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Internet, de l'utopie au cauchemar

Internet, de l'utopie au cauchemar | Toulouse networks | Scoop.it

Il l'a tant aimé... Le dernier essai du spécialiste des médias Bruno Patino est un réquisitoire teinté de mea-culpa contre le Web d'aujourd'hui, gangrené par "l'économie de l'attention".

Jusqu'à présent, les "repentis" du Web, ces pionniers aux espoirs douchés, parlaient l'américain. Désormais, il faudra aussi compter avec la voix, bien française, de Bruno Patino. Incroyable et pourtant vrai : le directeur éditorial d'Arte France, figure des défricheurs du Web, avoue ne pas reconnaître, lui non plus, l'Internet dans lequel il avait placé sa foi, cette Toile magique où tous les savoirs devaient se conjuguer, où chacun allait pouvoir s'exprimer, échanger, partager, dans une conversation universelle expurgée des hiérarchies sociales. Ce merveilleux "commerce libre des idées" dont le philosophe John Stuart Mill décelait l'avènement au XIXe siècle avec l'essor de la presse aux Etats-Unis.  

 

Vingt-cinq ans après l'explosion du réseau mondial, le rêve s'est chargé de cauchemars, constate Bruno Patino dans son dernier essai, La Civilisation du poisson rouge, d'une lecture décapante. Le directeur de l'école de journalisme de Sciences Po y décrit un univers "de prédation" dans lequel ne priment ni l'intérêt des contenus ni la démocratisation des opinions, et pas davantage la vérité des faits, mais le profit que les plateformes retirent de nos clics stakhanovistes. Pour le spécialiste des médias, l'évolution des sociétés ou l'avènement d'outils technologiques, si séduisants fussent-ils, ne sont pas les fautifs. C'est l'économie, plus exactement les options stratégiques prises par les Google, Facebook et consorts, qui ont fait du Web ce golem auquel il s'agit maintenant d'échapper.  

 

Les Gafam ont utilisé et potentialisé les formidables ressources des nouvelles technologies pour rafler des milliards de données concernant les utilisateurs, afin de les revendre aux publicitaires et aux autres services numériques, explique Patino. Plutôt que de faire payer les usagers, ils ont préféré miser sur la publicité, comme le faisaient avant eux les médias traditionnels, mais en jouant d'une arme fatale dont ces derniers ne disposaient pas : l'intelligence artificielle, laquelle permet de cibler les publics. "Ce fut un choix. Il n'y avait en la matière aucune obligation technologique", soutient le journaliste, dans le droit fil de l'analyse du philosophe Eric Sadin. 

 

LIRE AUSSI >> La face très noire de l'intelligence artificielle 

Avant de disparaître, en 2018, John Perry Barlow, l'un des pères fondateurs du réseau numérique et grand libertaire devant l'Eternel, aura eu le temps de voir sombrer son utopie positiviste d'un monde "liquide" nourri de l'intelligence collective dans un techno-capitalisme où les algorithmes ont remplacé les machines-outils. Et puisque ce sont les données - ce "pétrole" - qui font les bénéfices, il importe d'en glaner toujours plus. Comment ? En retenant sans relâche l'intérêt de l'internaute.  

Cette "économie de l'attention", ainsi que l'a baptisée Bruno Patino, s'immisce dans les replis du temps journalier, à la manière d'un intrus prenant peu à peu possession d'une maison mal fermée. Pas seulement les minutes "inutiles", passées à attendre un bus, un film, un ami. Celles, aussi, du travail, des repas en famille, des loisirs... La durée d'usage quotidien du smartphone a doublé dans les années 2000. Elle est d'une heure trente-deux minutes en France (trois heures en Chine), et les experts vaticinent un doublement dans les prochaines années.  

