pensent ne pas avoir de besoins particuliers. D’autres au contraire constatent des évolutions de leurs populations et considèrent que si un nouveau service intervient sur leur territoire, c'est bon pour les habitants et pour la dynamique locale. « Pour que ça fonctionne, on demande qu’il y ait une interaction. Smile n’est pas un service qui se pose quelque part, avec un camion aménagé, qui reçoit et qui est complètement autonome. Nous préférons que les communes s’approprient le service par une action volontaire, en s’inscrivant sur un calendrier de programmation. Nos besoins sont raisonnables, une prise de courant, deux tables et quatre chaises. Au besoin nous pouvons déployer notre tivoli en extérieur. On dispose de tablettes, d’ordinateurs, on peut même organiser des ateliers. « Mais tout cela nécessite une participation active des communes. Toutes celles qui ont joué le jeu jusqu'à présent ont été soit surprises positivement par l’intérêt rencontré, soit enthousiastes et convaincues dès le départ. Nous pensons qu’elles sont conscientes de l’importance de redonner de la confiance, de retisser du lien social entre nos institutions et ceux qui en sont le plus éloignés. »
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Cap Métiers NA
September 4, 9:16 AM
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Rendez-vous à la machine à café
Entre 2021 et 2023, le service emploi de la régie de quartier Diagonales de La Rochelle a mené une expérimentation nommée « Transition compétences » sur les quartiers de Mireuil, Villeneuve et Port Neuf. L’action consistait à accompagner l'habitant depuis le domicile jusqu'à l'emploi, en lien avec un réseau d’entreprises. Elle impliquait de mener un travail important vers l’extérieur pour remobiliser les partenaires, expliquer la démarche et surtout repérer du public dans les quartiers, les centres commerciaux, les commerces, etc. « L’avantage de transition compétence, c'est qu'on était dans un cadre expérimental, » explique Aude Ambert, coordinatrice du service emploi de la régie de quartier. « La personne était au centre, avec l'objectif de la ramener vers l'autonomie, d'être dans le pouvoir d'agir et d’avoir la possibilité de mailler avec les différents partenaires en fonction des besoins. » L’Espresso de l'emploi, lancé en début d’année 2022, s’inscrit dans la continuité de cette action, avec la même volonté d’agir hors les murs, de partir au contact de l'habitant. Ce que ne faisait pas le service emploi auparavant même si la régie mène depuis 1993 des actions hors les murs et d’aller-vers. À cette époque, la mairie de proximité avait repris la main sur un bâtiment situé dans le quartier de Mireuil. Elle a sollicité différents partenaires locaux pour savoir s'ils étaient désireux d’intégrer le lieu, afin d’y mener des actions originales. Occasion pour la régie de poursuivre ce qui avait déjà été expérimenté et de mobiliser des partenaires de l'emploi pour mettre en place des actions communes. Au démarrage, il a été pensé comme un atelier autour du numérique et l'emploi, avec pour objectif de permettre à l'habitant d’acquérir une certaine autonomie face au numérique à la dématérialisation. « Nous nous sommes dit qu’il fallait essayer de proposer quelque chose de plus attractif, un temps de convivialité avec tout habitant qui peut pousser la porte pour s'informer, qu'on puisse échanger autour d'un petit café, de façon très informelle. Eventuellement d’aller plus loin, jusqu’aux questions d'emploi et de devenir professionnel. En qualité d’accompagnateur à l'emploi, on a aussi le rôle et le devoir d’aborder tous les freins périphériques qui touchent la personne, de l'aider à avancer dans ses démarches, ainsi que de l'informer sur les ressources qu'elle peut trouver au sein de son quartier. » Le lien de confiance La convivialité est un prétexte pour déclencher un premier contact, établir un premier lien de confiance, même si la confiance prend du temps à s'installer. La posture du professionnel n’est pas la même que s’il se trouve derrière un bureau et qu’il accueille les personnes en position de sachant, quelque part un peu dominant. Le faire sortir de son bureau et aller au-devant de la personne permet d’établir une posture de proximité, plus d'égal à égal, de rentrer dans une relation beaucoup plus appropriée. L’Espresso de l’emploi ambitionne d’être cet « autre endroit », un environnement différent. Ses objectifs sont multiples, à commencer par apporter un premier niveau d'information au sens large du terme, quels que soient les besoins d’une personne, ce qu'elle recherche. Mais aussi de lui proposer une aide dans ses démarches, de prendre contact ou de revenir vers des institutions dont elle s’est coupée à un moment donné. Il s’adresse autant à ceux qui ont besoin d'un accompagnement renforcé, avec une présence régulière, qu’à la demande ponctuelle de l'habitant qui attend une réponse quasi immédiate. La porte d'entrée est l'insertion professionnelle, mais une régie de quartier est faite pour créer du lien social et répondre aux besoins des habitants au sens large du terme. C’est l’esprit de l'accompagnement global, qui consiste à traiter tous les freins périphériques de la personne. « Aujourd’hui, on a le sentiment que les habitants ont beaucoup plus de difficultés à se projeter. On est de plus en plus sur l'immédiateté, plus prégnante qu’avant. Et donc nous rencontrons plus de difficultés à les mobiliser, sur de l'individuel, et encore plus sur du collectif. » Il existe une véritable méconnaissance des possibilités, d'autant plus avec une population qui n'est pas toujours à l'aise avec le numérique et plus largement avec la dématérialisation. Les personnes ne connaissent pas leurs droits, elles ont tendance à abandonner si elles n’arrivent pas à joindre quelqu’un au téléphone. Beaucoup sont en souffrance, isolées, avec des problématiques de santé. « Avec elles, il faut qu'on remette en route un certain nombre de choses, y compris dans nos mesures d'accompagnement. D’autant que les besoins et demandes ne sont pas toujours exprimées, parce que les gens n'osent plus pousser la porte, ne savent pas où aller ou parce que lorsqu’elles s’adressent à une structure, on leur dit d’aller s’adresser à un autre interlocuteur. À force d’allonger les circuits, au bout d'un moment, elles abandonnent. L'engagement peut aussi être un peu plus compliqué parce qu’elles sont déjà rentrées dans le circuit, et n’ont pas forcément eu satisfaction ou trouvé la réponse attendue. » L’Espresso de l’emploi est ouvert tous les mardis de 14 à 16 heures. Au démarrage, le seul créneau horaire disponible était le mercredi matin, mais il n’était pas très adapté au public féminin sans solution de garde d’enfant. « Le matin n’est pas une bonne idée, parce que quand on a perdu l’habitude de se lever tôt, ça peut être compliqué de venir, surtout s’il faut déposer les enfants à l'école. On a également expérimenté un créneau le soir, jusque 21 heures, en espérant toucher des habitants un peu plus disponibles. En fait ce sont essentiellement les jeunes du quartier, quatorze à seize ans, qui fréquentaient l'espace. Mais ça n’est pas le public qu'on souhaitait mobiliser. » Un accueil, des évènements L’équipe d’accueil est composée des quatre conseillers en insertion du service emploi de la régie, en alternance, ainsi qu’un agent de France travail, du CCAS pour les questions d’accès au droit, et des agences intérim d'insertion, ADEF, Adef+, Cohésion 17. Au moins une fois par mois un événement est organisé autour des métiers ou des formations financées par la Région Nouvelle-Aquitaine, sur la mobilité avec l’opérateur de transport en commun de l’agglomération, qui attire jusqu’à une trentaine de personnes. « Cette complémentarité est importante. Nous ne savons pas tout sur tout, il faut aller chercher les professionnels qui ont une spécialité, qui peuvent décanter un certain nombre de choses. Et surtout ne pas faire tout et n'importe quoi, chacun de son côté. » Par ailleurs, depuis le mois de juin, la régie a recruté une médiatrice à l'emploi dont le rôle est d’aller au contact des habitants sur les deux quartiers de Villeneuve et de Mireuil pour pouvoir se faire repérer, informer l'habitant de l'existant et promouvoir l’Espresso et ses permanences. L’intérêt d’un travail de médiation est d’être beaucoup plus présent sur le terrain, afin d’arriver à capter plus de de personnes, parce que les missions et les exigences des structures ne le permettent pas toujours. Même s’ils viennent avant tout chercher du lien social, qu’ils sont parfois isolés, les habitants disposent de leur propre réseau de connaissances. Ils peuvent également agir comme un relais pour faire circuler des informations par le bouche-à-oreille, qui fonctionne très bien au sein des quartiers. L’important est de partir de la réalité de l'habitant, de l’orienter et le guider vers les interlocuteurs les plus appropriés au regard de la situation. Collectivement, c’est aux professionnels de détecter quelle est la porte d'entrée qui correspond le mieux à ses demande et besoins. « Il ne faut pas se rater à cette étape. D’ailleurs il ne faut pas se rater en règle générale quand on fait de l’accompagnement. L’accompagnement ce n’est pas aller là où on veut emmener la personne, c'est bien de partir de la personne pour l'emmener là où elle souhaite aller. Ce n’est pas à nous de définir que la priorité est vers l'emploi, mais de s’occuper d’abord des besoins intermédiaires à mettre en place. Et à nous de tirer les bonnes ficelles. » « On a changé notre façon d'être et de faire avec l'habitant au travers des différentes expérimentations que nous avons menées. On mettait déjà la personne au centre, mais peut-être pas encore de la même façon. Aujourd'hui les demandes des publics ont évolué aussi, ils ne se projettent pas de la même façon qu’avant. Ce n’est pas à eux de s'adapter à nous, c'est à nous de nous adapter à eux. »
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Cap Métiers NA
February 27, 11:04 AM
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Depuis 2021 Axe et Cible anime « la Forge des compétences » (notre article du 11 janvier 2024). Plus récemment, son projet Cap Echo a été retenu par l’AMI O2R de la DREETS, en consortium avec AKSIS TB, Konexio, Activ’Action, La Cravate Solidaire de Bordeaux, Entreprendre pour Apprendre Nouvelle Aquitaine. Marylène Costa, avec une équipe dédiée, a la responsabilité de ce dispositif, financé jusque fin 2027, qui a pour objet d’accompagner des publics jeunes et adultes éloignés de l’emploi dans quatre territoires girondins. En quoi consiste Cap Echo ? L’idée de la Forge des compétences est d’essaimer des modèles d’accompagnement pour des publics sur différents territoires. Les accompagner autrement, ou plutôt aller les chercher autrement. Dans cette logique, nous avons développé « Talent’co² », un pur produit CEJ Jeunes en rupture de la DREETS, sur les territoires ruraux de Sainte-Foy-la-Grande et de Coutras. Nous avons déjà fait plusieurs promotions et nous poursuivons cette action en 2025. Nous avons ensuite créé Cap Echo, en réponse à l’AMI O2R, toujours avec les notions de « aller-vers » et de communauté de pairs. Dans ce cadre, nous décidons de faire un focus sur certains quartiers et territoires. Cela fait de Cap Echo un dispositif qui vise quatre publics différents, selon quatre modalités différentes, puisque nos partenaires ne sont pas les mêmes sur chaque territoire. Comment avez-vous choisi vos territoires d’intervention ? Nous intervenons d’abord dans des lieux que nous connaissons déjà, pour y avoir déjà mené des expérimentations, comme à Coutras et le pays Foyen. Sur chacun des territoires retenus, nous avons zoomé sur des publics spécifiques. Par exemple à Lesparre-Médoc et Bordeaux maritime nous ciblons plus la problématique des femmes et des publics issus de bidonvilles de Saint-Laurent-Médoc. Comment procédez-vous pour vous implanter ? À chaque fois que nous sommes arrivés sur un territoire, nous rencontrons les décideurs, les communautés de communes, les services de la ville, toutes les instances collectives. Notre approche, outre de cibler certains publics, c’est de travailler avec plusieurs acteurs. Pour certains, ce sont des partenariats historiques. On n’est pas des experts en tout, donc on travaille à plusieurs. Et nous ne cherchons pas à faire du chiffre. Quel est le rôle de vos partenaires ? Nous testons des modèles différents, par exemple à Bordeaux maritime, Activ’Action travaille plutôt sur le collectif intensif au travers de « Bootcamp ». Sur Lesparre, nous travaillons sur la problématique de l’’illectronisme avec l’acteur Konexio qui intervient. À Coutras, avec Entreprendre pour Apprendre, nous traitons de la question de l’entrepreneuriat avec la création de mini entreprise. AKSIS TB, soutien sur l’accompagnement à l’entreprise. Et la Cravate Solidaire, son pitch emploi, sa cravate mobile, est avec nous sur tous les territoires ruraux. Comment recueillez-vous les besoins des participants ? Le préalable à l’entrée dans un parcours, c’est l’accueil inconditionnel dans nos espaces. Les gens entrent et sortent, ils observent. Et nous faisons pareil, on regarde, on observe. Nous pouvons nous rendre au domicile, par exemple si un jeune ne sort plus de chez lui. Nous avons aussi la possibilité de faire des entretiens dans des cafés, des bibliothèques, des médiathèques. Nous sommes hors et dans les murs avec eux, on s’apprivoise. Sur la partie accueil, nous utilisons la roue des besoins, avec laquelle nous travaillons le diagnostic, nous mettons en exergue les obstacles, puis c’est la mise en place des parades avec les accompagnateurs au travers d’un parcours co-construit. Quels sont vos outils de repérage ? Nous utilisons plusieurs modèles. Nous nous sommes professionnalisés pour apprendre à questionner les gens, les aborder. Nous avons appris à diagnostiquer en marchant. Quand nous repérons une personne, nous ne lui parlons pas d’emblée de notre accompagnement. C’est une erreur qu’on a pu faire par le passé. On discute, on échange, on recueille les besoins. Par exemple, nous avons une action qui s’appelle porte à porte, que l’on mène en binôme. Il y a une manière de les interroger, sans être insistant. Nous faisons aussi de l’accompagnement à domicile. Notre but est d’informer les gens, pas de faire la promotion du dispositif. Ensuite, nous avons ce qu’on appelle le porteur de parole. Nous installons des écriteaux dans la rue, on écrit une question et les gens en discutent avec nous. C’est un média vraiment puissant. Nous avons aussi une tente information Proximité (TIPS) avec des zones à partager, des photos langages, des médias d’éducation populaire, que l’on installe en marge d’événements, de marchés, etc. Les gens s’y arrêtent, Ils se livrent et ils racontent leurs récits. Qu’est-ce qui fonctionne le mieux pour capter les invisibles ? Plutôt que d’invisibles, nous parlons de « non recourants. » Parce qu’ils n’ont pas recours au droit commun. Il y en a trois types : celui qui n’est pas informé, celui qui n’a pas envie d’y aller, celui qui ne sait pas lire ni écrire. Par définition, les publics non captifs ne veulent pas être captés. Un stand classique ne fonctionne pas. Mais quand nous utilisons un média comme le porteur de paroles, une exposition, la personne la regarde et nous, à côté, on questionne l’exposition, pas la personne. Du coup elle entre dans le jeu sans le savoir, elle participe sans participer. C’est inconscient. Nous n’utilisons pas le même média sur tous les territoires. Pas de porteur de paroles à Coutras par exemple, ça ne marche pas, parce qu’il n’y a pas assez de passants. Il faut qu’il y ait un marché, un évènement. Mais en zone urbaine, c’est un support qui marche très bien. Comment se déroule un parcours type ? La personne signe un contrat de participation avec nous, comprenant quelques objectifs, mais on n’y met pas trop d’enjeux non plus. Les parcours durent six mois, avec un contenu très individualisé. Le calendrier comporte trois phases. D’abord le repérage, un à trois mois, avec un sas d’accueil, la sécurisation du parcours, les questions administratives et de rémunération. Après la phase de remobilisation, à partir du quatrième mois, on passe à la phase « action accompagnement. » À ce moment-là, le projet de la personne est mieux déterminé. Là on peut retrouver la cravate solidaire de Bordeaux, son soutien au pitch emploi, AKSIS TB et son soutien à la relation employeur. Et à six mois, le parcours « institutionnel », normé, s’arrête. Mais il peut durer jusqu’à douze mois, puisque nous effectuons des accompagnements plus longs et un suivi post promotion. Que proposez-vous aux participants ? Au bout de deux mois, nous commençons des ateliers coopératifs, comme « la fabrique à solutions » et le suivi se poursuit en parallèle avec les accompagnateurs et accompagnatrices lors de cette étape « inspiration », ou remobilisation, les partenaires démarrent également leurs actions collectives. Chaque participant est libre d’aller sur telle ou telle action collective. Ce ne sont pas toujours les mêmes groupes, cependant on constate qu’il y a le plus souvent un « noyau dur » qui se met en place. Des personnes qui vont inspirer les autres. Dans ces ateliers, on travaille la confiance en soi, on trouve des solutions aux différents freins, on développe des compétences, tout cela en s’appuyant sur des démarches d’intelligence collective. Dès cette phase, nous inscrivons les bénéficiaires auprès du réseau pour l’emploi. Nous ne nous contentons pas de leur délivrer du contenu descendant. Nous créons des communautés de pairs, où tous les publics sont mélangés, nous parions sur le fait que ça va fonctionner. Nous nous mettons en posture de facilitateur. La mixité est puissante dans le vivre ensemble. Souvent les personnes ont aussi besoin de sortir de leur milieu, de rencontrer d’autres gens, de partager leurs expériences. Nous ne forçons personne, elles sont volontaires pour aller vers l’emploi. Jeunes, mamans, l’objectif est le même pour tous. Quand estimez-vous qu’un parcours soit réussi ? Nous avons des indicateurs classiques pour les sorties en emploi et en formation. Mais nous parlons de « sorties favorables » dès lors que la personne est en mouvement, en action, en pouvoir d’agir, qu’elle a acquis une certaine autonomie. Nous regardons également si la motivation a été augmentée, si elle a pu développer des compétences transférables. Si et comment les bénéficiaires se sont inscrits auprès du réseau pour l’emploi. Parfois, nous partons de loin. Le plus important pour nous, c’est que les personnes ne restent pas isolées. Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine : https://pro.cap-metiers.fr/politiques-publiques/la-place-nouvelle-aquitaine/
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December 19, 2024 4:53 AM
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Gironde, partenaires contre l'illettrisme
Fabrice Lantoine est directeur de l’association ADAV 33, une association départementale qui s'adresse aux Gens du Voyage de la Gironde. Elle compte une trentaine de salariés et anime deux centres sociaux, dont celui de Toulenne, qui a la particularité d’être ouvert à tous publics. Le centre coordonne depuis trois ans un collectif de lutte contre l’illettrisme sur le Sud Gironde, initialement financé par l’appel à projets régional « Innover contre l'illettrisme. » Comment est né votre projet de collectif ? Il a commencé en 2017 par une initiative née d'une rencontre d’élus, d'acteurs de la société civile, d'associations et d’organismes de formation impliqués dans les Habilitations de Service Public (HSP). Nous avons pensé qu’il serait bien de monter un collectif de lutte contre l’illettrisme, et que l’on fédère des gens autour d’actions dans le cadre de la semaine nationale de lutte contre l’illettrisme. Nous avons répondu à l’appel à projet régional pour aller plus loin et avoir une force de frappe plus conséquente. Comme le centre social Sud Gironde de Toulenne, dont j’étais directeur à l’époque, était le seul acteur qui ne faisait pas directement de la formation type HSP ou d’actions de lutte contre l’Illettrisme, nous avions une sorte de neutralité, et nous avons accepté de porter le projet. En parallèle nous menions un travail autour de la médiation par le numérique, c’est tout naturellement qu’on est passé à un collectif de lutte contre l'illettrisme et l’illectronisme en Sud Gironde. Avez-vous réalisé une étude de territoire pour recenser les besoins ? Nous n’avons pas fait d’étude des besoins à proprement parler. Mais dans le collectif il y a un centre social et deux établissements de vie sociale qui ont l'habitude d’effectuer des diagnostics de territoire, puisque ça fait partie de leurs commandes habituelles. Et puis nous entretenons des liens suivis avec des grands acteurs sociaux comme le Département, France travail, la mission locale, etc. Donc on savait tout de même à peu près à quel type de public ça pouvait être utile. Justement, à quel public vous adressez-vous ? Le Sud Gironde fait partie de ce qu'on appelle l'arc de la pauvreté en Gironde. Il y a beaucoup de personnes de tous âges sous le seuil de pauvreté, qui exercent des métiers souvent pénibles et qui peuvent être concernés par des problématiques d'illettrisme. Nous avons essayé de fixer le moins de barrières possibles. L'idée c'est que les personnes soient repérées et orientées par les grands acteurs sociaux et par nos repéreurs, qu'ensuite elles participent à nos actions, par exemple les ateliers de territoire. On lutte contre beaucoup de fatalisme et d'absence de projection chez les personnes. La résignation est assez terrible. Notre projet c'est aussi d’essayer de favoriser la mixité, de faire en sorte que les publics, par exemple gens du voyage ne restent pas qu’entre eux. Les partenaires du collectif œuvraient-t-ils déjà dans le domaine de l’illettrisme ? Ils étaient déjà engagés. Le fait d'être ensemble leur a permis de trouver des moyens, mais aussi une dynamique partenariale et une caisse de résonance pour mieux dérouler leurs actions. Ce qui m'intéresse le plus, c'est que le collectif de lutte contre l’illettrisme en Sud Gironde est un groupe finalement informel de gens qui se réunissent plus ou moins régulièrement pour travailler sur cette question. Nous organisons trois à quatre rencontres par an, on essaie de confronter nos pratiques et de les faire évoluer. Le projet nous a apporté des moyens suffisant pour financer nos ateliers. Le collectif rassemble quatre associations qui sont des espaces de vie sociale et un organisme de formation. Chacun couvre une partie du territoire et met en place une ou plusieurs actions. Notre territoire est assez étendu, et le collectif permet de le mailler et de créer des lieux de proximité de lutte contre l’illettrisme. Ce sont des premières marches pour ensuite, pourquoi