HIGH-TECH - Pour la majorité des utilisateurs, les recherches Web et sociale sont avant tout complémentaires...
A qui faites-vous le plus confiance? A votre réseau social? Au Web? A un ami? A un site spécialisé? Selon l'analyste Brian Blau, du cabinet Gartner, pour la majorité des personnes, la réponse est «ça dépend». C'est notamment pour cela, explique-t-il à 20 Minutes, que la fonction de recherche sociale dévoilée par Facebook mardi ne va «pas rendre obsolètes des sites comme Google, Yelp ou LinkedIn».
Un échantillon social limité
La principale différence, c'est que Google et Facebook ne cherchent pas au même endroit. Le premier écume les 50 milliards de pages Web qu'il a indexées. Le second examine les contenus publiés publiquement par son milliard d'utilisateurs et surtout ceux de vos réseaux immédiat (245 amis en moyenne) et élargi (150.000 amis d'amis, en moyenne).
Film, resto, voyage... Les études montrent qu'on fait davantage confiance à ses amis proches pour une recommandation. Problème, dans la pratique, l'échantillon est en général très réduit. Combien d'amis ont «liké» Argo, récompensé aux Golden Globes? Trois, sur un réseau de 1.000 personnes. Lincoln? Deux. Zero Dark Thirty? Un. Le resto italien du coin? Zéro. On peut élargir aux «amis d'amis» mais «leur avis n'a alors pas beaucoup plus de poids que celui d'un étranger» sur Yelp ou Allocine, estime Blau.
Si Facebook veut devenir une source d’autorité, il va devoir inciter les utilisateurs à être davantage actifs dans leurs «like» et «check-in». Avant, il faudra déjà que les dentistes, garagistes et autres plombiers créent leur page Facebook. «Dans l'immédiat, la recherche sociale ne sera qu'une source supplémentaire, aux côtés du Web et des apps», selon l'expert de Gartner.
Des fonctions restreintes mais potentiellement puissantes
Pour l'instant, même si Bing est intégré pour le côté Web, la recherche sociale de Facebook est limitée. D'abord elle n'est pas disponible sur mobile –une hérésie à l'heure du «mobile first» accuse PandoDaily. Ensuite, elle se concentre sur quatre domaines: les personnes, les photos, les lieux et les intérêts («like»). Les milliards de statuts et de liens ne sont pas indexés –mais ça viendra. Twitter garde donc une longueur d'avance pour la recherche temps réel.
En revanche, si la recherche Web sur Google est d'abord horizontale, celle de Facebook peut offrir une verticalité intéressante. Une requête comme «les amis d'amis qui habitent Paris et travaillent comme Community Manager» pourrait séduire les recruteurs. «Les amies de mes amis qui sont célibataires et aiment 50 Shades of Grey» transforme d'un seul coup Facebook en site de rencontres. Il n'y a plus qu'à payer 1 euro pour s'assurer que son message arrive bien dans la boîte de réception.
Du potentiel pour la publicité
Facebook pourrait inquiéter Google sur le terrain des annonces ciblées. Jusqu'à présent, on utilisait le réseau passivement. Du coup, les taux de clic sur les pubs n'ont jamais décollé. Dans une démarche de recherche, on devient d'un seul coup actif et plus à même de cliquer.
Pour l'instant, Mark Zuckerberg a expliqué qu'il s'agissait de «construire un bon service» et qu'il ne serait pas monétisé. Mais à terme, Brian Blau est persuadé que Facebook capitalisera sur la recherche. Il lui suffira de faire payer un commerce local pour apparaître dans les résultats sponsorisés dans une requête type «les meilleurs restaurants chinois de mon quartier», comme le font déjà Google et Yelp.
En somme, la recherche Facebook ne va pas remplacer celle de Google. Mais elle pourrait bien lui permettre de capter une part plus importante du gâteau publicitaire.
Philippe Berry