Revue de presse théâtre
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LE SEUL BLOG THÉÂTRAL DANS LEQUEL L'AUTEUR N'A PAS ÉCRIT UNE SEULE LIGNE  :   L'actualité théâtrale, une sélection de critiques et d'articles parus dans la presse et les blogs. Théâtre, danse, cirque et rue aussi, politique culturelle, les nouvelles : décès, nominations, grèves et mouvements sociaux, polémiques, chantiers, ouvertures, créations et portraits d'artistes. Mis à jour quotidiennement.
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July 17, 2017 10:38 AM
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Béatrice Hanin nommée directrice du Théâtre, scène nationale de Saint-Nazaire

Béatrice Hanin nommée directrice du Théâtre, scène nationale de Saint-Nazaire | Revue de presse théâtre | Scoop.it
C'est donc une femme qui succède à Nadine Varoutsikos-Pérez.

Le jury réuni le 5 juillet a unanimement opté pour la candidature de Béatrice Hanin, qui dirigeait le Rive Gauche, scène conventionnée pour la danse de Saint-Étienne-du-Rouvray près de Rouen, depuis 2012. Elle a auparavant été responsable des services éducatifs du musée des Beaux-arts et du musée de l’École de Nancy, et dirigé l’Atheneum, centre culturel de l’université de Bourgogne à Dijon.

D'après la DRAC, Béatrice Hanin "veut faire du théâtre un lieu de vie artistique largement ouvert, ancré dans la ville et son territoire, aux côtés des autres acteurs culturels. Considérant l’action culturelle comme un élément constitutif de son projet, elle veut multiplier les temps et les modes de rencontre entre les artistes et les habitants, notamment à travers une programmation hors les murs et des formes participatives."
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June 27, 2017 6:33 PM
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Aurélie Dupont : « Pina Bausch m’a sauvée »

Aurélie Dupont : « Pina Bausch m’a sauvée » | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Propos recueillis par Pascale Krémer dans Le Monde



La danseuse étoile, directrice de la danse à l’Opéra de Paris depuis août 2016, sera l’une des invitées du Monde Festival, du 22 au 25 septembre.


La Matinale du « Monde » a rencontré la danseuse étoile, devenue directrice de la danse à l’Opéra de Paris en août 2016. Elle sera l’une des invitées du Monde Festival, qui se tiendra du 22 au 25 septembre.

Je ne serais pas arrivée là si…

… Si Liane Daydé ne m’avait pas dit que j’étais douée. Elle donnait des cours de danse Salle Pleyel, à Paris, après avoir été étoile à l’Opéra. J’avais 9 ans, j’étais à l’école primaire dans le 16e arrondissement. Ma professeure de gym m’avait vue faire des grands écarts faciaux, elle a suggéré que l’on me montre à une prof de danse.

Ma mère a eu l’intelligence de se renseigner auprès d’amies et de me présenter à Liane Daydé, qui était excellente. J’ai suivi un de ses cours. Je pensais qu’elle me trouverait catastrophique. Je n’avais jamais dansé, jamais vu de ballet. J’étais terrorisée, et davantage fascinée par le pianiste que par la danse. Mais, à la fin, elle a dit à ma mère qu’il fallait me présenter à l’Opéra de Paris. Ma vie a basculé.

Cette ancienne étoile vous a préparée au concours d’entrée à l’école de danse de l’Opéra ?

Elle m’a appris à danser pendant trois mois, enseigné les codes, le vocabulaire. Il fallait que je sache quoi faire si l’on me demandait un saut de chat ou un pas de bourrée ! Trois mois, c’est très peu. Mais, en même temps, cela ne sert à rien d’avoir de la technique pour entrer à l’école de danse. On vous l’apprend. Il faut juste un corps doué pour danser. J’ai tout appris à l’Opéra.

A quoi a ressemblé votre enfance avant que la danse ne vous accapare ?

Elle a été douce, assez protégée, privilégiée, à Paris. Mon père était professeur de médecine, ma mère infirmière, j’ai une grande sœur et une petite sœur. Mais j’étais affreusement timide, renfermée, solitaire. Je ne parlais pas. J’étais une enfant très particulière, je pense. Je me sentais différente et j’en souffrais. Je m’inventais des histoires, je dessinais, j’écoutais de la musique…

Vers 7 ans, j’ai vécu deux ans aux Etats-Unis avec ma famille, près de Washington. Une période fantastique. On avait une maison avec un jardin, j’avais beaucoup de liberté, je faisais du chant et des claquettes à l’école. J’ai découvert la comédie musicale, qui me fascinait. Et le piano, chez des amis de mes parents qui en avaient six. C’était ça que je voulais faire. Pianiste.

Qu’est-ce qui vous en a empêchée ?

Au retour en France, mes parents n’ont pas voulu que je prenne des cours. Ils ont peut-être pensé que c’était un caprice… Ma vocation a été contrariée. Mais j’aurais eu la vie solitaire du concertiste, je serais allée vers ce qui m’était naturel. En danse, on est entouré même si on décide seul de la masse de travail que l’on inflige à son corps. C’était sans doute mieux que la danse me choisisse.

La danse vous a choisie, et vous avez appris à l’aimer ?

Je n’ai pas eu la révélation pendant les trois mois de cours avec Liane Daydé. Mais c’était sympa de danser, on ne demandait pas à la timide que je suis de parler. Et il y avait le piano qui accompagnait…

Quel souvenir gardez-vous du concours d’entrée à l’école de danse ?

J’avais 9 ans et demi. Dans la cour, il y avait toutes ces petites filles avec des chignons qui attendaient la peur au ventre, leurs parents sur les côtés. Elles étaient parfaites. Moi je ne me sentais pas aussi parfaite. Je ne dansais pas depuis assez longtemps pour avoir la bonne façon de faire le chignon, la bonne tunique, les bons chaussons.

Ensuite, je me suis retrouvée en culotte et tee-shirt, on m’a pesée, regardé les bras, les pieds, le dos, demandé de toucher mes pieds, de tendre les jambes. On observait aussi la taille et le poids des parents, qui devaient être présents. Les enfants qui étaient choisis suivaient un cours de danse. Et les derniers retenus, un stage de trois mois.

Vous avez passé toutes les étapes et vous vous êtes coulée dans le moule ?

Je me suis sentie bien. J’aimais la musique, travailler, ne pas avoir à parler. Je me trouvais au milieu d’enfants comme moi, différents, et je ne ressentais plus ma différence. J’y ai noué des amitiés très fortes. C’est tellement dur, loin de sa famille, qu’on se sert les coudes…

Cela me plaisait de travailler sur mon corps. Cette maîtrise. Sentir les progrès. La danse, c’est dur au début, ça fait mal, il faut casser les pieds, se faire des ampoules pour avoir de la corne, intégrer tellement de techniques, d’informations… Mais, un jour, cela devient naturel, on danse comme on respire, et c’est bon !



En 2000, après avoir gagné le concours international de ballet de Varna (Bulgarie), vous avez dénoncé la « dureté » de l’école de danse…

Quand j’y étais, dans les années 1980, il y avait des mots très durs, des insultes, une méchanceté des adultes envers les enfants qui n’avait rien à voir avec la rigueur. J’imagine que certaines danseuses qui n’avaient pas fait de grandes carrières étaient jalouses des enfants très douées auxquelles elles apprenaient à danser.

J’ai beaucoup, beaucoup travaillé. Je suis perfectionniste. Depuis toute petite, je ne m’autorise pas la médiocrité, elle me fait souffrir. Surtout, avoir une technique forte me rendait inattaquable. J’échappais à la méchanceté.

Des Trois petits cochons, j’étais celui qui avait la maison en brique. Il fallait éviter le renvoi, chaque année. Ma sœur, qui était entrée deux ans après moi, a été renvoyée à 14 ans. Je l’ai mal vécu. A 16 ans, je suis entrée dans le corps de ballet. Je pense que je ne serais pas restée une année de plus à l’école.

De cette intégration au corps de ballet à votre nomination comme danseuse étoile, moins de dix années se sont écoulées. Vous étiez pressée de gravir les échelons ?

Il le fallait, sinon on ne montait pas sur scène à l’époque ! Il y avait un seul lieu, et moins de spectacles qu’aujourd’hui. En tant que quadrille, on était remplaçante des 32 cygnes du Lac des cygnes. Et moi, la dernière arrivée, je n’étais que neuvième remplaçante ! Je n’ai pas mis un pied sur scène pendant la première année, en 1989. En montant coryphée, au moins, on devenait nécessairement cygne.

Cela dit, c’est quand j’étais remplaçante de cygne, à 16 ans, que je me suis échappée pour voir l’un de mes premiers ballets contemporains, Le Sacre du printemps de Pina Bausch. En 1997, quand elle a été invitée par l’Opéra, j’étais la première dans le bureau de la directrice pour demander à passer les auditions.

Et Pina Bausch vous a retenue pour son ballet ?

Pina a choisi dix garçons et dix filles avec des personnalités très particulières, qui tous étaient un peu écorchés. Elle a soigné tout le monde, y compris moi. Elle m’a aidée à accepter d’être qui j’étais et à le montrer.

J’avais beaucoup travaillé jusque-là sans vraiment être dans le plaisir, sans vraiment me sentir artiste. J’avais une image de technicienne. Pina Bausch a vu ce qu’il y avait derrière le bouclier. Ma fragilité, c’était ça qui l’intéressait. Elle m’a sauvée. Révélée. A partir de ce moment, j’ai été moi et je me suis battue pour avoir les rôles que je voulais vraiment danser. Des rôles tragiques. J’adore raconter une histoire et mourir à la fin.

A 25 ans, le 31 décembre 1998, vous devenez étoile après avoir dansé « Don Quichotte ». Qu’est-ce que cela représente, après un tel travail ?

C’est une fin et un début. Je suis en haut de la hiérarchie. Soulagée. Mais, en même temps, tout commence. Il y a un stress chaque fois que je mets le pied sur scène parce que je suis devenue l’un des moteurs de la compagnie, que les gens viennent pour moi, que je leur ai coûté 150 euros…

Six mois après ma nomination, j’apprends que j’ai une fracture du cartilage du genou droit, derrière la rotule. C’est une blessure que je me suis sans doute faite en chutant sur les genoux dans Le Sacre du printemps… Un chirurgien me dit qu’il faut m’opérer mais qu’ensuite je ne pourrai plus danser. Alors je continue à danser en souffrant. Je tiens, je tiens jusqu’à ce que je n’en puisse plus. Et je me fais opérer.

Vous avez fait mentir le chirurgien ?

Pour ma rééducation, je lui ai demandé quelqu’un de dur. Je voulais y aller à fond, m’acharner sur quelque chose. Il m’a conseillé Bertrand Bonaime, un ex-rugbyman devenu kinésithérapeute. Lui m’a dit que j’allais redanser.

Je me suis remusclée à fond, pendant un peu plus d’un an, dans la douleur, sans trop y croire. Il ne connaissait pas la danse après tout. Quand je suis retournée danser, j’étais hypermusclée mais j’avais encore mal. J’ai dû arrêter et reprendre la rééducation. Le chirurgien m’a dit que, de toute façon, si je redansais, ça ne durerait pas plus de six mois.

Qu’est-ce que je pouvais faire d’autre comme métier ? Je ne trouvais rien. Alors j’ai réinventé ma danse. J’ai changé tous mes appuis. Je ne me suis plus servi de mon genou droit, mais de mes chevilles, de mes pieds, de ma hanche, de mes bras, de mon dos, de la musique, du rythme. Je faisais un mélange de tout ça. Je jouais avec les temps musicaux, c’est là que mon amour de la musique m’a aidée.

Mais tous les yeux étaient braqués sur vous, jeune étoile…

Personne ne s’est rendu compte que je ne me servais pas de l’articulation de mon genou opéré. Qui remarque le degré de flexion d’un genou ? Quand vous regardez un saut, vous regardez le résultat du saut, pas l’appel. Je m’en suis sortie comme ça.

Parfois, je galérais. J’ai même dû refuser des ballets très techniques, qui demandaient beaucoup de puissance dans les jambes. Et, chaque fois que je dansais, je me disais que c’était la dernière fois… Tout le monde savait que je souffrais, mais, un jour, j’ai cessé d’en parler. J’ai décidé que ça allait bien. Parler d’un handicap vous fait réaliser tous les jours que vous l’avez.

Est-ce que tous les danseurs de ce niveau vivent avec la douleur ?

Oui, chaque danseur a mal. Il y a les grosses, les petites douleurs, et les blessures aussi, surtout à partir de 30 ans, à cause de l’usure. Ceux qui font de grandes carrières sont les chanceux qui tiennent physiquement. Moi j’ai supporté la douleur parce que le plaisir était plus fort qu’elle.

Quel était ce plaisir de la danse ?

Etre libre. Etre quelqu’un d’autre à chaque fois, en scène. Raconter des histoires. J’aurais adoré avoir des mots en plus. Les mots étaient dans ma tête, et les virgules, et les points-virgules, et les points d’exclamation ! Ce que le danseur a dans la tête, les gens peuvent le lire. Si je préfère les ballets tragiques, comme Roméo et Juliette ou La Dame aux camélias, c’est parce que le théâtre est plus fort que la danse. Elle devient secondaire, décorative.

Il y a aussi le plaisir du studio, pendant ce mois et demi de répétitions quotidiennes où l’on construit tout, et la scène, qui est comme une psychanalyse. On peut tout essayer, tout assumer. C’est là où je me sentais le mieux, le temps était arrêté. Vous appuyez sur pause, vous dansez, à la fin vous rappuyez et la vie continue.

Un an après avoir pris votre retraite de danseuse, à 42 ans, vous êtes devenue directrice de la danse. Quel est votre objectif ?

Quand Benjamin Millepied a pris la décision d’arrêter, le directeur général m’a demandé de lui succéder. Benjamin a une énergie débordante. Il a donné un coup de frais à la compagnie, il a ouvert les fenêtres, redonné le goût du spectacle. Il a aussi changé tous les parquets et amélioré le suivi médical des danseurs. Mais il ne se sentait pas totalement à l’aise.

Moi, je suis un pur produit de l’Opéra. Je pense qu’il faut maintenir une certaine tradition tout en étant ouvert aux créations contemporaines. Je pense au plaisir des danseurs. J’ai envie qu’ils goûtent à un maximum de chorégraphies différentes, qu’ils se mettent en danger. Et surtout qu’ils dansent, sans avoir à attendre de remplacer un cygne.

Propos recueillis par Pascale Krémer

Aurélie Dupont dansera dans « Sleep », du chorégraphe Saburo Teshigawara, les 13, 14 et 15 juillet à New York, dans le cadre du Lincoln Center Festival 2017. Le Ballet de l’Opéra de Paris y dansera également « Emeraudes », de George Balanchine, du 20 au 23 juillet.

Le Ballet de l’Opéra présentera « Drumming Live », d’Anne Teresa de Keersmaeker, du 1er au 15 juillet (à l’Opéra Bastille) et « La Sylphide », de Pierre Lacotte (à l’opéra Garnier). Le 21 septembre, à l’Opéra Garnier, aura lieu le gala d’ouverture de la saison de danse 2017-2018.

