Jean-Michel Lattes, président de Tisséo Collectivités, Jean-Michel Evin, l’ancien DGS de Tisséo, ainsi que plusieurs responsables seront jugés pour prise illégale d’intérêt et favoritisme.
En cause : un marché public confié sans appel d’offres à la société Algoé.
Le budget est passé de 150 000 € à 4,30 M€. Une audience est prévue au printemps.
Tisséo et son ancien directeur général des services (DGS) ont-ils favorisé une société chargée de mener des études à propos de la ligne C du métro de Toulouse ?
"Quatre entreprises et autant de personnes seront jugées pour prise illégale d’intérêt, recel de prise illégale d’intérêt et favoritisme", précise le procureur de la République.
D’après nos informations, les prévenus sont notamment Jean-Michel Evin, l’ancien DGS de Tisséo, son fils, mais aussi Jean-Michel Lattes, le président de Tisséo Collectivités, et un responsable de la société Algoé, basée à Lyon.
Un second appel d’offres oublié…
Les faits se seraient déroulés entre 2012 et 2018. Ils ont été mis en lumière par un rapport de la Chambre régionale des comptes.
A l'époque, Tisséo a lancé un appel d'offres d'assistance de maîtrise d'ouvrage remporté par Algoé, une société de conseil.
Cette structure, chargée de mener des études et d'accompagner les décisions stratégiques liées à la mobilité, a obtenu ce marché légalement pour un budget estimé à 150 000 € par an.
La bascule s'effectue autour de l'année 2015. A cette période, Tisséo s'est aperçu que la mission initiale, confiée à Algoé, devait évoluer puisqu'elle n'était plus adaptée aux nouvelles normes.
Jean-Michel Evin aurait dû lancer un nouvel appel d'offres mais ne l'a pas fait. Il a demandé à Algoé de réaliser de nouvelles études sans faire jouer la concurrence.
Pour gagner du temps ou favoriser des amis ? Cette interrogation est au cœur de l'affaire.
Un budget 13 fois supérieur aux prédictions
A partir de cette date et jusqu'à 2018, plusieurs irrégularités seraient apparues. Les prestations se sont multipliées de manière exponentielle.
"66 bons de commande ont été conclus avec des objets parfois éloignés des opérations et projets décrits dans le marché", note la Chambre régionale des comptes.
Le budget s'est également envolé. Il a atteint, en trente-trois mois à peine, 4,32 M€.
"La somme prévue pour leur mission a été multipliée par 13", prévient la juridiction financière.
Autre particularité : au moment où Algoé a été désigné sans appel d'offres pour le marché, le patron de cette entreprise a accepté d'embaucher le fils de Jean-Michel Evin (Originaire de Lyon, il y aurait d'abord effectué un stage avant d'être définitivement recruté).
Algoé a-t-il accepté cet emploi en contrepartie du marché lucratif ?
L'enquête menée par la division financière de la police judiciaire semble le démontrer. Jean-Michel Lattes a été mis en garde à vue en raison de sa signature sur certains documents.
Son rôle semble minime : lorsqu'il a constaté les irrégularités, l'élu a lui-même fait un signalement au procureur, ce qui a entraîné l'enquête.
Défendu par Me Jacques Levy, l'homme politique aurait expliqué avoir été trahi par l'ancien DGS, finalement parti de Tisséo en 2018.
Les juges du tribunal correctionnel de Toulouse devront déterminer les responsabilités de chacun, lors de l'audience fixée au 13 mai 2025.
Contacté, Jean-Michel Lattes n'a pas souhaité s'exprimer.
Rémi Buhagiar
Publié le 01/02/2025
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