Revue de presse théâtre
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LE SEUL BLOG THÉÂTRAL DANS LEQUEL L'AUTEUR N'A PAS ÉCRIT UNE SEULE LIGNE  :   L'actualité théâtrale, une sélection de critiques et d'articles parus dans la presse et les blogs. Théâtre, danse, cirque et rue aussi, politique culturelle, les nouvelles : décès, nominations, grèves et mouvements sociaux, polémiques, chantiers, ouvertures, créations et portraits d'artistes. Mis à jour quotidiennement.
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August 30, 2021 10:10 AM
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Roselyne Bachelot annonce des aides "sur-mesure" au secteur de la culture après la fin du "quoi qu'il en coûte"

Site de France Info, le 30 août 2021

 

Les aides seront attribuées selon la situation de chaque théâtre ou cinéma par exemple, selon la ministre de la Culture, qui reçoit des représentants du monde de la culture ce lundi 30 août après-midi

 

La ministre de la Culture Roselyne Bachelot a annoncé lundi 30 août une aide "sur-mesure" au secteur de la Culture pour affronter les conséquences de la crise sanitaire due au Covid-19 après la fin de l'aide "quoi qu'il en coûte". "Nous serons aux côtés des secteurs qui sont en difficulté, mais les choses sont très différentes selon les secteurs, donc on va faire du sur-mesure", a dit la ministre sur France-Info.

 

A 14h30, le monde de la culture, dont des représentants du cinéma et du spectacle vivant, seront reçus séparément par les ministres de l'économie Bruno Le Maire et des PME Alain Griset et de la Culture Roselyne Bachelot. Cette réunion suit l'annonce de mercredi 25 août par le ministre de l'Economie que le gouvernement mettait fin aux mesures de soutien aux entreprises "quoi qu'il en coûte". La ministre de la Culture a mentionné, sans précision, le maintien de "certaines mesures transversales" d'aide aux entreprises, tout en notant que le secteur de la culture est dans une "période de reprise".

Des aides différentes pour chaque théâtre ou cinéma

A la question de savoir si l'aide serait attribuée selon la situation de chaque théâtre ou cinéma, la ministre a répondu : "Exactement". Et pour cela les services de l'Etat vont "regarder le chiffre d'affaire et la fréquentation" des entreprises concernées, en utilisant comme périodes de référence "ce qui s'est passé avant l'instauration du pass sanitaire, et par rapport aux années sans crise sanitaire". Evoquant le secteur de la presse, qui a "rencontré de grandes difficultés", elle a annoncé un effort "pour un certain nombre d'acteurs et en particulier pour les photo-journalistes et photo-documentaristes".

 

Un programme de commande publique, doté de 5 millions d'euros et piloté par la Bibliothèque nationale de France (BnF), va en sélectionner 100 en novembre et 100 en mars 2022. Ils recevront une bourse de 22 000 euros pour réaliser une "radioscopie de la France de la crise sanitaire et après". Leurs travaux seront exposés ensuite "à la BnF et dans toute la France".

 

 

Légende photo : La ministre de la Culture Roselyne Bachelot à la fin du Conseil des Ministres le 25 août 2021.  (ARTHUR NICHOLAS ORCHARD / HANS LUCAS)

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May 6, 2021 11:53 AM
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En Suisse, une « ruée vers l’art » avec des jauges limitées

En Suisse, une « ruée vers l’art » avec des jauges limitées | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Par Louis Borel dans Le Monde  -  6 mai 2021

 

Légende photo : En Suisse, bars et restaurants peuvent recevoir du monde en terrasse depuis la mi-avril, comme ici à Zurich, le 20 avril. ARND WIEGMANN/REUTERS

 

Cinémas et salles de spectacle ont rouvert dans l’effervescence le 19 avril. Mais les acteurs du monde culturel protestent contre les restrictions à cinquante personnes.

 

« On n’a peut-être pas atteint le bout du tunnel, mais on commence à voir la lumière. » Si Edna Epelbaum admet une situation sanitaire encore fragile (avec 1 615 nouveaux cas de Covid-19 en moyenne ces sept derniers jours et 10 000 morts pour 8,6 millions d’habitants), la présidente de l’Association cinématographique suisse jubile. Depuis le déconfinement des lieux culturels, lundi 19 avril, le public helvétique se précipite dans les salles. « On s’était tous mis à voir des films en streaming, mais l’expérience du grand écran manquait aux spectateurs », témoigne Aude Vermeil, directrice de Fonction : Cinéma, une association professionnelle pour le cinéma indépendant. Même enthousiasme du côté des arts vivants : « Le public avait soif de culture. On a repris conscience de notre besoin de contact », glisse la secrétaire générale du Grand Théâtre de Genève, Carole Trousseau-Ballif.

Denis Maillefer, codirecteur de la Comédie de Genève : « C’est absurde et triste. On ne peut pas s’empêcher de comparer avec les bus ou les terrasses bondées »

Le protocole sanitaire imposé par le Conseil fédéral lors de cette réouverture reste toutefois étonnant. Avec une jauge d’accueil limitée à cinquante personnes, ou à un tiers pour les plus petites salles, les acteurs du secteur peinent à relancer leur activité. « C’est absurde et triste. On ne peut pas s’empêcher de comparer avec les bus ou les terrasses bondées », déplore Denis Maillefer, codirecteur de la Comédie de Genève, tandis que bars et restaurants peuvent recevoir du monde dehors depuis la mi-avril. « Cinquante personnes ne représentent rien en termes de recettes. Je ne peux évidemment pas amortir nos coûts », rappelle Christian Berner, directeur financier de l’Opéra de Zurich.

 

L’importante institution de 1 200 places a pourtant repris les représentations chaque soir depuis le 1er mai. Ballets, récitals, petits opéras : « On essaie de présenter des œuvres au public sans faire faillite parce qu’on préfère avoir cinquante personnes plutôt que zéro », explique Christian Berner. Ce qui signifie notamment renoncer aux guest artists, ces chanteurs lyriques étrangers habituellement invités à participer à un opéra, ou continuer à toucher le chômage partiel pour financer les nouvelles productions. Dans le même souci d’économie, d’autres salles de spectacle ont fait le choix de n’ouvrir que ponctuellement, comme la Comédie de Genève, qui donnait, mercredi 5 mai, No paraderan (Marco Berrettini) pour cinquante personnes dans sa grande salle de 500 sièges. « C’est plutôt une entrouverture qu’une réouverture, regrette Denis Maillefer. Mais c’est important pour notre public. »

Mesures sanitaires plus cohérentes

Vingt pour cent des cinémas ont préféré opter pour la fermeture en raison d’une « situation financière très fragile », explique Edna Epelbaum. L’interdiction de la vente de confiseries et de la privatisation des salles les coupe d’un tiers de leurs revenus. Malgré la reprise à l’affiche du multicésarisé Adieu les cons, d’Albert Dupontel, de Drunk, de Thomas Vinterberg, Oscar du meilleur film étranger, ou de la comédie populaire 30 jours max, de Tarek Boudali, le manque de blockbusters américains et de films familiaux les prive d’une certaine audience. Les cinémas attendent impatiemment l’arrivée sur le marché suisse du catalogue des distributeurs français dès le déconfinement du voisin hexagonal, mercredi 19 mai. Sans compter cette jauge de public contestée.

 

L’Union des théâtres suisses a saisi le groupe national de travail scientifique sur le Covid-19 (SN-STF) pour réclamer des mesures sanitaires plus cohérentes. « On prend les cinquante personnes comme une étape pour se réorganiser avant une réouverture plus importante début juin, estime Carole Trousseau-Ballif. Il faut des jauges plus dynamiques, en pourcentage, qui varient en fonction de la taille de la salle. »

Marc-Olivier Wahler, président du Musée d’art et d’histoire de Genève : « Le premier dimanche, on a enregistré 3 000 visiteurs dans la journée, contre 500 habituellement »

Les musées fonctionnent déjà avec ces consignes qui semblent davantage appropriées. Rouverts dès le 1er mars, ces lieux ont une capacité d’accueil relative, qui est passée récemment de 25 mètres carrés à 10 mètres carrés par visiteur. De quoi générer parfois une légère attente à l’entrée, sans toutefois empêcher les spectateurs d’accéder aux œuvres – d’autant que les touristes internationaux sont absents. « Le public est prêt à patienter, parce qu’une fois à l’intérieur il découvre l’exposition dans des conditions encore plus favorables. On constate une vraie ruée vers l’art », analyse Sylvie Wuhrmann, qui dirige la Fondation de l’Hermitage, à Lausanne.

 

Marc-Olivier Wahler, président du Musée d’art et d’histoire de Genève, s’étonne ainsi des impressionnantes files d’attente devant son établissement. « Le premier dimanche, on a enregistré 3 000 visiteurs dans la journée, contre 500 habituellement », triomphe-t-il. Ce qui n’a pas empêché d’autres petits musées de garder leurs portes closes, en raison notamment des coûts de protection sanitaire trop élevés, ou parce qu’ils sont gérés par des bénévoles à risque. « Les soucis sont plutôt devant nous », dit en soupirant Isabelle Raboud, présidente de l’Association des musées suisses. Le virus n’ayant pas terminé de frapper, reste à savoir comment la crise touchera à long terme le soutien des collectivités et des mécènes privés aux lieux culturels.

 

Louis Borel

 

 

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April 29, 2021 3:06 PM
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Lieux culturels occupés : une tentative de convergence

Lieux culturels occupés : une tentative de convergence | Revue de presse théâtre | Scoop.it

par Anne Diatkine dans Libération  publié le 28 avril 2021

 

 

Des délégations des 56 lieux culturels occupés de France se sont retrouvés à Villeurbanne pour unifier le mouvement. Pas gagné tant les demandes peuvent sembler disparates.

 

 
 

Ils sont venus, ils sont tous là, enfin une bonne partie : des délégations de cinquante-six lieux occupés ont traversé la France pour se retrouver au Théâtre National Populaire (TNP) dans le quartier des Gratte-Ciel à Villeurbanne, dont le tout nouveau directeur, Jean Bellorini, vient d’annoncer qu’il est en mesure de présenter un premier spectacle à partir de la mi-mai, signe que dans son théâtre, public, occupants, salariés, équipe artistique, sauront cohabiter.

 
 

Ils sont venus, ils étaient là et ils ont pu confronter ce qui les rassemble en dépit de leur disparité et de l’extrême hétérogénéité des types d’occupation. A quoi sert le raout ? «Il fallait unifier le mouvement. Comme la résistance après guerre, au moment du Conseil national de la résistance, a dû être unifiée», ose l’un des organisateurs. Quoi de commun en effet, entre les problèmes de Thomas, berger-charpentier, qui se présente comme «précaire volontaire», délégué d’un petit théâtre municipal dans l’Aude en Lozère et qui dit se battre pour «l’essentialisation de la culture» en milieu rural et ceux d’une infirmière psy en burn-out ? Entre ceux d’une délégation de la confédération paysanne et ceux d’Antoine, contrebassiste de jazz, dont l’activité s’est arrêtée depuis maintenant un an puisqu’elle se passe en bonne partie dans des cafés et des restaurants ? «Eh bien on a élargi la lutte. On n’est plus dans une revendication sectorielle», estime-t-il, lui qui a épluché jusqu’à la dernière virgule le rapport Gauron sur le sort des intermittents et la possible prolongation de l’année blanche.

 

Espérance des luttes

Arrêtons-nous un instant sur l’occupation à Auch, dont tous les occupants se présentent sous le prénom de Camille «afin de ne pas être mis en avant en tant qu’individu», même si le risque du vedettariat semble cependant une faible menace. Camille E. et Camille V., une fille et un garçon de moins de trente ans chacun, occupent le jour le Dôme de Gascogne et à partir de 19 heures et jusqu’au lendemain, le Ciné 32, cinéma d’art d’essai qu’ils ont transformé en «outil de travail» en organisant des projections «ciné-lutte». Camille E. et V. se targuent que la plupart des occupations a permis d’ouvrir les lieux culturels fermés, bien qu’on n’entre pas au Ciné 32 comme dans un moulin juste pour voir un film. L’occupation agrège l’association le Véloche et accompagne les manifestations contre la suppression de poste de CPE dans un lycée de la ville. Le champ est trop vaste pour ne pas s’y embourber ? «Non», pense Camille E., qui comme les autres Camille ne parle plus de «convergence des luttes»  mais   «d’espérance des luttes» : «On crée un lien social qui était rompu.»   Dialogue qui passe par un système particulier de prise de parole lors des AG où une femme alterne avec un homme «afin de ne pas reproduire les discriminations de genre qui existent dans la société.»    Là aussi, «l’occupation continuera tant que la réforme de l’assurance chômage ne sera pas abrogée». Camille E., elle, restera car elle a réussi l’exploit de trouver un emploi salarié dans l’un des lieux qu’elle occupe grâce au mouvement. Mine de rien, certaines occupations se rêvent en université populaire. Emma, étudiante en littérature espagnole, a poussé la porte de l’Opéra de Lyon parce qu’elle avait entendu parler d’un atelier de gravure mais des étudiants en philo organisent aussi des points philo, et elle y est depuis maintenant un mois.

 

Et les intermittents ?

Oui, bon, d’accord. Et les intermittents ? Comme Jacquemine, par exemple, ingénieure du son, venue en délégation du Quartz de Brest, qui a perdu «cinq cents euros par mois depuis un an» et qui compte bien réunir ses heures cet été notamment aux Francofolies de la Rochelle. C’est le bât qui blesse et le principal point d’âpreté : le mouvement quasi invisible, dont la principale revendication et dénominateur commun s’est fixée sur l’abrogation de l’assurance chômage, doit-il s’attaquer à la reprise des activités au risque de bloquer spectacles et festivals et de créer une scission entre équipes, public et chômeurs ? Ou doit-il changer de stratégie afin de provoquer un genre d’insurrection populaire digne de ce nom ? Jacquemine pense qu’elle sera, «comme un tiers des intermittents», obligée de se reconvertir si la réforme honnie passe. Pour autant, elle est «complètement opposée» à ce que le mouvement bloque les festivals cet été. Christophe Jaillet, acteur, encarté à la CGT spectacle, estime à l’opposé qu’il va falloir «péter les festivals» si la réforme n’est pas «complètement abrogée» et si la reprise «ne s’accompagne pas de droits sociaux». L’autre possibilité serait, toujours selon Jaillet, de se focaliser sur les gros spectacles avec des vedettes. Sur ce point essentiel et clivant, «aucune décision n’a été votée.» La suite au prochain épisode, fin mai, dans les lieux occupés d’Orléans.

 
 
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April 22, 2021 6:10 PM
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Joris Mathieu : "L'urgence de renouer avec une vie sociale"

Joris Mathieu : "L'urgence de renouer avec une vie sociale" | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Une lettre de Joris Mathieu aux spectateurs du Théâtre Nouvelle Génération de Lyon - Publié par Sceneweb le 22 avril 2021

 

Joris Mathieu, le directeur du Théâtre Nouvelle Génération – Centre dramatique national de Lyon vient d’être renouvelé par le Ministère de la Culture à la tête de son théâtre, fermé comme tous les autres théâtres de France. « Un  sentiment bien étrange » écrit-il dans une  lettre envoyée au public avec l’envie de parler du mouvement d’occupation qui a débuté début mars par l’Odéon et qui se poursuit « dans une relative indifférence générale » écrit le metteur en scène. 

 

 

Chères spectatrices, Chers spectateurs,

 

Il ne s’agit pas pour moi, aujourd’hui, de dresser la liste des spectacles annulés ou reportés pour les mois d’avril et de mai. Je crois malheureusement que plus personne n’attend ce type d’informations, que nous y sommes habitués, et même vous le communiquer n’aurait plus vraiment de sens.

 

Ne pas pouvoir aller au théâtre, au cinéma, au musée, au restaurant, au café, est devenu une triste norme. C’est dramatique, mais c’est ainsi.

 

Je vous écris aujourd’hui, pour vous parler de ce qu’il se passe, depuis maintenant plus d’un mois, à l’intérieur de nos théâtres, dans une relative indifférence générale.

 

Je ne veux pas parler des répétitions qui se poursuivent sur nos scènes, mais du mouvement d’occupation des lieux culturels en France (plus d’une centaine désormais) qui a commencé par l’emblématique théâtre de l’Odéon à Paris et s’est étendu progressivement à toutes les villes, petites, grandes, moyennes, en province.

 

Le Théâtre Nouvelle Génération n’est pas occupé.

Mais nul n’est besoin de l’être pour se sentir concerné par ce qui anime ce mouvement.

 

Je ne sais pas s’il est pertinent pour se faire entendre, dans ce contexte, d’occuper des théâtres fermés et ce n’est pas mon sujet. Mais je sais par contre qu’en temps normal, les théâtres sont des lieux de débats, de confrontation de point de vue, dont la fonction est aussi sociale et politique.

 

Et c’est pour cela que je vous écris aujourd’hui. Parce qu’il ne vous est pas possible de venir jusqu’à nous pour comprendre ce qu’il se passe, et que la moindre des choses est que cette parole puisse vous parvenir malgré tout.

 

Alors voilà…

Ces occupations passent relativement inaperçues dans les médias, au milieu des annonces de reconfinement, de fermetures d’écoles, des polémiques sur les réouvertures clandestines de restaurants, des commentaires sur les mutations multiples du virus et sur la campagne de vaccination, mais, ici, dans la Métropole de Lyon, ce sont le Théâtre National Populaire à Villeurbanne et l’Opéra de Lyon qui sont occupés par des artistes, des étudiant·e·s en arts, des précaires… Bref, peu importe en réalité le statut des uns et des autres, ce sont avant tout des individus, aux histoires et aux parcours différents, mobilisés au quotidien, engagés dans une démarche collective, pour faire entendre leur précarité, l’angoisse des jours actuels et futurs, des situations de vie devenues trop difficiles sans perspectives de travail. Faire entendre aussi leur colère contre des décisions politiques, certes difficiles à prendre mais souvent incompréhensibles, comme le choix de maintenir fermés tous les lieux de sociabilité, même lorsque les conditions sanitaires donnaient à penser qu’il était possible de les ouvrir partiellement avec des protocoles raisonnables, pour maintenir un service public minimal de la culture.

 

Bien sûr, ce mouvement raconte ainsi l’urgence de renouer avec une vie sociale, de rouvrir les lieux de culture, de reconduire des mesures sectorielles, comme « l’année blanche », pour prolonger les droits d’indemnisation des travailleurs de la culture. Mais ces occupations nous disent bien plus que cela. Elles soulignent l’obscénité qu’il y aurait à demander pour soi-même, pour un secteur particulier, des mesures de soutien, sans se préoccuper du sort des autres, des plus précaires encore. Cela dans un contexte où le gouvernement semble complètement sourd et aveugle, au point d’apporter en réponse – à l’extrême difficulté financière dans laquelle se trouve la jeunesse de notre pays, les intermittents du travail, etc… – un projet de réforme de l’assurance-chômage qui promet une diminution importante des indemnisations mensuelles d’un grand nombre d’ayants droits, selon l’évaluation réalisée par l’UNEDIC elle-même.

 

Ces occupations nous disent également à quel point de saturation nous sommes arrivés de ce régime de la concurrence individuelle permanente. La jeunesse, en particulier, réclame de sortir de cet environnement de la compétitivité constante, qui ne risque que de s’accroître si nous n’agissons pas maintenant. Nous savons que la crise économique post-covid les livrera davantage encore à la merci d’une vie où ils seront rémunérés à l’action, à la course, à la livraison, au projet, soumis à la tension d’un marché du travail toujours moins protecteur.

 

Alors voilà…

Oui, c’était un sentiment bien étrange, pour moi, d’apprendre il y a quelques semaines le renouvellement, par la Ministre de la Culture, de mon contrat à la direction du TNG jusqu’en décembre 2024, alors que la crise pandémique s’étire dans le temps, alors que le théâtre que je dirige a dû fermer ses portes depuis plus d’un an, et dans un contexte où un mouvement social prend racine dans les lieux culturels.

 

Plus étrange encore de devoir projeter quelles ambitions mes trois dernières années de contrat devront nourrir.

Je me réjouis bien sûr de la confiance qui m’est accordée, de la reconnaissance du travail accompli par toute l’équipe du théâtre – soucieuse au quotidien de faire vivre un projet artistique partagé avec la population – mais je ne peux que m’alerter de la gravité du contexte dans lequel cette annonce me parvient, et de ce que l’expérience menée à la direction du TNG m’a permis de dresser comme constat sur les difficultés dans lesquelles était déjà plongé le secteur culturel avant la pandémie.

 

Depuis ce poste que j’occupe depuis maintenant plus de six ans, je sens s’accroître, année après année, la fracture entre le sens fondamental des missions du service public de la culture, et le modèle économique dans lequel je dois les mettre en œuvre avec mon équipe. Je sens s’accentuer le décalage entre ce qui fonde notre engagement commun dans ces missions et l’écosystème dans lequel nous exerçons ce travail qui me semble trop souvent entrer en contradiction.

 

Nous ne désirons pas tant pouvoir faire plus que faire mieux.

Aussi, nous aurions tort de considérer les occupations des lieux culturels comme des épiphénomènes. Il serait cynique de n’y voir là que la mobilisation de quelques milliers de personnes, sans véritable pouvoir de se faire entendre, occupants qu’ils sont de lieux de toute façon déjà fermés au public. Il serait erroné et trop commode de considérer ces manifestations comme l’expression caricaturale de Français éternellement insatisfaits par les décisions de leur gouvernement.

 

Je crois que nous devons écouter ce que ces voix expriment, et d’une certaine manière, je l’affirme, leurs revendications entrent en résonance avec les paradoxes que je ressens à la direction d’un théâtre public.

Bien sûr, mon désir de rouvrir les portes du théâtre est grand. Et j’espère que le gouvernement donnera désormais, d’ici le 15 mai, comme annoncé par le président de la République, un calendrier de réouverture progressif (ce que nos syndicats et organisations professionnelles ont d’ailleurs déjà proposé depuis début janvier). Cette décision est urgente et essentielle pour la démocratie et je regrette que cette longue période de « distanciation sociale » et les arbitrages gouvernementaux aient pu laisser penser que les lieux culturels étaient des lieux plus dangereux que les centres commerciaux. Ce sont des marqueurs symboliques d’une époque, dont l’Histoire se souviendra.

Oui, je désire la réouverture des lieux culturels dans les plus brefs délais, mais comment pourrait se dérouler sereinement cette réouverture, sans que le gouvernement n’ait d’ici-là apporté des réponses claires aux revendications sociales légitimes des occupants qui sont actuellement dans ces lieux ?

Je considère que les événements que nous traversons doivent nous offrir l’occasion d’inventer de nouvelles perspectives de réponses à ce qui dysfonctionnait déjà avant cette crise.

Je ne peux évidemment que saluer les mesures d’urgence (exceptionnelles à l’échelle internationale) prises pour soutenir notre économie et les situations individuelles. Et le plan de relance du secteur culturel (notamment les moyens qui ont été distribués aux structures pour faire face à la crise) devrait permettre dans un premier temps, aux lieux comme le nôtre, d’agir, à leur échelle, pour soutenir avec solidarité l’activité des acteurs indépendants les plus fragilisés par cette crise.

Mais je crois surtout que nous devons sortir d’un court-termisme aussi nécessaire au présent, qu’infécond pour l’avenir. Et pour en sortir, il me semble important de reconnaître que la crise de confiance en nos institutions, est née d’une insuffisance réelle des réponses qu’elles apportent. Qu’elles n’arrivent plus à prendre suffisamment en considération l’ensemble des situations d’urgence dans lesquelles se trouvent un trop grand nombre de nos concitoyens, qui se sentent laissés pour compte des politiques publiques.