Aurélie Dupont sera l’invitée du Monde Festival le samedi 23 septembre au Palais Garnier.  http://www.lemonde.fr/festival/article/2017/06/22/conversation-avec-aurelie-dupont-une-vie-a-l-opera_5149435_4415198.html



Retrouvez tous les entretiens de La Matinale ici : http://www.lemonde.fr/je-ne-serais-pas-arrive-la-si/

Propos recueillis par Pascale Krémer

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May 17, 2017 2:03 PM
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Françoise Nyssen, directrice d'Actes Sud : “Après un best-seller, il faut être encore plus attentif”

Françoise Nyssen, directrice d'Actes Sud : “Après un best-seller, il faut être encore plus attentif” | Revue de presse théâtre | Scoop.it


Propos recueillis Nathalie Crom dans Télérama


Mise à jour du 17 mai 2017 : Françoise Nyssen a été nommée ministre de la Culture du gouvernement Edouard Philippe. Nous l'avions rencontrée en 2015 pour parler de sa maison d'édition à Arles, de ses nombreuses librairies et de son école pour enfants différents...



Article de décembre 2015 :


Une maison d'édition à Arles qui a le vent en poupe après le Nobel de Svetlana Alexievitch et le Goncourt de Mathias Enard, de nombreuses librairies, une école pour enfants différents... Notre invitée de la semaine revient sur une aventure familiale et engagée. Un Nobel (Svetlana Alexievitch), un Goncourt (Boussole, le roman de Mathias Enard), à quoi s'ajoutent plusieurs gros succès de librairie, de Millénium 4 à l'inattendu Charme discret de l'intestin, de l'auteure allemande Giulia Enders... 2015 aura été une nouvelle année faste pour Actes Sud, la maison d'édition fondée il y a trente-sept ans par Hubert Nyssen (1925-2011), et que dirige aujourd'hui sa fille Françoise.


Ce jour de novembre, pourtant, ce n'est pas d'emblée de l'éclatante santé d'Actes Sud qu'elle a envie de parler. A la fin de l'été, à Arles où elle vit, et où se trouve le siège de l'entreprise, une école a ouvert ses portes. Un lieu destiné aux enfants « différents », à ceux qui « n'ont pas trouvé leur place dans le système éducatif traditionnel, terriblement axé sur l'évaluation et incapable de leur apporter des réponses, de leur donner confiance ». Antoine, le fils de Françoise Nyssen et Jean-Paul Capitani, était de ces gamins précoces, surdoués, passionnés, douloureux. En 2012, à 18 ans, il « a décidé d'arrêter de vivre », et c'est alors qu'est né le projet de cette école alternative. L'idée s'est concrétisée, l'établissement, baptisé le « Domaine du possible », accueille désormais une trentaine d'enfants, et c'est, tout simplement, « une joie immense, impressionnante ». Une réalisation de plus, mais assurément précieuse entre toutes, pour cette femme attentive et généreuse.
Comment concevez-vous le métier d'éditeur ?


Dans le contexte d'aujourd'hui, après les attentats de la mi-novembre, la raison pour laquelle on fait ce travail est plus que jamais une évidence. Il s'agit de poser des questions sur le monde tel qu'il fonctionne. Et, en même temps, d'apporter de la beauté, du plaisir. Offrir de la beauté, à travers un texte très littéraire, c'est aussi un geste politique, car elle nourrit, stimule, éveille les sens et donne de l'énergie, plus encore qu'un essai. Ce n'est pas un hasard si nous travaillons à la fois dans le domaine de la littérature et pour une collection telle que « Domaine du possible », qui publie notamment les ouvrages des essayistes Pierre Rabhi et Naomi Klein.
 
"L'amour de l'Orient, le respect de sa culture : Mathias Enard propose une autre vision de la situation"
 
Pour parler de son activité d'éditeur, mon père évoquait souvent la double notion de plaisir et de nécessité. Au moment où ces événements terribles se produisent, il me paraît plus important que jamais que le livre de Mathias Enard ait été ainsi éclairé et mis en avant par le prix Goncourt, car il propose une autre vision de la situation : l'amour de l'Orient, le respect de sa culture, une érudition bienheureuse, ainsi qu'une forme de lenteur qui va à rebours du rythme trop rapide sur lequel on vit les choses aujourd'hui.


Quel a été votre parcours ?


Quand mon père a créé Actes Sud, en 1978, c'est une aventure à laquelle je n'ai pas résisté. Pourtant, je suis plutôt une scientifique. Je ne sais pas si je dois l'avouer, mais je le suis devenue parce que je trouvais plus facile de faire des études de sciences que de lettres. Je manquais à ce point de confiance en moi que je me disais : je ne suis pas une bonne lectrice, je ne saurai pas réfléchir sur les textes, pas écrire. Les maths, ça semblait tellement plus facile. Il se trouve aussi que je voulais être médecin, car j'ai toujours aimé m'occuper des autres. Je pense avoir hérité cela de mon grand-père, qui était généraliste et médecin en milieu carcéral, à Anvers. Pourtant, lorsque j'ai eu mon bac, je n'ai pas osé m'engager dans des études de médecine, persuadée que je serais un mauvais praticien — c'est ce que je reproche à l'éducation traditionnelle : elle ne sait pas lutter contre ces failles énormes dans la confiance en soi, si fondamentale pour les enfants. Le second mari de ma mère étant un grand savant [le généticien René Thomas, NDLR], j'ai résolu de faire moi aussi de la recherche, ainsi je ne risquais pas de mal m'occuper des gens.
Mais comment vous êtes-vous retrouvée à travailler, dès 1979, dans la toute jeune maison d'édition de votre père ?


Quelques années plus tard, j'étais devenue chercheuse, j'habitais Bruxel­les, une ville ravagée par la promotion immobilière et les grandes démolitions, quand le démon de m'occuper des autres a ressurgi. Je me suis investie dans les comités de quartier, l'action sociale et éducative en direction des enfants défavorisés, et j'ai bientôt cessé de faire mon doctorat pour me tourner vers des études d'urbanisme. Quand j'ai dû m'installer à Paris, quelque temps plus tard, avec deux enfants en bas âge, j'ai pris un travail à la Direction de l'architecture, mais je ne me suis pas adaptée au mode de fonctionnement des Parisiens. Dans les pays du Nord, on commence à travailler tôt le matin, on finit assez tôt le soir, et on a donc le temps d'avoir une vie après. A Paris, il me semblait que le temps s'étalait, qu'on le gaspillait en laissant traîner les choses. C'était hors de ma culture.


C'est à ce moment que mon père a créé, avec sa compagne, sa maison d'édition à Arles. Je ne connaissais rien au métier, mais j'ai eu comme une illumination et je lui ai proposé de le rejoindre. Il m'a dit oui. Pour la première fois, quelqu'un me faisait confiance, à moi qui en avais si peu. Mon père avait son caractère, il n'était pas toujours facile. Notre relation était empreinte d'une grande réserve, je ne l'ai jamais appelé papa en public. Mais il avait cette qualité précieuse, faire confiance aux autres, qu'il m'a transmise. C'était aussi quelqu'un de très engagé dans ce qu'il faisait, et un bosseur hallucinant. Il me semble que je ne l'ai jamais vu prendre de vacances.

Quel était votre moteur profond, en vous engageant ainsi dans l'édition ?


La lecture. Toutes mes vacances de ­petite fille, je les ai passées chez mon père. Lorsque j'arrivais chez lui, à ma demande il avait préparé une liste d'ouvrages qu'il me proposait de lire. La lecture était déjà pour moi plus qu'un passe-temps : ma nourriture favorite. Je me revois très bien, enfant, calculant combien il me manquait d'argent de poche pour pouvoir acheter un nouveau volume du Club des Cinq...
 
"Diriger une entreprise est un drôle de métier. J'organise, j'encadre, je dis souvent que je suis celle qui ourle."
 
Etes-vous, comme l'était votre père, un bourreau de travail ?
Je me vois plutôt comme quelqu'un de paresseux. Si je n'arrête pas de travailler, c'est pour que tout ce que j'ai à faire soit le plus vite possible derrière moi. J'adorerais avoir des moments de pause. Mes enfants me reprochent certainement d'avoir consacré trop de temps à mon travail, comme moi, je l'ai reproché jadis à mon père. En fait, au quotidien, le travail et la vie ont toujours été joyeusement mêlés. Mon mari et moi nous sommes rencontrés à travers le projet d'ouverture d'une librairie à Arles. Il est entré chez Actes Sud dès 1982. Aujourd'hui, nous nous occupons ensemble de l'organisation et de la programmation de concerts, de lectures et d'expositions du Méjan, le centre culturel que nous avons créé autour de la maison d'édition à Arles. Et, bien sûr, de la nouvelle école. J'ai plutôt tendance à me dire que je ne travaille pas assez. Diriger une entreprise est un drôle de métier. J'organise, j'encadre, je dis souvent que je suis celle qui ourle. Régulièrement, à la fin de la journée, quand tout le monde est parti, je me dis : Ah ! ça y est, je vais me mettre à la tâche !

Vous écoutant, on vous sent guidée par une éthique, un sentiment de responsabilité...


C'est fondamental. J'ai la chance d'avoir eu une belle éducation, auprès de parents et de beaux-parents eux-mêmes très engagés et responsables. Ma mère était kinésithérapeute, elle a passé sa vie à accompagner les femmes qui accouchaient et a même introduit en Belgique la sophrologie dans le cadre de l'accouchement sans douleur. J'ai une grand-mère maternelle suédoise qui, en 1914, à 20 ans, a quitté son pays, qui était neutre dans le conflit, pour venir à Rouen soigner les soldats français. Ma famille et mon éducation m'ont appris à être responsable et libre, à ne compter que sur moi pour trouver un accomplissement.


Qu'est-ce qui a guidé l'histoire de la maison, le développement de l'entreprise ?


Très sincèrement, lorsque nous avons lancé la maison, on ne se projetait pas. Et c'est pareil maintenant. Nous n'avons pas d'autre projet en ligne de mire que trouver de bons auteurs et les accompagner dans le temps. Ce qui nous importe, c'est ce que l'on fait. Et la façon dont on le fait. Au centre, il y a l'éditorial. Autour, une vraie entreprise, qui doit fonctionner et, pour cela, être organisée et gérée. Bien gérée. Sans jamais négliger l'attention nécessaire portée à toute l'équipe (1) — comme mon père, je fonctionne à la confiance.


L'histoire d'Actes Sud, c'est une aventure collective : mon père et sa compagne, le directeur littéraire Bertrand Py qui est arrivé dès 1980 et Jean-Paul, mon mari, et tous ceux avec qui nous travaillons. C'est tous ensemble que nous avons fait les choses. Il y a eu de grands moments, de grandes joies. Je pourrais en citer tellement : la rencontre avec Nina Berberova (1901-1993) au milieu des années 1980, le jour où on a décidé de reprendre les éditions Sindbad ­dédiées à la littérature arabe, la première fois qu'on a eu le Goncourt, en 2004, pour le livre de Laurent Gaudé et la visibilité nouvelle que la maison a acquise alors... Mais il y en a tant, je n'ai pas envie de choisir parmi eux.


Vous auriez pu décider de demeurer une maison d'édition de taille modeste, plutôt que de devenir un groupe...
Jamais nous ne nous sommes assis autour d'une table en nous demandant : qu'est-ce qu'on pourrait développer l'année prochaine ? Quelle cible pourrait-on viser ? Ce furent toujours des rencontres, nées d'une volonté d'être présent à l'autre, attentif à ce qui s'offre. Un jour Madeleine Thoby nous a proposé de développer un secteur de livres jeunesse, et on s'est lancés. Michel Parfenov, aujourd'hui l'éditeur de Svetlana Alexievitch, avait auparavant une maison d'édition, ­Solin, qui ne s'en sortait plus, et il nous a demandé si nous étions partants pour l'accompagner. Et les choses se sont passées de la même façon pour le secteur théâtre, le poche avec la collection Babel...
L'année où Flammarion a été en vente, si nous nous sommes portés candidats au rachat, en association avec Albin Michel, c'est parce qu'il nous semblait qu'il y avait une logique, Flammarion étant notre distributeur. Ce n'était pas une décision de grossir, mais une occasion se présentait. C'est aussi comme cela que s'est faite la reprise des éditions Jacqueline Chambon, de Payot-Rivages, ou des neuf librairies, comme Maupetit, à Marseille, ou L'Arbre à lettres-Bastille, à Paris. Nous sommes rarement ­allés chercher, on est plutôt venu nous trouver.
 
"Publier un livre parce que c'est tendance, parce qu'on pense que ça va marcher, ça ne nous intéresse pas."
 
Résultat : vous êtes un groupe... Avez-vous le sentiment d'occuper une place singulière dans le paysage éditorial français ?
Je ne sais pas, je ne crois pas. J'ai toujours refusé d'opposer les grosses maisons d'édition aux petites, les provinciaux et les Parisiens. Il y a des bons éditeurs et des passionnés de livres partout. Certes, nous sommes nés à Arles, et si nous avons des locaux à Paris, notre siège et une bonne partie de l'équipe sont toujours dans le Sud. Mais l'édition n'est pas un concept géographique. Par ailleurs, j'aimerais que notre philosophie ne soit pas alternative, mais générale. Publier un livre parce que c'est tendance, parce qu'on pense que ça va marcher, ça ne nous intéresse pas. On publie un livre parce que ça a du sens, on s'attache à un auteur parce qu'on croit en lui.
Comment expliquez-vous cette année exceptionnelle, qui n'est pas la première ?
Notre catalogue est le fruit d'un travail réfléchi. Le parcours de Mathias Enard est typique et exemplaire : en 2008, lorsqu'il a publié Zone, déjà on pouvait mesurer l'étendue de son talent, et se mettre à attendre ce grand livre qu'est Boussole. Plus vous publiez des auteurs qui ont ce talent-là, plus d'autres écrivains viennent vers vous. Notre catalogue attire, et ce mouvement s'amplifie. Après, il s'agit de continuer à être attentifs à nos auteurs, à faire en sorte qu'ils se sentent soutenus, accompagnés, valorisés.
Cela dit, des années exceptionnelles comme celle-ci peuvent être dangereuses. Après un best-seller, on peut plonger. Il faut être encore plus attentif à bien gérer, à ne pas se laisser griser, ne pas s'éloigner de la nécessaire frugalité. Surtout, le navire doit pouvoir continuer à avancer sans compter sur des succès de vente exceptionnels. Ce qu'on a gagné doit être réinvesti dans la maison pour financer des développements qui aient un sens. Les succès importants que nous avons connus depuis le milieu des années 2000, à commencer par le prix Goncourt de Laurent Gaudé, nous ont permis de consolider les fonds propres de l'entreprise, de la désendetter, de retrouver la pleine maîtrise du capital en faisant sortir les partenaires financiers des débuts. Nous sommes aujourd'hui trois à posséder le capital, Bertrand Py, mon mari et moi.
Vous avez 65 ans, comment voyez-vous l'avenir de la maison, sa pérennité ?
Nous jouons de chance. Nous avons toujours poussé nos enfants — sept à nous deux, Jean-Paul et moi — à suivre leur propre voie, et c'est ce qu'ils ont tous fait. Or il se trouve que trois d'entre eux, trois filles, vers l'âge de 30 ans, sont revenues vers la maison avec le désir d'y trouver leur place. Elles travaillent donc désormais dans l'entreprise, et la pérennité capitalistique de la maison est ­assurée. Nous les avons tous élevés dans l'idée que le fait d'être nos enfants leur donne non pas des droits mais des responsabilités et des devoirs. C'est pour cela que je n'aime pas trop le mot héritier, et ce qu'il sous-tend. Je ne me suis jamais considérée comme une héritière, et mes enfants ne le sont pas non plus. A leur tour, mes filles ­seront, et sont déjà, au service de ce projet initié par mon père, en accord avec l'idée qu'il se faisait du métier d'éditeur : placer l'éditorial au centre, s'attacher au contenu des livres, prêter attention à tous ceux dont on a la responsabilité, les auteurs comme l'équipe. Et veiller à conserver le plaisir de le faire.