pas, permettre aux publics d’intégrer une formation type HSP. Le cœur de notre action, ce sont les fils rouges pendant la journée nationale de l'illettrisme, les rencontres de formateurs et les ateliers disséminés dans tout le sud Gironde. Que sont les ateliers de territoire ? C'est une action qui a été imaginée par le collectif. Ils ont été déployés à Captieux, Bazas, Monségur, La Réole, Cadillac, par l'établissement de vie social La Boussole à Captieux, l'association Passerelle de Monségur, l'association Orfie de Podensac. Il nous reste une sorte de zone blanche vers Villandraut et Saint-Symphorien, où il y a sans doute des besoins, mais il faut que déjà faut qu'on trouve des lieux et une association porteuse, ce qui n’est jamais simple. On essaie de faire des ateliers d’une durée minimale de 6 mois. En gros on s'était donné comme objectif de mettre en place six ateliers de territoire, qui ont accueillis une cinquantaine de personnes. L’idée est que l’on fasse de l'action socio linguistique, c'est-à-dire que l’on travaille sur l’illettrisme à partir de supports qui peuvent être détournés, avec des thématiques qui touchent souvent à la vie sociale. Et vos autres actions ? Afin de préparer la journée nationale de lutte contre l’illettrisme on a eu l’idée de faire un fil rouge à visée culturelle. La première année par exemple on avait choisi la thématique « à quoi ça sert d'écrire ? ». On l’avait proposé à plusieurs associations, certaines ont produit des choses, par exemple un groupe de collégiens a écrit une chanson et ils sont venus l’interpréter lors de la journée nationale. Ou des personnes âgées qui ont fait des collages à partir d’un atelier d'écriture. Cette année nous avons fait intervenir une artiste plasticienne qui a mené des ateliers dans plusieurs structures et nous avons rassemblé les travaux dans un ouvrage. Avez-vous eu des surprises ? La première bonne surprise c'est que le conseil régional ait accepté de pérenniser le financement, même s’il est un peu réduit. Nous avons aussi un peu de financement du conseil départemental. Pour moi, les actions ne peuvent se construire que dans le temps. Par exemple il nous a fallu deux ans pour trouver un lieu à Cadillac, et suffisamment de personnes pour démarrer. On a bien fait de ne pas lâcher, parce qu'aujourd'hui il est en place et fonctionne bien. Sinon, il y a un public qui participe à nos ateliers, auquel je ne m'attendais pas. Ce sont les adultes en situation de handicap qui viennent d'institutions Je pensais que ces personnes allaient être prises en charge au sein de leurs structures, dans les activités de soutien médico-social. Je pensais que nous aurions surtout du public allophone ou FLE qui sont toujours un peu à la frontière de l’illettrisme. A contrario, avez-vous rencontré des difficultés particulières ? C'est toujours un peu compliqué de travailler avec plusieurs partenaires. Les structures, avec leur autonomie de gestion, sont liées au projet par un engagement philosophique et une convention de financement. Mais chacune garde son indépendance, je pense que c’est important. Il faut arriver à se mettre d'accord sur des objectifs, et qu’un porteur de projet coordonne l’ensemble. C’est un subtil mélange entre le travail mené ensemble, et une part d'autonomie. L’autre problème est que, lorsqu’un partenaire est fragilisé à cause de difficultés financières ou managériales, ce qui arrive régulièrement, les projets font des vagues. Je pense qu’il faut l'accepter, prendre du recul et avoir un peu de détachement. Que faudrait-il améliorer selon vous ? Je pense que nous avons une marge de progrès, dans nos relations avec les prescripteurs qui ne nous orientent pas suffisamment de publics, parfois parce qu’ils s'interdisent de penser que les gens sont en situation d’illettrisme. Pourtant le travail de communication a été fait, et nous sommes toujours en lien avec France travail, les Maisons du Département des Solidarités, notamment pour leur proposer des formations de sensibilisation à la question de l'illettrisme avec le CRIA. Mais les prescriptions n’augmentent pas vraiment. Qu’envisagez-vous pour le futur ? Nous venons d’entamer notre troisième année. Nous allons surtout reconduire ce qui a déjà été mis en place. On essaie de monter des événements, comme une séance de ciné débat que nous avons récemment organisé. Dans le cadre de la journée nationale, nous avons présenté un spectacle de théâtre. Et avec la chaîne des savoirs, des « ambassadeurs » sont venus témoigner. Une bénévole qui les accompagnait a dit quelque chose qui m'a marqué, que ce n'est pas aux illettrés d’avoir honte, c'est à la société. Le fait que les gens témoignent, ça renverse un peu les rôles, c’est une façon de demander à la société de prendre ses responsabilités et de faire en sorte qu’on évite au maximum ces situations. Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine : https://pro.cap-metiers.fr/politiques-publiques/la-place-nouvelle-aquitaine/
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December 5, 2024 7:57 AM
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Un accompagnement cousu main
Comme son nom l’indique, le Contrat d'Engagement Jeune « Rupture » (CEJR) s’adresse aux jeunes en rupture, c’est-à-dire à un public qui connaît plus de difficultés que celui accompagné par les missions locales dans le cadre du CEJ classique. Son ambition est de les repérer, d’aller à leur rencontre, de lever les freins qui les empêchent de signer un contrat. Lancé début 2023, ce dispositif consiste en un accompagnement social renforcé et n’a pas de limite de temps. A Brive, le CCAS de la ville a souhaité se positionner sur l’appel à projet CEJR en partenariat avec la mission locale et le service cohésion sociale de l’agglomération. L'analyse des besoins sociaux réalisé au préalable, avait révélé, entre autres, une augmentation du nombre de jeunes sans solution d'hébergement. Les deux éducateurs qui animent le dispositif interviennent à mi-temps chacun dans le cadre de « Pass Pro », puisque c’est le nom qui lui a été choisi. Ils effectuent un travail en amont qui consiste à repérer les jeunes, les accompagner dans leurs démarches et les orienter. Un dispositif partenarial Manon Semblat est référente du Pass Pro à la fois pour l’agglomération et le CCAS de Brive. « Le projet a été lancé conjointement par le CCAS, l’agglomération et la mission locale. Nous travaillons en partenariat avec la mission locale parce que, qui dit jeune, dit mission locale au niveau de l'accompagnement vers l’emploi. Mon collègue Pascal Morteyrol travaille à la mission locale, il est à disposition pour 50% de son temps auprès du CCAS » C’était aussi l’objectif de l’appel à projet, de les orienter vers la mission locale pour signer un CEJ. « Dans la réalité ce n’est pas si simple, le CEJ n’est pas toujours une finalité, cette solution n’est pas toujours adaptée pour diverses raisons. Le jeune peut vouloir accéder à l’emploi ou à une formation directement, ou il est parfois trop éloigné de l’emploi. » Pour qu’un jeune soit accompagné dans le cadre de Pass Pro, il faut qu’il habite l’agglomération, qu’il ne soit pas inscrit à la mission locale ou n’avoir pas eu de contact avec son conseiller depuis au moins 5 mois. Les orientations peuvent venir de n’importe quels partenaires ou pairs. « On arrive à repérer ceux qui connaissent une difficulté à un moment donné, par exemple ce qui ont fait un séjour à l'hôpital, par le biais du Département parce que les parents sont suivis. Là où c’est plus compliqué, ce sont les jeunes qui vivent chez leurs parents, qui ne sortent pas, qui ne savent pas à qui s’adresser, qui ont peut-être une addiction ou, de manière plus générale, une problématique de santé mentale. » Actuellement, une vingtaine de jeunes sont suivis dans le cadre de ce dispositif, l’idée étant de proposer un accompagnement renforcé et réactif. Il est nécessaire de pouvoir se rendre disponible à chaque sollicitation pour éviter les ruptures. « Si un jeune m'appelle un après-midi, il faut que je puisse le recevoir tout de suite, au pire le lendemain. En fait on est vraiment sur du cousu main, tout dépend vraiment de là où on part. » « Dans la première phase de l’accompagnement, on ne contractualise rien pour ne pas faire peur au public. On s'adapte à chaque jeune, à ses besoins, et ses objectifs, c'est vraiment le cœur de notre travail. Nous ne suivons pas de programme précis. La porte d'entrée peut être de faire une carte d’identité ou une carte Vitale. Notre but, c'est d’abord de créer une relation de confiance. De toute façon, lorsqu’un jeune est à la rue, sa priorité n'est pas de signer un CEJ, mais de trouver un toit, de trouver à manger. Le reste est secondaire. Tant qu’on n’a pas réglé ses problèmes, on ne peut pas engager un autre travail avec lui. » « Lorsqu’il est prêt à aller plus loin, on reste à ses côtés pour l’aider à trouver des stages, appeler des employeurs, aller déposer leur CV. Toutes ces démarches qu’il n’est pas toujours capable de faire seul. Côté emploi, on va l'aider à chercher les employeurs, être là quand il va les appeler. Cependant, nous ne faisons pas tout à sa place, le but est qu’il devienne autonome. En quelque sorte, nous endossons le rôle qu'un parent jouerait avec son enfant qui cherche du travail pour la première fois. » Accompagner sans conditions Pas de règle dans l’accompagnement, ni en matière de durée, ni en matière de rythme de rencontres. Au départ, si une situation est un peu compliquée, les rencontres peuvent être quotidiennes. Pour d’autres, ce sera une fois par mois. Combien de temps et comment procèdent les éducateurs, tout cela dépend de chaque jeune. Les questions de logement constituent un des principaux freins à l’insertion des jeunes, avec la mobilité qui est aussi un obstacle majeur à l’insertion sur un territoire très majoritairement rural. Au point de parler de « parcours d'errance » pour certains qui n’ont pas eu de cadre dans leur vie, ce qui rend leur rapport à la formation et au travail d’autant plus compliqué. « Autre difficulté, certains de nos jeunes, du fait de leurs histoires de vie, n’ont pas autour d’eux les ressources familiales pour les accompagner dans l’entrée dans la vie active. Souvent très immatures, il faut avec eux réaliser des accompagnements de proximité. Dans ces cas-là, le « faire-avec » va primer » Depuis le début de Pass Pro, ce sont environ 60 jeunes qui ont été accompagnés. Certains ont accédé à l’emploi, d’autres à la formation. Ceux qui l’ont fait se sortent de ces difficultés assez vite. « On leur a juste permis d’accéder plus vite à leur parcours d’insertion. » Pour la plupart, les accompagnements sont longs. Quand ils ne durent pas, c’est à l’initiative du jeune, soit qu’il ne donne plus de nouvelles, soit qu’il ait déménagé malgré les relances et sollicitations dans les périodes de ruptures. Le dispositif qui était expérimental sur deux ans est reconduit pour une année supplémentaire. Il s’arrêtera avec la fin des financements, peut-être au profit d’autres actions à venir.
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September 12, 2024 8:42 AM
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Le retour à l’emploi en mode TZCLD
Le territoire de Monts et Barrages (Haute-Vienne) regroupe trois communautés de communes. Essentiellement rural, il connaît un taux de chômage important et des solutions de sortie de la privation d'emploi en nombre limité. C’est à l’occasion d’une sollicitation d’ATD Quart Monde que le chantier d'insertion le « Relais Info Service » (RIS) de Bujaleuf, le Pôle d’Equilibre Territorial et Rural (PETR) Monts et Barrages et l'association interconsulaire de la Haute-Vienne ont entamé en 2019 une réflexion sur la démarche « Territoire Zéro Chômeur de Longue Durée » (TZCLD). Les trois structures ont alors choisi de constituer un consortium et une équipe projet pour combiner leurs compétences respectives en matière d'insertion par l'activité économique, de développement économique du territoire et de relations avec les entreprises. Afin de mieux porter le pilotage de l’action et coordonner l’équipe, une cheffe de projet a ensuite été recrutée par le RIS. Monts et Barrages devient alors « territoire émergent. » « L'objectif initial était assez ambitieux puisqu’il visait l’ouverture d’une entreprise à but d'emploi pour l’ensemble du territoire qui couvre 34 communes, » explique Sarah Kirsch. « Mais assez rapidement, l’association TZCLD nous a conseillé de scinder le projet si nous voulions l’installer sur les trois communautés de communes de Noblat, Briance-Combade et Portes de Vassivière. » En octobre 2019, c’est la création du premier comité de pilotage, qui a marqué le début de la démarche de présentation du projet et de sa philosophie aux élus des différentes territoires. Séminaire de l'emploi, job dating, conférences, Grève nationale du chômage, autant d’évènements qui ont été l’occasion d’expliquer le projet, d’informer et de sensibiliser les publics. La crise sanitaire a bloqué le lancement de la démarche, mais l’effort de communication s’est poursuivi par différents moyens. « Après cette période, nous sommes revenus en force pour continuer à promouvoir le projet, Nous avons organisé des informations collectives pour mobiliser des personnes privées durablement d'emploi (PPDE), et constitué des comités locaux pour chaque communauté de communes. L’enjeu était de réussir à rassembler autant de personnes que possibles autour de l'idée de privation d'emploi sur le territoire. Ça a été vraiment novateur à ce moment-là. Nous nous sommes rendus dans chaque commune, une par une, pour présenter le projet et faire des enquêtes avec les volontaires, afin de connaître les besoins de chaque territoire. » L'implication des volontaires Les acteurs comme Pôle emploi, Cap emploi, les missions locales, ont relayé l'information aux publics susceptibles de répondre aux seuls critères du projet, à savoir d'être depuis plus de 6 mois sur le territoire et de se considérer privé durablement d'emploi. Le but était de les informer, ainsi que de les inciter à participer à la démarche. « Il nous fallait des bénévoles, qu’on appelle les volontaires, pour s'impliquer avec l'équipe projet. Tous les outils qu'on a développés sont faits en collaboration avec les volontaires. » Parmi les éléments essentiels au succès de la démarche, le portage politique, qui occupe d'ailleurs une place importante dans le dossier de candidature. Pour s’assurer du soutien des élus, il aura fallu vaincre certaines réticences et lever quelques incertitudes. Est-ce que le TZCLD va remplacer les structures de l'emploi qui existent déjà ? Combien tout cela va coûter ? Quel est l'intérêt pour le territoire ? Ce projet est-il vraiment réalisable ? Mêmes interrogations chez les volontaires, qui trouvaient étonnant qu’on leur présente la perspective d’un CDI, dans un emploi qui pourrait leur plaire, et dont ils fixeraient eux-mêmes le temps de travail. « Il fallait que le portage politique soit présent à toutes les échelles, de la commune au Département. Tous ces acteurs ont très rapidement participé aux comités locaux pour l'emploi, qui sont vraiment montés en puissance en 2021. Nous avons aussi intensifié le rythme des informations collectives. L’année d’après, sur la base des enquêtes réalisées avec les volontaires auprès des communes, des habitants et des entreprises, nous avons identifié plus de 150 travaux nécessaires sur le territoire que nous avons regroupés dans « le laboratoire des travaux utiles. » Ont suivi des « journées des travaux utiles », des ateliers qui consistaient à travailler, avec les volontaires, sur la préfiguration de « pôles » d’activité par territoire, leurs valeurs, les compétences nécessaires, les besoins de matériaux, les locaux, jusqu’à la recherche d’un nom et d’un slogan. Les réflexions menées durant ces « laboratoires » ont été présentées à chaque comité local pour l'emploi pour validation. Autre élément pris en compte, les risques de concurrence, et le rôle complémentaire d’un pôle par rapport à l’existant. « Par exemple l’activité de démantèlement de chantier. Certaines entreprises le proposent, mais pour elles ce n’est pas forcément intéressant, parce que ça coûte cher d’utiliser de la main d'œuvre expérimentée, qui pourrait être mieux employée. » Progressivement il est apparu qu’il serait trop compliqué de constituer trois Entreprises à But d’Emploi (EBE), une par communauté de communes. Le projet de la CC Noblat étant le plus avancé, son dossier a été déposé fin 2022, première étape d’un long processus qui s’est poursuivie par une phase d'analyse par le fonds d'Expérimentation Territoriale contre le Chômage de Longue Durée (ETCLD). Plusieurs auditions en ont eu lieu, concernant des aspects comme le portage politique et la plus-value sur le territoire, le parcours des volontaires avant l'ouverture de l'EBE ou encore les activités futures de l'entreprise à but d'emploi. L'aboutissement d'une longue démarche Pour finir, les membres du fonds d'expérimentation est venu visiter le territoire. A cette occasion, ils ont pu rencontrer les élus, l’équipe projet et les volontaires, et assister à du prototypage des activités prévues à l'ouverture de l'EBE, comme un atelier couture avec du réemploi de tissu et de la « customisation » de meubles. « C'était une façon de finaliser l'analyse de notre dossier, afin de le présenter en octobre 2023 au conseil d'administration du fonds d'expérimentation. Il a été validé fin novembre, et nous avons reçu notre habilitation. Puis s’est ouverte une nouvelle phase de conventionnement avec le fonds d'expérimentation, le comité local pour l'emploi, l'entreprise à but d'emploi, le Département, France travail et l'Etat, qui devaient tomber d'accord sur le projet. La signature de la convention est intervenue en septembre, avec les premiers contrats des salariés dans l’EBE. » Dans le processus de création de projet, la moyenne d’âge des volontaires avoisinait la cinquantaine. Les plus jeunes sont attendus à l'ouverture de l'entreprise à but d'emploi, comme on le constate dans les autres expériences. « Nous n‘avons pas défini de profil type. Nous savons qu’il y a des personnes privées durablement d'emploi sur le territoire de Noblat. Environ 400 qui n’ont pas de solution, pour des problèmes de mobilité ou de personne à charge. C’est le comité local pour l'emploi qui détermine quels profils entrent en EBE ou si d'autres solutions plus adaptées existent sur le territoire. » Les candidats contactent le RIS à l’issue d’une information collective ou par le bouche-à-oreille. On leur propose un rendez-vous individuel, qui n’est pas un entretien d’embauche à l’EBE, mais qui consiste à trouver une solution correspondant au mieux à chaque situation. Ce peut être l’EBE, mais aussi le chantier d’insertion, l’ESAT d’Eymoutiers. Ou encore l’embauche par une entreprise qui recherche un profil disponible. La création d’une EBE n’est pas d’actualité pour les CC de Briance-Combade et Portes de Vassivière. Mais tous les acteurs ont la volonté de poursuivre la même dynamique, avec la même philosophie que celle de TZCLD. Cette volonté s’est traduite par la mise en place d’un comité technique autour du droit à l'emploi sur le territoire, comprenant des formations territorialisées et des réponses aux freins rencontrés par les personnes, à commencer par la mobilité, et de l'intermédiation entre les gens et les entreprises. Les premiers clients attendent que l'entreprise à but d’emploi de Noblat ouvre ses portes. Au démarrage, elle accueillera une dizaine de volontaires, pas tous à temps plein, en moyenne à 20 heures hebdomadaires. Pour certains salariés, un temps plein était tout à fait envisageable, c’était plus difficile pour d'autres en termes de fatigue et d'organisation de vie. Chaque situation pourra évoluer par la suite. « Nos projections à fin 2024 tablent sur près de 15 salariés, puis 30 en 2025. Pour certains, l’EBE sera vraiment un tremplin pour retrouver de la confiance en eux, prendre conscience qu'ils ont des compétences et peuvent en développer de nouvelles, qu’ils restent au sein de l’EBE ou en sortent à terme. L’objectif est de couvrir toute la communauté de communes, en tout cas d'intervenir sur la commune de Saint-Léonard de Noblat. Selon les activités qui vont se développer, il sera possible d’envisager la création d’antennes. » Dans un premier temps, l’EBE s’installera dans les murs de l'ancien hôpital médiéval de Saint-Léonard. D’autres locaux seront nécessaires selon la progression du volume d’activité. D'ici trois ans, l'objectif serait d'avoir aidé une centaine de personnes. Sur les autres communautés de communes, il sera possible de développer d'autres activités avec le chantier d'insertion ou des expérimentations qui ont été tentées ailleurs, mais dont les acteurs de Monts et Barrages n’ont pas forcément connaissance. « Même si l'entreprise à but d'emploi n’avait pas vu le jour, nous avons créé une dynamique, un noyau de volontaires, un lien social. Nous avons vu le retour de la confiance en soi, pour certains une prise de conscience de leurs difficultés, de ce qu'ils pouvaient faire et ne pas faire, la capacité d’exprimer leurs envies. Quoi qu’il arrive par la suite, ce projet a déjà produit des effets bénéfiques. »
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July 18, 2024 9:24 AM
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Aborder l'illettrisme en milieu rural
