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Corinne Lepage, ancienne ministre de l’environnement : « Le nucléaire est l’une des énergies les plus coûteuses »

Corinne Lepage, ancienne ministre de l’environnement : « Le nucléaire est l’une des énergies les plus coûteuses » | Think outside the Box | Scoop.it

Coût, souveraineté, avenir de la filière… Dans une tribune au « Monde », l’avocate écologiste et ancienne ministre de l’environnement entend corriger sept « contre-vérités » sur le nucléaire.

 


A quelques exceptions près, la présentation faite actuellement sur le nucléaire dans les médias et la parole publique s’inscrit dans un mouvement qui prend malheureusement de l’ampleur : celui de la vérité alternative, chère à Poutine, à Trump et à quelques autres. Celle-ci a notamment pour fâcheuse conséquence de raconter une histoire complètement fausse, appliquant le fameux adage : « Plus c’est gros, plus ça passe. »

On peut être un partisan du nucléaire, en raison de la priorité absolue donnée à la lutte contre le dérèglement climatique, en arguant que jamais les énergies renouvelables ne permettront un volume d’électricité suffisant. C’est de moins en moins exact, mais c’est une thèse qui peut s’entendre. En revanche, à force d’entendre des contre-vérités, les Français sont aujourd’hui convaincus d’une série d’inepties :

« L’énergie nucléaire est la moins chère. » C’est faux. Si la France a effectivement bénéficié d’une énergie bon marché durant de longues années, grâce au nucléaire payé par les Français, l’énergie nucléaire elle-même est aujourd’hui une des plus coûteuses. Amory Lovins, dans un entretien accordé au Monde le 31 octobre, précise : « Les analystes de Bloomberg New Energy Finance disent qu’un nouveau kilowattheure nucléaire coûte cinq à treize fois plus cher qu’un nouveau kilowattheure solaire ou éolien. »

Choix financiers totalement déraisonnables

« L’énergie nucléaire est la seule à pouvoir assurer l’indépendance de la France. » C’est totalement faux. Le vent, le soleil, l’eau dont bénéficie notre territoire assurent notre indépendance. Il n’en va pas de même de l’uranium, qui est extrait de pays « complexes », comme le Niger ou le Kazakhstan. Les combustibles eux-mêmes nous rendent dépendants à 30 % du russe Rosatom, comme si le précédent du gaz ne nous avait pas suffi. D’ailleurs, l’Allemagne n’a jamais compté le nucléaire comme une énergie assurant l’indépendance du pays.

« La filière industrielle nucléaire est le fleuron de l’industrie française. » Elle l’a été. Elle ne l’est malheureusement plus. Aucun EPR n’a été vendu à l’étranger depuis les deux réacteurs d’Hinkley Point, en réalité vendus à EDF, puisque British Energy appartient à EDF. Inutile de s’appesantir sur Olkiluoto (dix-neuf ans de retard) et Flamanville 2 (un coût de 19,1 milliards contre 3,3 milliards prévus et toujours pas démarré).

 

Nucléaire : l’interminable saga de l’EPR finlandais Olkiluoto 3

 

« Les déboires actuels du nucléaire trouvent leur responsabilité chez les écologistes qui ont obtenu la fermeture de Fessenheim. »

 

C’est évidemment totalement faux. Les déboires actuels du nucléaire trouvent leur responsabilité chez les propres acteurs du secteur. 
En cause : des choix financiers totalement déraisonnables, des investissements compris entre 10 milliards et 20 milliards de dollars perdus à l’étranger, l’absence d’entretien à un niveau convenable du parc français.
En particulier, onze ans après Fukushima, les centrales qui, pour des raisons purement financières, ont décidé de recourir à la sous-traitance, plutôt que de maintenir un niveau élevé de personnel qualifié.
Quant à Fessenheim, sa fermeture incombe au choix d’EDF de ne pas investir, à partir de 2018, dans cette centrale qui devait effectivement fermer si Flamanville ouvrait.
Ce choix a conduit à devoir fermer en 2020, faute d’avoir réalisé les travaux minimaux, alors même que Flamanville n’était pas ouvert, et que la centrale pouvait donc continuer à fonctionner.
De plus, cette fermeture s’est accompagnée de centaines de millions d’euros payés à EDF pour une prétendue perte dont elle est en réalité largement responsable.

 

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Chantal Jouanno : « Le débat sur le nucléaire est empreint de défiance car les politiques ont été marquées par le secret et les décisions imposées »

(...)

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La décarbonation de l’industrie et ses limites

La décarbonation de l’industrie et ses limites | Think outside the Box | Scoop.it

À l’occasion de la loi de transition énergétique pour la croissance verte (LTECV), la France s’est armée d’une ambitieuse feuille de route pour lutter contre le changement climatique. La « Stratégie Nationale Bas Carbone » (SNBC) a pour ambition d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050, et définit à cette fin une trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Dans ce contexte, le gouvernement a, dans le cadre du Conseil national de l’industrie (CNI), demandé aux comités des filières les plus émettrices de gaz à effet de serre, de proposer des feuilles de route pour respecter les objectifs de réduction fixés par la SNBC. Les filières industrielles de la chimie, du ciment, de la métallurgie et de l’agroalimentaire ont ainsi proposé d’agir sur des leviers d’action qui diffèrent en fonction des échéances.

Pour respecter les objectifs de 2030, les propositions d’actions se sont concentrées, entre autres, sur « l’efficacité énergétique [de la] substitution de combustibles fossiles par de la biomasse ou des combustibles solides de récupération, l’utilisation de la chaleur fatale [et] l’augmentation du taux de recyclage (1) ».

En revanche, pour atteindre les objectifs 2050, ces filières proposent de mettre en œuvre des technologies qui nécessitent encore d’être affinées par le temps et la recherche, telles que l’hydrogène ou le captage-stockage-utilisation du CO2 (2).

Avec les transports (29,7 %) et l’agriculture (19 %), l’industrie (18 %) représente une des sources majeures d’émissions de gaz à effet de serre. En France, si le secteur industriel a considérablement diminué ses émissions de CO2 depuis une vingtaine d’années, il contribue néanmoins encore à 20 % des émissions nationales. Surtout, la réduction des émissions issues de l’industrie s’explique en partie par la désindustrialisation massive qu’a connue la France ces trois dernières décennies.

Trop souvent négligé, décarboner notre industrie s’avère pourtant être tout autant nécessaire que la décarbonation du logement ou du transport si l’on veut pouvoir atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. De surcroît, face à la complexité et à la relative inefficacité du système d’échange des quotas de gaz à effet de serre (SEQUE), la décarbonation de l’industrie, et surtout de l’industrie lourde, est un enjeu crucial dont le gouvernement ne s’est saisi que très récemment à travers les plans « France Relance » et « France 2030 ».





PLAN RELANCE ET DÉCARBONATION DE L’INDUSTRIE

Le plan « France Relance » est présenté comme « une feuille de route pour la refondation économique, sociale et écologique du pays ». Pour ce faire, le plan est doté de 100 milliards d’euros sur deux ans dont 30 milliards sont affectés à la transition écologique et répartis entre la rénovation énergétique, la lutte contre l’artificialisation des sols, l’économie circulaire et les circuits courts, la mer, les infrastructures et la mobilité verte, les technologies vertes et la décarbonation de l’industrie.

Le plan de relance prévoit une aide ambitieuse de 1,2 milliard d’euros à la décarbonation de l’industrie sur la période 2020-2022. Cette décarbonation du secteur industriel repose sur deux axes principaux de réductions : d’une part, le soutien à l’investissement industriel pour une meilleure efficacité énergétique et l’évolution des procédés industriels, d’autre part, le soutien à la décarbonation de la chaleur industrielle.



Soutien à l’investissement pour l’efficacité énergétique

En premier lieu, un dispositif d’appel à projets conduit par l’Agence de la transition écologique (ADEME), IndusEE, désormais clos, a été lancé en 2020 pour soutenir l’investissement dans les projets d’envergure, améliorant l’efficacité énergétique d’une activité industrielle. Face à son succès, un appel à projets unique (DECARB IND) a été renouvelé en 2021 avec un champ d’application plus large. Désormais, en plus de l’amélioration de l’efficacité énergétique, tous les projets visant à la transformation des procédés industriels qui concourent « significativement à la décarbonation de l’industrie » sont désormais éligibles.

Par ailleurs, le plan de relance a prévu la mise en place d’un guichet de soutien à l’investissement pour les projets d’amélioration de l’efficacité énergétique, qui doit permettre aux entreprises d’obtenir des subventions pour leurs projets d’efficacité énergétique d’une valeur de moins de 3 millions d’euros, et ce jusqu’au 31 décembre 2022. Ce dispositif est encadré par le décret n° 2020-1361 du 7 novembre 2020 et par l’arrêté pris le même jour et modifié par un arrêté du 28 mai 2021. Ainsi, une subvention peut être versée aux entreprises « qui réalisent un investissement dans un bien acquis à l’état neuf […] affecté à une activité industrielle manufacturière sur le territoire français, lorsque ce bien permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre de l’activité par la mise en place de mesures d’efficacité énergétique ». Elle vise notamment les biens de récupération de force ou de chaleur et les biens destinés à l’amélioration du rendement énergétique d’appareils ou d’installations.



Soutien à la chaleur bas carbone

En premier lieu, un appel à projets a été institué en 2020 pour la production de chaleur à partir de biomasse pour un usage industriel qui apporte à l’entreprise lauréate une aide à l’investissement ainsi qu’une aide au fonctionnement. Au regard de l’engouement suscité par le dispositif, celui-ci a été reconduit du 11 mars au 14 octobre 2021. Il concerne notamment les projets d’installation de nouveaux équipements et la conversion à la biomasse d’installations existantes utilisant des combustions fossiles. Par ailleurs, un appel à projets, lancé le 20 octobre et conduit par l’ADEME, prévoit un soutien au fonctionnement pour la chaleur industrielle issue de Combustibles Solides de Récupération.

Si la combustion de la biomasse émet moins de carbone que la combustion fossile, il convient de rappeler que celle-ci, et notamment la combustion du bois, rejette dans l’air des particules fines néfastes pour la santé humaine. Une étude parue en 2020 dans la revue Nature (3) affirme que « les particules issues de la combustion de la biomasse, par leur potentiel oxydant, c’est-à-dire leur capacité à attaquer les cellules, seraient même plus toxiques que celles issues des gaz d’échappement des vieux véhicules diesels et essence (4). »












UN VERROU TECHNOLOGIQUE À LA DECARBONATION DE L’INDUSTRIE

Pour décarboner l’industrie, et notamment l’industrie lourde, les solutions actuellement disponibles dites « matures » demeurent insuffisantes pour atteindre les objectifs de la SNBC. Face à ce « verrou technologique », « des innovations de rupture sont absolument nécessaires (5) ».

C’est dans cette projection que l’ADEME travaille, grâce au projet Finance ClimAct, à élaborer des plans de transition sur neuf secteurs industriels énergo-intensifs (acier, aluminium, ciment, ammoniac, chlore, ethylène, papier-carton, sucre et verre). Il s’agit de construire des feuilles de route pour permettre aux industriels un changement de procédés afin de se conformer aux objectifs de neutralité carbone.

Pour le secteur du ciment par exemple, la réflexion entreprise avec l’ADEME sur l’impact et le coût des différents leviers d’amélioration a fait émerger plusieurs solutions : la baisse du taux de clinker dans les compositions ou encore la mise en place de technologies de captage et stockage de CO2, etc.

Or, alors que les analyses montrent qu’un investissement de 3,5 à 4,5 milliards d’euros sur les technologies « matures » serait nécessaire pour réduire de 40 à 55 % les émissions de gaz à effet de serre du parc cimentier français (6), les « investissements corporels bruts moyens » sur la période 2013-2017 du secteur ne se sont élevés qu’à 172 millions d’euros par an. Les investissements paraissent encore trop insuffisants pour atteindre l’objectif de réduction de 81 % des émissions du secteur industriel.




LA STRATÉGIE « FRANCE 2030 »

Dévoilé le 12 octobre, le nouveau plan d’investissement « France 2030 » prévoit, entre autres, un investissement de 500 millions d’euros pour qu’à terme, puisse émerger en France « au moins deux Gigafactory d’électrolyseurs » et pour « produire massivement de l’hydrogène et l’ensemble des technologies utiles à son utilisation ».

De plus, toujours en continuité du plan de relance, l’objectif de décarbonation de l’industrie devra bénéficier d’un nouvel investissement, avec pour objectif de réduire de 35 % les émissions du secteur d’ici à 2030.

Parmi les arguments permettant de justifier les investissements massifs dans la filière de l’hydrogène, le gouvernement avance que le développement de l’hydrogène décarboné est primordial pour remplir les objectifs de décarbonation de l’industrie en France. En effet, le secteur est de loin le premier consommateur d’hydrogène, et notamment la métallurgie, la chimie et le ciment.





LE PARI D’UNE FILIÈRE FRANÇAISE DE L’HYDROGÈNE DÉCARBONÉ

Aujourd’hui, la France donne une place importante dans ses politiques publiques à l’hydrogène pour la décarbonation de l’industrie. La stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène décarboné en France, institué par le plan de relance en septembre 2020, vise à soutenir la R&D afin de permettre le développement de technologies plus performantes pour l’ensemble des usages de l’hydrogène. L’objectif derrière le développement de l’hydrogène est bien de décarboner l’industrie grâce à l’émergence d’une filière française de l’électrolyse.

La production d’hydrogène actuelle (hydrogène gris) est particulièrement émettrice de CO2. Pour produire de l’hydrogène décarboné, il est soit possible de capter-stocker le CO2 émis lors de la production (hydrogène bleu), soit de le produire par électrolyse de l’eau (hydrogène vert) à partir de l’énergie renouvelable. Il existe également un hydrogène rose bas carbone produit à partir d’une électricité nucléaire, mais cet hydrogène peut être qualifié de vert.

Néanmoins, la production d’hydrogène bleu et vert est encore pour l’instant bien plus coûteuse que ne l’est l’hydrogène gris. En effet, la production d’hydrogène décarboné, et surtout d’hydrogène vert, consomme une quantité importante d’électricité. En effet, si l’industrie française substituait en totalité l’hydrogène gris par de l’hydrogène vert, « il faudrait augmenter la production actuelle d’électricité française de 15 % », ce qui « montre que l’hydrogène vert peut difficilement être la seule solution de décarbonation de la sidérurgie, et de substitution de l’hydrogène gris par du vert dans la chimie (7). »

L’hydrogène constitue par conséquent une solution de long terme, qui, toutefois, pourrait, à moyen terme, alléger l’impact de la sidérurgie en tant que substitut au charbon. Néanmoins, plusieurs défis restent à relever. En premier lieu, le coût de production de l’hydrogène décarboné ne permet pas d’inciter les industriels à verdir les quelque 900 000 tonnes consommées chaque année par le secteur. De plus, le rendement et la longévité des électrolyseurs doivent être améliorés. Là encore, les investissements R&D du secteur industriel devront être massifs, afin d’améliorer le rendement des électrolyseurs comme de l’éolien terrestre et du solaire qui permettront d’alimenter les premiers en électricité (8).

Enfin, et c’est là l’un des points clés, la question du stockage de l’hydrogène doit faire l’objet d’une réflexion accrue. En effet, le stockage massif de l’hydrogène dans des réservoirs de 700 bars cause trop de pertes énergétiques (9).

Pour finir, on regrettera le manque de vision et d’ambition pour adjoindre à la décarbonation de l’industrie un volet économie circulaire. En effet, outre l’amélioration de l’efficacité énergétique des procédés de production, l’enjeu de la réduction des matières premières utilisées dans l’industrie ne doit pas être négligé. Le développement de l’économie circulaire, « par l’amélioration de la qualité du tri et de la collecte, ainsi que le déploiement de solutions de recyclage pour la production de matériaux secondaires (10) » est un vecteur critique de la décarbonation du secteur.

Par ailleurs, la captation et le stockage de CO2 sont incontournables et devraient contribuer à hauteur de 15 % aux réductions des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050 (11). Le captage-stockage du CO2 est à l’heure actuelle une technique complexe et toujours en cours de développement. Selon une étude de l’Ademe (12), environ 51 mégatonnes des 65 mégatonnes de CO2 rejetées par l’industrie sont « captables ». Le bénéfice est par conséquent non négligeable. Cependant, cette technologie présente encore de nombreuses limites. D’une part, elle est extrêmement énergivore. D’autre part, l’acceptabilité sociale de ce genre de projet est particulièrement difficile à obtenir, au même titre que les projets éoliens et solaires. Or, comme l’affirme à juste titre la physicienne Florence Delprat-Jannaud, « tout l’intérêt de cette technologie est d’être déployée en parallèle des énergies renouvelables ».