Françoise Nyssen en quelques dates


1951 Naissance à Etterbeek, en Belgique.


1979 Françoise Nyssen rejoint la maison d'édition fondée un an plus tôt par son père.


1985 Entrée de Nina Berberova au catalogue (L'Accompagnatrice).


2004 Laurent Gaudé reçoit le prix Goncourt pour Le Soleil des Scorta.


2012 Jérôme Ferrari, auteur du Sermon sur la chute de Rome, reçoit à son tour le Goncourt.



(1) Actes Sud emploie deux cent vingt personnes, trois cents si l'on inclut les effectifs des éditeurs associés (Jacqueline Chambon, Le Rouergue, Payot-Rivages, LLL...) et ceux des neuf librairies que possède la maison d'édition.

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April 27, 2017 3:53 AM
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Barbara Engelhardt, nouvelle directrice du Maillon à Strasbourg

Barbara Engelhardt, nouvelle directrice du Maillon à Strasbourg | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Par Stéphane Capron dans Sceneweb


Michel Reinhardt, président du Maillon a présenté ce matin lors d’une conférence la nouvelle directrice du Maillon. Il s’agit de Barbara Engelhardt. « Un choix mûri enthousiaste et réfléchi » a déclaré Alain Fontanel, le 1er adjoint au maire de Strasbourg.

Barbara Engelhardt n’est pas une inconnue dans l’est et à Strasbourg. Elle était responsable artistique du festival Premières à Strasbourg et Karlsruhe, consacré aux jeunes metteurs en scène européens, programmé depuis sa création en 2005 par Le Maillon et le Théâtre National de Strasbourg.

Elle est également directrice du festival européen Fast Forward à Braunschweig (Allemagne), fondé en 2010. De 2004 à 2012, elle a conçu, avec Patrick Sommier, la programmation du festival. Le Standard idéal à la MC93 de Bobigny. Tout en présentant en France et en Allemagne un grand nombre de metteurs en scène venus de divers horizons, ces festivals lui permettent également de suivre
au plus près le travail de certains artistes. Elle collabore étroitement avec le metteur en scène David Marton à l’Opéra de Lyon.

Avant de s’installer en France, elle a été rédactrice en chef de la revue Theater der Zeit – Politik und Theater à Berlin. Auteur et éditrice de nombreuses publications sur le théâtre, elle a dirigé entre autres, de 1999 à 2011, la collection Scène, anthologie de textes dramatiques français traduits en allemand.

Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr

Mots-clés : Barbara Engelhardt, nomination

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April 10, 2017 6:57 PM
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« SAMO », hommage à Basquiat

« SAMO », hommage à Basquiat | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Par Rosita Boisseau dans M le magazine du Monde


La metteuse en scène Laëtitia Guédon retrace la jeunesse du peintre américain, dans les rues de Soho, à travers la danse, la musique et le jeu.


S’attaquer à la vie et à l’œuvre de Jean-Michel Basquiat (1960-1988) exige une jolie dose de témérité. Ou beaucoup de passion. Ou les deux à la fois. C’est le cas de la metteuse en scène Laëtitia Guédon qui signe avec SAMO un hommage tout personnel au peintre et graffeur qui mit le feu aux murs des rues de New York dès son adolescence.

« Parce que je le considère comme un artiste majeur du XXe siècle, mais aussi parce qu’il me renvoie directement à mon histoire, à mon enfance au début des années 1980, à Aubervilliers, dans la cité de la Maladrerie, où l’art s’activait partout et tout le temps, explique Laëtitia Guédon. Je voyais mon père peindre les murs de la cité. Les rues de New York étaient bien loin de celles de la banlieue parisienne, mais elles avaient pourtant en ­commun une certaine idée de la liberté. »

Nommée directrice de la salle Les Plateaux Sauvages, à Paris, Laëtitia Guédon revient à Aubervilliers, de temps en temps, pour intervenir en milieu scolaire dans le cadre des activités menées par le Théâtre de la Commune. Elle rembobine sa vie et retrouve certaines fres­ques murales, croisées dans sa jeunesse, intactes. « J’ai choisi de m’intéresser à la trace qu’on laisse pour se raconter et raconter le monde, explique-t-elle. J’ai décidé de traiter une période moins connue de la vie de Basquiat, celle de sa jeunesse, de la rue. Dans les années 1980, il sort à peine du lycée, fugue de chez ses parents et part à la conquête des rues de Soho. A cette époque, il signe SAMO [pour  “Same Old Shit”] des messages lapidaires, poétiques et politiques, et se crée une identité d’artiste. »

Un danseur, un acteur, un musicien

Pour plonger dans les couches de cette vie à l’arrache, Laëtitia Guédon fait équipe avec l’écrivain Koffi Kwahulé et le vidéaste Benoît Lahoz. Elle déploie l’histoire de Basquiat entre trois interprètes, le danseur Willy Pierre-Joseph, l’acteur Yohann Pisiou et le musicien- slameur-beat boxer Blade MC Alimbaye.

« Je voulais travailler différemment une œuvre théâtrale, proposer un projet à la frontière d’un travail performatif, explique-t-elle. Nous sommes partis tous ensemble en résidence à la Chartreuse, à Villeneuve-lès-Avignon, pour écrire. Chacun a brassé des vidéos, des interviews, regardé des tableaux, des films sur le peintre et les années 1980. Et puis nous avons dû aussi nous interroger sur notre propre histoire. Nous sommes tous français, mais profondément nourris d’un métissage culturel. Basquiat fut sans cesse renvoyé à sa condition d’homme noir avant son engagement poétique. »

En pistant le jeune peintre, Laëtitia Guédon et son équipe s’aperçoivent qu’il fréquentait des boîtes de nuit, comme le Mudd Club. « Il enflammait les pistes de danse, mais à la suite d’un accident, il était blessé physiquement et psychiquement, poursuit-elle. C’est autour de ces axes que nous avons travaillé avec Willy Pierre-Joseph. C’est un double de Basquiat qui transcende et fait écho à la parole. » Avec ce spectacle, soufflé par la musique de Nicolas Baudino et Blade MC Alimbaye, au croisement du hip-hop et du jazz de Charlie Parker, Laëtitia Guédon ouvre aussi les bras aux habitants d’Aubervilliers. Certains formeront un « chœur urbain » autour de ce héros tragique qui introduira le spectacle.

SAMO, de Laëtitia Guédon. Jusqu’au 14 avril à La Loge, Paris 11e ; le 21 avril au Théâtre Victor-Hugo, à Bagneux (Hauts-de-Seine) ; le 27 avril au Quai des Arts, à Argentan (Orne).

Rosita Boisseau
Journaliste au Monde

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March 23, 2017 8:36 PM
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Maud Le Pladec, fraîche touch

Maud Le Pladec, fraîche touch | Revue de presse théâtre | Scoop.it

 
Par Ève Beauvallet envoyée spéciale à Lyon, pour Libération Next



Arrivée en janvier à la tête du Centre chorégraphique d’Orléans, la plus mélomane des jeunes chorégraphes françaises enchaîne les collaborations et signe «Moto-Cross», autofiction entre dancefloor, politique et pots d’échappement.

Nous sommes dans un futur proche plus ou moins utopique. Disons en 2030. Les adeptes du clubbing seraient devenus incollables sur les enjeux de la danse contemporaine. Les systèmes économiques de la musique et du milieu chorégraphique se seraient ajustés, permettant la prolifération de formes hybrides fantaisistes et le croisement de publics qui se regardaient auparavant en chiens de faïence. En extrapolant un peu, c’est sans doute le genre de tableaux qui s’esquisserait si l’on opérait une coupe dans le cortex préfrontal de l’hyperactive et volubile Maud Le Pladec, alors qu’elle détaille devant nous quelques-uns de ses projets pour le Centre chorégraphique national d’Orléans - dont elle a pris la direction en janvier, entre deux collaborations de prestige (un opéra avec le metteur en scène Thomas Jolly par-ci, un autre avec Guy Cassiers par-là). «Nous discutons beaucoup avec l’Astrolabe, la scène des musiques actuelles d’Orléans, se réjouit-elle. Nous sommes entre autres en train de réfléchir à des sortes de battles DJ/danseur, avec Rival Consoles [projet du compositeur britannique Ryan Lee West, ndlr], par exemple, avec qui nous sommes en contact.»

Eclectisme
En soi rien d’étonnant à vouloir flirter avec la scène musicale locale : elle est plutôt fertile en terres orléanaises et l’institution cousine, le Centre dramatique national d’Orléans, vient elle aussi d’accueillir à sa tête une nouvelle directrice quadragénaire, Séverine Chavrier, adepte de théâtre musical remasterisé. Le cadeau Bonux, c’est que Maud Le Pladec est une des chorégraphes contemporaines les plus mélomanes de sa génération, une goulue d’analyse musicale qu’on sent archi-partante pour disserter des heures, sous nos yeux hagards, sur la façon dont les compositeurs phares de la musique spectrale et postsérielle ont accueilli dans leur style le son «sale» du rock et l’énergie du low art… tout en s’assurant régulièrement que la communication passe toujours bien. «Vous m’arrêtez si jamais je dévie, hein ?» Pas du genre chargée de TD universitaire, donc. Pas non plus sur-décontractée, du genre à taper dans le dos de Steve Reich tout en sifflotant Lio. Maud Le Pladec s’affirme davantage comme une curieuse appliquée, rigoureuse, qui prononce des mots comme «psychoacoustique», «dimension physique de la musique». Surtout une amoureuse éperdue d’éclectisme, dont on sent le cœur fondre comme un sucre lorsqu’on lui fait lister ces musiques cheesy qu’elle dit avoir «un peu honte d’aimer» mais qu’elle balance tout de même façon manifeste ou portrait chinois sur le plateau de Moto-Cross, autofiction chorégraphique en forme de juke-box générationnel : Sébastien Tellier sera donc ravi d’être cité dans la même phrase que Confidences pour confidences.

Il existe des explications plus ou moins rationnelles à tant de passion, qui nous poussent à rappeler deux éléments biographiques qui constituent pour une part le sous-texte de Moto-Cross, dernière pièce au compteur (et premier solo) créée aux Subsistances de Lyon. Le premier, c’est qu’à 20 ans, en 1996, Maud Le Pladec partage la vie d’un DJ avec lequel elle découvre la French Touch naissante. Le second est plus fondateur et touche à cette enfance passée avec un père breton DJ amateur, passionné de courses de moto-cross : «Il avait une disco-mobile, achetait ses disques chez Emmaüs… Il n’y connaissait rien mais il adorait ça, sourit-elle. Dans des soirées, il mixait la Compagnie Créole et Lil’ Louis, un DJ underground de Chicago auteur d’un tube, French Kiss, dans lequel on entend un orgasme mixé dans une boucle techno. A 12 ans, j’ai découvert ça et ça a été un flash musical et érotique puissant.»

Podium
Entre-temps, Maud Le Pladec est devenue danseuse (pour Loïc Touzé ou Boris Charmatz) et chorégraphe. Dans ses pièces, elle explore un type de relation chaque fois singulière entre corps et sons (avec musique live souvent interprétée par l’ensemble Ictus). Relation analogique dans Professor (2010), magistral travail de «mickey-mousing» sur la musique du compositeur Fausto Romitelli : «L’idée était de traduire physiquement tout ce qu’on entendait» - avec pour résultat une minutieuse partition de postures expressionnistes à la Murnau et d’actions stylisées façon Tex Avery. Rythme et contrepoint avec Poetry (2011) ou pouvoir subversif du son dans Democracy (2013).

Moto-Cross est un projet «à part», précise-t-elle, une étude subjective de la musique pop dans laquelle les principes de mix, de sample, sont utilisés comme métaphore de la construction identitaire et du récit de soi. Postée sur un podium de dancefloor, la chorégraphe superpose une myriade d’éléments biographiques plus ou moins fantasmés : les musiques actuelles que son père, aujourd’hui disparu, aurait pu mixer, les dernières danses hip-hop sur lesquelles, enfant, elle aurait adoré danser, le dessin d’elle en tutu peint sur le camion C35 familial… Ainsi qu’un souvenir traumatique, pris comme point nodal du projet : «Ma première télé-réalité, ça a été l’agonie, sous les caméras du monde entier, d’Omayra Sánchez en 1985, cette petite Colombienne qui avait mon âge, coincée dans la boue, victime d’une catastrophe écologique autant qu’économique. Sa mort a ouvert une époque d’hypermédiatisation et d’hypermondialisation. J’ai l’impression rétrospective qu’elle s’adressait à moi à travers l’écran pour me dire, de manière prophétique : "Ce n’est que le début, les temps à venir, ça va être sale."»

Ève Beauvallet envoyée spéciale à Lyon
Moto-cross chor. Maud Le Pladec La Briqueterie Vitry-sur-Seine (94). Les 30 et 31 mars. Et «Concrete», le 24 mai à la Maison de la culture de Bourges (18). «Grensgeval (Borderline)», d’après Elfriede Jelinek, m.s. Guy Cassiers et Maud Le Pladec, du 18 au 24 juillet au Festival d’Avignon (84).


«Moto-Cross» a été créé aux Subsistances de Lyon. Photo Eric Soyer

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March 21, 2017 2:44 PM
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Pièces, chorégraphie d’Ambra Senatore

Pièces, chorégraphie d’Ambra Senatore | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Par Jean Couturier pour Théâtre du blog


Ambra Senatore, nouvelle directrice du Centre chorégraphique national de Nantes, mêle, comme à son habitude, danse et théâtre, dans un univers quotidien. Ici, un appartement : coin cuisine, à cour, coin salon, à jardin et une table basse, au centre, avec autour, des poufs rouges.



Dans ce décor familier, les personnages dialoguent autour d’un thé, à propos de situations banales, ou de petits faits-divers : la mort d’un chat, un récit de voyage au Japon… Ces phrases, répétées régulièrement, subissent des distorsions surréalistes, à la manière d’Eugène Ionesco ou de Nathalie Sarraute. La gestuelle, elle aussi répétitive, prend des tonalités burlesques à la Jacques Tati.
La belle bande-son de Jonathan Seilman et Ambra Senatore  rythme cette pièce d’une heure, conçue avec une précision d’horlogerie, avec des mouvements justes et bien contrôlés. La pièce tend progressivement vers l’absurde et ses différents tableaux s’enchaînent  en continu, même si les trois danseuses, dont Ambra Senatore et les deux danseurs évoluent rarement ensemble. La chorégraphe joue avec un humour distancié sur des situations étranges : «Je suis heureux que tu sois imparfaite», dit l’un d’eux au personnage interprété par la chorégraphe.
Une « imperfection » qui demande beaucoup de travail pour produire un divertissement théâtral légèrement dansé et décalé.


Jean Couturier


Théâtre des Abbesses 31 Rue des Abbesses, 75018 Paris jusqu’au 19 mars.
theatredelaville-paris.com       

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March 16, 2017 1:10 PM
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Nomination de Sandrine Mini à la direction de la scène nationale de Sète et du Bassin de Thau - Ministère de la Culture et de la Communication

Nomination de Sandrine Mini à la direction de la scène nationale de Sète et du Bassin de Thau - Ministère de la Culture et de la Communication | Revue de presse théâtre | Scoop.it
Communiqué


Audrey Azoulay, ministre de la Culture et de la Communication, a donné son agrément à la proposition unanime du jury de nommer Sandrine Mini à la direction de la scène nationale de Sète et du Bassin de Thau, en plein accord avec François Commeinhes, président de la Communauté d’agglomération de Sète et du Bassin de Thau, Kléber Mesquida, président du Conseil départemental de l’Hérault, Carole Delga, présidente du Conseil régional d’Occitanie, et René Spadone, président de l’association.

