L’Orient, fantasme de l’altérité radicale - France Cullture 58 mn  #Islam #Orientalisme #Essentialisme | Infos en français | Scoop.it

L’Orient, fantasme de l’altérité radicale - France Cullture 58 mn  #Islam #Orientalisme #Essentialisme

Tout un courant littéraire et artistique, l'orientalisme, a contribué à répandre une image ambiguë et fantasmée de l'Orient, qui perdure encore aujourd'hui. Comment ce courant s'est-il construit, et en quoi consiste l'image qu'il donne de l'Orient ? Et quels sont ses effets aujourd'hui ?

Cette semaine, et pour la dernière semaine de Cultures Monde de la saison, nous entreprenons un voyage : vers l’Orient, vers l’Amérique, l’Afrique ou enfin vers le « Grand nord ». Mais un voyage critique, nous interrogerons les représentations d’hier et d’aujourd’hui de ces contrées du monde tantôt adulées tantôt méprisées : comment expliquer l’attraction ou la répulsion qu’elles peuvent exercer ? Quel genre de représentations l’aventurier intrépide, le voyageur d’antan ou les médias d’aujourd’hui véhiculent-ils?

Et ce matin, nous commençons naturellement par un voyage vers l’Orient. Le cinéma, la littérature, la peinture ou encore la musique portent une image d’un Orient fantasmé qui en dit long sur le lien que nous avons entretenu – et que nous entretenons encore – avec ce monde arabo-muslman. L’un des derniers exemples en date : fin janvier, lorsque l’écrivain algérien Kamel Daoud, longtemps rédacteur en chef du Quotidien d’Oran et largement plébiscité en France et ailleurs pour son ouvrage Meursault contre-enquête - remake littéraire post colonial de l’Etranger de Camus, déclarait renoncer au journalisme. La raison : une tribune publiée au lendemain des événements dits « de Cologne » ces agressions de plus de plusieurs dizaines de femmes lors de la nuit de la Saint Sylvestre. Dans cette fameuse tribune, Kamel Daoud revenait sur cette nuit de violences commises par des hommes d’abord estampillés réfugiés, puis plus tard identifiés comme plutôt maghrébins, algériens et marocains et installés en Allemagne de longue date mais, en tout cas, comme des hommes - a priori - de culture arabo-musulmane. Kamel Daoud avait alors expliqué les agressions par la misère sexuelle des hommes en terre d’Islam.

Sa tribune avait provoqué l’ire de sociologues, historiens et anthropologues de parts et d’autres de l’Atlantique, qui lui avaient répondu dans une contre-tribune lui reprochant de « recycler les clichés orientalistes les plus éculés », de céder en quelque sorte aux « mythes », aux poncifs orientalistes qui englobent et caricaturent ledit Orient. Alors de quoi parle-t-on ? Que sont ces clichés orientalistes que relayerait Kamel Daoud ?

L’orientalisme, ce mouvement qui a irrigué l’art occidental tout particulièrement au XIXe siècle a été l’origine de toute une série de représentations : tantôt un Orient figure de l’immuabilité, sensuel, voluptueux, tantôt un Orient barbare, archaïque, décadent. Des représentations rarement neutres qui ont imprégné l’imaginaire occidental et qui auraient justifié le colonialisme sur fond de présupposée supériorité idéologique occidentale. C’est en tout cas la thèse d’Edward Saïd élaborée notamment dans son ouvrage fondateur : L’Orientalisme.

Mais quelle perception exactement ces représentations de l’ailleurs oriental a provoqué ? Quels modèles idéaux et surtout quel héritage encore aujourd’hui ? Existe-t-il, en dépit de la masse d’études savantes, un orientalisme latent dans le rapport de l’Occident à l’Orient ? Des représentations qui brouilleraient encore « notre » appréhension de l’Orient, vu comme un ensemble homogène, ou même, de l’Islam qui cristallise bien des peurs contemporaines ?

Une émission préparée par Clémence Allezard

Intervenants

  • Sonia Dayan-Herzbrun : philosophe et sociologue, professeure émérite à l'Université Paris Diderot-Paris 7
  • Mathias Enard : écrivain
  • Claire Gallien : Maître de conférences en littérature et civilisation britannique à l'Université Paul-Valéry Montpellier 3,