 

Pour ne parler que de ce que je connais, les lieux culturels sont allés au bout de ce qu’ils pouvaient faire en matière de redistribution des moyens dont ils disposent. En multipliant le nombre de spectacles présentés chaque année, en réduisant la durée des séries de représentations et des temps de résidence, en divisant les apports financiers en parts toujours plus nombreuses mais toujours plus réduites, les directions de ces lieux ont tenté d’apporter une réponse à la tension croissante du secteur, pour soutenir au mieux l’activité et l’emploi. Et cette réponse ne peut être qu’insatisfaisante. Nos moyens ne sont pas proportionnés pour soutenir l’ensemble de la population active du spectacle vivant.

 

Nous arrivons à un point de rupture.

Ainsi, combien de jeunes artistes sont formés chaque année dans les écoles d’art, pour ensuite se heurter à « un marché du travail » que nous savons être saturé ?

 

Au-delà de la question centrale des moyens de vie des individus, cette politique de la fragmentation du travail, du salariat et du sens de ce travail, a eu pour conséquence directe, depuis plusieurs décennies, de générer une moins grande efficience des missions d’intérêt général, qui réclament au contraire des temps longs de présence artistique, auprès des habitants sur les territoires.

 

En parallèle de cette incapacité à accompagner budgétairement l’augmentation constante de la population des travailleurs de la culture – qui aurait pu être une chance pour accentuer le projet essentiel de la démocratisation culturelle –, le déficit d’implication politique et de réinvestissements financiers a freiné l’élan originel de la décentralisation culturelle, qui n’a pas pu aller au bout de son déploiement ni s’adapter pleinement à la transformation profonde du paysage sociétal.

 

Si nous voulons reprendre le chemin de ce projet de société, les structures culturelles ne peuvent pas continuer à travailler dans un modèle dont les perspectives d’amélioration reposent si fortement sur les recettes d’exploitation des tournées, l’expansion de l’activité, la compétitivité, l’augmentation de la production et la surmultiplication des offres. Encore moins dans un contexte environnemental qui réclame au contraire une décroissance et une mobilité raisonnée.

 

À moyens constants et dans un contexte aggravé par la crise économique post-covid, il nous faudra inévitablement faire le choix d’aider moins d’acteurs culturels pour mieux soutenir la stabilité des emplois, la pertinence de leur travail et leur implantation durable. Tout comme aujourd’hui les soignants expriment l’injustice de devoir sélectionner, par manque de lits, les patients qui auront accès à des soins, nous augmenterons encore, par ces choix, la paupérisation des acteurs de notre secteur.

 

Ce que j’exprime ici, dans cette longue lettre, n’est pas porté par un sentiment de défiance vis-à-vis à du monde politique et de ses institutions. Bien au contraire, ma parole est motivée par une grande conviction dans le pouvoir d’action du service public, dans lequel je me sens pleinement engagé à mon modeste niveau, et dont je souhaite voir restaurer l’efficience pleine et entière. Je crois seulement qu’il est indispensable, dès maintenant, d’avoir un plan conséquent d’investissement intellectuel, financier et humain, pour que ce service public (l’école, la recherche, la culture, la santé…) sorte de plusieurs décennies où les gouvernements successifs ont fait le pari de modéliser son fonctionnement sur le secteur privé. Nous mesurons aujourd’hui les limites de cette doctrine et nous devons agir afin qu’il redevienne la colonne vertébrale d’une société porteuse de valeurs de solidarité, de justice sociale et de progrès. La politique publique doit réinvestir fortement ces missions essentielles, celles qui fondent sa légitimité, celles qui lui permettent, dans la société, d’être davantage producteur de sens, que pourvoyeur d’offres et de services.

 

C’est aujourd’hui, finalement, ce que j’espère voir se produire au moment de la reconduction de mon mandat de directeur du Centre dramatique national de Lyon. Qu’après cette crise qui nous frappe, nous arrivions à entrer dans une nouvelle ère de la politique culturelle, mieux émancipée des logiques de production et de diffusion, pour favoriser le soutien à l’emploi durable, les temps longs de présences artistiques, et pour mieux soutenir la création dans les territoires et auprès de tous les publics.

 

Joris Mathieu,
Directeur du Théâtre Nouvelle Génération – CDN de Lyon

 

 

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April 19, 2021 5:20 PM
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"La culture n’est pas qu’une distraction", affirme Muriel Mayette-Holtz, directrice du TNN

"La culture n’est pas qu’une distraction", affirme Muriel Mayette-Holtz, directrice du TNN | Revue de presse théâtre | Scoop.it
PAR ALICE PATALACCI dans Nice Matin Mis à jour le 15/04/2021 à 23:26 Publié le 15/04/2021 à 22:38

Muriel Mayette-Holtz est prête à ouvrir le Théâtre national de Nice pour le 15 mai. Eric Ottino

Arrivée en novembre 2019 à la direction du TNN, Muriel Mayette-Holtz doit faire face aux aléas de la crise sanitaire et, depuis mi-mars, à l’occupation du théâtre. Interview.

Çela fait un mois que le théâtre national de Nice (TNN) est occupé, comme plus de 90 autres en France. Une mobilisation que la directrice du théâtre, Muriel Mayette-Holtz, soutient, tout en préparant la saison estivale.

Pourquoi vous êtes-vous opposée à la première tentative d’occupation, le 12 mars ?

 
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Une occupation, ça s’organise. Nous avons donc pris le temps de l’organiser avec eux, sereinement, dès le lundi [le 15 mars, ndlr]. On essaie d’accompagner leurs besoins, tout en continuant à travailler. Il est important que cette occupation ne vienne pas perturber l’engagement des intermittents, de l’autre côté. Ce n’est pas ce qu’ils souhaitent, donc tout se passe bien.

Il y a donc toujours une activité au sein du théâtre ?

Le théâtre ne s’est jamais arrêté, et les gens ont beaucoup de mal à le comprendre. Un spectacle, ça prend des mois, avant d’arriver à maturité. Il y a une étude dramaturgique, une distribution, une construction, des répétitions… Tout ce travail, on ne l’a pas interrompu. Nous avons emmagasiné des spectacles qui n’attendent qu’une chose : le rendez-vous avec le public. On continue aussi à intervenir dans 26 lycées et collèges.

En ce moment, les acteurs de la troupe du TNN portent le projet Lettres à mon père, pour lequel les jeunes écrivent une lettre imaginaire à un père. On devait organiser un marathon des lettres, sous le kiosque de la Coulée verte, ce lundi, qui va être reporté. On a aussi accueilli beaucoup de compagnies régionales, pour leur faire profiter des locaux.

 

Il a aussi fallu reprendre la programmation...

On a reprogrammé, décalé des spectacles, on en a annulé d’autres, procédé à des remboursements… Pour refaire un programme la saison prochaine. Ce travail de l’ombre n’a jamais cessé.

 

Les administratifs et les artistes sont donc mobilisés ?

Dans tous les centres dramatiques nationaux, il y a une partie administrative et une partie technique. C’est rare qu’il y ait des troupes, mais je l’ai imposé, et ça nous a notamment permis d’être plus mobiles. En période Covid, on a pu faire de vraies propositions vidéos, que l’on peut voir sur notre site et notre page Youtube.

On a, à l’année, six comédiens, un pianiste-musicien, un metteur en scène-écrivain et moi. Sur certains projets, des artistes et techniciens peuvent se greffer. Entre mars et juin, j’avais envisagé 10 000 heures d’intermittents, pour compléter les acteurs qui sont ici. Ça permet aussi de donner des heures aux intermittents. C’est un des grands sujets de cette crise : que font les artistes et comment peuvent-ils vivre sans travailler ?

 

Des rendez-vous, cet été ?

L’an dernier, on a inventé les Contes d’apéro, un peu en urgence. Du fait de leur succès, on les reprendra cette année, du 1er juillet au 15 août. Tous les soirs, à 19 heures, il y aura un spectacle gratuit au kiosque. Je vais aussi monter L’école des mères, de Marivaux. On donnera quatre représentations au château, à partir du 19 août. Le maire a offert ces représentations aux vallées sinistrées. On partira donc en tournée fin août. On finira à Aspremont, Villefranche-sur-Mer et Beaulieu-sur-Mer.

 

Vous seriez prête à rouvrir le théâtre, si c’était possible ?

Quand on démarre dans une ville où on ne vous connaît pas, une première saison compte. Moi, je n’ai pas pu la dérouler. Si on peut rouvrir à partir du 15 mai, on est prêts. En plus des Contes d’apéro, on a rebasculé une programmation ambitieuse des spectacles qu’on n’a pas pu donner pendant cette saison, en juin-juillet. Et le maire nous a dit que, quoi qu’il arrive, on ouvrira le 15 septembre.

 

Fermer les théâtres n’était pas forcément une bonne idée ?

C’est normal d’être vigilant sur la sécurité sanitaire. Mais je trouve absolument incompréhensible que nos théâtres restent fermés, alors que nous sommes à même d’accueillir du public, et de le gérer. Mon métier, avant de faire de la programmation, c’est de recevoir. C’est ce qu’on a fait dans les rares périodes où on a été ouverts, sans déplorer le moindre cluster. Pourtant, nous allons dans les écoles, faire des spectacles sous des préaux ou dans des gymnases, avec une sécurité plus difficile à faire respecter que dans nos salles.

Il me semble qu’il aurait été bon de proposer une date où nous rouvrions tous les théâtres de France, dans les respects des règles. Rester fermés n’est, à mon avis, pas une bonne solution.

 

La culture semble peu abordée, dans les allocutions gouvernementales...

Je suis inquiète de ne pas assez entendre l’importance de la culture. On a l’impression que ce serait un plus. Or, c’est l’école de la vie. Il n’y a pas plus ancestral que ce rendez-vous d’êtres humains devant d’autres, pour raconter le monde. Sur un plateau, on peut tout dire, aborder tous les sujets, avec cette distance du faux, qui nous permet de magnifier les sujets et d’oser les regarder. Rien ne peut remplacer ça. C’est le début de la liberté.

 

Surtout en période de crise ?

C’est fondamental, car on est menacé par le repli sur soi-même. Il faut que l’on soit pédagogique, pour expliquer l’importance de la culture. Surtout quand on voit à quel point nos vies peuvent se renfermer. On se lève, on mange, on travaille, on mange, on dort… Et ça recommence. L’émotion, la beauté, l’ouverture, le partage manquent.

Le théâtre, c’est tout ça. C’est un rendez-vous quotidien nécessaire, et pas seulement une distraction.

Soutien "modéré" pour les occupants
 

Si Muriel Mayette Holtz dit soutenir les occupants du TNN, eux, sourient à l’évocation de cette idée. "Il y a des théâtres où le directeur a dormi avec les occupants, dans un sac de couchage. Ça, c’est du soutien !", pose Jean-Louis Ruf, membre du bureau régional du Syndicat français des artistes-interprètes (SFA-CGT).

Les occupants évoquent aussi des problèmes pour franchir les grilles et sortir du parvis du TNN, le week-end. "Pour se doucher, on doit prévenir le vigile, sortir, aller à l’entrée des artistes et monter à l’étage. Sans parler du robinet mis à disposition pour faire la vaisselle, d’où coule un faible jet ", ajoutent-ils.

Muriel Mayette-Holtz est prête à ouvrir le Théâtre national de Nice pour le 15 mai. Eric Ottino
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April 11, 2021 8:28 AM
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La réouverture mi-mai, les directeurs de théâtres ont du mal à y croire

La réouverture mi-mai, les directeurs de théâtres ont du mal à y croire | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Par Alexis Campion dans le JDD - 11 avril 2021

 

Six directeurs de théâtres publics et privés témoignent. Ils craignent de ne pas pouvoir rouvrir mi-mai. Stéphane Braunschweig, directeur de l'Odéon occupé, attend une annonce plus ferme de la part du gouvernement

 

Six directeurs de théâtres publics et privés témoignent. Ils craignent de ne pas pouvoir rouvrir mi-mai. Stéphane Braunschweig, directeur de l'Odéon occupé, attend une annonce plus ferme de la part du gouvernement

 

La ministre de la Culture est sortie de l'hôpital, le spectacle vivant ne respire toujours pas. Les annulations et reports se prolongent sans fin depuis plus d'un an. La précarisation des intermittents se précise. La motivation des occupants des théâtres se renforce. Dans ce contexte, alors que la pandémie sévit toujours en France, la reprise des théâtres promise pour la mi-mai par le Président lors de sa dernière allocution paraît de moins en moins probable et beaucoup de professionnels, traumatisés par le faux départ du 15 décembre dernier, n'osent plus y croire. La confiance s’érode.

Si Stéphane Braunschweig, directeur du théâtre de l'Odéon actuellement occupé, assure être toujours en contact direct avec le cabinet du ministère de la Culture, il attend toujours une annonce ferme afin de pouvoir organiser une réouverture qui ne saurait s’organiser du jour au lendemain. Bertrand Thamin, président du syndicat national du Théâtre Privé, n’a eu accès à aucune concertation depuis que la ministre est tombée malade. Tous se disent las des supputations qui n'ont toujours pas accouché d'un ordre de marche sanitaire précis afin qu'une reprise, même minorée, puisse se concrétiser officiellement. Pour Jean Bellorini, directeur du Théâtre National Populaire, il faut parer au plus urgent "redémarrer la machine à l'endroit des festivals de l’été à tout prix"...

 

 

"La reprise de mi-mai? Mais en quelle année?"

Bertrand Thamin, directeur du théâtre Montparnasse et président du syndicat national du Théâtre Privé

 

 

"La reprise de mi-mai? Mais en quelle année? Bien sûr on peut et on a intérêt à espérer une ouverture début juin mais je pense qu'il se passera la même chose que l'an dernier : quelques petites salles rouvriront et les plus grandes, dans leur immense majorité, attendront septembre pour des questions bêtement économiques, la reprise par étapes avec des jauges dégradées et un couvre-feu n'est pas viable. La même incertitude plane sur Avignon où les théâtres du off devront sans doute passer de 8 à 5 représentations par jour afin de respecter les consignes sanitaires, et tout cela est encore à l'étude..."

 

 

"Il faut une annonce certaine au moins quatre semaines avant"

Stéphane Braunschweig, directeur du théâtre de l'Odéon actuellement occupé

 

"La reprise mi-mai, bien sûr, j'ai envie d'y croire. Mais pour le faire, il faut une annonce certaine au moins quatre semaines avant afin que nous l'organisions avec un calendrier, une communication, des décors montés à temps, etc. Dans l'attente, le nouveau spectacle de Christophe Honoré (Le Ciel de Nantes) prévu en avril est reporté à 2022. Mi-mai, nous pourrions rouvrir avec La Ménagerie de Verre, d'Ivo Van Hove avec Isabelle Huppert, que nous n'avons pu jouer qu'une semaine l'an dernier.

 

En ce qui concerne les protocoles, on sait faire, l'ouverture de septembre dernier a montré que les flux étaient bien répartis

 

Isabelle Huppert sera par ailleurs en répétition chez nous en mai pour La Cerisaie, mise en scène Thiago Rodriguez, prévue en juillet à Avignon. D'autres spectacles sont prêts, Antoine et Cléopâtre de Célie Pauthe initialement prévu pour lever le rideau fin avril, et Berlin mon Garçon de Marie Ndiaye mis en scène par Stanislas Nordey, qui attend toujours sa première après plusieurs annulations. Mais est-ce que cela vaudra la peine de les jouer à peine deux ou trois semaines avec une jauge dégradée? Nous n'avons pas encore tranché.

En ce qui concerne les protocoles, on sait faire, l'ouverture de septembre dernier a montré que les flux étaient bien répartis. Si les occupants du théâtre sont toujours là mi-mai, il sera difficile pour nous de jouer. J'espère que si on arrive à rouvrir, ils entendront raison, après tout cette réouverture était leur première demande. Après, certains d'entre eux ont affirmé qu'ils empêcheraient la réouverture si on ne répondait pas à leurs revendications concernant l'assurance-chômage..."

 

"Nos maisons n'ont plus les moyens de faire semblant"

Jean Bellorini, directeur du TNP, Théâtre national populaire à Villeurbanne

 

"Mi-mai je n'y crois pas et je n'ai pas du tout envie de revivre ce qui est arrivé le 15 décembre. Nos maisons n'ont plus les moyens de faire semblant. La réalité des hôpitaux m'interdit de faire pression pour une réouverture à tout prix. On ne peut pas aller à l'encontre de ce qui est sanitairement raisonnable même si, évidemment, on a des spectacles prêts, notre détresse est évidente. On espère sauver en partie la Biennale de la Danse début juin. C'est à l'endroit des festivals d'été que la machine doit redémarrer à tout prix.

Nous, on s'adaptera tant que possible comme on le fait déjà en dépit du manque de clarté des plus hautes autorités, on jouera Onéguine, mais le spectacle du centenaire du TNP, prévu le 27 avril et encore une fois repoussé, on s'attend à le jouer en septembre. Je ne crois plus en rien mais on fera déborder notre saison sur début juillet si une reprise est possible d'ici là. L'occupation du TNP en ce moment, par 60 personnes, se passe bien, en bonne intelligence avec nos équipes qui travaillent. Mais cela révèle un paradoxe difficile à digérer : les autorités laissent faire, à noble titre car le théâtre c'est une agora, un lieu pour discuter, et pourtant, par principe elles n'acceptent pas des représentations à 60 spectateurs? Pourquoi, depuis octobre, ont-elles refusé toutes nos demandes officielles pour jouer, ne serait-ce que pour des scolaires et dans les plus strictes conditions sanitaires?"

 

"Je ne crois plus rien et je ne prépare rien"

Arthur Nauzyciel, directeur du TNB, théâtre National de Bretagne à Rennes

 

 

"Mi-mai? Mais je n'en sais rien, je ne crois plus rien et je ne prépare rien car rien n'est tranché. Si la réouverture est autorisée mi-mai, il faudrait une annonce mi-avril pour qu'elle se fasse dans de bonnes conditions. A ce stade, on ne fait plus de projets et entre nous, artistiquement, mon imaginaire est bloqué, empêché par les conditions actuelles. On est comme des avions au sol.

 

La reprise sera complexe et personne ne sait à quoi s'attendre

 

Mais on saura réagir une fois que le calendrier sera précisé, ainsi que les contraintes. Si on ne peut ouvrir qu'en juin, ce sera un temps très court en fin de saison, il faudrait imaginer quelque chose de fort et de réparateur pour retrouver le public, un projet spécifique qui réunirait les générations qui ont été si durement opposées par cette pandémie, et qui ne pourrait être formulé que si les conditions autorisées sont clarifiées.

La reprise sera complexe et personne ne sait à quoi s'attendre. Le respect des conditions sanitaires sera prioritaire. On ne peut pas généraliser l'impact d'une pandémie qui relève de l'intime. Beaucoup de gens sont meurtris, pas rassurés, ce ne sera pas forcément la fête. Nous avons une responsabilité envers le public, les plus fragiles, les artistes dont nous avons honorés tous les contrats malgré le crève-coeur des annulations."

 

"Je ne prévois rien avant septembre"

Jean Robert-Charrier, directeur du théâtre de la Porte Saint-Martin

 

 

"Je ne crois pas une seconde à une reprise mi-mai, je ne prévois rien avant septembre. Ce que j'attends, c'est une date précise avec une jauge qui ne serait pas trop dégradée, bref je n'attends rien sinon des propos assurés... Et non des supputations! A cela s'ajoute un calendrier de reprise très compliqué à organiser quand les disponibilités des comédiens appelés à tourner pour des films changent tout le temps. Et entre nous, j'ai en assez de parler de ça."

 

"Je ne m'attends à rien de très concret avant juin"

Sébastien Azzopardi, directeur de deux grands théâtres privés parisiens, le théâtre Palais-Royal et le théâtre Michel

 

 

"A titre personnel je ne crois pas à une reprise mi-mai. Le Président a bien dit que cette reprise serait progressive et favoriserait les représentations en extérieur et les petites jauges. De l'expérience vécue l'an passé, je présume qu'on rouvrira d'abord certains restaurants et bars qui peuvent accueillir en extérieur.

Je ne m'attends à rien de très concret avant juin. Pour nous, théâtres privés, c'est paradoxal de tenter la réouverture en fin de saison, juste avant la fermeture d'été. De plus, faudra-t-il compter sur un couvre-feu mortifère pour nous qui ne sommes pas des cinémas? La proposition de réouverture en trois étapes, avec des jauges progressives à 35% puis à 65% et enfin 100% sera difficilement viable sans dédommagement.

 

 

Avec toutes ces questions en suspens, le plus simple est de miser sur une réouverture en septembre

 

 

Avec toutes ces questions en suspens, le plus simple est de miser sur une réouverture en septembre. Certains comédiens programmés en juin nous ont appelé car ils ont des propositions de tournage pour juin. Ces engagements étant plus sûrs pour eux que notre épais brouillard, on les a libérés...

Notre véritable horizon, c'est septembre au théâtre du Palais-Royal avec deux reprises : Edmond et La Machine de Turing. Reste beaucoup de questions de planning. Concernant les protocoles d'accueil des publics, je pense que nous maîtrisons plutôt bien ces sujets car si l'aération des lieux reste une interrogation, c'est vrai, diverses études ont bien montré que la maîtrise des flux et des gestes barrières est plus avérée dans les théâtres que dans les grands magasins ou dans les gares, où les gens bougent dans tous les sens, les flux sont chaotiques."

 

 

"Nous avons tout déprogrammé jusque fin juin pour envisager une reprise en septembre"

Elisabeth Bouchaud, directrice du théâtre de La Reine Blanche à Paris et à Avignon

 

 

"La reprise mi-mai ou juin je n'y crois pas du tout. Nous avons tout déprogrammé jusque fin juin pour envisager une reprise en septembre. Comment rouvrir en fin de saison avec une jauge diminuée et alors qu'on ne connaît pas les conditions de dédommagement? Nous avions prévu Cerebrum, un seul en scène d'Yvain Juillard, l'acteur qui a incarné Louis XVI dans Fin de Louis, le fameux spectacle de Joël Pommerat. Ce serait absurde de ne le jouer trois semaines en jauge dégradée sans même pouvoir communiquer en amont. En septembre et octobre dernier, pendant le mois et demi de réouverture, ces conditions étaient bonnes mais aucune garantie ne nous a été donnée pour la suite alors qu'on sait qu'en juin, il faudrait jouer avec une jauge à 35%. En ce qui concerne l'aération, je sais que la Reine Blanche à Paris fonctionne sur de l'air extrait et non brassé. Je me dis que ça ne peut pas être mauvais mais, à ce jour, personne ne m'a dit à quoi il faut se conformer. Pareil pour les pauses entre chaque représentation, quel temps faudra-t-il garantir pour aérer, désinfecter? 45 minutes? 1 heure?

 

Notre horizon maintenant, c'est le Off d'Avignon. S'il devait être encore annulé, je vais prendre un sale coup dans la tronche ! Nous avons programmé six spectacles dont quatre produits par nous. Mais on attend pour communiquer, on espère que le SNES précisera la semaine prochaine les conditions d'accueil des publics.. Tout cela est encore bien flou, on sait qu'on doit nommer deux représentants COVID qui, dans chaque théâtre, contrôleront les protocoles sanitaires. Très bien, mais ils doivent être formés. Comment? Quand? Bref, on est dans les starting-block, c'est sûr, mais si on nous donne des devoirs sanitaires sans préciser la marche à suivre...

