C'est en tout cas ce qu'a annoncé le commandant en chef de la marine russe, l'amiral Viktor Tchirkov, à l'occasion de la mise sur cale de deux nouvelles corvettes au chantier naval du Nord (Saint-Pétersbourg) le 20 février dernier.
Par ces déclarations, le commandant en chef de la marine russe semble clore un débat qui durait depuis la fin des années 2000 sur la nature de la propulsion du futur destroyer : turbine à gaz ou nucléaire. La rupture de la coopération militaro-technique avec l'Ukraine, dans le contexte de la crise qui dure depuis fin 2013, a dû influencer la prise de cette décision. La Russie recevait en effet ses turbines à gaz de l'entreprise ukrainienne Zorya Machproject située à Nikolaïev. Les turbines ukrainiennes équipent en effet les premières unités des frégates russes des projets 11356M et 22350, mais suite à la rupture de la coopération avec Kiev, Moscou va devoir se tourner vers des fournisseurs indigènes, et c'est l’entreprise Saturn (Rybinsk) qui pourrait fournir les prochaines turbines à gaz. La Russie n'a plus mis sur cale de bâtiment à propulsion nucléaire depuis le croiseur atomique Pierre le Grand (Projet 1144, ex Youri Andropov) mis sur cale en 1986 à l'usine de la Baltique (St Pétersbourg).
L'annonce, faite au chantier naval du Nord, semble en outre confirmer que c'est ce chantier qui sera en charge de la construction du bâtiment dont la première unité pourrait être mise sur cale dès 2017, selon une source au sein du complexe militaro-industriel russe. Rappelons que le programme d'armement 2011-2020 ne comporte pas de budget dédié à la construction du futur destroyer, mais qu'en revanche, les fonds pour la phase d'avant-projet et d'étude ont bien été budgetés. Le programme d'armement 2016-2025 devrait quant à lui comporter le budget pour la constructions de plusieurs unités : l'idée, très ambitieuse, est de disposer à l'horizon 2025 de 12 unités, dont 6 dans la flotte du Nord et 6 dans la flotte du Pacifique.
Sur le design du bâtiment, il semblerait que ce soit l'institut Krilov qui ait remporté la mise sur le bureau Severnoe. Le 'Lider' déplacerait 14 000 tonnes pour 185 mètres de long et 22 mètres de large (donc équivalent de point de vue là au destroyer américain de type Zumwalt), et comme le montre les photos ci-après, de 6 complexe universels de tirs pour navire UKSK (pour les missiles de type Kalibr et Onyx notamment) et 12 VLS (système de lancement vertical) situés tous deux à l'avant, tandis qu'à arrière se situent encore 2 VLS, près de la plateforme pour hélicoptères. Krilov semble ainsi avoir revue sa copie depuis la visite que Vladimir Poutine avait réalisé dans les locaux du bureau d'étude en 2009 au cours de laquelle une maquette lui avait été présentée.
Ces déclarations prouvent que malgré les difficultés économiques, la Russie affiche toujours autant de détermination à vouloir assumer un statut de puissance navale. Au-delà du double défi technique que représente la construction d'un bâtiment de 14 000 tonnes à propulsion nucléaire, avec l'intégration de systèmes de navigation et de combat (cf. sérieuses difficultés d'intégration déjà rencontrées sur les frégates du projet 22350), il se pose également la question du budget. Combien coûte une unité ? L'objectif de 12 unités est-il réaliste d'un point de vue financier (ne parlons pas du calendrier qui est incantatoire) ? En période de difficultés économiques, si des coupes budgétaires sont à prévoir dans la marine, il est fort probable que les programmes de grands bâtiments de surface soient les premiers touchés.
Sources : Lenta, Flotprom, Bmpd, Paralay.com, RIA Novosti, Kommersant, forums.