 

Appliquant à la lettre les enseignements de la psychologie comportementale, les robots d'Internet savent mieux que n'importe quelle pub à l'ancienne faire de nous des sujets captifs. L'enchaînement automatique des vidéos sur YouTube ou Netflix en est un exemple : il "soulage de la fatigue liée à la prise de décision", note, dans une phrase terrible, Bruno Patino. Ce confort, agréable dans un premier temps, devient vite nécessaire et prend le pas [...] sur la zone de contrôle du cerveau." Notre santé mentale est en péril", insiste l'homme des médias. Au creux de ce réel stroboscopique farci de notifications, où une sollicitation chasse l'autre à une cadence que les plateformes doivent accélérer pour préserver leur filon, la pensée n'a plus d'espace où se loger. Les manitous de Google ont calculé que le cerveau des jeunes nés connectés décrochait au bout de neuf secondes. Soit seulement une de plus que le poisson rouge figurant en couverture du livre, généralement plus apprécié pour ses moirures que pour ses capacités cognitives. Les plus jeunes, évidemment, sont les plus vulnérables. A force de ne plus savoir où donner de la tête, ils menacent de finir en poupées de chiffon, abandonnant "la lutte contre le plaisir immédiat que fait naître la réponse à un stimulus électronique, aussi minime soit-il", ajoute Patino.  

On peut déplorer qu'Internet soit devenu cette arène de corrida où se déchaînent les passions sur fond de conduites toxicomaniaques. Mais pourquoi s'en étonner, quand l'architecture économique sur laquelle le Web a prospéré est tout entière bâtie sur la viralité des contenus ? conclut l'auteur. Quand l'émotion immédiate l'emporte sur la raison, l'effet produit sur la nature du message, l'avis de l'internaute le plus proche sur les données objectives ? Quand l'information elle-même doit jouer les aguicheuses pour ne pas être éjectée de la piste aux taureaux ?  

Ouvrir les boîtes noires algorithmiques

Les algorithmes des réseaux sociaux, Facebook en tête, composent à l'intention de chaque utilisateur une image kaléidoscopique du monde correspondant à ses affinités, simulacre renforcé par l'afflux constant de nouveaux contenus de la même eau. Chacun voit le réel avec ses yeux. Cependant, lorsque le champ de vision est à ce point "subjectivé", se retrouver sur des combats communs, une lecture partagée des enjeux et des valeurs à défendre - bref, se sentir appartenir à une même société - devient impossible. Toute information émanant des médias de masse passe pour suspecte, toute mesure politique visant le bien général semble répondre aux intérêts d'une camarilla ou d'une autre, comme le montre le mouvement des gilets jaunes. Là est la tragédie : rien ne pourra jamais coller avec la représentation de l'individu-monade, tel que l'Internet des Gafam l'a engendré.

 

Certains, parmi les pionniers "repentis", refusent ce fatum numérique. Tim Berners-Lee, l'inventeur du Web, s'essaie à la construction d'un contre-Internet répondant à l'esprit premier du réseau. Bruno Patino en appelle pareillement à la création d'offres alternatives, dans laquelle les médias publics pourraient trouver une nouvelle mission d'intérêt ô combien général. Plus compliqué, il prône la régulation. Le tour de vis est déjà dans l'air, avec les mesures de rétorsion fiscale votées en avril par les députés français, contraignant les Gafam à s'acquitter en France des impôts liés à leur activité sur le territoire. Mais l'ex-héraut 2.0, lui, va plus loin : il veut ouvrir les boîtes noires algorithmiques, pour en limiter l'efficacité et la portée addictive ; mettre fin à l'irresponsabilité éditoriale des hébergeurs, qui leur permet de laisser passer des contenus problématiques sans être inquiétés. Les potentats du Web sauront-ils renoncer à leurs profits immédiats ? Pourquoi pas ? A condition que les internautes renoncent, eux, aux charmes fétides de la dépendance. 

 

 

 

 

*La Civilisation du poisson rouge. Petit traité sur le marché de l'attention. Bruno Patino, Grasset, 184 p., 17 €. 

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En ce moment même, une entité inconnue cherche à détruire Internet

En ce moment même, une entité inconnue cherche à détruire Internet | Toulouse networks | Scoop.it

Dans un post alarmant sur son blog, l’expert en cybersécurité Bruce Schneier explique que les “piliers” d’Internet sont victimes d’attaques précises et patientes.

 

 

Et si Internet était réellement menacé de disparition ? Si la structure intrinsèquement décentralisée du réseau rend un scénario aussi apocalyptique difficilement concevable, il semblerait que quelqu’un, ou quelque chose, soit en train de planifier une attaque potentiellement fatale au réseau. C’est, du moins, l’avis de Bruce Schneier, expert en cybersécurité, membre du projet Tor et de l’Electronic Frontier Foundation (EFF), qui explique dans un post de blog publié le 13 septembre que l’attaque est déjà en cours… depuis un an ou deux.