 

Lors du premier confinement, j'avais l'impression d'être dans un mauvais remake de Pompéi. Et bien sûr je suis jalouse de l'Espagne, qui a su expérimenter et préserver une part de sa vie culturelle, je redoute le virus quand je monte dans un métro alors que je me sens en sécurité dans le théâtre. Mais je conçois aussi que c'est très difficile de prendre des décisions en ce moment. Je n'aimerais pas être à leur place. Si pénible soit la situation, on se sent moins à terre qu'il y a tout juste un an car on a malgré tout pu accueillir les répétitions de compagnies subventionnées. Bien que diminuée, la vie a continué, les techniciens ont pu être payés. De mon côté j'écris une comédie musicale sur la science que j'espère monter en 2023, 2024? (rires..)"

 

 

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April 6, 2021 11:45 AM
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La détresse rageuse des jeunes artistes mise à nu 

La détresse rageuse des jeunes artistes mise à nu  | Revue de presse théâtre | Scoop.it

 Article de Jean-Pierre Thibaudat dans son blog Balagan  le 5 avril 2021

 

Que faire ? Que faire devant le silence, l’indifférence ? Que faire face à l’absence de toute réponse aux questions inlassablement posées ? Que faire avec pour tout avenir la négation de toute perspective ? Ce lundi de « fêtes », des jeunes artistes du spectacle ont mis à nu leur détresse et leur rage dans sept lieux symboliques de la capitale.

 

 Jeunesse piétinée, culture sacrifiée ». Le titre de leur communiqué de presse reprenait un slogan que l’on retrouve au fronton de la centaine de lieux culturels occupés en France. Un mouvement parti de l’Odéon et qui s’est répandu à toute vitesse partout en France tel un feu non domesticable.

 

Voici le texte du communiqué de ce groupe de jeunes artistes :

« Nous ne pouvons plus travailler ni rêver. Nous avons 22 ans, 25 ans, 19 ans, 27, 18, 21 et 26 ans. Nous avons des rêves, des objectifs, des promesses. Nous devons grandir, encore, chercher, construire, ensemble et dans toutes les langues, le monde de demain. La pandémie nous a coupé nos membres. A nous, jeunesse amputée, mutilée, vous avez répondu “courage”, “espoir”, “patience”.

Alors nous nous sommes armée-e-s de patience et nous avons accepté, d’annuler, d’arrêter, d’interrompre. Mais jusqu’à quand durera cette indifférence face à nos vies et à nos espoirs ?

Quel monde nous attend si l’art ne nous permet plus d’échanger, de se retrouver ? A quoi va ressembler un monde sans fiction ?

 

 

Nous vous imposons nos corps aujourd’hui parce que c’est la seule manière qu’on nous écoute. C’est qu’ils ne sont plus que des feuilles de papier. Nous avons vingt ans. Nous sommes vos suicidé.e.s. Nous ne laisserons plus personne nous dire que c’est le plus bel âge de la vie. »

Alors, avec aux lèvres cette phrase rageuse de Paul Nizan, ils ont déboulé sur la place de la République sur le coup de midi ce lundi de Pâques. Elles et ils se sont déployé.e.s, en respectant les distances sanitaires, le haut de leur corps nu devenu page où écrire « jeunesse piétinée, culture sacrifiée », « je vais mourir, mais pas sur scène » et autres cris de rage et de détresse.

Après quoi le groupe a repris le métro pour manifester dans d’autres lieux symboliques de la capitale : Bastille, Châtelet, le Sacré Cœur, Barbès et, pour finir, la basilique de Saint-Denis.

En ce jour de Pâques, ils se devaient de sonner les cloches à ceux qui restent sourds.

 

 
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April 3, 2021 6:53 PM
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Occupation des théâtres et autres lieux d’art : de la scène à l’agora politique -  Publié dans L'Insatiable 

Occupation des théâtres et autres lieux d’art : de la scène à l’agora politique -  Publié dans L'Insatiable  | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Par Clara Hubert, Victoria Tran, Héloïse Humbert pour L'Insatiable - Le 3 avril 2021

 

Depuis le 4 mars 2021 la place de l’Odéon est le théâtre d’une occupation politique qui s’inscrit dans le sillage de nombreuses manifestations n’ayant encore jamais permis aux travailleuses et travailleurs du secteur culturel d’obtenir gain de cause. Mais cette fois, le mouvement va plus loin. Contrairement à l’occupation de la Philharmonie en février 2021 à l’occasion des « Défaites de la musique », qui était restée ponctuelle, le mouvement d’occupation des théâtres ne cesse de s’amplifier et de se solidariser avec d’autres. Depuis, plus d’une centaine de lieux de cultures sont entrés en lutte — et cette lutte concerne tous les précaires, au-delà même du régime dit de l’intermittence — , la Colline à Paris, puis le Théâtre National de Strasbourg (deux autres théâtres nationaux), suivis d’un très grand nombre de lieux culturels dans toute la France. Un mouvement qui ne cesse de s’élargir en donnant la parole à d’autres secteurs d’activité et aux précaires en général. Et affirme ainsi que ce qu’on nomme la culture est non seulement une chose essentielle, mais bel et bien centrale et motrice dans la vie des humains.

 

Les occupant.e.s de l’Odéon organisent chaque jour à 14h une agora publique, au cours de laquelle sont invitées à parler toutes les personnes qui souhaitent s’exprimer sur la situation du monde professionnel de la culture, mais plus encore, sur les modes d’actions politiques permettant à tou.te.s de lutter pour les droits sociaux des travailleuses et travailleurs précaires [voir l’encadré sur les revendications des occupant.e.s en fin d’article]. Cette agora quotidienne est précédée de performances artistiques qui permettent à la fois de soutenir les occupant.e.s et de mobiliser le public sur la place de l’Odéon. Nous nous y avons rencontré divers membres de ce mouvement révolté et joyeux.

 

Le théâtre, lieu d’attroupement démocratique
 
Robin Renucci, directeur des Tréteaux de France et président de l’association des centres dramatiques nationaux, le rappelle, le théâtre est un art qui rassemble et unit : « un rituel laïque ». Il répète que nous sommes aujourd’hui privé.e.s de ces lieux qui ont été le ferment de la démocratie, « endroit de lien social, de fraternité et de transmissions », alors même « qu’aucun foyer épidémique n’a été déclaré dans un public au théâtre ». Malgré les protocoles pensés pour assurer la possibilité d’une réouverture des théâtres en toute sécurité, il déplore que « le modèle intitulé " résilience ", sur la table de la ministre et du Premier Ministre depuis janvier, sous forme d’un tableau de reprise d’activité en fonction des différents stades de l’épidémie, soit resté lettre morte ».

 

Ses attentes vis-à-vis du gouvernement s’inscrivent dans la continuité des revendications des occupant.e.s : « nous voulons la ré-ouverture des théâtres, avec des conditions fixées par nos organismes syndicaux. Nous voulons alerter sur les conditions de la reprise : il ne s’agit pas seulement d’ouvrir, il faut encore savoir dans quelles conditions, dans un contexte où beaucoup n’auront pas pu exercer leur activité professionnelle. C’est pourquoi d’un point de vue technique, nous appuyons la demande de prorogation des droits de l’intermittence et l’augmentation de la durée de l’année blanche — pour le moment, elle est en vigueur jusqu’au mois d’août. Nous trouvons indécent de remettre en route une réforme de l’assurance chômage dans ce contexte de fragilité : c’est ce que nous avons exprimé il y a quelques jours. Nous demandons la ré-ouverture dans les plus brefs délais des lieux culturels sur la base du protocole de reprise des activités graduées, et cette ouverture doit être assortie de la prorogation des droits des intermittents et des crédits. Les professionnels de notre secteur sont menacés par une précarité extrême ».  

 

Il poursuit : « 20 millions d’euros ont été annoncés par le Premier Ministre, en réponse à la pression que nous exerçons auprès de la ministre. Mais ces mesures ne suffisent pas à répondre aux attentes. Certes, un accompagnement financier est nécessaire, mais il faut aussi un accompagnement prioritaire et essentiel de la jeunesse, de la nouvelle génération d’artistes coupée en plein envol, sans visibilité sur l’avenir. Que vont devenir ces jeunes gens ? Il faut que le gouvernement suspende tout projet de reforme des conditions d’accès à l’assurance chômage. C’est une nécessité dans un contexte où les plus fragilisés sont déjà victimes de la crise économique et sanitaire que l’on traverse. On ne répond pas seulement avec de l’argent au sentiment d’être méprisé. Il faut évidemment soutenir par des plans de relance financiers, mais les revendications que je viens de nommer ne sont pas que financières, elles sont aussi d’ordre organisationnel et politique. Reconduire cette année blanche de l’intermittence est une décision politique. »

 

Renucci insiste sur le fait que « mai 68 a commencé à l’Odéon, le signe de l’Odéon occupé rappelle cette autre mobilisation ». Depuis que nous l’avons rencontré, le mouvement d’occupation des théâtres n’a cessé de prendre de l’ampleur, permettant la mise en avant, sous une forme nouvelle, de problématiques politiques dans l’espace public et la mise en lumière de situations jusqu’alors négligées.

 

La position de Samuel Churin, comédien et membre de la Coordination des Intermittents et Précaires est explicite à cet égard :


Extrait d’un communiqué paru dans l’hebdomadaire Politis

[...]À mes amis qui réduisent l’occupation des 100 lieux de spectacle à une demande de réouverture, je dis : vous êtes hors-sujet.
À mes amis qui n’ont pas lu les banderoles « Retrait de la réforme d’assurance chômage » présentes partout, je dis : informez-vous et arrêtez de vomir sur cette magnifique mobilisation pour de mauvaises raisons.
À mes amis du monde de la culture qui n’ont pas compris que les lieux étaient occupés aussi par des intermittents hors spectacle, des chômeurs, des auteurs, des étudiants, je dis : allez occuper avec eux et vous comprendrez peut-être mieux les enjeux de cette lutte.
À mes amis qui pensent qu’il vaut mieux occuper ailleurs, je dis : les chômeurs n’ont pas de lieux, les théâtres appartiennent à tous, les débats passionnants lors des agoras organisées partout doivent s’amplifier. Nous avons cette occasion unique de faire le lien avec toutes celles et ceux qui vivent de contrats courts ou qui font partie de la longue liste des 10 millions de pauvres. C’est là que ça se passe, ici et maintenant. Pourquoi retourner dans l’ombre et s’isoler ?
À mes amis qui ne comprennent toujours pas ou ne veulent pas entendre, je dis : vous êtes hors-sujet, hors-sol, hors tout, n’en dégoutez pas les autres.
À mes amis occupants, je dis : continuons de mettre la lumière sur celles et ceux qui n’ont plus rien, sur les précaires réunis enfin dans un immense soulèvement collectif, amplifions, renforçons les occupations, occupons de nouveaux lieux, continuons à construire ce mouvement avec tous ceux qui ne sont jamais entrés dans ces théâtres.
Alors nous pourrons penser ensemble un projet qui ne laisse personne de côté, qui mette l’être humain au centre de toutes nos préoccupations, qui mette le bien commun au-dessus de tout.
Alors nous pourrons de nouveau jouer de grands mythes, de grandes banalités, ou de belles réalités comme l’histoire d’un ouvrier communiste nommé Croizat qui inventa les droits attachés à la personne et la sécurité sociale, prolongement du Conseil National de la Résistance.

Samuel Churin

 

 

La situation des compagnies

Johanne Gili est cofondatrice de La Fine Compagnie, un collectif artistique transdisciplinaire qui a performé le 17 mars devant l’Odéon, en soutien aux occupant.e.s du théâtre. « Nous avons été immédiatement sympathisants des occupations, notamment de l’occupation de l’Odéon — qui a été la première —, on connait des gens dedans. La performance était un soutien aux occupant.e.s, permettant d’animer leur quotidien et de rassembler du monde sur la place avant le débat publique organisé en début d’après-midi. Pour tout le monde, ça permet de se donner un peu de baume au cœur — que ce soit nous qui performions ou regardions, selon les moments. Comme nous travaillons sur la mise en forme de questions politiques, cette tribune tombait bien. La performance théâtrale et musicale a été préparée au pied levé pour l’occasion : c’est une performance issue d’un spectacle en création, Luciole, sur lequel on travaille depuis plus d’un an. Dès qu’on franchit une étape dans la création, on a tendance à aller jouer quelque part, à se montrer dans différents cadres »

Si la situation financière des compagnies qui travaillent en salle est désastreuse, celle de la Fine Compagnie reste, pour Johanne, relativement privilégiée : « On ne faisait déjà presque plus de théâtre en salle : depuis quelques années nous sommes dans la catégorie "théâtre indépendant", qui fonctionne surtout avec des subventions publiques. Économiquement on tient le coup, tous les endroits un peu interstitiels — les écoles, les médiathèques, les centres sociaux, la rue — sont encore accessibles, ce qui fait qu’on se montre assez régulièrement malgré tout. Mais on n’est pas représentatifs de tout le secteur : il y a des gens pour qui c’est beaucoup plus dur. Pour ceux qui n’avaient pas encore accès à l’intermittence, c’est terrible, parce qu’ils n’avaient pas l’indemnisation chômage. Il y a aussi des gens très isolés... Nous, on est en résidence dans une friche culturelle — la Villa Mais d’Ici —, on baigne dans une sociabilité qui nous permet de bonnes conditions de travail ».

 

Malgré ce statut temporairement privilégié, le travail que la compagnie parvient à mener reste impacté par la crise sanitaire et sa gestion politique : « c’est une espèce de folie, tout s’annule, tout se reporte, tout se décale... On est dans un jeu perpétuel qui consiste à faire et défaire. Caler des dates, ça n’a plus de sens [rires]. Ça nous rend un peu zinzin. On se demande ce que ça va donner en termes de subventions publiques dans les temps à venir, on attend le double effet. Même si on n’est pas les plus impactés tout de suite, on se dit que ça va nous revenir, avec peut-être des grosses baisses de financements, et d’énormes embouteillages. Cette crise renforce mon idée que ce travail, qui lie notre volonté de création au contact réel avec des gens qui viennent de partout, est ce qui nous convient le mieux. D’ailleurs, c’est ça qui nous laisse un peu de liberté, à l’heure actuelle. C’est ça qui a du sens, plutôt que d’être dans des théâtres aux structures pyramidales, qui ne s’adressent qu’à une toute petite portion de la population en perdant toute capacité de subversion ». 

 

 Occupons, occupons la place de l’Odéon... »   

Jean-Charles, scénariste, et Franck, street reporter, sont deux occupants qui ont accepté d’échanger avec nous au sujet de la façon dont la mobilisation s’est mise en place : « naturellement, et avec colère ». Le quatre mars, au cours d’une manifestation organisée par le secteur culturel, un petit groupe s’est détaché de la manifestation partant de la place de la République. « Au cours de cette manifestation assez festive, des artistes appelaient à réinvestir les lieux publics — les théâtres, notamment, mais pas uniquement, pour réinventer la vie », raconte Jean-Charles qui ajoute, amer : « on est resté là jusqu’aujourd’hui, malheureusement on n’a pas encore été entendus. Il y a une forte résistance, donc on prévoit de rester jusqu’à ce que nos revendications soient entendues. On n’est pas forcement les bienvenus, mais on ne fait rien de mal. Depuis une semaine, la police ne nous menace pas : ils sont plutôt tranquilles mais ils savent que le mouvement s’étend et que les gens comprennent. On est plutôt soutenus en fait. Et on va gagner ! ». Nous leur demandons si la mobilisation a le soutien de la direction du théâtre et de Christophe Honoré, qui travaille avec son équipe aux répétitions d’une pièce à l’Odéon, Franck précise qu’entre les occupants et eux :« C’est assez tendu... Mais quelques techniciens nous soutiennent vraiment »

 

 

Pour ce qui est de la coordination entre les lieux : « On veut rester en contact avec les plus de 100 lieux culturels occupés. On est sur la même longueur d’ondes, on essaie d’avancer tous ensemble », expliquent Jean-Charles et Franck. Bien que les lieux occupés soient des théâtres et leurs occupant.e.s en majeure partie des professionnel.le.s de la culture, leurs revendications concernent l’ensemble des professions précaires ou intermittentes touchées par la crise sanitaire : « aujourd’hui, ça ne concerne pas que les théâtres, rappelle Jean-Charles, notre idée, c’est que le mouvement parvienne à toucher tous les corps de métiers ».  

 

Identifiées comme rédactrices, nous avons été interpellées par Isabelle, une travailleuse du secteur touristique venue manifester au nom de la FMITEC — la Fédération des Métiers Intermittents Tourisme Évènementiel Culture, créée en mars 2020 au début de la crise sanitaire. Déplorant que les professions intermittentes — y compris celles affiliées au régime général — ne soient pas toutes également protégées par le droit du travail, elle se réjouit que les intermittents du spectacle « ayant beaucoup plus de pouvoir de par le fait qu’ils sont fédérés, syndiqués, ce que nous ne sommes pas », aient choisi de soutenir les autres professions précarisées par la crise sanitaire et la politique actuelle, pour participer à visibiliser leurs problématiques spécifiques. 

 

134 lieux de culture occupés en France au 30 mars. Coordination des Intermittents et Précaires.

La ministre de la Culture, qui s’est rendue sur place début mars, (quelque temps avant de remettre la Légion d’honneur à Michel Sardou) n’a rien trouvé de mieux à faire que dénoncer ce mouvement comme étant non seulement « inutile », mais aussi « dangereux » pour la conservation des théâtres. Il y a pourtant d’avantage lieu de s’inquiéter du devenir des édifices sociaux et culturels durablement menacés par le gouvernement et sa gestion de la crise, que de la bonne conservation de bâtiments provisoirement occupés — les occupant.e.s n’ont d’ailleurs aucun intérêt à les dégrader. C’est précisément à la lutte pour le droit du travail et contre le mépris politique adressé au secteur culturel — entre autres —, que se consacrent depuis maintenant un mois toutes les personnes qui participent de près ou de loin à cette occupation active des lieux d’art et de culture.

Si nous ne devions retenir qu’une chose de notre passage place de l’Odéon, c’est la détermination et l’optimisme de celles et ceux qui se réunissent chaque jour sur la place publique afin de créer, de toutes pièces et sans en attendre l’autorisation, un espace de parole — de geste politique et artistique — accessible à chacun.e d’entre nous. 

 

-> Les revendications des occupant.e.s de l’Odéon :

L’abrogation de la réforme d’assurance chômage ; la prolongation de l’année blanche et son élargissement à tou.te.s les employé.e.s précaires ; la baisse du seuil d’accès à l’indemnisation chômage pour les primo entrant.e.s et et intermitent.e.s en rupture de droits ; la garantie des congés maladie et maternité pour les salarié.e.s à l’emploi discontinu et les artistes auteurs ; un plan massif de soutien à l’emploi et de reprise de l’activité dans tous les secteurs et un soutien aux caisses sociales spécifiques du spectacle dont l’existence est menacée par la baisse des cotisations.

 

Clara Hubert, Victoria Tran, Héloïse Humbert

 

Le site du théâtre de l’Odéon occupé

 

PS : Si vous souhaitez soutenir le mouvement, la plupart des théâtres occupés ont organisé des cagnottes disponibles en lignes ! 
 

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April 3, 2021 9:14 AM
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Dans les théâtres occupés, «une bataille entre ceux qui travaillent et les autres» –

Dans les théâtres occupés, «une bataille entre ceux qui travaillent et les autres» – | Revue de presse théâtre | Scoop.it

par Annabelle Martella et photos Camille McOuat dans Libération
publié le 3 avril 2021 à 8h27

 

Invités à quitter les lieux, les occupants du Nouveau théâtre de Montreuil ont manifesté vendredi, avec des soutiens venus d’autres établissements artistiques, leur intention de poursuivre le mouvement en protestation notamment contre la réforme de l’assurance chômage.

 

A peine a-t-on mis le pied sur le parvis du Nouveau théâtre de Montreuil (NTM) qu’on entend au loin la voix d’un représentant du Snam-CGT. «Ces lieux-là nous appartiennent», crie-t-il à la petite foule, rassemblée ce vendredi soir pour soutenir l’occupation de ce théâtre investi nuit et jour depuis plus de deux semaines par une majorité d’étudiants, apprentis comédiens et artistes émergents. Prononcée sur un ton de défi, cette affirmation entend susciter l’adhésion des badauds et sympathisants sur place mais elle s’adresse surtout à Mathieu Bauer, présent avec son équipe sur le parvis. Le directeur du CDN a en effet demandé aux occupants de ne plus rester dormir au théâtre et de ne venir l’occuper que quelques jours par semaine.

 

Avec le renforcement du confinement, les activités du théâtre vont encore s’amenuiser ces prochaines semaines. Les répétitions seront maintenues mais les actions culturelles pour les scolaires sont annulées et les salariés mis en télétravail. «Jamais, au grand jamais, la direction n’a dit qu’elle expulsera ses occupants, déclare Mathieu Bauer, visiblement agité par l’événement en cours. Nous les avons reçus avec hospitalité et délicatesse et partageons un certain nombre de leurs revendications, mais nous sommes aujourd’hui rattrapés par la réalité sanitaire.» Il ajoute : «L’occupation demande une grande logistique et c’est un rythme très lourd pour notre maison. La semaine prochaine, nous devrons payer des frais de gardiennage alors que nous ne serons même pas présents au théâtre. Nous demandons simplement aux occupants de nous laisser le temps de souffler pour qu’après, nous aussi nous puissions travailler à une convergence avec eux.»

 

Comme dans de nombreux théâtres occupés, le NTM accueille le mouvement, le soutient ouvertement, sans pour autant s’y associer. Les activités du théâtre n’étant pas mises à l’arrêt, la direction et les artistes associés ne s’engagent pas pleinement dans le mouvement. Les occupants du NTM le comprennent très bien, eux qui défendent la culture. Hors de question pour eux de «déranger» les répétitions ou le travail de création, quitte à être relégués dans la cuisine du théâtre pour que la salle qui leur est dédiée puisse servir à la formation de techniciens. «Mais bon, on ne se sent pas vraiment considérés, avance quand même Laurik, un occupant. Ils nous décalent là où ils peuvent. On comprend qu’on n’est pas la priorité.» Ensemble, ils ont décidé de continuer à occuper le théâtre jour et nuit sans l’aval de la direction. Parce qu’ils ne veulent pas que la mobilisation faiblisse, et puis aussi parce que certains travaillent la journée et que c’est durant la soirée que se déroulent les AG. «La pression s’est accrue sur les théâtres occupés depuis les nouvelles réglementations sanitaires, explique un membre de la coordination des occupations inter-écoles, qui se trouve à l’Odéon. Les occupations étudiantes sont les plus fragiles car ils ont peu de représentants syndicaux en leur sein. Par exemple depuis quelques jours, la direction de la Colline a également changé de cap du jour au lendemain et est de moins en moins favorable à ce que les étudiants continuent à occuper.»

 

A 19 heures, une petite dizaine d’occupants (des apprentis comédiens, scénographes mais aussi un barman ou un étudiant en sciences sociales) arrivent dans le calme à l’intérieur du NTM. La direction n’a montré aucune opposition et les a laissés tranquillement rentrer. L’ambiance est étrange. L’équipe les salue en leur souriant et les occupants donnent docilement au gardien la liste des gens qui resteront dormir là. Tout le monde semble marcher sur des œufs. On repense à ce qu’a dit une musicienne engagée dans le mouvement au directeur du CDN sur le parvis : «On défend tous la culture mais là on voit bien c’est une bataille entre ceux qui travaillent, ceux qui sont déjà installés dans les institutions culturelles et les autres, les précaires, ceux qui aimeraient travailler.» Puis elle nous glisse : «Après il a des responsabilités en tant que directeur, je comprends mais bon il y a un moment, chacun sa merde. On va pas demander l’autorisation d’occuper un lieu, c’est absurde. Désolé pour lui mais c’est pas ça la révolte.»