Sandrine Mini propose pour la scène nationale un projet ambitieux, à l'écoute de la diversité des parcours des artistes et des publics. Son projet laisse place aux acteurs de la scène artistique régionale et prévoit un pôle de création et de diffusion dédié au jeune public.

Sandrine Mini aura à cœur de renforcer l’empreinte de la scène nationale dans la région, en organisant dans l’espace public des communes de l’agglomération un événement annuel autour du cirque, de la danse, de la musique et des arts plastiques.

Sandrine Mini a précédemment dirigé la scène conventionnée « Le Toboggan » à Décines de 2014 à 2016, après avoir été successivement attachée culturelle à l’Ambassade de France à Rome et directrice des publics et du développement au Musée national Picasso.

La ministre tient à saluer Yvon Tranchant qui, tout au long de sa carrière, a œuvré au soutien aux artistes et à leur rencontre avec les publics.

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March 5, 2017 3:50 AM
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Fériel Bakouri nommée à la direction de l’Apostrophe, scène nationale de Cergy-Pontoise

Fériel Bakouri nommée à la direction de l’Apostrophe, scène nationale de Cergy-Pontoise | Revue de presse théâtre | Scoop.it

par Stéphane Capron dans Sceneweb


C’était une nomination attendue car parmi les candidats figurait Laurent Dréano qui a été conseiller théâtre/danse des trois ministres de la Culture de la Présidence de François Hollande. On ne pourra pas soupçonner le pouvoir en place de favoritisme puisque c’est Fériel Bakouri qui a été nommée sur ce poste.

Fériel Bakouri a présenté un projet tourné vers les nouvelles générations, les artistes issus du bassin méditerranéen, en veillant à la présence des femmes dans la programmation de la nouvelle Apostrophe qui, au 1er janvier prochain, rassemblera l’actuelle scène nationale et le Théâtre 95.

Son projet invite les habitants à s’engager dans des propositions artistiques participatives. Sa programmation, respectueuse des équilibres entre les disciplines, maintiendra une forte présence chorégraphique et sera davantage ouverte aux musiques. Une attention particulière sera portée aux adolescents et aux jeunes adultes.

Fériel Bakouri est directrice-adjointe du Centre dramatique national de Montreuil depuis 2009. Elle avait auparavant été directrice des relations publiques à la MC 93, scène nationale de Bobigny.

Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr avec communiqué

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January 31, 2017 7:47 PM
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[Théâtre] Irina Brook veut faire « voyager ceux qui ne bougent pas » | Arkult

[Théâtre] Irina Brook veut faire « voyager ceux qui ne bougent pas » | Arkult | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Par Hadrien Volle pour Arkult


À la tête du Théâtre National de Nice depuis 2014, menant des projets tel que « Réveillons-nous », festival écologiste depuis 2015, dirigeant des mises en scène de textes comme « Terre Noire » ou « ? » de Stefano Massini, « Lampedusa Beach » de Lina Prosa, Irina Brook est l’une des femmes de théâtre à placer très ouvertement le mot « écologie » au cœur de ses projets. Le terme est pris dans sons sens large : humanité, programme social, respect de la nature et donc des êtres. La franchise de son projet va avec l’urgence d’une prise de conscience globale à l’échelle de la planète, un travail au quotidien à sa hauteur.

Irina Brook a régulièrement assumé une conscience écologiste arrivée sur le tard, au fil de lectures. En parallèle de la Cop21, durant la saison 2015-2016, elle lançait « Réveillons-nous », ce festival aux formes multiples qui fait du théâtre un lieu où construire une pensée plus verte, plus à l’écoute du monde qui l’entoure. Durant cette première édition, elle avait accueilli la créations « Les Glaciers grondants », fable de David Lescot, mais aussi l’avant-première du film qui a depuis créé l’événement, « Demain », pour un public curieux et néanmoins nombreux.


Les questions sur les rapports nord/sud transparaissent évidemment dans son travail de metteure en scène, avec « Lampedusa Beach », pièce sur l’émigration tragique d’une africaine pour l’Italie, mais surtout avec « Terre Noire ». Cette pièce de Stefano Massini montre le combat de petits paysans contre la « Earth Corporation » – avatar transparent de Monsanto – afin de pouvoir reprendre le droit de cultiver durablement leurs terres. Dans un très beau décor, où le jeu sur la transparence laisse entrevoir en fond de scène quelques carcasses de machines jonchant des terres souillées, la sagesse simple mais essentielle se laisse entendre. A la question d’un paysan à son fils, « qui travaille le plus à nous nourrir ? », la réponse est l’évidence même : « la terre », et pourtant, on ne la respecte pas. Le couple de paysans est porté par un duo très touchant incarné par Babetida Sadjo et Pitcho Womba Konga, et le combat entre les avocats Romane Bohringer et Hippolyte Girardot ne manque pas de cynisme. Sur des questions capitales, « Terre Noire » est un drame haletant, intense. Certains y verront de la naïveté, nous préférons y voir une fibre positive, un cri d’espoir frontal qu’il faut faire entendre jusqu’à ce que les choses changent.

La metteure en scène a coupé dans le texte de Massini pour donner à la pièce un aspect universel, « cette histoire une parmi des milliers d’histoires similaires ». Afin d’en assumer l’horreur, Irina Brook projette en début de représentation des images des conséquences de la vente des graines stériles de Monsanto aux paysans indiens. 250 000 d’entre eux se sont suicidés quand ils ont pris conscience du piège qui s’était refermé sur eux. On voit les familles, les morts, les bûchers qui les consument….


Brook rêve de voir davantage de spectacles sur cette thématique. En tant que directrice de théâtre, elle dit « recevoir beaucoup de pièces contemporaines et porter de l’intérêt à certaines », tout en regrettant qu’un grand nombre ne parle que de choses qui ne l’intéressent pas : « je ne compte plus le nombre de textes reçus qui parlent, par exemple, de la vie de Modigliani », en d’autres termes, déconnectées de l’actualité.

Car si le théâtre est toujours le miroir de l’humanité, peu de pièces montrent frontalement l’agonie de la nature, selon Irina Brook. Elle dit en « avoir peu trouvées, malgré de nombreuses recherches ». Alors elle attend, espère, qu’un auteur vienne travailler au plateau avec les comédiens et elle sur des idées qu’elle conçoit : « j’aimerais qu’un auteur soit prêt à se lancer dans cette expérience commune ».

Des projets, Irina Brook en a donc quelques-uns, malgré un poste de directrice qui lui paraît parfois éreintant : « il y a quelque mois, j’ai eu envie de tout envoyer balader, mais aujourd’hui, je pense que ce serait vraiment dommage de partir du TNN avant de voir grandir toutes les graines que j’ai semées ». Elle affirme donc vouloir accomplir « au moins » son deuxième mandat, afin de continuer à « faire voyager les gens qui ne bougent pas ».

Hadrien Volle

« Terre Noire » en tournée 2017 :

Théâtre des Célestins (Lyon), du 31 janvier au 4 février,
Théâtre le Forum (Fréjus), 7 février,
Plan les Ouates, 10 février,
Théâtre CO2 (Bulle), 17 février,
Wolubilis (Bruxelles), 22 février,
Théâtre des Sablons (Neuilly sur Seine), 25 février,
Théâtre Jacques Coeur (Lattes), 3 mars,
La Criée (Marseille), 9 au 11 mars,
CC Yzeurespace (Yzeure), 14 mars,
Théâtre la Colonne (Miramas), 17 mars,
Il Funaro (Pistoia), 23 et 24 mars.

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January 4, 2017 6:46 PM
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Ruth Mackenzie, une féministe à la direction artistique du Théâtre du Châtelet

Ruth Mackenzie, une féministe à la direction artistique du Théâtre du Châtelet | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Par Marie-Aude Roux dans Le Monde


L’actuelle directrice du Festival de Hollande, chargée en 2012 du volet culturel des JO de Londres, travaillera en collaboration avec Thomas Lauriot dit Prevost.


C’est la Britannique Ruth Mackenzie qui a été choisie pour prendre la succession de Jean-Luc Choplin à la tête du Théâtre du Châtelet, dont elle assurera la direction artistique. Elle travaillera en binôme avec Thomas Lauriot dit Prevost, nommé délégué général.

Agée de 59 ans, Ruth Mackenzie est, depuis 2015, directrice artistique du Festival de Hollande, fameuse manifestation d’avant-garde à Amsterdam. La femme aux tenues noires et aux cheveux blancs et courts s’illustra notamment en organisant en un temps record, entre le 21 juin et le 9 septembre 2012, pour les Jeux olympiques et paralympiques de Londres, le plus grand festival de l’histoire du pays : plus de 25 000 artistes venus du monde entier. Une performance qui lui a valu d’être faite commandeur de l’ordre de l’Empire britannique par la reine Elizabeth.


Née en Afrique du Sud, Ruth Mackenzie est la fille d’un couple de journalistes engagés contre l’apartheid et réfugiés en Angleterre après avoir fui les troubles de 1960. A Londres, élevée dans le quartier résidentiel de St. John’s Wood, Ruth Mackenzie est en contact avec le monde de l’art. Etudiante en littérature anglaise au Newham College de Cambridge, Ruth Mackenzie fréquente la nouvelle intelligentsia artistique. Cette féministe engagée (elle l’est toujours et vitupère contre l’insuffisante représentation des femmes aux postes-clés) participe à la création d’une compagnie de théâtre à vocation sociale pour laquelle elle écrit plusieurs pièces. On la retrouve également sur les planches, où elle fréquente le metteur en scène Nicholas Hytner, et l’actrice Annabel Arden, cofondatrice avec Simon McBurney du Théâtre de Complicité.

Forte personnalité

Mais le talent de Ruth Mackenzie se révèle surtout dans la stratégie et l’organisation d’événements artistiques : à Bradford, dans le Yorkshire, puis au Southbank Centre en 1986. En 1990, elle devient l’administratrice du Nottingham Playhouse, qui comprend le Royal Festival Hall et le Queen Elizabeth Hall. Elle y invite Peter Brook et Robert Lepage. Devenue directrice générale du Scottish Opera en 1997, elle y développe un projet artistique remarqué, malgré une gestion épinglée par un rapport du gouvernement.

En 2002, Ruth Mackenzie revient au théâtre et prend en main la destinée artistique du Festival de Chichester. Elle y restera jusqu’en 2006, où elle prend le poste de directrice générale du Festival international de Manchester. C’est en collaboration avec ce festival que le Théâtre du Châtelet coproduira alors le fameux opéra de Damon Albarn, Monkey, Journey to the West, donné à Manchester en avant-première.

Une forte personnalité

Exigeante, maniant habilement culture et politique, Ruth Mackenzie (qui de 2007 à 2010 a fait également partie de l’équipe du Festival de Vienne, en Autriche) a exercé les fonctions de conseillère spéciale au secrétariat d’Etat à la culture, aux médias et aux sports sous cinq gouvernements. Consultante pour de nombreuses institutions publiques, elle s’est impliquée dans les nouvelles technologies en devenant PDG de The Space, une plate-forme spécialisée dans le développement des arts numériques.

Cette forte personnalité va donc reprendre le Châtelet avec un délégué général, Thomas Lauriot dit Prevost, auquel le lieu n’est pas inconnu puisqu’il en fut pendant sept ans, jusqu’en 2013, directeur administratif avant de partir pour La Monnaie de Bruxelles. A charge pour lui de mener également à bien les grands travaux que le bâtiment va subir à partir de mars et pour deux ans. Annoncées mardi par la maire de Paris, Anne Hidalgo, leurs nominations devraient être entérinées la semaine prochaine par le conseil d’administration du théâtre.

Marie-Aude Roux
Journaliste au Monde

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December 21, 2016 3:52 PM
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Bérangère Vantusso nommée directrice artistique du Studio-Théâtre de Vitry

Bérangère Vantusso nommée directrice artistique du Studio-Théâtre de Vitry | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Le jury présidé par Nicole Gautier et composé des partenaires institutionnels du Studio-Théâtre (DRAC Île-de-France, Ville de Vitry, Département du Val-de-Marne et Région Île-de-France) a nommé Bérangère Vantusso directrice artistique du Studio-Théâtre de Vitry. Succédant à Daniel Jeanneteau, elle prendra ses fonctions à partir du 2 janvier 2017.

BÉRANGÈRE VANTUSSO
Bérangère Vantusso est née en Lorraine en 1974.

Comédienne formée au CDN de Nancy, elle aborde pour la première fois la marionnette en 1998, alors qu’elle étudie à la Sorbonne Nouvelle. Reconnaissant d’emblée dans cet art le point crucial de son questionnement quant à l’incarnation et à la prise de parole scéniques, elle devient marionnettiste auprès de François Lazaro, Emilie Valantin, Michel Laubu ou Sylvie Baillon.

En 1999, elle réunit autour d’elle plusieurs artistes et crée la compagnie trois-six-trente, dont elle met en scène tous les spectacles. La démarche de création s’oriente dès le début vers un théâtre de recherche où se rencontrent marionnettes, acteurs et compositions sonores au service des écritures contemporaines. En 2006, avec la création de Kant de Jon Fosse, la compagnie affirme son identité en faisant de l’hyperréalisme le lien qui unit le théâtre et la marionnette contemporaine. Bérangère Vantusso conçoit avec Marguerite Bordat d’étranges figures au seuil du vivant et met en scène Les Aveugles de Maeterlinck, L’Herbe folle d’Eddy Pallaro, Violet de Jon Fosse et Le Rêve d’Anna d’Eddy Pallaro.

Elle a créé L’Institut Benjamenta d’après Robert Walser en juillet 2016 au 70° Festival d’Avignon.

Après avoir été artiste associée au Théâtre national de Toulouse, elle est aujourd’hui membre de l’ensemble artistique du Théâtre du Nord – CDN de Lille, du CDN de Sartrouville et du T° – CDN de Tours.

En 2015, elle est lauréate du programme hors les murs de l’Institut Français et part deux mois au Japon pour rencontrer les maîtres du Théâtre national de Bunraku.


Elle a collaboré avec différents metteurs en scène : Arnaud Meunier, Antoine Caubet, Paul Desvaux, Sylvain Maurice et Guillaume Vincent. Formatrice, elle dirige régulièrement des stages ou des ateliers autour de la marionnette et de l’écriture contemporaine. 


 Depuis 2002 elle enseigne l’interprétation avec marionnettes aux élèves d’hypokhâgne du lycée Victor Hugo à Paris. Elle est régulièrement invitée à témoigner de sa pratique au cours de colloques ou de tables rondes. 


 Enfin, elle est intervenue avec les élèves de L’ENSATT à Lyon (2009) et de l’ENSAD à Montpellier (2015). 


 Lien vers le site de la compagnie trois-six-trente. http://www.troissixtrente.com/

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October 27, 2016 8:55 AM
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Naissance de Scènes du Golfe, à Vannes et Arradon

Naissance de Scènes du Golfe, à Vannes et Arradon | Revue de presse théâtre | Scoop.it


Par Yves Pérennou pour La Scène



Arrivée il y a tout juste un an à la direction du théâtre de Vannes, Ghislaine Gouby s’est retrouvée rapidement devant le chantier, qu’elle imaginait à plus long terme, de l’évolution vers un statut d’établissement public de coopération culturelle (EPCC). Le départ de Mylène Humbert-Lucas, directrice du théâtre d’Arradon, commune voisine de Vannes, annoncé dès juillet 2015, a offert aux élus l’opportunité d’un rapprochement. Rondement mené, le processus aboutit ce 1er septembre 2016 à l’EPCC Scène du Golfe. Les deux théâtres conservent leur nom, Anne de Bretagne pour Vannes et La Lucarne pour Arradon. Le conseil d’administration reste présidé par Gabriel Sauvet qui présidait déjà celui de Vannes. Les maires de Vannes et Arradon sont vice-présidents. Le Théâtre Anne de Bretagne dispose d’une salle de 800 places dotée d’un vaste plateau et d’une salle de 350 places avec proscenium, tandis que la salle de la Lucarne fonctionne avec des gradins rétractables. 