Sous quelle forme ? En testant, grâce à des séries d’attaques ponctuelles et parfaitement calibrées, les faiblesses de certains systèmes vitaux au réseau. Car si Internet est composé des milliards de machines qui s’y connectent, certaines entreprises fournissent des services particuliers, comme l’enregistrement des noms de domaines selon leur extension (.com, .net, .org, etc.) ou la gestion de protocoles d’affichage de pages, sans lesquels le réseau ne peut fonctionner correctement. Et ces entreprises, considérées comme les “piliers” du réseau, ont confirmé à Bruce Schneier — sous réserve d’anonymat — l’émergence et l’augmentation récente d’un nouveau type d’attaques, qui ressemble à s’y méprendre à du “repérage”.

 

Des attaques DDoS envoyées en éclaireur

Dans les faits, ces attaques sont de simples tentatives de “déni de service” (DDoS), l’arme préférée des Anonymous et des hackers amateurs d’aujourd’hui (tellement fréquentes qu’il existe même des cartes pour les visualiser en direct dans le monde). Le déni de service ne nécessite pas énormément de connaissances techniques et fonctionne, à peu de chose près, comme un bras de fer : armé d’une foule de bots, l’assaillant bombarde de données le site ciblé jusqu’à ce que celui-ci, incapable de les traiter toutes à la fois, devienne inaccessible pour les autres utilisateurs. S’il existe aujourd’hui un marché entier de services de défense contre ce type d’attaque, Bruce Schneier explique que le DDoS “se joue largement à la bande passante” : celui qui a la plus grosse remporte le duel, et c’est tout.

Jusque-là, rien de révolutionnaire ou de particulièrement terrifiant, tant on imagine que les entreprises essentielles au fonctionnement d’Internet disposent d’arsenaux de défense affûtés. Ce qui inquiète l’expert, c’est la façon dont ces attaques de dénis de service sont menées :

“Ces attaques sont bien plus larges que celles que [ces entreprises] ont l’habitude de voir. Elles durent plus longtemps. Elles sont plus sophistiquées. Et elles ressemblent à du sondage. Une semaine, l’attaque débute à une certaine intensité, augmente sa violence lentement avant de s’arrêter. La semaine suivante, elle reprend là où elle s’était arrêtée et continue d’augmenter. Et ainsi de suite, le long de ces lignes, comme si l’assaillant cherchait le point précis de faiblesse.”

Enfin, ces nouveaux types d’attaques DDoS, plus complexes, sont configurés de telle façon qu’ils permettent à leurs commanditaires d’avoir une vue d’ensemble des défenses de l’adversaire. Attaquée simultanément à différents endroits et par différents types de DDoS, l’entreprise n’a d’autre choix que de faire fonctionner tous ses systèmes de protection à la fois. Et, par conséquent, de dévoiler son jeu. Comme si un pays calibrait son arsenal, patiemment, en étudiant les défenses de son adversaire à venir avant de lancer une attaque systémique.

 

Bons baisers de Chine

Quant à l’origine des attaques, le spécialiste est catégorique : tester la résistance des fondations d’Internet “n’est pas quelque chose qu’un activiste, un criminel ou un chercheur ferait”. Ce type d’attaque, par sa coordination, son ampleur et sa complexité, ne peut venir que d’un État. “On dirait qu’un commandement militaire essaye de calibrer son arsenal en vue d’une cyberguerre”, développe Bruce Schneier. Selon lui, et les responsables interrogés, “les données pointent vers la Chine”. Même si la Russie est un autre candidat sérieux, au vu de ses récents antécédents.

La question qui suit, après avoir identifié les attaques et réduit le nombre de suspects, est évidemment : “Que peut-on faire pour y remédier ?”. Réponse de Bruce Schneier : “Pas grand-chose, en fait”. Tant que la source des attaques n’aura pas été clairement identifiée (et vu les moyens technologiques à l’œuvre, ça risque d’être compliqué), impossible de faire quoi que ce soit pour enrayer le processus.

Comme conclut Bruce Schneier, les piliers qui soutiennent Internet sont en train d’être méticuleusement grignotés par une entité inconnue, personne ne peut encore rien faire pour l’arrêter, mais “les gens devraient le savoir”. Ne serait-ce que pour se rappeler qu’Internet n’est pas indestructible.