1) Conseil général de l’économie, « La décarbonation des entreprises en France », Rapport, févr. 2021.

2) Ibid.

3) K. R. Daellenbach, G. Uzu et al., « Sources of Particule-Matter Air Pollution and Its Oxydative Potential in Europe », Nature, 587, Nov. 2020.

4) S. Mandard, « Le chauffage au bois, première source d’émission de particules fines », Le Monde, 4 juin 2021.

5) T. Gourdon, S. Padilla, « Comment décarboner l’industrie lourde », Transitions & Énergies, 19 févr. 2021.

6) Ibid.

7) Conseil général de l’économie, « La décarbonation des entreprises en France », Rapport, févr. 2021.

8) H. Leroux, « Transport, industrie, énergie… : faut-il croire à la révolution hydrogène ? », Sciences & Vie, 15 déc. 2020.

9) Ibid.

10) https://reseauactionclimat.org/thematiques/industrie-lourde/

11) E. Disdero, « “France 2030” : capter et stocker le CO2 pour décarboner l’industrie, est-ce vraiment une bonne idée ? », Libération, 14 oct. 2021.

12) https://presse.ademe.fr/wp-content/uploads/2020/07/captage-stockage-geologique-co2_csc_avis-technique_2020.pdf.


Corinne Lepage,

Avocate à la Cour,

Huglo Lepage Avocats



Nathan Pillet,

Élève-avocat

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La République, c’est l’affirmation de l’État de droit.

La République, c’est l’affirmation de l’État de droit. | Think outside the Box | Scoop.it

Qu’est-ce que l’État de droit ? C’est la garantie que les règles de droit vont s’appliquer à tous et dans des conditions identiques.

L’application à tous soulève évidemment nombre de questions dans un pays où l’administration un pouvoir considérable du fait d’une inflation délirante de texte qui ouvre la voie à de multiples interprétations ; où localement, le droit est régulièrement bafoué par la force, qu’il s’agisse de l’emprise des mafias sur certains quartiers ou, dans d’autres parties du territoire, de décisions de destruction de paysages, de ressources, de pollutions diverses en toute connaissance de cause et en toute impunité. On pourrait y ajouter la prise de décisions manifestement illégales par le gouvernement comme l’autorisation de chasse d’espèces protégées, autorisation déjà annulée par le conseil d’État est sanctionnée par l’union européenne. Cette inefficience du droit pour ne pas dire ce mépris et cette indifférence à l’égard de la loi dont certains croient pouvoir se prévaloir participe de la défiance généralisée à l’égard du système politique et de ses représentants.

L’application suppose que le pouvoir politique ne s’immisce pas dans les affaires judiciaires quelles qu’elles soient, que la liberté de la presse et le droit à l’information soient respectés. À cet égard, la non-conformité du système français la Convention européenne des droits de l’homme en ce qui concerne la non indépendance du parquet reste une difficulté majeure de même que la restriction constante du recours au juge d’instruction et la contestation permanente du travail du parquet financier.

Ce constat conduit à une véritable interrogation sur le respect par les plus hautes autorités de l’État de droit en France aujourd’hui. On passera sur la différence de comportement d’Emmanuel Macron et d’Angela Merkel en face d’une décision de leur Cour suprême respective sur l’insuffisance de leurs politiques climatiques : l’indifférence, voire le mépris pour l’un, l’application immédiate de la décision judiciaire pour l’autre. Le sujet majeur concerne la destruction systématique des organes de contrôle mis en place au cours des années et l’irrespect total à l’égard de toute exemplarité politique. Alors que ce thème avait été mis en exergue au début du quinquennat, force est de constater qu’aucun gouvernement et entourage n’a jamais compté autant de personnes mises en examen sans qu’il n’en découle aucune conséquence politique. C’est la première fois qu’un ministre en exercice est renvoyé en correctionnelle ce qui sera le cas de Monsieur Griset cette semaine. On est vraiment très loin de la jurisprudence Balladur alors même que pour la première fois, un ancien président de la République est condamné deux fois à de la prison ferme, et tout ceci dans une relative indifférence. La lutte contre la corruption, contre la délinquance en col blanc qui avait pu apparaître comme un objectif majeur il y a quelques années notamment avec la création de la Haute autorité qui constitue un progrès indéniable apparaît désormais quasiment comme « ringarde ».

C’est un signe de déliquescence considérable de notre société que le phénomène Zemmour traduit d’une autre manière. En effet, défendre le pétainisme qui a été la honte de la France, où les pires exactions ont été commises dont une délinquance financière à l’échelle industrielle, et avoir de surcroît le culot de se revendiquer de De Gaulle apparaît visiblement comme un projet souhaitable pour 15 % de nos concitoyens ! Cela n’a été rendu possible que par le délitement du projet républicain.

Le rétablissement de l’état de droit dans toutes ses formes est un impératif non seulement éthique mais politique prioritaire.


Corinne LEPAGE

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Coronavirus: l'inertie tragique de nos institutions face à la crise impose un big-bang dans l'administration

Coronavirus: l'inertie tragique de nos institutions face à la crise impose un big-bang dans l'administration | Think outside the Box | Scoop.it

Une délégation d'urgentistes en grève entrant au ministère de la santé alors que de nombreux manifestants réclament de meilleurs salaires et plus de personnel, le 11 juin 2019 à Paris.

 

L’incompétence de l’État jacobin, doublée de l’arrogance des technocrates et du mensonge d’État, sont chaque jour davantage mis en cause.

 

La prolongation de l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 24 juillet a suscité de la part de certains commentateurs la réflexion que la France était sortie de la démocratie.

Si les questions de crise sanitaire et de crise économique n’en sont plus -seules l’ampleur et la durée restent en discussion- en revanche, le sujet démocratique et institutionnel ne fait que s’ouvrir.

La démocratie a été passablement écornée par les mesures qui ont été prises et surtout par le processus avec lequel le gouvernement y est parvenu. En effet, la loi du 23 mars 2020 a été votée dans des circonstances plus qu’acrobatiques et  les dispositions pour la sortie du confinement n’ont pas fait l’objet d’un vote au sens démocratique du terme: aucun temps donné aux parlementaires pour réfléchir, pas de possibilité d’amendement, pas de mise en place du vote électronique pour tous les députés et une absence de la majorité d’entre eux pour des questions sanitaires, etc... le comble de l’absurdité a sans doute été de faire croire qu’il y avait une concession démocratique considérable dans le fait d’accepter de faire voter le Parlement sur le projet de déconfinement….

Quant au contenu même du texte, il est parfaitement anti-démocratique dans la mesure où le gouvernement est autorisé à légiférer par ordonnances pour un temps très long, qui va bien au-delà de l’urgence sanitaire et surtout les mesures qu’il est autorisé à prendre sont sans rapport nécessaire avec la crise sanitaire. En réalité, aucun délai n’est fixé pour la validité des mesures décidées. Cette sortie de l’état de droit a donc permis au gouvernement de nombreux coups de canif dans le contrat: par exemple, permettre aux préfets de déroger à toutes les règles sociales et environnementales et sans aucun contrôle, supprimer le respect élémentaire des droits de la défense… Plusieurs pages seraient nécessaires pour détailler tous les avantages consentis à tel ou tel, demandés mais non obtenus jusque-là, pour des raisons évidentes et qui tentent de passer sous le radar avec l’urgence sanitaire. Qui peut nous expliquer pour quelles raisons la lutte contre la pandémie justifie de telles mesures?

 

Les Français sont à la recherche d’une autre organisation politique et ce qui se passe sur le terrain dessine incontestablement les évolutions.

 

Et l’accumulation d’erreurs depuis le début de la crise sanitaire prouve la crise démocratique qui est avant tout une crise de confiance et un constat d’incapacité de nos institutions à intervenir en temps de crise. En effet, derrière la crise démocratique se profile une crise institutionnelle qui justifie une réforme profonde de notre système politique et administratif, voire une révision de la Constitution.

L’incompétence de l’État jacobin, doublée de l’arrogance des technocrates et le mensonge d’État relayé par des médias soit par indisponibilité d’autres informations, soit par faute d’indépendance, est chaque jour davantage mise en cause. Ce matraquage médiatique depuis le début de la crise du coronavirus conduit finalement à une absence de réflexion, ce qui interpelle directement notre système institutionnel. Que tout puisse être décidé par un seul homme, même s’il a été élu, appuyé sur un conseil scientifique (qu’il a lui-même désigné dont la diversité n’est pas la caractéristique première et qu’il invoque selon ses propres souhaits) n’est pas acceptable en principe et ne l’est particulièrement pas dans la crise actuelle. L’opposition politique est inaudible alors que le débat est plus que jamais indispensable et les dérives de la macronie tant en ce qui concerne la faiblesse politique de ses députés que l’inexpérience de ses ministres (à quelques exceptions près) que l’influence des lobbies sont éclatantes. Cette situation remet en cause l’organisation même de nos institutions et ce n’est pas un hasard si le nombre d’initiatives venues de la société civile, de sociétés savantes, et même d’organisations politiques pullulent. Les Français sont à la recherche d’une autre organisation politique et ce qui se passe sur le terrain dessine incontestablement les évolutions:

- une organisation beaucoup plus girondine dans laquelle les territoires se voient reconnaître une réelle autonomie tant réglementaire que financière avec bien entendu de réels contre-pouvoirs tant au niveau des oppositions locales que des organisations citoyennes

- le retour à un équilibre des pouvoirs entre gouvernement et Parlement avec la suppression des ordonnances qui sont des blancs-seings donnés sans aucun contrôle réel, et le passage soit à un régime présidentiel avec un Parlement beaucoup plus puissant (ce qui signifie la réduction massive des outils de rationalisation du parlementarisme c’est-à-dire de réduction des droits du Parlement) ou le retour à un Premier ministre qui gouverne réellement et peut donc être renversé, les pouvoirs du président de la République étant considérablement réduits dans cette deuxième option

- la création d’une véritable chambre de la société civile, dotée de pouvoirs à la fois pour se prononcer en amont du Parlement sur les textes et pour pouvoir saisir le Conseil constitutionnel en aval

- un renforcement de la justice avec non seulement des moyens dignes de ce nom pour le système judiciaire mais une refonte complète du rôle du Conseil d’État qui ne peut plus jouer à la fois le rôle de conseil du gouvernement et de juge de toutes les décisions qu’il prend y compris en matière de libertés publiques. Le Conseil d’État ne devrait garder que le rôle de conseil du gouvernement; les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel intégreraient le système judiciaire et une chambre administrative serait créée à la Cour de cassation à laquelle les membres actuels du Conseil d’État pourraient décider de siéger à la condition bien sûr d’abandonner le Conseil d’État

- une refonte du rôle de la loi et du règlement pour réduire massivement l’inflation juridique qui est une source d’insécurité, d’inégalité et de contraintes inutiles

Bien d’autres propositions pourraient être formulées et il ne s’agit que de pistes. Mais le sujet doit être mis sur la table.

Cette réforme institutionnelle doit se doubler d’une révolution administrative. Chacun a pu mesurer l’inanité des choix effectués depuis des années tous gouvernements confondus, la primauté absolue de Bercy, la captation des fonds publics par des systèmes administratifs au détriment des professionnels chargés de remplir la mission, l’inertie tragique de l’organisation administrative. Tout ceci n’est plus acceptable. Il faut faire le big-bang de l’administration française et c’est sans doute la Cour des comptes qui serait le mieux à même de formuler les propositions issues des multiples rapports de très grande qualité fournis chaque année et qui ne sont quasiment jamais suivis de réponses. Il faut envisager non seulement une réorganisation des ministères et de leurs compétences mais également une règle intangible laissant la très grande majorité des fonds alloués à un service public pour le fonctionnement de ce service et non pour l’administration chargée de l’administrer. L’hôpital qui ne se voit allouer qu’une très faible minorité des fonds publics alloués à la fonction sanitaire et dont les personnels ont pleuré et imploré dans le vide durant des années. Il devrait être le premier bénéficiaire de cette révolution de bon sens: la dépense publique doit aller au service public et non pas à l’administration du service public.

En bref, de cette très grave crise, espérons que nous saurons collectivement non seulement nous relever mais tirer les conséquences de nos erreurs tragiques pour qu’a minima elles ne se répètent pas. La meilleure manière de nous guérir et de réparer est de co-construire ce que nous voulons, faute de quoi la spirale de la violence pourrait nous conduire vers des temps lugubres.

 

Corinne Lepage Avocate, ancienne ministre de l'Environnement, députée européenne de 2009 à 2014, Présidente de CAP21/Le Rassemblement Citoyen

 

 

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Le projet de loi énergie-climat nous prend pour des imbéciles

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Un manifestant réclame la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim, le 3 février 2018 à Strasbourg.

 

Cette loi de régression énergétique valide par exemple la durée de vie à 50 ans de nos réacteurs, faisant prendre un risque vital à de nombreux concitoyens.

 

Le projet de loi énergie-climat devrait changer d'intitulé pour être dénommé loi de régression énergétique. En effet, ce texte au demeurant très court n'est destiné qu'à valider plusieurs reculades majeures du gouvernement sur nos objectifs climatiques, reculades au demeurant probablement incompatibles avec nos engagements communautaires.

À titre préliminaire, on soulignera le caractère paradoxal de ce projet de loi qui intervient alors même que la ville de Grande-Synthe et les associations regroupées autour de "l'Affaire du siècle" poursuivent l'État pour une inaction climatique. La démonstration de cette inaction -on pourrait même parler d'action contre-productive- est parfaitement illustrée par ce texte qui prend nos concitoyens pour des imbéciles.

En effet, le gouvernement ayant décidé, en dépit de toute rationalité économique, financière et industrielle, de renforcer la part du nucléaire dans le mix énergétique (alors que celle-ci n'a jamais été aussi faible puisqu'elle est passée de 77 à 68% entre 2005 et 2017), toute la logique de la politique énergétique s'en trouve inversée. La place des énergies renouvelables, malgré les envolées lyriques, reste congrue et la meilleure preuve en est que les investissements R&D sont d'un facteur 1 à 100 entre le renouvelable et le nucléaire (ce qui montre le mensonge flagrant dans les déclarations étatiques sur la volonté de pousser les énergies renouvelables). Et l'accent ne doit surtout pas être mis sur la réduction de la consommation énergétique; en effet, il faut vendre l'électricité nucléaire. D'où la substitution à la règle du facteur 4 –c'est-à-dire de la réduction par quatre de nos émissions de gaz à effet de serre pour 2050- pourtant fixée dans le droit communautaire, d'une règle de neutralité carbone qui n'a aucune valeur juridique et surtout aucune réalité technologique. Il s'agit en effet de prétendre compenser les émissions de gaz à effet de serre -qui donc théoriquement peuvent continuer à croître- par l'absorption de ces mêmes gaz. Cette prétention est à la fois stupide et tragique. Elle est stupide dans la mesure où malheureusement les puits de carbone que constituent la forêt et les océans jouent de moins en moins leur rôle et que nous ne disposons pas de technologies permettant aujourd'hui de stocker de manière définitive et sûre le carbone. C'est donc un pari lancé par les mêmes ingénieurs, disciples du Docteur Folamour, qui il y a 50 ans affirmaient pouvoir régler la question des déchets nucléaires. C'est tragique dans la mesure où la France fait un choix suicidaire, à l'opposé de celui des autres pays tout en prétendant vouloir servir d'exemple. C'est pathétique!

Ce choix majeur étant fait, il ne reste plus qu'à en tirer les conséquences qui sont celles de la régression.

Cette régression est tout d'abord de reculer la réduction de la part du nucléaire à 50% en 2025 à une date ultérieure -ce qui aurait été parfaitement atteignable puisque nous sommes à 68% et que donc plus d'1/3 du chemin entre 75 et 50 a déjà été fait sans fermeture d'aucun réacteur. Au passage, la loi valide la durée de vie à 50 ans de nos réacteurs, ce qui, quand on sait l'état plus que préoccupant de nos vieux réacteurs -reconnu au passage par l'ASN- consiste à faire prendre, en toute connaissance de cause, un risque vital à nombre de nos concitoyens.