«Les outils sont complémentaires, se réjouit Ghislaine Gouby qui va développer les résidences avec plusieurs artistes baptisés «complices» comme Claire Diterzi, Chloé Moglia, ou encore Jeff Odet et son Cirque Farouche Zanzibar. Catherine Diverrès est artiste associée depuis 2012 jusqu’en décembre 2017. Les artistes complices seront deux mois par saison sur Vannes ou Arradon, une présence artistique qui manquait au territoire, estime Ghislaine Gouby. La Lucarne avait un label régional de scène de territoire pour le théâtre et la voix. Scènes du Golfe lui conservera une programmation pluridisciplinaire, mais avec une plus grande place pour la danse, en misant sur une circulation des publics.



L’EPCC dispose de la Lucarne 150 jours par an et a révisé sa convention avec la Ville de Vannes qui lui loue les salles du théâtre avec un tarif quotidien. «C’est un cas original, mais, en retour, le théâtre n’a pas les charges d’entretien», confie Ghislaine Gouby. La directrice assure que le rapprochement se fait sans réduction financière. La Ville d’Arradon valorise un apport en nature à 140 000 € auxquels s’ajoutent 90 000 € pour la programmation et la Ville de Vannes augmente légèrement, à un total de 1,2 M€. L’effectif a été consolidé avec trois nouveaux postes, dont un transfert de la Ville (technicien). Beaucoup de nouveautés sont annoncées par Scènes du Golfe en cette rentrée, comme les Récréations (cirque en établissements scolaires), les 12h30 (pause artistique à déjeuner), des tarifs dernières minute... 

Yves Pérrenou

(En partenariat avec La Lettre du Spectacle du 23 septembre 2016)

Légende : Ghislaine Gouby

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June 28, 2017 2:52 AM
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Centres Dramatiques Nationaux : 70 ans et un conflit social qui couve ?

Centres Dramatiques Nationaux : 70 ans et un conflit social qui couve ? | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Ecouter la chronique de Xavier Martinet dans La Dispute de France Culture (12 mn)


https://www.franceculture.fr/emissions/le-petit-salon/centres-dramatiques-nationaux-70-ans-et-un-conflit-social-qui-couve


C'est un "choc" pour la présidente du Syndeac Madeleine Louarn : 15 CDN et le syndicat des directeurs sont assignés en justice par les représentants des artistes-interprètes. Ils leur reprochent de manquer à un accord de 2003 sur la répartition des emplois artistiques. Le système peut-il évoluer?


Photo : Catherine Marnas, Directrice du Théâtre National de Bordeaux-Aquitaine, assigné en justice parmi 15 autres CDN pour n'avoir pas employé assez d'artistes, comme le prévoit un accord de 2003• Crédits : GEORGES GOBET / AFP - AFP
L'équipe

Production
Lucile Commeaux, Xavier Martinet

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May 20, 2017 9:49 AM
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La MC93, ruche ouverte sur la ville

La MC93, ruche ouverte sur la ville | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Par Rosita Boisseau dans Le Monde


Après trois ans de travaux, la Maison de la culture de Bobigny rouvre ses portes avec « Nicht Schlafen », d’Alain Platel


Le nouveau plancher sent bon, la peinture jaune brille, le cuir vert des tabourets claque. Tout est neuf, frais, beau. Après trois ans de fermeture et de travaux, la MC93, maison de la culture de Seine-Saint-Denis, à Bobigny (Seine-Saint-Denis), affiche un bulletin de santé architectural parfait pour sa réouverture, mardi 23 mai. Une longue vitre borde le bâtiment jouant la transparence, l’ouverture et la facilité d’échanges d’une ruche artistique accueillante.

La rénovation de ce lieu emblématique, ouvert en 1980, a été pilotée par Vincent Brossy en dialogue avec Hortense Archambault, directrice de la MC93 depuis 2015. La restructuration des espaces s’est coulée dans ses désirs de « fabrique d’expériences » tout autant que de « programmation de spectacles ». Le hall, immense, encore élargi (720 mètres carrés), bordé par un restaurant permanent, se veut libre d’accès pour les groupes de danseurs amateurs et proposera des expositions, des projections…

UNE « BLACK BOX » A ÉTÉ CONSTRUITE SUR LE TOIT DU BÂTIMENT, AUQUEL ELLE DONNE UNE STATURE PLUS IMPOSANTE


Parallèlement, les deux salles déjà opérationnelles, dont la plus grande de 1 200 places, ont été ­rhabillées à la pointe de l’élégance et de la technologie. Nouveauté, une « black box » a été construite sur le toit du bâtiment, auquel elle donne une stature plus imposante et une visibilité plus marquée. Elle s’adaptera à tous les désirs des artistes et toutes les configurations du public.

Pour fêter sa réouverture et signer l’esprit de sa programmation, Hortense Archambault a parié sur la danse, « langue des corps qui parle à tous », en invitant le chorégraphe et metteur en scène belge Alain Platel avec sa nouvelle pièce pour neuf interprètes, Nicht Schlafen. Le grand plateau, dans sa froideur sombre, quasi minérale, est l’écrin parfait pour ce spectacle aux éclats coupants. Ses cadavres de chevaux encastrés les uns dans les autres, œuvres de Berlinde De Bruyckere, s’auréoleront d’une plasticité plus proche du tableau que du charnier en conservant leur intensité inconfortable. Sur ce terrain, la note excessive de cet opus ne fait culmine dans des pics de brutalité, de corps tordus, cassés, vrillés, comme Platel les sublime sur scène depuis ses débuts, dans les années 1990. Avec un tour de vis de plus dans la virtuosité de la souffrance qui laisse pantelant.

Ligne de douleur

Est-ce l’inspiration musicale, celle de Mahler et son époque, le début du XXe siècle et son chaos, qui ont impulsé cette violence ? Est-ce la lecture du livre Les Années verti­gineuses : Europe, 1900-1914, de l’historien Philipp Blom, en écho avec le monde aujourd’hui, qui a soufflé sur l’incendie ? Nicht Schlafen, qui invite aussi des chants pygmées et les atmos­phères sonores du compositeur ­Steven Prengels dans les envolées bouleversantes de Mahler, tire la sonnette d’alarme. Il reconduit la ligne de douleur chère au chorégraphe belge de façon trop univoque, même si un peu d’espoir ­s’infiltre à la fin du spectacle.

Nicht Schlafen. Ne pas dormir. ­Obligation de vigilance, attaque d’insomnie et encore. Chair de poule, mal au ventre. Interdiction de dormir, sommeil oublié, remisé. Le seul espace réparateur pour l’humain, sas de repli où l’on s’abandonne en confiance, est biffé. Ne pas dormir. Sinon se retrouver à poil, pillé, en sang, mort peut-être. Ne pas dormir pour rester vivant encore un peu. Après Nicht Schlafen, impossible de se reposer sur ses deux oreilles.


LA SAUVAGERIE, L’ANIMALITÉ MÊME, EMPORTENT LES PERSONNAGES DE CETTE FRESQUE DÉVASTÉE



La sauvagerie, l’animalité même, emportent les personnages de cette fresque dévastée. Attaquer l’autre, le cogner, le déchiqueter, lui rouler dessus, toutes les nuances de la brutalité explosent dans des luttes sèches. Au corps à corps, ou seul contre soi-même, les héros grimaçants et dépenaillés de cette guerre de tranchées n’en finissent pas de se battre. Et toujours chez Platel, en ­particulier dans les unissons, cette gestuelle du spasme, du segment, du tremblement, symptômes du corps écartelé et sans cesse arraché à lui-même, qui signe un contemporain défiguré.

A la hauteur de l’inquiétude existentielle d’Alain Platel, de son urgence à projeter sur scène une flambée d’émotions secouées, les interprètes de ce nouvel opus se révèlent non seulement à toute épreuve, mais éclatants dans leur singularité. Citons-les tous : Ido Batash, Bérengère Bodin, Romain Guion, David Le Borgne, Samir M’Kirech, Boule Mpanya, Dario Rigaglia, Elie Tass, Russell Tshiebua.


Ce spectacle coup de poing augure de la programmation ­offensive désirée par Hortense ­Archambault. Pour préparer la ­venue de ce spectacle, une dizaine de jeunes de Bobigny et de Bondy ont réalisé un clip autour de l’œuvre et collaboreront avec d’autres artistes la saison prochaine. Suivant un axe « écriture contemporaine » affirmé, Archambault a invité le spectacle ­Jamais seul, du metteur en scène Patrick Pineau écrit par Mohamed Rouabhi, une création de Frédéric Fisbach conçue en collaboration avec l’écrivain Dieudonné Niangouna. Parmi les artistes également attendus, Roméo Castellucci et Guy Cassiers ainsi que la chorégraphe Régine Chopinot.

Nicht Schlafen, d’Alain Platel. MC93, 9, boulevard Lénine, Bobigny (93). Du 23 au 27 mai. 20 heures sauf le samedi à 18 heures. De 9 à 25 euros. www.mc93.com

Rosita Boisseau

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May 4, 2017 3:12 AM
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Héritière de Vilar : Nathalie Cabrera, nouvelle directrice de la Maison Jean-Vilar (Avignon)

Héritière de Vilar : Nathalie Cabrera, nouvelle directrice de la Maison Jean-Vilar (Avignon) | Revue de presse théâtre | Scoop.it


Propos recueillis par DOMINIQUE MARÇON dans Zibeline


Nathalie Cabrera a succédé à Jacques Téphany à la direction de la Maison Jean Vilar, à Avignon. Rencontre avec celle qui veut perpétuer la mission fondatrice du lieu tout en repensant un théâtre populaire d’aujourd’hui.


Zibeline : Comment avez-vous été nommée, et par qui ?


Nathalie Cabrera : J’ai rédigé un projet, et été auditionnée par un jury. Composé du président de l’Association Jean Vilar, Eric Ruf, Didier Deschamps, Cécile Helle, Maire d’Avignon, Olivier Py, directeur du festival d’Avignon, un représentant de la Bibliothèque Nationale de France (BNF), et deux représentants du ministère de la Culture.


Quelle est la fonction de la Maison Jean Vilar ?


L’Association a été créée en 1972 par Paul Puaux, autour de la mémoire de Jean Vilar, et en 1978 a été ouverte la Maison, avec la Ville, qui a mis à disposition l’Hôtel de Crochans, l’État et la BNF. La mission de ces deux structures est de prendre soin et de valoriser le fonds Jean Vilar. Et aussi de garder la mémoire du Festival d’Avignon, l’antenne de la BNF continuant à archiver tous les documents relatifs au Festival, et depuis une quinzaine d’années ceux du Festival Off.


Comment s’inscrit votre projet au sein de ce fonctionnement ?


Dans la continuité, et dans le changement. Je pense qu’il faut replacer l’héritage de Jean Vilar dans le contexte actuel, l’ancrer dans le présent, aux côtés du Festival d’Avignon. Car de son origine, en 1947, à nos jours, c’est toute l’histoire du théâtre contemporain que l’on traverse. La Maison doit proposer cette ouverture au public, le plus large possible.


Sous quelles formes ?


C’est d’abord un lieu d’exposition. La Maison en a toujours fait et je souhaite poursuivre cette politique, en faisant en sorte qu’elles s’adressent à chacun, pas seulement au public très connaisseur de théâtre, et pas sous un angle pédagogique. Je voudrais proposer une approche sensible de l’histoire du théâtre, notamment par le biais des œuvres. Mon idée est de privilégier des formes immersives qui permettent des modes de lecture très différents, de trouver des voies d’accès qui ne soient pas fondées sur la seule connaissance, mais aussi sur la sensibilité. Il faut pouvoir faire appel à des projets portés par des artistes qui interprètent cette histoire.


En dehors de la période estivale, comment envisagez-vous de faire vivre cette Maison ?


Un des enjeux fondamentaux est de pouvoir agir toute l’année. En plus des expositions et du travail de médiation qui sera mené autour, j’imagine une programmation en lien avec les opérateurs culturels du territoire de proximité, pour organiser des temps de rencontres, de débats et d’échanges avec les avignonnais, autour de l’actualité artistique et culturelle. La Maison a la capacité de donner à cette actualité une assise patrimoniale : on a ici des images, des éléments de décors… qui entrent en résonance avec elle. Nous sommes en train d’en discuter avec des partenaires réguliers comme les Hivernales, Festo Pitcho… Mais aussi d’autres institutions, comme la Collection Lambert, le Théâtre d’Arles, ou l’Opéra à Avignon…


Qu’en est-il du Théâtre Populaire aujourd’hui ?


C’est un élément fondamental ! L’Association Jean Vilar est là pour faire vivre sa mémoire, et doit se poser la question de cet héritage aujourd’hui. De son accompagnement, de la mise en œuvre de ses valeurs dans les pratiques artistiques et culturelles de nos jours. Nous allons inviter des jeunes gens en formation dans les écoles d’art et d’art dramatique à se saisir de ces histoires et de ces archives pour produire des formes en direction du public. Nous allons, avec le monde professionnel, réfléchir à la façon de valoriser l’engagement des théâtres concernant le travail sur les publics.
Et pour s’inscrire dans cette réalité, il faut qu’on puisse développer le volet numérique, faire en sorte que le nouveau site Internet de la Maison Jean Vilar, qui ouvrira dans le courant de l’année, nous permette de valoriser le fonds et les activités du lieu, et de développer de nouveaux outils et supports, notamment en direction des enfants.


Comment est financée la Maison Jean Vilar ?


Elle est portée par la Ville d’Avignon, qui met à disposition le bâtiment ainsi que du personnel, plus une subvention, et le ministère de la Culture. Cela équivaut à peu près à 200 000 euros chacun. Elle est aussi soutenue par la Région PACA et le conseil départemental du Vaucluse à hauteur de 20 000 euros chacun.


Quels sont vos projets à court terme ?


Concernant le Festival d’Avignon, cet été, le programme de la Maison Jean Vilar a été nettement densifié. Il y aura dans la Maison deux spectacles : celui de Rezo Gabriadze (du 11 au 17 juillet), Ramona, et Hamlet, mis en scène par Olivier Py avec des détenus du centre pénitentiaire du Pontet ; et dans le jardin les lectures de textes africains, celles de l’Adami avec le TgSTAn et de jeunes comédiens. Et deux autres projets, d’importance, qui sont pour l’heure en cours de finalisation… et s’installeront au-delà du Festival.



Propos recueillis par DOMINIQUE MARÇON
Avril 2017
Photo : Nathalie Cabrera -c- X-D.R

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April 24, 2017 7:17 PM
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Hortense Archambault prépare la réouverture de la MC93

Hortense Archambault prépare la réouverture de la MC93 | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Par Hadrien Volle pour Sceneweb
 


Hortense Archambault devant la MC93 en travaux – Avril 2017.
Le 23 mai, la Maison de la Culture de Seine-Saint-Denis (MC93) rouvre ses portes après trois années de travaux. Ce bâtiment élevé par le célèbre duo d’architectes Fabre et Perrotet a ouvert en 1980 sur une surface de 6 000 m² et il atteint aujourd’hui, au fil des restauration, les 11 000 m². Ces nouveaux travaux dirigés par l’architecte Vincent Brossy – lui-même admirateur de Fabre et Perrotet – ont été pensés en premier lieu pour la sécurité des personnes, pour l’accessibilité au public handicapé et pour refaire l’isolation thermique des lieux. Ils réservent aussi bien d’autres nouveautés… Hortense Archambault, directrice de l’établissement depuis août 2015 revient sur ce chantier colossal de 18 millions d’euros, « toutes dépenses confondues ».