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Le développement de la fibre devra être réexaminé - 08/06/2018

Le développement de la fibre devra être réexaminé - 08/06/2018 | Toulouse networks | Scoop.it

Parmi les divers dossiers qui ont été examinés et ont reçu l'approbation du comité syndical, pour terminer la séance, le conseil communautaire devait valider le fond de concours au SDAN31 (schéma d'aménagement numérique 31) pour l'année 2018 ; il concerne la participation des communes au financement et le mode de calcul correspondant en approuvant les termes de la convention à intervenir avec les diverses communes. Préalablement le vice-président maire de Pouze, Pierre Lattard, a apporté les derniers développements de la réunion du syndicat mixte et le résultat récent de l'appel d'offres. L'entreprise adjudicataire Altitude a proposé le phasage des travaux et en a donné le détail. Il a fait ressortir que toutes les communes seront raccordées pour la fin 2022 et, carte à l'appui, fait part de la répartition arrêtée par le syndicat mixte. Seront dans l'ordre raccordées dès

2018-2019 les communes d'Escalquens et de Labège,

 

en 2019-2020 Auzielle, Pechbusque, Auzeville, Pompertuzat, Deymes, Donneville Belberaud, Fourquevaux, Labastide Beauvoir, Les Varènes, Baziège, Ayguesvives, Montgiscard

 

en 2021-2022 Lacroix-Falgarde, Vieille-Toulouse, Auzeville-Tolosane, Castanet-Tolosan, Mervilla, Péchabou, ensuite Odars, Rebigue, Aureville, Goyrans, Clermont-Le-Fort, Corronsac, Espanès, Montbrun, Belbèze-Lauragais, Noueilles, Issus et Pouze.

 

L'entreprise, précise-t-il, s'est engagée à déployer la fibre optique sur l'ensemble du territoire du Sicoval par réseau souterrain, selon un rythme du déploiement sur 4 ans. Pour ce qui concerne les prises, et l'organisation, il existe déjà un accord avec Bouygues et, en discussion avec Free et Orange ; précision est donnée sur le fait que l'entreprise qui installe les réseaux n'est pas celle qui commercialise les prises.

 

 

Les élus sicovaliens ont «la fibre» sensible

À l'issue de l'exposé les réactions ne se font pas attendre, c'était sans compter que les élus sicovaliens ont «la fibre» sensible ! En effet, Arnaud Lafon maire de Castanet 1er intervenant, précisait entre autres : «J'ai une interrogation sur les choix techniques qui ont consisté à phaser de manière calendaire la desserte des habitants de notre territoire. On demande à nos communes du Nord de faire un effort en matière d'accueil de population, sans pour autant leur offrir les services d'usage auquel ils ont droit. J'ajoute que pour ma commune sur les 6200 ménages 2000 habitent en collectif cette décision ne correspond pas à ce qui nous avait été préalablement indiqué. Je ne manquerai pas de rappeler à mes administrés que pour le conseil départemental ils ne sont pas prioritaires !» De son côté, François Régis Valette maire d'Auzeville, très contrarié, précisait : «Je découvre cette situation nouvelle. Ce n'est pas ce qui nous avait été indiqué antérieurement. Je trouve cela extrêmement surprenant. Lorsqu'il nous a été présenté, le déploiement était bien prévu en 2019 ! C'est incompréhensible.» Après les diverses interventions, Bruno Caubet vice-président maire d'Issus intervenait : «je pense que nous devons poser cette question à l'effet de savoir quels ont été les critères qui ont motivé à retenir cette programmation ? Sont-ils techniques géographiques identitaires etc. ?» Le président lui a répondu que la question sera posée officiellement.

 

Une intervention technique.

Mireille Garcia maire de Vieille-Toulouse, apportait très longuement sa contribution technique détaillée, laquelle a été religieusement écoutée par les édiles, amenant ainsi un éclairage nouveau à l'imbroglio. Toutefois, elle reconnaît que cette couverture pose deux soucis : «Un choix technique lié au découpage des zones d'influence que sont les «nœuds de raccordements d'abonnés» qui couvrent soit une commune, soit deux ou trois communes». Elle conclut à : «la nécessité d'obtenir le plan des nœuds où sont raccordés des points de mutualisation. C'est ce tableau que chacun d'entre nous doit avoir. D'autre part les entreprises qui ont candidaté ne sont pas tenues de respecter stricto sensu ce cahier des charges, elles ont le choix de la manière dont elles ont programmé les travaux ; Il est nécessaire de réclamer ce planning avec les points de mutualisation.». Pour conclure, le président Oberti a précisé qu'il n'était pas question de délibérer ce soir sur le calendrier des opérations.

