"Le Limousin zone de prolifération, une espèce géante découverte en Charente, pas de doute, les tiques n'ont pas dit leur dernier mot et la Nouvelle-Aquitaine n'est pas épargnée. Le printemps peut donc vite rimer avec inconvénients. Voici quelques explications, conseils et précautions.
Le Limousin, zone de prolifération
"Si on se base sur le réseau Sentinelles de veille sanitaire, le Limousin a toujours été une région où le nombre de cas de piqûres de tiques est plus important que les autres régions en France, excepté le Grand Est’’, déclare Jonas Durand, ingénieur à l’INRAE, l’Institut National de Recherche de l’Agriculture, de l’Alimentation et de l’Environnement. On observe ainsi sur la carte de Santé Publique France que la Creuse est particulièrement touchée.
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Une tique géante identifiée en Charente
Jean-Yves Morellec, chef de service à l’OFB (Office Français de la Biodiversité) de Charente, raconte : "On a toujours eu beaucoup de tiques, on y est confronté quand on est dans les bois et il y a plusieurs espèces. Philippe Dumas, inspecteur de l’environnement, est à l’origine du signalement d’une espèce particulière, l’Hyalomma marginatum, découverte le 20 juin 2020, à Boisné-la-Tude, au sud d’Angoulême."
L’Hyalomma marginatum est une tique géante deux fois plus grosse que ses congénères (2 centimètres quand elle est gorgée de sang) et porteuse potentielle de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo. L’ARS (Agence Régionale de la Santé) a été prévenue, cette maladie peut entraîner des flambées de fièvre hémorragique virale sévère selon l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé).
"Elle est plus dangereuse que les autres", explique Jean-Yves Morellec."Sa particularité est qu’elle poursuit ses proies. Elle ne se laisse pas tomber sur elles comme la plupart des tiques, elle peut les poursuivre sur une centaine de mètres".
Philippe Dumas précise : "Une tique a trois phases de développement. A partir de l’œuf, elle se développe d’abord en larve, elle fait un premier repas de sang, elle se décroche, elle se transforme en nymphe, deuxième repas de sang, nouveau décrochage, et ensuite, elle devient adulte et fait un troisième repas, et c’est à ce stade que nous pouvons être piqué. Au terme de ce dernier repas, elle se décroche et se reproduit au sol."
L’Hyalomma marginatum se distingue avec deux phases de développement. Elle n’a besoin que de deux hôtes, les deux premières phases se produisent sans qu’elle ne quitte sa proie. Une fois adulte, elle parasite son nouvel hôte, souvent les chevaux.
Sa particularité est qu’elle poursuit ses proies
Jean-Yves Morellec, Chef de service à l'OFB Charente
Une stratégie d'attaque singulière
"Cet acarien a une stratégie tout à fait particulière", ajoute Philippe Dumas, le découvreur de l’OFB : "D’ordinaire, une tique monte sur une branche, un brin d’herbe et attend le passage d’une proie, animal ou humain. L’Hyalomma marginatum est capable de repérer un cheval au pré (statique) à 10 mètres, de courir après lui, comme une araignée, jusqu’à une distance de 100 mètres, c’est quand même assez impressionnant pour un acarien."
Ce spécimen identifié en Charente a été prélevé et expertisé à Montpellier, c’était un mâle. "On s’interroge vers son arrivée dans la région’", poursuit l’inspecteur de l’environnement. "Peut-être grâce à un oiseau migrateur mais nous ne sommes pas dans les couloirs de migration. Ce type de tique se développe dans des milieux assez secs, arides, est-ce que ce sera le cas chez nous ? Le problème est que si elle n’est pas dangereuse pour les animaux, la maladie qu’elle véhicule peut être mortelle pour l’homme."
C’est le signalement le plus au nord que l’on ait trouvé. La présence de l’Hyalomma marginatum a été constatée à partir des années 2010 dans le sud de la France, présence jugée « pérenne » depuis 2015 par l’Anses, l’Agence Nationale de sécurité sanitaire, de l’environnement et du travail."
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[Image] L’Hyalomma marginatum est un acarien méditerranéen très agressif • Crédit : Philippe Dumas