En 2015, lors de votre arrivée à la tête de la MC93 Bobigny, le bâtiment est déjà en travaux. Celui-ci va rouvrir ses portes au mois de mai prochain. Qu’est-ce qui aura changé ?

Le projet de rénovation de Vincent Brossy est aussi une restructuration architecturale. Le déclanchement des travaux vient d’un problème clair : des difficultés techniques et des problèmes de sécurité devaient être réglés ! Mais de là, l’architecte est parti pour faire un geste consistant à reprendre le bâtiment tel qu’il était, avec ses extensions successives, et en faire quelque chose de cohérent tout en gardant l’esprit du lieu. Un peu à l’image du projet que je veux mener à bien à la direction de la MC93. Les artistes qui ont visité le bâtiment et qui ont travaillé à l’ancienne MC93 sont à la fois émus, parce qu’ils retrouvent quelque chose du caractère de la M,C et en même temps ils voient quelque chose d’une transformation. Très concrètement, la grande salle Oleg Efremov, a été transformée principalement sur le plan technique. Le spectateur ne va donc pas s’en rendre, l’âme de cette salle a donc été gardée. Il y a un très grand plateau, une cage de scène qui est parmi les plus importantes d’Île-de-France et 800 places pour le public en configuration gradins.

Alors quelles sont les nouveautés qui seront visibles pour le public ?

La plus importante est la Nouvelle Salle – qui ne porte pas encore de nom. Elle ouvrira en septembre 2017 avec une création de Marie-Christine Soma réunissant, entre autres, Dominique Reymond, Mélodie Richard et Pierre-François Garel. Une salle qui n’existait pas et qui a été élevée sur le toit de la salle Efremov. C’est donc une extension vers le haut. Ce nouvel équipement va remplacer la salle Christian Bourgois qui manquait de hauteur sous plafond. En termes de technique, cette nouvelle salle permet donc davantage d’amplitude. La jauge sera de 200 à 230 places avec une configuration très polyvalente. La salle Bourgois sera de temps en temps programmée, mais la plupart du temps elle servira de lieu de répétition, le vrai lieu de répétition qui manquait à la MC93.


La « Nouvelle Salle » de la MC93


Il y a aura aussi des changements du côté des espaces d’accueil.

Le hall est l’une des petites choses sur lesquelles j’ai pu intervenir puisque lorsque je suis arrivée à la MC93, le programme architectural était déjà choisi. Mais j’ai demandé à l’architecte de réfléchir à la transformation du hall pour en faire un « lieu de tous les possibles » qui correspond, là aussi, au projet que je veux mener à la MC93 qui est celui de dire qu’un théâtre doit être un outil pour montrer les spectacles les plus merveilleux possible, mais peut-être que cela ne suffit pas. Un lieu comme la MC doit remplir de hautes fonctions dans une ville comme Bobigny.

Comment cela s’illustre dans le hall ?

Le hall est considérablement agrandi et joue de la transparence sur la ville. Dès le mois de septembre, le hall sera ouvert les après-midis de la semaine aux personnes qui en auront besoin. Par exemple, des jeunes nous ont dit qu’ils auraient besoin d’un endroit pour répéter, on peut donc imaginer les choses pour eux comme cela se fait déjà au 104. L’aménagement même de l’espace a été pensé en associant les futurs usagers. Un groupe de spectateurs et de non-spectateurs de la MC a été créé pour en définir le cahier des charges, et c’est le designer Johan Brunel qui a créé le mobilier.


Le Hall Matoub
Qu’est-ce qui est ressorti de ces réunions avec les usagers ?

Tout le monde était d’accord qu’il y aurait des usages très différents de cet espace nouveau et qu’il fallait faire confiance aux gens, car le théâtre est l’un des rares endroits où des gens très différents peuvent se côtoyer. Donc le mobilier sera justement très « mobile » et il pourra être utilisé de différentes façons. L’expérience nous dira s’il faut ajouter ou retirer des éléments, comme cela a pu se faire au 104 avec les paravents ou les miroirs.

Le restaurant sera ouvert tous les midis où le café sera à 1€., comme on l’illustre par ailleurs avec le [« pass illimité »].

Cette invitation accompagne une politique d’ouverture accrue de la MC93 sur la ville ?

En effet ! Le restaurant de la MC sera ouvert tous les midis, avec le café à 1€. Cette ouverture accompagne des initiatives déjà en place comme le « pass illimité » qui permet à des spectateurs de venir voir tous les spectacles de la saison pour 10€ par mois. Car la question financière peut être parfois un frein à la fréquentation de nos lieux. On a vendu un nombre important de pass, notamment en tarif réduit (7€). Grâce à celui-ci, on s’est rendu compte que sur cette saison – qui s’est déroulée hors les murs dans toute la Seine-Saint-Denis – les gens allaient voir beaucoup de choses. Ce qui était un de nos enjeux. Une grande partie des adhérents à ce pass sont de nouveaux spectateurs. On en a vendu 210 cette année.

Nouvelle architecture, plus d’ouverture sur des publics nouveaux. Vous désignez aussi ce nouveau lieu comme lieu d’accueil d’une « fabrique d’expérience ». Qu’en est-il ?

Le hall sera l’un des espaces de cette « fabrique d’expérience » qui est un projet en gestation depuis plusieurs mois maintenant. Cette réflexion vise à donner à l’art une expression très concrète dans la société. Cette fabrique est ouverte à tous les projets : de ceux qui veulent accueillir des habitants de Bobigny et plus largement de Seine-Saint-Denis pour créer des rencontres, faire autre chose qu’une création au sens où on l’entend habituellement dans un lieu comme la MC93 mais en associant néanmoins des artistes en résidence sur le long terme avec des citadins. Au final, cela pourra produire une œuvre, mais aussi beaucoup de temps pour des rendez-vous, des moments de partage, que l’on ne peut pas qualifier, mais qui seront autant d’expériences pour ceux qui y participeront. Tout est possible.


La façade de verre de la MC93
Allez-vous continuer à faire des spectacles « hors les murs » dès lors même que la MC93 sera rouverte ?

Seulement des lectures car c’est un format qui s’y prête et qui peut se balader plus facilement et puis on veut continuer à créer de la relation entre des textes contemporains et des lieux particuliers. Il y aura donc de nouveaux sites avec de nouveaux textes. Jusque-là, nous avons été dans des lieux patrimoniaux comme la Bourse du Travail ou la gare de déportation, mais aussi des lieux associatifs à Noisy ou dans des cafés, des parcs et des bibliothèques. Pour le reste des créations, on va se reconcentrer sur l’intérieur des murs.

Que va-t-il se passer justement à l’intérieur des murs la saison prochaine ? Quelle orientation artistique allez-vous suivre ?

Mon orientation reste vouloir représenter des artistes qui parlent d’aujourd’hui. De fait, il y aura beaucoup d’auteurs contemporains programmés. Notamment deux aventures qui sont pour moi très belles, symbolique de ce que j’ai envie de faire. Ce sont des artistes qui passent commande à un auteur contemporain. La première, c’est Patrick Pineau qui a demandé à Mohamed Rouabhi un texte qui s’appelle « Jamais seul ». Une galerie de 45 personnages des milieux populaires, très poétique. Ce sera l’une des grosses productions de la saison prochaine, cela se jouera en novembre à la MC avec une quinzaine d’acteurs. Autre production d’une commande d’un texte par un artiste, c’est Frederic Fisbach, acteur et metteur en scène, qui a demandé un monologue à Dieudonné Niangouna, « Et Dieu ne pesait pas lourd ». Il sera créé à la MC93 en janvier 2018. Dans ces deux exemples, l’important c’est la rencontre artistique, de faire cohabiter deux univers différents. Il sera donc beaucoup question de cela la saison prochaine.

Qui d’autre va accompagner cette volonté ?

Roméo Castellucci avec « De la démocratie en Amérique » d’après Alexis de Tocqueville, dans le cadre du Festival d’Automne. Anatoli Vassiliev fera également une création, ainsi que Guy Cassiers. Nous aurons également un spectacle de Kornél Mundruzczo, Imitation of Life, un artiste hongrois qui n’est jamais venu à Paris et dont le dernier film est sélectionné à Cannes. Nous aurons aussi de la danse avec le Pacific Melting de Régine Chopinot et une partie du portrait Jérôme Bel du Festival d’Automne. Nous aurons aussi quelques découvertes, parmi lesquelles Marine De Missolz, Leyla-Claire Rabih. On espère ainsi que le public va retrouver le chemin de la MC93 après ces trois ans de fermeture…

Photos et propos recueillis par Hadrien VOLLE – www.sceneweb.fr

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March 30, 2017 6:14 PM
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Théâtre - Laëtitia Guédon : "Le métissage passe par la réinvention de l'action culturelle"

Théâtre - Laëtitia Guédon : "Le métissage passe par la réinvention de l'action culturelle" | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Par Anaïs Heluin pour Le Point Afrique


Au-delà de la mise en scène de la pièce de Koffi Kwahulé sur le peintre Jean-Michel Basquiat, Laëtitia Guédon veut partager son regard original.

Laëtitia Guédon aurait pu attendre la fin des travaux en automne 2017 pour ouvrir Les Plateaux sauvages*, nouvel établissement culturel de la Ville de Paris à la tête duquel elle a été nommée. Elle a préféré se lancer dans l'aventure au plus vite. Mettre en place un temps de préfiguration permettant aux artistes et au public de commencer à s'apprivoiser. C'est donc dans un espace encore en chantier qu'elle nous accueille, tandis que la compagnie La Louve de Lou Wenzel répète dans la salle de l'ancien Vingtième Théâtre. Résultat d'une fusion entre cette structure et le centre d'animation des Amandiers situé à quelques mètres, Les Plateaux sauvages se veulent lieu de métissage. D'abord entre création professionnelle et transmission artistique, mais aussi entre cultures différentes. Deux types de mélanges que Laëtitia Guédon pratique également en tant que metteuse en scène à la tête de sa compagnie 0,10.

Cela notamment dans sa dernière création intitulée SAMO**, a Tribute to Basquiat, consacrée au peintre noir américain Jean-Michel Basquiat (1960-1988), créée début mars à la Comédie de Caen. Dans ce spectacle comme dans le lieu qu'elle dirige, Laëtitia Guédon questionne son identité et celle des personnes de sa génération. En particulier de celles qui sont issues de l'immigration. Elle a pour cela passé commande d'un texte à l'auteur d'origine ivoirienne Koffi Kwahulé, et s'est entourée d'un comédien – Yohann Pisiou – au physique étonnamment proche de celui de Jean-Michel Basquiat, du danseur Willy Pierre-Joseph, du musicien-performeur Blade MC Alimbaye, du jazzman Nicolas Baudino ainsi que du vidéaste Benoît Lahoz.

Résultat : une forme hybride qui rappelle non seulement l'esthétique des œuvres les plus connues du peintre, réalisées de 1986 à sa mort deux ans plus tard, mais aussi l'énergie de ses balbutiements. Ses déambulations dans le quartier de Soho avec ses acolytes Al Diaz et Shannon Dawson, à la recherche du mur idéal pour réaliser des graffitis signés « SAMO © » - anagramme de « Same Old Shit ». Ses expériences musicales au sein du groupe Gray dont aucun des membres n'avait de formation musicale. Incarné par trois interprètes, le Basquiat de Laëtitia Guédon est tel que le décrit Glenn O'Brienn dans le catalogue de l'exposition du musée d'Art moderne de la Ville de Paris en 2010. « Un peu comme Mohammed Ali sur le ring, bondissant rythmiquement en avant et en arrière, secouant la tête en zigzaguant comme pour éviter d'invisibles coups de poing. »

Le Point Afrique : Avec Samo, a Tribute to Basquiat, vous revenez à l'écriture de Koffi Kwahulé, que vous avez découverte avec Bintou (Lansman, 1997), objet en 2009 de votre première mise en scène à la tête de votre compagnie 0,10. En quoi son théâtre vous intéresse-t-il particulièrement ?

Laëtitia Guédon : Une des choses qui me touchent le plus dans son écriture, c'est la manière dont elle questionne l'identité. Histoire d'une jeune fille française issue de l'immigration africaine, Bintou a fait écho pour moi aux émeutes des banlieues en 2005. Lorsque j'ai découvert ce texte, je sortais à peine de l'école d'Asnières où j'ai fait ma formation de comédienne. Je n'avais alors jamais rien lu de semblable : très influencée par le jazz, l'écriture de Koffi Kwahulé s'attache à des personnages de l'entre-deux très peu présents dans les récits portés sur les scènes nationales. Née en France d'un père martiniquais et d'une mère marocaine, je me reconnais dans le malaise qu'ils expriment. Dans l'étrangeté qu'il y a à se sentir pleinement française, tout en étant sans cesse ramenée aux origines que suggère ma couleur de peau.

Parmi les artistes que vous avez déjà accueillis en résidence aux Plateaux sauvages, plusieurs travaillent sur la notion d'identité. Blandine Savetier dans son adaptation du roman Neige de Orhan Pamuk par exemple, ou encore Sidney Ali Mehelleb pour Babacar ou l'Antilope. Est-ce un axe de votre projet ?

Les compagnies accueillies aux Plateaux sauvages sont avant tout sélectionnées pour leur disponibilité à entrer en contact avec un territoire. En l'occurrence avec celui du quartier des Amandiers, remarquable par la mixité sociale de ses habitants. Je suis persuadée qu'en culture, le métissage des publics et des récits passe par la réinvention de l'action culturelle. Plus que vendre des billets, je veux remettre le théâtre à l'endroit du partage et de la simplicité. Permettre à tous de profiter des plaisirs de la scène, à la fois à travers les ateliers et autres activités proposées par les compagnies et grâce à des ateliers de pratique artistique amateur dirigés par des professeurs de qualité à des tarifs raisonnables, indexés sur le quotient familial. Le thème de l'identité, abordé en effet par plusieurs des compagnies en résidence et par moi-même avec ma compagnie, n'a donc pas été fixé. Les sensibilités convergent naturellement vers ce sujet.

Vous avez tout de même initié une collaboration avec le label Jeunes Textes en liberté, qui porte de manière explicite cette question de l'identité.

Je ne peux pas rester indifférente au débat sur la diversité, qui agite en ce moment le milieu culturel. Créé par Penda Diouf et Anthony Thibault, le label Jeunes Textes en liberté se saisit du problème de la manière qui me semble la plus intelligente : en favorisant l'émergence d'auteurs dramatiques contemporains qui prennent en compte la représentativité de la diversité française, qu'ils en soient eux-mêmes issus ou non. Car cette question n'est pas la propriété des artistes issus de l'immigration. Les Plateaux sauvages vont offrir un ancrage au label, notamment à travers un festival annuel. Nous ouvrirons aussi une librairie tournée vers les écritures francophones émergentes.


Dans vos mises en scène, cette diversité est en partie liée à votre démarche d'action culturelle, dont des traces sont visibles dans les spectacles. Création et travail avec les habitants devront-ils être ainsi associés aux Plateaux sauvages ?