 
Limiter à 2° la température impose et de diviser par quatre nos émissions de gaz à effet de serre et de trouver de surcroît des solutions de compensation pour les émissions qui resteront. Le projet français est un très mauvais signal, venant d'un pays qui prétend à l'exemplarité climatique, pour tout le reste du monde.

Ensuite, la régression concerne la diminution de nos ambitions en termes de consommation d'énergie finale par rapport à 2012 (fixé par la conférence environnementale de 2013) puisque l'objectif intermédiaire de 20% en 2030 est ramené à 17%, rendant impossible l'atteinte de l'objectif de 50% en 2050, ce dont nos gouvernants actuels se moquent éperdument puisqu'ils ne seront plus là à cette époque. Quant à la réduction de la consommation d'énergie fossile, elle reste bien théorique puisque si quatre centrales à charbon doivent être fermées, le gouvernement ne cesse de délivrer des permis d'exploration pétrolière à Total, renforçant ainsi à terme la production de pétrole et par voie de conséquence l'augmentation de la consommation d'énergie fossile.

De toute façon, les émissions de gaz à effet de serre sont revues à la hausse puisque l'objectif de plafond de 254 millions de tonnes CO2 initialement prévu pour 2023 est remonté à 277 millions tonnes dans le projet PPE, accessoire de la loi climat énergie.

En définitive, c'est donc bien une régression qui est envisagée et non pas du tout le projet ambitieux présenté par Monsieur de Rugy. Espérons que les organismes concernés, à savoir le CESE et le Conseil d'État auront le courage de rappeler au gouvernement ses engagements et ses devoirs, les uns et les autres étant manifestement ignorés par le projet. En effet, ce texte devra être confronté aux différents textes communautaires qui viennent d'être adoptés (directives du 11 décembre 2018 relative aux énergies renouvelables d'une part et l'efficacité énergétique d'autre part, le règlement sur la gouvernance de l'Union de l'énergie et de l'action pour le climat du 11 décembre 2018). Or, la prémisse de départ c'est-à-dire l'oubli du facteur 4 n'est pas compatible avec les orientations communautaires. En effet, limiter à 2° la température impose et de diviser par quatre nos émissions de gaz à effet de serre et de trouver de surcroît des solutions de compensation pour les émissions qui resteront. Le projet français est un très mauvais signal, venant d'un pays qui prétend à l'exemplarité climatique, pour tout le reste du monde. C'est un très mauvais coup porté à tous les jeunes qui s'emparent aujourd'hui de la question climatique.

 

Corinne Lepage

Avocate, Ancienne députée européenne Cap21, ancienne ministre de l'Environnement

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Le rôle du juge national dans l’établissement d’une justice climatique mondiale : défi et perspectives

Le rôle du juge national dans l’établissement d’une justice climatique mondiale : défi et perspectives | Think outside the Box | Scoop.it

Le titre de cet article est une forme de décalque du titre d’un ouvrage complet que nous avons consacré à ce même sujet qui s’intitule "Le contentieux climatique : une véritable révolution judiciaire mondiale" , qui vient de paraître aux éditions Bruylant (1).

La question de la place du juge dans ce domaine se pose effectivement parce qu’il n’existe ni institution internationale ni justice internationale consacrées à l’environnement.

 

L’idée d’une organisation nationale des Nations unies a été soutenue par la République française mais n’a pas été adoptée à la dernière conférence de Rio. L’idée d’une juridiction internationale ayant compétence universelle sur les questions environnementales n’a jamais été sérieusement envisagée.

 

Le droit international issu de la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) de 1992 se consacre, depuis 1995, à l’organisation régulière de réunions des états parties (ou COP) qui n’ont pas encore conduit au droit qu’il faudrait instituer.

 

à cet égard, l’Accord de Paris de décembre 2015 obtenu à l’issue de la COP 21, bien qu’il ne présente pas l’aspect d’un accord contraignant, peut être regardé comme un pas en avant décisif, ce que reconnaissent la plupart des juristes, car il contient un certain nombre d’obligations.

 

Aujourd’hui, l’état du climat continue à se dégrader et certains scientifiques ont affirmé que si nous continuons ainsi, nous n’aurions que 5 % de chances de réussite d’atteindre le seuil de 2°C à l’horizon 2100, fixé comme limite supérieure à ne pas dépasser selon l’Accord de Paris.

 

On comprend, dans ces conditions, que dans des continents aussi différents que l’Afrique, l’Asie ou l’Amérique, les associations et les collectivités publiques se mobilisent et saisissent leurs juges nationaux pour obtenir des États et/ou des principaux responsables du réchauffement climatique, soit des mesures préventives et efficaces, soit des mesures réparatoires ou des limitations au droit de polluer par le CO2.

 

Il existerait aujourd’hui neuf cents décisions rendues dans le domaine du contentieux climatique. La partie la plus importante du contentieux climatique se trouve aux États-Unis. Son développement accéléré s’explique sans doute par l’attitude du président actuel Donald Trump, qui a entendu dénoncer l’Accord de Paris et mettre en marge son pays de ce mouvement mondial que l’on retrouve dans toutes les collectivités, face à ce qu’on peut appeler une catastrophe majeure à terme, c’est-à-dire une catastrophe lente.

 

à cet égard, Jean Jouzel écrivait, la veille de la COP21 de 2015 : « Si rien nest fait pour réduire leffet de serre lié aux activités  humaines, nous irons la fin de ce siècle à un réchauffement moyen supérieur à 4°C par rapport à l’aire préindustrielle qui se poursuivrait jusqu’aà 8 à 12 °C en 2300.

 

La dernière fois que le climat a été plus chaud de 4°C, c’était il y a 15 millions d’années avant l’histoire humaine. La dernière fois que le climat a été plus chaud d’environ 2°C, c’était il y a 125 000 ans.

 

Le niveau des océans était alors d’au moins 6 m plus élevé qu’aujourd’hui. Il serait très difficile, voire impossible de faire face aux conséquences d’un réchauffement climatique global supérieur à 1,5 ou 2°C tant pour la biodiversité que pour les sociétés humaines » (2).

 

Les recours climatiques ont deux objets, tout d’abord les recours juridictionnels qui tendent essentiellement à obtenir des pouvoirs publics des mesures d’anticipation ou de réduction ou d’adaptation au changement climatique.

 

Et il ne faut pas les négliger les contentieux dirigés contre les grandes entreprises considérées par certains experts comme responsables du réchauffement climatique. Un rapport américain (3) du professeur Heede estime que quatre-vingt-dix grandes multinationales exerçant leur activité dans le domaine des hydrocarbures, du ciment ou du charbon, sont responsables d’au moins 40 % du réchauffement climatique.

 

Pour qu’une jurisprudence s’établisse, il faut d’abord que le juge national interprète de façon simple les obstacles de procédure qui peuvent empêcher le déroulement d’un procès sur le fond. Le juge peut en effet, dans la plupart des contentieux, rejeter un recours pour un motif de procédure ou d’irrecevabilité sans avoir à statuer sur le fond.

 

La vraie question est celle de savoir comment déterminer les responsabilités et comment développer un contentieux qui ne soit pas seulement un contentieux punitif mais surtout un contentieux préventif, car c’est demain qui nous intéresse.

 

Finalement, le défi lancé au juge national ne peut se cantonner au seul champ des règles de procédure ou de compétence et surtout, doit lui permettre de se référer à un droit nouveau et supérieur qui s’impose à tous et à chacun.

 

On examinera successivement ces deux questions.

 

 

 

 

DÉPASSER LES CONTRAINTES DE LA PROCÉDURE CLASSIQUE

 

Comme on le sait, traditionnellement, un procès national, sur quelque continent qu’il se déroule, est dominé par la règle des trois unités (que l’on peut emprunter à nos chers auteurs classiques), c’est-à-dire la règle de l’unité de temps, de lieu et d’action.

 

Ici, rien à voir. Pas d’unité de lieu, puisque le dommage est global et que la victime est universelle. Pas d’unité de temps, parce que si le passé est la source des difficultés, le futur, bien qu’incertain, est ce qu’il faut construire. Pas d’unité d’action, puisque toutes les actions judiciaires sont conduites séparément selon les différents systèmes judiciaires.

 

Ajoutons à cela une autre difficulté : comment voir clair dans les systèmes judiciaires hétérogènes ? Le système accusatoire, le système inquisitorial, le système de la preuve orale, le système de la séparation des pouvoirs font que la plus grande diversité règne sur la planète.

 

Trois domaines de procédure fondamentaux commandent le déroulement d’un procès : la question de la compétence, celle de la séparation des pouvoirs et la détermination de l’intérêt pour agir.

 

à chaque fois et dans chaque système spécifique, les juges ont toujours cherché à faire preuve de la plus grande bienveillance.

 

Il sera probablement très rare qu’un juge, saisi par une association de particuliers sur la question climatique, décline sa compétence car, d’une façon ou d’une autre, les effets du changement climatique se feront sentir, certainement, à terme, sur son territoire (soit relèvement du niveau de la mer, soit perturbation dans la biodiversité, soit atteinte aux générations futures vivant dans le ressort de la compétence du juge).

 

La chose est beaucoup plus facile lorsque le recours vise à mettre en cause la carence de la puissance publique : en général, c’est la juridiction administrative qui est compétente. S’il s’agit d’engager une responsabilité dans la production d’éléments contribuant à l’augmentation des gaz à effet de serre, la question n’est pas plus délicate, car la jurisprudence universelle sur le sujet reconnaît comme compétente la juridiction dans le ressort de laquelle se trouve soit la victime, soit l’auteur du dommage.

 

La seconde question qui est celle de la séparation des pouvoirs est traditionnellement liée à l’existence de juridictions concurrentes, ce qui ne pose aucun problème dès lors que le recours est dirigé comme il doit l’être en fonction de la question de fond posée (droit public ou droit privé).

 

En revanche, ce qui sort de l’ordinaire, c’est que, dans certaines affaires, comme l’une des plus célèbres, l’affaire Leghari (4), rendue au Pakistan en septembre 2015, le juge saisi par un certain nombre d’agriculteurs menacés par la montée des eaux a décidé de faire œuvre de législation et de nommer une commission pour élaborer des textes et forcer le Parlement à agir.

 

La question de l’intérêt pour agir peut être dépassée facilement par la création d’une association dont l’objet social est adéquat.

 

Le système anglo-saxon en vigueur, et en particulier aux États-Unis, permet de constituer un véritable trust souvent d’enfants (par exemple Our Children Trust) et donc de mettre en place une action pour les générations futures. Si c’est un droit moral qui est invoqué, l’intérêt pour agir ne fait pas grande difficulté.

 

Dès lors que l’on veut initier un contentieux en responsabilité, les difficultés ne peuvent que s’accumuler tant du côté de la désignation du responsable que, et surtout, du côté de la qualité de victime.

 

Tel est le cas, par exemple, du litige intenté par un agriculteur péruvien qui se plaint du danger qu’il risque de subir du fait de la fonte d’un glacier qui menace son village, et dont il attribue la responsabilité à la société allemande RWE, en ce qu’elle contribuerait, selon les experts, pour 0,47 % au réchauffement climatique global.

 

Les questions de la preuve et de l’expertise sont évidemment cruciales dans ce domaine particulier. C’est pourquoi le sujet a été traité dans un autre article (voir « L’expertise dans le contentieux climatique » par Chancia Plaine, Journal Spécial des Sociétés n° 45 du 23 juin 2018). 

 

Finalement, grâce à un certain libéralisme dont ont déjà pu faire preuve les juges par rapport aux règles classiques de procédure, on constate que ceux-ci facilitent les choses pour que s’élabore effectivement une véritable doctrine juridique qui touche aux règles de fond.

 

 

A QUEL DROIT SE RÉFÉRER ET QUEL DROIT APPLIQUER ?

 

On voit toute la difficulté du sujet : comment reconnaître un droit nouveau, impératif et universel.

 

Dans la plupart des cas, il ne s’agit pas de se référer aux règles classiques de la responsabilité civile mais d’imposer à un État ou à une collectivité publique l’obligation d’agir dans un sens déterminé.

 

La consultation des décisions de justice montre que la doctrine des droits de l’homme à l’environnement est fréquemment invoquée.

 

La vérité est que dans la plupart des États du monde entier, le droit constitutionnel a fait un bond en avant considérable depuis les années 90. Selon une étude publiée par le professeur Delzangles (5), cent quarante-cinq États bénéficieraient d’un droit constitutionnel à l’environnement qui peut s’assimiler à un droit objectif ou quelques fois, même, à un droit subjectif (droit à un environnement sain).

 

La palme revient au droit constitutionnel de l’environnement.

 

Les objectifs et principes de la Charte de l’environnement de 2004, tels la prise en compte des besoins des générations futures et des autres peuples ou le principe de précaution, pourraient, en effet, permettre de dépasser les enjeux locaux et immédiats ou quasi immédiats du contentieux en intégrant à l’appréciation des juges la prise en compte des conséquences globales et à venir des décisions, actions ou inactions qui leur sont soumises.

 

Deux exemples contentieux illustrent ce recours du juge au droit constitutionnel.

 

Tout récemment, dans une affaire historique Friends of the Irish Environnement CLG v. Fingal County Council (6) jugée par la Haute Cour d’Irlande en date du 21 novembre 2017, le juge a reconnu un droit constitutionnel personnel à un environnement (« a personal constitutional right to an environnement »), mais il a rejeté l’affaire sur le fond.

 

Dans une autre affaire plus intéressante, le tribunal administratif fédéral d’Autriche a interdit en février 2017 la construction d’une troisième piste d’un aéroport ainsi que la délocalisation de la route nationale B10, pour violation de l’article 144 de la loi constitutionnelle fédérale sur l’environnement parce que cela augmenterait les émissions de gaz à effet de serre en retenant la nécessité de la protection du climat (7).

 

Le tribunal a décidé que la réalisation d’une nouvelle troisième piste de l’aéroport international de Vienne devait être arrêtée au motif que les avantages économiques positifs de l’expansion de l’aéroport étaient annulés par le préjudice potentiel pour l’intérêt public causé par la hausse des émissions de carbone. Mais, en juin 2017, la Cour constitutionnelle autrichienne a annulé ce jugement (8).

 

Comme on le voit, le juge national tente d’opérer dans le contentieux climatique une véritable révolution pour passer du local au global, et surtout faire prévaloir ce qui peut s’assimiler à la reconnaissance d’un véritable droit de l’humanité destiné à en assurer la survie, malgré ses contradictions, dans des conditions de dignité acceptables.

 

à cet égard, le recours à des principes constitutionnels pourrait permettre d’éviter que notre quotidien l’emporte sur celui des générations plus jeunes et à venir.

 

 

1) Christian Huglo, Le contentieux climatique : une révolution judiciaire mondiale, Éditions Bruylant, avril 2018, 392 p.

2) J. Jouzel et al., Crime climatique stop ! L’appel de la Société civile, Paris, Seuil, p. 53.

3) R. Heede, Carbon Majors : Accounting for carbon and methane emissions 1854-2010. Methods and Results Report, Snowmass, Climate Mitigation Services, 2013.

4) Hte C. Lahore, 4 septembre 2015, Ashgar Leghari v. Federation of Pakistan, § 7, p. 6, et § 4, p. 4, aff. W.P. 25501/2015.

5) C. Lepage, Déclaration universelle des droits de l’humanité, Rapport à l’attention de Monsieur le Président de la République remis le 25 septembre 2015, « Annexe 1 : Lettre de mission confiée par Monsieur le Président de la République ».

6) High court of Ireland, November 21st 2017, Friends of the Irish Environment CLG v. Fingal County Council, no 344 JR.

7) Bunderverwaltungsgericht, 2 février 2017, Vienna-Schwechat airport, W109 2000179-1/291.

8) Verfassungsgerichtshof Österreich, Vienna-Schwechat Airport, Juge 29th 2017.

Christian Huglo,

Avocat à la cour, Docteur en droit,

Directeur général SAS Huglo Lepage Avocats,

Codirecteur du Jurisclasseur Environnement

 

Raphaëlle Jeannel,

Avocate à la cour,

Huglo Lepage Avocats

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Une action collective contre Linky au tribunal de Bordeaux

Une action collective contre Linky au tribunal de Bordeaux | Think outside the Box | Scoop.it

Elles refusent « linkysition » : près de 200 personnes vont saisir en référé le Tribunal de Grande instance de Bordeaux pour demander le retrait ou la suspension de la pose des compteurs électriques Linky à leurs domiciles. Cette action collective est en fait menée auprès de 20 tribunaux de France et fédère pour l’instant 4446 inscrits sur la plateforme Mysmartcab.fr (moyennant 48 euros).