 

photo Montreuil, Le 2 Avril 2021. Occupation du Nouveau Théâtre de Montreuil. (Camille McOuat)

 

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March 25, 2021 9:50 AM
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Le Festival d’Avignon dévoile une programmation féminine et féministe autour du thème « Se souvenir de l’avenir »

Le Festival d’Avignon dévoile une programmation féminine et féministe autour du thème « Se souvenir de l’avenir » | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Par Fabienne Darge dans Le Monde - 25/03/21

 

Olivier Py a présenté, mercredi 24 mars, les spectacles qui composeraient le « in », prévu pour se tenir du 5 au 25 juillet dans la Cité des papes. Une édition de haute tenue et internationale, en dépit du contexte de crise sanitaire.

« On y croit ! » : c’est le message principal envoyé par Olivier Py, ainsi que par toutes les tutelles, mercredi 24 mars, lors de l’annonce du programme du 75e Festival d’Avignon, prévu pour se dérouler du 5 au 25 juillet. On a d’autant plus envie d’y croire que le programme dévoilé par le directeur du festival est de haute tenue, sans en rabattre, malgré le contexte sanitaire, sur l’exigence artistique ni sur la dimension internationale de la manifestation créée par Jean Vilar en 1947.

 

L’ouverture de cette édition résolument féminine, féministe et diverse, dont le thème est « Se souvenir de l’avenir », a été confiée à deux femmes puissantes. Isabelle Huppert fera son grand retour dans la Cour d’honneur du Palais des papes, en jouant dans La Cerisaie, de Tchekhov, sous la direction du Portugais Tiago Rodrigues. La metteuse en scène brésilienne Christiane Jatahy proposera Entre chien et loup, création inspirée par Dogville (2003), de Lars von Trier.

Du côté des grands artistes étrangers, on retrouvera également l’Espagnole Angélica Liddell, avec L’odeur du sang ne me quitte pas des yeux ; la Sicilienne Emma Dante, avec deux créations, Misericordia et Pupo di zucchero ; le Sud-Africain Brett Bailey, avec Samson ; les Belges Anne-Cécile Vandalem, avec Kingdom, et du groupe FC Bergman, avec The Sheep Song le Hongrois Kornel Mundruczo, avec Une femme en pièces.

Diversité

Moins connus, et donc à découvrir, le Rwandais Dorcy Rugamba et le Sénégalais Felwine Sarr s’associent pour proposer Liberté, j’aurai habité ton rêve jusqu’au dernier soir, d’après René Char et Frantz Fanon. Le jeune Palestinien Bashar Murkus doit venir de Haïfa avec une proposition intitulée Le Musée. Le Grec Pantelis Dentakis mêle vidéo et marionnettes miniatures pour adapter La Petite Fille dans la forêt profonde (2008), de Philippe Minyana.

 

Une même diversité se retrouve chez les Français. Caroline Guiela Nguyen est conviée avec Fraternité, conte fantastique, premier volet d’un cycle théâtral ; Laëtitia Guédon met en scène Penthésilé.e.s - Amazonomachie, de Marie Dilasser. Le jeune et très doué Baptiste Amann retrouve Avignon, d’où il vient, avec sa trilogie Des territoiresLaurent Gaudé a écrit La Dernière Nuit du monde (Actes Sud, 72 pages, 11 euros), dont s’empare Fabrice Murgia. Eva Doumbia propose Autophagies (Histoires de bananes, riz, tomates, cacahuètes, palmiers)… Nicole Garcia joue Marie NDiaye, dans Royan. La professeure de français (Gallimard, 2020). Lola Lafon et Chloé Dabert se retrouvent autour du Mur invisible (Actes Sud, 1992), fantastique texte de Marlen Haushofer. Victoria Duhamel exhume une opérette oubliée d’Offenbach, Le 66 !

Inclassables

On compte aussi un certain nombre d’« indisciplinaires » ou d’inclassables : Théo Mercier avec Outremonde, à la fois une exposition et un spectacle ; Nathalie Béasse, avec Ceux-qui-vont-contre-le-vent ; Mylène Benoit, avec Archée Phia Ménard, avec La Trilogie des contes immoraux (pour Europe) ; Madeleine Louarn et son ensemble Catalyse d’acteurs handicapés, avec Gulliver, le Dernier Voyage. On pourra découvrir une troupe de jeunes gens réunis sous le nom de Nouveau Théâtre populaire, proposant Le Ciel, la Nuit et la Fête, soit Le Tartuffe, Dom Juan et Psyché, de Molière.

 

 

Désormais incontournables dans la programmation du « in », les spectacles jeune public, le spectacle itinérant, prévu pour tourner dans toute la région, et le feuilleton théâtral sont bien au rendez-vous – un feuilleton dont se charge Olivier Py, avec Hamlet à l’impératif !.

La danse est aussi présente dans cette édition qui voit notamment le retour de Maguy Marin, avec Y aller voir de plus près. Sont aussi au menu Rosalba Torres Guerrero et Koen Augustijnen, avec Lamenta ; la Sud-Africaine Dada Masilo, avec Le Sacrifice Jan Martens, avec Any Attempt Will End in Crushed Bodies… Dimitris Papaioannou, avec Ink. Enfin, c’est le chorégraphe espagnol Marcos Morau qui a été choisi pour la deuxième création dans la Cour d’honneur, Sonoma. On y croit !

 

 

Il y a un an : Coronavirus : le Festival d’Avignon dans l’expectative

Fabienne Darge

Légende photo : Olivier Py, directeur du Festival, tient la conférence de presse de présentation du programme du 75e Festival d’Avignon, le 24 mars 2021. ARNOLD JEROCKI/DIVERGENCE

 

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March 19, 2021 1:39 PM
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A l’Odéon occupé, «le rapport de force avec ce gouvernement est vital»

A l’Odéon occupé, «le rapport de force avec ce gouvernement est vital» | Revue de presse théâtre | Scoop.it

par Julien Gester dans Libération  publié le 19 mars 2021 à 10h46

 

 

Comment ça va, la culture ? Tous les jours ou presque, la newsletter «Libé Culture» demande à des artistes et acteurs du secteur des nouvelles de ce qu’ils fabriquent, tant bien que mal. Aujourd’hui, Valérie Massadian, cinéaste, qui nous parle depuis le théâtre parisien occupé.

 

Cinéaste après avoir été notamment garagiste, mannequin ou scénographe, Valérie Massadian est l’auteure de deux beaux longs métrages, Nana et Milla. Depuis douze jours, elle prend part jour et nuit à l’occupation du théâtre de l’Odéon à Paris.

 

«Quand l’occupation a commencé, j’ai eu une nuit d’hésitation avant de revenir à Paris pour m’y joindre, car je savais que ça avait été organisé par la CGT Spectacle et que j’ai une réticence vis-à-vis des syndicats – à qui je reconnais des acquis non négligeables mais aussi des lâchetés, certaines trahisons. Mais je suis aussi à un moment de vie où je considère que face à ce qui est en train de se construire, ou surtout de se détruire, à travers les lois délirantes pondues par ce gouvernement, il faut s’élever contre les effets extrêmement graves de la politique sur la vie de beaucoup de gens. Et cette occupation est pour moi cohérente avec les dernières batailles qui ont pu être menées socialement.

 

 

«On fait deux AG par jour, matin et soir, avec une très belle écoute, autour de cette idée de parvenir à faire durer, à faire comprendre aux gens ce qu’on est en train de faire. C’est très riche, divers, nourri par des gens qui viennent dans les agoras avec leurs métiers très loin de ce qu’on peut connaître, leurs expériences. J’apprends énormément. Il y a toutes sortes de solidarités qui s’expriment, y compris d’endroits surprenants, parce qu’on arrive doucement à faire passer l’idée que ce n’est pas qu’un truc d’intermittents du spectacle. Il s’agit d’arriver à sortir de l’entre-soi, militant ou corporatiste, pour trouver un langage commun dans le rapport de force avec ce gouvernement. C’est vital.

 
«Mais les réseaux sociaux, les médias, le gouvernement «font leurs courses» en fonction de ce qui les arrange et ça ne reflète pas ce qui se met en place à plein d’endroits, sur tout le territoire. Avec des vrais écarts entre des lieux qui ont accueilli ces occupations à bras ouverts, ou d’autres qui ont fait leur casting, ce qui a dépolitisé la chose. Quand certains directeurs de salles disent que tout ce qu’ils veulent c’est la réouverture, on n’est évidemment pas contre ici. Mais la réouverture seule, c’est la mort, ça laisse sur le carreau plein de gens, intérimaires, précaires, dans le secteur culturel comme ailleurs, tandis qu’on aligne les milliards d’euros pour les entreprises… Quand les revendications ont été présentées à Castex, il les a balayées une à une : “La réforme de l’assurance chômage ? C’est un autre dossier.” Alors que c’est indissociable !

 

«D’un côté, beaucoup considèrent la culture comme un truc de bourgeois, et on ne peut pas leur donner tort quand on voit que la plupart des gens du milieu ne se sont pas mobilisés contre les lois travail, la réforme des retraites, et semblent se réveiller maintenant qu’ils sont secoués par leur part de la crise. Je comprends la défiance que ça peut inspirer, faute de les avoir vus se bouger jusque-là. Et puis de l’autre côté, il y a ceux qui continuent à répéter leurs spectacles en disant au micro qu’ils nous soutiennent mais ne veulent surtout pas se mélanger. C’est mou, ça reste neutre, ça a peur pour ses fesses, parce qu’on a plus de pouvoir que les gens ici, parce qu’on a un nom, parce qu’on existe socialement dans la culture. C’est un étau qui me met très en colère, parce qu’il faudrait réunir tout le monde. Faire comprendre à tous ceux qui ne se sentent pas immédiatement concernés par les mesures terrifiantes qui se mettent en place que, non seulement qu’il faut être solidaires, mais aussi que tout le monde sera à un moment ou un autre affecté.

 

«C’est la même chose que ce qu’il s’est passé avec les césars, l’an dernier avec Adèle [Haenel], ou cette année, avec Corinne Masiero et Jeanne Balibar – dont le discours était précieux et résumait si clairement tout. Ça va à certaines personnes mais la majorité dit que non, “ce n’est pas le bon endroit pour ça”. Va-t-il nous rester un endroit d’ailleurs ? (Rires)»

 

Légende photo : Devant le théâtre de l'Odéon occupé, le 5 mars. (Francois Mori)

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March 16, 2021 11:33 AM
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Nicolas Dubourg sur les annonces pour la culture : “Comment peuvent-ils nous mépriser à ce point-là ?”

Nicolas Dubourg sur les annonces pour la culture : “Comment peuvent-ils nous mépriser à ce point-là ?” | Revue de presse théâtre | Scoop.it

 Par Fabienne Arvers  dans Les Inrocks - 15 mars 2021

 

Alors que l’effet boule de neige de l’occupation des théâtres à Paris et partout en France prend de l’ampleur, Nicolas Dubourg, président du Syndeac (Syndicat national des entreprises artistiques et culturelles) et directeur du théâtre La Vignette de l’université de Montpellier, réagit aux nouvelles mesures annoncées par le gouvernement le 11 mars pour soutenir la culture. Il appelle en outre à une mobilisation le week-end du 20 mars.

 

Avez-vous participé à la rencontre du 11 mars avec les organisations syndicales du secteur culturel, le Premier ministre Jean Castex et la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot ?

Nicolas Dubourg - Comme je n’y étais pas convié, j’ai écrit à la conseillère de Jean Castex, Florence Philbert, afin de faire part de mon étonnement. Elle m’a répondu que cette rencontre ne concernait que les syndicats de salariés. Or, on avait déjà eu deux rendez-vous avec le Premier ministre à Matignon, en tant que représentants de lieux, et, à l’époque, les syndicats de salariés n’avaient pas été conviés et s’en étaient émus. La réponse avait alors consisté à leur dire : on parle de la question de la réouverture, des protocoles, de l’équilibre financier des maisons. En gros, ça ne vous regarde pas. De fait, aucun de ces points-là n’a été abordé le 11 mars. Les seules questions du jour étaient plutôt relatives à l’emploi, même si l’annonce sur les 20 millions d’euros d’aides supplémentaires pour la culture va aussi concerner des équipes artistiques, c’est-à-dire des entreprises… qui n’étaient pas conviées. 50 % des adhérents du Syndeac sont des équipes artistiques et sont concernés par cette annonce. Leur technique, c’est toujours de nous réunir à des moments différents pour nous dire la même chose.

 

Par contre, le 12 mars, j’ai eu une réunion avec Sophie-Justine Lieber (la directrice de cabinet de Roselyne Bachelot), Hélène Amblès (sa conseillère en charge de la création, du spectacle vivant et des festivals), ainsi que Marie Francolin (la directrice adjointe de cabinet, en charge du Covid-19 auprès du ministre de la santéà, ce qui était une première. Sophie-Justine Lieber nous a annoncé que le travail en interministériel s’accélérait actuellement  pour essayer d’aboutir à un protocole simplifié. En janvier, le ministère avait parlé d’un protocole en cinq étapes : d’abord la phase zéro, soit la phase actuelle, où les théâtres ne sont ouverts qu’aux professionnels. La phase 1 est l’ouverture aux scolaires, la phase 2, 25 % de jauge ouverte au public, la phase 3, 50 %, la phase 4, 75 % et la phase 5, 100 %. A présent, on nous parle de trois étapes qui s’échelonneront à trois ou quatre semaines d’intervalle pour passer de 33 % à 75 %, puis à 100 % de remplissage des salles de spectacle.

 

Mais quand on demande une date pour passer le premier cap, on n’a aucune réponse. Quid du couvre-feu à 18 heures ? Quid de la différenciation territoriale ? Ce n’est pas non plus la même chose si vous êtes dans le secteur privé ou public, on n’a pas le même rapport au remplissage des salles. S’agissant du secteur public, on a donc redit qu’on était prêts à ouvrir à condition d’avoir des aides, mais qu’il nous semblait fondamental de rouvrir les théâtres. On a juste eu confirmation que les festivals de l’été auront lieu. Ce à quoi on a répondu que, dans ce cas, leur protocole doit s’enclencher au moins six semaines en amont. Ils nous disent y travailler en nous rappelant que la situation sanitaire est loin d’être positive, surtout en Ile-de-France.

 

Comment réagissez-vous à la déclaration de Roselyne Bachelot qui juge l’occupation des théâtres “inutile” et “ dangereuse” ?

 

La posture de ce gouvernement est très étonnante. Jusqu’au 19 janvier, on était plutôt satisfaits du dialogue, dans la mesure où il y avait régulièrement des réunions au cours desquelles on posait les sujets sur la table et, une fois l’analyse partagée, des réponses étaient apportées. Pas toujours satisfaisantes, mais il y avait la fameuse clause de revoyure qui nous permettait d’espérer que, face à une mauvaise analyse, il y aurait un jour une bonne réponse. Le 19 janvier, après l’annonce du protocole en cinq points sur la question de la réouverture, on est rentré dans la phase : plus d’image, plus de son, et ce pendant quasiment deux mois. C’est proprement hallucinant. Avec d’autres syndicats, on a interpellé le gouvernement le 17 février avec une déclaration pour la réouverture de tous les établissements culturels recevant du public, signée par l’Association des régions de France, tous les présidents de régions, les maires et présidents des métropoles des plus grandes villes de France, en demandant au gouvernement de mettre en place ce protocole. On n’a eu aucune réponse. Le 4 mars, à la suite de cette manifestation à laquelle nous étions associés, la CGT a décidé de mettre en place sa modalité d’action : l’occupation de théâtres.

 

C’était une surprise pour vous ?

 

On n’était pas du tout informés. Mais lorsque la ministre de la Culture s’offusque aujourd’hui de l’occupation des théâtres, ce qui m’étonne surtout, c’est qu’elle ne l’ait pas anticipé. C’est ça qui est fou. Le nombre de courriers qu’on a envoyés à ce gouvernement et qui sont restés lettres mortes… On ne peut pas laisser dans un état d’ignorance absolu le seul secteur fermé depuis quasiment un an. Ils ne se permettraient jamais ça avec le secteur aéronautique ou avec l’industrie. Comment peuvent-ils nous mépriser à ce point-là ? Roselyne Bachelot a beau jeu de trouver la réponse du corps social trop forte. En tant que pharmacienne et ancienne ministre de la santé, elle sait très bien que quand le stimulus est puissant, la réponse du patient est forte. A moins qu’il ne soit totalement mort, le fait qu’il y ait une réponse immunitaire est plutôt bon signe….

Nous, on propose autre chose : le week-end du 20 mars, on appelle à organiser des assemblées générales où seront conviés des élus, des responsables de lieux, des intermittents, des artistes et le public. L'idée est de venir débattre, échanger sur la situation du secteur. On va inscrire sur toutes les devantures des théâtres une citation que Roselyne Bachelot avait volée à Pablo Neruda “Le printemps est inexorable”, en dessous de laquelle on va écrire : “Feu vert pour la culture”, en français mais aussi en anglais (“#greenlightforculture”), car c’est un mouvement européen et cette problématique de fermeture des lieux de culture nous est commune. Elle témoigne du fait que la puissance publique se désengage massivement de la politique culturelle. Notre revendication traverse l’Europe et est porteuse d’une vision politique.

 

Comment considérez-vous cette occupation des théâtres ?

On est un syndicat d'employeurs et notre métier, c’est de faire fonctionner des théâtres. Nous les occupons donc par notre activité en permanence et ce sur quoi on se bat en ce moment, c’est précisément de pouvoir les réinvestir pour y travailler et y accueillir du public. Historiquement, la question de l’occupation consiste à bloquer l’activité. La CGT parle d’occupation mais je pense que le terme est mal choisi dans la mesure où la CGT et les intermittents se battent aujourd’hui pour faire fonctionner leur outil de travail, et non pas pour le bloquer. Notre position, c’est de nous battre pour la réouverture des théâtres et les modalités d’action que nous mettons en place ne sont pas là pour empêcher le travail, bien au contraire, mais pour pouvoir accueillir du public le plus rapidement possible dans nos établissements.

 

Qu’en est-il de la prolongation de l’année blanche demandée pour les intermittents ? Quelles sont vos préconisations ?

 

Il n’y a pas encore d’annonce puisqu’un rapport est attendu pour la fin du mois de mars. Le Syndeac a mis en place un outil de travail pour faire des propositions très concrètes, que nous finalisons ces jours-ci. Ce rapport doit faire une évaluation de la situation parce que l’année blanche est un système un peu aveugle. Cela s’adresse à tout le monde, quelle que soit la situation du salarié intermittent. Or, au bout d’un an, on a observé de grandes disparités avec des intermittents dont la rémunération s’est effondrée, littéralement. Certains vont avoir fait leurs heures, mais là où ils avaient d’habitude un cachet moyen à 200 euros, ils vont toucher le minimum syndical à 120 euros. Cela veut dire qu’au moment où ils vont calculer leurs indemnités journalières, non seulement ils auront perdu beaucoup de revenus cette année, mais ils auront en plus une perte de revenus sur l’année qui suit. On souhaite que cette perte de revenus soit compensée et maîtrisée par l’intermittent lui-même au lieu que lui soit imposé un système aveugle qui ne lui permet pas, in fine, de rester dans le secteur. L’année blanche, c’était simple à expliquer, mais là, c’est plus complexe et on sera en mesure de faire des annonces par rapport à nos propositions d’ici une ou deux semaines.

 

>> A lire aussi : Samuel Churin : “Nous occuperons tous les théâtres de France”

 

Sait-on comment vont être utilisés les 20 millions d’euros supplémentaires annoncés le 11 mars par rapport au plan de relance initial ?

 

 

Ils vont servir en priorité aux équipes artistiques, notamment pour soutenir l’entrée dans la profession des jeunes compagnies. Il s'agit d'une revendication que l'on porte depuis le début : les dispositifs de relance doivent permettre de financer de l’emploi artistique ou technique. A travers le maintien des subventions, on maintient l’équilibre financier des structures, mais le plan de relance, lui, doit permettre de financer l’emploi. Quand la ministre avait annoncé en août dernier le plan de relance – les fameux 400 millions sur les deux milliards d’euros pour la culture -, elle avait indiqué qu’il était soumis à deux choses : d’une part, qu’il était évolutif et qu’on se reverrait si la crise durait. Cette annonce est donc justifiée et il devra sans doute y en avoir d’autres - c’est comme une clause de revoyure. D’autre part, elle avait annoncé que la manière de dépenser l’argent serait souple en fonction des problèmes à régler. Aujourd’hui, on a une connaissance assez partielle de la manière dont cette crise impacte les entreprises, les lieux, les compagnies. Nous demandons donc qu’à travers le mécanisme de la démocratie sociale et de la négociation avec les partenaires, on puisse régulièrement faire des points de suivi pour modifier ou pas les dispositifs mis en œuvre. Il est important de pouvoir faire évoluer la réponse à la problématique. Pour nous, cette annonce de 20 millions d’euros, c’est une manière de vérifier que l’engagement à ce fameux “quoi qu’il en coûte” perdure, dans le sens où l’on est le secteur le plus impacté par cette crise.

Par ailleurs, on ne parle que de l’Etat, mais je peux vous dire que dans les régions et dans les villes, le maintien des subventions en 2021 n’est pas encore acquis. S’il commence à y avoir des désengagements de ce côté-là, cela va se faire d’une manière beaucoup plus silencieuse et avec des conséquences bien plus graves. Aujourd’hui, si vous prenez le bloc communal, les départements et les régions, elles financent la culture beaucoup plus que l’Etat. Vous pouvez très bien avoir un désengagement financier de la puissance publique qui passe inaperçu parce qu’il est porté par des acteurs qui sont fractionnés et politiquement invisibles. Alors, si les 20 millions qu’on nous annonce d’un côté, on les perd de l’autre, c’est fini.

 

Comment voyez-vous arriver la saison des festivals ?

 

Pourquoi insister à ce point sur la réouverture des théâtres ? Parce que l'on est un secteur particulier. Il va y avoir des problématiques très concrètes de disponibilité des plateaux, d’abord pour répéter, puis pour jouer. Les répétitions qui ont lieu en ce moment étaient soit déjà prévues, soit se sont rajoutées sans être corrélées à un calendrier de diffusion. On a besoin d’un calendrier pour réorganiser nos plannings de répétition de manière à être prêts le jour J.

Deuxième point : les équipes. Elles sont laminées par la crise et elles appréhendent une reprise sur les chapeaux de roues. On souhaite une reprise progressive de l’activité. On a besoin de se réentraîner, les publics ont besoin de revenir. L’histoire des festivals est importante parce qu’elle nous permet de nous dire : si les festivals reprennent cet été, on demande que quatre semaines avant, les théâtres aient rouvert de manière à tester les choses, qu’on puisse reprendre les réflexes. On parle bien sûr d’une réouverture avec progressivité. 

 

Propos recueillis par Fabienne Arvers

 

Légende photo : 

Nicolas Dubourg, président du Syndeac (Denise Oliver Fiero)
 

 

 

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March 15, 2021 3:12 PM
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Derrière ses portes fermées, le Théâtre 14 devient une fabrique de la pensée

Derrière ses portes fermées, le Théâtre 14 devient une fabrique de la pensée | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Par Marie Sorbier sur le site de son émission "Affaire en cours" sur France Culture - 15 mars 2021

 

Affaire en cours poursuit son tour d'horizon des institutions culturelles fermées au public mais toujours actives avec Edouard Chapot, co-directeur du Théâtre 14 à Paris.

