Dans son long et sinueux parcours jurisprudentiel pour « conceptualiser la place de la religion dans la sphère publique » et « construire une vision cohérente de [ses relations] avec l’Etat, valable dans toute l’Europe », la Cour européenne des droits de l’homme se heurte inévitablement à des contentieux aussi sensibles que complexes (Julie Ringelheim, « Rights, Religion and the Public Sphere : The European Court of Human Rights in Search of a Theory ? », in A European Dilemma: Religion and the Public Sphere, Camil Ungureanu et Lorenzo Zucca (Dir.), Cambridge, Cambridge University Press, 2012, p. 283). Les affaires aux sources de l’arrêt Eweida et autres c. Royaume-Uni rendu le 15 janvier 2013 en témoignent éloquemment. Saisie par des ressortissants britanniques de confession chrétienne, la juridiction strasbourgeoise avait à apprécier la pertinence de leurs « appels à une adéquate prise en compte [claims for accommodation] des pratiques religieuses sur le lieu de travail » (Julie Ringelheim, précité). Deux des requérants revendiquaient ainsi le droit de porter au travail des signes vestimentaires manifestant une appartenance religieuse. Les deux autres invoquaient leurs convictions religieuses pour justifier leur refus de remplir leurs obligations professionnelles auprès de couples homosexuels...