 

Le fondateur de ce site, Maître Christophe Lèguevaques, est l’un des trois avocats parisiens à l’origine de cette initiative, avec l’ancienne ministre de l’environnement Corinne Lepage et Me Arnaud Durand. L’avocat et conseilleur municipal écologiste Pierre Hurmic qui défendra les requérants devant le TGI bordelais, au nom de la liberté de choisir, du droit au respect de la santé et de la protection de la vie privée.

Compteurs sans consentement

Motifs  : « le déploiement de compteurs communiquant notamment par courant porteur en ligne (CPL) augmente les expositions chroniques aux champs électromagnétiques », alors que la loi du 9 février 2015 vise à réduire celles-ci. Et « le fournisseur ou distributeur d’électricité impose l’installation des compteurs dits « Linky » sans le consentement des personnes, voire dans certains cas en cas de violation d’un refus dument notifié ».

Les inscriptions à Mysmartcab sont ouvertes jusqu’au 6 mai pour les habitants des départements de Gironde, Dordogne et Lot-et-Garonne, dépendants du TGI de Bordeaux. Les opposants à Linky ne devrait pas s’en laisser conter,  indique Pierre Hurmic  :

« La mobilisation hostile ne s’étiole pas au fur et à mesure des poses, au contraire elle grandit. 1/3 des abonnés girondins sont déjà équipés des nouveaux compteurs (280 000 abonnés sur 946 000). Des Collectifs Stop Linky ont vu le jour un peu partout, notamment sur Bordeaux Métropole, Andernos, Libourne, La Teste…  10 communes refusent cette pose  (500 en France) et 14 ont affiché un soutien aux opposants, notamment Talence, Pessac, Bègles, et Libourne. »

A Bordeaux, poursuit l’élu, les conseillers municipaux écologistes « sollicitent du Maire l’organisation de réunions d’information dans chaque quartier » et n’ont pas obtenu d’Alain Juppé le vote d’une motion demandant à Enedis de respecter le libre choix de chaque Bordelais.

 

Une manifestation nationale Stop Linky aura lieu Samedi 5 Mai à 15h Place de la Victoire

 

Simon Barthélémy publié le 26/04/2018

 

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Loi secret des affaires : des conséquences extrêmement graves pour l'environnement

On fait rentrer aujourd'hui dans le secret ce qui n'en est pas : la manière dont vous polluez l'environnement, ça ne doit pas être un secret, ça concerne tout le monde" Corinne Lepage, avocate, ancienne ministre de l'environnement et eurodéputée

Le vote au Sénat a lieu le 18 avril !

Aidez-nous à faire pression en signant notre pétition: https://info.pollinis.org/fr/stopsecr...

 

La loi #secretdesaffaires: des conséquences extrêmement graves pour l'#environnement. @Corinnelepage met en garde contre cette remise en cause du droit des citoyens à l'#information.

 

Signez la pétition #StopSecretdAffaires: http://www.stopsecretdaffaires.org 

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Et si la France inventait la démocratie de demain ?

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Podcast :

https://www.franceculture.fr/player/export-reecouter?content=454311cd-b8b5-49bd-a7cb-3486bcf93692

 

 

Émission en partenariat avec le service Planète-Sciences du Monde

Avant son entrée au gouvernement, Nicolas Hulot appelait de ses vœux la mise en place d’une “chambre du futur” ; Emmanuel Macron a fait sienne cette idée novatrice, portée par d’autres citoyens, n’hésitant pas à annoncer, le 3 juillet 2017 à Versailles, la transformation à venir du CESE (le Conseil économique, social et environnemental) en “Chambre du futur”.

 

Face à la « myopie des démocraties », métaphore de Pierre Rosanvallon pour parler de l’incapacité structurelle des démocraties à intégrer le long terme dans les prises de décisions, nos institutions et notre droit semblent pris de court face aux enjeux environnementaux qui nécessitent, justement, de penser le long terme et d’intégrer dans les réflexions politiques d’aujourd’hui le devenir des générations futures…

 

Cette Assemblée citoyenne du futur serait-elle donc en passe d’être créée, aux côtés de l’Assemblée nationale et du Sénat ?

Quelles évolutions constitutionnelles et institutionnelles pourraient voir le jour ? Quels verrous faudra-t-il lever pour y parvenir ? La démocratie du XXIème siècle aura-t-elle pour berceau la France ?

Autant de questions que nous allons aborder avec nos invités, Floran Augagneur, conseiller scientifique de la Fondation Nicolas Hulot, co-auteur du livre « Inventer la démocratie du XXIe siècle », paru aux éditions Les liens qui libèrent et Corinne Lepage, avocate spécialiste des questions environnementales, ancienne ministre de l’environnement et ancienne eurodéputée, présidente de Cap 21, auteure des livres « Mains propres : plaidoyer pour la société civile au pouvoir », et « À bout de confiance. De la morale en politique », parus chez Autrement.

 

Déclarations de Corinne Lepage

Défendre le long terme contre le court terme veut dire faire des choix qui seront coûteux aujourd’hui et qui ne rapporteront que demain, c’est très difficile en politique.      

L'Assemblée nationale n’est pas très forte politiquement, et le pouvoir est en fait concentré dans un très petit nombre d’hommes autour du président de la république dont le souci de la société civile n’est pas le souci principale.

Déclarations de Floran Augagneur

L’idée est de créer une troisième chambre parlementaire qui soit le contrepoids des deux chambres existantes, pour imposer et garantir la prise en compte du temps long dans le processus législatif.    

La question métaphysique du siècle : pourquoi est-ce qu’on sait, mais qu’ on n’agit pas ? Il faut recréer le chaînon manquant entre le savoir et l’action, un pouvoir qui permette d’imposer ce savoir dans l’action politique.    

Le fait que cette chambre ait du pouvoir est la condition de son succès.

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En poursuivant dans la voie du nucléaire, la France fonce droit vers une triple impasse

En poursuivant dans la voie du nucléaire, la France fonce droit vers une triple impasse | Think outside the Box | Scoop.it

En poursuivant dans la voie du nucléaire, la France fonce droit vers une triple impasse.

 

La poursuite du maintien d'une nucléarisation massive du pays se heurte à une triple impasse économique, technique et surtout financière.

 

Le sujet du nucléaire en France est relativement peu abordé au niveau politique et en tout cas traité comme un sous-sujet de la question énergétique, ce qui évite bien évidemment que nos concitoyens puissent prendre pleinement conscience du caractère totalement central du sujet tant pour l'économie que pour l'industrie et pour les finances de la France. Faisant comme si la situation de 2017 était en tout point comparable à celle de 1973 ou 1981, comme si le nucléaire était une énergie d'avenir rentable, assurant l'indépendance énergétique et correspondant à un savoir-faire d'excellence français, nos dirigeants ont décidé d'opter pour le déni de réalité, même si les coûts croissants de la filière nucléaire et son impact majeur sur les finances publiques ne peuvent plus être dissimulés. Son addiction au nucléaire conduit indubitablement EDF tout d'abord dans une impasse économique et industrielle.

 

L'impasse économique et industrielle

La physionomie du monde de l'énergie est en plein bouleversement. D'une part, toutes les perspectives d'une croissance infinie des besoins en électricité sont mises en échec, au moins dans les pays industrialisés. Depuis 1970, on assiste en réalité à un découplage entre la croissance du PIB et celle de la consommation électrique due à une amélioration de l'efficacité énergétique. Celle-ci s'est considérablement accrue au cours des 10 dernières années. L'augmentation de la part des services qui consomment globalement six fois moins que l'industrie explique également cette situation qui en France s'est doublée d'une désindustrialisation très importante. Or, EDF n'a en rien anticipé cette situation et ce d'autant plus qu'elle a volontairement construit huit réacteurs nucléaires de plus que ce que justifiaient les besoins français estimés en 1975. Les gaziers ont agi de même, de telle sorte que la surproduction a fait baisser les prix de gros de l'électricité au moment même où les énergies renouvelables devenaient dans un certain nombre de pays d'Europe tout à fait compétitives.

 

D'autre part, la baisse imprévue et colossale des coûts de production de l'électricité renouvelable et en particulier du photovoltaïque (une baisse de 70% des coûts en cinq ans à laquelle devrait s'ajouter une nouvelle baisse de même niveau dans les trois à cinq ans à venir) rend ces énergies compétitives. Les derniers appels d'offres ont été passés au prix de 62 euros le mégawattheure soit six centimes le kilowattheure, c'est-à-dire la moitié du kilowattheure facturé par l'EPR (s'il est un jour mis en route). Il est à 5,38 centimes d'euros en Allemagne, au Danemark, l'éolien offshore atteint des niveaux comparables. Au Texas, dans les pays du golfe, au Maroc, les immenses centrales solaires qui se construisent produisent une électricité en moins de quatre centimes du kilowattheure. Le nucléaire n'a donc plus aucune rentabilité et cette situation n'est évidemment pas propre à la France. Ainsi, aux États-Unis, la construction de deux réacteurs qui étaient en cours en Caroline-du-Sud a été abandonnée, alors que 40% des infrastructures étaient réalisées, au motif que le projet n'était pas rentable.

 

Le coût de construction d'une centrale nucléaire est 10 fois celui d'une centrale gazière moderne et la moitié des centrales nucléaires américaines perd de l'argent. Dans la mesure où elles ne sont pas renflouées par l'État comme en France, les entreprises les ferment et s'enfoncent dans le rouge. Ainsi, Westinghouse a déposé le bilan et entraîné dans sa chute Toshiba qui cherche à se débarrasser de cette filiale qui la plombe. La plupart des pays d'Europe (mis à part l'Europe de l'Est pour des raisons historiques et la Grande-Bretagne mais l'avenir est incertain) ont abandonné le nucléaire : Allemagne, Belgique, Italie, Suisse, Suède. La Corée du Sud, par la bouche de son nouveau président, Monsieur Moon a annoncé au mois de juin son retrait progressif du nucléaire. Aucun pays à économie libérale ne peut aujourd'hui opter pour le nucléaire compte tenu de la nécessité absolue de faire subventionner par l'Etat une filière qui n'est pas rentable et qui devient la plus coûteuse de toutes les énergies.

 

Un récent rapport publié en août 2017 par des chercheurs de Stanford affirme que 139 pays du monde pourraient à l'horizon 2050 ne dépendre que de l'énergie renouvelable créant ainsi 24 millions d'emplois. Dès 2030, 80% de l'énergie pourrait être renouvelable. Au passage, ces bouleversements permettraient de réduire massivement la pollution atmosphérique et donc d'améliorer la santé humaine mais aussi de ne pas dépasser les 2° d'augmentation de la température voire peut-être de parvenir à 1°5.

Inutile de souligner que la France est bien loin de cette logique. Même si un objectif de 50% de nucléaire à l'horizon 2025 est affirmé, notre faiblesse volontaire dans la production d'énergie renouvelable (16 à 17%) rend très difficile cet objectif, les 23% auxquels nous nous sommes obligés dans le cadre communautaire apparaissant comme hors d'atteinte. Il suffit d'entendre les cris d'orfraie de tous ceux qui n'ont pas compris que le monde a changé lorsqu'il est question de respecter la loi transition énergétique pour apprécier les progrès qui restent à faire en particulier dans les consciences. Le drame est que non seulement notre choix économique est catastrophique dans la mesure où le maintien d'un nucléaire massif va peser très lourdement sur le coût de l'électricité et donc sur la productivité économique et sur les ménages.

Il est également catastrophique car il nous a privé durablement du développement d'une filière forte dans les énergies renouvelables et l'efficacité énergétique alors que nous disposions de toutes les technologies utiles grâce au CEA et à l'Inès. Mais, l'industrie nucléaire a toujours bloqué le développement industriel de ces technologies afin de protéger son fleuron devenu obsolète. Dès lors, même si EDF énergies renouvelables est une filiale prometteuse d'EDF, elle ne représente qu'un pour cent de son chiffre d'affaires et nous ne disposons pas d'ETI puissantes. Heureusement, Engie semble faire sa révolution et opter pour le Nouveau Monde. C'est une chance pour l'économie française. Mais cela signifie que la compétition avec l'opérateur historique risque de plomber encore un peu plus ce dernier et le pousser à mener les combats d'arrière-garde contre l'autoconsommation, l'énergie locale, la décentralisation énergétique, l'installation des éoliennes, etc.

En réalité, la poursuite de ce qui est devenu une forme d'utopie, à savoir le maintien d'une nucléarisation massive de la France se heurte à une triple impasse économique, technique et surtout financière.

 

Corinne Lepage

Avocate, Ancienne députée européenne Cap21, ancienne ministre de l'Environnement

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Assistants parlementaires : le MoDem dans le viseur des enquêteurs

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Un ex-employé du parti de François Bayrou affirme avoir été en partie rémunéré sur les crédits alloués aux collaborateurs d'eurodéputés.

 

C'est un nouveau rebondissement dans l'affaire des assistants parlementaires européens. Le 30 mai dernier, Le Parisien révélait que dix-neuf eurodéputés étaient visés depuis deux mois par une enquête préliminaire ouverte au parquet de Paris  pour « abus de confiance ». Cette enquête avait été ouverte après une dénonciation de la députée européenne Sophie Montel, dont le parti, le Front national, cherche à détourner l'attention des investigations qui l'accablent…

« Il s'agit clairement d'un contre-feu ouvert par le FN », confie une source proche du dossier. Les enquêteurs de l'Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF) exploitent cependant toutes les pistes et cherchent à savoir si de petites mains de partis politiques français ont bel et bien été rémunérées, entièrement ou partiellement, par des fonds européens. Selon nos informations, un signalement a été fait, mercredi 7 juin, au parquet de Paris, pour apporter des éléments concernant le MoDem, le parti de François Bayrou et de Marielle de Sarnez.

 

Deux fiches de paie

Ce témoignage, le premier à être livré à la justice, provient d'un ancien salarié du MoDem, qui travaillait dans les années 2010 au siège parisien, 133, rue de l'Université, et figurait dans l'organigramme du parti. Il affirme avoir été rémunéré en partie par des fonds européens alors qu'il avait été recruté en CDI pour des fonctions internes au mouvement. Pendant un an, ce permanent aurait ainsi été rémunéré partiellement sur l'enveloppe d'assistants parlementaires locaux de l'ancien eurodéputé du Sud-Est Jean-Luc Bennahmias. Problème : l'auteur du signalement a assuré à la justice n'avoir « jamais » travaillé pour lui « en particulier ».

Deux fiches de paie, l'une portant l'en-tête « UDF » (l'ancien nom du MoDem), l'autre celui d'une association de financement (en l'occurrence, Association pour une Europe citoyenne*, présidée par Jean-Luc Bennahmias), lui étaient adressées chaque fin de mois. Selon des documents que nous avons pu consulter, la part de ses revenus issus de Bruxelles, via cette fameuse association, a progressivement augmenté, jusqu'à atteindre les trois quarts de son salaire pendant sept mois.

Techniquement, le procédé était le suivant : après lui avoir fait signer un contrat de permanent à temps plein, la direction du MoDem lui aurait fait parapher dans la foulée un « avenant de détachement ». Cet avenant modifiait la nature du premier contrat dans le but « d'exercer des fonctions de collaborateur auprès de M. Bennahmias » à temps partiel. Le volume horaire n'y était pas précisé. Au moins une autre salariée, contactée par Le Point.fr, aurait été embauchée de la même manière.

 

Plusieurs collaborateurs seraient concernés

L'ex-vice-président du MoDem Jean-Luc Bennahmias ne dément pas, mais ne se souvient pas exactement du quota horaire effectué par son collaborateur. « Comment distinguer la fonction européenne de celle du MoDem, alors que nous étions tous des spécialistes de l'Europe ? se défend le président du Front démocrate. Je ne vois pas de collaborateur rue de l'Université qui n'ait pas travaillé à un moment ou à un autre pour l'Europe. » Jean-Luc Bennahmias n'est pas le seul concerné. Plusieurs eurodéputés centristes et collaborateurs nous ont confirmé, sous le couvert de l'anonymat, l'existence d'un tel système. Certains nous ont même dit se tenir à la disposition de la justice.