Dans Samo, a Tribute to Basquiat en effet, le travail que j'ai mené avec ma compagnie auprès de la population – adolescente en particulier – de Caen et d'Ivry-sur-Seine a beaucoup servi la pièce. Dans les vidéos réalisées par Benoît Lahoz, on retrouve des visages de jeunes gens rencontrés lors de ce travail de territoire. Et les ateliers d'écriture que Koffi Kwahulé a faits avec eux ont nourri son écriture. J'ai toujours fonctionné ainsi, notamment à Aubervilliers où j'ai grandi puis travaillé au théâtre de la Commune, mais chaque compagnie accueillie aux Plateaux sauvages procède comme elle veut. L'important étant qu'il y ait rencontre avec la population. Lou Wenzel fait en ce moment une initiation au théâtre avec les élèves de l'école des Amandiers. Sidney Ali Mehelleb, qui cherche à mêler sport et théâtre, a organisé un stage d'une semaine sur le thème du coup porté avec une association locale de karaté...


Votre projet aux Plateaux sauvages comme votre pratique de la mise en scène sont largement inspirés de votre connaissance de la ville d'Aubervilliers. Je garde en effet un souvenir enchanté de mon enfance dans la petite cité de la Maladrerie à Aubervilliers, à un moment où Jack Ralite faisait beaucoup pour les artistes, convaincu que leur présence dans la cité était nécessaire. Peintre, mon père recevait dans son atelier tous types de personnes. Et il peignait aussi bien sur de grandes toiles que sur les murs de la cité. Cette circulation de l'art, son ancrage dans le quotidien, sont restés mon idéal. L'utopie de la Maladrerie a pourtant pris fin... En effet. Pourtant, lorsque je suis retournée sur les lieux vingt ans après les avoir quittés, j'ai retrouvé sur les murs les fresques de mon père. Tout avait été tagué, sauf elles, comme si on avait voulu garder une trace du passé. De ce moment où tout semblait possible pour la culture, du moins dans mes souvenirs d'enfant. Je ne peux pas dire quel sera l'avenir des Plateaux sauvages : c'est un laboratoire qui connaîtra sans doute ses échecs, mais que mon équipe et moi allons développer au mieux afin que nos successeurs puissent s'appuyer sur une base solide tout en imaginant leur propre projet. 


 On retrouve votre intérêt pour la trace dans votre dernière création, à travers les graffitis du jeune Basquiat. La révolte de celui-ci est-elle, selon vous, semblable à celle qui anime la jeunesse avec laquelle vous travaillez ? 


 Je crois que, contrairement à Basquiat et à une bonne partie de la jeunesse de Soho à New York dans les années 70, les jeunes Français des cités n'ont pas les moyens de transcender leur révolte. Leur lucidité sur l'avenir les empêche souvent d'essayer de s'en sortir. Ce que je trouve formidable chez Basquiat, c'est qu'à un moment donné l'art aspire tout. J'aimerais que les Plateaux sauvages puissent offrir la possibilité de ce dépassement. C'est pourquoi le premier endroit que j'ai voulu investir dans l'ancien centre d'animation, c'est le sous-sol où j'ai ouvert un petit studio d'enregistrement. Les jeunes pourront venir y travailler en toute discrétion. 


 Est-ce pour cela que vous avez choisi de vous intéresser à la jeunesse du peintre, et non aux années 1986-1988 où il produit ses œuvres les plus célèbres ? 


 La manière dont l'artiste se crée à ce moment-là une identité sous le pseudonyme de « Samo » m'a passionnée. Sa détermination à devenir une star lui donne une énergie incroyable, qui se déploie sous des formes diverses, parmi lesquelles des inscriptions murales. Le terme de « graffitis » ne rend pas tout à fait compte de ces productions. Comme de nombreux artistes de l'époque, Jean-Michel Basquiat refusait d'ailleurs de l'utiliser : ils lui préféraient le substantif « Écritures ». Ce foisonnement m'a permis de sortir des codes théâtraux classiques. De créer un frottement entre danse, théâtre, jazz, naissance du hip-hop, arts plastiques et vidéo. Un projet indiscipliné plus que pluridisciplinaire. 


 Quelle place réservez-vous à la revendication d'une identité noire américaine par Basquiat ? 


 Basquiat n'a jamais versé dans une revendication de type Black Panthers. C'est aussi cela qui m'intéresse chez lui. Il a beau avoir peint les plus grandes figures noires américaines de l'époque et avoir été passionné par la musique de Charlie Parker, il a toujours sur faire preuve d'humour sur ces sujets. Le spectacle rend compte de cette distance qui donne une grande force politique à son œuvre. Mon père disait souvent « l'art doit être oblique ». Je suis d'accord avec lui. 


 * Les Plateaux sauvages, 5, rue des Plâtrières, 75020 Paris. Tél. : 01 40 31 26 35. www.lesplateauxsauvages.fr. Inauguration et lancement de la saison 2017-2018 en automne 2017. 


 ** SAMO, a Tribute to Basquiat, du 22 mars au 1er avril au théâtre des Quartiers d'Ivry-CDN du Val-de-Marne, Manufacture des Œillets / Le Lanterneau, 1 place Pierre-Gosnat, 94200 Ivry-sur-Seine. www.theatre-quartiers-ivry.com, également du 5 au 14 avril à La Loge à Paris, le 21 avril théâtre Victor Hugo à Bagneux et le 27 avril au Quai des arts à Argentan.

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March 22, 2017 6:49 AM
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Hortense Archambault : « Rassembler des gens qui ne se ressemblent pas »

Hortense Archambault : « Rassembler des gens qui ne se ressemblent pas » | Revue de presse théâtre | Scoop.it


Propos recueillis par Brigitte Salino dans Le Monde


La directrice de la MC93 de Bobigny, en Seine-Saint-Denis, estime que « la plus grosse barrière à la diversité est psychologique ».


Rencontrer, parler, innover : tel est le credo d’Hortense Archambault. Convaincue qu’il faut repenser le théâtre public, l’ancienne codirectrice du festival d’Avignon veut que le public se réapproprie, ou s’approprie, la MC93 de Bobigny, qui a essaimé dans la Seine Saint-Denis pendant les travaux de rénovation, et mené de nombreuses actions pour diversifier le public, en l’associant à la marche du théâtre. La réouverture aura lieu le 23 mai, avec Mahler Projekt d’Alain Platel.


Vous dirigez la MC93 depuis un an et demi. Qu’avez-vous appris sur la banlieue et la culture en banlieue ?

En tous cas, je ne peux pas dire que j’ai découvert la banlieue en arrivant à Bobigny. Je savais un peu vers quoi j’allais, notamment à travers deux passages professionnels : Les rencontres des cultures urbaines à La Villette, où pour la première fois j’ai rencontré une culture totalement éloignée de mon histoire esthétique et familiale, et le projet de la FabricA à Avignon, où il s’agissait de se rapprocher vraiment des personnes qui habitent un quartier. A Bobigny, il y a plutôt des choses qui se sont raffermies : d’abord, le fait qu’on y trouve une aspiration à la beauté, à la poésie . C’est une aspiration profonde, très partagée. On s’en rend compte dans les discussions : souvent, les gens ne parlent pas d’art ou de spectacle, mais de poésie.

L’autre chose frappante, c’est que la complexité qu’on éprouve tous par rapport à la réalité du monde se retrouve d’une façon très prégnante, notamment dans les quartiers dits populaires, parce que le monde entier est là. Les questions des codes, des cultures, des langues, de la religion, etc. traversent la banlieue, ainsi que tous les paradoxes de notre époque. En arrivant à Bobigny, j’avais l’intuition qu’un théâtre public a une place vraiment particulière à occuper dans cet espace-là.

Laquelle ?

Il faut repenser le théâtre public. Il est un peu déligitimé, aujourd’hui, parce que les gens ont l’impression qu’il a été confisqué par quelques-uns.

Par une élite ?

Je ne sais pas si c’est une élite, parce qu’on a un problème dans le spectacle : une partie des élites, intellectuelles, économiques et politiques, n’y vient plus. Tout se passe comme si le théâtre public n’était plus quelque chose de partageable, alors qu’il est un endroit de lien à nul autre pareil, je pense. Il y a dans la représentation théâtrale une puissance symbolique extrêmement forte, dont on a peut-être oublié de se dire qu’elle existe. Ce qui m’intéresse, c’est de réfléchir à cette question, et de faire que le théâtre public redevienne un endroit de rassemblement. Et cela passe par l’idée que les gens puissent se le réapproprier. Ou se l’approprier.

Lire aussi notre reportage de la série « La culture en Campagne » : Lever de rideau sur la diversité

Comment y parvenir?

Je pense qu’il y a un vrai travail à faire pour rouvrir concrètement nos théâtres, qui se sont plutôt fermés, ces dernières années, à cause de la diminution des crédits : ils ne sont plus ouverts dans la journée, les programmations sont plus courtes, et tout est concentré, pour des raisons d’efficacité, sur le moment de la représentation. Bien sûr, la représentation est au cœur de la vie du théâtre. Mais autour, avant et après, il y a plein de choses. Le message qu’il faut faire passer, c’est qu’il n’y a pas besoin de prérequis pour entrer dans un théâtre. Pour cela, il faut travailler sur des problèmes extrêmement concrets, l’accessibilité, le prix, la garde des enfants..., et réfléchir à des sujets très intéressants, comme la première fois où l’on voit du théâtre, la perception qu’on a d’une représentation. On constate souvent que les gens s’empêchent de penser par eux-mêmes. Ils disent qu’ils n’ont rien compris, et en fait, quand on parle avec eux, on voit qu’ils ont tout compris.

Avez-vous mis en place des actions particulières ?

On a lancé plein de projets, à travers ce qu’on a appelé « La fabrique d’expériences ». Cette idée d’expériences nous rend très libres, y compris dans notre relation à l’évaluation, et aux politiques, à qui on a demandé de nous accompagner, en sachant que certaines choses fonctionneraient, et d’autres pas. On a ainsi mis en place un comité de spectateurs-compagnons, c’est-à-dire des spectateurs particulièrement engagés dans la vie du théâtre, avec qui on discute des questions pratiques, mais pas seulement : je leur parle aussi de mes problématiques, on réfléchit ensemble. On a aussi mis en place des résidences d’artistes. C’est très important, la présence d’artistes, parce qu’avec eux on est au cœur du sujet, de la symbolique dont je parlais. Ces artistes travaillent avec des centres sociaux, des associations, des établissements scolaires... Et ils travaillent sur une longue durée, ce qui nous permet d’établir un partage, un langage commun, avec plein de gens différents.

Quelle est pour vous la plus grosse barrière à la diversité ?

Elle est psychologique. C’est celle énoncée par Pierre Bourdieu : on s’empêche d’avoir une pratique sociale parce qu’on pense qu’elle ne s’adresse pas à soi, et qu’on a intégré cet empêchement. Il faut trouver comment rompre cette barrière. La question n’est pas de se dire que tout le monde va aller au théâtre ; ce qui est scandaleux, c’est qu’on soit dans l’inégalité totale de l’autorisation. Moi, ce qui m’intéresse, c’est que les gens choisissent, justement. Qu’ils sachent pourquoi ils viennent, ou ne viennent pas. La rencontre avec le théâtre ne nous appartient pas. On doit essayer de donner les meilleures conditions pour qu’elle se fasse. Après, elle se fait, ou elle ne se fait pas.

Une chose me frappe, par exemple, en Seine Saint-Denis : il y a beaucoup de classes moyennes issues de la diversité. Elles ont des moyens, sortent au restaurant, vont voir des films ou écouter de la musique, mais ne viennent pas beaucoup dans nos salles. Pourquoi ? Parce qu’elles ne se sentent pas concernées ? L’enjeu est de les rencontrer, de parler, pour éventuellement modifier leur perception et leur image du théâtre. Je pense aussi qu’il faut agir à travers certains médias, certains réseaux sociaux, sur lesquels on n’est pas du tout présents, alors qu’on devrait l’être, parce que ce sont ces réseaux qui s’adressent à certaines communautés.

Toute la difficulté, par rapport à la diversité, consiste à s’adresser à différentes communautés sans aller vers le communautarisme. Pour moi, ce serait un échec total. Quand je parle de mon projet à Dieudonné Niangouna, il me dit : « Tu veux un lieu qui rassemble des gens qui ne se ressemblent pas. » Oui, c’est ça, et c’est un enjeu qui m’intéresse au-delà de la question du théâtre, en fait. Il faut travailler à ce rassemblement, et assumer le fait que le partage des codes va peut-être nous paraître bizarre.

Est-ce que cela passe par un renouvellement des œuvres?

Une chose est certaine : il y a des récits manquants, des gens dont on ne parle pas, et qu’on n’entend pas sur les scènes. Je pense aux classes populaires, à la colonisation, à la ruralité, par exemple. Il faut aussi veiller à ce que les codes dominants ne soient pas ultra-dominants. Si on propose d’autres spectacles, d’autres histoires, d’autres langues, on aura une multiplicité des entrées qui permettra, à terme, de diversifier les publics.

Et pour les acteurs, qu’envisagez-vous?

Il y a de plus en plus d’acteurs issus de la diversité, mais la plupart de nos scènes sont monochromes. Dans la programmation de cette année, j’ai fait attention à ce qu’il y ait la même diversité sur scène que dans le public : cela modifie le regard de tout le monde. J’assume cette démarche, qui est un peu volontariste, mais qui ne m’a demandé de faire aucune concession sur l’exigence artistique. On peut tout à fait être attentif à la diversité sans en faire un critère. Le jour où je me dirai : il faut tel quota de telle communauté, j’aurai échoué.

Le prix des places a beaucoup augmenté, ces dernières années, dans le théâtre public. C’est un frein à la fréquentation. Que proposez-vous, à Bobigny ?

Il n’y a plus d’abonnement. On le remplace par un laisser-passer illimité, qui s’inspire de celui pratiqué par certains cinémas. Les gens paient 7 euros par mois, et s’engagent sur dix mois. Cette somme est prélevée chaque mois, ce qui la rend très gérable, même pour les budgets contraints. Et elle permet de voir autant de spectacles que l’on veut. On envisage aussi de nouveaux horaires : le samedi 18 heures, et des représentations l’après-midi en semaine, pas pour les scolaires : beaucoup de gens sont sont libres l’après-midi, et pas le soir. Ca, c’est une proposition des spectateurs-compagnons.

La MC93 rouvrira le 23 mai, après rénovation. Est-ce que le désir d’ouverture dont vous parlez va se traduire dans l’architecture ?

Le projet de rénovation est très beau. Je peux d’autant plus le dire que ce n’est pas moi, mais mon prédécesseur, Patrick Sommier, qui l’a choisi. Un des points sur lesquels j’ai tout de suite agi, quand je suis arrivée, c’est de penser le hall d’entrée avec les usagers. Quels besoins avez-vous, avant et après les spectacles ? Quel mobilier voulez-vous ? Est-ce que vous avez envie d’être tranquilles, ou entourés ?...En tenant compte de toutes les questions, l’architecte a pensé le hall comme « un lieu de tous les possibles », selon son expression. Ce sera donc un lieu très vaste, qu’on va habiter progressivement. Un lieu de vie.

Brigitte Salino
Journaliste au Monde


Photo (c) Ilka Kramer

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March 20, 2017 9:12 AM
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Le théâtre civique de Marie-José Malis

Le théâtre civique de Marie-José Malis | Revue de presse théâtre | Scoop.it

À la tête du Centre dramatique national d’Aubervilliers, Marie-José Malis joue résolument la carte du service public, au service du public



Pièce d’actualité n° 8. Institution

Conception et mise en scène de Marie-José Malis

Théâtre de la Commune, Centre dramatique national d’Aubervilliers.