Bruno Marolleau est délégué départemental Charente-Maritime de la fédération des foyers ruraux. En 2022, elle a élaboré le projet « Vivre ensemble et faire ensemble », une action de lutte contre l’illettrisme en milieu rural. Le dossier a été financé par l’appel à projets régional « innover contre l’illettrisme. » Que représente la fédération des foyers ruraux ? En Charente-Maritime, nous comptons 70 associations. Certains de nos foyers ont 60 ans d'existence. Notre fédération porte des valeurs d’éducation populaire autour de l'émancipation, de la formation du citoyen, du maintien du lien social en milieu rural. Plus généralement, nous œuvrons dans l'animation et le développement des territoires ruraux. Quelle est différence fondamentale entre un centre social et un foyer rural ? Nous sommes surtout présents dans des petites communes. Nos structures ne comprennent que très peu de professionnels, elles reposent à 99% sur du bénévolat. Notre point commun avec les centres sociaux c'est que nous avons 4 structures en Charente-Maritime qui sont labellisées « espace de vie sociale. » Sous ce label, nous travaillons avec les partenaires locaux pour définir les manques de la population, depuis la petite enfance jusqu'à la grande vieillesse. Tous les 4 ans, nous élaborons ensemble un projet qui est soumis pour validation aux administrateurs de la CAF. Comment avez-vous imaginé votre projet « Vivre ensemble et faire ensemble » ? Juste avant la crise sanitaire, le CIAS des Vals de Saintonge, un territoire situé complètement en ZRR, a mené une enquête autour de l'illettrisme. Les résultats n’étaient pas catastrophiques, on était proches des moyennes départementales et nationales, sauf peut-être pour les 25-35 ans. Cette étude nous a appris que nous avions un certain nombre d'invisibles en milieu rural. La question était, comment les repérer ? Et comment les informer pour qu'on puisse déclencher un rendez-vous avec eux ? Après restitution de l’étude auprès des acteurs, le constat était partagé, mais aucune action particulière n‘était prévue. C’est à ce moment-là que nous avons proposé de travailler sur le sujet, puisque le CIAS Vals de Saintonge cherchait quelqu'un pour répondre à l'appel à projet régional. Quelle était la nature de votre proposition ? Dans un premier temps, nous avons lancé l'idée, avec CORAPLIS, la COordination Régionale des Actions de Proximité de Lutte contre l'Illettrisme et d'accès aux Savoirs, d’organiser trois soirées ciné-débat autour de l'illettrisme et de l’illectronisme, dans des communes comme Matha, Aulnay, Saint Savinien. Ces soirées étaient gratuites, ouvertes à tous publics, surtout des personnes sensibles à la thématique. Nous avons projeté le film « illettré » avant d’avoir des échanges avec la salle, qui se sont révélés très riches. On a eu beaucoup de participants, dont des élus, des chefs d’entreprise et des enseignants qui ont témoigné des situations d’illettrisme qu’ils ont rencontrées. L'idée, c'était aussi d'expliquer notre démarche, de trouver notre place parmi les acteurs locaux. Et puis surtout de faire un appel à bénévolat et de repérer des forces vives. Qu’avez-vous proposé aux bénévoles ? Toujours avec CORAPLIS, nous avons mis en place des formations de deux jours, sur « les trucs et astuces » pour détecter les situations d’illettrisme, lorsqu’on suspecte des difficultés sur l'écriture et la lecture chez une personne rencontrée à la banque alimentaire, aux Restos du cœur, à la mairie, etc. Et comment, avec des outils bienveillants, confirmer son premier diagnostic. Le but c’est de rendre les bénévoles aptes à « aller vers » sans crainte de faire des bêtises. Tout l’enjeu, c'est de trouver le centre d’intérêt qui va servir de base de départ, la petite étincelle qui va faire que la personne va se sentir assez en confiance pour accepter d’être accompagnée. Par exemple, une de nos bénévoles fait partie d’une chorale. Elle a constaté qu’une personne faisait semblent de lire les partitions, qu’en fait elle ne savait pas lire, mais qu’elle compensait en connaissant les textes par cœur. Leur thème de travail commun, pour apprendre à lire et à écrire, c'est la chanson. Quel était le contenu de votre projet déposé à l’AAP régional ? Quand l’appel à projets régional a été lancé, notre idée c’était d’agir sur trois axes. D’abord étendre notre réseau de repéreurs facilitateurs au territoire des Vals de Saintonge, ensuite faire du lien avec les conseillers numériques, plutôt sur la dimension illectronisme, enfin, faire en sorte que nous soyons identifiés comme première marche. Notre volonté n’a jamais été de nous substituer aux intervenants spécialisés, mais de proposer une écoute individuelle de proximité, et donc de créer cette première marche pour que les gens se sentent plus à l'aise. Nous voulions aussi travailler autour de l'estime de soi par une approche culturelle, avec l’aide d’artistes. Avant ce projet, vous abordiez la question de l'illettrisme ? C’était en bruit de fond dans nos activités. Mais en milieu rural, l’illettrisme reste un peu tabou, les gens ont du mal à reconnaître qu’ils ne savent pas écrire. Il y a tout ce phénomène de jugement, de honte, qu'il faut prendre en compte, essayer d'amoindrir au maximum. Mais c’était naturel pour nous d’intervenir sur ce sujet, puisque l'être humain est au cœur de nos projets et que nous travaillons sur tout ce qui est développement des compétences psychosociales. Nous avons appris à prendre en compte que le facteur temps était important, qu’il ne fallait pas non plus bousculer les choses, parce que chacun va à son rythme. Les bénévoles montent en compétence grâce à la formation avec CORAPLIS, et l’utilisation de la méthode Griso qui est très terre à terre (notre article de 2022 https://sco.lt/89WAT2), et dans laquelle ils se sont bien reconnus. Pour eux, ça a été une bonne approche. Au vu de votre expérience, que faudrait-il selon vous pour toucher tous les publics ? Il faudrait plus de partage avec les collectivités, avoir l’occasion de présenter notre action aux maires du territoire et aux secrétaires de mairie pour relayer l'information au niveau de toutes les associations locales. Malheureusement, l’illettrisme ne fait pas partie de leurs priorités. Aujourd’hui, nous sommes surtout présents à Saint-Savinien, Aulnay et un peu Matha. Récemment, la mairie de Saint Jean d’Angély nous a mis des locaux à disposition à la médiathèque. Nous avons des contacts avec d’autres communes comme Tonnay-Boutonne et Saint-Hilaire-de-Villefranche. Nous avons une base de travail intéressante, qui fait qu'aujourd'hui le nombre de demandeurs d'emploi baisse. Et c'est vraiment parce qu’on travaille tous ensemble. C’est un véritable enjeu en milieu rural. Je suis convaincu que nous y arriverons si les efforts sont conjoints, que chacun ne reste pas dans son coin à mener ses propres actions. En plus, le collectif permet d’avoir plus d’ambitions. Certaines choses sont en train d'évoluer. La politique de guichet, c’est terminé. Maintenant il faut développer le « allers vers ». Le Conseil départemental a la volonté de travailler sur cette thématique avec les acteurs locaux de Charente-Maritime. Nous allons les rencontrer avec les bénévoles, parce qu’il me paraît important de reconnaître leur investissement et de les faire exister dans ces projets de territoire. Tout récemment, nous venons de signer une convention de coopération avec France Travail à Saint-Jean-d'Angély pour un accompagnement bienveillant des futurs apprenants. Depuis que vous avez lancé la démarche combien de personnes avez-vous accompagnées ? Nous avons accompagné une vingtaine d’apprenants, certains en FLE, d’autres sur l'illectronisme, mais qui est aussi une manière d'avancer sur l'illettrisme. Ce que nous disent les bénévoles, c’est qu’il y a une petite phase « d'apprivoisement », d’instauration de la confiance entre les personnes. Pour certains, ça va très vite. Pour d'autres le processus est plus long. Il faut respecter cette notion de temps nécessaire. Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine : https://pro.cap-metiers.fr/politiques-publiques/la-place-nouvelle-aquitaine/
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February 1, 2024 7:28 AM
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La prévention spécialisée au service de l'insertion professionnelle
L’Association Départementale pour la Sauvegarde de l’Enfant à l’Adulte de la Vienne (ADSEA 86) intervient dans le champ de la protection de l’enfance et dans celui de l’insertion sociale et professionnelle. Son pôle Prévention, dont Emmanuel Delestre est directeur, anime depuis 2020 une action baptisée "De l’oisiveté de la rue au travail », lauréate du PIC Repérer et Mobiliser les Publics Invisibles (RMPI). Comment avez-vous créé « De l’oisiveté de la rue au travail » ? C'est en 2019 que nous avons entamé un travail avec la mission locale de Châtellerault et de Poitiers. Nous avons commencé à monter un dossier ensemble, avant que l’Association Régionale des Missions Locales ne dépose son propre projet. De notre côté, nous avons présenté le nôtre, puisqu’il n'était pas interdit de partir seul. Et nous avons été retenus. Notre proposition était de travailler à partir des quartiers pour accrocher et remobiliser les jeunes, en renforçant la prévention spécialisée sur les territoires de Poitiers, de Châtellerault et d’Angoulême. Quel est le profil de votre public ? Dans ces villes, les éducateurs de prévention spécialisée sont implantés sur tous les quartiers prioritaires. Ils s’adressent aux 16-25 ans. Avec le PIC, le public est celui des 16-29 ans, sans formation, sans emploi, sans stage (les NEET) sortis des radars. Etant donné que nous étions déjà en lien avec des publics sur ces territoires, disposer d’un poste de plus nous permettait d'aller plus loin et de mettre un focus sur ce public en rupture. Quel était votre objectif de départ ? Notre parti pris était de nous appuyer sur notre dispositif existant. Nous ne voulions pas créer un poste spécifique PIC qui aurait rencontré l’incompréhension des jeunes et risquait de dénaturer l’action des éducateurs déjà en place. Concrètement, nous voulions éviter de faire une distinction entre ces professionnels. Les jeunes sont extrêmement prudents vis-à-vis de l'adulte et en défiance par rapport aux institutions. Je pense qu’ils n’auraient pas compris pourquoi un troisième éducateur arrivait avec une mission différente. Donc nous avons constitué une équipe de 3 éducateurs en leur demandant d’élargir leur champ d’intervention jusqu’à 29 ans. Quelle est votre approche ? Les jeunes en rupture, les décrocheurs en voie de marginalisation, les gens qui ont connu une succession d'échecs, sont dans une forme de rejet des intervenants. L'idée de monter un groupe, par exemple, c'est déjà toute une affaire. Pour arriver à les remobiliser, il faut créer un lien de confiance. Et pour ça, il faut avoir des éducateurs en poste sur ces quartiers. Le nouvel intervenant PIC a pu s’appuyer sur ce lien de confiance ce qui lui a fait gagner plusieurs mois représentant une forte plus-value. Notre action passe ensuite par des petits riens, par les centres d’intérêt des jeunes afin de les amener là où on veut. On parle de leur quotidien, de leurs difficultés, c'est vraiment un art de l'ordinaire. C'est un travail qui prend énormément de temps. Pour ça, nous disposons de quelques outils. Quels sont ces outils ? En premier lieu, nous avons les chantiers éducatifs, qui sont un très bon support de remobilisation. Dans ce cadre, on propose un travail aux jeunes, qui va d'une demi-journée à plusieurs jours. Nous travaillons en partenariat avec des associations intermédiaires, la SATE 86 à Poitiers, Action Emploi à Châtellerault ou AISD’EMPLOI à Angoulême, qui se chargent d’éditer les contrats à durée déterminée d’usage, des déclarations URSSAF et de verser le salaire aux jeunes. L’encadrement est assuré par les éducateurs de la prévention spécialisée qui travaillant aux côtés des jeunes. C'est un dispositif que nous avons beaucoup utilisé dans le cadre du PIC. Petit à petit, en fonction de ce qu'ils nous disent de leurs difficultés, de ce qu'ils veulent faire, on les éprouve à partir du chantier éducatif qu’on peut ouvrir à partir de 16 ans. Nous avons aussi eu recours à « Explore l'Europe » à Angoulême, un dispositif qui permet à des groupes de monter un projet pour faire un séjour dans un pays de l’UEE. Quand on fait des projets européens avec les jeunes, ils passent physiquement des frontières géographiques mais aussi psychologiquement par le fait de s’ouvrir sur le monde et d’autres cultures, favorisant l’altérité. Pour finir, ils bénéficient également des accompagnements des missions locales, ou d’autres structures en fonction de leurs problématiques. Selon vous, quels effets ont les chantiers éducatifs ? Avant de rejoindre un chantier, il faut que l’éducateur sente que le jeune est prêt, ne serait-ce que pour y travailler une demi-journée. Avant ça, il faut souvent qu’il refasse ses papiers, son cv, sa carte vitale, avoir un RIB pour se faire payer, etc. Avec ces éléments, on peut voir si le jeune est déjà dans une dynamique de remobilisation. Une fois qu'il est inscrit à l'association intermédiaire, encore faut-il qu’il vienne. Pour que ça marche, il y a tout le lien de confiance à créer entre lui et l'éducateur, ça prend de nombreuses semaines. L'avantage des éducateurs qui étaient déjà sur le terrain c'est que parfois ils ont vécu des séjours ou des sorties avec ces jeunes, ce qui leur a permis d’en repérer certains en amont. Le chantier éducatif est aussi un bon outil pour ceux qui vivent des parcours extrêmement chaotiques, y compris avec de la prison. Au démarrage, vous étiez-vous fixé un objectif en nombre de jeunes accompagnés ? Un peu moins de 300 sur 4 ans. Fin 2023, on en était à environ 140 jeunes. Nous avions misé sur 110 la première année, mais comme l’action a commencé début 2020, nous ne sommes arrivés qu’à la moitié. Compte tenu de la situation sanitaire, les sorties à la journée, les activités en petits groupes, tout cela a été très compliqué. Nous avons gardé des liens avec eux pendant toute cette période. C'est un suivi souvent sur des mois parce qu'ils partent de loin, et il y a un travail à faire sur leurs papiers, leur vie quotidienne, leur remobilisation, etc. Tout cela est très chronophage. Nous avions mal anticipé ce côté chronophage. En fait, pour travailler auprès des invisibles, 4 ans c'est court. Il faut créer un lien avec eux, il ne suffit pas de leur proposer un dispositif. Cela prend des semaines, des mois, il faut arriver à se faire accepter sur le territoire. C’est l’avantage de la prévention spécialisée, elle évite d’être trop intrusif. Vous savez quand un parcours commence, mais en moyenne combien de temps dure-t-il ? C'est un peu le système des tamis. Le premier, ce sont les maisons de quartier, l’éducation nationale, etc. Nous sommes le deuxième tamis, avec un maillage un peu plus serré. Il y a toute une partie des jeunes que l'on connaît vers 11-12 ans, plus on intervient tôt, plus on arrive à agir sur leurs problématiques. Et puis le troisième tamis, ce sont tous les jeunes qui sont passés à travers. C'est ceux-là qui vont demander le plus de temps de mobilisation, pour les amener à faire des démarches un peu autonomes, par exemple appeler un médecin, s’inscrire pour passer leur permis de conduire, trouver les ressources pour le financer. A un moment donné les choses s'enclenchent, permis, santé, prendre plus soin de soi. Petit à petit, ces jeunes s’autonomisent et reprennent leur place dans le jeu social. Mais les parcours peuvent durer 10 ans. Certains jeunes passent par la case prison, et quand ils sortent, ils reviennent nous voir pour participer à un chantier par exemple. C'est très aléatoire. Mais il y a toute la partie où on va devoir le soutenir, le tirer, et cette dernière est très chronophage. Vous semblez insister sur l’importance du temps dans le cadre de vos actions, qu’en est-il ? On ne mesure pas assez le temps nécessaire pour accompagner ces jeunes. En matière de dispositifs tout existe aujourd’hui. Le vrai problème, ce sont les marches qu'il faut gravir pour que les jeunes se sentent suffisamment autonomes, qu’ils aient envie de progresser. C'est notre métier d’effectuer ce travail. Le principe de « l’aller vers » est un peu galvaudé en ce moment. Mais aller vers des gens n'est déjà pas simple, aller vers des jeunes en rupture, ça demande un vrai savoir-faire pour être accepté. Selon moi, le métier est devenu plus difficile avec la dématérialisation, la situation des jeunes qui est plus compliquée sur le plan administratif. Et puis il y a des diminutions de moyens partout. Le métier est devenu plus dur aussi au niveau éthique et personnel, on se fatigue plus vite. Je suis content que nous arrivions à garder les éducateurs. Nous connaissons des problèmes de recrutement comme tout le secteur social et médico-social, problème d’attractivité des métiers, même si nous sommes pour le moment encore quelque peu épargnés. Le milieu ouvert attire toujours, mais nous arrivons à la limite. Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine : https://pro.cap-metiers.fr/politiques-publiques/la-place-nouvelle-aquitaine/
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October 5, 2023 5:25 AM
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Reprendre confiance pour se remettre en mouvement
Sandrine Toudic, Valérie Jourdan et Séverine Ménard sont conseillères en insertion professionnelle à l’Espace Mosaïque, le centre socio-culturel de Courçon (Charente-Maritime). Elles animent le dispositif Mobilis’action, un parcours de remobilisation destiné à tous les publics qui ont besoin de reprendre confiance en eux. Mobilis’action est financé par l’appel à projets régional « Mobilisation vers la formation ». D’où vient Mobilis’action ? Nous avions une action précédente qui s’appelait ODAS (voir notre article ), et nous avons souhaité reprendre une partie de son contenu en y apportant certaines modifications. C'est comme ça qu'est né Mobilis’action. L'idée principale est qu’il fallait proposer un parcours d'ateliers, plutôt que de faire tous les ateliers en même temps et au même moment, de les mobiliser progressivement. Quel est son principe ? Pendant le premier mois, on s'appuie sur des ateliers pour enclencher des changements. On fait appel à des supports comme les jeux de rôle, l'activité physique, la gestion des émotions et du stress. Et puis de l'art thérapie, qui consiste à créer une sorte de carnet de bord à base de collages, de textes, un support de développement personnel. Dans une deuxième phase, on est sur « j'expérimente », avec des ateliers autour de l'image de soi, le numérique et puis toujours l'art thérapie et le sport. Et la dernière phase, c’est plutôt « j'ose aller vers » avec de la création musicale, des visites d'entreprises et de plateaux de formation, des immersions, du bénévolat. Les trois phases sont réparties sur 4 mois, à raison d'environ 2 jours et demi par semaine. Nous intervenons pour introduire de la réflexion sur le projet professionnel, sur les compétences, sur la valorisation de parcours, la connaissance de soi, les différents domaines d’activité, etc. Au démarrage, nous proposons aux participants de réfléchir ensemble sur des règles de vie du groupe : prévenir en cas d’absence, respecter la parole des autres, oser parler sans être jugé. Les règles sont coconstruites, elles ne sont pas imposées. Le but est de former un collectif qui prenne en compte l'individualité de chacun. Quel est votre public ? Notre public présente des vulnérabilités en matière de santé, d'isolement, de confiance en soi. C’est pour ça que l’objectif du projet est vraiment de restaurer l'estime de soi. Dans le premier groupe, constitué en début d'année, nous avons eu 8 personnes de 26 à plus de 50 ans, sur une quinzaine orientées par nos partenaires, qui ont assisté à notre réunion d’information collective. 8 personnes, c’est le bon format pour qu'il y ait de l’écoute, des échanges et la mise en confiance nécessaires. Puisqu’on travaille sur l'estime de soi, les émotions, ça nécessite qu'on puisse être assez disponibles et que l’effectif soit assez réduit pour permettre de se livrer plus facilement. Nous avons constitué un deuxième groupe en septembre. En matière de public, vous constatez des spécificités sur votre territoire ? Depuis quelques années, nous avons un public qui a subi de l'épuisement professionnel et qui se retrouve complètement démuni dans sa recherche d'emploi, de formation ou de réorientation. L'isolement et le manque de mobilité ajoutent à sa détresse professionnelle. Nous sommes en secteur rural, et les principaux bassins d'emploi sont à plus d'une demi-heure de route. Après 20 ans d’activité de notre association, on découvre toujours des profils différents, des nouvelles personnes qui n'avaient jamais franchi la porte du centre social. Quel est le travail que vous effectuez sur le projet professionnel ? Nous avons des ateliers autour de la recherche de projets, l'emploi, dès le début du parcours. On aborde la question sous l’angle des centres d'intérêt, des valeurs de la personne, leurs compétences et leurs qualités. Dans le groupe, nous avons des questionnements du genre « qu'est-ce que je peux faire de ma vie ? », « je n’ai plus forcément confiance à l'entreprise, car j’y ai vécu des expériences et des moments très difficiles, allant jusqu’à un burn-out », ou « je n’ai pas d'expérience du tout. » Le sujet central est toujours « qu'est-ce que je peux faire de ma vie professionnelle ? ». C’est un problème que se posent même les diplômés que nous avons, qui interrogent le sens et l’utilité de leur formation. Nous travaillons autour de la connaissance de soi, du territoire, de leur bassin de vie. Petit à petit, on aborde des notions d'emploi, de formation et de compétences. Le jeu de rôle, par exemple, consiste à se créer un personnage fictif avec lequel ils font des choses qu’ils n’arrivent pas forcément encore à réaliser dans la vie. Quel est l’objectif à l’issue des 4 mois ? L’objectif final, c’est déjà se sentir mieux, de lever leurs peurs et leurs freins face aux réalités de l’emploi et de la formation. C’est important d’être dans l'accueil et la bienveillance. Même si on parle tout de suite de projets professionnels, on ne leur met pas de pression pour ne pas engendrer de peurs supplémentaires. La pression, ils se la mettent suffisamment tout seuls. Pour eux, c’est déjà difficile de faire ce pas, de venir régulièrement, de respecter des horaires, de jouer le jeu et de faire confiance. Mais ils ont un objectif et face au groupe, ils sentent qu’ils se doivent d'être présents. Pour nous, ce qui est positif c'est aussi de voir leur transformation ne serait-ce que physique, c’est-à-dire s’apprêter, prendre soin de soi et faire attention à son image, oser prendre la parole en groupe, sortir de son domicile, se socialiser. Qu’avez-vous constaté que vous n’aviez pas anticipé ? Beaucoup de personnes nous disent que grâce à cette action, elles ont repris confiance, elles ont pu oser faire des choses. C’est toujours étonnant qu’un projet comme celui-ci puisse avoir autant d'impact psychologique chez les gens. Et des résultats sur leur socialisation. Il y a vraiment une émulation dès le départ, une solidarité au quotidien, et c'est ce qui les a maintenus tout le long, parce qu’en dehors ils continuent à vivre leurs difficultés propres. Les participants ne se seraient probablement pas rencontrés dans d'autres contextes. Ils ont vraiment créé quelque chose de l'ordre d'un soutien collectif. En passant par Mobilis’action, les publics sont prêts à se poser des questions sur leur avenir professionnel, tenter de nouvelles expériences en allant faire des enquêtes métier, des immersions dans des secteurs d'activité auxquels ils n’auraient pas pensé. Avant, ils ne le faisaient pas, peut-être par méconnaissance. Pensez-vous qu’il faudrait apporter des améliorations à votre dispositif, et si oui lesquelles ? Il faudrait peut-être, après l’action, organiser un atelier avec le groupe tous les mois, peut-être pendant 6 mois, pour continuer à animer leur temps collectif. C’est une source d'angoisse pour eux, surtout les plus fragiles, parce que tant qu’ils sont dans le dispositif, ils suivent un certain rythme, ils sont redynamisés, ils ont envie d'aller de l'avant, et la dynamique retombe brutalement. Ils seraient partants pour que nous organisions des temps réguliers après l’action, pour que sa fin soit moins brusque. Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine : https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx
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September 14, 2023 3:46 AM
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La Fabricothèque, la boîte à outils rochelaise pour la création d’entreprise
Depuis 2016, elle s’appelait « La Fabrique à Entreprendre La Rochelle ». Depuis le début de l’année 2023, elle est devenue « La Fabricothèque », tout en conservant les mêmes attributions. Portée par la Mission Locale La Rochelle Ré Pays d’Aunis, elle s’adresse à tous les publics en lien avec la création et la reprise d’entreprise. « Aujourd'hui, nos financeurs sont la communauté d'agglomération de La Rochelle et la communauté de communes Aunis Atlantique," précise Anaïs Thibaud, coordinatrice du dispositif. « Notre action, c'est vraiment être la porte d'entrée pour tout porteur de projet en création ou reprise d'entreprise sur le territoire. Nous travaillons avec un réseau de 18 partenaires techniques véritablement opérationnels, que nous réunissons en plénière, tous les deux mois, pour évoquer les actions, dresser des bilans. Nos financeurs sont présents à nos rencontres, ce qui leur permet d’avoir une remontée de situation sur le plan économique. Entre chaque réunion plénière, les techniciens sont invités à participer aux groupes de travail sur lesquels ils souhaitent s’investir. » Premier outil de sensibilisation de La Fabricothèque, la réunion « Etes-vous prêts à entreprendre ? », un passage obligé pour toute personne qui souhaite s'installer sur le territoire, qu’elle porte un projet, ou qu’elle ait une simple idée mais qu’elle ignore par où démarrer. Au cours de ces réunions d’information collective, une quarantaine par an, on lui présente les étapes du parcours du créateur type, les partenaires qui prendront en charge son accompagnement, le montage de son modèle et les questions financières. Le deuxième axe de La Fabricothèque, c’est son agenda événementiel. Une à deux fois par mois, elle organise des ateliers spécifiques, pour 10 à 15 participants en présentiel, en fonction des besoins exprimés par les accompagnateurs. Créer son activité dans l'économie sociale et solidaire, comment convaincre un financeur ? Bien démarrer en vendeur ambulant, entreprendre autrement… autant de sujets abordés au cours d’une quinzaine de séances annuelles. Un programme évolutif Le programme est défini en novembre pour l'année suivante. C’est le bilan de l’année en cours qui détermine s’il est pertinent de reconduire une action. « Un des avantages de La Fabricothèque c'est que, d'une année sur l'autre, on peut proposer des événements récurrents, comme on peut en abandonner certains pour en créer d'autres. Par exemple, nous avions un atelier qui s'appelait « comment démarrer en livreur coursier » que nous avions créé suite à la crise sanitaire. Mais on s'est rendu compte qu’il ne correspondait pas aux besoins du public. Nous avons simplement décidé de l’arrêter. » Les ateliers sont complétés par des forums de tailles diverses, sur l'entrepreneuriat féminin, ou sur le thème « financer son projet autrement ». Ils offrent l’occasion aux participants d’entendre les témoignages de chefs d'entreprise, d’échanger avec eux, de participer à des activités ludiques. « Lors du forum « Financer son projet Autrement », nous avons proposé un « serious game » aux visiteurs. Nous les avons regroupés autour d’entités fictives pour qu’ils travaillent sur les solutions de financement. Ils devaient aller chercher des « Radisols », des billets fictifs, puis aller solliciter les partenaires sur leur stand. Chaque événement est complètement différent. » Autre dimension importante, la sensibilisation des collégiens et lycéens à l'entrepreneuriat et à l'esprit d'entreprendre, en fonction des sollicitations des établissements scolaires. « Pour moi, les actions auprès des scolaires sont essentielles. Nous devons sensibiliser les jeunes, notamment quand leur cadre familial n’est pas propice. Plus tôt on leur parle d’entrepreneuriat, plus tôt on leur fait rencontrer des chefs d’entreprise, mieux c’est. On peut aussi utiliser des outils ludiques, des casques virtuels, des visites sur nos forums. L’idéal serait de pouvoir intervenir dans toutes les classes dès la 4e, au lycée et au lycée pro, même si c’est juste une demi-journée dans l'année. » En matière d’accompagnement, La Fabricothèque porte une attention particulière aux publics issus des QPV, sans pour autant se focaliser uniquement sur eux, ce qui risquerait d’aboutir à l’effet inverse de ce qui est attendu. Elle fait également la promotion de l'entrepreneuriat féminin, avec la participation de réseaux comme Trajectoire d'entreprise au féminin, afin de casser certaines idées reçues qui font que, encore trop souvent, les femmes ne se sentent pas autorisées à créer leur activité. Convaincre de l'importance de l'accompagnement à la création Problème, les publics ne sont majoritairement pas convaincus qu’il soit important de se faire accompagner. Il y a quelques années existaient des dispositifs, notamment régionaux, qui proposaient un accompagnement assorti d’une petite aide financière. Les porteurs de projet venaient pour l’aide et découvraient l’importance de l’accompagnement. Aujourd'hui, les incitations financières sont moins nombreuses. Trop souvent, l’accompagnement est compris comme une perte de temps. Il faut convaincre les candidats que c’est la meilleure façon d’assurer la pérennité de leur affaire. Au besoin, le « Fabricochèque » peut constituer une incitation. Il s’agit d’une aide de 500 euros, destinée à tout porteur de projet qui réside en QPV ou qui souhaite s'y implanter. « Nous avons ouvert un peu nos critères d’attribution, du fait qu’il y a de plus en plus de personnes qui ont du mal à se faire accompagner avant création. Nous pouvons mobiliser le chèque pour celles qui ont besoin de retravailler leur modèle économique, 6 à 12 mois après le lancement de leur activité, sous réserve qu’elles acceptent notre accompagnement. » « Parfois il arrive que nous soyons dans la dynamique d’aider les gens à faire le deuil de leur projet, de les amener à se rendre compte de manière concrète et opérationnelle que leur modèle économique ne tient pas la route. C’est important de ne pas pousser quelqu'un à créer à tout prix, qu’il en vienne à connaître un échec, et qu’il y laisse des plumes. Pas tant sur le plan financier que du point de vue de l'estime de soi. » Au cours du premier semestre 2023, plus de 450 personnes sont passées par La Fabricothèque, entre la participation aux événements, les réunions d'information collective, l’attribution de chèques. Pour aider les porteurs de projet à mieux se repérer, La Fabricothèque a élaboré un guide des partenaires qui présente leurs actions et champs d’intervention en détail. Pour chacun de ces partenaires, des pictogrammes indiquent à quelle étape ils peuvent intervenir, quel est leur champ de compétence, ce qu’ils peuvent faire en matière de construction du projet, de constitution d’un réseau, de montage financier, etc. « Nous adaptons nos outils en fonction des publics que nous rencontrons. Je pense que plus de porteurs de projets solliciteraient notre accompagnement s’ils étaient sensibilisés en amont, si on leur disait qu’il faut se méfier de ce qu’ils entendent parfois, que la création d’activité n’est pas inaccessible. Plus de 50% des entrepreneurs démarrent avec moins de 5 000€, et n'ont pas forcément de diplôme, il faut le faire savoir. Pour 2024, l’objectif de La Fabricothèque est d’étendre son territoire d’intervention à la communauté de communes de l’Ile de Ré et d’Aunis Sud, afin d’avoir exactement le même périmètre d’intervention que l’Espace Régional d'Information de Proximité (ERIP), porté lui aussi par la Mission Locale La Rochelle Ré Pays d’Aunis » Pour consulter le programme, le guide et connaître tous les partenaires de La Fabricothèque : www.lafabricotheque.com
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April 27, 2023 8:11 AM
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Le travail au bout du voyage
L’action de formation « Des clés pour l’emploi » relève d’un constat partagé il y a plus de 10 ans par tous les acteurs de la métropole bordelaise, selon lequel beaucoup de femmes résidentes des quartiers de la politique de la ville étaient écartées et rejetées des dispositifs existants, faute d'actions adaptées. A l’époque, l’organisme AIM formation (Actions Inter Médiation), qui possède une expertise sur ces publics, a lancé l’idée de ce programme pour impulser et favoriser l'émancipation des femmes sans solution. « Des clés pour l’emploi » s’adresse depuis le début à des femmes immigrées, qui n'avaient que peu ou pas travaillé, avec un faible niveau de maitrise de la langue française, à l'oral comme à l'écrit. « Nous avons retenu le secteur du nettoyage, » explique Lucie Martinez, consultante en insertion professionnelle, « parce qu’il offrait des possibilités d'emploi plus facilement accessibles à des personnes sans qualification et avec des difficultés de langue. Nous voulions répondre en priorité aux femmes qui souffraient de l'autorité patriarcale, particulièrement des femmes originaires d'Afrique du Nord. » Au gré des vagues d'immigration successives, le public s’est progressivement étendu à des personnes venues d’Asie, du sous-continent indien, d’Europe de l’Est. Point commun de toutes ces femmes, leur difficulté à s'approprier les dispositifs et à trouver leur place en France, ainsi qu’à comprendre les injonctions qui leur étaient faites dans le cadre de leur accompagnement social. Le français comme outil d'insertion « A l'époque, c’était la seule formation non sélective du point de vue des difficultés de communication. Au tout début, elle incluait des cours de français. Aujourd’hui, c'est moins le cas, parce que la demande des femmes est avant tout d’accéder à l'emploi. Or l’apprentissage de la langue prend du temps. On privilégie plutôt l’acquisition de vocabulaire technique, des choses vraiment basiques pour se présenter, pour travailler. Cela dit, un des objectifs de cette formation, c'est de donner aux participantes l’envie de s'inscrire, par la suite, à des cours de français dans la durée, pour avoir la possibilité d’évoluer. » La formation est proposée 4 fois par an. Chaque session dure 2 mois, pour des groupes de 10 à 12 femmes. Beaucoup sont en situation de monoparentalité, par conséquent le choix a été fait de fonctionner en demi-journées, afin de s'adapter aux contraintes diverses, familiales, de logement, de santé. L’après-midi ou le matin pour toute la durée de la session, pour garder une certaine stabilité et que les participantes puissent s'organiser en amont. Pas de formation non plus pendant les vacances scolaires, ni le mercredi. Seules exceptions, les journées aux techniques de nettoyage qui durent 2 jours entiers. Après 5 semaines, à raison d’une douzaine d’heures hebdomadaires, la formation se poursuit sur un stage de 2 semaines en entreprise. Il prend place après que tous les modules ont été déroulés (gestes professionnels, techniques de nettoyage, les produits, les matériels). Les horaires de stage vont de 2 à 7 heures par jour, selon les contraintes, les attentes de chacune, leur état de santé, et le secteur qu’elles ont envie de découvrir. Pour beaucoup, ce stage est une première expérience professionnelle. C’est aussi très souvent le premier « diplôme » obtenu en France, une attestation de formation aux techniques de nettoyage dont elles sont très fières. « Les entreprises qui nous proposent des terrains de stage viennent rencontrer les apprenantes chez nous, dans un milieu bienveillant. Ainsi, les femmes se confrontent à cet exercice, un peu intimidant, qui consiste à se présenter à des chefs d'équipe et des chargés de recrutement. Ma présence les sécurise. Les lieux de stage sont pensés pour que, à l’issue, elles aient la possibilité de signer un contrat de travail. D’abord un CDD, puis un CDI, c'est de l'insertion progressive. A ce stade, certaines femmes décident qu’elles ont envie de faire autre chose, de s'investir dans une formation intensive de français. Ou elles mettent entre parenthèses leur envie de travailler pour quelque temps, à cause de problèmes de santé. » Los de ces rencontres, les entreprises parlent de leurs métiers et de leur activité. Les stagiaires prennent conscience petit à petit que, certes, on peut travailler dans le nettoyage sans vraiment bien parler français, mais que pour gagner en autonomie et en responsabilité, trouver un travail stable, ne pas se contenter de remplacements, il faut acquérir les codes de la société, à commencer par la langue. « Si les professionnels sont présents, alors que les personnes ont de nombreux freins et connaissent parfois des situations très compliquées, c’est qu’ils reconnaissent qu’elles ont réellement envie de travailler. Ce secteur a du mal à recruter actuellement, et c'est d’autant plus difficile de trouver des personnes avec cette motivation et cette envie-là. » Créer une dynamique collective Parmi les points forts de la formation, la mixité des participantes, mixité des âges (de 17 à 58 ans), des situations économiques, des cultures. Certaines n'ont jamais ou très peu travaillé, d’autres n’ont travaillé que dans leur pays d'origine. Les interactions entre participantes sont très porteuses. La confrontation aux pairs s’avère très efficace pour susciter des changements de comportement, des dynamiques de projection. Du point de vue financier, l’action a été montée en co-construction sur la base du diagnostic commun. D’abord la commune de Bordeaux et l’Etat sur les enveloppes de la politique de la ville, puis le Département de la Gironde pour les bénéficiaires du RSA, la CAF, et la métropole afin d’élargir l’action aux communes autour de Bordeaux. « Notre action s’est réinventée, elle s'est adaptée à chaque fois aux besoins qui évoluaient. Le fond reste le même, une action pour les femmes qui veulent travailler et sont empêchées de le faire. Mais c'est vrai qu’elle a beaucoup évolué, pour répondre à chaque fois aux nouvelles attentes qui se sont présentées. » Pour Lucie Martinez, l’idée principale de la formation « des clés pour l’emploi » est d’accueillir tout le monde. Y compris des publics qui ont été refusés de toutes parts, un peu laissés de côté par le système, et dont le quotidien est très compliqué. Des femmes de tous âges, de toutes conditions. Seule restriction, que les personnes soient autorisées à travailler en France. « La fierté de cette action, c'est d'être vraiment inclusive. On prend la personne à tout moment de son parcours. On crée un environnement bienveillant, dans lequel elle va pouvoir explorer et faire éclore ses possibilités, ses envies. C'est un espace de solidarité, d'échange, de rencontres, où des employeurs ont envie de vous tendre la main. Ce sont de très belles histoires à chaque fois. » « Cette formation permet également aux participantes de se familiariser avec les valeurs de la République et le concept de laïcité, de développer l'exercice de leur citoyenneté. Elles acquièrent le sentiment de trouver leur place et de participer à la société. C’est pour elles l'occasion de se confronter aux autres femmes, aux entreprises, au monde du travail. Nous voyons bien qu’elles vivent des changements de perspective. Elles mettent en place différentes choses, elles trouvent des solutions qu'on n'aurait pas du tout imaginé au départ. »
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February 16, 2023 7:52 AM
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Si tu ne vas pas à la science...
Une tente gonflable jaune, bien visible au pied des immeubles. Cette tente, c’est le laboratoire des Petits Débrouillards qui y déploient leurs expériences, sous forme de petits défis scientifiques : des machines infernales avec des parcours de billes, des animations en « stop motion », de la pâte à modeler qu’il faut s’efforcer de faire flotter… Mission des Petits Débrouillards, association créée en France en 1986 : la découverte et la transmission de la culture scientifique et technique. Parmi ses actions, la « science en bas de chez toi »* consiste à installer ce laboratoire mobile au milieu des tours, pendant la période estivale, sur un espace fréquenté par les jeunes. Ils sont invités à venir échanger avec les animateurs, découvrir, expérimenter. « Pour nous la base c’est l’éducation populaire, toucher le maximum de jeunes qui n’ont pas forcément accès à la culture scientifique, » explique Kevin Guénée, coordinateur d’activité. « Et cette action-là correspond complètement à nos idées et valeurs. On va dans les quartiers, c’est gratuit pour les enfants, sans inscription. C’est assez libre et flexible pour eux. Ça permet d’avoir une grande partie des enfants du quartier qui ne viendraient pas si on faisait des ateliers payants. » Les sciences, toutes les sciences La culture scientifique est un terme qui peut faire peur. L’association conçoit les sciences au sens large : numérique, sciences et vie de la terre, sciences sociales… Son objectif principal, c’est l’éveil à la curiosité, l’envie d’apprendre. « Chez nous il n’y a pas forcément de scientifiques. Certains animateurs ont un bagage scientifique, mais pas tous. On n’est pas des spécialistes, mais on a un regard curieux sur tout. Et on essaie d’attirer l’attention, de donner envie d’approfondir les choses, faire des expériences en physique et en chimie, mais aussi des sciences sociales en abordant les questions de différence homme femme, les stéréotypes, etc. Mais ça reste les vacances, on n’est pas des professeurs.» A La Rochelle, deux ou trois animateurs interviennent chaque après-midi, parfois le matin, pour 4 heures d’animation avec le public. Un QPV (quartier politique de la ville) par semaine, du début à la fin des vacances scolaires. En organisant ce rendez-vous quotidien pendant une semaine, les enfants découvrent cette sorte de « stage sciences » et reviennent les jours suivants. Le but est de les fidéliser, les faire suivre une dynamique, proposer des nouvelles expériences, s’adapter à leurs demandes. Le public est majoritairement composé de jeunes qui ne partent pas en vacances et dont les parents travaillent. Ils ne ne sont pas inscrits au centre de loisirs, par manque d’envie, ou de moyens. La « science en bas de chez toi » comporte une dimension animation, autour de la proposition de découverte et d’amusement. Les interventions sont annoncées par affiches et flyers distribuées aux commerçants, par réseaux sociaux. « Il y a des jeunes qui viennent parce qu’ils ont vu l’info, et certains qui viennent tous les ans, qui nous connaissent. On commence aussi à voir des jeunes parents qui ont connu le laboratoire il y a des années, puisque ça fait plus de 15 ans que nous faisons cette action. » L’objectif d’amener le maximum de jeunes vers la science n’est pas affiché frontalement. Certains veulent juste s’amuser, d’autres vont aller plus loin, poser des questions, qui déboucheront sur d’autres tests. On veut les mettre dans cette dynamique de curiosité, dans un format ouvert. S’il y a échec, on recommence. C’est une façon de mettre en valeur, ceux qui peuvent être en difficulté à l’école. « La manipulation et le jeu, c’est la meilleure façon d’apprendre. C’est la meilleure façon d’accrocher les enfants. A partir du moment où ils commencent à jouer, découvrir, manipuler, sans s’en rendre compte ils apprennent des concepts scientifiques. On commence par des choses simples, faire de la pâte à modeler, fabriquer des voitures avec des ballons, créer du gaz avec du bicarbonate et du vinaigre pour propulser des petites fusées. Des choses qui leur parlent directement. » « Ensuite, quand on les a accrochés par deux ou trois expériences, on peut aller plus loin sur d’autres phénomènes. On va parler de Co2, de pression, de forces centrifuges. Ils apprennent parce qu’ils sont dans une dynamique, ils sont investis dans un projet. Tout ce qu’on fait, ils peuvent le refaire chez eux. » Faire des jeunes de futurs scientifiques n’est pas le but. Ce que veulent les Petits Débrouillards, c’est toucher le maximum d’enfants. Si à la fin de la semaine, certains disent vouloir continuer sur la voie scientifique, que leur regard a un peu évolué, qu’ils ont trouvé des expériences à faire sur les réseaux sociaux, c’est un plus. Aucune évaluation, à part quelques quizz, mais toujours sous forme de jeu. L'influence des fake news Les enfants ont tous les mêmes besoins et les mêmes lacunes, qu’importe le quartier. Ce que constatent les animateurs, c’est qu’ils sont souvent influencés par les fausses informations qui circulent sur Internet, les vidéos qu’ils regardent, qui vont du meilleur au pire. « Beaucoup de jeunes nous disent qu’ils connaissent un sujet parce qu’ils ont visionné certaines expériences en ligne sur Youtube. Parfois il suffit juste d’essayer d’en reproduire une, pour leur montrer que ça ne fonctionne pas. » « Quand ils testent en réalité, ils se rendent compte qu’il y a une grosse différence. S’ils effectuent la manipulation avec nous, ça rentre. Et s’ils veulent la reproduire, ils comprendront pourquoi ça marche. C’est peut-être une des raisons d’un niveau scientifique un peu faible… C’est ça aussi qu’on essaie de mettre en place : tu as vu une vidéo, mais essaye par toi-même. Manipule, vérifie que c’est vrai, essaie de comprendre pourquoi ça marche. En 2022, « la science en bas de chez toi » a touché 300 participants à la Rochelle, 40% de filles et 60% de garçons. La moyenne d’âge est d’environ 8-9 ans. « C’est très compliqué de toucher les pré-ados, les 13-15 ans, on ne les voit pas. De temps en temps, on capte des petits groupes. Une fois qu’on a réussi à communiquer, ils sont intéressés, mais ils ont plus envie d’aller se promener avec leurs amis. Donc ça reste très compliqué d’avoir ces publics. Le plus gros, ce sont les plus jeunes, avec ou sans leurs parents. » « Les enfants se souviennent de nous quand on intervient dans les écoles. Mais tant qu’on ne peut pas leur proposer une animation régulière, c’est difficile de les capter à l’année. Notre objectif, ce serait de monter un club scientifique les mercredis après-midi, dans un centre social ou dans une médiathèque. Pour que ça fonctionne, il faudrait que cette activité soit accessible à tous. Parce qu’il y a aussi des jeunes qui n’aiment pas faire de foot ou de la danse. Il y en a plein qui seraient intéressés, on sait qu’il y a de la demande. » * « La science en bas de chez moi » est une action soutenue par la Région Nouvelle Aquitaine dans le cadre de l’appel à projets de soutien aux actions de développement dans les quartiers "politique de la ville".