 

« Le MoDem demandait aux députés européens de mettre à disposition du parti un de leurs assistants parlementaires », dénonce aujourd'hui l'ex-eurodéputée Corinne Lepage. Dans un livre publié en janvier 2015, et intitulé « Les mains propres », l'ex-ministre concluait : « C'est ainsi que des assistants parlementaires servent en réalité le parti politique, et non le parlementaire... » Des affirmations que François Bayrou et Marielle de Sarnez ont toujours réfutées, bien qu'ils n'aient pas porté plainte à l'époque.

 

Corinne Lepage, qui a soutenu Emmanuel Macron pendant la campagne, va désormais plus loin : « C'était écrit noir sur blanc sur un document de 2009 que les élus devaient signer. J'ai bien sûr refusé. » Un document qui, s'il existe, intéresse fortement les enquêteurs…

 

* L'Association pour une Europe citoyenne est une association enregistrée à la préfecture des Bouches-du-Rhône et qui vise, selon ses statuts, à « gérer tous les moyens humains, matériels et financiers mis à disposition par le Parlement européen ». Les salaires des assistants parlementaires locaux, non accrédités au Parlement européen, transitent en général par un « tiers payant », qui peut être une personne physique ou une association.

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Comment expliquer qu'en 2017, EDF ne soit toujours pas capable de justifier les coupures d'électricité?

Comment expliquer qu'en 2017, EDF ne soit toujours pas capable de justifier les coupures d'électricité? | Think outside the Box | Scoop.it

Depuis quelques heures, EDF a communiqué abondamment sur les risques de pénurie d'électricité en raison du froid et des pointes de consommation que celui-ci risquait de générer.

 

Depuis quelques heures, EDF a communiqué abondamment sur les risques de pénurie d'électricité en raison du froid et des pointes de consommation que celui-ci risquait de générer. Comment expliquer que dans un pays théoriquement en surcapacité -puisque nous disposons environ de huit réacteurs de plus que ce dont nous avons besoin- nous en soyons arrivés à une telle situation?

 

Elle résulte d'une double conjonction. D'une part, une addiction au chauffage électrique, en particulier dans les logements sociaux, conduite à la demande de l'État et surtout d'EDF pour écouler l'électricité produite par les centrales nucléaires, et ce de manière constante. Rappelons que lorsqu'il y a une pointe de consommation électrique en Europe l'hiver, la moitié de la pointe est due à la France qui est une exception en Europe au très mauvais sens du terme. Cette addiction au chauffage électrique, constamment encouragée par le législateur, pour les mêmes raisons, a des conséquences sociales extrêmement lourdes puisqu'elle renforce la précarité énergétique et les charges des locataires. S'ajoute à cela un retard massif de la France en matière d'efficacité énergétique, sans même parler de sobriété énergétique. En effet, jusqu'à ces toutes récentes années, la France a refusé énergiquement de mettre en place une politique de maîtrise de l'énergie ce qui explique qu'un ménage français consomme aujourd'hui 35 % de plus d'électricité qu'un ménage allemand équivalent. Cette politique est bien entendue tout à fait volontaire c'est-à-dire destinée à permettre la consommation d'une électricité permanente qu'il était impossible de stocker. La mise en place au demeurant très discutable, car faite dans l'intérêt unique d'EDF et non des consommateurs, des compteurs Linky et les premières campagnes en faveur de la sobriété énergétique arrivent très tard.

 

Le second facteur explicatif est l'indisponibilité d'un nombre relativement important de réacteurs nucléaires à la suite de leur mise à l'arrêt à la demande de l'autorité de sûreté nucléaire. Les contrôles qui ont été exigés à juste titre trouvent leur source dans les malversations constatées au sein de l'entreprise Areva au Creusot à la suite des anomalies découvertes sur la cuve et le couvercle de l'EPR de Flamanville. En effet, les anomalies détectées ont conduit à craindre que des générateurs de vapeur voire des cuves de 21 réacteurs puissent comporter des défauts. On doit donc être reconnaissant à l'ASN d'avoir exercé ses pouvoirs et exiger de l'exploitant, particulièrement réticent, une mise à l'arrêt pour contrôle. Si les autorisations de redémarrage, avec des conditions dont il n'est pas certain qu'elles aient été respectées par l'exploitant, ont été données par l'ASN pour certains réacteurs -avec au passage un certain nombre d'adaptation concernant les règles– il n'en demeure pas moins que nombre de réacteurs restent encore aujourd'hui à l'arrêt.

 

Dans ces conditions, il n'est pas surprenant que nous manquions d'électricité, d'autant plus que le manque de rentabilité des centrales au gaz a conduit à en fermer certaines réduisant d'autant les capacités de production électrique autre que nucléaire. En effet, notre extrême faiblesse dans le développement des énergies renouvelables (la biomasse et même le solaire qui peuvent être utilisés en période de froid) et l'absence de rentabilité d'un certain nombre de centrales à gaz rendent notre approche monomaniaque de l'énergie catastrophique. Reste bien évidemment l'approvisionnement sur le marché européen qui lui-même est très sollicité et bien évidemment coûteux, ce qui gêne EDF en des périodes de vaches très maigres.

 

Ainsi, la situation actuelle est totalement imputable à notre champion national qui, dans sa croisade permanente en faveur du nucléaire, qui a engendré une dépendance volontaire du chauffage à l'électricité, a cherché à détruire toutes les sources alternatives de production électrique depuis 20 ans, ce qui a été évidemment encouragé par des politiques dotés d'une clairvoyance redoutable.

Au-delà, la communication faite sur les risques de pénurie, voire de black-out, n'a pas seulement l'objectif de prévenir les Français d'une menace de manque d'électricité. Elle vise également à faire pression sur l'autorité de sûreté nucléaire pour que les autorisations de redémarrage soient données le plus rapidement possible et, de manière plus insidieuse, à essayer de faire porter sur l'autorité de contrôle la responsabilité d'une insuffisance des moyens de production. Or, s'il est un responsable de cette insuffisance c'est évidemment l'exploitant qui, malgré des procédés de contrôle interne, n'a jamais été capable lors des décennies passées de déceler les malfaçons dont ses réacteurs pouvaient être affectés. Autrement dit, derrière la communication sur la situation de tension sur le réseau se cache la partie de bras de fer qu'EDF a engagé contre l'autorité de sûreté nucléaire pour forcer cette dernière à donner des autorisations qui ne doivent pas l'être, dès lors que la sûreté et la sécurité ne sont pas complètement assurées.

 

Corinne LepageAvocate, Ancienne députée européenne Cap21, ancienne ministre de l'Environnement

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Goodbye Britain, le Brexit est une chance pour l'Europe

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La Grande-Bretagne a toujours eu un pied dedans et un pied dehors au niveau européen. Ardent défenseur d'une Europe des guichets -chacun se souvient Margaret Thatcher et de son "I want my money back"- la Grande-Bretagne s'est toujours opposée à une Europe politique et s'est toujours posée en œil de Washington au sein des institutions européennes. Son départ peut donc ouvrir de nouvelles perspectives.

Mais, celles-ci sont totalement irréalistes si l'Europe n'est pas extrêmement ferme avec la Grande-Bretagne, si les institutions européennes continuent à fonctionner comme elles le font, et si un "Cœur d'Europe" ne se met pas en place.

 

La fermeté de l'Union européenne à l'égard de la Grande-Bretagne doit être extrême. Non seulement il ne peut être question que la Grande-Bretagne préside l'union au 1er janvier, mais encore son commissaire et ses députés doivent être déclarés démissionnaires d'office. Ils n'ont aucun droit à décider de quoi que ce soit concernant l'Union européenne à laquelle ils n'appartiennent plus.

Les fonctionnaires britanniques devront quitter leur poste dans les meilleurs délais et doivent immédiatement être privés de tout pouvoir de décision. Les conséquences financières doivent être tirés dans les meilleurs délais et en particulier le privilège dont jouit la City doit être supprimé. Le séisme économique et financier qui résulte du Brexit pour la Grande-Bretagne doit se réaliser, si c'est le cas, sans aucun amortissement de la part de l'union européenne. En effet, un des principaux arguments des défenseurs du BREXIT était l'avantage économique pour la Grande-Bretagne d'une sortie de l'Union. Il est indispensable que chacun puisse mesurer les conséquences de ses actes.

 

En second lieu, il serait aberrant de considérer que le tremblement de terre qui vient de se produire ne concerne que la Grande-Bretagne. Le comportement antidémocratique de la commission, sa soumission aux lobbys, son refus constant d'écouter les citoyens européens pour prendre les décisions radicalement contraires à ce qu'ils demandent, s'est payé dans les urnes. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, une très grande partie de l'opinion publique européenne devient eurosceptique voire europhobe en raison du comportement des dirigeants européens. Le TAFTA et le CETA sont rejetés par les Européens de manière massive. La réaction de la Commission a été de cacher la réalité du contenu des négociations, heureusement dévoilé par Greenpeace. Et, la situation est encore pire que celle que l'on pouvait imaginer.

 

Le poids des lobbys financiers, pharmaceutiques, chimiques, agro-semenciers, pétroliers, automobiles a conduit depuis des mois à des décisions radicalement opposées aux intérêts sanitaires, environnementaux et économiques des Européens. La politique d'austérité, sur laquelle même le FMI revient aujourd'hui, a été imposée en potion amère, au nom d'un ultralibéralisme auquel la Grande-Bretagne n'est évidemment pas étrangère. Le changement de politique doit être immédiat et drastique, avec une reconnaissance des erreurs commises, et de nouvelles décisions fortes et symboliques très rapides. Il est indispensable que tous les peuples européens comprennent qu'à travers le vote britannique, c'est leur protestation qui a bien été entendue.

 

Enfin, il nous faut un projet européen simple à comprendre. Revenons aux fondamentaux. L'Union européenne a été constituée pour garantir la paix et la sécurité en Europe. A l'heure du terrorisme et des menaces géopolitiques d'une part, de la mondialisation d'autre part, ce double impératif conduit à rendre le projet européen indispensable pour tous les Européens... à la condition qu'il s'agisse effectivement d'un impératif. Or, la sécurité est globale car elle va de l'intégrité physique au sens le plus classique du terme à la sécurité climatique, économique ou sanitaire. Cela conduit donc à une Europe politique aujourd'hui impossible à 27.

 

C'est la raison pour laquelle les propositions que j'avais faites en 2014 autour de la notion de cœur d'Europe prennent tout leur intérêt. Admettons une Europe à plusieurs vitesses, en réalité à trois vitesses. Cœur d'Europe se construit à partir des six pays fondateurs et de ceux qui souhaitent une construire une Europe politique intégrée. Le second cercle est celui de l'euro qui doit se doter d'institutions démocratiques et travailler sur une Europe intégrée sur le plan économique. Enfin le troisième cercle est celui du grand marché européen. Cette Europe à plusieurs vitesses doit dans tous les cas de figure sortir d'une logique de guichet, être ferme sur ses valeurs ce qui n'est pas le cas aujourd'hui et répondre aux grands défis que sont l'immigration, le changement climatique accéléré, l'atonie économique, le retard digital sur les États-Unis...

 

Tout ceci passe par la remise en cause indispensable par les dirigeants européens d'eux-mêmes et de leur comportement. Ils sont aujourd'hui devant l'Histoire, responsables du succès ou de l'échec du plus beau projet politique que le monde ait connu depuis la fin de la deuxième guerre mondiale.

 

Corinne Lepage Devenez fan

Avocate, Ancienne députée européenne Cap21, ancienne ministre de l'Environnement

 

 

Adèle Aubry's curator insight, November 27, 2016 2:20 PM

Since the European Union's (EU) birth, the United Kingdom has been opposed to a political union. Therefore, Brexit allows us to think about new perspectives on the European's institutions. 
For the former MEP (Member of the European Parliament) who wrote the article (Corinne Lepage), these perspectives cannot be achieved if the EU is not very strict with the UK. To her, on the first of January all the British must be dismiss of their functions in the institutions. Furthermore, if there is a crisis, no financial help should be given to the UK. 
Finally, she relates the Brexit's votes to a general negative feeling about the Union in Europe. To her, this fear of Europe is due to several factors: the European Commission's performance, the lobbies' influence and the lack of a clear project. 


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Scandale sanitaire

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Liberté d’expression et liberté d’information : le fondement même de la République

 
 
 
 

Certes, le ministère de l’éducation nationale n’a pas lésiné sur la communication autour de ce drame pour rappeler aux enfants – et c’est ô combien nécessaire- que la liberté d’expression qui intègre le droit au blasphème de manière générale et non pas de manière particulière c’est-à-dire dirigée contre une seule croyance religieuse, est un bien précieux. On peut s’en réjouir mais ce n’est pas pour autant que la liberté d’expression sans qu’elle encourt des risques y compris physiques contre ceux qui l’exercent est respectée dans notre pays. Commençons par les enseignants qui considèrent qu’en réalité rien n’a changé dans la protection qui leur est assurée notamment lorsqu’ils abordent les sujets sensibles que sont la liberté d’expression ou la Shoah. ; Que des parents d’élèves parfois soutenus par des islamistes notoires comme dans l’affaire Paty pourraient continuer à être confrontés à des professeurs auxquels le « pas de vague » continuerait à s’appliquer, même si le ministre de l’éducation nationale revendique le fait de ne plus accepter le « pas de vague ». Continuons avec des affaires symboliques comme celle de Mila et dans une moindre mesure comme celle de lycéens de Nantes, coupables d’avoir mimé une manifestation religieuse dans une vidéo qui devait rester interne et qui font aujourd’hui l’objet de menaces sur les réseaux sociaux. Et dans le même temps, c’est open bar pour les révisionnistes, les négationnistes, les pétainistes qui peuvent déverser un flot de mensonges et d’ignominie sans qu’il ne se passe rien... la liberté d’expression se réduit-elle à cela ?

 
 
 

Cette liberté d’expression est au fondement de la République et de la démocratie. Pour autant, peut-elle être conçue sans aucun lien avec la vérité historique et la réalité ? Poser cette question conduit immédiatement à poser celle de la liberté d’information. Or, le moins qu’on puisse dire est que de multiples coups de canif dans le contrat ont pour le moins été portés au cours des années récentes. Sous prétexte de contrôle des fake news, une forme de contrôle étatique a été mis en place qui exclut tout débat sur des sujets controversés. Il y a une vérité étatique, en réalité gouvernementale, et tout le reste n’est que fake news, complotisme, expression d’esprits malades. Or, les arguments doivent être confrontés aux arguments, les faits aux faits pour permettre un débat démocratique et un choix éclairé. Dans bien des domaines, le gouvernement actuel tourne le dos à cette évidence en tuant le débat dans l’œuf. La prise de pouvoir sur les grandes chaînes d’information liée aux questions financières et à la concentration entre les mains d’amis du pouvoir, de la presse explique pour partie cette technique du bulldozer. Le refus de reconduire la présidente de l’Autorité de la Concurrence coupable de s’être opposée au rapprochement entre M6 et TF1 en est une des multiples illustrations. Ainsi, le débat sur la gestion de la covid et des médicaments possibles - indépendamment de la question des vaccins qui ont montré leur efficacité- a-t-il été écarté. Dans un autre domaine, la propagande grossière et fondée sur des éléments factuels inexacts, en faveur d’une énergie nucléaire qui serait adoptée par toute la planète vise non seulement à satisfaire le lobby nucléaire, très proche du pouvoir, mais encore à éviter le débat sérieux sur la transition climatique qui appelle d’autres solutions purement techniques et purement énergétiques.

 
 
 

Et que dire du silence assourdissant des médias sur cette grande première que constitue la condamnation correctionnelle d’un ministre en exercice dans l’indifférence générale. La lutte contre la délinquance en col blanc n’est visiblement pas une priorité.

 

Ainsi, quel que soit le domaine vers lequel on se tourne, la liberté d’informer et de s’exprimer est mise en cause ce qui réduit d’autant l’espace du débat démocratique et provoque la frustration et la défiance.

 

Corinne Lepage

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Climat : décision "historique", la justice ordonne au gouvernement d'en faire plus

Climat : décision "historique", la justice ordonne au gouvernement d'en faire plus | Think outside the Box | Scoop.it

La France n’en fait pas assez pour respecter ses engagements de lutte contre le changement climatique et doit prendre des mesures supplémentaires dans les neuf mois. La justice a rendu jeudi 1er juillet 2021 une décision « historique » qui devrait alimenter la campagne présidentielle.