Un théâtre qui s’adresse à tous, à chacun, particulièrement à ceux qui habituellement s’en tiennent éloignés, n’y viennent jamais parce qu’ils ne se sentent pas concernés, sont trop impressionnés par ce temple de la culture qu’ils imaginent réservé à une élite de la culture dont ils ne font pas partie.

Un théâtre qui s’est donné comme mission de les attirer, au travers de spectacles, réunions, rencontres, pour réfléchir, agir, afin que, « eux et nous, ensemble, nous changions le monde »,

C’est le défi que s’est lancé Marie-José Malis, directrice du Théâtre de la Commune, à Aubervilliers, en lançant son cycle des « pièces d’actualité », il y a deux ans. Des pièces qui, comme leur titre l’indique, traitent du présent au quotidien, en concordance avec la population, ses préoccupations : chômage, pauvreté, exclusion, migration et émigration…


La première de ses pièces, 81 avenue Victor-Hugo, réunissait un groupe de migrants, clandestins sans papiers originaires d’Afrique, squattant un centre Pôle Emploi à l’abandon, situé à cette adresse – non dans le Paris chic du XVIe arrondissement, mais dans un quartier cosmopolite et populaire, aux bâtisses décrépites d’Aubervilliers. Une heure durant, ils témoignaient de leurs existences, racontaient leur terrible périple depuis leur pays d’origine, leur crainte permanente d’être renvoyés « chez eux ».

À cent lieues d’un simple théâtre documentaire, le spectacle relevait, d’une expérience inédite et bouleversante d’humanité, autant pour ces acteurs jouant leur propre rôle que pour le public.

Aujourd’hui, c’est un autre thème qu’aborde Marie-José Malis avec cette « huitième pièce d’actualité » : Institution. C’est-à-dire, le lieu de rassemblement des citoyens appelés à penser, s’organiser par eux-mêmes, résoudre « démocratiquement », « citoyennement » leurs problèmes, sans appel à une autorité suprême, à un quelconque pouvoir venu d’en haut. 


Un théâtre de la résistance

Sous une fresque de bataillon d’ouvriers en marche, le texte, délivré par un comédien et deux comédiennes (Pascal Batigne, Sylvia Etcheto et Sandrine Rommel), entrelace des extraits des Institutions républicaines de Saint-Just et du Catherine de Sienne, de l’Allemand Lenz, avec les prises de parole du Malien Ntji Coulibaly, appelant à la résistance, face aux ravages de la transformation en logements sociaux de l’un des plus anciens foyers parisiens – La Procession, dans le XV° arrondissement. Le tout, sans consultations, ni discussions préalables.

Sans souci non plus de ses conséquences sur le mode de vie d’une population à la tradition communautaire, soudainement désocialisée. Ainsi, habitués à se côtoyer dans une cuisine commune où chacun se montre solidaire, partage avec celui qui n’a rien, les résidents se retrouveront isolés, confinés à la solitude, dans des studios réduits. Du moins, ceux qui pourront payer un loyer nouveau… 


Une École citoyenne, L’École des Actes

Ce sont ces mêmes questionnements qui s’expriment dans la deuxième partie du spectacle, rassemblant, chaque soir, quarante à soixante élèves sur les 150 inscrits à l’« École des Actes ». Fondée par le Théâtre de la Commune au mois de novembre dernier, et présidée par le philosophe Alain Badiou, cette école est ouverte à tous, quels que soient l’âge et la nationalité – déscolarisés, étrangers ne parlant pas le français, marginaux, femmes seules…

Perché sur des gradins, le public est invité à suivre leurs travaux. Là encore, il y est question d’un centre, géré celui-là par la Croix-Rouge, où l’« hébergé » n’a pour seul droit que celui d’« être pris pour être ensuite rejeté ! », se plaint l’un. Où la seule alternative est de soumettre, traité en enfant irresponsable, ou se révolter et plier bagage. À moins de se lancer dans une grève de la faim.

Bientôt, entre les élèves, le débat s’engage : cette grève n’est-elle pas contre-productive ? Existe-t-il une solution autre, un autre recours ? La réponse sera trouvée, peut-être, lors de la représentation suivante… 


Didier Méreuze

19 h 30 les mardis, mercredis et jeudis ; 20 h 30 le vendredi ; 18 heures le samedi ; 16 heures, le dimanche. Jusqu’au 26 mars. Rens. : 01.48.33.16.16. www.lacommune-aubervilliers.fr

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March 8, 2017 8:21 AM
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Genève : Sandrine Kuster nommée à la tête du Théâtre Saint-Gervais

Genève : Sandrine Kuster nommée à la tête du Théâtre Saint-Gervais | Revue de presse théâtre | Scoop.it

La directrice du Théâtre de l'Arsenic succédera à Philippe Macasdar.
Sandrine Kuster



C'était l'une des nominations théâtrales les plus attendues de l'année. On sait désormais qui succédera à Philippe Macasdar à la direction du Théâtre de Saint-Gervais. Le Conseil de la Fondation pour les Arts de la Scène et les Expressions Culturelles Pluridisciplinaires a finalement désigné Sandrine Kuster, l'actuelle directrice de l'Arsenic, à Lausanne. Cette dernière s'est vu confier un mandat de quatre ans, renouvelable pour deux périodes maximales de trois ans. Elle présentera sa première saison à l'automne 2018 à Saint-Gervais.


Sandrine Kuster Image: Patrick Martin

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February 13, 2017 6:47 PM
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Concours de théâtre : les conseils de la directrice du Conservatoire de Paris

Concours de théâtre : les conseils de la directrice du Conservatoire de Paris | Revue de presse théâtre | Scoop.it


Claire Lasne-Darcueil à la tête du CNSAD depuis 2013 ( Photo : Frédéric Pickering)


Par Agathe Charnet pour son blog du Monde "L'Ecole du spectacle"



Ils sont 1331 candidats inscrits au premier tour du concours du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique (CNSAD) de Paris. Ils ne seront que trente, quinze garçons et quinze filles, à voir leurs noms affichés sur la liste des admis, au mois de mai 2017, à l’issue de trois épreuves éliminatoires.

La saison des concours a débuté pour les jeunes comédiens souhaitant intégrer des écoles supérieures d’art dramatique (lire notre billet de blog « Tout savoir sur les écoles supérieures d’art dramatique »). Cette année, le premier tour du CNSAD – l’établissement qui attire le plus grand nombre de candidats – se déroulera du 6 au 18 mars 2017.

Pour départager ces postulants âgés de 18 à 25 ans, un exercice imposé : la scène de concours. Au Conservatoire de Paris, elle ne dure jamais plus de trois minutes, au risque de se voir imposer un implacable « merci » en cas de dépassement du chronomètre.

Trente candidats par jour 

Quatre scènes sont à préparer pour le premier tour : une classique, une contemporaine, une en alexandrins et enfin un parcours libre, expression des talents du candidat. Claire Lasne-Darcueil, directrice du Conservatoire depuis 2013, a imposé une règle simple. Le candidat a le choix de la première scène qu’il souhaite passer durant l’épreuve, « ce qui lui permet de bien se concentrer », détaille la directrice. « Le jury demande ensuite à écouter une à trois scènes supplémentaires ou pose quelques questions au candidat sur son envie d’entrer à l’école ».

Ce jury, composé de cinq professionnels du monde du spectacle, voit défiler trente personnes par jour. Trente candidats accrochés au même rêve, présentant en cent quatre-vingt secondes le fruit de plusieurs mois, parfois même d’années, de travail acharné. « Nous avons le devoir de rester frais et ouverts à toutes les propositions » affirme Claire Lasne-Darcueil. Nous votons ensuite pour les candidats admis au deuxième tour. D’ailleurs, nous sommes en général assez unanimes sur les gens que nous souhaitons revoir. Il y a des évidences.»

Savoir « être au présent »

Ce qui est déterminant pour le jury, selon Claire Lasne-Darcueil, ce n’est pas tant le niveau technique que la capacité à être « au présent ».

« Tout se se passe dans l’instant. Tout d’un coup, on ne voit plus quelqu’un qui fait du théâtre mais on est face à quelqu’un qui est tout simplement là. »

Un fragile équilibre entre présence scénique et gestion du stress qui induit bien évidemment des rendez-vous manqués entre les acteurs en herbe et leurs auditeurs : « Les concours sont arbitraires, il suffit de voir le nombre de candidats pour le nombre d’admis. Et il y a des gens formidables qui ratent parce qu’ils ne sont pas vraiment là au moment de leur passage. Ce qui ne remet en aucun cas en question leur potentiel ou leur valeur. » 

Concernant le choix des scènes de concours, Claire Lasne-Darcueil n’a pas de préconisations particulières mais elle apprécie lorsque les jeunes comédiens lui font « découvrir des textes ou des auteurs » : « Des scènes trop passées par les candidats peuvent appauvrir l’écoute du jury. L’année dernière, on a entendu beaucoup de Wajdi Mouawad ou de Falk Richter. »  A bon entendeur… Mais, « il n’y a pas de recette » ajoute prestement Claire Lasne-Darcueil.

Changer la place des femmes sur scène

La directrice du CNSAD a néanmoins formulé une doléance, il y a deux ans de cela, lors d’une rencontre au Théâtre de la Colline questionnant les représentations de la femme sur scène.

« J’avais remarqué qu’en concours, les jeunes filles jouaient des scènes de viol, d’agression, de dégradation. Des situations caractéristiques du répertoire classique, écrit par des hommes, où la femme est malheureusement souvent montrée comme victime. C’était un spectacle assez inquiétant. »

Et Claire Lasne-Darcueil a été entendue : « en une année, ça a changé du tout au tout, c’est tout juste si les candidates ne mettaient pas des beignes à leurs partenaires ! Plus sérieusement, elles m’ont prise au mot de façon fine et humoristique. D’ailleurs, montrer la femme comme drôle, ça c’est quelque chose qui est moins habituel ! »

Enfin, lorsqu’il s’agit de donner des conseils aux candidats qui se présenteront 2 bis rue du conservatoire dans moins d’un mois, Claire Lasne-Darcueil met l’accent sur l’envie et le travail. « Je crois que quand on a un désir profond, il faut se sentir légitime, assure t-elle. On est légitimé par la force de son désir et par son travail, c’est le meilleur cocktail. » 


Les résultats du concours 2016, vidéo : https://youtu.be/YN1W_dYIt9k


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January 31, 2017 8:40 AM
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Marie-José Malis - Art et projet de société

L'art déclare #lartdeclare http://www.lartdeclare.fr Réalisation : Pierre Linguanotto

Marie José Malis est directrice de la Commune, CDN d'Aubervilliers.


Vidéo présentée par le SYNDEAC

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January 4, 2017 5:12 AM
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Nouvel écrin pour le théâtre d'Aubervilliers

Nouvel écrin pour le théâtre d'Aubervilliers | Revue de presse théâtre | Scoop.it
Par Laurence Albert dans Les Echos

Le mythique Centre dramatique national doit être rénové. Parmi les scénarios de l'appel d'offres, une idée détonne : mêler théâtre et accueil de migrants.

Un demi-siècle après leur naissance, les centres dramatiques nationaux (CDN) de banlieue, pionniers de la démocratisation culturelle, font peau neuve. Le théâtre de Sartrouville (Yvelines) s'est agrandi en 2014. Celui des Amandiers à Nanterre y songe sérieusement. Aubervilliers, premier CDN de banlieue, créé dans les années 1960, dans une salle des fêtes de la troisième République, saute à son tour le pas. La ville, propriétaire du théâtre de la Commune, vient de publier un appel d'offres pour lancer une étude préalable à la rénovation. « Le théâtre est obsolète. La scène est trop petite, sans dégagement, ce qui interdit certains types de spectacles, et sans accès handicapés. Et nous n'utilisons que 300 des 360 places en raison de la configuration étroite, ce qui est problématique pour conserver l'appellation CDN, et pour l'équilibre budgétaire » explique Thomas Adam, le directeur des services culturels de la ville. Crucial, d'autant que le théâtre est sur une ligne de crête étroite s'agissant de ses finances. La directrice, Marie-José Malis, enfonce le clou : « Il n'y a plus de saut qualitatif à espérer dans des lieux aussi vétustes. »

Trois scénarios sont sur la table : rénover et agrandir l'existant, y adjoindre une annexe dédiée aux spectacles, ou déployer, toujours sur deux sites - la salle et une annexe-, un projet d'ampleur réunissant théâtre, résidence d'artistes, et foyer d'accueil pour les migrants. Très attachée à cette salle des fêtes la municipalité souhaite la conserver. Mais la première hypothèse, celle d'une rénovation- extension classique, en récupérant les locaux de la médiathèque adjacente, a du plomb dans l'aile « Ce scénario paraît trop compliqué, trop coûteux. Il faut créer une annexe, soit sous la forme classique d'une black box, soit avec ce projet mixte », explique Marie-José Malis. Cette troisième piste, celle d'un lieu où se rencontreraient migrants, public du théâtre et jeunes artistes en résidence, recueille de nombreux suffrages. « Ce nouveau type de lieu, hospitalier, serait original sans être pharaonique. Il a du sens au regard ce que nous faisons déjà avec notre école pour les jeunes laissés-pour-compte et nos projets participatifs avec les habitants », explique la directrice.
Campus Condorcet

Pour renouer encore le fil entre les habitants et leur théâtre, le CDN n'exclut pas que cette annexe soit localisée dans l'un des deux quartiers en devenir autour du campus Condorcet ou vers le Fort d'Aubervilliers, devenu un haut lieu culturel entre la compagnie Zingaro et la résidence d'artistes des Laboratoires d'Aubervilliers. « Aubervilliers affirme l'importance de la culture et est en même temps une ville pauvre, dont une partie de la population est éloignée de la culture : il faut la reconquérir », assure Marie-José Malis, qui a déjà réussi, depuis 2013, à renouveler l'audience du CDN. « Notre génération est adepte d'un théâtre frugal, économe. Mais le CDN est l'un des derniers grands lieux culturel du département qui n'a pas été rénové », argue-t-elle. Reste à savoir si son propos aura l'oreille des grands investisseurs de la culture : Etat et collectivités locales, au premier rang desquelles la région...



Laurence Albert

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November 5, 2016 6:53 PM
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MARIE JOSE MALIS : LE CHOIX DES POSSIBLES

MARIE JOSE MALIS : LE CHOIX DES POSSIBLES | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Par Joëlle Gayot sur la page de son émission sur France Culture


Elle a fait le choix du possible. Le choix de l’affirmation et celui de l’émancipation. Elle dirige depuis janvier 2014 le théâtre de la Commune à Aubervilliers, en banlieue nord de Paris.

Là, elle mène un travail généreux et exigeant qui est un contrepoint résolu à toutes les formes de clichés qui pourraient tenter en nous l’envie d’aller au plus facile.


Avec obstination, elle met en scène les pièces de Luigi Pirandello, dramaturge italien nobélisé, plus connu pour son art de la mise en abime que pour sa confiance dans le théâtre comme lieu de mise à l’épreuve de la réalité et de sa transformation. Elle reprend jusqu’au 11 novembre «La volupté de l’honneur», un spectacle qu’elle a créé la saison passée. Une représentation qu’on quitte en état de trouble. Mais un trouble profitable qui lève en chaque spectateur une foule de questions.

Pirandello était fasciné, comme les grands esprits de son temps, par l’idée de l’homme nouveau et de la transformation du réel. Marie José Malis

La Volupté de l’Honneur de Luigi Pirandello mis en scène par Marie-José Malis au théâtre de la Commune à Aubervilliers du 3 Novembre au 11 Novembre 2016.

Intervenants
Marie José Malis : metteuse en scène et directrice du théâtre de la Commune à Aubervilliers


Photo :  Marie-José Malis • Crédits : Willy Vainqueur

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