 

Ecouter l'entretien avec Edouard Chapot (8 mn)

 

La salle du Théâtre 14, à Paris.• Crédits : Carole Sertillanges

Les institutions culturelles sont fermées depuis de longs mois. Alors que la colère et l'incompréhension montent, Affaire en cours continue son tour d'horizon des institutions fermées au public pour comprendre ce qui se passe derrière leurs portes closes. Après le Frac Bretagne et la scène nationale de Châteauroux, le Théâtre 14 à Paris. Au micro de Marie Sorbier, Edouard Chapot, co-directeur du théâtre avec Mathieu Touzé, explique comment le théâtre vit et poursuit ses missions malgré l'absence du public.

 

 

Comme dans tous les théâtres, notre mission de service public est d'accueillir les spectateurs. Depuis novembre, nous sommes en incapacité de le faire, mais le théâtre continue à vivre. Nous l'avons transformé en une fabrique de théâtre et de pensée.                      
Edouard Chapot

Fabrique de théâtre

Le Théâtre 14 accueille des équipes en résidence pour des répétitions et propose des représentations professionnelles. Entre novembre et mars, le théâtre a accueilli exclusivement des créations. Une activité qui continue l'écosystème du spectacle vivant, et qui permet aux projets d’être vus, diffusés, et éventuellement tournés la saison suivante. A cela s'ajoutent des ateliers professionnels menés par le comédien et metteur en scène Marc Ernotte. Initialement prévus toutes les deux semaines, ces ateliers ont maintenant lieu chaque semaine, en raison d'une demande très forte de la part des comédiens. Ces ateliers, qui se tiennent dans différents lieux du 14ème arrondissement de Paris, leur permettent de maintenir des liens entre eux et d'entretenir leur pratique théâtrale. 

Fabrique de pensée

Le Théâtre 14 profite du temps de la fermeture pour réfléchir à l'essence et à l'utilité mêmes du théâtres. Cette réflexion prend la forme de rencontres avec des autrices et auteurs, qui ont lieu dans la plupart des cas dans l'enceinte du théâtre, tout en étant retransmises en direct sur le site de l'Université populaire du Théâtre 14. Des discussions "ciné-philo" sont également proposées, avec le philosophe et réalisateur Ollivier Pourriol.

Ces discussions sont un moyen de penser le lien social qui a normalement lieu au théâtre, cette sociabilité particulière où l'on est ensemble sans forcément se parler, mais en regardant tous la même chose. Ollivier Pourriol parle de temps partagé, ce qui est ce qu'on a perdu aujourd'hui et que l'on essaye de retrouver aujourd'hui par les outils numériques.                    
Edouard Chapot

 

 

On ne propose pas de captations de spectacles. On estime que le spectacle vivant est vivant, par définition. En attendant que les théâtres puissent réouvrir, on propose d'autres outils, notamment numériques, pour quand même se retrouver ensemble.                    
Edouard Chapot

Une colère saine

Aux yeux du directeur du Théâtre 14, la colère des intermittents et des étudiants qui occupent des théâtres en France, comme le Théâtre de l'Odéon et le Théâtre de La Colline, est saine et légitime. 

 

 

Il est légitime d'interroger la fermeture des lieux culturels qui, eu égard à toutes les autres ouvertures, est d'autant plus difficile à comprendre. Ces occupations permettent de poser le débat dans l'espace public. C'est une radicalité intéressante et nécessaire, d'autant plus que des groupes très différents occupent les lieux : la CGT, les étudiants, les intermittents.                    
Edouard Chapot

 

 

Edouard Chapot estime nécessaire la prolongation de l'année blanche pour les intermittents du spectacle, dont le secteur d'activité est sinistré non seulement aujourd'hui mais à long terme. Si proposer des représentations professionnelles permet de répondre au court terme au problème de la diffusion, l'absence d'échéance d'ouverture finit par avoir raison des répétitions de spectacle.

 

 

A quoi bon répéter un spectacle dont on ne sait quand il va pouvoir se jouer ? Même si on a l'autorisation de répéter, ça commence à s'essouffler. Avoir des échéances de réouverture, même à long terme, devient absolument indispensable. Si ça doit passer par l'occupation, je trouve ça très sain.                    
Edouard Chapot

Une boîte à outils argumentaire

Un colloque prendra place les 30 et 31 mars 2021 au Théâtre 14. Un moment destiné à construire une boîte à outils permettant de dire, dans le débat public, pourquoi le spectacle vivant est essentiel. Les arguments pour défendre cette perspective ne sont pas forcément évidents, dit Edouard Chapot. Selon lui, les arguments d'autorité soulignant le spectacle comme moyen de la rencontre ne suffisent pas dans le débat public. Ainsi, le colloque organisé au Théâtre 14 mêlera chercheurs, universitaires, médecins, personnalités politiques et philosophes pour aborder l'ensemble des facettes du spectacle vivant. Dans le respect des normes sanitaires, cet événement accueillera dans le théâtre un nombre de professionnels, et sera diffusé le 31 mars 2021 en direct sur le site de l'Université populaire du Théâtre 14. Des extraits du colloque seront par la suite disponible sur le même site. 

Au programme de ce colloque figurent notamment cinq tables rondes : une qui réunira un thérapeute, un neurologue, un psychiatre, une autre portera sur l'utilité sociale de la culture, deux autres traiteront des aspects économiques de la culture et de ses financements publics, et une qui reviendra sur les liens entre territoires et culture. Entre chacune de ces réunions, des personnalités politiques et des artistes seront amenés à faire un retour d'expérience.

Prêts à ouvrir demain

Dans une perspective de vaccination à grande échelle, Edouard Chapot espère pouvoir réouvrir son théâtre dès début mai, avec des protocoles sanitaires stricts et des jauges réduites. 

 

 

En tout cas, nous sommes prêts. Le public n'attend que ça et nous, les équipes administratives, techniques et artistiques, nous tenons prêt pour ouvrir dès demain.                    
Edouard Chapot

 

Je crois que la saison prochaine sera une saison de crise. Enormément de lieux pensent d'abord le report des spectacles, par solidarité avec les équipes artistiques. Si des changements et des transformations doivent se faire au niveau des systèmes de production et de diffusion du spectacle vivant, ce sera plutôt à partir de la saison 2022-2023. Il est certain que tout le monde se pose ces questions. Cela a mis en valeur une forme de surproduction des spectacles, et il s'agit maintenant de repenser à la fois cette production et les temps de visibilité.                    
Edouard Chapot

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July 22, 2021 12:18 PM
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« L’idée de mettre à l’écart des citoyens et des clients nous est insupportable » : les lieux culturels face au passe sanitaire

« L’idée de mettre à l’écart des citoyens et des clients nous est insupportable » : les lieux culturels face au passe sanitaire | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Par Gilles Rof  (Marseille, correspondant), Claire Mayer(Bordeaux, correspondante), Laurie Moniez(Lille, correspondante), Claire Guillot, Rosita Boisseau (envoyée spéciale à Avignon), Sylvain Siclier et Sylvia Zappi daans Le Monde 22 juillet 2021

Un contrôle de passe sanitaire au cinéma le Grand Rex à Paris, le 21 juillet 2021. ALAIN JOCARD/AFP

 

Désormais obligatoire pour les établissements accueillant plus de 50 personnes, le contrôle du passe a suscité des réactions agacées, entre scepticisme et désarroi.


Ils croyaient enfin revivre, revoir leurs spectateurs. Partager avec eux leur enthousiasme après tant de mois de fermeture. Le public revenait timidement mais sûrement. Mercredi 21 juillet, il a fallu en rabattre. Cinémas, théâtres, salles de concerts… tous les lieux accueillant plus de 50 personnes sont désormais obligés de réclamer un passe sanitaire au public. Entre scepticisme et désarroi, les premières heures de cette contrainte liée à la nouvelle flambée de l’épidémie de Covid-19 ont atteint le moral du milieu culturel déjà bien sombre.

 

Comment, en effet, contrôler sans être intrusif et garder le côté ludique et festif ? Surtout qu’il a fallu s’organiser en catastrophe, en pleine saison estivale. Avant l’ouverture du Théâtre Molière dans le centre-ville de Bordeaux (Gironde), le directeur, Xavier Viton, assurait « appréhender terriblement » ce moment. Pour que ses employés n’aient pas à affronter d’éventuelles réactions vindicatives de la part de spectateurs mécontents, il se chargera lui-même des contrôles. Ces nouvelles normes, il n’est pas contre, mais leur mise en œuvre est, à ses yeux, « décalée » : « Ce n’est pas à nous de vérifier ces passes sanitaires », lâche-t-il.

 

 

L’appréhension est aussi palpable à Avignon (Vaucluse), où le Festival bat son plein. Les théâtres ont affiché les consignes : sésame sanitaire ou test PCR de moins de soixante-douze heures ou test antigénique de moins de quarante-huit heures. Fanny Laurent, administratrice du Théâtre des Lucioles, dit que son équipe est au taquet mais craint les conséquences des nouvelles contraintes sur la fréquentation. « Ce qui prend du temps, c’est qu’on doit vérifier à la fois la validité du passe ou du test mais aussi demander la preuve de son identité à chaque spectateur » – mercredi à la mi-journée sur TF1 le premier ministre, Jean Castex, a annoncé que les responsables d’établissement n’auront pas à faire cette vérification d’identité.

Même inquiétude au Théâtre des Halles, où Alexandra Timar, directrice adjointe, évoque une chute des réservations, en particulier de groupes de jeunes qui annulent leur venue : « Le public est plutôt compréhensif. Ce matin, sur 200 personnes, on a refusé l’entrée à trois qui n’avaient pas de passe sanitaire. On tente de conserver l’esprit festif, mais avec ce côté contrôle, c’est assez difficile. »

« Trouver la bonne manière »

Trop rapide, décidé dans la précipitation… les critiques sur l’impréparation de ce nouveau protocole reviennent comme un leitmotiv. Au Couvent Levat de Marseille (Bouches-du-Rhône), qui s’apprête à inaugurer le festival Ciao Moka, la consigne est d’être « souple »« On se donne une semaine pour trouver la bonne manière », avance Karine Terlizzi, directrice de Juxtapoz qui gère le site. Là aussi, on s’interroge sur la responsabilité des contrôles exigés : « Cela stresse les équipes, soulève des questions : est-ce à nous de jouer le rôle de l’État, de faire la police ? », pointe la Marseillaise. Dans ce lieu situé à la Belle-de Mai, un des quartiers les plus populaires, on redoute l’impact des nouvelles mesures auprès d’un public de proximité déjà difficile à séduire. « C’est une population pour qui la vaccination n’est pas forcément facile à envisager. Est-ce que cela va nous couper d’elle ? »

Karine Terlizzi, directrice de Juxtapoz : « Cela stresse les équipes, soulève des questions : est-ce à nous de jouer le rôle de l’État, de faire la police ? »

Plus loin, sur la corniche Kennedy, le Théâtre Silvain, qui accueille près d’un événement par soir depuis le 11 juin, voit tous les « petits » organisateurs, qui baissaient la capacité de leurs événements juste au-dessous de 1 000 personnes pour éviter les contraintes sanitaires, s’inquiéter de ne plus pouvoir le faire. « Pour les autres événements, le dispositif est rodé », note Robert Homerowski, responsable du site.

Malgré la soudaineté, la plupart des lieux ont su s’adapter très vite. Comme aux Rencontres d’Arles, le festival de photographie, dont les expositions sont réparties dans une quinzaine de lieux, qui s’est réorganisé en quelques jours : il a fallu acheter des scanners, former les équipes… et dresser la liste de toutes les preuves acceptées pour justifier l’accès aux expositions. « Il y a des gens qui ont des passes internationaux, d’autres qui présentent des preuves de tests qui ne sont pas sur l’application TousAntiCovid… je suis devenue super pro des questions sanitaires ! », s’amuse Aurélie de Lanlay. L’interrogation, souligne cependant la directrice adjointe du festival, est de savoir si les jeunes, qui font partie des populations les moins vaccinées en France, viendront malgré tout. Ici, les moins de 30 ans représentent 30 % des visiteurs…

 

 

Du côté des cinémas d’art et essai, on a préféré limiter la jauge à 49 spectateurs, en dessous du seuil d’exigence du passe, plutôt qu’opérer les pointages exigés. Trop compliqué quand on est une petite structure avec très peu de salariés. Le Pont-des-Arts, à Marcq-en-Barœul (Nord), a ainsi décidé de sacrifier une partie des 220 sièges de sa grande salle, sauf pour les gros films. « C’est une manière de ne pas pénaliser le public », souligne Amandine Pitula, la directrice. Mais chez ces petits exploitants, l’opposition à l’instauration d’un « flicage » se dit ouvertement et la colère est perceptible. « Il y a une contradiction à demander aux cinémas de contrôler les gens alors que l’État ne veut pas imposer la vaccination », note William Benedetto, le directeur de l’Alhambra, à Marseille, résumant le sentiment général.

Les exploitants qui gèrent Les Variétés et Le César, en centre-ville, emploient les grands mots, estimant que les nouvelles règles instaurent une « ségrégation » entre leurs spectateurs. « L’idée même de mettre à l’écart de nos cinémas des citoyens et des clients fidèles (…) nous est insupportable », écrivent-ils dans un message diffusé sur les réseaux sociaux. Le directeur du cinéma Utopia, Patrick Troudet, à Bordeaux, n’en pense pas moins : il se dit « viscéralement contre » l’idée de devoir « demander de justifier une entrée ».

Multiplexe bien calme

C’est probablement du côté des gros multiplexes cinématographiques et des grandes salles de spectacle que l’on s’en sort le mieux. Les gérants se sont préparés et, un peu partout, des affichettes avertissent les spectateurs : « Si vous avez plus de 18 ans, merci de préparer votre passe sanitaire et une pièce d’identité pour pouvoir accéder aux salles. » En cette première matinée de fin juillet, le Kinepolis à Lomme (Nord) était bien calme. « On a mis les bouchées doubles depuis une semaine pour augmenter la sécurité au niveau des points de vérification des deux entrées du cinéma », explique François Minebois, directeur adjoint du multiplexe de la métropole lilloise. La directrice des ventes France de Kinepolis, Anne-Sophie Le Guiader, ajoute : « Certes, nous serons confrontés à de l’incompréhension et à de la colère. Mais nos salariés sont plus peinés par la fermeture des cinémas que par ces mesures mises en place. »

 

Mercredi soir, au New Morning à Paris, alors que le concert de la chanteuse Robin McKelle se préparait, Catherine Farhi, qui dirige le club parisien, et l’une des rares salles de la capitale active durant l’été, se voulait sereine. Quitte à faire une embauche ponctuelle d’une ou deux personnes pour les prochains concerts afin « que l’entrée reste fluide » avec le nouveau protocole. « L’important, c’est de pouvoir travailler. Et puis avec le passe, il a été dit que le masque pourrait être retiré, ce sera plus agréable », glisse-t-elleMais, là encore, la crainte de voir le public plus jeune fuir les concerts du Festival All Stars, qui dure jusqu’à fin juillet, demeure.

 

 

Gilles Rof (Marseille, correspondant)Claire Mayer (Bordeaux, correspondante)Laurie Moniez (Lille, correspondante)Claire GuillotRosita Boisseau  (envoyée spéciale à Avignon)Sylvain Siclier et Sylvia Zappi

 

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May 6, 2021 6:37 AM
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« Nous avons plus que jamais besoin de théâtre… »

« Nous avons plus que jamais besoin de théâtre… » | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Propos recueillis par Baudouin Eschapasse dans Le Point - 6 mai 2021

ENTRETIEN. Un festival de théâtre d’un nouveau genre se tiendra les 6 et 7 mai à Bordeaux. Catherine Marnas évoque sa genèse et sa programmation.

 
Catherine Marnas entend « transformer son théâtre en une ruche bourdonnante d'artistes en répétition... » © Frédéric Desmesure

 

 

Ce sera un festival en petit comité… comme une répétition générale avant la grande reprise du 19 mai prochain. « Focus », la manifestation dédiée à la création contemporaine qui se tient cette semaine au théâtre national de Bordeaux en Aquitaine (TnBA) n'en devrait pas moins permettre aux jeunes troupes invitées de montrer enfin leur travail au public. À l'origine de ce nouveau festival, Catherine Marnas, directrice de ce centre dramatique national, en explique le principe.

 

Le Point : Le festival Focus, dont vous organisez la première édition les 6 et 7 mai prochains à Bordeaux, intervient juste avant la réouverture des salles de spectacle. Allez-vous pouvoir accueillir du public avant les autres théâtres ?

 

Catherine Marnas : Non. Nous ne pourrons malheureusement pas ouvrir nos portes au grand public. Cette édition sera réservée à un auditoire restreint de professionnels : programmateurs et directeurs de salle. Si l'une des propositions sera montrée en extérieur, ce ne sera que dans le cadre d'un protocole sanitaire très strict. Mais nous avons bon espoir que les spectacles qui seront montrés au TnBA pourront tourner dans l'Hexagone la saison prochaine. Comme tous les théâtres de France, nous attendons le 19 mai avec impatience…

 

Comment avez-vous vécu la saison dernière ?

 

Nous n'avons pu jouer que 19 fois sur la saison 2020-2021, là où, d'habitude, nous proposons entre 170 à 180 représentations par an. Mais nous avons quand même beaucoup travaillé. C'est tout le paradoxe de la crise que nous traversons. Notre lieu avait beau ne pas accueillir de spectateurs, nous n'avons pas cessé de répéter dans les trois salles de notre centre dramatique national. Si j'osais une image, je dirais que nous avons réalisé un travail de Pénélope. Comme la femme d'Ulysse, nous détricotions le soir ce que nous avions tissé pendant la journée. Certains de nos spectacles ont été repoussés quatre fois ! Cela veut dire que nous devions être prêts à la date dite, mais que les circonstances nous ont, chaque fois, contraints à retarder le moment où nous pourrions montrer le résultat de notre travail. Alors, nous reprenions les répétitions…

 

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Le festival que vous créez cette année est-il une réponse à la crise que nous traversons ?

 

Je l'ai imaginé avant la pandémie. Son objectif est de mettre en avant la création contemporaine. Je suis engagée de longue date dans ce projet qui vise à aider une nouvelle génération d'hommes et de femmes de théâtre à émerger. Je suis entourée de beaucoup de jeunes compagnies. Je dirige l'École supérieure de théâtre de Bordeaux Aquitaine (Estba), d'où sortent, tous les trois ans, quatorze diplômés. Si j'aime l'idée qu'ils se frottent à la vraie vie en sortant de chez nous, je souhaite néanmoins leur offrir la possibilité de montrer ce qu'ils font ici. Nous avons en Aquitaine de nombreux créateurs de talent, nous avons conduit avec eux de nombreux entretiens par vidéo pendant le premier confinement. Et tous nous ont dit la même chose : les conditions de production et de distribution sont de plus en plus difficiles.

Pourquoi ?

Les temporalités sont cruelles. Il faut deux ans en moyenne pour mettre sur pied un projet, pour réunir une coproduction, répéter et trouver des dates. Or, le monde change à une telle vitesse que ces jeunes ont envie de partager immédiatement leur travail. L'idée du festival Focus est de leur permettre de montrer une forme, même inaboutie, de ce qu'ils préparent. Un peu comme si un peintre organisait une journée « portes ouvertes », pour qu'on voie où il en est.

 

Vous allez montrer neuf spectacles, à différentes étapes de leur réalisation. Le premier d'entre eux fait penser à une chanson de Dominique A puisqu'il s'intitule Le Courage des oiseaux

Oui. C'est une lecture-performance de Baptiste Amann. Ce sera un geste en forme de « making-of » de la trilogie qu'il a écrite et qui sera programmée au Festival d'Avignon cet été. Cela va bientôt faire sept ans que Baptiste développe ce projet intitulé « Des territoires ». C'est une exploration géographique et générationnelle de la scène qui vise à répondre à une question : quelle histoire écrire lorsque'on est, comme ses personnages, héritiers d'un patrimoine sans prestige et représentants d'une génération que l'on décrit comme désenchantée ?… Les deux premiers spectacles ont été créés en 2015 et 2017. Baptiste ne présentera pas ici le troisième opus de ce projet, mais un spectacle où il racontera les sept années qu'il a passées sur les routes pour créer ces trois œuvres. Je ne sais pas encore très bien la forme que cela prendra. Je peux juste vous dire qu'il a demandé un piano sur scène et que je ne doute pas que cela sera très abouti.

 

Est aussi annoncée une lecture de Jérémy Barbier d'Hiver. De quoi s'agit-il ?

Ce sera un texte très personnel que Jérémy a écrit : le monologue d'un homme qui parle à la tombe d'un père qu'il n'a pas connu. Cette pièce dont le titre provisoire est Mine de rien est en quelque sorte une suite à la « carte blanche » que notre théâtre lui avait déjà proposée. Ce sera son premier spectacle personnel. Il en proposera une lecture au plateau…

 

Cet ancien élève de l'Estba est aujourd'hui membre du collectif « Les Rejetons de la reine » qui sera également programmé cette semaine.

 

Effectivement. Ce collectif, constitué outre de Jérémy, de Clémentine Couic, d'Alyssia Derly et de Julie Papin, s'est formé au cœur de l'Estba en 2019. Il présentera sa première création : Un poignard dans la poche. Un texte de Simon Delgrange qui sera d'ailleurs à l'affiche du TnBA en octobre 2021. L'histoire se développe autour d'un repas de famille. On y parle beaucoup de politique et cela dégénère très vite. C'est du théâtre contemporain de l'absurde que je situerais volontiers entre Roland Dubillard et Roger Vitrac.

 

Une table ronde, organisée le vendredi 7 mai, de 9h30 à midi, permettra aux « compagnons » du TnBA de partager avec le public la manière dont ils envisagent les « nouvelles relations entre équipes artistiques et lieux culturels ».© Pierre Planchenault

 

Quels seront les autres temps forts du festival ?

Julien Duval, fondateur du Syndicat d'initiative, proposera une forme courte, avec son acolyte Carlos Martins, autour d'une formule bien connue de Voltaire qui résonne étrangement par ces temps de Covid : « Il faut cultiver son jardin. » Une pièce qui est susceptible d'être jouée en appartement. Le collectif Os'o composé par des élèves de la première promotion de l'école (Bess Davies, Mathieu Ehrhard, Baptiste Girard, Roxane Brumachon et Tom Linton. Denis Lejeune étant « invité » pour l'occasion) mettra en scène un spectacle « jeune public » qui parlera d'ovnis et de science-fiction (Qui a cru Kenneth Arnold ?). Une pièce qui sera proposée, à la rentrée, dans les écoles du territoire. De son côté, Aurélie Van Den Daele adaptera La Chambre d'appel de Sidney Ali Mehelleb, un beau texte qui parle de mémoire. Enfin, Monique Garcia, cofondatrice du Glob Théâtre qu'elle dirige avec Anne Berger, jouera dans la rue une pièce étonnante (Fortune Cookie) à l'attention d'un seul spectateur à la fois. Pour ce faire, elle l'embarquera pour quelques minutes dans un tuk-tuk pour une parenthèse enchantée où il sera question de divination et de magie.