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November 27, 1:40 PM
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Solidaires, du jardin à l’assiette
Forte d'une expérience en restauration ambulante depuis plus de trois ans, l’association pessacaise Epi’sol a pu, en 2024, concrétiser son projet de restaurant solidaire. Baptisé « Epi'cez tout », ce lieu d’une quarantaine de places est entièrement animé par des bénévoles. Située à Pessac, Epi’sol Pessac a été créée il y a près de dix ans par un collectif d’habitants dans le but de favoriser l'accès à une alimentation de qualité pour tous. Elle s’est progressivement dotée d’une épicerie solidaire, d’un jardin spécialisé autour des plantes aromatiques et des fleurs comestibles, et d’un outil de restauration ambulante, le vélo cargo et sa cuisine mobile. Aujourd’hui, l’association porte également un espace de vie sociale, et compte cinq salariés, une centaine de bénévoles et plus de 1 300 adhérents. La dernière création de l’association s’appelle « Epi’cez tout. » Ce projet de restaurant ou de bar associatif trottait dans la tête des membres du bureau de l'association et des bénévoles depuis un certain temps, mais personne ne pensait qu’il pourrait prendre forme rapidement, compte tenu de la nécessité de disposer d’un local adapté. Tout s’est accéléré après la proposition d’Aquitanis, l’office public de l'habitat de Bordeaux Métropole, de mettre un tel lieu à disposition d’Epi-sol pour y monter un projet de restauration et faire du lien avec la résidence sociale située à proximité. L’incubation a été menée avec l'association Atis, suivie de la recherche de financeurs. En moins d’un an, « Epi’cez tout » a pu ouvrir ses portes. « Le fonctionnement de notre restaurant suit la même logique que l’épicerie solidaire, » explique Fabienne Maugue, animatrice. « Il est ouvert à tout le monde, et nous adaptons les prix en fonction de la situation sociale des publics accueillis. Nous allons jusqu'à la gratuité pour quelques repas destinés aux personnes dans la rue. En partenariat avec l’association Imagine demain, nous réalisons chaque mercredi quinze repas, livrés le soir même dans le cadre d’une maraude. Cette possibilité, offerte aux personnes de la rue, est portée par la Fondation pour le Logement des Défavorisés. Nous avons aussi un principe de repas suspendu. » Un projet participatif Les bénévoles intéressés se sont mobilisés pour monter le projet, certains sur les aspects administratifs, et juridiques, d’autres sur la cuisine. « Chacun a mis sa petite brique, c'est un vrai projet collectif participatif. Nous avons aussi travaillé sur la décoration avec des gens de la rue, des gens en précarité, des bénévoles qui ont œuvré ensemble pour en faire un lieu accueillant. » Avec le chantier d’insertion Insert’net les tables, le bar, les portes de placard, ont été réalisés à l’aide de palettes et de bois de récupération. Autre objectif, celui de faire travailler les producteurs locaux, de n’utiliser que très peu de produits transformés, et de tout réaliser au sein même du restaurant. L'achat des denrées ne doit pas dépasser cinq euros par repas. Pour assurer l’activité et le salaire du chef, il faut quotidiennement servir une vingtaine de repas complets à douze euros. Chaque année, Bordeaux métropole délivre le prix de l'ESS doté d’un prix de 5 000 euros. « Epi’cez tout » a candidaté et a été lauréat fin 2024. « C’est une reconnaissance qui venait appuyer la valorisation de notre projet. Ça a été un gros coup de pouce en termes de communication et de promotion. Ce prix, c'était aussi l'entrée de Bordeaux Métropole dans le tour de table des financeurs de notre restaurant. Et puisque l’esprit du lieu, c'est d'effacer les différences, d’accueillir tout le monde, pas seulement les plus pauvres, le label économie sociale et solidaire est tout à fait adapté à notre démarche. » « Epi’cez tout » vit en partie grâce à des subventions publiques. Les collectivités ont participé à sa création et à sa mise place, comme la Région Nouvelle-Aquitaine. Son fonctionnement est soutenu par Bordeaux Métropole, la ville de Pessac, le Département de la Gironde, ainsi que la CAF de la Gironde en raison de l’espace de vie sociale. Une série d’autres financeurs interviennent, comme la Fondation pour le Logement des Défavorisés, les entreprises AXA et le Crédit Mutuel. En 2025, le projet a également obtenu un soutien de Bordeaux Mécènes Solidaires, un fonds de dotation porté par Bordeaux Métropole qui regroupe un grand éventail d'entreprises. Le modèle économique repose également sur des ressources propres, d’abord les déjeuners servis, puis des prestations traiteur pour la ville de Pessac, des comités de quartier ou encore des entreprises. L'idée d'un lieu comme « Epi’cez tout » n’est pas de devenir totalement indépendant des financements publics puisqu’il répond tout de même à une préoccupation portée politiquement. Il est important que les financeurs restent proches de ce genre d’initiatives, afin de fournir des repas gratuits aux personnes qui en ont besoin, garantir la masse salariale, et plus largement assurer le fonctionnement de l'association. « Ensuite, il y a ce que nous appelons l'économie de la réciprocité. Cela inclut tous les liens avec les bénévoles, de liens entre le don et le contre-don, ce que chacun apporte, comment il l'apporte et ce qu'on peut donner en retour. Ce n’est pas juste le bénévole qui donne, c'est aussi Epi’sol qui prend soin de ses bénévoles en leur offrant des repas, ou des moments conviviaux. » Du bien au corps, du bien à la tête « Epi’cez tout » a aussi une dimension thérapeutique. « Depuis quelques années, par exemple, nous avons avec nous une jeune fille hébergée au Foyer Accueil Médicalisé Château Sauvage à Pessac, avec un profil dit neuroatypique. Elle est très investie au restaurant et voudrait passer un CAP pâtisserie. Mais elle n’en a pas les capacités aujourd’hui. Des bénévoles l’aident pour certaines matières comme le français et les mathématiques, de façon qu’elle acquiert progressivement un niveau suffisant pour tenter son CAP dans deux ou trois ans. D’autres bénévoles fréquentent le lieu pour passer du temps, pour oublier leur pathologie, parce qu’ils aiment bien venir servir les gens, faire à manger, etc. Ou partager leur passion pour la pâtisserie. » Pour l'instant, le principe est de laisser venir les gens, sans aucune barrière. Si une personne vient au restaurant ne serait-ce que pour cuisiner une heure, on ne lui demandera pas de revenir plutôt le lendemain parce qu’il y a trop de monde en cuisine. Si la personne est là aujourd'hui, on la considère le jour même, on la prend telle qu’est est à cet instant. À terme, l'idée de l’association est de certifier le restaurant, d'envisager de le transformer en véritable structure d'insertion ou en tiers-lieu. Mais cela demande de constituer et déposer un nouveau dossier, et dans ce domaine, les deux années passées ont déjà été très intenses. La priorité immédiate pour 2025 est plutôt de renouveler l'agrément pour l'espace de vie sociale. Autre enjeu majeur, pour 2026, afin de faire face à la baisse tendancielle des dotations publiques, celui de diversifier les sources de financement, de rester très ouvert aux prestations et de faire en sorte d'installer l'activité sur le territoire. Epi’sol prévoit notamment de solliciter la banque des territoires. Mais pour cela, il faut avant tout décrocher un agrément « Entreprise solidaire d'utilité sociale » (ESUS). « Pour le moment, nous avons un très gros projet, la réalisation d'un livre de recettes venant des quatre coins du monde. Ce sera l’occasion de valoriser tous les bénévoles qui viennent en cuisine, qui venaient déjà sur le vélo cargo. Et de valoriser aussi notre production de plantes aromatiques. Nous avons pour objectif de le sortir au printemps prochain. Avant cela, nous avons mis en place des ateliers d'écriture avec des bénévoles et la préface sera signée par l’écrivaine Marie N’diaye qui habite à Pessac et nous fait le plaisir de soutenir nos actions. »
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September 18, 4:00 AM
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Un village, des solutions
Après avoir été une association pendant 70 ans, l’AFPA est depuis 2017 un établissement public industriel et commercial (EPIC) avec le statut d'agence sous tutelle conjointe du ministère du Travail et du ministère des Finances. À horizon fin 2025, tous les centres AFPA devront avoir été labellisés « village des solutions ». C’est du moins le projet de l’AFPA national. En nouvelle Aquitaine, la démarche a été engagée début 2024, elle concerne la majeure partie des dix-huit centres AFPA, comme Pau et Bayonne dont Vincent Pomes est directeur. « En fait, l'orientation qui est la nôtre, c'est d'être un facilitateur en termes d'insertion sociale et d'inclusion professionnelle. Notre cœur de métier reste la formation professionnelle. Mais maintenant, quasiment à parts égales, nous faisons de l'accompagnement global des publics. » C’est le cas par le biais de différents programmes nationaux comme Prépa compétences, un accompagnement des demandeurs d’emploi prescrits par France travail, la promo 16.18 qui s’adresse aux jeunes décrocheurs, les ateliers Déclic de découverte des métiers, ou encore HOPE, le programme d’hébergement et d’orientation pour un public réfugié ou bénéficiaire de la protection individuelle internationale. Le deuxième volet comprend les missions nationales de service public gérés par l’AFPA, comme la création des certifications et des titres professionnels, ainsi que la professionnalisation des jurys VAE en lien avec les titres professionnels. « Dans l'accompagnement, j’ajouterai la nouvelle tendance en Nouvelle-Aquitaine, avec l'habilitation de service public (HSP), qui a ouvert la voie à l’intégration de l'accompagnement dans les parcours qualifiants. Les stagiaires viennent comme ils sont, et on s'occupe de tout, c'est-à-dire les freins professionnels que sont la mobilité, le logement, la parentalité, la fracture numérique, la santé. » Réunir les acteurs Le village des solutions, est en quelque sorte une labellisation « interne », dont le principe consiste à réunir des acteurs de tout horizon qui sont animés par l’insertion sociale et professionnelle et de favoriser la réunion de ces acteurs. En tant que chef de file, l’Afpa trouvera des alternatives de coopération et d’accompagnement. « La Région Nouvelle-Aquitaine croit en la formation professionnelle et le village des solutions, on le voit plus comme l’occasion d'avoir des partenaires qui nous rejoignent dans l'ambition d'inclusion sociale et d'insertion professionnelle, et qui nous permettent d'apporter des solutions concrètes à nos ressortissants. » À Bayonne et Pau, la recherche de partenariats a commencé il y a un peu plus d’un an et demi. La CPAM et la CAF, deux nouveaux partenaires, proposent des réunions d’information collective sur l'accès aux droits, et permettent à tous les publics de trouver une réponse à leurs problématiques liées à la santé, à commencer par un accès facilité aux bilans de santé, ainsi que sur la parentalité, le logement, etc. Autres exemples, Idelis apporte son aide sur la question de la mobilité, et l’entreprise Orange anime des ateliers numériques. « Le village des solutions, c'est en fait imaginer une communication et une organisation fluide entre partenaires du territoire. Ils gardent leurs objectifs propres, mais ensemble nous sommes plus forts pour répondre au mieux aux besoins de nos publics. Les partenaires ont tout à gagner à venir au village des solutions, ce n’est pas payant, et cela nous ouvre la possibilité de proposer des alternatives concrètes aux bénéficiaires, en coordonnant un parcours d'accompagnement intégré. » Cette appellation n’est en soi pas une révolution, l’AFPA reste d’abord considérée comme l'organisme de formation des demandeurs d'emploi. Pendant longtemps les centres AFPA attendaient les publics prescrits par d’autres, mais elle a toujours travaillé avec un réseau de partenaires, d'associations, de structures d'insertion, etc. Avec le village des solutions, elle ambitionne de dépasser les organisations un peu archaïques, elle intervient beaucoup plus en agilité et en fluidité, avec des opérateurs de tous ordres qui se retrouvent sur les valeurs de la formation de l'insertion et de l'emploi et apportent leur expertise particulière. « Ce qui a changé, c’est que l’Etat et les Régions nous attendent sur un accompagnement global. Cela nous oblige à intervenir bien en amont de la formation professionnelle, avec toute la diversité des questions à traiter que cela implique. La remobilisation, la resociabilisation, sont des sujets qui dépassent le seul sujet de formation professionnelle. Le village des solutions nous place dans une dynamique beaucoup plus large en tant qu’opérateur ensemblier sur le territoire. Réunir des partenaires va justement nous donner encore plus de légitimité sur cet enjeu d'insertion sociale et professionnelle, mais surtout nous apporter du concret. Tout le monde ne conventionnera pas avec l’AFPA, mais en tout cas nous proposons, grâce à cet outil, de coopérer et d’échanger, pour mieux accompagner les publics dont on a la responsabilité. » Un label qui résulte d'une évolution L’arrivée de ce label n’implique pas un changement d’organisation, puisque l’évolution de l’AFPA a débuté il y a déjà quelques années, avec l’introduction de la dimension d’accompagnement global des programmes nationaux et les missions de service public. Le village des solutions vient en quelque sorte matérialiser cette évolution et l’ouverture de l’opérateur AFPA sur son écosystème pour la réussite du territoire. La seule véritable différence, c’est qu’il aura fallu aller chercher de nouvelles compétences, des profils de CIP, d'éducateurs, d'accompagnateurs socio-éducatifs, de formateurs pré insertion, et des partenaires spécialisés. « Le modèle dépassé de l’Afpa, c'était un formateur référent métier qui accompagnait les stagiaires, avec l’appui des services support et des équipes techniques. La réalité de l’accompagnement global et coordonné passe par une organisation plus fluide et pluri disciplinaire. » Il y a trente ans, un stagiaire venait à l’AFPA pour apprendre le métier de comptable, de soudeur, de mécanicien ou de plaquiste. Il rentrait en formation du premier au dernier jour, développait des compétences, passait un titre pro avant d’aller à l'emploi. « Depuis bon nombre d'années, il y a une évolution des publics qui nous arrivent. Des mineurs que l’on accueille à partir de seize ans, jusqu’à ceux qui sont proches de la retraite. Nous avons toutes les catégories sociales et professionnelles. Mais avant d’emmener les personnes dans la réalité métier et dans la dynamique d'acquisition des compétences, il y a plein d'autres choses à travailler. Donc, quelque part, la formation professionnelle a changé. Idéalement, tous les parcours devraient mener à une formation, une certification puis à l’emploi, c’est un schéma classique. Simplement, il faut désormais intégrer d'autres choses dans les parcours. Les modules transverses prônés par la Région Nouvelle-Aquitaine sur la solidarité, le développement durable, en sont le meilleur exemple. » Le village de Pau regroupe déjà une dizaine de partenaires qui se retrouvent lors d’un conseil trois fois par an. On y compte des associations, des structures d'insertion, des établissements publics, des entreprises, des institutionnels… L'AFPA crée le champ des possibles, donne une vision de coopération mais c’est le collectif « village des solutions » qui sert le territoire et doit être animé par l'ensemble de ses acteurs. L’AFPA est ensemblier mais n’en est pas propriétaire. Pour qu’un village des solutions fonctionne, il faut qu’il soit porté par l'équipe locale de direction, et que tous les collaborateurs AFPA soient « embarqués ». Il vit grâce aux partenaires, mais il faut d'abord que tous les formateurs, les personnels d’accompagnement, les métiers support, soient mobilisés. « Un formateur qui a une section de douze stagiaires à gérer, dont certains connaissent des freins à l'emploi, doit voir le village des solutions comme une possibilité, un outil facilitateur, parce qu’il n’est pas éducateur, assistante sociale ou agent immobilier. Le village doit le rassurer sur le fait que les problématiques de certains de ses apprenants vont être résolues. Il pourra se concentrer sur l'acquisition de compétences. Si c'est vécu comme cela par l'ensemble des collaborateurs, nous pouvons ensuite travailler au développement à l'externe. L'idée c'est qu'à partir d’un moment, on ne nous voit plus comme un simple organisme de formation, mais comme un atout qui vient faciliter les enjeux d'insertion sociale et professionnelle de tous sur le territoire. »
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March 6, 12:31 PM
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À Tulle, le quartier de Souilhac a longtemps été le siège de la manufacture d'armes qui a fait la prospérité de la ville durant des décennies. Le site a périclité progressivement jusqu’à sa fermeture au milieu des années 2000. Depuis 2016, la communauté d'agglomération de Tulle réfléchissait à l’implantation d’un campus destiné à rassembler la majorité de l’offre de formation post-bac locale sur un site unique. Un restaurant universitaire et inter-entreprises y a ouvert ses portes en 2019, précédant le regroupement des organismes de formation en 2021. C’est dans le cadre de cette stratégie, qu’un Campus connecté a vu le jour en septembre 2021. Sa création a été rendue possible grâce à la labellisation obtenue dans le cadre d’un appel à projet national lancé en 2020. Ce projet est ainsi financé sur 5 ans par le Secrétariat Général pour l’Investissement dans le cadre du PIA 3 – Territoires d’Innovation pédagogique sous l’égide de France 2030, opéré par la Caisse des Dépôts. « De mars à juin 2020, une grande campagne de concertation a été menée dans le cadre du programme Action Coeur de Ville à l’échelle du territoire de l’agglomération de Tulle, » explique Caroline Monteil, cheffe de projet à Tulle agglo. « Les collégiens et lycéens, mais aussi les acteurs économiques, se sont exprimés afin de mieux comprendre ce qui faisait rester ou partir les jeunes étudiants et travailleurs. Ils ont évoqué leurs difficultés à poursuivre des études supérieures en raison de différentes contraintes, que ce soient des problèmes financiers, de mobilité ou de santé, mais aussi des difficultés à recruter des personnes diplômées ou inciter à l’esprit entrepreneurial » « Quand on a réalisé le diagnostic, on s'est bien rendu compte que le concept du Campus connecté était une solution très intéressante pour nos jeunes, que de pouvoir continuer leurs études localement. Pour concevoir notre offre, nous nous sommes notamment appuyés sur l’expérience des Campus connectés déjà existants, comme celui de Cahors. » C’est Sylvain Domenger, tuteur du Campus connecté Tulle Corrèze, qui a géré la première rentrée avec cinq étudiants. « Dans un premier temps, j’ai dû m’approprier l’outil, interroger les autres tuteurs, observer un dispositif né juste avant les Campus connectés qui s'appelle la Digital Académie, afin d’être capable de l'expliquer et de le vendre auprès des personnes intéressées. » Des actions de communication ont été entreprises, les établissements locaux contactés pour les informer et les convaincre que le nouveau dispositif n’entrait pas en concurrence avec eux, et qu’ils pouvaient lui adresser des candidats. Avec l'université de Limoges, des comités de sites ont été mis en place à Brive, Tulle et Guéret, afin de rapprocher l'enseignement supérieur des territoires. Le cahier des charges national des Campus connectés indique que l’offre s’adresse aux néo bacheliers. Mais Tulle a voulu d’emblée toucher un public plus large, comprenant aussi des adultes en reconversion ou des jeunes suivis par la mission locale ou France Travail. En fait, toute personne exprimant son intérêt à faire des études, et ayant la capacité de suivre des enseignements à distance, qui nécessitent un certain degré d’autonomie. L’idée était également de s’adapter au territoire, de répondre aux besoins des entreprises en restructuration, notamment en matière de reconversion professionnelle. Les études c'est aussi à distance Le message du Campus connecté consistait à promouvoir les études supérieures pour tous, à expliquer qu’il était possible de suivre des études à distance proche de chez soi, que le manque de moyens ou d’envie de quitter son territoire ne devait pas faire renoncer quelqu’un à une formation. La dimension « campus » a été valorisée dès le départ, elle qui offre un environnement étudiant et des solutions pour rompre l’isolement. Les candidats se présentent eux-mêmes, ou sont aiguillés par une mission locale, France Travail, le CIO, un lycée. Ils sont reçus en rendez-vous, pendant lequel le tuteur passe en revue leurs motivations, leur explique les règles de fonctionnement, leur fait visiter les locaux, évalue leurs connaissances en informatique pour voir s’ils sont à même d’être autonomes devant un écran. Seule véritable condition pour être accepté, avoir trouvé une formation à distance. Chaque candidat signe un contrat d'accueil et un règlement intérieur. Il s’engage à être présent douze heures par semaine en moyenne sur l’année. « On fait du cas par cas, on ne va pas sanctionner quelqu’un et rompre son contrat parce qu’il a eu un empêchement d’ordre familial. Chacun a un mode de vie et des contraintes différents. Certains sont en service civique ou travaillent à mi-temps, ils ont parfois des rythmes différents d’une semaine à l’autre. C'est à moi de m'adapter, d’essayer de trouver un créneau pour mettre en place des activités avec le maximum de personnes. » La date de rentrée est liée au cursus universitaire ou privé. Les néo bacheliers démarrent plutôt en septembre après les résultats de bac ainsi que les retours de leurs vœux sur Parcoursup. Le processus de sélection s’étend globalement de juillet à septembre, et c’est le plus souvent à ce moment là qu’intervient un temps d’intégration. D’autres jeunes ou adultes arrivent plus tard, en fonction de leur calendrier d’entrée en formation respectif. La nature de l’accompagnement du tuteur dépend de chaque individu et de son degré d’autonomie. Le contrat passé entre l’agglomération et l’étudiant est finalement assez simple : réussir son année. Pour cela, il faut qu’il prouve qu’il s’en donne les moyens. « Je leur impose un entretien mensuel, en face à face, ça fait partie de leur engagement. J’adopte un peu la posture d’un manager, l’étudiant vient me présenter son travail du mois, je lui demande des comptes sur les objectifs fixés au préalable, on étudie son planning de cours, on y intègre du temps de révisions avant ses examens. » « Une fois que nous avons fait le tour des questions « scolaires », nous échangeons sur sa situation personnelle, son intégration au sein du Campus, son envie de participer aux activités, ou d’en proposer de nouvelles. C’est la dimension psychologique de mon poste. Les étudiants ont besoin d'une écoute, d'une personne présente à leur côté pour les rassurer, les rebooster parfois. Certains ont plus besoin de moi donc je vais vraiment être derrière eux régulièrement. » « Il n’existe pas de règles générales, de logiques d'âge ou de genre. Chaque individu a des besoins propres. Je suis beaucoup plus sollicitant dans les premiers temps, je crée les liens pour que ça se passe bien entre eux, ensuite je m'efface petit à petit. Dans tous les cas, ils restent entièrement responsables de leurs objectifs et de leurs résultats. » Une dynamique collective La fréquentation d’un Campus connecté présente plusieurs avantages, en premier lieu une vie étudiante qui permet de rompre l’isolement, de rencontrer des pairs de différents âges, dans diverses situations, qui suivent des formations différentes. De plus l'accompagnement du tuteur est un avantage indéniable pour l’accompagnement vers la réussite. Ce dernier joue également un rôle important en matière d’orientation. Par ailleurs, les animations et activités proposées toute l’année, ont pour principe de sortir les étudiants du cadre de leurs études, et de créer du lien entre eux. Elles peuvent être ludiques (faire son savon, atelier cuisine), artistiques (ateliers sculptures) ou culturelles (visite d’un théâtre ou d’un musée), ainsi que méthodologiques, pour travailler sur la prise de notes, rédiger son CV et sa lettre de motivation, s’entrainer à la prise de parole, rencontrer des entrepreneurs qui viennent présenter leur métier. Chaque année un des Campus connectés reçoit les étudiants de tous les autres sites, l’occasion pour eux de se rendre compte qu'ils ne sont pas les seuls et peuvent être solidaires. « Je leur dis à chaque fois, venez comme vous êtes. Vous pourrez faire plein de choses que vous ne pourriez pas faire dans un cursus universitaire classique, donc à vous de me proposer des idées ». Les retours sont essentiellement positifs et on constate que les Campus connectés entraînent des résultats bénéfiques pour les territoires, tant au niveau démographique qu’économique. Certains étudiants ou adultes en reconversion créent, par exemple, leur propre activité après leur formation, des entreprises qui ont vocation à rester et à se développer sur leur territoire. À Tulle, le Campus connecté a su enclencher une belle dynamique sur le territoire grâce à une implication remarquable de l'ensemble des parties prenantes du projet. La recherche de nouveaux partenariats est désormais une des priorités pour pérenniser le dispositif, en multipliant les contacts directs, lors de salons, de forums, etc. Les réflexions portent également sur la rentabilité du dispositif pour le maintenir et le faire croître. « Nous travaillons pour asseoir le fonctionnement et ainsi prouver aux élus qu’ils ont eu raison de le mettre en place, et que la dynamique doit se poursuivre. Petit à petit les choses évoluent, de nouvelles portes s’ouvrent. Le dispositif s’intègre localement dans le paysage universitaire et les partenariats s’étoffent pour maintenir ce service localement »