Saisi par la commune de Grande-Synthe, le Conseil d’État, plus haute juridiction administrative française, a donné raison à cette ville du Nord qui s’estime menacée par la montée du niveau de la mer, soulignant que les trajectoires actuelles de la France ne lui permettaient pas de respecter ses engagements dans le cadre de l’Accord de Paris.

Il a donc ordonné « au Premier ministre de prendre toutes mesures utiles permettant d’infléchir la courbe des émissions de gaz à effet de serre (…) afin d’assurer sa compatibilité avec les objectifs », soit une baisse de 40 % d’ici 2030 par rapport à 1990.

Le gouvernement a jusqu’au 31 mars, soit en pleine campagne pour la présidentielle, pour revoir sa copie. Et si les juges estiment les mesures toujours insuffisantes, le Conseil pourra prononcer une astreinte financière.

Ce processus assez long n’aboutira pas avant le scrutin présidentiel, mais donnera des arguments aux critiques du bilan d’Emmanuel Macron en la matière.

La décision, inédite en France, intervient juste après que le Haut Conseil pour le Climat (HCC) eut estimé une nouvelle fois dans son rapport annuel que « les efforts actuels sont insuffisants pour garantir l’atteinte des objectifs » de la France. Malgré une baisse des émissions de 1,9 % en 2019 et estimée à 9,2% en 2020, chiffre exceptionnel dû à la mise à l’arrêt de l’économie par la pandémie de Covid-19.

« Pas sérieusement contesté »

La trajectoire sera d’autant plus difficile à respecter que l’Union européenne s’apprête à revoir à la hausse ses objectifs avec des répercussions attendues pour la France, souligne le HCC, organisme indépendant créé par Emmanuel Macron pour évaluer la politique climatique du pays.

Un constat « pas sérieusement contesté » par le gouvernement, écrivent les juges.

Dans un communiqué, Matignon a « pris acte » de la décision et « rappelé sa détermination à renforcer son action climatique ». Notamment en faisant appliquer rapidement la loi climat-résilience en discussion au Parlement « dès lors » qu’elle aura été adoptée, par un « engagement fort » au niveau de l’UE, dont Paris assurera la présidence début 2022, ou encore par la poursuite des aides à la transition, par exemple pour l’achat de véhicules propres.

Il y a dans la décision de jeudi « une forme de reconnaissance des choses qui ont été faites, mais ne sont pas suffisantes et devront être complétées, » estime-t-on à Matignon.

Quant à l’expiration du délai peu avant la présidentielle (pressentie les 10 et 24 avril), la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili n’y voit pas malice. « Que ça fasse partie du débat politique, que tous les acteurs et tous les secteurs s’emparent de ce sujet, c’est extrêmement important », a-t-elle dit à la presse en marge d’un déplacement.

« C’est une journée historique, » a réagi de son côté l’avocate de Grande-Synthe, l’ancienne ministre de l’Écologie Corinne Lepage.

Le jugement « reconnait de manière absolument indubitable que les efforts qui sont faits actuellement sont notoirement insuffisants, » s’est-elle félicitée.

« L’étau se resserre autour de l’État », a commenté de son côté Célia Gautier, porte-parole de l’Affaire du siècle, coalition de quatre ONG qui s’était jointe à l’action de Grande-Synthe et poursuit également l’État pour « inaction climatique » dans une autre procédure. Soutenues par une pétition signée par plus de 2,3 millions de personnes, elles ont obtenu en février une première condamnation de l’État, reconnu responsable de manquements dans la lutte contre le réchauffement.

Les militants écologistes ont déployé une nouvelle stratégie de contentieux juridiques sur le climat ces dernières années, et les premières décisions en la matière tombent depuis quelques mois, au détriment de l’État.

Les justices néerlandaise et allemande ont elles aussi récemment ordonné un relèvement des ambitions climatiques de leur État respectif. Ce qui a été rapidement fait en Allemagne.

Les plaignants français s’inquiètent déjà qu’il n’en soit pas de même. « Nous allons veiller au grain, » promet Me Lepage. Alors que Célia Gautier exhorte le gouvernement à cesser de « choisir le déni (…) et la posture de l’autruche ».

 

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En avant-première : commentaire du projet de loi d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19

En avant-première : commentaire du projet de loi d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 | Think outside the Box | Scoop.it

Le projet de loi intitulé projet de loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 comporte quatre titres et dix-huit articles, qui traitent de très nombreux domaines de notre droit, fortement impactés par la situation actuelle.

 

Le titre est 1 est consacré aux dispositions électorales (I), le titre 2 traite de l’état d’urgence sanitaire (II) et enfin le titre 3 est dédié aux  mesures d’urgence économique et d’adaptation à la lutte contre l’épidémie de Covid-19 (III).

 

I. Concernant les élections municipales

 

A circonstances exceptionnelles, mesures exceptionnelles.

L’expression démocratique s’est heurtée, il y a quelques jours, à une crise sanitaire sans précédent.

Si le premier tour des élections municipales a été maintenu, il devait évidemment en être autrement du second tour.

Le projet de loi prévoit que le second tour des élections municipales est repoussé au plus tard au moins de juin 2020.

Si la date n’est pas encore connue, elle sera fixée par décret en Conseil des ministres et dépendra, à l’évidence, de l’évolution de l’épidémie de Covid-19. D’ailleurs, à cet effet, un rapport du gouvernement fondé sur une analyse du comité scientifique sera adressé au Parlement, au plus tard, le 10 mai 2020. Ce rapport sera l’occasion de faire le point sur la situation sanitaire et se prononcera sur la tenue du second tour des élections municipales.

 

Mais qu’en est-il des conseillers élus au premier tour ?

 

Pour les conseillers (municipaux, communautaires, d’arrondissement ou de Paris) élus au premier tour, la prise de fonction est immédiate. Exception faite pour les communes de moins de 1000 habitants où le nombre de conseillers élus est inférieur à la moitié du nombre de sièges à pourvoir. Dans ce cas, les conseillers élus au premier tour entrent en fonction le lendemain du second tour.

 

Et les dépenses de campagne dans tout cela ?

 

En effet, si certains voient leur campagne terminée en raison de leur élection au premier tour, d’autres ne sont pas dans ce cas.

Là encore, à situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles.

Le projet de loi prévoit que la campagne électorale pour le second tour sera ouverte à compter du deuxième lundi qui précède le scrutin et que le plafonnement des dépenses prévu par le code électoral sera majoré par décret.

Ledit projet prévoit également que les frais de campagne engagés pour la propagande notamment (affiches, coût du papier, frais d’impression, frais d’affichage…) en vue du second tour initialement prévu le 22 mars prochain, seront remboursés.

 

Quand auront lieu les prochaines élections municipales ?

 

Puisque certains conseillers sont élus en mars 2020 et que d’autres seront élus ultérieurement, quand auront lieu les prochaines élections municipales ?

Le projet de loi prévoit qu’elles auront lieu, indifféremment sur l’ensemble du territoire français, en mars 2026.

 

II. Concernant l’état d’urgence sanitaire

 

Le titre 2 du projet de loi traite de l’état d’urgence sanitaire. Il est déclaré par décret en conseil des ministres, pour une ou plusieurs circonscriptions à l’intérieur desquelles des zones d’urgence sanitaire sont définies. Cette déclaration est valable 12 jours au-delà desquelles une nouvelle loi doit fixer la durée définitive de l’état d’urgence, sauf démission du gouvernement ou dissolution de l’Assemblée nationale, cas dans lequel la loi devient caduque au bout de 15 jours.

 

Cette déclaration permet au Premier Ministre de prendre par décret des mesures attentatoires aux libertés à savoir les libertés d’aller et venir, d’entreprendre, de se réunir. Les réquisitions de tout bien et de tout service sont autorisées dans le but de lutter contre la catastrophe sanitaire, et à condition d’être proportionnées, ce qui bien entendu ouvre la porte à un contentieux administratif ultérieur le cas échéant.

L’indemnisation des réquisitions est régie par le code de la défense et plus précisément les articles L.2231-1 et suivants de ce code.

 

Ces pouvoirs exceptionnels, qui sont par définition liberticides (ce qui ne signifie pas qu’ils ne sont pas justifiés par la situation actuelle), ne s’arrêtent pas au premier ministre puisque le ministre de la santé peut également prendre, par voie d’arrêté, toute mesure générale ou individuelle visant à lutter contre la catastrophe. Ces mesures devant naturellement être proportionnées aux risques encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu.

Et, les préfets peuvent prendre les mesures d’application y compris des mesures individuelles qui doivent être transmises au Procureur de la République. Si les mesures générales ou individuelles n’excèdent pas un département, le préfet est habilité à les décider lui-même après le l’avis du directeur général de l’ARS.

Ces mesures peuvent faire l’objet d’une exécution immédiate.

 

Enfin, en cas de violation de manquement aux obligations, la loi prévoit une amende de quatrième classe, hormis pour le fait de ne pas respecter les réquisitions, qui est un délit puni de six mois d’emprisonnement et de 10 000 € d’amende.

 

Ces mesures qui peuvent s’avérer effectivement extrêmement contraignantes et qui fondent le confinement auquel nous sommes aujourd’hui contraints, sont parfaitement compréhensibles et nécessaires dans le contexte actuel.

Néanmoins, il conviendra d’être extrêmement attentif pour éviter des débordements et l’utilisation de ces mesures « exceptionnelles » à d’autres fins que des fins strictement sanitaires.

 

Or, du fait de la quasi-fermeture des juridictions administratives, il n’est pas certain qu’un référé liberté, dans le cas où une mesure tout à fait excessive et disproportionnée serait prise, puisse être jugé dans les 48 heures d’usage.

Il conviendra de voir si le Parlement souhaite mettre un ou deux verrous à l’utilisation de ces dispositions.

 

III. Concernant les mesures d’urgence économique et d’adaptation à la lutte contre l’épidémie de Covid-19

 

Le titre trois qui regroupe les articles 17 et 18, organise les mesures d’urgence économique et d’adaptation à la lutte contre l’épidémie de Covid-19.

 

Ces mesures permettent au gouvernement d’intervenir par ordonnance, dans un délai de trois mois à compter de la publication de la présente loi (ce qui est un délai relativement long par rapport à un confinement prévu au départ pour 15 jours probablement pour 30 voire 45 jours) et comprennent toute une série de mesures de soutien à l’activité économique.

Il s’agit de soutien à la trésorerie des entreprises , des  aides directes ou indirectes pour les entreprises dont la viabilité est mise en cause, le fond de solidarité étant partagé avec les collectivités locales qui devront néanmoins donner leur accord.

 

Les mesures pourront intervenir en matière de droit du travail, de droit de la sécurité sociale et de droit de la fonction publique pour limiter les ruptures de contrat de travail : recours à l’activité partielle, réduction du reste à charge pour l’employeur, adaptation des modalités de mise en œuvre des pertes de revenus pour les indépendants…

Les modalités d’attribution de l’indemnité complémentaire prévue à l’article L.1226 -1 du code du travail pourront être adaptées (il s’agit d’une indemnité complémentaire à l’allocation journalière prévue à l’article L.321-1 du code de sécurité sociale).

Les modalités d’acquisition des congés payés pourront être modifiées unilatéralement par l’employeur, de même que les jours de réduction de temps de travail et de repos affectés à un compte épargne temps. L’objectif est très probablement de pouvoir intégrer à ses jours de repos (quel qu’en soit la nature), les jours non travaillés du fait du coronavirus.

 

Puis, suit toute une série de mesures permettant des dérogations à la durée du travail, au versement de l’intéressement, au suivi de l’état de santé des travailleurs, de l’information  et de la consultation des instances représentatives du personnel, ou encore de la formation professionnelle.

Des modalités nouvelles pourront être prévues en ce qui concerne les droits et obligations des entreprises à l’égard de leurs clients et fournisseurs ainsi que pour les coopératives à l’égard des coopérateurs en ce qui concerne les délais et pénalités (en particulier pour les contrats de vente de voyages et séjours).

 

Les règles de délai d’exécution et de résiliation prévues par les contrats publics et le code de la commande publique ainsi que les pénalités contractuelles pourront également être modifiées.

Le droit des procédures collectives et des entreprises en difficulté peut également être modifié.

 

Enfin, l’article 17 1° h prévoit la possibilité de reporter et d’étaler le paiement des loyers, des factures d’énergie pour les locaux professionnels, de renoncer aux pénalités financières ou à la suspension, interruption ou réduction de fourniture du fait du non-paiement de ses factures.

De même, le délai d’expulsion locative pour la période d’hiver pourra être modifié.

 

La deuxième partie de l’article 17 prévoit une série de mesures afin de faire face aux conséquences de la situation sur le plan juridique.

Globalement, il s’agit de reporter les délais.

 

Tout d’abord, et c’est essentiel pour le contentieux, les délais applicables au dépôt et au traitement des déclarations et demandes, aux consultations du public préalables à la prise d’une décision, les délais de réalisation par les entreprises ou les particuliers des travaux, de contrôle ou de  prescriptions de toute nature, pourront être modifiés ; les délais prévus à peine de nullité, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, cessation d’une mesures ou déchéance d’un droit, cessation d’une mesure (à l’exception des mesures privatives de liberté), pourront être adaptés, interrompus, suspendus ou reportés.

S’agissant des juridictions, les règles relatives à la compétence territoriale, aux délais de procédure, à la publicité des audiences, au recours à la visioconférence, aux modalités de saisine de la juridiction et du respect du contradictoire pourront  être modifiées et adaptées.

 

De même, en matière pénale, pour permettre l’intervention à distance de l’avocat , les règles seront adaptées.

Les conditions de réunion et de délibération de toutes les assemblés, organes des personnes morales, ou encore le droit des sociétés relatif à la tenue des assemblées générales, seront simplifiés et adaptés, de même que les règles relatives à l’établissement, l’arrêt, l’audit, la revue et /ou l’approbation des comptes.

Il en va de même en ce qui concerne la possibilité pour les établissements publics et  instances  collégiales de tenir des réunions dématérialisées.

 

S’agissant de la délivrance des diplômes de l’enseignement supérieur, des modalités de déroulement des concours, examens d’accès à la fonction publique, elles pourront être modifiées.

Des règles ont également été prévues pour faire garder les jeunes enfants, pour assurer l’accompagnement des personnes en situation de handicap et des personnes âgées ainsi que des personnes en situation de pauvreté.

La continuité du droit des assurés sociaux de leurs accès aux soins et au droit, sera assurée par des modifications jugées nécessaires des codes correspondants.

 

Enfin, pour assurer le fonctionnement des collectivités locales et la continuité budgétaire et financière de ces dernières et des établissements publics locaux, des dérogations sont prévues à toutes les règles de fonctionnement, de délégation, d’exercice des compétences, d’approbation des budgets et des procédures d’enquête publique.

La loi de ratification devra être déposée devant le parlement dans un délai de deux mois.

 

Par ailleurs, les délais dans lesquels le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, des mesures relevant du domaine de la loi sont prolongés de quatre mois, lorsqu’ils n’ont pas expiré à la date de publication de la présente loi.

Les délais fixés pour le dépôt de projets de loi de ratification d’ordonnances publiées avant la date de publication de la présente loi sont prolongés de quatre mois, lorsqu’ils n’ont pas expiré à cette date.

 

Au total, lorsque le Président de la République a fait référence à un état de guerre, c’est bien de cela dont il s’agit sur le plan juridique puisque c’est tout notre droit qui est interpellé et qui peut être modifié par ordonnance.

Si l’on peut tout à fait comprendre que l’état d’urgence sanitaire et économique justifie des adaptations de notre système juridique, il faut espérer – compte tenu des malheureux précédents que nous avons vécus depuis quelques mois- que cette capacité juridique ne sera pas utilisée pour faire passer des réformes auxquelles les Français étaient particulièrement réticents.

 

Il est dommage que le projet de loi ne prévoit pas le retour à l’état de droit initial dès lors que les circonstances de l’état d’urgence sanitaire économique auront pris fin.

Cela aurait permis de lever toute ambiguïté quant à l’étendue dans le temps des transformations majeures auxquelles nous devons nous attendre.

 

Lire le projet de loi : Projet de loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Coivd-19

 

Corinne LEPAGE

Avocate à la cour – Docteur en droit

Huglo Lepage Avocats

 

et

 

Madeleine BABES

Avocate à la cour

Huglo Lepage Avocats

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L'affaire des malformations dans l'Ain révèle la mauvaise protection des lanceurs d'alerte

L'affaire des malformations dans l'Ain révèle la mauvaise protection des lanceurs d'alerte | Think outside the Box | Scoop.it

La France a voté plusieurs lois sur la protection des lanceurs d'alerte. Le licenciement des membres du Registre des malformations en Rhône-Alpes révèle sur le terrain que cette protection est loin d'être effective.