 

Les deux dernières propositions du festival présentent la particularité d'être très biographiques…

Yacine Sif El Islam et son compagnon, Benjamin Yousfi, raconteront l'agression homophobe dont ils ont été victimes en septembre 2020 et qui les a conduits à l'hôpital. En jetant ce choc sur le papier, en partageant les comptes rendus médicaux et l'avancée de l'enquête de police, Yacine met à distance ce traumatisme et signe un spectacle touchant (Sola Gratia) qui met en perspective cet événement avec des moments de son enfance.

 

Reste votre propre pièce qui raconte le destin d'un hermaphrodite du XIXe siècle, Herculine Barbin. Pourquoi avoir choisi d'adapter sur scène le destin de cette femme, devenue homme ?

J'étais partie pour adapter Le Rouge et le Noir, mais la pandémie m'a poussée à reporter ce projet. En racontant la vie d'Herculine, née femme en 1838, puis « réassignée » homme en 1860, sous le nom d'Abel, après examen médical, j'ai l'impression de traiter d'un sujet brûlant dans notre société. Lorsque je participe aux jurys qui doivent départager les 750 jeunes qui déposent un dossier pour intégrer notre école, je me rends compte que cette question de genre taraude cette génération. Je ne compte plus les candidats et candidates qui évoquent devant nous ce sujet lors des oraux. Or, c'est cela le théâtre pour moi : traiter dans l'urgence d'une question, à chaud. Partager avec des spectateurs, le temps d'une cérémonie païenne, une expérience qui nous bouleverse.

 

Allez-vous modifier votre programmation pendant l'été ?

Bien sûr. Nous allons prolonger les spectacles tout au long de l'été. Et jouer dehors s'il le faut. Le square en face du théâtre nous le permet. Nous avons plus que jamais besoin de théâtre…

2021ENTRETIEN. Un festival de théâtre d’un nouveau genre se tiendra les 6 et 7 mai à Bordeaux. Catherine Marnas évoque sa genèse et sa programmation.

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April 25, 2021 2:11 PM
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Occupation de théâtres : les directions entre deux sièges 

Occupation de théâtres : les directions entre deux sièges  | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Par Anne Diatkine dans Libération - 25 avril 2021

 

Souvent solidaires des mobilisations, les responsables des lieux de spectacle, qui tentent d’organiser leur réouverture, doivent composer avec la défiance et la perspective d’une occupation au long cours.

 

Jean-Marc Grangier, qui dirige la Comédie de Clermont, scène nationale, a été assez secoué, lorsqu’à sa question («Quand est-ce que vous pensez partir ?»), les occupants lui répondirent : «On compte tenir jusqu’à la présidentielle.» Plus d’un an, donc, dans le magnifique bâtiment conçu par l’architecte star Eduardo Souto de Moura, qui n’a pas encore été inauguré. Boutade ou non, et aussi solidaire qu’il soit avec les revendications portées par ses hôtes, le directeur du théâtre a compris qu’un déménagement en deux heures avant la réouverture des lieux ne serait pas possible, et qu’il fallait qu’il envisage avec eux les conditions de leur départ et un rétroplanning. «On a pris le temps de discuter pendant deux heures. Je leur ai demandé qu’ils arrêtent dans un premier temps l’occupation nocturne et dans un deuxième l’occupation diurne de manière à ce que les publics ne se croisent pas en période de pandémie. Le blocage des théâtres est de toute manière antagoniste avec leurs revendications, qui comprend la reprise de l’activité.»

 

Abrogation de la réforme de l’assurance chômage

Aussi bien les occupants que les équipes et les directions voudraient éviter un scénario catastrophe qui opposerait ceux qui travaillent et ceux qui occupent. «On n’a jamais envisagé de bloquer les théâtres» renchérit Denis Gravouil, secrétaire général de la CGT spectacle. Mais chacun le sait tout autant : parmi les revendications, il y a l’abrogation de la réforme de l’assurance chômage qui devrait entrer en application le 1er juillet et qui affectera tous les précaires. La solidarité et le souhait de faire tache d’huile, de ne pas restreindre le mouvement au seul périmètre artistique, sont parmi les ingrédients de ce mouvement qui essaime dans toute la France et plus de 100 théâtres depuis déjà sept semaines. Faut-il quitter les lieux au moment même où le rapport de force risque enfin d’émerger ? Jusqu’ici, les occupations dans les théâtres ont été superbement ignorées par le ministère, sans doute dans l’espoir que le mouvement s’éteigne de lui-même. La perspective d’une réouverture des salles mi-mai et l’analyse du rapport Gauron qui soumet différents scénarios possibles à l’issue de l’année blanche, suffiront-elles à changer la donne et permettre aux occupants d’organiser la tête haute leur départ ?

 

Ces problèmes et bien d’autres seront débattus ces lundi et mardi, avec des délégations de la plupart des lieux, qui se rencontrent pour la première fois dans l’emblématique Théâtre national populaire, à Villeurbanne, dirigé par Jean Bellorini. Une grande première en effet, car le mouvement, à la fois uni et disparate, agrège aussi bien des intermittents, des précaires, des étudiants et élèves des cours de théâtre, des gilets jaunes, ce qui rend chaque occupation spécifique aussi bien par ses modes d’action, sa vigueur, que par le type de relation avec les directions des théâtres. Hortense Archambault, directrice de la MC93 à Bobigny (Seine-Saint-Denis) et présidente de l’Association des scènes nationales, explique : «Ça se passe plutôt bien quand les théâtres sont occupés par des personnes que les équipes de théâtre connaissent déjà. Et plus mal quand ce n’est pas le cas.» Faute d’obtenir la considération des tutelles, les relations se sont durcies au fil des semaines. Le changement de vocabulaire est éloquent. Si les étudiants et les élèves «habitaient» le Théâtre de la Colline ou le TNS à Strasbourg, ils revendiquent aujourd’hui le terme d’«occupation». A Villeurbanne encore, le metteur en scène Jean Bellorini qui s’inscrivait «en solidarité totale» avec le mouvement, a commencé par ouvrir quatre loges avec des douches puis deux dortoirs distincts femmes et hommes à ses hôtes, adhérents à la CGT spectacle, et des membres du collectif unitaire 69. «Ils revendiquent que le théâtre soit le lieu de l’agora. Je suis d’accord avec eux.»

 

Soutenir les artistes émergents

Mais depuis quelque temps déjà, l’humeur a changé. Bellorini, à l’instar de la tribune initiée par des responsables de scènes dont Robin Renucci, interpelle le «silence du gouvernement qui conduit à un durcissement. Lequel se manifeste par des appels très réguliers à changer la hiérarchisation des priorités. L’ouverture des salles devient presque accessoire. Ce qui me semble inacceptable, c’est lorsque les occupants remettent en cause l’institution en demandant sa “mise à mort“. Je ne peux pas les accompagner. Aujourd’hui je reste à l’écart.» Même distance prise au Théâtre de la Cité à Toulouse, où le directeur du lieu n’est plus présent lors des AG, souvent houleuses. Plongé dans cette situation tempétueuse et complexe car il est à la fois pris à partie et solidaire, Jean Bellorini, pourtant en mesure de présenter des spectacles dans ses deux salles en mai, se demande s’il ne serait pas plus sage de repousser l’ouverture à l’automne. On le sent amer : «Le TNP a assumé tous ses contrats et les cessions qui n’ont pas eu lieu, on n’a pas eu recours au chômage partiel, car on n’allait pas demander à l’Etat une double subvention. Ce serait bien qu’on ne nous laisse pas seuls face à la crise sociale.»

 

Certaines directions le disent : la remise en cause des institutions qui peut être très violente – certaines banderoles clament : «Ils nous ont mis dedans, foutons-les dehors» – n’a pas que des inconvénients. Elle oblige à repenser la fonction des CDN et théâtres nationaux dans leurs contrées, et notamment la recherche effrénée d’artistes de renommée internationale. Jean-Marc Grangier : «Sur le territoire, certaines équipes artistiques sont très discrètes voire invisibles. Mais même si on les voit peu, elles font un travail conséquent, notamment en médiation, qu’il faut reconnaître, et peut-être que nous, les institutions, tellement obsédées par notre cahier des charges, notre soif de visibilité et de faire découvrir les grandes signatures, on les a un peu oubliées. Il ne faudrait pas qu’on participe à creuser davantage le fossé entre les têtes d’affiche et ces toutes petites compagnies composées parfois de gens très jeunes.» Une remise en cause créatrice si elle s’accompagne d’une proposition : «Je vais créer une ligne budgétaire pour ces artistes émergents et j’en discuterai avec la personne qui sera à ma place la saison prochaine» – Jean-Marc Grangier quitte le théâtre en juin prochain. Ce qui témoigne d’une certaine endurance : en mars dernier, lorsqu’il a proposé aux intermittents occupants de leur donner les moyens d’organiser leur propre festival en plein air en juin, contrat et cachets à l’appui, après avoir persuadé la municipalité de construire un plateau dans un jardin de la ville, son initiative a été refusée, car comprise comme une tentative de récupération.

 
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April 20, 2021 12:46 PM
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Non à la mise à l’arrêt du monde culturel    -    Une tribune signée par des responsables de scènes publiques

Non à la mise à l’arrêt du monde culturel    -    Une tribune signée par des responsables de scènes publiques | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Par des responsables de scènes publiques publié le 19 avril 2021 dans Libération

 

 

En même temps qu’il envisage une réouverture des lieux culturels le 15 mai, le gouvernement impose une transformation brutale de l’assurance chômage que dénoncent plus de 200 artistes et responsables culturels, de Laure Calamy à Jean-Claude Gallotta en passant par Corinne Masiero ou Charles Berling.
 
 
 

Monsieur le président de la République, Monsieur le Premier ministre, Mesdames et Messieurs les membres du gouvernement,

 
 

Nous sommes artistes, acteur·rice·s, auteur·rice·s, technicien·ne·s, directeur·rice·s de lieux culturels et, comme tous nos concitoyens, nous avons bien entendu et compris, durant cette année, qu’il allait falloir «apprendre à vivre avec le virus», que ce qui avait d’abord été considéré comme une situation exceptionnelle allait sans doute entraîner des modifications pérennes de nos manières de vivre et de travailler.

 

Nous pensions alors, «qu’apprendre à vivre avec le virus» consisterait à concevoir ensemble les modalités du maintien d’un service public des arts et de la culture en toutes circonstances.

 

Depuis plus d’un an, nos organisations professionnelles ont multiplié les propositions raisonnables de calendriers et de modalités de réouverture partielle. Tout comme pour l’école, il y avait là un enjeu politique et social essentiel, précisément en temps de crise. Et nous ne comprenons pas l’interminable mise à l’arrêt qui a été infligée à notre secteur.

Votre surdité et votre mutisme face à cette question fondamentale s’apparentent à un terrible choix de société, que vous avez fait.

 

Nous attendons donc fermement la proposition de calendrier de réouverture des lieux culturels et de convivialité, que vous avez évoquée pour le 15 mai.

Pour autant, nous voyons qu’au moment où vous esquissez cette perspective de nous rassembler à nouveau, vous n’hésitez pas à compromettre ces retrouvailles, en alimentant la division et la fracture sociale avec des projets de réformes des droits sociaux injustes et incompréhensibles dans ce contexte.

 

Ces jours meilleurs, promis et espérés, vous les placez délibérément sous les auspices des conflits sociaux.

Nous ne pouvons pas comprendre cette volonté d’imposer en pleine crise une transformation brutale de l’assurance chômage. Nous savons qu’elle engendrera pour l’ensemble des intermittent·e·s du travail, pour la jeunesse qui cherche à accéder à l’emploi, pour les salarié·e·s les plus fragiles, une aggravation de la précarité et une dégradation des conditions d’existence.

 

Comment envisagez-vous un retour à la vie dans de telles conditions ?

Beaucoup d’entre nous travaillent dans des lieux occupés depuis plus d’un mois, au cœur de conflits sociaux qui germent partout en France, que vos annonces provoquent et nourrissent de désespoir et de colère.

 

Aujourd’hui, à l’approche d’échéances électorales majeures dans notre pays, l’indifférence gouvernementale que vous opposez aux mouvements en cours aura des conséquences profondes.

Nous vous demandons solennellement de prendre en considération une situation qui, dans son ensemble, témoigne d’un appel désespéré à créer un espace de dialogue qui permettra de revenir à la vie sociale et sensible.

 

Voilà ce que les occupant·e·s des lieux culturels essayent de vous faire entendre. Voilà ce que nombre d’expert·e·s des questions sociales et économiques essayent de vous faire entendre.

Voilà ce que les élu·e·s des grandes villes de France, de tous bords politiques, ont également essayé de vous faire entendre, il y a quelques jours, via un communiqué de l’association France urbaine.

 

Voilà ce que tout le monde, finalement, essaie de vous faire entendre. Et c’est ce que nous essayons de faire à notre tour.

Entendez-vous ?

 

Signataires : 

Robin Renucci, directeur des Tréteaux de France, président de l’ACDN, Ariane Ascaride, comédienne, Nicolas Bouchaud, comédien, Joris Mathieu, auteur, metteur en scène, directeur du Théâtre Nouvelle Génération-CDN de Lyon, Maguy Marin, chorégraphe, Béatrice Dalle, actrice, Emilie Capliez,   directrice de la Comédie de Colmar-CDN, Benoît Lambert,  metteur en scène, directeur de la Comédie de Saint-Etienne,   Vincent Dedienne, acteur, Nathalie Garraud, directrice du Théâtre des 13 vents-CDN Montpellier, Jean Bellorini, metteur en scène et directeur du TNP, Chloé Delaume, autrice, Alice Diop,   cinéaste, David Bobée, metteur en scène, directeur du Théâtre du Nord et du CDN de Normandie Rouen, Joey Starr, musicien et acteur, Charles Berling, acteur, directeur du Théâtre Liberté, scène nationale de Châteauvallon, Philippe Torreton, comédien, François Morel, comédien, Laure Calamy, actrice, Julie Deliquet, metteuse en scène et directrice du Théâtre Gérard Philipe-CDN de Saint-Denis, Clothilde Hesme,   actrice, Jean-Claude Gallotta, chorégraphe, Hervé Le Tellier,  écrivain, Stéphane Brizé, réalisateur, Christophe Honoré, metteur en scène et réalisateur, Isabelle Gélinas, actrice Collectif (La) Horde, chorégraphes, Cécile Ladjali, écrivain, Antoine Volodine,  auteur, Christian Rizzo, chorégraphe et directeur ICI-CCN Montpellier-Occitanie, Irène Jacob, actrice, Virginie Boccard,   directrice-Les Quinconces et l’Espal, scène nationale Le Mans, Boris Charmatz, chorégraphe, Gérard Mordillat, auteur, metteur en scène, Judith Henry, actrice, Arnaud Meunier,  directeur de la MC2 Grenoble, Corinne Masiero, actrice,   Claire Lasne-Darcueil, comédienne et metteuse en scène, Jean-Louis Martinelli, metteur en scène, Sandrine Mini, directrice - TMS - Sète - Scène nationale de l’archipel de Thau, Emmanuel Demarcy-Mota, metteur en scène, directeur du Théâtre de la Ville et du Festival d’Automne, Nicolas Royer, directeur de l’Espace des arts-Scène nationale de Chalon-sur-Saône, Marcial Di Fonzo Bo, metteur en scène et directeur de la Comédie de Caen, Anne Alvaro, actrice, Jacques Bonnaffé, acteur, Marcel Bozonnet, metteur en scène, Phia Ménard, chorégraphe, Jean-Claude Mourlevat, écrivain, Jean-François Sivadier, metteur en scène, Maud Le Pladec,  chorégraphe et directrice du Centre chorégraphique national d’Orléans, Anna Mouglalis, actrice, Olivier Cadiot, écrivain,   Jacques Fansten, réalisateur, Jean-Charles Massera, artiste-écrivain, Chloé Dabert, directrice de la Comédie de Reims-Centre dramatique national, Renaud Herbin,  marionnettiste directeur du TJP Centre dramatique national de Strasbourg-Grand Est, Daniel Jeanneteau, directeur du T2G-théâtre de Gennevilliers, François Rancillac, metteur en scène Cie Théâtre sur paroles, Sylvie Gouttebaron, écrivain, Matthieu Cruciani, directeur CDN Colmar,   Marc Lainé, directeur de la Comédie de Valence, Centre dramatique national Drôme Ardèche,   Julia Vidit, metteuse en scène, Théâtre de la Manufacture  -CDN de Nancy, Pascale Daniel-Lacombe, directrice CDN Comédie Poitou-Charentes, Jacques Vincey, metteur en scène et directeur du Théâtre Olympia-CDN de Tours, Jacques Peigné, directeur délégué Comédie de Caen-CDN de Normandie,   Carole Thibaut, autrice, metteuse en scène, directrice du CDN de Montluçon, Muriel Mayette-Holtz, directrice du Théâtre national de Nice, Rodolphe Dana, directeur du Centre dramatique de Lorient, Benoît Joëssel, directeur administratif et financier du Théâtre national de Nice, Lucie Berelowitsch, directrice du Préau, CDN de Normandie-Vire, Sébastien Juilliard, directeur adjoint du Préau CDN de Normandie-Vire, Martin Palisse, directeur le Sirque, Olivier Saccomano, auteur et directeur du Théâtre de 13 vents-CDN de Montpellier, Anne Tanguy, directrice des 2 Scènes, Scène nationale de Besançon, Fabrice Boy, administrateur CDN Besançon Franche-Comté, Nicolas Dupas, directeur adjoint du Théâtre de Lorient, CDN, Catherine Meneret, direction adjointe du centre chorégraphique national de Caen, Alban Richard,   chorégraphe, directeur du centre chorégraphique national de Caen, Ariane Lipp, directrice adjointe CDN Nancy, Lucien Ammar-Arino, directeur délégué /VIADANSE - CCN de Bourgogne Franche-Comté à Belfort, Anne Monfort, metteuse en scène,   Joëlle Smadja, directrice - CDCN Pole Sud Strasbourg, Corinne Gaillard, directrice /La Place de la Danse-CDCN Toulouse /Occitanie, Olivier Letellier, metteur en scène Théâtre du Phare,  Laurence Méner, directrice adjointe /TJP CDN de Strasbourg Grand Est, Eric Lamoureux, chorégraphe directeur de VIADANSE Centre chorégraphique national de Bourgogne Franche Comté à Belfort, Adèle Lhoutellier, secrétaire générale, TJP - CDN de Strasbourg, Mathieu Bauer, metteur en scène, directeur du Nouveau Théâtre de Montreuil, Marion Aubert, autrice, Maëva Paquereau, chargée de projet de territoire - Collectif FAIR-E /CCN de Rennes et de Bretagne, Catherine Marnas, metteuse en scène et directrice du TnBA, Célie Pauthe, metteuse en scène et directrice du CDN Besançon Franche-Comté, Bernard Chambaz, écrivain, Clémence Sormani, directrice déléguée Ballet national de Marseille, Didier Grimel, directeur adjoint Comédie de Béthune CDN Hauts-de-France, Sandra Neuveut, directrice de La Briqueterie, Luc Beraud, cinéaste, Yves Beaunesne, metteur en scène Compagnie de la Chose incertaine, Mme miniature,   créatrice son musicienne, Nadia Minisini, directrice adjointe Le Gymnase CDCN Roubaix - Hauts de France, Laurent Heynemann,   réalisateur, Richard Sandra, comédien, Constance Dollé,  comédienne, Lorraine de Sagazan, metteuse en scène, Bruno Bouché,   directeur artistique Ballet de l’Opéra national du Rhin,   Julie Jacovella, comédienne, Thierry Malandain, directeur CCN - Malandain Ballet Biarritz, Alexandra Tobelaim, metteuse en scène directrice du NEST – CDN de Thionville, Elise Vigier, metteuse en scène, Marianne Alphant, auteure, Didier Stephant, artiste plasticien, Aleksandra de Cizancourt, comédienne /Collectif In Vitro, Stéphane Gil, directeur délégué - ThéâtredelaCité - CDN Toulouse Occitanie, Galin Stoev, artiste directeur - ThéâtredelaCité - CDN Toulouse Occitanie, Emmanuelle Boisanfray,    administratrice du Ballet de l’Opéra national du Rhin, Céline Breant, directrice du Gymnase /CDCN Roubaix-Hauts de France,   Macha Makeieff, artiste et directrice théâtre national de Marseille La Criée, Benoît Peeters, écrivain, Stephan Lauret, directeur La Manufacture CDCN Bordeaux La Rochelle, Liliane Schaus,  directrice de La Maison CDCN, Borja Sitjà, directeur de l’Archipel-Scène Nationale de Perpignan, Simon Delétang, directeur du Théâtre du Peuple de Bussang, Yoann Barbereau, écrivain, Olivier Atlan, directeur Maison de la culture de Bourges, Emmanuel Ruben, directeur littéraire et artistique Maison Julien-Gracq, Farid Bentaieb, directeur /Le Trident scène nationale de Cherbourg en Cotentin, Annabelle Simon, metteuse en scène Cie Les immersives,   Aline Chassagne, adjointe à la culture Besançon,    Jean-Christophe Laurier, comédien, David Seigneur, comédien théâtre Gérard-Philipe Saint Denis, Damien Godet, directeur /Scène nationale du Sud-Aquitain, Emmanuel Noblet, comédien,   Jérôme Prieur, écrivain et réalisateur, Lise Saladain,   directrice déléguée, La Manufacture CDCN Bordeaux La Rochelle, Maia Sandoz, metteuse en scène, Christian Benedetti, acteur /metteur en scène /directeur du Théâtre-Studio à Alfortville, Kevin Keiss, auteur, dramaturge, maître de conférence associé à l’université BordeauxMontaigne, Daniel Jeanneteau, directeur du T2G - théâtre de Gennevilliers, Nelson-Rafaell Madel, comédien, metteur en scène, Astrid Bayiha, autrice, comédienne et metteuse en scène, Adrien Bernard-Brunel, artiste-interprète, Jonathan Prigent, régisseur général, Jeanne Benameur, écrivaine, Xavier Deranlot, acteur /metteur en scène, Julie Bardin, régisseuse lumière, Arlette Farge, historienne, Lise Facchin, auteure, metteure en scène, Le Ring, Maud Le pladec, directrice Centre Chorégraphique National d’Orléans, Irina Solano, actrice, Anne Barbot, metteuse en scène et comédienne, Paul Moulin,   comédien /metteur en scène - Théâtre de l’Argument, Pierre Tanguy, musicien, Claire Pouderoux, comédienne, Maëlle Dequiedt, metteuse en scène - Cie La Phenomena, Kristina Chaumont, comédienne, Alexandre Dain, directeur adjoint le quai CDN Angers pays de la Loire, Christophe Rauck, metteur en scène directeur du Théâtre Nanterre-Amandiers, Beatrice Venet,  metteuse en scène de la cie Rêve Mobile, Camille Davin, directrice /compagnie ia, Sarah Horoks, Comédienne /metteuse en scène /La C.T.C, Élie Triffault, metteur en scène- Auteur- Comédien -Compagnie 55, Yannick Thebault, Rêve Mobile, Sophie Chesne,   directrice adjointe La Comédie de Saint-Etienne, Michel Chaumont,  Débats et rencontres, théâtre des Amandiers, aujourd’hui retraité, Anne-Marie Peigné, directrice adjointe déléguée au développement Théâtre Nanterre-Amandiers, Bruno Cochet, directeur du Théâtre de Rungis, Tatiana Breidi, directrice Le studio d’Asnières, Bruno Brinas, concepteur lumière, Jenny Macquart, metteuse en scène, Lucie Joliot, éclairagiste et scénographe, Christophe Marquis, directeur L’échangeur-CDCN Hauts-de-France, Dominique Fabre, auteur, Clara Benoit-Casanova, autrice, comédienne, Sonia Kechichian, directrice, Théâtre d’Angoulême, scène nationale, Camille Claris,   comédienne, Olivier Faliez, comédien, Frédéric Danos, poète, Eric Massé, co-directeur du Théâtre du Point du Jour, Angélique Clairand, co-directrice du Théâtre du Point du Jour, Xavier Deranlot,  acteur /metteur en scène, Thomas Jolly, artiste-directeur Le Quai CDN - Angers /Pays de la Loire, Emmanuelle Vo Dinh, chorégraphe-directrice, Nasser Djemaï, auteur, metteur en scène, directeur du Théâtre des quartiers d’Ivry – CDN du Val-de-Marne,  Philippe Triboit, scénariste-réalisateur, Mexianu Medenou,   comédien, Leïla Anis, autrice associée /TGP-CDN de Saint-Denis, Laurence De Magalhaes, directrice Le Monfort /Festival Paris l’été, Stephane Ricordel, directeur du Théâtre le Monfort et festival Paris L’été, Roland Auzet, metteur en scène compositeur, Christine Citti, comédienne, autrice, Laurent Vacher, metteur en scène, Aurélien Recoing, acteur - metteur en scène - réalisateur, Sylvain Maurice, directeur CDN Sartrouville,   Pierre-Yves Lenoir, directeur des Célestins, Théâtre de Lyon,   Emmanuel Meirieu, metteur en scène /auteur de théâtre, Benoît André, directeur de La Filature - Scène nationale de Mulhouse,   Pierre Maillet, acteur /metteur en scène /Les Lucioles, Stéphane Malfettes,   directeur des SUBS, Lyon, José-Manuel Gonçalves,  directeur /CENTQUATREPARIS, Severine Chavrier, directrice CDNO, Hélène Joly, directrice déléguée terrain I Boris Charmatz,   Claudia Stavisky, directrice Célestins Théâtre de Lyon, Mehdi Guellati, administrateur adjoint d’un CDN, Paul Desveaux, metteur en scène, Vincent Garanger,   comédien,    Pauline Sales,  autrice, Céline Le Roux, directrice adjointe Théâtre Nouvelle Génération- CDN de Lyon, David Lescot, auteur, metteur en scène,   Dominique Hervieu, directrice de la Maison de la danse, Mathurin Bolze, directeur artistique Cie MPTA /festival Utopistes, Anne Theron,  Compagnie nationale Les Productions Merlin, Sinan Bertrand, acteur, Luc Rosello, directeur CDNOI,    Anne-Laure Liégeois, metteuse en scène, Olivier Dutilloy, comédien, Franck Manzoni, comédien, Théâtre National Bordeaux Aquitaine, Isabelle Bridot, directrice Les Hivernales - CDCN Avignon, Pierre Cattan, producteur et fondateur du studio Small Bang, Adrien De Van, directeur Théâtre Paris /Villette, Lydie Salvayre,  autrice,   Jeanne Balibar, actrice, Catherine Corsini,  cinéaste,   Marina Foïs, actrice, Michel Hazanavicius,    cinéaste, Pascale Ferran, cinéaste.