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February 6, 2:40 AM
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Nouveau site paré au décollage
En 2023, la mairie de Mimizan plage cherchait à monter un projet susceptible d’apporter une réponse au manque de logements destinés aux jeunes actifs et aux saisonniers. Les élus sont alors entrés en contact avec l’association « La Smalah » (Saint-Julien -en-Born) pour s’informer sur son action de formation professionnelle au métier de constructeur bois, centrée sur la fabrication de tiny houses. Ils souhaitaient monter un programme similaire sur le site d’une ancienne hélistation, successivement propriété de l’armée puis de l'office national des forêts, qui comporte un ancien hangar à hélicoptères et quelques chambres individuelles. Avant de solliciter La Smalah, la municipalité s'était tournée vers un bailleur social qui envisageait de raser les bâtiments et de tout reconstruire à neuf. « À l’inverse, notre projet proposait de rénover l’existant, pour un coût moindre, » explique Vincent Péchaud, directeur. « Et à terme, de loger des jeunes actifs à des loyers modérés et de les accompagner dans leur intégration sur le territoire, en offrant des services classiques que l’on peut trouver dans des résidences d'habitat social. Nous voulions aussi y ajouter une dimension tiers-lieu, avec une programmation socioculturelle ouverte sur le village. Je crois que les élus ont été séduits par notre proposition de faire de l'accompagnement de jeunes, pas seulement de la construction de logements. » Le projet a été monté en deux phases. La première consistait à rénover les bâtiments, créer trois chambres supplémentaires, une cuisine et un grand lieu de vie partagés. Dans un premier temps, il s’agissait d’y accueillir des saisonniers pour la période estivale, notamment des nageurs sauveteurs. Le principe de la démarche, avec l’aide de l'architecte Nicole Concordet et du concept de « permanences architecturales », était de mettre en œuvre une maîtrise d'usage autant qu'une maîtrise d'œuvre, c'est à dire partir du bâtiment, y vivre pour en déterminer les besoins et utilisations, ainsi que ses aménagements. Le tout en lien avec les habitants et les usagers, etc. Architecture sur site Lors de cette première phase, le collectif d'architectes et scénographes bordelais Cmd+O (Commando), est venu vivre quelques mois sur le site, au cours de la rénovation. Spécialisés dans les chantiers participatifs, ils ont accueilli des jeunes en formation à La Smalah, mais aussi des habitants du territoire et des futurs salariés d'une entreprise à but d'emploi (EBE) à Mimizan. Des artisans locaux et les services techniques de la mairie ont aussi participé au chantier. C’est ainsi que 150 m² d'espace de vie et 10 chambres ont été construites ou rénovées avec 80% de matériaux de réemploi et de dons d'entreprises locales. La deuxième phase, qui prendra place en 2025, prévoit la construction de dix nouveaux logements individuels, toujours en situation de formation sous forme de chantier participatif. L’ensemble se veut exemplaire architecturalement, étant soumis à la loi littorale, aux contraintes de montée des eaux, de retrait du trait de côte, etc. L'idée est de faire un bâtiment déplaçable qui pourra au besoin, être démonté et replacé plus loin à l’intérieur des terres. En cours de chantier, il ne s’agissait pas à proprement parler de formation, mais plutôt d’animation ou d’initiation. « Dans le cadre de notre formation en construction de tiny houses, les jeunes ont un mois de stage. Trois d’entre eux ont choisi de le faire avec les architectes constructeurs de l'hélistation, ainsi que chez un artisan local qui travaillait sur le projet. Ensuite, nous avons accueilli des jeunes en remobilisation qui ont, eux aussi, fait un stage sur le site. » Côté public, outre les saisonniers, le projet entend apporter une solution au manque de logements sur le territoire, notamment pour les jeunes actifs de moins de 30 ans. Cette volonté nécessite de trouver un modèle économique durable, il implique de chercher des financements, par exemple sous forme de partenariat avec un bailleur social. L’objectif est de choisir un cadre modulaire, peut-être celui de l’auberge de jeunesse ou du Foyer de Jeunes Travailleurs, pour que des jeunes en insertion ou en formation puissent être logés, ainsi que potentiellement des jeunes actifs et des saisonniers. « À terme, les vingt-cinq logements prévus n’auront pas la capacité de régler le problème dans son intégralité, mais ce sera un début. Globalement nous avons une problématique d'intégration de la jeunesse sur nos territoires qui sont très vieillissants, et accaparés par des maisons secondaires. Notre réflexion porte sur la manière d’intégrer les jeunes et de les encourager à rester sur le territoire. » Le projet de La Smalah comporte également une partie animation culturelle, qu’elle envisage de mettre en place dès cet hiver, pour accompagner la location des premiers logements. Elle aurait pour ambition, par l’organisation de quelques événements, de communiquer sur le lieu et de l’ouvrir aux habitants du territoire. La programmation culturelle sera complétée par un dispositif d’accompagnement pour les résidents, ou toute autre personne qui aurait besoin d’une permanence en économie sociale et familiale, en psychologie, en conseil socio professionnel. « À moyen terme, si ce lieu tourne avec vingt-cinq couchages en permanence, nous aurons un bureau sur site, un directeur ou une directrice, et certainement un salarié mutualisé avec La Smalah, qui sera présent une journée par semaine par exemple. » Plus que des logements La philosophie tiers-lieu est revendiquée par La Smalah, même si elle ne présente pas d’emblée son projet comme tel, mais bien comme la création d’une résidence d'habitat jeunes. « Dans la dimension tiers-lieu, ce qui nous intéresse c'est le côté implication des citoyens dans un projet de développement local, le côté gouvernance partagée et d’ouverture. L’été prochain, les maitres-nageurs sauveteurs reviennent et on peut imaginer qu’à l'automne suivant les travaux commencent. Le chantier est en soi une dynamique d'ouverture. » « Le projet a été officiellement présenté aux habitants par la mairie, avec notamment des ateliers ouverts au public, des articles de presse, etc. Réussir ce projet nous intéresse beaucoup, Il pourrait illustrer notre savoir-faire, et nous offrirait la possibilité d’aller voir d’autres mairies pour leur proposer le même genre de démarche. Je sais que certaines d’entre elles veulent aussi impliquer les acteurs économiques et les employeurs, parce que ces grands projets coûtent cher. » Si tout se passe bien, et dès que les derniers obstacles administratifs seront levés, le lieu devrait être complètement opérationnel courant 2026. Sa configuration finale n’est pas encore connue. Le nombre de logements dépendra des normes liées aux agréments qui seront demandés. Ainsi, pour être labellisé « résidence sociale », il faut être en mesure de proposer des logements individuels, avec une cuisine et une douche par logement. « Nous savons que, pour avoir ces agréments et être à l'équilibre économiquement, il nous faudrait disposer de soixante logements, ce qui ne sera pas notre cas. Donc nous allons essayer de trouver une sorte d'agrément ou de modèle intermédiaire. Il reste beaucoup d’inconnues, un certain nombre d’éléments ne dépendent pas de nous. C'est un projet très séduisant sur le papier, mais qui dépend de plein de choses. Aujourd’hui, on ne sait pas vraiment quand on arrivera au bout, et si on arrivera au bout. »
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December 12, 2024 8:36 AM
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Une Maison Forte de ses convictions
La Maison Forte est un tiers-lieu associatif à vocation culturelle, situé à Monbalen (Lot-et-Garonne). Il offre toute une programmation culturelle et de réflexion populaire, propose des résidences de recherche et de création, accueille des stagiaires et favorise la coopération territoriale. Il comprend également un laboratoire d’innovation sociale et culturelle autour du rapport au vivant et des transitions écologiques, sociales et culturelles. En 2022, l’association a eu le désir de se diriger vers la formation, particulièrement pour un public jeune appartenant à des milieux peu touchés par sa programmation culturelle. Après avoir pris connaissance du réseau des écoles de la transition écologique (écoles ETRE), elle a décidé de présenter sa candidature, en raison des publics concernés par cette démarche, à savoir des jeunes dits « en situation de décrochage », éloignés de l'emploi et de la formation, et plus profondément en recherche de sens. Ce réseau a placé au cœur de sa pédagogie le « faire », l’apprentissage par l’expérience, dont la Maison Forte est déjà familière. L’approche ETRE s’appuie sur la constitution de petits groupes de jeunes pour des temps plutôt courts de remobilisation et préqualification, avec une attention particulière portée à l’accueil et à l’accompagnement de chacun des jeunes. Pour l’association La Maison forte, il s’agit également de fédérer autour de ce projet un réseau d'entreprises, d'élus, de citoyens, prêts à s'engager sur la question de la transition écologique et sociale, comme sur la question de la transmission. « J’avais rejoint la Maison Forte depuis quelques mois, plutôt sur la dimension recherche, » explique Marion Blancher. « Du fait de mon métier d'enseignante en philosophie et de mon intérêt propre pour la pédagogie, la rencontre s'est faite assez facilement. On m'a proposé de m'investir sur ce projet, bénévolement au départ. A l’époque, c’était compatible avec mon métier d’enseignante remplaçante. Après un an de bénévolat pour cette année d'incubation, l'équipe a proposé de m'embaucher pour développer le projet d’une école ETRE en Lot-et-Garonne. » Des créations accompagnées Le processus de création d’une école ETRE débute toujours par une période d’incubation. En l’occurrence, elle a duré de septembre 2023 à juin 2024, pendant laquelle le réseau national a accompagné la structure, en suivant un cahier des charges précis, tout en lui laissant une grande liberté dans l’élaboration de son projet afin que l’école réponde aux besoins des jeunes et du territoire, avec les ressources de l’association et de ses partenaires. Une grande partie de ce temps d'incubation a été consacrée à une enquête de territoire sur les bassins de vie du Villeneuvois et de l’Agenais. « On s’est concentré sur ces deux territoires accessibles en transport en commun, avec l'idée, qu’à terme, il serait intéressant de proposer des sessions délocalisées, par exemple à Nérac ou à Marmande, avec des partenaires locaux, pour limiter ce frein périphérique de la mobilité. » Cette enquête a consisté à rencontrer une centaine d’acteurs locaux. Des professionnels, agriculteurs, maraîchers, artisans, pour recueillir leurs expériences, leurs besoins en termes d'emploi et de dynamique économique. Ainsi que des acteurs de l'accompagnement socio-éducatif des jeunes, comme les missions locales, la Maison des Adolescents, l’association de prévention La Sauvegarde. Partir à la rencontre de tous ces interlocuteurs avec le projet d’une telle école facilite les contacts, notamment parce que la Maison Forte proposait d’ajouter une dimension à l’accompagnement des jeunes avec une école sur mesure, qui fait un pas de côté, et propose un autre avenir à des jeunes qui ne trouvent pas leur voie dans le monde tel qu’il est. « Nous avons globalement reçu un très bon accueil en tout cas du côté des prescripteurs, parce qu'il y a un réel besoin. Nous avons également rencontré des jeunes, comme des stagiaires de la MFR qui fréquentaient la Maison Forte, et même quelques-uns de mes anciens élèves qui étaient en situation de décrochage. Nous avons beaucoup appris à leur contact. Cela nous tenait vraiment à cœur de les interroger et de les impliquer dans le projet, leur demander leur avis sur le programme, nous aider à diffuser l’information. Le réseau des écoles déjà existantes ainsi que la rencontre des différents prescripteurs nous a beaucoup aidé aussi. » L’association considère que le terme de « décrocheur » est stigmatisant et occulte toute une partie du problème. Pour elle, le décrochage est le symptôme du dysfonctionnement d’un système plus global qui inclut les familles, les enseignants, les institutions. Son approche consiste à présenter les jeunes comme étant dans une situation de mal-être ou de recherche, ne trouvant pas leur place dans le système qui leur est proposé, que ce soit le système scolaire, de formation professionnelle ou plus globalement le système social. Combattre le décrochage scolaire « Un point qui nous a particulièrement frappé, c'est le constat qu'il y a de plus en plus de jeunes en décrochage scolaire pas tant en raison des freins périphériques que pour des raisons de santé mentale liée à la pression du système scolaire, pression qu’ils s’imposent aussi à eux-mêmes. On voit que cette question et celle des phobies sociales peuvent toucher des jeunes qui, par ailleurs, ont tous les moyens pour réussir. De même, les jeunes qui ne parviennent pas à répondre aux exigences scolaires révèlent de vrais talents et un profond désir quand ils expérimentent un autre cadre d’apprentissage. » La phase d'incubation inclut une « session test », qui permet de voir plus concrètement si l'école en création est en mesure de se lancer. Depuis son ouverture, l’école suit un rythme de trois sessions de deux semaines et une session d’un mois par an. En 2026, seront proposées une ou deux sessions de préqualification qui durent trois mois, avec le choix de thématiques plus ciblées. La Maison forte a aussi développé d’autres propositions comme des chantiers avec les centres sociaux ou des Journées découvertes pour différentes structures. Une semaine de résidence d’artistes est prévue pour une association de jeunes de Villeneuve autour du rap et de l’agro-écologie. L'idée étant de les accueillir dans le cadre habituel des résidences, mais en leur proposant d'ajouter la dimension découverte de la ruralité et des enjeux écologiques. « On était assez étonné de voir que des jeunes qui vivent à Agen et à Villeneuve ne sortent pas de ces petites enclaves urbaines et qu’ils ont des représentations faussées de la campagne. En tout cas, il y a un vrai enjeu de découvrir autrement la nature et la ruralité. » Au sein de l’école ETRE, chaque groupe est constitué de huit jeunes au maximum. Il s’agit d’un des critères du réseau qui cherche également à créer de la diversité dans les publics. Diversité qui, par ailleurs, s’impose d’elle-même compte tenu de l’origine des participants qui se présentent à l’école par des biais très divers. Pour exemple, un travail mené avec la Mission de Lutte contre le Décrochage Scolaire (MLDS) de l'Education nationale et avec des conseillers principaux d’éducation, reflète le choix d'aller toucher des lycéens en voie de décrochage, tout autant que des mineurs non accompagnés, hébergés dans une maison d’enfants à caractère sociale (MECS) des Apprentis d’Auteuil. En matière de formations, l’école ETRE portée par la Maison forte se positionne sur quatre grandes thématiques, dont certaines déjà liés aux activités habituelles du tiers-lieu et aux besoins proches du territoire, comme l'agriculture, l'agroécologie et l'alimentation durable, ainsi que la médiation culturelle autour de la question des transitions. Autres thématiques, l'écoconstruction, le réemploi et l’artisanat, qui répondent à un enjeu de restauration et de préservation du patrimoine de la Maison Forte. Pour aller plus loin, elle a la volonté de tisser des liens avec ValOrizon, le syndicat de valorisation et traitement des déchets ménagers du Lot-et-Garonne et avec l’association Tera (Tournon d’Agenais) qui projette l’ouverture d'une formation sur les métiers de l'éco construction. « L'ouverture de l'école ETRE de Monbalen était une manière de faire tremplin vers tout un champ de la formation chez nous qui en fait est plus large, par exemple le projet Ecotone, un programme qui s'adresse aux étudiants et qui a vocation à mettre en valeur les savoirs, les idées et les envies d'actions des personnes en formation en leur donnant la possibilité d'agir pour leur territoire, sur leur territoire. Mon rôle c'est aussi de coordonner ces différentes dimensions, comme l'accueil de stagiaires ou les formations que nous proposons dans le domaine de l'agroécologie. La Maison forte est avant tout un lieu d’expérience, où les jeunes accueillis sont finalement tout aussi apprenants que chacune des personnes qui vit, travaille, séjourne dans ce lieu. »
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November 14, 2024 7:44 AM
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Les tiers-lieux, si ressemblants, si différents
Pour Chloé Rivolet, codirectrice et responsable animation territoriale de La Coopérative Tiers-Lieux, « un tiers-lieu c’est avant tout une démarche, un processus qui consiste à créer un bien commun à l’échelle d’un territoire, avec un collectif. » Les structures qui répondent à cette définition sont aujourd’hui très variées, mais elles possèdent toutes les mêmes particularités. La première consiste à proposer un parcours d’émancipation individuelle, ou comment le lieu permet aux personnes de développer leurs compétences, de tester leur projet, etc. La deuxième, l’animation d’une dynamique collective qui permet de valoriser chacun, notamment grâce à la notion d’accueil inconditionnel. « Cela ne veut pas dire qu'une réponse est apportée à tous, mais que le lieu est en mesure de donner des renseignements aux personnes qui poussent leurs portes, de leur faire une place et leur proposer des projets. Tout cela est permis par la dynamique collective. » Enfin, dernier point, le territoire, qui fait qu’un tiers-lieu ne ressemblera pas à un autre, en fonction des réalités et besoins locaux, des activités, de l'animation du modèle économique, des objectifs des partenaires et des acteurs de proximité. Chaque tiers-lieu définit les leviers qu’il veut actionner, place ses propres curseurs. Certains vont être très impliqués sur la dynamique collective, un peu moins dans l’émancipation individuelle. Mais chacune des trois dimensions doit être présente. « A noter que certaines organisations répondent à ces caractéristiques, sans pour autant être identifiées en tant que tiers-lieu. Ce sont notamment des structures du médicosocial qui cherchent à se réinventer et qu’on accompagne pour aboutir à une démarche plus ouverte, plus participative. » Adopter cette démarche, c’est faire partie d’un réseau très dynamique, qui s’appuie sur les expériences précédentes pour faire de la recherche action, trouver de l’inspiration, être reconnu auprès des institutions et s'exprimer. Plus prosaïquement, il ouvre accès à certains dispositifs d'aide, notamment ceux de la Région Nouvelle-Aquitaine qui soutient la création de tiers-lieux depuis plusieurs années. Un outil de localisation Pour prétendre à des aides régionales, il faut être référencé sur la cartographie coproduite par la Coopérative Tiers-Lieux et par la Région, au regard d’un certain nombre de critères. Aujourd’hui la Nouvelle-Aquitaine en compte environ 250, selon un système de modération qui a pour but de mieux référencer les structures. « Au début, c’était juste du déclaratif, n’importe quel lieu pouvait être référencé. Mais nous avons un peu affiné notre approche afin d’évaluer les initiatives de manière plus précise et qualitative. » Pour faire tiers-lieu, il n’est pas nécessaire de proposer un grand éventail d’activités différentes. L'accessibilité en termes de tarif, d’horaires, de programmation, constitue le point essentiel. Un bureau qui n’a qu’une activité de coworking peut être référencé, sous réserve qu’il développe une vraie dynamique qui s’inscrit dans la démarche. Mais cela reste assez rare, puisqu’une activité de coworking, notamment en agglomération, se présente la plupart du temps comme une offre de services. Les utilisateurs consomment le lieu, sans être forcément contributeurs. « Un tiers-lieu ne peut pas être un espace de colocation d’entreprises, pas plus qu’une pépinière ou un incubateur, qui s’adressent souvent à une seule typologie de public, des entrepreneurs dont la durée de présence est assez limitée dans la structure. Alors que dans les tiers-lieux, la volonté est que les contrats soient à durée indéterminée, même si on peut partir un peu comme on veut. » A noter que les tiers-lieux s’inscrivent forcément dans le champ de l’économie sociale et solidaire, même s’il ne s’agit pas d’un critère exigé. Assez naturellement, ils se reconnaissent dans ces valeurs, principalement parce qu’ils sont majoritairement portés par des associations. La Coopérative Tiers-Lieux, en tant que tête de réseau régionale, déploie différents formats de rencontre et d'accompagnement gratuit, donne de la visibilité aux tiers-lieux à travers des actions collectives et des productions de cartographie. Elle remplit par ailleurs deux autres grandes missions. D’abord un laboratoire d’innovation sociale, qui intervient à l’échelle nationale auprès de structures assez variées, médicosociales ou caritatives, qui cherchent à modifier leurs pratiques et modes d’intervention auprès de leurs publics. Ensuite, une activité de formation professionnalisante qui dépasse les frontières de la Nouvelle-Aquitaine puisque, en coopération avec d’autres réseaux régionaux, elle intervient dans dix régions différentes pour des formations de facilitateurs ou de transformation des organisations, notamment sur la base de l’intelligence collective. La Coopérative accompagne des tiers-lieux en création ou des structures existantes qui ont envie de se transformer et rejoindre le réseau, qu’ils aient besoin d’un appui à la gouvernance ou au développement d'une nouvelle activité. Elle intervient également auprès d'organisations diverses, notamment des centres sociaux qui s’intéressent à la démarche. « Nous travaillons aussi auprès de collectivités qui disposent de locaux vacants, avec un enjeu de redynamisation de leur localité et de développement de nouvelles activités pour leurs habitants, mais qui n’ont pas l’ingénierie des compétences pour donner forme à un tel projet. Notre rôle est de mettre en ordre de marche les acteurs, de faire émerger des dynamiques dans un local qui bien souvent appartient à la collectivité, mais qui est géré par un collectif d’habitants. Si la finalité pour la collectivité est de rester à la manœuvre, cela ne nous intéresse pas. Nous estimons qu’il est trop dangereux pour un lieu, in fine pour les utilisateurs, qu’il soit potentiellement remis en cause à chaque mandature. » Elaborer un modèle économique Les structures s’adressent à la Coopérative pour recevoir une aide sur les questions de gouvernance, de modèle économique, d’organisation de l'accueil. Le thème de l’organisation interne, du recrutement, revient régulièrement, ainsi que la gestion du binôme salarié-bénévoles dans les associations, qui n’est pas toujours simple. Les entreprises et les organisations qui cherchent à se transformer, à se réinventer afin d’être plus attractifs vis-à-vis de leurs bénéficiaires, font aussi face à un enjeu financier. D’un territoire à l’autre, on retrouve les mêmes problématiques, mais les spécificités locales conditionnent les outils qui sont fournis aux acteurs des différentes structures, charge à eux de mettre en place la méthodologie et l’approche la plus pertinente pour leur projet. « Notre rôle est plutôt de faire la promotion du modèle. On se rend sur les territoires pour évaluer la situation, repérer si la fonction de tiers-lieux au sens social du terme est déjà remplie par d’autres acteurs, ou si le territoire aurait besoin d’un tiers-lieu estampillé. » Il est assez rare qu’une nouvelle initiative se monte s’il en existe déjà d’autres à proximité. La Région a pour principe de ne pas financer un lieu qui se créerait à moins de vingt minutes d’une autre structure. Dans ce cas, il est suggéré aux porteurs de projet de se rapprocher de l’existant, d’essayer de proposer une approche complémentaire, afin que le projet ait un sens. Ainsi des ponts et des partenariats peuvent se créer, par exemple en associant un atelier partagé, un café associatif et une activité culturelle La Coopérative Tiers-Lieux se trouve aujourd’hui dans une phase de stabilisation. Depuis plusieurs années, elle a opéré un renforcement de ses fonds propres. Cependant ses activités ont nécessairement besoin du soutien des collectivités. Elle cherche désormais à maintenir une dynamique de réseau dans un contexte budgétaire assez changeant. « La bonne nouvelle c'est que, depuis cinq ou six ans, il existe une association nationale des tiers-lieux. Il y a aussi France Tiers-Lieux, un Groupement d'Intérêt Public constitué de cinq ministères et de l'Association Nationale des Tiers-Lieux. Nous n’avons aucune certitude sur la continuité des aides et des politiques publiques, mais comme les acteurs nationaux se sont fédérés, nous essayons ensemble de plaider la cause des tiers-lieux, en plus de nous rencontrer régulièrement et de s'inspirer des modèles économiques des uns et des autres. »