 

Les pouvoirs publics souhaitent-ils étouffer la voix du Registre des malformations en Rhône-Alpes (Remera) qui a révélé en 2016 un surnombre de malformations dans le département de l'Ain ? La question se pose, ainsi que celle plus large de la protection des lanceurs d'alerte, alors que les Hospices civils de Lyon viennent de notifier aux six membres de l'association leur licenciement au 31 décembre 2018.

Le Registre rhônalpin est chargé avec cinq autres registres de surveiller les anomalies congénitales sur un territoire représentant 19% des naissances françaises. Son statut associatif lui donne une indépendance dont ne peuvent pas forcément se prévaloir ses homologues et qui donne lieu à des tensions avec l'établissement Santé Public France qui le cofinance.

 

Des hypothèses environnementales qui restent en suspens

En juillet dernier, le Registre publiait les résultats d'une étude révélant sept cas d'enfants nés avec une malformation des membres supérieurs entre 2009 et 2014 dans un petit périmètre du département de l'Ain. "Des hypothèses environnementales (produit de l'agriculture ? vétérinaire ?) semblent se dessiner mais elles sont à l'état d'ébauche et les données de la littérature ne contribuent pas à les affiner. Le registre devrait donc s'appuyer sur des ressources externes en toxicologie et épidémiologie environnementales pour mettre en place une étude dont le design reste à définir", concluaient les auteurs du rapport. Dans le même temps, il apparaissait que deux autres territoires ruraux, en Loire-Atlantique et dans le Morbihan, étaient touchés par des maux identiques.

Mais plutôt que l'appui réclamé pour poursuivre les investigations, l'association a reçu une fin de non-recevoir des pouvoirs publics.

Dans trois rapports d'investigation publiés le 4 octobre après la médiatisation de ces affaires, Santé Publique France (SPF) ne reconnaît pas d'excès de cas par rapport à la moyenne nationale dans l'Ain, contrairement aux deux autres départements. Dans les trois zones, elle indique ne pas avoir identifié de cause commune entre les différents cas de malformations constatés et refuse par conséquent les investigations complémentaires. Interrogés par Le Monde, trois biostatisticiens ont formellement contesté la méthodologie utilisée par l'étude de SPF pour conclure à l'absence d'excès de cas dans l'Ain. "Santé Publique France doit dire qu'il a commis une erreur", tonne l'eurodéputée écologiste Michèle Rivasi.

 

"Où est la faute ?"

Non seulement, les préconisations du Remera ne sont pas suivies d'effet mais son existence même est remise en cause avec le licenciement de ses six salariés. La structure devrait mettre la clé sous la porte d'ici la fin de l'année, ayant perdu ses deux principales sources de financement, à savoir les subventions de l'Inserm et de la Région Rhône-Alpes. "Le scandale des bébés nés sans bras éclate. Remera doit fermer (…). S'il n'y a pas de lien, qu'on nous le prouve !", tweetait rageusement Emmanuelle Amar, sa directrice générale, le 13 octobre.

"L'alerte est constitutive de la mission du Registre. L'affaire a été rendue publique en 2016 car elle n'a pas été entendue en interne. Les salariés du Remera se retrouvent dans une situation couverte par la loi de 2016 protégeant les lanceurs d'alerte", estime Delphine Batho. L'ancienne ministre de l'Environnement auditionnera Mme Amar le 23 octobre dans le cadre du groupe d'études Santé environnementale de l'Assemblée qu'elle co-préside. Il semble en effet que la loi Sapin II, qui a été précédé par six autres lois traitant du droit d'alerte selon un rapport du Conseil d'Etat de 2016, ne semble toujours pas protéger efficacement leurs auteurs.

Le président de la Région, Laurent Wauquiez, a annoncé le 12 octobre qu'il pourrait finalement débloquer une subvention pour le Remera si l'Etat ne remplissait pas ses obligations. Cette volte-face tendrait à prouver que c'est plus l'équipe que la structure elle-même qui serait visée. "Si on continue à financer, il ne s'agit alors plus d'un licenciement économique mais d'un licenciement pour faute", pointe Corinne Lepage. "Mais où est la faute ?", interroge l'ancienne ministre de l'Environnement, avocate de formation.

 

Laurent Radisson

Journaliste : Rédacteur en Chef délégué aux marchés HSE

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Pollution et santé : une « marche des cobayes » hétéroclite part de Fos-sur-Mer

Pollution et santé : une « marche des cobayes » hétéroclite part de Fos-sur-Mer | Think outside the Box | Scoop.it

Une « marche des cobayes », baptisée « Vérité et justice pour la santé environnementale », partira de Fos-sur-Mer mardi 1er mai, en direction de Bruxelles, avec une manifestation à Paris prévue le 30 juin.

Les signataires de l’appel s’inquiètent de l’explosion des maladies chroniques (parmi lesquelles ils citent « cancers, allergies, autisme, hyperactivité, maladies auto-immunes, infertilité, obésité, perturbations hormonales, pubertés précoces, maladies liées aux effets secondaires de certains médicaments et vaccins, électro-hypersensibilité, etc. ») et demandent cette marche « pour en finir avec le tout pouvoir des lobbys industriels qui s’infiltrent dans les évaluations scientifiques et la réglementation » et pour « exiger le droit fondamental à un air sain, une alimentation saine, une médecine saine, un environnement sain et la préservation de la santé de tous. »

Les membres et soutiens du collectif sont hétérogènes, de l’Apesac (Dépakine), à l’Association de défense et de protection du littoral du golfe de Fos (ADPLGF), en passant par l’Association française des malades de la thyroïde (AFMT), le C2DS (Comité développement durable santé), le Criigen (comité de recherche et d’informations indépendantes sur le génie génétique), le Criirad (Commission de recherche et d'information indépendantes sur la radioactivité), E3M (Entraide aux malades de la myofasciite à macrophages), Générations futures, différents collectifs anti Linky et bien d’autres.

De nombreuses personnalités très variées soutiennent elles aussi cette marche : Michèle Rivasi (députée européenne), Corinne Lepage (avocate, ancienne ministre de l’environnement, fondatrice de Justice Pesticides), Jacques Testart (biologiste), Jean-Luc Mélenchon (député des Bouches-du-Rhône), Philippe Even (professeur de Médecine, ancien président de l’Institut Necker), Romain Gherardi (chercheur à l’INSERM et neurologue), Serge Hercberg (épidémiologiste, président du programme national nutrition santé)…

 

Fabienne Rigal

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Les 2 raisons inavouées du gouvernement de réformer le monde de la justice

Les 2 raisons inavouées du gouvernement de réformer le monde de la justice | Think outside the Box | Scoop.it

Les 2 raisons inavouées du gouvernement de réformer le monde de la justice.

 

La mobilisation de la totalité du monde de la justice est suffisamment rare pour qu'elle appelle non seulement le gouvernement, mais l'ensemble de la population française à la réflexion.

 

 

 

La mobilisation de la totalité du monde de la justice -magistrats, avocats, greffiers...- est suffisamment rare pour qu'elle appelle non seulement le gouvernement, mais l'ensemble de la population française à la réflexion. L'analyse du projet gouvernemental comme celle d'une mise à mort de la justice est partagée par l'ensemble des syndicats de magistrats (Union syndicale des magistrats (USM), le Syndicat de la magistrature (SM), CGT-Chancelleries et services judiciaires et d'autres syndicats) comme par différentes instances représentant la profession d'avocat. Il ne s'agit pas d'une quelconque revendication corporatiste, mais bien d'une réaction parfaitement légitime et justifiée à l'encontre d'un pouvoir politique, qui pour des raisons financières, mais aussi tout à fait politiques, souhaite "réorganiser la justice" avec des transformations que les organisations de magistrats ont stigmatisées: "Suppression des 307 tribunaux d'instance et de la fonction spécialisée de juge d'instance, organisation judiciaire illisible et éloignée du citoyen, déshumanisation de la justice, privatisation du contentieux civil ... régression des droits de la défense, recul du contrôle de la justice sur les atteintes aux libertés publiques, suppression larvée du juge d'instruction et du juge de l'application des peines, réduction de la collégialité".

 

En s'attaquant à tous les sujets d'un coup, procédure civile, procédure pénale, organisation des juridictions, renforcement des pouvoirs de police, dématérialisation de la procédure, le gouvernement crée un rideau de fumée destiné à empêcher de comprendre la philosophie profonde de cette réforme qui rejoint une volonté politique clairement exprimée de détruire ou a minima d'annihiler tous les contre-pouvoirs de notre pays.

 

La situation lamentable de la justice française est un constat partagé; il s'agit non seulement d'un manque de moyens criant qui place notre justice au dernier rang européen en matière de moyens, mais encore plus du refus de reconnaître l'existence d'un pouvoir judiciaire digne de ce nom et d'assurer l'indépendance de la justice et en particulier celle du parquet, malgré les décisions réitérées de la Cour Européenne des Droits de l'Homme refusant de reconnaître au parquet français la qualité de magistrats.

 

Le projet vise à l'évidence à faire des économies supplémentaires par la suppression des tribunaux d'instance, la réduction programmée du nombre des affaires passant devant le juge, y compris en cas de difficulté comme en matière familiale, la réduction des audiences..., sans évidemment que la qualité de la justice et les droits du justiciable en soient moindrement améliorés.

 

Mais il s'agit aussi et peut-être d'abord, même si cet aspect de la réforme est passé sous silence par la garde des sceaux, d'une volonté politique de réduire encore les moyens de la justice pénale et en particulier ceux des juges d'instruction et de séparer au maximum la justice du peuple français. Sur le premier point, la prise d'autonomie de la justice financière et en particulier du parquet financier semble gêner considérablement le pouvoir politique. Il est vrai qu'il n'était guère habitué à ce que les responsables politiques puissent se retrouver en correctionnelle, la règle de l'impunité de fait ou de droit étant devenue, sauf exceptions notables, une règle générale. Impunité de fait, car lorsqu'une affaire vient à l'audience 20 ans après les faits, il est rare que les prévenus soient exposés à une peine sérieuse. Dès lors, réduire encore les moyens et les pouvoirs du juge d'instruction est de bon aloi... alors que, comme par hasard, une certaine presse se fait de plus en plus l'écho "d'un pouvoir médiatico-judiciaire" qui monterait des complots et n'aurait qu'un comportement "politique".

Cette volonté d'éviter un fonctionnement réellement indépendant la justice, efficace, et au service des justiciables se traduit également dans la réduction de la compétence des cours d'assises. Sur le plan symbolique, comme sur le plan politique, cette décision est très grave. En effet, la participation à un jury, ce qui est une obligation citoyenne, trouve sa source dans la révolution française et constitue pour tous nos concitoyens qui ont vécu cette expérience, un moment très important de compréhension des difficultés de rendre la justice et un exercice politique au sens le plus noble du terme majeur. Certains pays comme les États-Unis du reste utilisent de manière beaucoup plus large les jurys citoyens, ce qui est assez logique puisqu'il faut semble-t-il rappeler que la justice est rendue au nom du peuple français comme au nom du peuple américain aux États-Unis.

Car l'objectif est aussi de séparer le plus possible la population de sa justice. La première a toutes les raisons de se plaindre de la lenteur des procédures, de leur coût, de certaines impunités, des comportements des puissants... Cette situation participe évidemment de la défiance générale à l'égard du système politique dans son ensemble et par rapport à une idée de justice en particulier.

Alors, supprimer les jurys des cours d'assises, dématérialiser les procédures jusqu'au point de supprimer les audiences, remplacer la saisine du juge par des procédures amiables de manière systématique sont autant de manière d'éloigner encore les citoyens de leur justice alors qu'elle est leur principal soutien.

En effet, si la société civile a pu monter en puissance, si les pollueurs et les corrupteurs peuvent parfois être poursuivis, si les procès climatiques mettent en cause de manière croissante l'inaction des Etats et la responsabilité des grands émetteurs de gaz à effet de serre, si parfois David l'emporte contre Goliath, c'est bien grâce aux juges.

Entretenir, voire accroître la défiance à l'égard des juges, c'est une manière supplémentaire de réduire le champ démocratique pour conforter la toute-puissance du pouvoir politique et des grands intérêts économiques trop souvent soutenus au détriment des intérêts de la nouvelle économie et de la population.

Dès lors, encourageons le monde associatif, les collectivités locales, le monde de la nouvelle économie à soutenir l'action du monde de la justice pour que la réforme, qui est indispensable, ne se fasse pas au détriment de la société civile, mais au contraire à son avantage. Plus que jamais la justice doit être une grande cause nationale.

 

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    Corinne Lepage Avocate, Ancienne députée européenne Cap21, ancienne ministre de l'Environnement
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Linky : Corinne Lepage attaque l’Etat

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Constitué autour de l’ancienne ministre de l’environnement Corinne Lepage, un groupe d’avocats a présenté, ce 9 avril, une nouvelle action collective, visant l’Etat, contre le déploiement du compteur communicant Linky.

 

 

Linky essuie depuis le début de l’année une nouvelle série de plaintes. Après la remise en cause, en février, de son utilité par la Cour des Comptes et la mise en demeure de l’opérateur Direct Energy par la Cnil[1] fin mars sur le relevé des données[2], le compteur intelligent made in France va faire l’objet d’une action collective en justice.

«Nous allons former, dans les jours à venir, un recours gracieux auprès des ministres de la santé et de la transition écologique pour rappeler à l’Etat sa responsabilité de protéger la santé du public. En cas de rejet de notre demande, le tribunal administratif sera saisi», explique Christophe Lèguevaques, avocat au barreau de Paris et spécialiste des actions collectives.

 

3.800 refus

Ce recours s’ajoute à un recours en référé, préparé depuis 6 mois, regroupant désormais 3.800 citoyens demandant le respect de leur refus du Linky. «Les dossiers sont actuellement à l’étude et vont faire l’objet d’une tentative de rapprochement avec Enedis. En cas d’échec, nous lancerons la procédure le 5 juin avec un référé central auprès du tribunal de grande instance (TGI) de Nanterre et 17 référés devant les TGI correspondant aux directions territoriales d’Enedis», ajoute l’avocat.

 

Une étude scientifique «sérieuse»

Au nom du principe de précaution, le collectif d’avocats -d’ores et déjà soutenu par la commune de Bondy (Seine-Saint-Denis), l’association Stop Linky Drôme Ardèche, et les 3.800 opposants individuels- réclame la réalisation d’une étude scientifique sérieuse sur les effets sanitaires du compteur utilisant les courants porteurs. Dans l’attente des résultats, il appelle le gouvernement à suspendre son déploiement, qui a déjà couvert un tiers des 35 millions de foyers visés dans l’Hexagone d’ici 2021.

 

Pollution électromagnétique

A l’appui de leur recours, les juristes ciblent trois arguments principaux. A commencer par la protection de la santé des utilisateurs. «Pourquoi se rajouter de la pollution électromagnétique alors que l’Anses[3] vient justement de reconnaître les souffrances vécues par les électrosensibles?», affirme l’eurodéputée écologiste Michèle Rivasi, en référence au rapport d’expertise publié le 27 mars par l’agence. D’autres dispositifs sont en effet possibles selon elle, comme la technologie filaire adoptée au Royaume-Uni.

 

Protection des données

Deuxième grief: le risque de revente de données personnelles. «Les citoyens sont inquiets sur l’intrusion de ce premier objet connecté dans leur foyer. D’autant plus que les données recueillies par 35 millions de capteurs peuvent se revendre très cher, jusqu’à 100 euros la donnée», explique Michèle Rivasi. «Curieusement, le réseau Linky s’est progressivement élargi pour occuper aujourd’hui 36 fréquences de manière permanente. Ce qui laisse planer des doutes sur l’importante quantité de données qu’il peut véhiculer», complète l’avocat Arnaud Durand.

 

Déni démocratique

Enfin, le collectif d’avocats remet en cause l’utilité même du compteur et l’absence de débat démocratique qui accompagne son installation. «Comme l’explique la Cour des comptes, Linky ne propose aucune valeur ajoutée puisqu’il ne comporte pas d’écran reporté, permettant de suivre la consommation en temps réel comme au Royaume-Uni», note l’eurodéputée écologiste. «C’est un compteur intelligent pour EDF seulement», ajoute l’ancienne ministre de l’environnement Corinne Lepage, soulignant que le compteur ne permet aucune interaction avec le consommateur qui décide par exemple de produire de l’électricité d’énergie renouvelable. A contrario, l’Allemagne a opté pour un dispositif différent, ne visant que les gros consommateurs d’électricité et les producteurs d’énergie d’origine photovoltaïque.