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April 13, 2021 4:10 PM
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Occupant.e.s du TNS : «  Nous sommes vos suicidé-e-s »

Occupant.e.s du TNS : «  Nous sommes vos suicidé-e-s » | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Tribune signée par les occupant.e.s du TNS, et publiée par Jean-Pierre Thibaudat dans son blog Balagan 13 avril 2021


Il y a plus d’un mois, dans la foulée de l’Odéon, les élèves de l’école du TNS et d’ailleurs occupaient le Théâtre National de Strasbourg. Aujourd’hui plus d’une centaine de lieux culturels sont occupés. En marge des revendications professionnelles et sociales dûment répertoriées par toutes et tous, les occupant.e.s du TNS écrivent aujourd’hui cette tribune. Un cri d’alarme, une arme de lutte.

 

« Nous avons 22 ans, 25 ans, 23 ans, 19 ans, 27 ans, 18 ans, 21, 24 et 26. L’une de nous a eu 20 ans la semaine dernière, derrière les portes closes de ce théâtre. Et combien d’autres ont fêté et fêteront leurs 20 ans seul-e-s?

 

Nous avions des rêves pour chaque anniversaire à venir. Des objectifs, des projets, des promesses. Nous devions grandir, encore, chercher, saisir, sentir, construire, ensemble et dans toutes les langues, le monde de demain. Étendre nos bras, nos jambes, enjamber, courir. La pandémie nous a coupé nos membres. A nous, jeunesse amputée, mutilée, vous avez répondu «courage», «espoir», «patience». Alors nous nous sommes armé-e-s, oui, de patience, nous avons espéré, attendu, prié, nous nous sommes confinés, nous nous sommes masqués, nous avons accepté, d’annuler, d’arrêter, d’interrompre. On s’est résigné à nos écrans. On s’est stoppé en pleine route sur des longs chemins. Figé dans l’élan. En équilibre. Les amitiés naissantes, empêchées, les rencontres, empêchées, l’apprentissage, empêché, l’expérience, empêchée. La pensée, confinée. Empêchée.

 

Vous nous aviez dit que nous étions les forces du rêve. Mais l’espoir ne tient pas «coûte que coûte». Et le rêve s’abîme. Et le courage s’épuise. Et ça ne suffit tout simplement plus, car ça fait déjà trop longtemps qu’on espère, et nos réserves ne sont pas infinies, elles s’amenuisent, se réduisent en peau de chagrin.

 

NON, NOUS NE DANSERONS PAS TOUJOURS, NON, NOUS NE RÊVERONS PAS TOUJOURS, NON, NOUS NE SURVIVRONS PAS QUOI QU’IL ARRIVE, OUI, DES DESTINS SERONT BRISÉS, OUI, DES EXISTENCES SERONT CONDAMNÉES, OUI, UNE GÉNÉRATION EST SACRIFIÉE.

 

Nous ne vivons pas dans le déni de la pandémie. Nous voulons apprendre à vivre avec elle là où le gouvernement nous exhorte à attendre des jours meilleurs. Nous ne pouvons plus attendre un futur sans cesse mort-né. Un jour viendra où nous nous ne pourrons plus espérer, croire, attendre. Et qui prendra la relève ? Les plus jeunes d’entre nous, les adolescents et les enfants seront-ils encore capables de rêver à un autre état du monde ? À 14 ou 15 ans, quand on s’est déjà habitué à ne pas connaître le visage des autres, comment peut-on imaginer un monde solidaire ? À moins que ce ne soit cela finalement l'objectif des arbitrages: enterrer pour toujours l'idée que l'on peut vivre dans la pluralité. L'idée que l'autre peut nous aider. Qu'est-ce qu’il restera alors ? Une société où l'on étudie seul-e, où l'on travaille seul-e, où l'on jouit seul-e, où l'on meurt seul-e. Oui, cette société-là entretient et garantit un fonctionnement économique effréné, au détriment de toute logique humaine. Nous savons que l'argent ne fait plus le bonheur de notre génération : nous apprenons chaque jour le goût amer de sacrifices et de solitudes qu'il a désormais. Et nous ne pouvons même pas vomir : nos ventres sont vides. Notre seule nourriture est une colère immense. Et cette colère sera notre puissance d’être. La mort lente qui rampe sur nos corps, mort sociale, mort physique à laquelle nous condamne le gouvernement, nous allons nous en défendre, nous aussi « coûte que coûte », avec les dents, les ongles. Avec les pavés, avec le feu.

 

Ici, à l’intérieur des théâtres où nous nous sommes enfermés, plus les jours passent, plus nous sommes inquiets. Ne croyez pas que nous dormons. Ne croyez pas que nous rêvons. Nous avons les yeux grands ouverts. Plus les jours passent, plus nos mains sont serrées. Plus les jours passent, et plus nous sommes dangereux. Nos révoltes ne sont pas culturelles. Notre révolution est humaine. Entendez-nous, chaque jour qui passe, nous sommes affamés mais pas affaiblis. La peur qui grandit nous fait vivre. Nous sommes décidés à en découdre avec la marche inacceptable du monde. Nous ne refusons pas la peur, parce qu’elle est dans nos mains, dans nos poings serrés. Parce que sans elle, sans cette force qui nous pousse encore, encore, encore, encore, nous serons définitivement sans avenir.

 

Il n’y a pas de porte de sortie pour nous. Entendez-nous bien: pour nous, il n’y aura pas d’autre possibilité que de lutter. Pas d’autre poésie que l’action réelle. Que peut-on perdre de plus? Nos lieux de pensée, de création, nos lieux de recherche, de travail nous ont été enlevés. Nous avons été laissés de côté, perdants dans tous les arbitrages, inlassablement condamnés, nous avons été, tout le long de cette crise, depuis plus d’un an, vos prêts-à-sacrifier Nous ne sommes pas votre priorité, nous l’avons compris. Un pays qui oublie sa jeunesse, qui sacrifie sa jeunesse, qui néglige sa jeunesse, un pays qui assassine sa jeunesse –est-il viable? Vous nous laissez tomber, et il faudra que vous l’assumiez. Nous ne sommes pas vos actifs marchands et productifs, nous sommes la génération du futur, nous sommes vos suicidé-e-s.

 

Nous vous avons appelé. Nous avons habité, occupé, crié à nos fenêtres.

 

Vous avez mis en balance les existences humaines, vous les avez catégorisées en valeurs marchandes par les termes «essentiel» et «non-essentiel». Nous sommes vos suicidé-e-s. Vous avez gardé nos lieux de vie fermés. Et quand nous avons protesté, votre seule réponse a été, encore, de clamer notre inutilité. Vous nous laissez crever. Nous sommes vos suicidé-e-s.

 

Vous avez frotté l’injustice jusque dans nos visages. Qu’est ce qui ressemble plus à une salle de spectacle, de concert, qu’une église? Qu’est ce qui ressemble plus à un amphithéâtre d’université qu’une assemblée parlementaire? Pourquoi les émissions télévisées peuvent-elles accueillir du public pendant que nous sommes réduits, sans cesse, au distanciel? Pourquoi peut-on acheter mais pas apprendre, pas penser? Nous sommes vos suicidé-e-s.

Vous nous avez refusé des aides à l’emploi et à l’insertion. Nous, étudiant-e-s qui allons faire notre entrée dans un monde professionnel sinistré, profondément fragilisé par la crise, embouteillé, miné par une concurrence accrue, vous nous avez refusé cet accompagnement. Vous nous refusez une place, des créneaux pour la jeunesse dans le monde futur. Vous refusez l’abaissement du seuil d’heures pour les primo-entrants. Vous nous refusez un avenir.Nous sommes vos suicidé-e-s.

Vous nous laissez démuni-e-s. Vous nous laissez disparaître.Vous n’avez pas fini de compter vos morts. Nous sommes vos suicidé-e-s. Nous avons vingt ans. Et nous sommes vos suicidé-e-s. Nous ne laisserons personne dire que c’est le plus bel âge de la vie. »

Les élèves-occupant-e-s du Théâtre National de Strasbourg 

 

Légende photo : Le théâtre National de Strasbourg occupé les élèves de son école © Gulliver

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April 9, 2021 2:16 PM
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Crise liée au Covid-19 : sans ressources, les jeunes artistes au bord de l’implosion

Crise liée au Covid-19 : sans ressources, les jeunes artistes au bord de l’implosion | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Par Sandrine Blanchard dans Le Monde - 9 avril 2021

 

Les annulations et reports de spectacles précarisent les aspirants à l’intermittence, que la pandémie prive de revenus.

 

Diplômé à l’automne 2019 du Conservatoire national supérieur de musique et de danse (CNSMD) de Lyon, Quentin Rebuffet n’a plus de revenus : « Je vis sur mes réserves, et, si ça continue, je vais devoir faire appel à ma famille. » A 29 ans, ce violoncelliste passionné par la musique de chambre a eu la malchance de subir de plein fouet l’impact de la crise sanitaire sur le secteur culturel : « C’est vraiment une histoire de calendrier. Avec toutes les dates de concerts annulés, je n’ai pas pu faire les heures qui m’auraient permis d’entrer dans le régime de l’intermittence du spectacle et, du coup, je n’ai pas pu bénéficier de l’année blanche. » Ses « réserves », il les doit aux quelques mois de cours qu’il a donnés comme remplaçant au conservatoire, au sortir de ses études. « Cela m’a permis de toucher le chômage, mais mes indemnités se sont arrêtées depuis deux mois », souligne-t-il.

 

Lire le récit : La « génération Covid », stoppée dans son envol, entre angoisse et résilience

Quentin Rebuffet fait partie de ces nombreux jeunes diplômés dans le milieu artistique coupés dans leur élan par la fermeture des lieux culturels. « Quand j’étais étudiant, jamais je n’aurais imaginé que, un an et demi après ma sortie d’une grande école, où j’ai eu de bons résultats, je me retrouverais sans emploi et dans une situation si précaire », témoigne le violoncelliste. Il a envoyé, en vain, des lettres de candidature pour « cachetonner » dans des orchestres, mais, « comme ils fonctionnent actuellement en mode réduit, ils font appel à moins de musiciens et privilégient, ce qu’[il] comprend, ceux avec qui ils travaillent déjà ». Quentin Rebuffet croise désormais les doigts pour que la dizaine de concerts qu’il devrait faire cet été dans des festivals puisse bien avoir lieu.

« Incertitude perpétuelle »

« Cela aurait dû être une bonne année, mais des dizaines de contrats ont été annulés à cause des mesures contre le Covid », dit, avec lassitude, Juliana Plançon. A 27 ans, cette violoniste en master 2 au CNSMD de Lyon a eu « la chance » d’obtenir son intermittence juste avant le premier confinement. Mais, depuis, « tout s’est annulé, hormis quelques contrats de captation avec l’Opéra de Lyon ». Et, avec la fermeture des écoles, même les interventions en milieu scolaire ont été stoppées.

Élise Noiraud, comédienne : « L’année blanche va entraîner de fortes chutes de revenus. Chez les intermittents, la bombe sociale arrivera à l’été »

Après cinq années de conservatoire, « sans compter les études préparatoires, j’ai de l’amertume et la colère commence à monter », ne cache pas la musicienne. Etant parvenue, malgré tout, à cumuler 250 heures en un an, elle est loin des 507 heures nécessaires au renouvellement de son intermittence et redoute de voir son taux d’indemnités baisser drastiquement.

Même pour ceux qui sont installés depuis plus longtemps dans un métier artistique, « l’impact professionnel de la crise sanitaire est très violent », insiste Elise Noiraud. Après le succès de son spectacle Le Champ des possibles, en juillet 2019 au festival « off » d’Avignon, cette comédienne, autrice et metteuse en scène aurait dû jouer tout le mois de novembre 2020 au Théâtre du Rond-Point, à Paris, et cumuler sur l’année quelque soixante-dix dates de tournée.

 

Désormais, elle jongle avec l’« incertitude perpétuelle », fait le point chaque mois sur les reports ou annulations avec les lieux où elle était programmée en bataillant afin de « sauver les meubles, financièrement ». Car, avec le chômage partiel, les cachets ne représentent que 5 heures au lieu de 12 heures. « Le risque, à l’issue de l’année blanche, est de se retrouver avec un taux minimal aux alentours de 40 euros par jour, ce qui va entraîner de fortes chutes de revenus, calcule-t-elle. Chez les intermittents, la bombe sociale arrivera à l’été », prédit la comédienne.

 

 

Le calendrier de sa compagnie a été bouleversé. « La création de notre nouveau spectacle, l’adaptation de Ressources humaines, d’après le film de Laurent Cantet, initialement prévue pour cet automne, a dû être décalée d’un an. Cela devient très compliqué de monter des coproductions. » En cause : l’embouteillage de spectacles en attente de programmation. Elise Noiraud éprouve « un sentiment paradoxal » : « On ne peut pas dire que l’Etat n’a rien fait – l’année blanche a été primordiale –, mais on se rend compte que ce ne sera pas suffisant. »

Appel aux dons

Pour l’heure, Quentin Rebuffet répète à ses frais et n’envisage pas une seconde de renoncer à son métier. « Je suis un idéaliste, j’aime profondément ce que je fais. Les prochains mois vont être difficiles, mais je ne suis pas prêt à abandonner mon rêve », assure-t-il. Juliana Plançon veut rester « confiante », malgré « le peu d’écoute accordé à la jeunesse et à la culture ».

Trop d’interprètes, trop de créations, pas assez de diffusion, ce triangle infernal risque d’aggraver la précarité des jeunes artistes qui ne sont plus étudiants et pas encore intermittents

Le réalisateur Bertrand Guerry, habitué dans son travail à côtoyer beaucoup de compagnies de danse, s’inquiète pour tous ces diplômés formés dans des écoles d’excellence qui, avec la crise sanitaire, vont être victimes d’une « double peine » : « Ils auront davantage de difficultés à être engagés et vont être confrontés à une année blanche de création sur 2021-2022 à cause d’un trop-plein de spectacles. » Trop d’interprètes, trop de créations, pas assez de diffusion, ce triangle infernal risque d’aggraver la précarité des jeunes artistes qui ne sont plus étudiants et pas encore intermittents.

 

Lire l’enquête : La saison sinistrée des intermittents du spectacle

Sous le titre « Soutenons le spectacle vivant », un appel aux dons vient d’être ouvert en faveur de ces jeunes en difficulté. Lancée à l’initiative du producteur et diffuseur Pierre Beffeyte, ancien président de l’association Avignon festival & compagnies (qui coordonne le « off »), du nouveau magazine trimestriel G.I.V.E., consacré aux « nouvelles générosités », avec le soutien d’Antoine Vaccaro, président de Force for Good et du fonds Globale Philanthropie, cette collecte vise à « apporter une aide individuelle à des jeunes en situation de précarité identifiés par les conservatoires et les écoles », explique Pierre Beffeyte. « Nous nous donnons deux mois pour réunir au moins 200 000 euros », précise Antoine Vaccaro.

 

Article réservé à nos abonnés Lire aussi  Le revenu brut mensuel moyen des intermittents a diminué de 400 euros en 2020, selon l’Unédic

« Pour mes parents, le fait que j’intègre un conservatoire national constituait une garantie pour l’avenir. Aujourd’hui, je les sens inquiets », constate Quentin Rebuffet. Dès qu’il leur parle d’un éventuel projet, la première question est : « De combien sera le cachet ? »

 

Illustration : OLIVIER BONHOMME

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April 4, 2021 12:15 PM
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Elena et Coline, occupantes de la Colline : “Ce que l’on veut faire entendre, c’est la voix de la jeunesse”

Elena et Coline, occupantes de la Colline : “Ce que l’on veut faire entendre, c’est la voix de la jeunesse” | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Publié dans Télérama le 4 avril 2021

 

ÊTRE ÉTUDIANT EN TEMPS DE PANDÉMIE – Depuis début mars, les deux futures comédiennes, soucieuses de leur avenir, ont pris place dans le théâtre parisien. Elles racontent leurs inquiétudes face à leur avenir incertain et leurs revendications.

 

Des slogans zèbrent toute la façade du Théâtre de la Colline, niché derrière la place Gambetta, dans le 20e arrondissement de Paris. Ils brillent sous le soleil, ce matin du 31 mars, et empruntent avec astuce la charte graphique colorée du théâtre pour dérouler leurs formules. Les revendications et l’irrévérence s’y mêlent avec humour. À l’intérieur, Coline et Elena nous attendent en contrebas des marches, à la croisée de la librairie et des vestiaires. C’est là leur dortoir comme le QG de leur mobilisation, depuis que le 9 mars, elles sont venues avec d’autres apprentis des métiers de la scène, occuper le théâtre. Elles s’y relaient jour et nuit avec une centaine d’autres futurs artistes, moyennant un quota de trente personnes maximum. Leur vie y est réglée selon des principes décidés ensemble, en assemblée générale, tenues à deux pas de la grande salle où le directeur du théâtre nommé en 2016, l’auteur-metteur en scène Wajdi Mouawad, répète sa nouvelle création.

Coline, 27 ans, a quitté une troisième année de médecine et sa Touraine natale pour devenir comédienne. Elle suit, à Paris, la dernière année d’une formation professionnelle dans un conservatoire d’arrondissement. Elena, 24 ans, Parisienne d’origine, vient d’intégrer en octobre le fameux Conservatoire national supérieur d’art dramatique de Paris. Toutes deux assument leur rôle de porte-parole du jour auprès de la presse, cherchant toujours le mot juste. La semaine dernière, Elena a représenté les « occupants de la Colline » avec cinq autres jeunes mobilisés (quatre filles et un garçon) dans une réunion de deux heures organisée sur Zoom avec des hauts fonctionnaires du ministère de la Culture. Première étape obtenue dans un parcours qu’elles imaginent long et veulent voir aboutir à des mesures concrètes. Elles disent ici ce qui les anime, les mobilise et leur font désirer un avenir meilleur.

 

Pourquoi vouloir devenir comédienne ?
Elena :
 Le choix du cœur depuis toujours. Pas de réponse plus précise à donner !

Coline : La vocation est venue plus tard, quand, après avoir vu un spectacle de sortie d’école d’un ami comédien, je suis rentrée en larmes chez moi. J’ai mis trois ans à faire le pas. Ne pas l’oser aurait été un éternel regret.

Comment avez-vous vécu les confinements successifs ?
E. :
 Alors que je préparais le concours du CNSAD depuis plusieurs mois, le premier confinement a décalé les épreuves 2020 qui n’ont pu avoir lieu qu’en octobre. Pendant une année entière, j’ai donc eu la tête dans le guidon, même l’été, tant cette épreuve est difficile (1 600 candidats pour 30 places seulement). Cette période a été lourde de stress avec des cours de jeu en ligne, et un manque cruel de théâtre. Heureusement, les cours ont pu avoir lieu pendant le deuxième confinement…

C. : Tout s’est arrêté, lors du premier confinement, dans mon conservatoire d’arrondissement. Les cours n’ont pas repris en mai et l’année a été validée au vu de notre engagement dans le travail. L’année scolaire suivante a repris en septembre, mais comme les élèves de troisième cycle de conservatoire sont considérés comme des praticiens amateurs, tout s’est arrêté, à nouveau, en octobre au profit de cours sur Zoom. Je n’ai repris qu’en janvier.

“On ne détient pas de recette parfaite pour conduire une mobilisation alors, depuis le début, on essaye tout”, Coline

Comment a commencé l’occupation de la Colline, le 9 mars dernier ?
E. :
 Dès le 4 mars, avec ma classe du Conservatoire, je suis allée aux AG de l’Odéon. Le mot est passé très vite entre nous et l’on s’est tout de suite coordonnés avec les étudiants de l’école du Théâtre national de Strasbourg. Quand on est arrivés devant la Colline, le 9 mars, on ne savait pas comment ça allait se passer. On a prévenu Wajdi Mouawad vingt minutes seulement avant notre arrivée. Celui-ci nous a accueillis en nous souhaitant la bienvenue. C’était émouvant. Mais personne ne se connaissait. On allait rester toute la nuit ensemble sans savoir qui était qui ! Il y avait tant d’incertitudes sur les motivations individuelles de chacun… Nous étions pourtant heureux de commencer ça ensemble.

C. : On ne détient pas de recette parfaite pour conduire une mobilisation alors, depuis le début, on essaye tout. On ne veut pas d’un mouvement qui s’installe.

Les étudiants-acteurs occupent le Théâtre de la Colline pour protester contre la fermeture des lieux culturels et de spectacle non essentiel.