 

Jean-Louis Laffont
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Les Inrocks - Gérard Filoche : "Internet ? C'est merveilleux ce truc-là"

Les Inrocks - Gérard Filoche : "Internet ? C'est merveilleux ce truc-là" | Toulouse networks | Scoop.it

Chaque semaine, nous interrogeons une personnalité sur son rapport au web. Ancien inspecteur du travail, aujourd'hui membre du bureau national du PS, Gérard Filoche n'a pas peur de critiquer durement le gouvernement qu'il a pourtant soutenu. Très prolixe sur Twitter, pédagogue sur son blog, il a fait d'internet un outil central au service de son combat politique.

  

Quel est votre premier grand moment avec internet ?

Gérard Filoche – J’approchais la fin de ma carrière d’inspecteur du travail, c’était en 2004, j’avais eu un litige avec l’entreprise de cosmétique Guinot-Mary Cohr. Une femme avait été mutée dans des conditions discriminatoires à son retour de maternité, alors que le code du travail stipule bien qu’après cette période, un salarié retrouve un contrat de travail identique ou similaire, à celui qu’il avait avant son départ. Je m’étais rendu au CE de l’entreprise, la direction m’a reproché de l’avoir entravé et m’a poursuivi en justice.

Durant le procès, on a lancé une pétition sur internet qui a récolté 62 000 signatures. J’ai reçu des milliers de messages de soutiens. En 2012, le dernier jugement a été rendu. J’ai gagné l’ensemble des procès, 14 à 0. Je les ai gagnés en grande partie grâce à internet. A ce moment-là, je me suis rendu compte de la puissance de cet instrument pour le militantisme.

Avec internet, on peut aussi retrouver des émissions de télé qui ont déjà été diffusées. En 2013 sur LCI, j’étais invité sur le plateau de Michel Field (avec qui j’avais tracté dans les années 1970 d’ailleurs) pour parler de l’Accord national interprofessionnel (ANI). Au dernier moment, le programme change et je dois m’exprimer sur l’affaire Cahuzac. La vidéo a été beaucoup regardée en replay. Le lendemain ma boîte mail était bloquée, je ne comprenais pas pourquoi. J’ai demandé à mon fils d’essayer de regarder, il m’a dit qu’elle était saturée, j’ai dû racheté du stockage. J’avais reçu 25 000 mails, je n’ai évidemment pas pu répondre à tous.


Qu’est-ce qu’internet vous apporte dans votre combat politique ?

J’ai près de 52 ans de militantisme derrière moi. Dans les années 1960, on imprimait des tracts sur une ronéotype Gestetner (ancêtre de l’imprimante, ndlr). On retranscrivait nos textes sur des papiers translucides, des stencils, ensuite on les déposait sur le rouleau encreur, puis ça imprimait les tracts. Au mieux, on faisait 1 000 versions d’un même tract, mais le plus souvent autour de 800, pas plus, sinon la machine pouvait s’abîmer. Si jamais ça se cassait, il fallait tout reprendre. Pour les recto-verso, une fois un côté effectué, on devait retourner la ramette et faire dans l’autre sens. On passait une journée entière pour imprimer un tract de 4 pages. Il fallait des dizaines de centaines d’heures pour s’exprimer et parvenir à toucher un millier d’étudiants. La photocopie est arrivée au début des années 1970, mais c’était cher.

A l’université de Rouen, avec des camarades, on avait imprimé le livre de Wilhelm Reich La lutte sexuelle des jeunes, censuré sous de Gaulle. Il faisait une quarantaine de pages, à reproduire et à assembler. On a mis une quinzaine de jours. Vous comprenez maintenant ma fascination lorsque je vois qu’un tweet peut être relayé 13 000 fois en seulement quelques instants. Ça demandait tellement de travail, on traitait de tous les sujets : de la guerre au Viêt-Nam, de la sélection à l’université, des entreprises en grève avant Mai 68. Il y avait tant de difficultés à l’époque, aujourd’hui on peut réagir en un flash.