 

Rendez-vous au tribunal

Pire, Enedis rechigne à prendre en compte les refus individuels d’une installation de compteur, alors que celui-ci n’est pas juridiquement obligatoire. «400 communes ont déjà formulé un vœu contre Linky. A Valence, un arrêté municipal a même été pris pour que les refus individuels soient respectés mais les préfets font pression sur les maires pour qu’ils ne se prononcent pas», explique l’eurodéputée écologiste. Convoqué au tribunal de grande instance de Nanterre, Enedis ne pourra éluder ce débat.

 


[1] Commission nationale de l’informatique et des libertés

[2] La Cnil reproche à l’opérateur de ne pas demander clairement leur consentement aux usagers du Linky sur le relevé, chaque demi-heure, de leur consommation, au lieu du suivi journalier.

[3] Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail

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La déviance du pouvoir macronien

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LIVRE - Pour Corinne Lepage, l'espoir d'en finir avec la « vieille politique » porté par la campagne d'Emmanuel Macron n'a pas survécu aux premiers mois de présidence.

Le sujet : La campagne d'Emmanuel Macron a suscité un immense espoir chez les contempteurs de la « vieille politique », supportée par une société civile dont les représentants étaient, pour la plupart, déconnectés de toute vision partisane. Cet amateurisme revigorant a permis de faire entrer la société française dans une « ère positive ». Mais cet élan n'est-il pas déjà en train de retomber ? Il a aussi porté au pouvoir une nouvelle élite, dont la caractéristique est sa totale dépendance à l'égard du président de la République. En son sein, une jeune garde rapprochée s'est constituée autour du chef de l'Etat, le plus souvent constituée d'énarques, qui cultivent un fort sentiment de toute-puissance et d'omniscience, nourri par l'exploit que représente la conquête de l'Elysée. Six mois après celle-ci, le pouvoir macronien est prêt à basculer dans l'isolement et a entamé le capital confiance qu'il s'était constitué. Une situation aux antipodes de ce que la campagne laissait espérer.

L'intérêt. Ancienne ministre de l'Environnement de Jacques Chirac et ancienne eurodéputée, Corinne Lepage fait partie des rares « inclassables » de la vie politique de ces deux dernières décennies. Le profil atypique de cette avocate, spécialiste des questions environnementales, donne du crédit à l'analyse qu'elle fait de « l'hyperprésidentialisation » du régime dont elle redoute les effets. J.C.

 

« A bout de confiance. De la morale en politique », par Corinne Lepage, éditions Autrement, 239 pages, 17 euros.

 
 
Joël Cossardeaux
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Les graves impacts sur la santé et l'environnement montrent l'incohérence du CETA

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Le CETA devrait entrer en vigueur le 21 septembre après avoir fait l'objet d'un vote favorable du Parlement européen et d'une décision de validation surprenante de la part du conseil constitutionnel français.

 

Le CETA devrait entrer en vigueur le 21 septembre après avoir fait l'objet d'un vote favorable du Parlement européen et d'une décision de validation surprenante de la part du conseil constitutionnel français.

 

Le rapport au Premier ministre daté du 7 septembre 2017 sur l'impact de l'accord économique et commercial global entre l'Union européenne et le Canada sur l'environnement, le climat et la santé, est extrêmement clair. Le principe de précaution n'étant pas inclus dans l'accord, il n'y a pas de certitude à ce qu'ils puisse être appliqué; les modèles alimentaires de protection des consommateurs canadiens et européens divergent profondément au détriment évidemment des consommateurs européens de telle sorte que des produits interdits en Europe comme l'hormone de croissance les farines animales pourraient se retrouver dans des produits commercialisés en Europe, la position sur les OGM est antinomique et, comme le note de manière prudente les rédacteurs du rapport: "les dispositions du CETA pour l'agriculture apparaissent au final décevantes pour un accord dit 'de nouvelle génération'".

 

Le plus grave est incontestablement pour le climat, les accords de Paris ayant été conclus postérieurement à la négociation initiale du CETA. La politique canadienne à l'égard des schistes bitumineux conduit tout droit l'union européenne à devoir les importer, sans même qu'une taxation du carbone ne soit envisagée.

 

Le rapport confirme donc les profondes inquiétudes que nous étions nombreux à nourrir à l'égard de cet accord, même si il est exact qu'il a été amélioré par rapport à la première mouture et que la position de Donald Trump impose de trouver des accords avec le Canada. Pour autant, ce texte est totalement incohérent avec la politique que nous affirmons de champion de lutte contre le changement climatique et de gardien vigilant des accords de Paris puisque, le CETA devrait augmenter–même faiblement–les émissions de gaz à effet de serre alors que l'objet est bien évidemment de les réduire massivement. Cette incompatibilité pourrait être combattue par un report de la mise en œuvre du CETA, la cour de justice de l'union européenne est saisie sur la question du tribunal.

 

En tout cas, on ne peut pas comprendre que la France ne tire aucune conséquence de ce rapport qui était un engagement de campagne du président de la République. Si tel était le cas, il faudrait alors considérer le domaine du climat est devenu celui de la communication plus que de l'action. Dans ce contexte, le projet de loi sur l'interdiction de l'extraction d'hydrocarbures en 2040 qui permet non seulement de continuer les extractions déjà autorisées mais d'en autoriser d'autres conduirait à une lecture peu compatible avec une volonté ferme de s'attaquer aux dérèglements climatiques. Tout aussi incohérente est la position prise par le conseil constitutionnel dont le président se veut pourtant un promoteur ardent sur la scène internationale des droits de l'environnement qui n'a visiblement rien trouvé à redire au CETA.

Peut-être les images tragiques de nos territoires d'outre-mer ravagés par l'ouragan Irma conduiront-elles nos dirigeants à sortir du discours pour entrer dans le dur et accepter de s'opposer aux innombrables lobbys des hydrocarbures qui eux, ne payent pas (dans tous les sens du terme) les conséquences de leur soif insatiable de maintenir l'addiction des humains au pétrole, au charbon et au gaz.

 

Corinne Lepage

Avocate, Ancienne députée européenne Cap21, ancienne ministre de l'Environnement

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Les trois "embrouilles" des défenseurs de la centrale de Fessenheim

Les trois "embrouilles" des défenseurs de la centrale de Fessenheim | Think outside the Box | Scoop.it
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La communication qui a été faite de l'accord qui aurait été donné par le conseil d'administration d'EDF à la fermeture de Fessenheim ne correspond en rien à la réalité.

 

Tout d'abord, Fessenheim ne fermera pas au cours du quinquennat de François Hollande. Ce n'est pas un scoop car, dès 2013, après que Delphine Batho ait soutenu devant le conseil d'État la thèse de EDF et ainsi obtenu un arrêt du conseil d'État jugeant qu'il n'y avait aucun risque à Fessenheim, la messe était dite. Elle l'était définitivement après que le gouvernement ait refusé de se donner les moyens d'appliquer sa politique énergétique et de décider de la fermeture des centrales nucléaires qu'il jugeait utile pour atteindre l'objectif qu'il se fixait. Aujourd'hui, le dernier espoir que devait avoir le président Hollande de pouvoir se prévaloir d'un projet de fermeture disparaît, le conseil d'administration d'EDF ayant remis à un conseil d'administration ultérieur, la décision de déposer une demande de fermeture en bonne et due forme. En effet, le prétendu avis favorable n' en est pas un puisqu'il est assorti de conditions dont la réalisation est renvoyée à après l'élection présidentielle.

 

En second lieu, aucun accord n'a été donné par le conseil d'administration contrairement à ce qui a été publiquement indiqué. En effet, au terme d'un marchandage aussi scandaleux sur le plan politique sur le plan de la sécurité, le conseil d'administration d'EDF subordonne le dépôt d'une demande de fermeture à la délivrance de 2 autorisations qui ne devraient pas l'être. La première concerne Paluel. Cette centrale a été victime d'un accident très grave puisque un générateur de vapeur dont la chute était selon EDF impossible, est effectivement tombé sur le réacteur. La centrale ayant été arrêtée depuis mai 2015, si elle n'a pas redémarré en mai 2017, son redémarrage nécessite une nouvelle autorisation. Celle-ci devrait faire l'objet d'une procédure complète ce que veut absolument éviter EDF puisqu' elle nécessite une étude d'impact et une enquête publique. EDF veut donc une autorisation de redémarrage avant cette date. Et EDF surtout veut faire l'économie de toute procédure publique ce qui apparaît comme totalement illégal compte tenu de la gravité de l'accident qui est survenu. La même pression est exercée sur Flamanville dont l'autorisation vient à expiration en avril 2017. Une nouvelle autorisation est donc nécessaire et devrait être soumise, sauf dérogation, à une procédure complète ce que là aussi EDF veut éviter. C'est la raison pour laquelle le conseil d'administration a subordonné le dépôt d'une demande de fermeture de Fessenheim à une double violation de la loi au bénéfice de Paluel et Flamanville.

 

Enfin, la question de l'indemnisation mérite d'être posée. En effet, il se pourrait bien que nous soyons en face d'une situation qui celle de l'arroseur arrosé. En effet, pour pouvoir prolonger ad aeternum ses centrales, EDF avance toujours l'argument selon lequel la loi française ne prévoit aucune durée pour la vie des centrales nucléaires. C'est exact et pose problème dans la mesure où les décisions données par l'ASN tous les 10 ans ne sont pas analysés par le conseil d'État comme des autorisations de prolongation de la durée de vie mais comme de simples avis. Mais, si les autorisations ne sont pas fixées dans le temps, alors EDF ne peut prétendre à aucun droit à indemnisation pour quelle que durée que ce soit puisque précisément il n'existe pas de délai.

 

On ne peut pas en même temps prétendre que les décisions de l'ASN qui interviennent tous les 10 ans ne prolongent pas la durée de vie pour 10 ans et en même temps prétendre qu'elles donnent un droit à fonctionner pendant 10 ans. Autrement dit, sur un plan strictement juridique, le droit à indemnisation d'EDF est éminemment contestable.

Cerise sur le gâteau, Ségolène Royal a prétendu le 25 janvier au micro de Jean-Jacques Bourdin que de toutes façons EDF ne pourrait plus prélever de l'eau pour faire fonctionner la centrale car les normes avaient changé. C'est vraiment un comble . En effet, l'ASN a délivré en 2016 à EDF des autorisations de rejet et de prélèvements d'eau totalement dérogatoires à toutes les normes, c'est-à-dire en réalité parfaitement illégales tant au niveau du droit français que du droit communautaire. Dès lors, oser prétendre que la loi sur l'eau serait appliquée à EDF et à Fessenheim relève vraiment de la « réalité alternative » mise à la mode par Donald Trump.

 

Quelles leçons tirer de cette situation?

  • La première évidemment est simple: l'État est dans l'incapacité d'imposer son choix en matière de politique énergétique. C'est EDF qui décide de tout alors que l'État est actionnaire à hauteur de 85 % et que c'est lui qui fixe les règles du jeu. Cela signifie que la loi sur la transition énergétique, en ce qui concerne la baisse de la part du nucléaire dans le mix énergétique relève du marchand de sable, de la poudre aux yeux et de la communication qui ne cherche même pas être convaincante. Si l'État est incapable d'imposer la fermeture d'une centrale vieillissante et critiqué dans toute l'Europe comme dangereuse, comment pourrait-il imposer un changement de politique énergétique.

  • La seconde est tout aussi évidente: EDF est prête à tout pour obtenir le feu vert sur Flamanville. La pression qu'est exercée sur l'Etat à travers la non décision du conseil d'administration est exercée de manière encore plus forte sur le président de l'autorité de sûreté nucléaire. La presse regorge d'articles sur le dénigrement systématique exercé sur cette autorité par le lobby nucléaire, de manière à obtenir contre vents et marées une autorisation pour Flamanville qui ne devrait jamais être donnée.

  • Plus que jamais, contrairement à la Une du journal l'Express, le nucléaire ne doit pas être sauvé parce qu'il ne peut pas l'être sans entraîner notre pays dans une spirale infernale. Le jour où le scénario Negawatt confirme le rapport de l'Ademe sur la faisabilité d'un scénario renouvelable à 100% en 2050, ou l'Ademe elle-même confirme la rentabilité la compétitivité des énergies renouvelables, il est plus que temps de gérer sur la durée le parc nucléaire tel qu'il existe aujourd'hui en fermant progressivement les centrales les plus exposées au risque. Nous avons le temps de permettre au personnel d'EDF de se former aux techniques du démantèlement pour ceux qui voudraient rester dans la filière nucléaire, aux techniques de la maintenance pour la mise à l'arrêt des réacteurs pour ceux qui souhaiteront rester dans les centrales existantes, aux techniques du renouvelable tous ceux qui voudraient accéder aux nouvelles technologies. Nous avons le temps de programmer une reconversion au voisinage des sites concernés pour permettre le maintien d'une activité locale. Mais, plus nous attendrons, plus EDF sera confronté à la falaise financière dont le président de l'ASN a dit récemment qu'elle posait désormais problème en terme de sécurité. Plus nous attendrons, plus les énergies renouvelables et les techniques de sobriété et d'efficacité énergétique se développeront, seront compétitifs et seront entre les mains de sociétés étrangères. Plus nous attendrons, plus la révolution énergétique avancera et moins nous serons à même d'assurer notre autonomie énergétique, le développement de nos propres marchés et notre compétitivité économique puisque l'énergie française deviendra une des plus chère du monde. Il est plus que temps d'agir en regardant l'avenir et non le passé.

 

 

Corinne Lepage

 

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« Sans l'UE, on mangerait de la viande clonée »

« Sans l'UE, on mangerait de la viande clonée » | Think outside the Box | Scoop.it

Corinne Lepage, avocate, ex-ministre de l'Environnement, ancienne députée européenne

 

Avant d'être nommée ministre de l'Environnement du gouvernement Juppé en 1995, Corinne Lepage avait déjà associé son nom et celui de son cabinet d'avocat à la défense des victimes de la marée noire de l'« Amoco Cadiz ». C'était à la fin des années 1970. Bien avant le naufrage de l'« Erika » en 1999, où elle avait de nouveau défendu les communes souillées du littoral français. Ces combats, elle les a ensuite menés de 1999 à 2014 au Parlement européen, « car c'est à Bruxelles que le droit de l'environnement se joue désormais à 80 % ». « Européenne convaincue », Corinne Lepage a eu la satisfaction d'y voir des dossiers sensibles avancer. « Sans l'UE, on mangerait aujourd'hui de la viande clonée et du poulet aux hormones, affirme l'ancienne députée européenne. Et c'est grâce à l'UE que l'on a interdit l'arrivée de la colle à viande, un agglomérat de morceaux de steaks collés entre eux. »

Les OGM ? « L'Europe bénéficie de la réglementation la plus rigoureuse du monde », dit l'avocate. La pollution de l'atmosphère ? « Alors que la loi sur l'air n'était pas appliquée dans notre pays, l'Europe a menacé la France de poursuites et de sanctions financières devant la Cour de justice européenne, ce qui nous a obligés à revoir notre législation sur les incinérateurs et à bouger sur les particules fines. » « L'Europe est comme une épée de Damoclès pour les Etats membres, car elle est très exigeante en matière écologique et sanitaire, mais cela s'est traduit depuis des années par de vrais progrès pour les consommateurs », affirme l'ancienne vice-présidente de la commission Santé-Environnement du Parlement européen.



Les nitrates, les déchets...

Entre autres exemples d'avancées notables, Corinne Lepage cite la réglementation sur les nitrates dans l'eau ou celle sur la qualité des eaux de baignade. L'Europe a aussi imposé aux Etats des règles strictes en matière de traitement des déchets, et les discussions sont enflammées à l'échelle européenne lorsqu'on évoque les perturbateurs endocriniens ou les pesticides. « L'UE est aussi à l'origine du règlement Reach, qui a permis une évaluation de l'impact des produits chimiques et obligé les producteurs à fournir la preuve de leur non-toxicité, détaille l'ancienne ministre de l'Environnement. Sans l'Europe, chacun ferait sa législation dans son coin, et les citoyens seraient moins bien défendus et écoutés. »

 

  Le Parisien

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