Magali Cohen / Hans Lucas

Comment gérez-vous le risque sanitaire ?
C. :
 Avec du gel, des masques et des tests obligatoires pour les entrants, réitérés tous les deux jours. Respecter le protocole nous tient à cœur. Bien sûr, on n’est jamais à l’abri de rien : alors que l’on dénonce la fermeture des théâtres au prétexte que ceux-ci seraient de potentiels clusters, on serait très mal à l’aise si l’on en créait un ici !

Demandez-vous toujours cette réouverture immédiate des théâtres alors qu’une vague menaçante déferle ?
E. :
 Aujourd’hui, les choses ont évolué. On ne demande pas, comme au début, de rouvrir demain alors que l’on est presque tous confinés. Mais une fois le pic passé, il faut que les théâtres rouvrent, et que toutes les formes de soutien réclamés arrivent en même temps.

Comment s’est organisée la rencontre de la semaine dernière avec le ministère ?
C. :
 Après la visite de la ministre de la Culture à l’Odéon, on a éprouvé la nécessité de lui exprimer nos propres demandes.

E. : On avait besoin d’une parole chaleureuse, d’un dialogue direct. La volonté de transparence a vite existé des deux côtés, car si nous, nous ne pouvons pas faire sans le savoir-faire des équipes du ministère de la Culture, elles non plus, ne peuvent pas travailler sans nous qui avons une connaissance concrète de la vie des jeunes. Hélas, Roselyne Bachelot a été hospitalisée et les deux heures de conférence Zoom ont eu lieu avec Noël Corbin, délégué général à la transmission, aux territoires et à la démocratie culturelle, Hélène Orain, pour la Direction générale de la création artistique, et d’autres représentants des secteurs du théâtre, de la danse, du cirque et des arts de la rue, comme de l’enseignement supérieur et de la recherche, au sein du ministère de la Culture. De notre côté, nous étions six représentants (cinq filles et un garçon), comme désignés d’office par nos structures d’origine (CNSAD ou Conservatoires nationaux supérieurs de musique et de danse de Paris ou de Lyon).

C. : Nous avons obtenu, pour le deuxième rendez-vous, la liberté d’organiser nous-mêmes une représentativité plus conforme à notre mouvement. Car nous avons monté, grâce à des réunions en visioconférence tous les trois jours, un groupe « inter-écoles / théâtres occupés » où tout jeune artiste appartenant à une formation d’art peut nous rejoindre, que celle-ci soit privée ou publique, supérieure ou dispensée dans les conservatoires municipaux, départementaux, ou régionaux. On ne connaît pas encore la date de la prochaine réunion.

“Il y a un gouffre entre la vision des filières d’excellence qu’a le ministère de la Culture et ce que vivent vraiment les jeunes pendant leur apprentissage”, Elena

Vous réclamez justement le même statut étudiant entre les élèves des parcours professionnalisant des conservatoires ou des écoles privées et ceux des écoles supérieures de théâtre, pourquoi ?
E. : Comme il y a peu très peu d’élèves retenus, à la fin, dans ces écoles supérieures élitistes, les autres formations restent, de fait, une voie importante d’accès au métier. Il y a un gouffre entre la vision des filières d’excellence qu’a le ministère de la Culture et ce que vivent vraiment les jeunes pendant leur apprentissage.

C. : Comme « simple élève » de conservatoire ou d’école privée, sans statut étudiant, nous n’avons pas le droit aux bourses par exemple. En revanche, pour Pôle emploi, nous sommes quand même un peu trop « étudiants » et les boulots que l’on décroche ne nous ouvrent pas les mêmes droits sociaux qu’aux autres salariés !

Les futurs comédiens appellent Roselyne Bachelot à changer de politique culturelle et à venir en aide au secteur.

Magali Cohen / Hans Lucas

Qu’est-ce qui vous inquiète le plus dans l’avenir ?
E.
 : Débarquer dans un milieu à l’horizon souvent bouché qui donne peu d’aide à l’insertion professionnelle (ou bien de manière très sélective, comme le dispositif du Jeune Théâtre national réservé aux sortants du Conservatoire de Paris et de l’école du TNS). Alors maintenant, avec ces embouteillages annoncés dans les saisons théâtrales des deux prochaines années, ça va être bien pire !

Qu’imaginez-vous pour y remédier ?
C. :
 Des missions d’insertion dans tous les lieux subventionnés ! Notre modèle, c’est le JTRC déjà en place au Centre dramatique national de Tours : un accompagnement, deux ans durant, de cinq jeunes sortant des filières d’art dramatique ou des métiers techniques de la scène, dispensés par les écoles ou les conservatoires régionaux de Tours ou d’Orléans. Il est cofinancé par la Région et l’État. Ce sont aussi les jeunes professionnels du JTRC (Jeune Théâtre en Région Centre) qui gèrent, en lien avec l’équipe du Théâtre, la sélection du festival Wet° consacré à l’émergence. Des expériences similaires existent aussi à Lille, Dijon ou Toulouse. En plus de bénéficier d’une expérience artistique enrichie par la collaboration avec plusieurs metteurs en scène, ces nouveaux arrivants entrent ainsi, dès la fin de leur première saison, dans le régime spécial d’assurance chômage des intermittents du spectacle.

Accéder au régime de l’intermittence en sortant de l’école vous semble sinon une marche impossible ?
E. :
 Nos premiers travaux participent toujours de la débrouille ! Tout se fait sans argent, dans des théâtres privés dont on doit louer les salles. Donc personne n’est jamais payé pendant les répétitions. Dans de telles conditions, l’intermittence est un seuil infranchissable !

C. : Toutes ces revendications sont difficiles à faire entendre, car nous ne sommes représentés dans aucune instance officielle où ça se discute. Comment avoir notre part, par exemple, de tout cet argent neuf qui tombe au ministère de la Culture et qui doit être distribué par les Drac [Directions régionales des affaires culturelles, bras armé du ministère, ndlr] en faveur de la création ? On ne sait même pas par quel biais s’adresser à elles.

“Notre mouvement doit rester libre de toute influence. Cela fait vingt-deux jours qu’on est là, à la Colline, et l’on n’a été récupéré par personne”, Coline

Quand vous réclamez une seconde année blanche, ce n’est pas votre intérêt à vous qui ne faites pas partie du régime de l’intermittence… Car tout l’argent qui y serait consacré n’ira pas à l’emploi artistique.
E. :
 Même si l’année blanche ne me concerne pas en effet, je reste une citoyenne solidaire des autres. On réclame notre place mais pas aux dépens de ceux qui sont dans la galère. Notre mobilisation est partie de nos propres conditions de vie mais s’est aujourd’hui élargie à tous ceux qui sont dans la précarité. Car ce que l’on veut faire entendre, c’est la voix de la jeunesse en général. De toute cette génération au milieu de laquelle on va vivre nos vies et avec qui on partage un certain nombre de convictions.

N’avez-vous pas peur de voir votre mouvement récupéré par les politiques ou les syndicats ?
C. 
: On y est vigilant. On prend tous les soutiens. Les syndicats, comme la CGT qui est venue à plusieurs reprises, peuvent nous apporter des billes. Mais notre mouvement doit rester libre de toute influence. Cela fait vingt-deux jours qu’on est là, à la Colline, et l’on n’a été récupéré par personne.

Occuper un théâtre national dirigé par Wajdi Mouawad qui a représenté, il y a vingt-cinq ans, l’énergie de la jeunesse et d’une audace renouvelée, vous fait-il quelque chose ?
E. : 
À notre arrivée, c’était très impressionnant de discuter avec lui. De dialoguer avec un homme aujourd’hui établi qui manie une si belle langue et développe une vision si singulière. Et puis, petit à petit, le temps s’est installé différemment. Ces trois semaines paraissent une éternité où tout a été très lent et très rapide à la fois. Depuis le début, l’équipe du théâtre a toujours été à notre écoute. On peut les appeler quand on veut. Mais cette institution est peu à peu devenue le lieu de vie des « occupants de la Colline ». L’émulation du début s’est calmée, mais on tient le coup !

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April 3, 2021 4:56 PM
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Occupation de l'Odéon : un théâtre qui ne se tient pas sage

Occupation de l'Odéon : un théâtre qui ne se tient pas sage | Revue de presse théâtre | Scoop.it

 

 

Depuis le 4 mars, le théâtre de l'Odéon est occupé par des travailleurs et des travailleuses du monde du spectacle, occupation qui a inspiré de nombreux lieux de culture à travers le pays. Reportage à l'intérieur de l'un des théâtres les plus prestigieux de la capitale.

 

Reportage  vidéo publié par Le Média (11 mn)

 

 

Depuis maintenant près d’un mois, des travailleurs et des travailleuses du monde de la culture occupent le théâtre de l’Odéon pour protester contre la précarité de l’emploi et les mesures antisociales du Macron. Les occupants de ce théâtre ne travaillent pas tous dans le monde du spectacle ou de la culture, il y a des guides conférenciers, des traiteurs, des travailleurs de l’hôtellerie etc... leur point commun ? Tous demandent le retrait de la réforme de l’assurance chômage qui aura des conséquences sociales désastreuses.

C’est un des plus prestigieux théâtres de France mais c’est aussi un lieu qui déjà dans l’histoire a été investi lors de grands mouvements sociaux. 

Il est important de noter que cette nouvelle occupation du théâtre de l’Odéon a ouvert la voie à un large mouvement d’occupation dans toute la France. En effet, les travailleurs et les travailleuses ont maintenant investi plus d’une centaine de lieux.

Mais comment ça se passe concrètement à l’intérieur ? On a décidé de vous emmener faire un tour à l’intérieur pour rencontrer celles et ceux qui font vivre cette lutte au quotidien. 

Et ça tombe bien ce soir, les occupants reçoivent le journaliste et réalisateur David Dufresne pour une projection clandestine de son film « Un Pays Qui Se Tient Sage ». 

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March 31, 2021 2:12 PM
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La Comédie-Française apporte son soutien aux intermittents qui réclament la prolongation d'un an de l'année blanche

La Comédie-Française apporte son soutien aux intermittents qui réclament la prolongation d'un an de l'année blanche | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Publié par FranceInfo Culture  le 31/03/2021

 

La prestigieuse troupe de la Comédie-Française a apporté mardi son soutien aux intermittents du spectacle qui réclament au gouvernement de prolonger leur indemnisation au-delà d'août 2021 en raison de la crise sanitaire.

"Depuis l'interruption de nos spectacles, nous ne pouvons que constater la baisse d'au moins 50% de l'engagement des intermittents qui travaillent chaque année avec nous", a indiqué un communiqué de la troupe. "Comment ne pas comprendre le désarroi de beaucoup d'intermittents qui subissent de plein fouet les annulations ou reports en cascade de cette année?", s'interroge la Comédie-Française qui a apporté mardi son soutien aux intermittents du spectacle. 

Une prolongation de l'année blanche jusqu'à août 2022 ?

En 2020, le président Emmanuel Macron avait décidé d'accorder une année blanche aux intermittents qui, en raison de la fermeture des théâtres et des cinémas et de l'annulation des grands festivals d'été, n'avaient pas pu faire les 507 heures qui leur sont requises sur douze mois pour toucher des indemnités. Ce dispositif arrive à terme en août et les intermittents réclament qu'ils soient prolongés jusqu'à août 2022 en raison des incertitudes sanitaires.

"La saison prochaine, à supposer qu'elle puisse se dérouler à peu près correctement, comportera des reports de spectacles, et donc une diminution vraisemblable, et nous l'espérons exceptionnelle, des créations dans la majorité des théâtres", préviennent les comédiens et comédiennes du Français, rappelant l'importance de cette "exception française".

 

Une mission dresse actuellement un diagnostic de leur situation pour "proposer une réponse adaptée", selon le gouvernement.

France Télévisions  Rédaction Culture

Près d'une centaine de théâtres en France sont "occupés", notamment par des intermittents qui réclament également le retrait de la réforme de l'assurance chômage qui entre en vigueur en juillet.

Légende photo : La Comédie-Française, place Colette (BRUNO DE HOGUES / ONLY FRANCE)

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March 25, 2021 9:34 AM
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Le théâtre se réinvente-t-il après un an de pandémie ?

Le théâtre se réinvente-t-il après un an de pandémie ? | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Sur la page  de France Culture le 25 mars 2021

 


Journée spéciale Il y a tout juste trois semaines débutait à l'Odéon, à Paris, une vague croissante d'occupations de théâtres. Au coeur des revendications, la réouverture des lieux culturels, l’assurance chômage et l’indemnisation des intermittents. Avec aussi l'opportunité de penser, tester, l'avenir du théâtre.

 

Le Théâtre de la Manufacture à Nancy, le 22 mars 2021, est l'une des dizaines de salles occupées en France, essentiellement à l'appel de la CGT Spectacle. Parmi les revendications, la renaissance des lieux d’art, de culture, de pensée.• Crédits : Cédric Jacquot / L'Est républicain - Maxppp

Une centaine de théâtres et de lieux culturels sont désormais occupés en France par des intermittents et étudiants, selon la CGT Spectacle qui a initié ce mouvement le 4 mars dernier au théâtre de l'Odéon, à Paris. C'est le cas au théâtre Graslin, dans le centre-ville de Nantes, depuis deux semaines :

 

 

Écouter le reportage au théâtre Graslin à Nantes 1 MIN
 
Ils sont une cinquantaine à occuper le théâtre Graslin de Nantes. Louis-Valentin Lopez y a passé une journée et une nuit.

Outre une série de revendications, les participants à ces actions réfléchissent aussi aux transformations actuelles et futures du théâtre en temps de pandémie. Nous les avons interrogés un peu partout dans le pays et nous vous proposons de nombreux rendez-vous dans nos journaux à ce propos ce jeudi 25 mars.

À Toulouse, le Théâtre de la Cité (pré)occupé avec la jeunesse par la création

C’est un théâtre fermé aux spectateurs mais qui n’a jamais cessé de travailler depuis un an : le CDN de Toulouse, occupé depuis le 11 mars, est un lieu d’expérimentation pour les jeunes et de réflexion par les jeunes sur une réinvention de la création et de la rencontre avec le public :

 

 

 

Écouter
 
 
"On utilise des techniques de télévision pour réinventer une expérience de théâtre vivant. Ce n'est pas du cinéma ni du théâtre filmé." Reportage de Benoît Grossin.

Et alors que des jeunes étudiants et "artistes émergent.e.s" sont mobilisés pour leur avenir et celui du spectacle vivant, il est aussi question dans le théâtre de réinventer la création, sa mission principale, en temps de pandémie :

 

Écouter
 
 
"On est obligé de réinventer notre lien avec le public" : Galin Stoev, directeur du Théâtre de la Cité

Juan, 22 ans, en master d’écriture dramatique, à l’université Jean-Jaurès de Toulouse, est l'un des occupants. Très intéressé par la mise en scène, il considère que "c'est très difficile parce qu'une des questions les plus récurrentes et qui est une question très théâtrale, c'est : va-t-on avoir un espace pour travailler ? Comme nous n'avons pas d'espace et que nous sommes réduits à notre chambre. Notre chambre d'étudiant est petite, donc nous sommes un peu dans une sorte de paranoïa constante en se disant est-ce que j'attends de travailler ou est-ce que j'essaie de travailler maintenant ?"

 

 
 
"Avec ce mouvement au Théâtre de la Cité, je commence à pouvoir créer un réseau avec d’autres élèves et d’autres artistes" : Juan, étudiant en master d’écriture dramatique
 
 
Passer la nuit au Théâtre de la Cité est “une expérience de travail et de joie” pour Juan, en marge de sa formation à l’université Jean Jaurès de Toulouse. • Crédits : Benoît Grossin - Radio France À RÉÉCOUTER
 
Réécouter Derrière ses portes fermées, le Théâtre 14 devient une fabrique de la pensée  8 MIN

Le jeu à distance d'Emmanuel Noblet

Comédien et metteur en scène, il reçu un Molière en 2017 pour un seul en scène dans Réparer les vivants, d'après le roman de Maylis de Kerangal. Très solidaire des théâtres occupés, il vient de terminer les répétitions d'une pièce mise en scène par Christophe Rauck au théâtre du Nord, le centre dramatique national de Lille.

Au-delà de sa colère face à la fermeture des salles et aux conséquences sur les intermittents les plus précaires, il profite de la période pour inventer une nouvelle manière de proposer un vrai moment de théâtre à distance :

 

Rouvrir ? Mais quasiment aucune étude sur le sujet en France

La seule étude qui évoque les lieux culturels en France est celle de l'Institut Pasteur, publiée au début du mois de mars sur les lieux de contamination. Elle démontre qu'il n'y a pas eu de sur-risque d'infection dans les lieux culturels lorsqu'ils étaient ouverts en octobre dernier. A l'étranger, des études ou expérimentations ont été menées, notamment en Allemagne. D'après une étude de l'institut Hermann Rietschel de Berlin menée par le professeur Martin Kriegler et l'ingénieure Anne Hartmann, les théâtres, cinémas et musées sont des zones à moindre risque que les supermarchés ou les openspace. "La distanciation physique, le port du masque, le nettoyage des surfaces et des mains et une ventilation adaptée", respecter les mesures sanitaires dans les théâtres est tout à fait possible d'après Constance Delaugerre, professeure de virologie à l'hôpital Saint-Louis à Paris et signataire d'une tribune intitulée "Culture confinée, métros bondés : en finir avec la politique bipolaire:  

 

 

Mais le risque n'est pas le même pour le personnel et les comédiens, amenés à interagir, notamment sans masque sur scène. Des tests réguliers et la vaccination pourraient donc être une solution. A l'heure actuelle, une réouverture reste malgré tout précipitée estime Constance Delaugerre, en raison de "l'incidence très élevée et des variants qui ont un taux de transmissibilité et de sévérité bien plus important".  Cependant, une réouverture aurait pu être envisagée à des périodes où le taux d'incidence était moins important - par exemple sur la période décembre 2020-février 2021 - avec des protocoles sanitaires stricts ou pour évaluer les risques, comme cela a été fait dans d'autres pays. Pour la virologue, qui supervise le concert test qui devait être organisé en avril à l’Accor Hôtel Arena de Paris [la date pourrait être repoussée], un calendrier et des perspectives permettraient aux professionnels et au public de savoir quand les théâtres et autres lieux culturels rouvriront. Soit en se basant sur les expériences menées à l'étranger soit en mettant en place nos propres expérimentations. 

 

Ce mardi, la mission d’information du Sénat pour l’évaluation des effets des mesures de confinement ou de restrictions réunissait des représentants d’institutions culturelles internationales demeurées ouvertes. Joan Matabosch, le directeur artistique du Teatro Real de Madrid, y a expliqué que son institution a "mis en place en mai et juin un protocole sécurisé […] pour l’orchestre, pour le chœur", avec des "adaptations de la salle du théâtre, de répétition, de la fosse", etc. "Six épidémiologistes" suivent aussi le théâtre et font un point tous les 7 à 10 jours, précise Public Sénat.

 
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March 18, 2021 2:24 PM
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Théâtre du Soleil : Editorial du 18 mars 2021

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Écoutez l'annonce du répondeur de notre location individuelle en attendant de nous avoir au téléphone

 

 

 

Allô, bonjour, ici le Théâtre du Soleil,

 

Nous devons certainement le plaisir de vous entendre aujourd’hui au pavé publicitaire que vous venez de découvrir dans Le Monde annonçant notre spectacle : L’île d'or.

 

Ce pavé est comme une sorte de profession de foi et c’est donc avec joie et fierté que nous pouvons vous annoncer que nous commencerons le mercr#¥∅∂ §ð∑∫   juin à ᚜ɔɘh30 !

La location ouvrira le lundi‡Þ∴ᚑ   mai.

 

Et les conditions sanitaires requises pour être accueillies dans la salle seront les suivantes : 
nous vous demanderons de  \Ђɔɘɐɖדᚂ  vos masques, de   ð„ᚏᚗ ᚜ᚢЉЂב
distances  ขกᚠᚇ⠇ ɚ\   de  דᚂ᚜ᚗᚚ   gel, de Ђɔɘɐɖ   tests,  ₢₥⌋₩∠⤈⊇∳  PCR,   ᚥᚗ∅∂ §   logiques  ข∩∭⌊∝╭⤄∇   vaccination. 

 

Merci de votre de votre appel et de l’humour dont vous faites preuve en écoutant cette annonce qui reflète exactement notre situation à tous.

Si vous saviez, cependant, comme nous sommes heureux de la certitude que nous avons de vous retrouver bientôt.

 

Au mercr#¥∅∂ §ð∑∫   juin donc !

Nous comptons sur vous et nous vous attendons de pied ferme.

 

Ariane Mnouchkine

 

 

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Scooped by Le spectateur de Belleville
March 15, 2021 6:40 PM
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Occupation des théâtres depuis le 4 mars : 

Occupation des théâtres depuis le 4 mars :  | Revue de presse théâtre | Scoop.it

Etat des occupations en date du 15 mars 2021

 

L'occupation du théâtre de l’Odéon, un combat d'artistes "pour faire converger les luttes"

article de France 24

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Message de Stéphane Braunschweig, directeur de l'Odéon-Théâtre de l'Europe  (15 mars 2021) :

 
« Chères spectatrices, chers spectateurs,
 
Voilà exactement un an que nous vivons au rythme des confinements et des couvre-feux, et voilà plus de dix jours que le théâtre de l’Odéon est occupé, à l’initiative de la CGT, par des professionnels du monde de la culture. L’extension du mouvement à de nombreux autres lieux traduit la vive inquiétude qui traverse actuellement tout notre secteur.
Je partage cette inquiétude et soutiens pleinement la demande d’une prolongation del’«année blanche» pour les intermittents du spectacle.
 
La possibilité de maintenir les processus de répétitions a permis à certaines équipes de travailler, mais combien sont-ils à avoir vu toutes leurs dates annulées depuis un an ?
 
À l’Odéon, nous préparons, sans visibilité sur notre fin de saison, le programme de la saison prochaine, où nous essayons de reporter les nombreux spectacles annulés, tout en maintenant au maximum les nouveaux projets que nous avions. Mais il va sans dire que les annulations et reports de cette année vont impacter fortement la saison prochaine, et par un effet domino nous obliger à décaler à plus long terme certains de ces projets.
 
Cela signifie, à l’échelle de tout le secteur du spectacle vivant, que de très nombreux projets vont soit disparaître complètement, soit être encore décalés d’une année ou plus. Et il n’est pas du tout certain que celles et ceux qui ont eu la chance de travailler cette année puissent faire leurs heures et recharger leurs droits la saison prochaine.
 
C’est dans ce contexte que la prolongation de l’«année blanche», heureusement décrétée par le gouvernement en mai dernier, paraît indispensable. C’est ce dispositif qui a permis à de nombreux professionnels du spectacle vivant de se maintenir dans le régime de l’assurance chômage depuis un an, et qui doit leur permettre de passer le cap d’une année qui s’annonce encore très difficile, même si les théâtres reprennent enfin une vie plus ou moins normale. Il en va de la survie de nombreux artistes, techniciens et techniciennes intermittents, qu’ils ou qu'elles travaillent régulièrement dans les grandes institutions ou en compagnie. Je veux croire que la commission Gauron qui examine actuellement cette question prendra toute la mesure d’une situation que chaque nouveau jour de fermeture dégrade un peu plus.
 
Il est évident que les intermittents du spectacle sont loin d’être les seuls à être gravement impactés par les conséquences économiques de la crise sanitaire, mais personne ne doit rester au bord de la route.
 
Espérons que nous retrouverons vite cette visibilité qui nous manque tant, et qui nous laisserait apercevoir enfin le bout du tunnel.
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