L'agriculture, avec un effectif en forte baisse et des surfaces à exploiter en hausse, est confrontée à un casse-tête : comment continuer à produire ? Une piste : l'innovation.
En agriculture, tout est question d’échelle. Et au cœur de cette activité, il y a des hommes et des femmes. Des hommes et des femmes qui, à en croire leurs déclarations dans le dernier Portrait social de la France, travaillent près de 54 heures par semaine en moyenne, bien au-delà des 37,3 heures relevées chez les personnes de 15 ans ou plus ayant un emploi en France métropolitaine.
Ce travail se partage entre les activités de production et les activités connexes (entretien du matériel, administration…), de façon très inégale entre les différents types d’exploitations. Mais il est une composante de ce travail qui demeure incompressible, au moins dans les cultures : le temps passé à conduire des machines.
Moins de bras, plus de travail
Si, depuis 2000, le nombre d’exploitations a baissé, la surface exploitée en France, autour de 25 millions d’hectares (ministère de l’Agriculture, cité par Le Monde), elle, n’a pas changé. De 66 ha en moyenne, les exploitations ont donc grossi, pour atteindre une moyenne de 85 ha. Dans le même temps, l’emploi agricole n’a pas vraiment prospéré : le secteur a perdu presque la moitié de ses actifs, pour atteindre 770 000 permanents en grande majorité des exploitants ou leurs proches.
Pour résumer, les surfaces à traiter ont gonflé de 29%, tandis que les personnels disponibles pour les traiter ont chuté de 41%.
Ajoutez à ces statistiques la saisonnalité du travail, et la nécessité de traiter les cultures dans un temps parfois contraint – pour éviter les intempéries, pour récolter des produits à maturité, pour partager les investissements matériels avec d’autres agriculteurs… – et vous obtenez des horaires de travail pour le moins chaotiques. Au total, 43 % des agriculteurs ont des horaires variables d’une semaine sur l’autre, et le travail le soir ou le week-end est monnaie courante dans le secteur : plus des deux tiers des agriculteurs exploitants se disent concernés.
Une nouvelle main d'œuvre
Dès lors, les techniques qui peuvent apporter des gains de productivité – sans pour autant verser dans le paradigme productiviste de l’après-guerre – s’étudient. L’innovation peut se mettre au service de la qualité de vie tout autant que de l’environnement. Ainsi, l’utilisation des GPS pour sillonner les champs, qui a facilité le travail de ceux qui traitent de grandes surfaces agricoles, concerne désormais presque un agriculteur sur deux. Les prémisses d’un pilote automatique, qui optimise les parcours des agriculteurs (donc la consommation de carburant) et allège leur travail sur les machines.
A la veille du salon de l’agriculture, à Paris, un constructeur de tracteurs, Case, va plus loin et présente le premier tracteur autonome du marché. Un prototype qui, programmé, peut traiter des hectares – labourer, semer, désherber, récolter – sans jamais se fatiguer, en sécurité, assure son constructeur (guidage et détection radar et laser), et sous réserve que le plein soit fait. Programmé à distance, il joue sa partition sous le contrôle (éventuel), par écran interposé, de son pilote.
Que les amateurs de balades rurales se rassurent, toutefois : rien de tout cela n’est encore envisageable dans nos champs. Parce que, de même que la voiture autonome n’a pas encore trouvé son cadre législatif et règlementaire, il n’est pas encore question de faire tourner un engin de plusieurs tonnes sans pilote. Quant à l'investissement à consentir, il n'est pas encore dit qu'il soit compatible avec les comptes tendus d'une grande part des exploitations.
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