Sepp Blatter lors de la finale de la Coupe du monde 2014 (Allemagne-Argentine), stade Maracana, Rio de Janeiro le 13 juillet 2014
Presque toutes les fédérations sportives se trouvent en Suisse, où elles profitent d’une paix royale. Mais, sous la pression internationale, Berne prépare une loi anticorruption qui ennuie la Fifa et son président.
Quand la Fifa a choisi de quitter Paris pour Zurich, en 1932, c’était officiellement pour sa position centrale, la neutralité de la Suisse et l’accessibilité par le train. Près d’un siècle plus tard, la Suisse fout toujours une paix royale aux fédérations sportives et ça ne gâche rien.
Une quarantaine de fédérations sportives sont installées en Suisse, ce qui en fait leur terre d’accueil favorite, très loin devant Monaco. Le Comité international olympique (CIO), qu’il ne faut jamais avoir trop loin de soi, agit comme un aimant mais il n’y a pas que ça.
Les fédérations sportives, même lorsqu’elles gagnent un milliard d’euros par an comme la Fifa, sont des associations, et on ne fait pas beaucoup plus souple que le droit suisse des associations. La Fifa ou le CIO ont le même statut que le club de boules du quartier.
Bientôt, une « Lex Fifa »Elles sont considérées comme une organisation à but non-lucratif – malgré le milliard d’euros en réserves de la Fifa –, n’ont aucune obligation de publier leurs comptes, payent moitié moins d’impôts sur les bénéfices et ne sont pas soumises à la législation suisse contre la corruption.
Quand on est cerné en permanence par les soupçons de pots-de-vin, c’est assez confortable. Mais la Suisse pourrait durcir dans les prochains mois sa législation anticorruption, grâce aux petites bêtises de la Fifa. Jean-François Tanda, spécialiste de la maison Blatter pour le journal Blick :
Combler un vide juridique« L’attribution de la Coupe du monde au Qatar, la dernière élection de Sepp Blatter, l’affaire ISL, ce sont ces événements qui ont amené les politiciens à réfléchir pour savoir si on devait pas changer la loi. »
Le processus législatif suisse est très long. Mais, fin novembre, le Parlement commencera enfin à examiner un projet de loi surnommé « Lex Fifa ». Le but : inscrire la corruption privée dans le code pénal et faire en sorte qu’elle soit poursuivie d’office.
Aujourd’hui, la Suisse est l’un des pays qui lutte le plus efficacement contre la corruption de ses agents mais la corruption privée n’est poursuivie que sur plainte. Or, il y a rarement quelqu’un pour se plaindre d’un cas de corruption, les protagonistes ayant tout intérêt à cacher la chose. Avec cette loi, la justice suisse pourrait se saisir de l’affaire aussitôt prévenue par un lanceur d’alerte ou par un autre pays.
Transparency International a contribué à l’élaboration de la loi. Sa présidente, Delphine Centlivres à Rue89 :
« Si les autorités d’un pays demandent la collaboration des autorités suisses pour avoir des preuves, elles pourraient saisir les ordinateurs, consulter les comptes bancaires.
Il y a un vide juridique, nous avons l’occasion de le combler et de donner les moyens à tout le monde d’enquêter. »
Elle estime qu’il y a 60% de chances qu’elle soit votée en l’état devant le Parlement.
Un match avec des parlementaires(...)