Dans une nouvelle combinaison de matriochkas toujours plus inattendue, les groupes TF1 et Netflix ont annoncé ce 18 juin que « tous les abonnés de Netflix en France pourront regarder les chaînes du Groupe TF1 et les contenus à la demande de TF1+, directement sur Netflix à partir de l’été 2026 », dans une « alliance sans précédent qui permettra à nos programmes de qualité et populaires d'atteindre des audiences inégalées et d'ouvrir de nouveaux horizons publicitaires », selon les mots du PDG de TF1 Rodolphe Belmer, cité dans le Communiqué de presse .
Netflix hébergera les flux en direct de TF1, TMC, TFX, LCI et TF1 Séries Films « ainsi que la très grande majorité des contenus à la demande de son service de streaming gratuit, TF1 + », précise Les Echos.
Si l’accord professionnel renouvelé ces derniers jours avec les organisations de la production audiovisuelle confirme que TF1 bénéficie de l’ensemble des droits linéaires et non linéaires (AVOD/FVOD et SVOD) sur une durée de 48 mois, pour l'ensemble des œuvres indépendantes qu'il finance à un niveau substantiel et « de droits non linéaires élargis de 36 mois » pour les autres œuvres indépendantes (Daily NPA du 11 juin), et qu’elle pourra donc exposer ces programmes sur Netflix, la question pourrait surtout se poser sur les compétitions sportives, dont TF1 ne contrôle pas a priori les droits de diffusion en payant.
Sur le périmètre de l’accord, le Communiqué publié ce 18 juin n’évoque pas, par ailleurs, le cas des éditeurs qui avaient signé un accord d’agrégation au sein de TF1+ (Arte, L’Equipe, Le Figaro TV). Leur participation au nouvel ensemble ne semble pas tranchée à ce stade.
Concernant l’expérience utilisateurs, les abonnés pourront visionner les programmes « sans jamais avoir à quitter l’environnement Netflix », poursuit le Communiqué. Les contenus seront donc « embarqués » en ingestion sur la plateforme Netflix, plutôt que présentés dans l’approche app-to-app qui prévaut quand c’est Netflix qui est agrégé dans des offres payantes, celles de Canal+ par exemple.
« Il y aura bel et bien une section dédiée à TF1 sur la plateforme Netflix », indique Les Echos et « les spectateurs bénéficieront de l'expérience premium de recommandation de Netflix », dont les algorithmes assureront la mise en avant de certains programmes de TF1.
La mise en œuvre de l’accord nécessitera, au-delà, une double évolution – au moins – de l’interface de Netflix : pour y créer une entrée dédiée aux flux linéaires des chaînes, et pour faire leur place dans l’arborescence à certaines thématiques qui n’y figuraient pas jusqu’ici, à commencer par l’information.
S’agissant finalement de la monétisation des audiences générées par les programmes de TF1, Les Echos apportent une information capitale : « la régie de TF1 gardera la main sur la commercialisation des espaces publicitaires lorsque ses contenus seront présents sur Netflix. « Avec cet accord, nous allons mieux exposer et monétiser nos œuvres, renforçant ainsi le socle du groupe TF1, à savoir le financement publicitaire de programmes de qualité, familiaux et premium », confirme Rodolphe Belmer.
D’un point de vue défensif, TF1 semble prendre acte, avec cet accord, du fait que Netflix est devenu une plateforme de destination suffisamment puissante pour que les offres des autres éditeurs sortent du champ de considération d’une partie de ses abonnés. Être présent dans l’univers Netflix garantit TF1 contre ce risque d’invisibilisation.
D’après les données du Baromètre des Usages Audiovisuels NPA Conseil Harris Interactive, Netflix comptait 12,7 millions d’abonnés en France fin mars, dont 28% (3,5 millions environ) disent ne jamais se rendre sur TF1+. Sans doute une partie d’entre eux regarde-t-elle les chaînes de TF1 en linéaire. Il n’empêche que l’alliance annoncé ce 18 juin renforcera leur exposition aux programmes du groupe.
Sous un angle plus offensif, au-delà, l’alliance des leaders respectifs du gratuit et du payant peut prétendre à constituer une sorte de one stop shopping, présent – et puissant – dans l’ensemble des genres de programmes, capable en conséquence de répondre à l’ensemble des attentes du public et, finalement, d’en maximiser l’engagement.
Dans une interview aux Echos, Rodolphe Belmer indiquait il y a quatorze mois que « le principal concurrent de TF1, c'est YouTube ». A suivre les parts d’audience que la plateforme de Google grignote au fil des mois aux acteurs du streaming payant, et au premier chef Netflix, l’alliance annoncée de 18 juin confirme l’adage selon lequel les ennemis de mes ennemis sont mes amis