Si chaque année les organisateurs font leur possible pour que la course soit belle, seuls les coureurs peuvent la rendre mémorable. L'an passé, Alberto Contador conquérait un troisième titre, mais son dauphin Andy Schleck fut plus menaçant que jamais. L'Espagnol sera-t-il capable de décrocher un quatrième Tour de France? Cette année encore, la concurrence sera vive...
On prend les mêmes et on recommence?
Alberto Contador est le plus sérieux prétendant à sa propre succession. Les décisions non rendues du tribunal arbitraire du sport, suite à son contrôle positif controversé sur le Tour de l’an dernier, jouent donc en sa faveur, et lui permettent de s’aligner au départ en Vendée. Le coureur espagnol a prouvé de nouveau qu’il était l’homme des grands tours en s’imposant sur le Giro d’Italie. Le Tour 2011 devrait sacrer un montagnard et le Madrilène a toujours prouvé qu’il était l’homme à battre dès que la route s’élève. Mais tiendra-t-il la longueur après avoir atteint un pic de forme dès le mois de mai?
Andy Schleck le dit, cette fois-ci, c’est son tour. Car cette année, fini le maillot blanc (il a dépassé la limite d’âge). S’il veut faire mieux qu'en 2009 et 2010, il n’a plus le choix, il doit décrocher le jaune. Mais, sur les routes de Suisse (du 11 au 19 juin), test ultime avant juillet, il n’a pas convaincu grand monde. Lâché rapidement dans les grandes ascensions et faiblard en contre-la-montre, il reste malgré tout un des favoris de la Grande Boucle. En 2010, il perd le Tour pour 39 secondes et démontre qu’il est l’un des plus forts, si ce n’est le meilleur, en montagne. Aujourd’hui, il revient avec une équipe entièrement à son service. Mais contrairement à Contador, le Luxembourgeois a de sérieux handicaps: sera-t-il capable de réaliser de nouveau une bonne performance sur le contre-la-montre, comme entre Bordeaux et Pauillac en 2010, en résistant étonnamment bien à l’Espagnol? Peut-il se détacher de l’influence de son frère, Fränk, qui maintient lui aussi de fortes ambitions? Et enfin, est-il capable de surmonter et de gérer les soucis mécaniques, sans que cela tourne au drame?
Des outsiders qui croient en leurs chances
Dans le peloton, personne n’a l’intention de laisser la victoire se disputer entre les Saxo Bank et les Leopard-Trek. Ivan Basso et Cadel Evans ont prévu de livrer bataille. Bien qu’ils ne soient plus de premières fraîcheurs (tous deux ont 34 ans), ils ont chacun atteint la seconde marche du podium à Paris et comptent bien démontrer qu’ils sont toujours dans le rythme. Dans la catégorie «s’est placé mais est-il capable de récidiver?», on trouve Bradley Wiggins, quatrième en 2009, où l’anglais révèle des qualités de grimpeurs. Cette année, il a prouvé qu’il fallait compter sur sa bonne forme, après avoir remporté le Dauphiné. Une interrogation plane tout de même sur son équipe: sera-t-elle capable de le porter au plus haut niveau?
Chez Rabobank, Robert Gesink est un vrai grimpeur avec des qualités de rouleur. Sixième l’an dernier, il revient pour faire mieux. En Belgique, les regards se tournent vers Jurgen Van den Broeck qui, à 28 ans, a enfin décroché sa première victoire chez les pros, en enlevant une étape du Dauphiné. S’il confirme son bon niveau, cela sera-t-il suffisant pour s’imposer sur les routes du Tour? Dans un autre registre, l’américain Levi Leipheimer (37 ans) n’a pas encore raccroché son vélo, et bien lui a pris car il vient de gagner le Tour de Suisse pour une poignée de secondes. Treizième l’an passé, le coureur de Radioshack est toujours dans l’allure. N’oublions pas Alexandre Vinokourov, qui courra son dernier Tour de France, et qui aura toute une équipe dédiée à sa cause. Et on peut compter sur son tempérament offensif pour semer le trouble dans l’esprit des favoris.
Qui peut prétendre au vert?
Une petite nouveauté vient pimenter la conquête du maillot vert pour cette nouvelle édition du Tour de France. Chaque étape sera le lieu d’un sprint intermédiaire (contre deux, les années précédentes) qui récompensera les quinze premiers coureurs. Cela devrait provoquer de vraies bagarres en milieu d’étape et élargir le terrain de jeu des sprinters. Cavendish se verrait bien ramener le maillot vert à Paris. Si c’est un habitué des victoires d’étapes (en moyenne cinq victoires par Tour de France), il manque le maillot à points au palmarès du sprinter de l’Île de Man. Face à l’Anglais, plusieurs courageux ont de l’ambition. Alessandro Petacchi est sans doute son plus sérieux adversaire. En effet, il est celui qui a battu Cavendish le plus grand nombre de fois.
Du côté de Tom Boonen, le coureur belge donne l’impression que ses belles années sont derrière lui. Mais même s’il gagne moins, il a toujours de la puissance à revendre dans les sprints. Chez Garmin-Cervélo, la fusion des deux anciennes équipes propose un duo intéressant: Thor Hushovd et Tyler Farrar. L’Américain est un concurrent à prendre au sérieux dans les sprints massifs et aura, en la personne du champion du monde, un allier de choix. Le Norvégien est, quant à lui, plus à l’aise dans les sprints difficiles, en montée. Ceci dit, le nouveau règlement devrait le satisfaire car Hushovd est capable d’aller chercher des points précieux sur des étapes accidentées. Enfin, l’équipe Sky, avec Ben Swift et Edvald Boasson Hagen, devrait se disputer les places parmi les meilleurs.
Et les Français dans tout ça?
L’année dernière, les routes du Tour de France furent propice à un festival tricolore. Avec six victoires d’étapes, le maillot de meilleur grimpeur et une place dans le Top 20, la récolte fut bonne. Les Français qui brillent sur les routes de juillet, on y croit encore cette année. Thomas Voeckler, même s’il a perdu son titre de champion de France, reste une de nos meilleures chances de victoire d’étape. Il a démontré, notamment lors du dernier Critérium du Dauphiné Libéré, qu’il était en grande forme et qu’il prenait plaisir à courir. Sylvain Chavanel arborera enfin la tunique bleu-blanc-rouge sur les routes de l’Hexagone. Si l’année dernière, il avait enlevé deux étapes, cette année, il se peut qu’il prétende à une place au classement général.
Du côté du maillot de meilleur grimpeur, Anthony Charteau rêverait bien de renouveler sa performance de l’an passé et de porter les pois sur les Champs-Elysées. Mais la bagarre entre Français pour le titre n’est pas impossible car David Moncoutié, déjà plusieurs fois lauréat du classement de la montagne sur la Vuelta (2008, 2009 et 2010) a bien l’intention de défendre ses chances. Jérôme Coppel, enfin, pourrait bien faire une place et s’accorder le titre de premier Français. Certains lui promettent le Top 10. Affaire à suivre donc…