Vous vous êtes inscrit sur Twitter en 2009, au même moment que la plupart des personnalités politiques françaises. On vous a conseillé de le faire ?

Oui, des camarades de Démocratie & Socialisme (revue dont il a la rédaction-en-chef, ndlr) m’ont conseillé de m’y inscrire. Sur Facebook aussi, mais j’aime moins, on est limité à 5 000 caractères, je suis brimé (rires). L’avantage de Twitter, c’est la rapidité, et je suis pas mal suivi (27 800 followers, ndlr). Dans les années 1970, lorsqu’on envoyait un communiqué à l’AFP, il était peut-être relayé une fois sur 100. Aujourd’hui on le fait soi-même, en un tweet. D’ailleurs, il arrive que des médias m’invitent au sujet d’un post.

Sur Twitter, je suis traqué par les libertariens, ceux qui veulent une société sans intervention de l’État, autrement dit tuer la sécurité sociale, le système de retraites, etc. Je les appelle les “fachos cro-magnons”, parce qu’ils veulent nous faire retourner à l’âge de pierre. Je réponds à leurs commentaires. Ça me met en jambe. J’apprends à condenser mon propos en 140 signes, c’est un bon exercice pour répondre aux questions des journalistes, quand je suis invité à BFM TV ou à la radio. Le temps imparti est court, les questions sont toujours les mêmes, on peut les anticiper. Avec Twitter, je m’entraine à trouver des slogans, des tournures efficaces. “Ubériser”, “macroniser”, ce sont des expressions que j’ai inventées en tweetant.


Justement en termes de slogans, vous n’y allez pas de main morte… C’est ce qui fait mon charme. Il y a de ça deux étés, j’ai posté un tweet à propos du pape qui a généré beaucoup de réactions.


Puis il y a ce fameux tweet sur la mort de de Margerie, le patron de Total. Je prenais le train pour Paris, j’ai publié ce petit tweet où je disais que c’était “un coup dur pour l’oligarchie”, en une heure c’était le déferlement. Bernard Maris est d’ailleurs le seul à m’avoir soutenu (numéro de Charlie Hebdo du 29 octobre 2014, ndlr). Ciotti (député Les Républicains, ndlr) avait crié au scandale. Tout ça débouche sur Valls qui en début d’après-midi, annonce à l’Assemblé nationale que je ne devrais plus être au bureau national du parti…

J’ai d’ailleurs eu des centaines de tweets lors de la fausse annonce de la mort de Martin Bouygues, des gens qui s’attendaient à une réaction de ma part. Je leur ai répondu que je me réservais pour Serge Dassault (rires).

Ces chose-là, c’est pour le plaisir de provoquer. J’aime mieux les vraies batailles idéologiques. Par exemple ça fait maintenant huit mois que je fais du Macron matin, midi et soir, que je critique son projet de loi indigne qui veut nous ramener au XIXe siècle.


 

On vous fait des reproches à ce sujet au bureau national du PS ?

Je n’ai même pas de remarques. Macron n’est même pas au PS, si ça loi devait être votée au bureau national elle serait minoritaire. Je l’attaque sur des sujets que peu de gens connaissent, en particulier sur le droit du travail. Je fais même des formations au PS sur ces sujets. Je discutais avec un membre de son cabinet la dernière fois, qui ne connaissait même pas l’article 2064 du code civil (article qui renvoie la procédure de gestion des litiges entre salariés et employeurs aux dispositions du code du travail, et que le projet de loi pour la croissance et l’activité vise à modifier), alors que c’est une menace terrifiante, c’est le virus Ebola de la loi Macron.

Un autre exemple, le bulletin de paie. J’ai fait beaucoup de tweets à ce sujet ces derniers jours. On veut faire moins de lignes, on veut nous faire croire que les gens ne savent pas lire, qu’ils n’y comprennent rien. Alors que sur la feuille d’impôts il y en a bien plus et pourtant ça ne gêne personne. C’est juste un moyen de masquer le salaire brut, alors que c’est le plus important, puisqu’il contient les cotisations sociales !