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September 5, 2024 4:57 AM
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La petite école sur la colline
Elisabetta Pomiato est coordinatrice de l’association L'Escolinas (en béarnais, la combinaison d’école et de colline), qui porte l’école ETRE de Loubieng (Pyrénées-Atlantiques). L’Escolinas a reçu un financement régional pour l'organisation en AFEST d’actions de préqualifications au métier d’ouvrier de l'éco construction. Qu’est-ce qu’une école ETRE ? « ETRE » est l’acronyme d’Ecole de la TRansition Ecologique. C’est un modèle qui a été inventé en 2017 à Lahage près de Toulouse. Il repose sur le constat qu’il y a, par an, à peu près 100 000 jeunes qui sortent du système scolaire sans solution. En face, selon l'Ademe, plus de 300 000 nouveaux emplois dans les métiers verts et verdissants à l’horizon 2035, un million en 2050. Les écoles ETRE sont les seules à travailler en même temps sur la dimension sociale et la transition écologique de la société. Les premières écoles ont été créées en Occitanie. En 2021, un réseau national s’est constitué, qui compte aujourd’hui 28 structures un peu partout en France, qui sont toutes une émanation des besoins d’un territoire. En Nouvelle-Aquitaine, il y a nous à Loubieng et celle d’Argentonnay (Deux-Sèvres). Deux autres ont été labellisées en juin, une en Gironde et une en Lot-et-Garonne. Comment avez-vous procédé pour mettre en place votre projet ? Nous avons travaillé pendant un an, tous bénévolement, en nous réunissant les soirs, les week-ends les vacances. ETRE Pyrénées-Atlantiques s'est fédérée en association en octobre 2022. Nous avons ensuite présenté un projet, retenu par le réseau, qui nous a accompagnés en incubation pendant 9 mois. Notre association est constituée par des professionnels de différents domaines, comme Fanny Ferrand, une paysanne qui fait de l'élevage et produit du fromage en écopâturage dans sa ferme « Laits Ptits Béarnais », et Phylippe Méau, l’expert terre-paille du département. Pour ma part, je viens du ministère de la Culture. Un de mes rêves c'était vraiment de construire quelque chose à la campagne. Quelle est la nature de l’intervention du réseau national ? Le réseau nous demande de respecter un cahier des charges qui inclut l’apprentissage par le faire, la mixité, la bienveillance, un encadrement solide, l’accompagnement des jeunes, leur suivi, etc. Là où les écoles ont une certaine liberté, c’est dans le choix des métiers qui font sens sur leur territoire. On décide avec qui on veut travailler et qui on embauche, on cherche nos financements, etc. Le réseau national nous donne tous les outils, il nous forme, il nous accompagne et il collecte des fonds au niveau national qui sont redistribués aux associations locales. A Loubieng, quels sont les métiers que vous avez choisis ? Globalement, ce sont des métiers manuels de la transition écologique, auxquels on peut accéder grâce à des formations assez courtes, avec des apprentissages directement sur les chantiers. Nous travaillons beaucoup dans le domaine de l'agroécologie, le respect des sols, de l'air, de l'eau, du vivant. Notre but est de redonner envie à des jeunes de réinvestir les métiers de l'agriculture qui ont souvent une image négative, parce que très durs. Nous formons aussi aux métiers de l’éco construction et du réemploi avec des matériaux biosourcés, locaux autant que possible. Il y a une vraie demande dans ce secteur, avec de plus en plus de marchés publics comportant des critères écologiques et qui demandent l'utilisation de matériaux écologiques. On est vraiment sur un secteur d’avenir. En quoi consiste votre offre de formation ? Nous proposons ce qu'on appelle des remobilisations, des stages de découverte des métiers d’une durée de deux semaines, pour donner aux jeunes l’envie de se former. On se focalise sur le savoir-être en entreprise, la ponctualité, le travail en équipe, la communication, des choses de base. Pour les métiers, on est sur la fabrication de fromage, de compost, l'éco construction en terre paille, la charpente, la fabrication des briques en terre cuite, la cuisine à base de produits de saison bio. On fait aussi découvrir les ressourceries de l’association AIMA. Nous avons également une offre de préqualification en AFEST. Ce sont des sessions de 3 mois de formation au métier d’ouvrier de l'éco construction. Les stagiaires travaillent sur des vrais chantiers avec des professionnels qui leur apprennent à monter de vrais murs en terre paille, notre spécialité, ou d'autres techniques d'isolation. Selon ce qui les intéresse, nous accompagnons ensuite les jeunes vers une formation qualifiante ou directement chez un professionnel s’ils sont déjà assez bons, ou encore vers un service civique. En ce moment, nous animons trois sessions de remobilisation de deux semaines et deux préqualifications de trois mois par an. La prochaine débute le premier octobre. Mais pourquoi avoir choisi la modalité AFEST qui n’est pas la plus facile à mettre en place ? Pour nous, c'était l’occasion de véritablement structurer une formation en préqualification. Effectivement ça a été très lourd et chronophage. Nous étions tous dans l’auto-apprentissage parce qu’on ne vient pas du monde de la formation. En plus, ça demande des postures de la part des formateurs qui sont assez innaturelles, notamment la partie réflexivité. On s'y met, on essaie de tirer notre épingle du jeu, c'est-à-dire de faire en sorte que ce soit utile pour nos jeunes. En revanche, c’était facile pour nous de nous projeter dans la dimension en entreprise. Quel est le profil de votre public ? Ce sont les 16-25 ans, le public des missions locales, qui sont nos premiers partenaires en termes de prescription. La partie compliquée c'est de réussir à repérer ces jeunes, souvent ni en emploi, ni en formation, les fameux « NEET ». On essaie de travailler avec toutes les structures du territoire qui peuvent nous aider à les repérer. En moyenne, nous constituons des groupes de six à sept personnes. Avec la préqualification, nous sommes tenus par la Région d’en avoir dix dans l'année. Les stagiaires ont éventuellement une aide régionale pour la mobilité, et une rémunération s’ils sont éligibles. Pour les remobilisations, ils doivent pouvoir venir dans la journée et retourner chez eux le soir. Nous avons une navette à partir de la gare d’Orthez, donc s'ils arrivent jusque-là, on les prend en charge. Pour la préqualification en revanche, on essaie de trouver des solutions d'hébergement, un gîte partagé, un dortoir pour être proche des chantiers. Avez-vous rencontré des difficultés particulières ? Le plus simple a été de réunir les compétences professionnelles. En général nous recevons un accueil assez enthousiaste quand on présente le projet aux professionnels, qui comprennent ce qu’il peut apporter. On a aussi eu une écoute vraiment attentive de la part des services de la Région. A l'échelle locale et départementale, c’est plus compliqué, ça va prendre du temps, plus que ce que j'aurais imaginé. Personnellement, ça m'a demandé un grand un grand effort d’acculturation parce que je ne connaissais pas le milieu et les acteurs de la formation. En revanche, je sais monter des projets. Notre difficulté majeure, c'est plutôt de trouver le financement qui nous permettrait d’avoir des postes attirants. Pour l’instant nous avons très peu de candidatures, parce que le poste d’encadrant que nous proposons n’est pas à plein temps. De plus il est situé à Loubieng, donc ça demande aux gens de se déplacer. Comment voyez-vous la suite ? Pour augmenter le nombre de sessions, il faut grandir un peu, étoffer l'équipe et augmenter le temps de travail, parce qu’on est tous à temps partiel. Pour les remobilisations, je pense qu'on pourrait arriver à quatre sessions par an. On voudrait développer un volet agroécologie, mais pour l'instant, du point de vue de l'ingénierie de projet, on n'y est pas encore. Ce qu'on voudrait aussi, c'est de monter des chantiers un peu plus loin de chez nous, vers Pau et Bayonne. Pour ça, il faudra faire appel à des professionnels locaux, des personnes, qui à la fois maitrisent des techniques assez nouvelles et ont la fibre pédagogique. Ce qu'on essaie de développer aujourd'hui c'est une communication directe, par les réseaux sociaux, que les jeunes nous identifient sans devoir nécessairement passer par les missions locales. Nous venons de recruter une chargée de partenariat et de la communication, qui fera notre promotion auprès des structures. C'est un travail qui doit être constant et répété. Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine : https://pro.cap-metiers.fr/politiques-publiques/la-place-nouvelle-aquitaine/
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April 18, 2024 9:13 AM
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Vent en poupe pour les métiers du nautisme
Sylphe est un voilier mythique des années 60. Ce monocoque habitable de croisière de 6,5 mètres, conçu par l'architecte naval Michel Dufour, a été construit par le chantier du même nom, à La Rochelle, jusqu’au début des années 70. Aujourd’hui, son prototype original, le numéro « 0 », est accueilli dans les murs du lycée polyvalent du Pays d'Aunis à Surgères (Charente-Maritime). Il joue désormais le rôle d’ambassadeur du programme « Embarquez dans la Filière Nautique » (EDFN). Ce programme est porté par Fountaine Pajot qui a constitué un consortium1 afin de répondre à l’appel à projet Ingénierie de Formation Professionnelle et d’offres d’Accompagnement Innovantes (IFPAI) soutenu par l’Etat et la Région Nouvelle-Aquitaine, dans le cadre du plan d’investissement d’avenir « France 2030 » opéré par la Caisse des Dépôts. Il a l’ambition de toucher tous les profils, jeunes ou adultes en reconversion, afin d’identifier et d’attirer des publics nouveaux qui constitueront les futurs salariés. Il entend également fidéliser et faire progresser ces publics et les salariés en poste. EDFN comprend 12 actions, réparties pour moitié en actions « amont », pour l’autre moitié en actions « aval ». En amont, tout ce qui relève de la sensibilisation aux métiers et au repérage des publics éloignés de l’emploi. Pour Patricia Meignen, cheffe de projet IFPAI chez Fountaine Pajot, la présence du Sylphe dans un organisme de formation relève typiquement de ce champ-là. « L’objectif de faire venir le bateau ici, c'est vraiment de sensibiliser aux métiers du nautisme, de montrer qu’ils incluent par exemple des menuisiers et des menuisiers agenceurs. Ensuite, nous avons la volonté d’accompagner les gens vers les formations et, en fonction des intérêts de chacun, de les orienter, de leur proposer un environnement adapté et de lever les freins à l'emploi. » Au chapitre des actions « aval », on trouve l’intégration des stagiaires dans l’entreprise, le développement des compétences managériales, la formation des formateurs internes, le renforcement de la polyvalence (ou de la polycompétence) et des mobilités transversales des salariés. Ces actions n’ont pas été pensées selon une logique chronologique, elles ont toutes été engagées de front. Certaines sont complémentaires et s’alimentent entre elles. L'importance de la formation « Je vois les choses par le prisme de l'entreprise et de sa responsabilité sociétale » précise Franck Bonot, DRH de Dufour Yachts. « Son développement économiquement ne peut pas faire abstraction de l'environnement, de son bassin d’emploi. Et la formation tout au long de la vie est essentielle au développement. Les établissements de formation et les entreprises ne doivent rester en silo, il faut les décloisonner, pour faire en sorte que les apprenants ne soient pas trop éloignés des réalités des entreprises. » Pour la Communauté de Communes Aunis Sud, le projet s’inscrit naturellement dans le prolongement de ses compétences en matière de développement économique et d’emploi. Son président Jean Gorioux estime que « les pistes de travail ne sont pas spécifiques au nautisme, mais elles s'intègrent complètement au sujet du repérage des publics en recherche d'emploi. Les questions de mobilité, de logement relèvent aussi de nos compétences. Elles sont au cœur de la problématique de notre territoire, qui est dynamique mais qui malgré tout connaît des problèmes d'emploi de longue date, même si la situation s’améliore. Les objectifs affichés rentrent complètement dans notre projet de territoire et les moyens qu'on a mis en place. » En Aunis Sud, la priorité porte sur les demandeurs d’emploi de très longue durée, qui ont déjà fréquenté les structures d’insertion. Avant même de travailler le projet professionnel ou la formation, il s’agit déjà de les remobiliser et de leur redonner de la confiance. Dans cet esprit, des démarches ont été engagées avec les structures d'insertion pour créer des passerelles avec les entreprises, et outiller les conseillers. La présence du Greta comme organisme de formation au sein du consortium présente l’avantage d’associer l’éducation nationale au projet, et de s’adresser à la fois aux jeunes et aux adultes en formation. Il permet également d’impliquer le rectorat dans le but de mettre en place des actions de découverte des métiers auprès des collégiens. Même logique en ce qui concerne les établissements comme le lycée polyvalent de Surgères, qui voit dans ce projet la possibilité de toucher les trois types de public qu'il accueille, à savoir les jeunes en formation initiale, les apprentis dans le cadre de son UFA, membre du CFA académique, et les adultes en formation continue. « L’Éducation nationale nous demande d’adapter nos formations aux besoins économiques du territoire, » ajoute Vincent Rulié, proviseur. « Nous apportons notre pierre à l’édifice et, en retour, nous bénéficions de l'expertise des entreprises pour développer notre offre afin qu’elle soit plus en adéquation avec leurs besoins. On s'appuie sur des référentiels existants mais, en l'occurrence, il va peut-être falloir les écrire ou les inventer » Aujourd’hui, les diplômes et titres sont utilisés partiellement avec quelques « écarts », en ne gardant que le contenu pédagogique qui correspond aux besoins de l'entreprise. Des certifications plus adaptées, préparées par la Fédération des Industries Nautiques, sont en cours de validation par France compétences. Pour Frank Bonot, « il ne faut pas être dans une logique propriétaire. Les salariés n'appartiennent pas aux entreprises, notre rôle est de monter les gens en compétences. A nous d'être mieux disant dans les conditions d'emploi, d'être beaucoup plus attractif. Ça peut bénéficier aux autres acteurs du secteur, voire à d’autres secteurs. La logique n'est pas que dans un sens, on peut aussi récupérer des personnes qui ont acquis des compétences dans d’autres activités. » Dans cet esprit, le groupe Fountaine Pajot2 a créé un organisme de formation interne « l’Institut des Talents Nautiques » afin d’accompagner la montée en compétence des salariés et de fidéliser les nouveaux entrants. Attirer vers le nautisme Aujourd’hui, l’industrie du nautisme est méconnue ou ne bénéficie pas forcément d’une bonne image. Pour remédier à ce déficit d’attractivité, les pistes envisagées sont diverses : travailler sur la « marque employeur », améliorer les conditions d'accueil des stagiaires et des salariés dans les entreprises, faire découvrir les métiers par l’intermédiaire d’un certain nombre de relais, au premier rang desquels les prescripteurs. Mais aussi les parents, qui ont besoin d’être rassurés sur les débouchés des formations. Pour casser les idées préconçues, les partenaires s’accordent à penser qu’il faut donner à voir, proposer des visites d’ateliers, des journées portes ouvertes, exposer les techniques modernes de fabrication et les produits finis que sont les bateaux. Montrer que les accastilleurs, opérateurs techniques, menuisiers, contribuent à créer des produits de prestige. Pour ce qui concerne le repérage des publics, les partenaires vont élaborer des fiches par métier, présentant les compétences, les aptitudes nécessaires, l'offre de formation initiale et continue. Ils vont également concevoir des ateliers de découverte métiers mobiles. « L’idée est que nous choisissions quelques villes sur le territoire de la CDC Aunis Sud afin d’aller vers les publics. A partir de septembre, nous prévoyons de nous déplacer avec quelques outils, des supports techniques manipulables et numériques. Notre but est de donner envie aux jeunes et aux adultes d’en savoir plus, de venir visiter les entreprises, puis éventuellement de se projeter vers une formation et un emploi. » Au-delà des membres du consortium « Embarquez dans la filière nautique », ce projet permet une synergie avec l’ensemble des acteurs du territoire : Structures de l'Insertion par l'Activité Économique, France Travail, Rectorat, lycées, Comités Locaux École Entreprise, associations 3, etc. Les premiers résultats sont perceptibles au travers des relations engagées autour des projets créant, une nouvelle façon de travailler ensemble qui produit déjà des effets sur les prescripteurs dont les perceptions de l'entreprise et du milieu du nautisme en général ont évolué. L’appel à projet IFPAI est le catalyseur d’une véritable synergie entre toutes les parties prenantes, les acteurs économiques, les opérateurs de l'emploi. Il permet de créer des rencontres, une meilleure coordination, la mise en commun de moyens. Selon Patricia Meignen, « il y a une prise de conscience que le système qui a prévalu jusqu'ici a atteint ses limites. Le terreau était là, ainsi que les volontés et les constats partagés. Mais sans l’appel à projets, je pense qu'on n’aurait pas avancé aussi rapidement. » 1 Le consortium est composé des constructeurs Fountaine Pajot et Dufour Yachts, des équipementiers APPEP et Pochon, du Greta Poitou-Charentes, de la communauté de communes Aunis Sud, et de la Fédération des Industries Nautiques (FIN). 2 Le groupe Fountaine Pajot est notamment composé des chantiers Fountaine Pajot et Dufour Yachts 3 Ocean peak, Fondation Fier de nos Quartiers
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November 23, 2023 4:21 AM
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Un projet pour apprendre les projets
Marine Raffini est depuis peu directrice de la mission locale des Landes. Avant cela, elle était responsable du projet Territoires 100% solutions, lauréat du PIC Repérer et Mobiliser les Publics Invisibles (RMPI). En quoi consiste Territoires 100% solutions ? Nous avons démarré cette action en septembre 2020 de manière expérimentale, et nous avons souhaité la poursuivre. L’interrogation de départ était, est-ce que les dispositifs proposés aux jeunes sont réellement adaptés à leurs besoins et difficultés ? Nous avons pensé qu’il pouvait être intéressant de monter une action ayant pour objectif de créer un collectif à l'échelle d'un bassin de vie. Nous avons choisi les communautés de communes comme échelle. Notre idée c’était aussi d’intégrer les jeunes dans une démarche de projet pour imaginer des actions et ensuite les mettre en place. L’objectif est de leur faire découvrir leur environnement socioculturel et socio-économique, les ancrer sur le territoire et les faire monter en compétences pour que ça leur serve dans leurs projets personnels. Quel est son principe ? Territoire 100% solutions, c’est vraiment apprendre sans avoir l'impression d'apprendre. C’est travailler sur la conception d’un réseau d’entraide, entre jeunes, mais aussi avec les décideurs locaux. Le but c’est d’apprendre à élaborer un projet, apprendre à gérer le budget, à chercher les partenaires utiles, etc. Comment avez-vous procédé pour le mettre en place ? Nous sommes partis à la rencontre des associations sportives, des comités des fêtes, des acteurs de terrain qui pouvaient nous indiquer des jeunes potentiellement intéressés. Lors de la première étape du projet, nous avons réalisé un diagnostic approfondi du territoire, pour évaluer les réalités vécues par les jeunes et leurs perceptions. Nous avons élaboré un questionnaire et nous sommes allés à leur rencontre. C’est dans ce cadre-là que nous avons rencontré les premiers candidats qui, ensuite, en ont contacté d’autres avec notre accompagnement. Une fois le premier groupe constitué, nous avons fait une réunion collective. Les participants se sont mis d'accord sur la manière dont ils voulaient s’organiser et arriver à l’objectif de faciliter leur insertion. Par exemple, pour la première expérimentation qui se déroulait sur un territoire très rural, ils ont décidé de se voir toutes les semaines avec une alternance présentiel/visio. Ils ont aussi convenu que les rencontres se feraient à chaque fois dans des communes différentes et que j’irais chercher ceux qui n'était pas mobiles. Ils n’étaient tout de même pas en autonomie totale. J'étais là pour les orienter et les alerter sur la faisabilité de leurs idées. Quel est le profil des participants ? Nous n’avons pas ciblé des profils particuliers, nous voulions surtout trouver des complémentarités entre chacun pour constituer un groupe pertinent d’une douzaine de jeunes, qui puisse aller le plus loin possible. On souhaitait qu’il soit représentatif et composé d’individus qui pouvaient s’apporter mutuellement des choses, qu’ils soient déjà impliqués dans l’associatif ou en retrait de la vie sociale. Notre objectif était de faire se rencontrer des jeunes qui parfois habitent près les uns des autres mais ne se seraient pas nécessairement rencontrés sans le projet. Comment se déroule le projet ? Nous avons mené l'expérience sur un premier territoire, qui s'est avérée plutôt concluante. Ensuite, nous avons décidé de répondre à l'appel à projet RMPI pour la déployer sur trois nouveaux territoires. A chaque fois, l’action durait entre 10 et 14 mois, découpés en quatre temps. D’abord, le diagnostic et le repérage des premiers jeunes. Le deuxième, l’élaboration des actions. Et le troisième temps, l’expérimentation des actions. Ce sont les deux temps forts, où les jeunes allaient notamment à la rencontre des acteurs locaux et des partenaires. Enfin le dernier, le bilan et l'évaluation, que ce soit collectif ou individuel, le territoire, les actions. A quoi s’engageaient les jeunes ? Nous avons demandé aux jeunes s’ils souhaitaient formaliser leur engagement, par exemple pour leur employeur. A l'unanimité, ils ont souhaité qu’il n’y ait pas de formalisation de leur implication. Cela nous a permis d’avoir une certaine souplesse, qui permettait à certains jeunes de rejoindre le projet alors qu'il était déjà entamé. Il y avait aussi des passerelles avec les dispositifs les plus classiques de la mission locale, comme le CEJ. En ce qui concerne les sorties, pour nous le plus important c’est que le jeune ait gagné confiance en lui, qu’il soit monté en compétence et devenu plus à l'aise pour poursuivre sa démarche professionnelle. Certains ont continué à être accompagnés de manière individuelle à l'issue du projet, d'autres ont trouvé un emploi grâce au partenariat et à la rencontre avec les acteurs locaux. D’autres encore ont poursuivi leurs études. De quelle nature étaient les actions ? Nous avons été assez étonnés par le pragmatisme des jeunes, qui savaient bien faire la part entre ce qui était possible et ce qui ne l’était pas. Et surtout par la cohérence entre ce qu’ils souhaitaient, et ce que les élus de territoire avaient pu imaginer. Très souvent ça se recoupait, ça a été une vraie surprise pour les élus. Ce qui nous a marqué également, c’est que dans chaque groupe, les jeunes ont eu le réflexe d'aller regarder ce qui faisait dans des territoires similaires, de chercher des bonnes idées et des bonnes pratiques plutôt que de partir du principe d’inventer quelque chose de nouveau. Quelques exemples ? Il y a eu beaucoup de propositions sur le logement et la mobilité qui sont ressorties, notamment dans les territoires. Par exemple, pouvoir aller habiter chez des personnes âgées seules. Ou encore d'avoir chacun leur habitation dans un même bâtiment avec tous les services à proximité. On avait conscience que c'était compliqué, que nous n’allions pas construire comme ça un bâtiment avec des appartements, mais on s’est dit qu’il faudrait aller voir un bailleur social pour des logements en rénovation. Aujourd'hui, ce qu'on teste de manière expérimentale, c'est d'avoir 3 logements fléchés pour les jeunes, situés à 200 mètres de la maison France services, avec une voiture partagée à disposition. Comme une sorte d’espace de répit et de tremplin pour l'insertion des jeunes qui y résident, avec un accompagnement renforcé à la mission locale répondant à tous les freins qu’ils peuvent rencontrer. C’est quelque chose qu’on teste sur le premier territoire et qu'on aimerait développer sur l'ensemble des départements si ça fonctionne. Quel rôle jouent les élus et décideurs locaux ? Nous les avons informés depuis le début, on leur présentait territoires 100% solution comme une offre de service complémentaire. Nous sommes intervenus sur leur territoire en concertation avec eux, parce que proposer de actions c'est très bien, mais il faut qu’elles soient suivies d'effets, dans une dynamique commune avec les décisionnaires locaux. Donc les actions se sont faites sur chaque territoire avec un engagement de leur part à réaliser celles qui relèveraient de leurs compétences. C’est vrai qu’ils partaient d’une page blanche, et que nous leur demandions de s’engager à mener des actions dont ils n'avaient pas encore connaissance. C’était forcément un peu déboussolant. En revanche, ce qui les intéressait, c'était d’avoir un contact direct avec les membres du groupe, et de disposer d’un état des lieux approfondi de la situation des jeunes sur leur territoire et de leurs attentes. Particulièrement là où il y a un véritable exode de ce public. Est-ce que le projet a fait évoluer vos pratiques habituelles ? Derrière ce projet, notre idée était d'interroger les pratiques de la mission locale, et de renforcer nos actions hors les murs, d'aller à la rencontre des jeunes et de créer vraiment une dynamique collective à la fois pour eux et pour les territoires. Aujourd’hui la question c’est, est-ce qu’on poursuit le projet de la même manière sur d'autres territoires, ou d’une manière différente avec ce que nous avons appris de ce projet ? Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine : https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx
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September 28, 2023 6:42 AM
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Sud-Gironde, la piste GEIQ
Le projet CLIQ SG, pour "Comité local insertion qualification Sud Gironde", tient son origine d'une reconversion professionnelle. En 2021, Nicolas Jaudard était alors travailleur social. Il avait choisi de s’orienter vers un master de sociologie en « Intervention et innovation sociale », dans la perspective de développer des initiatives de coopération entre acteurs à l’échelle d’un territoire. « J’ai proposé à quelques structures du Sud-Gironde de travailler éventuellement sur un projet dans le cadre de ce master pendant 2 ans. J’ai tout de suite été contacté par la mission locale de Langon. » A l’époque, la mission locale faisait le constat que beaucoup de jeunes accompagnés vers l'emploi, dans le cadre de dispositifs existants ou de structures d’insertion, n’arrivaient pas jusqu'aux entreprises. Et ce, malgré les besoins. « On m’a proposé d’aller « faire le tour des popotes » et d’établir un diagnostic. On m’a demandé d'étudier un peu plus particulièrement les territoires Zéro chômeurs longue durée, et quelle serait leur pertinence pour le Sud-Gironde. Ou une régie territoriale, qui fait partie des réponses envisageables en milieu rural. Ou encore, un Groupement d'Employeurs pour l'Insertion et la Qualification (GEIQ), sachant qu’il en existait un à la Réole, le GEIQ Val de Garonne, un des plus anciens de France, mais qui a fermé quand son directeur est parti à la retraite. La mission locale travaillait en partenariat avec lui, et sa disparition a laissé un vide. » Pourquoi ce lien avec les entreprises ne se fait pas ? Quel est le chaînon manquant ? Y-a-t-il besoin de valoriser les métiers ? Quelles relations entre, d’un côté, les différents acteurs qui accompagnent les publics, et les entreprises de l’autre ? Malgré la présence de SIAE, des missions locales, Pôle emploi, la rencontre ne se fait pas, ou pas suffisamment. Ce qui aboutit à des jeunes qui vivent des problématiques d'isolement, d’addictions, de manque de mobilité, etc. Alors que des entreprises, à proximité, sont prêtes à les embaucher et à les former. « J’ai passé la première année de mon master à rencontrer l'ensemble des acteurs, les conseillers Pôle emploi et mission locale, les SIAE, le Département, la DEETS, les ESAT, tous ceux qui, de près ou de loin, travaillent sur l'insertion professionnelle. Ainsi que les clubs d'entreprises, afin d’aller chercher le point de vue des entrepreneurs sur ces questions. » Le choix entre trois options Ce travail de prospection a débouché au printemps 2022, sur un rapport évoquant les problématiques du territoire, les secteurs en tension, sur les différents acteurs locaux et leurs relations. Au chapitre des hypothèses, trois options étaient présentées : le territoire zéro chômeurs, la régie territoriale, le groupement d’employeurs. « Les différences portaient sur le fait qu’un territoire zéro chômeurs ou une régie territoriale nécessitent une mobilisation politique extrêmement forte sur le long terme. Après réflexion, la solution la plus pertinente semblait être la constitution d’un nouveau GEIQ notamment parce que c'est un modèle porté par les entreprises. » Le territoire de Sud Gironde est marqué par des freins à l’emploi relativement classiques mais très présents. Santé mobilité, isolement, logement, des publics plus exclus que sur d'autres secteurs. L’offre de formation, pourtant relativement riche pour un milieu rural, ne couvre pas tous les besoins. Beaucoup d'orientations se font par défaut mais ne correspondent pas forcément aux attentes des entreprises locales. De fait, les jeunes sont nombreux à partir faire des études mais ne reviennent pas, ou se détournent des études pour différentes raisons (distance, offre pas adaptée à leur projet, etc.) Côté entreprise, le territoire possède un tissu relativement important de TPE/PME notamment industrielles, avec des besoins assez spécifiques : techniciens de maintenance, soudeurs, chaudronniers, opérateurs de machines à commande numérique, etc. Depuis la disparition du GEIQ Val de Garonne, le paysage des GEIQ a bien changé. En Gironde il en existe désormais une dizaine, et beaucoup souhaitent se développer. Plutôt que d’en créer un nouveau, le Comité Régional des GEIQ de Nouvelle-Aquitaine proposait d’étudier les conditions pour que des groupements existants viennent déployer leur offre de services sur ce territoire. Nicolas Jaudard a été chargé de jouer ce rôle d’émulation entre les acteurs locaux, afin qu’ils se familiarisent avec les GEIQ de Gironde et que, finalement, des relations s’établissent et que les entreprises soient intégrées dans la boucle. Deux groupements ont exprimé leur volonté de s’engager dans une initiative commune en Sud-Gironde, le GEIQ BTP de Libourne et le GEIQ des industries technologiques d'Aquitaine. Ils avaient les entreprises, et l’envie de se développer sur place en lien avec les acteurs locaux. « Donc on avait cette sorte de conjonction avec un territoire qui a la volonté qu’il se passe quelque chose, et des structures qui se disent intéressées, mais avec toutes les difficultés de pouvoir créer un réseau, de pouvoir le faire vivre, d’être sur place, de matérialiser le projet en quelque sorte… » Développer les relations entre acteurs locaux « Ce qui m'a beaucoup interpellé, ce sont les rapports entretenus par les différents acteurs avec les entreprises. Dans chaque structure, ESAT, SIAE, agence Pôle emploi, mission locale, il y avait une personne dédiée qui démarchait les entreprises, chacune individuellement avec ses moyens. Tous ces acteurs de l'emploi et de l'insertion ont pour mission d'emmener les personnes qu'ils accompagnent vers l'entreprise. Malgré l'engagement de chacun, à l'échelle du territoire, le lien avec le tissu de PME reste embryonnaire. Une raison de plus qui explique que les parcours n'aboutissent pas jusqu'aux entreprises. » Autre ambition, celle de faire venir les entreprises dans les instances des structures d’accompagnement, de créer des événements, de l'animation, de rassembler les gens avec lesquels elles pourraient créer des passerelles. Sans oublier la dimension formation. « Aujourd’hui, les GEIQ sont présents en Sud-Gironde et sont des acteurs complètement intégrés à l'écosystème. Ils apportent ce lien avec les entreprises et vont le faire de plus en plus. Leurs actions sont planifiées toute l'année avec Pôle emploi, avec les missions locales. Ils y tiennent des permanences et se rendent, grâce aux structures partenaires (Espace services jeunesse, MDSI, SIAE, tiers lieu) à la rencontre des demandeurs d'emploi. Là, les Geiq représentent et convient les entreprises à certaines instances, des liens ont été tissés et les choses sont en train de se développer. Concrètement il y a également eu de nouvelles entreprises qui ont adhéré aux différents GEIQ. Exemple d’action avec un groupe de jeunes en CEJ, qui ont réalisé des films sur les métiers de l’industrie dans les entreprises du Bazadais *. C’était l’occasion pour eux de découvrir ces métiers, et pour la mission locale, le GEIQ Industrie et les autres acteurs, de disposer de supports de présentation sur les métiers d’opérateur sur machine à commande numérique ou de conducteur de ligne de fabrication. Les entreprises s’y retrouvent car ces films, qui seront diffusés pendant la semaine de l’industrie, représentent bien leurs réalités. « Ce genre de projet représente bien les liens qui ont été créés entre le GEIQ, les entreprises, les intervenants locaux et les collectivités, qui ne se parlaient pas nécessairement avant. Ces liens ne vont pas retomber du jour au lendemain, ce sont des personnes qui ont travaillé ensemble sur quelque chose de concret, qui leur plaît à toutes, et tout au long de l'année. » « Je crois que les GEIQ n’avaient pas forcément besoin du Sud-Gironde pour exister. En revanche, pour la mission locale l'agence Pôle emploi, les structures d'insertion par l'activité économique, le Département avec ses bénéficiaires RSA, il était nécessaire de disposer de ce type de dispositif qui ouvre les portes des entreprises aux jeunes, aux personnes en reconversion, à tous ceux qui veulent se former en travaillant. Alors certes, pour l’instant cela ne concerne que les entreprises adhérentes des GEIQ, mais les actions sont accessibles à toutes celles qui veulent s’y associer. » *Ces films seront présentés le 24 novembre lors d’un évènement public.
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May 11, 2023 7:58 AM
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Etudier près de chez soi, la solution campus connecté
Autrefois, c’était l’ancienne maison du garde champêtre. Après restauration par la mairie de Saint Macaire (Gironde), elle héberge depuis 2 ans le « campus connecté » porté et animé par la mission emploi formation du Pôle Territorial Sud Gironde, un syndicat mixte réunissant plusieurs communautés de communes. Le bâtiment comporte une salle spacieuse avec une grande table de travail, un équipement de visioconférence, une salle informatique, des espaces de travail. « C’est un lieu que nous avons voulu plaisant, accueillant et convivial », décrit Fiona Joseph, coordinatrice-tutrice. « Cette maison a vraiment une âme. Ce n'est pas juste une salle fonctionnelle et un peu impersonnelle. Les étudiants s’y sentent bien, c'est un peu leur deuxième maison. » Les Campus Connectés sont des lieux d'études labellisés à l'échelle nationale par le ministère de l'Enseignement supérieur de la recherche et de l'innovation. La France en compte aujourd’hui 86, dont 9 implantés en Nouvelle-Aquitaine. Ils sont majoritairement portés par des collectivités territoriales, mais peuvent aussi l’être par des structures associatives. Leur rôle est d'accueillir et d'accompagner des étudiants de tous âges, aussi bien des jeunes en formation initiale, des primo étudiants qui viennent d'obtenir le bac, que des actifs en reprise d'études qui entament un nouveau parcours de formation à distance. Ils doivent respecter un cahier des charges, ainsi qu’établir un partenariat avec un établissement universitaire dit de proximité, qui n'est pas nécessairement celui auprès duquel les étudiants suivent leur formation. Pour le Campus Connecté du Sud Gironde, il s’agit de l’université de Bordeaux qui est partenaire de six Campus Connectés de la région. Une autre vie étudiante « Notre campus comporte 15 places, donc on est plutôt sur des micros effectifs. Bien évidemment, il s'agit d'une autre expérience étudiante que celle qu'on peut connaître sur un grand campus universitaire. Au sein d’un de nos groupes, il y a vraiment des profils très variés en âge, en parcours de vie, en formations suivies. Tout au long de l'année il peut y avoir des entrées et des sorties du dispositif, qui se veut très souple. Je pense que c'est ce qui fait son charme auprès des bénéficiaires, à savoir qu’il convient autant aux formations courtes, aux formations longues, qu'à celles qui se déroulent à cheval sur deux années universitaires, etc. » Plusieurs éléments essentiels caractérisent un campus connecté. Il s’agit avant tout d’un site équipé et connecté, ouvert aux étudiants du territoire qui disposent ainsi d’un lieu où se rendre pour progresser dans leur formation à distance. Autre élément important, ils offrent un accompagnement individuel des étudiants, un tutorat qui peut prendre plusieurs formes, du coaching au conseil. Il ne s’agit pas nécessairement d’un accompagnement pédagogique, mais plutôt d'un soutien à l'étudiant et d'un accompagnement dans ses démarches tout au long de sa formation. « La dernière dimension est la dynamique collective qui s’opère au sein des campus, et qui contribue à motiver les étudiants inscrits. On ne leur demande qu’une chose, être présents sur le site 12 heures minimum par semaine. Les étudiants n'arrivent pas toujours à respecter ces conditions, mais c'est l'engagement de départ. C’est nécessaire pour que je puisse faire mon travail de tutrice, que je puisse assurer le suivi individuel et que la notion de dynamique et d'animation collectives du campus prenne tout son sens. » Les animations prennent des formes diverses, sur la base de thématiques. Par exemple, « bien s'informer, bien raisonner, bien parler, dans le monde d'aujourd'hui et de demain ». A cette occasion, des animateurs de Cap Sciences et l’association « les Débatteurs » ont effectué un travail avec les étudiants sur la prise de parole en public, l'éloquence, les présentations orales, etc. Pour sa part, l’association « IMS Project » (Informations pour le Monde Suivant) est venue inciter les étudiants à s’interroger sur la qualité de leurs sources d’informations. Autre exemple avec un projet qui portait sur le thème « cultiver son bien-être ». Dans ce cadre, ont été organisés des ateliers yoga, des séances de basket, une randonnée culturelle pour aller à la découverte de Toulouse-Lautrec, enfant du pays, et une formation aux premiers secours dispensée par l'union départementale des sapeurs-pompiers. Ont également été organisées des visites d'entreprises, des rencontres avec des professionnels, avec le sous-préfet de l'arrondissement de Langon venu présenter l'organisation des compétences sur le territoire. Répondre à un véritable besoin Au regard des deux premières années du campus, il s’avère que la formation à distance répond effectivement à un besoin. « Je pense que beaucoup n'auraient pas envisagé de suivre des études s’ils ne pouvaient pas bénéficier de cette solution à distance. Pour certains, notamment les plus jeunes, les primo étudiants qui viennent d'obtenir le bac, il s'agit souvent d'un choix par défaut. Parfois, ils ne trouvent pas de place en présentiel à l'issue de la campagne Parcoursup. La limite, c’est que la formation à distance est une formule exigeante. Il faut être organisé, autonome, discipliné et régulier. C'est difficile à faire si on est tout seul. Le campus connecté offre justement ce cadre qui aide beaucoup à ne pas décrocher. » Le Pôle Territorial Sud Gironde met à disposition une quinzaine d’ordinateurs portables financés par la Région Nouvelle-Aquitaine. Si la plupart des étudiants sont déjà bien équipés, ils peuvent s’en servir pour des besoins ponctuels, ou faire un emprunt pour la durée de leur formation. Le campus dispose également de moniteurs, de claviers et de souris, si les étudiants veulent se créer un poste de travail un peu plus confortable. « Très tôt il y a eu un dialogue qui s'est mis en place avec les établissements, les lycées du territoire, publics et privés. Ce dialogue perdure. Chaque année, j'interviens dans les lycées pour faire connaître le dispositif. En revanche, nous sommes un peu surpris d’avoir relativement peu de primo étudiants, et plus d'actifs en reprise d'étude que ce à quoi on s'attendait. Ces derniers représentent presque 50% des adhésions. » Pour la suite, le campus connecté aimerait accueillir davantage de personnes en formation professionnelle, pas seulement sur des formations diplômantes, mais aussi des formations certifiantes et professionnalisantes. Il pourrait accueillir des demandeurs d’emploi qui suivent une formation à distance dans le cadre de leur accompagnement par Pôle Emploi. Ce n’est pas le public envisagé au départ, mais qui pourrait être plus nombreux dans les années à venir. En Sud Gironde, le Pôle Territorial envisage de déployer le dispositif. Une nouvelle antenne ouvrira ses portes à La Réole en septembre prochain. A terme, une troisième antenne devrait voir le jour à Bazas. La volonté est de multiplier les lieux pour que les résidents du Sud Gironde puissent avoir accès au dispositif au plus près de chez eux. « Ce qui est formidable avec le campus connecté, c'est qu’il suscite tout un maillage autour de lui, un réseau d'intervenants vers lesquels il est facile de se tourner pour parler mobilité, service civique, travail à temps partiel… Au-delà de la mission d'accompagnement en termes de tutorat, ce qu'on apporte aux étudiants est bien plus large. Nous créons les conditions de mise en relation avec tout un ensemble d'acteurs du territoire, un accompagnement qui va bien plus loin que celui d’un tuteur dans l'enseignement supérieur. »
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Cap Métiers NA
March 30, 2023 10:37 AM
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CitésLab, soutenir l’envie d’entreprendre en QPV
BGE Limousin-Poitou-Charentes fait partie d’un réseau national dont l’objet principal est d'accompagner à la création d'entreprise, sans condition de profil, de diplôme ou de revenus. Les porteurs de projets sont accompagnés depuis le stade de l'émergence, leur idée de départ, jusqu'au « post-création », avec éventuellement une intégration de l’accompagnement en couveuse, une solution qui permet de tester son activité en toute sérénité. Pour ce faire, l’association porte plusieurs dispositifs pour un accompagnement à 360 degrés. Parmi eux, CitésLab est un dispositif national déployé dans près de 800 quartiers. A Limoges, il s'adresse spécifiquement aux habitants des 9 quartiers prioritaires de la ville. Soutenu en Nouvelle-Aquitaine par le dispositif "Entreprendre, la Région à vos côtés",l est parti du constat que dans ces zones urbaines, les envies de création existent, mais qu’elles se heurtent à un certain nombre de freins périphériques : difficultés de maîtrise de la langue française, défiance vis-à-vis des démarches administratives, carence en informations sur les démarches… Difficile dans ces conditions d’oser se lancer ou d’assurer la pérennité d’un projet. Pour Aymeric Chassin, chargé de projet CitésLab, la première étape de la démarche est la phase de détection. Elle consiste à partir à la rencontre des habitants pour leur présenter le dispositif et leur proposer des rendez-vous d'accompagnement. Autant de publics qui ne vont pas naturellement pousser d’eux-mêmes la porte d’un acteur de l’accompagnement. « On leur explique qui on est, on leur pose des questions, pour savoir s’ils ont un jour envisagé d'entreprendre. Parfois je rencontre des personnes qui le veulent, mais qui ne savent pas forcément dans quoi elles souhaitent entreprendre, ni comment. L'idée c'est de leur fournir toutes les ressources et informations nécessaires pour qu’elles puissent avancer sereinement dans leur projet. On parle de projet de vie, pas forcément de création d’entreprise. L’essentiel étant que la personne soit en phase avec le projet qu'elle souhaite mener à l'instant T, que ce soit créer une activité, prendre un emploi, partir en formation… » Le pari de l'entrepreneuriat Cette phase de prospection est complétée par des actions de sensibilisation, des ateliers d’éveil à l'entrepreneuriat où sont abordés les grandes étapes, les freins, les motivations. Et des questions plus transverses sur l’utilisation des outils numériques et des réseaux sociaux. L'accompagnement en tant que tel se fait au long cours. « J’ai la chance de ne pas être astreint à un volume horaire précis. La durée de l’accompagnement, de 5 à 10 heures réparties sur plusieurs mois, dépend de la maturité du projet, de ce qu’on perçoit de la personne, de ce qu’elle veut faire après. Une autre partie de ma mission consiste à orienter les personnes vers les acteurs et financeurs qui pourront l'aider. L’idée, c'est vraiment d'être au centre de l'écosystème, d'avoir une vision globale sur celui-ciet de pouvoir le mettre à disposition du porteur au bénéfice de son projet. » Certains publics vont envisager la création d'entreprise parce qu’ils se trouvent à un moment de leur parcours professionnel où ils manquent de perspectives. C’est dans ces moments qu’un projet de création peut émerger, sans forcément qu’ils aient l'âme d'un entrepreneur. « J’ai un rôle à jouer sur ce qu'on appelle l'amorçage du projet. Mais aussi dans le « désamorçage ». Il faut pouvoir dire à tout porteur de projet que ce qu’il veut faire, compte tenu de sa situation, n'est peut-être pas forcément la meilleure option et que d’autres solutions peuvent être envisagées, comme une entrée en formation, ou le retour à l'emploi. » Il peut aussi exister des inadéquations franches entre le porteur et son projet. Par exemple une personne qui veut ouvrir un restaurant mais n’a jamais cuisiné. « Notre travail, et celui des acteurs de l'accompagnement, c'est de lui faire comprendre, en douceur, qu’il ne suffit pas de voir un chef étoilé à la télévision pour envisager de monter un restaurant. On lui dit que ce serait bien de se former, de passer par une PMSMP. Cuisiner chez soi, c’est différent que de se projeter sur une activité professionnelle qui doit être rentable. » Le cœur de métier de CitésLab est d’expliquer aux porteurs de projets que BGE Limousin Poitou Charentes n’est pas là pour faire à leur place, mais pour faire avec eux. Le rôle de l’accompagnateur est de les mettre sur les bons rails, leur présenter les démarches à réaliser, identifier leurs besoins. A eux de contacter tous les acteurs autour de leur projet, d’acquérir un début de posture entrepreneuriale, de se poser les bonnes questions, de raisonner pragmatiquement. D'abord répondre aux besoins Beaucoup d’entre eux veulent que les choses aillent vite. Il est parfois difficile de mettre en place une démarche de structuration approfondie avec des personnes qui ont des besoins économiques urgents. Avec un public aussi volatil, l’accompagnement peut ne peut pas dépasser quelques mois. Dans tous les cas, CitésLab existe pour déclencher une prise de conscience. Son défi principal, comme celui de tous les accompagnants, c’est de répondre de manière complète et efficace aux attentes de ce public, en un laps de temps assez réduit. « Au départ c’est une chose qui m’a un peu désarçonné. Je voyais des gens avec un bon profil, et les accompagnements n’allaient pas au bout. En échangeant avec d’autres intervenants, je découvrais qu’ils ne comprenaient pas forcément que monter un projet demande du temps, alors qu’ils avaient des impératifs immédiats. » « Souvent, nos publics ont du mal à saisir qu’il ne suffit pas d’aller à l’Urssaf et créer une entreprise pour qu’elle génère du chiffre d’affaires. La phase de préparation et de réflexion n’est pas une évidence pour eux, alors qu’ils possèdent le savoir-faire. Ils ont aussi beaucoup d’idées reçues sur la posture, l’image du patron. Ils veulent créer pour ne plus avoir de chef, gagner de l’argent, trouver un équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle. Et ils s’illusionnent parfois sur les aides disponibles. Pour moi, un projet doit pouvoir être créé et se pérenniser sans aide extérieure. S’il est conditionné au fait de recevoir sur des aides, c’est que le modèle économique est à revoir. » En complément, BGE Limousin Poitou Charentes s'est vu confier l'organisation du concours régional « Talents des cités », soutenu par la Région Nouvelle-Aquitaine, initié par le ministère chargé de la Ville et Bpifrance. Ce concours offre un coup de projecteur aux acteurs de l’accompagnement, et valorise le parcours des porteurs de projet et entrepreneurs en QPV. 18 candidats sélectionnéssur 25 dossiers présents en 2022) se présentent dans 2 catégories. « Emergence » pour ceux qui sont dans la phase de création, « Création » pour ceux qui ont lancé leur activité depuis moins de 3 ans. Ces deux catégories englobent une grande diversité d’approches. Le jury nomme également 3 coups de cœur, pour récompenser des projets très qualitatifs qui méritent d’être encouragés. L’intérêt pour les candidats, outre un coup de pouce financier pour les lauréats, est de se faire connaître, de créer un effet d’entrainement et développer leur réseau.
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