En-dehors du gouvernement, vous n’épargnez pas les dirigeants européens. Vous traitez Jean-Claude Juncker de “corrompu”, accusez Wolfgang Schäuble de “pinochiste” …


Il y a des faits derrière ces réactions. Lorsque je dis que Juncker est un “mafieux”, je parle de Luxleaks, qu’il a encouragé, ça représente 2 400 milliards d’euros d’évasion fiscale ! Avec ça la crise est réglée. Quand on voit que l’Union européenne refuse les propositions de commission d’enquête sur “Luxleaks” et “SwissLeaks”, Junker a certainement cherché à les entraver. Schäuble aussi est un corrompu (impliqué dans l’affaires dîtes des “boîtes noires de la CDU”, concernant le financement illégal du parti dans les années 1990, ndlr), celui qui a fait les lois anti-social, Hartz, pareil il s’est fait épinglé (condamné pour faits de corruption lorsqu’il était DRH de Volkswagen, ndlr). Il faut le dire.

Les corrompus ce ne sont pas les Grecs, les corrompus ils sont à la tête de l’Europe. Après on me dit “trop à gauche”, mais je suis un social démocrate modéré. Quand Schäuble demande que des administrateurs viennent diriger la Grèce à la place du gouvernement, il veut mettre en place une dictature à la Pinochet. A côté de ces gens là, de Macron, Sigmar Gabriel, Martin Shultz, je suis gentil et modéré. Quand j’entends certains dire que le droit du travail est une entrave à l’emploi, je me dis que je suis un pâle social-démocrate.

Entre Twitter, votre blog, le site Démocratie & Socialisme, vous devez passer vos journées devant votre ordinateur…

C’est vrai que j’y passe beaucoup de temps, mais il faut voir les choses comme un enchaînement d’étapes. Twitter c’est de la musculation. Sur Facebook le propos est déjà un peu plus développé, puis je peux ajouter des illustrations. Sur mon blog, là les sujets sont beaucoup plus détaillés, j’essaie de faire de la pédagogie. Sur le site de Démocratie & Socialismeaussi les articles sont plus importants, et on publie des petites vidéos entretien qui font pas mal de vues. On partage aussi les vidéos des émissions dans lesquelles on apparaît en public, notamment celle d’Un soir à la tour Eiffel sur France 2 à laquelle j’ai participé et qui a fait près d’un million de téléspectateurs.

Depuis l’automne dernier, j’ai fait une centaine de meetings à travers la France sur le projet de loi Macron. Je prends beaucoup le train, j’en profite pour tweeter, écrire des articles. C’est un tout. Une fois accumulés tweets, posts facebook, les articles sur mon blog et sur Démocratie & Socialisme, tout ceci s’emboîte est donne un livre. Dans ma vie, j’en ai écrit 31. Depuis 2010, j’en ai publié 5 et en ce moment j’en ai trois en préparation. L’un sur la loi Macron, mais j’attends l’avis que doit rendre le Conseil constitutionnel pour le terminer, l’autre sur l’histoire de la gauche de 1994-2014, le dernier ce sera un polar. Je prévois aussi de publier quelque chose en 2017. Ce ne sera pas seulement la date de la présidentielle, c’est aussi le centenaire de la Révolution russe.

Quand ce n’est pas pour votre activité politique, comment utilisez-vous internet ?

Quand je m’exprime sur Twitter, ce n’est pas uniquement sur des sujets politiques. J’aime beaucoup la littérature américaine, notamment James Ellroy. Je me suis permis un petit commentaire quand j’ai fini Perfidia.



Sur internet, je fais comme tout le monde, je vais voir des trucs qui m’intriguent, ou alors j’y vais pour contacter des personnes qui me manquent. J’ai accumulé des tonnes de brochures, de livres politiques, depuis le début de mon militantisme, ça monte jusqu’au plafond. Mais je ne les consulte plus. Tout est sur internet, en plus complet.

Quand je travaillais comme inspecteur du travail, tous les matins j’avais un tas de revues sur le droit social et je faisais ma revue de presse. Aujourd’hui je ne les reçois plus, mais je continue à les consulter grâce à internet. Je tiens aussi une rubrique dans L’Humanité dimanche intitulée “Au boulot”. Je me sers d’internet pour mes recherches. C’est merveilleux ce truc-là.

Propos recueillis par Jean-Christophe Catalon

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