Travailler avec les entreprises, un intérêt à risque maîtrisé ? | EntomoScience | Scoop.it
Institut de recherche finalisée, INRAE collabore régulièrement avec des acteurs socio-économiques afin de faciliter l’appropriation des connaissances scientifiques et favoriser le développement d’innovations économiques, politiques ou sociétales.

 

Interview croisée entre Philippe Lénée, directeur du partenariat et transfert pour l’innovation à INRAE et Laurence Colinet, ingénieure spécialiste de l’évaluation des impacts de la recherche à INRAE.

 

INRAE INSTIT

Publié le 9 décembre 2021

 

Pourquoi la recherche publique collabore-t-elle avec des entreprises privées ?

 

Philippe Lénée :

 

« Travailler avec des partenaires c’est aller plus loin que si on était tout seul »

 

"En tant qu’établissement de recherche finalisée, une de nos missions est de participer au développement d’innovations pour résoudre des questions de société liées à l’environnement, l’agriculture et l’alimentation. Ces innovations sont le résultat d’un processus qui va de la production de connaissances scientifiques, l’invention, jusqu’à son utilisation par la société. Ce chemin est long ! S’arrêter à la production des connaissances ne garantit pas leur transformation en innovation ni leur utilisation par la société. En transférant nos résultats via des publications scientifiques ou des licences, on facilite l’innovation mais nous n’y participons pas, elle est faite par d’autres, sans notre accompagnement. Un autre intérêt de telles collaborations est d’amplifier le potentiel d’innovation.

 

Aujourd’hui, notre politique est de ne plus travailler « pour » mais plutôt « avec » les entreprises c’est-à-dire dans une démarche de co-conception et de co-réalisation, et de partager des questionnements, en incluant dans nos protocoles scientifiques les contraintes techniques ou économiques de production et de distribution. Les instituts Carnot sont au cœur de cette démarche de recherche partenariale en proposant une offre intégrée, adaptée au besoin des entreprises, de la start-up au grand groupe. INRAE porte cinq instituts Carnot qui couvrent les 14 domaines d’innovation d’INRAE.

 

Il y a une étape clé dans le chemin vers l’innovation, c’est la maturation technologique, c’est-à-dire la démonstration de la faisabilité de l’innovation en l’expérimentant à grande échelle ou dans des conditions préindustrielles. Cette phase est coûteuse notamment pour les PME/ETI. Le co-financement par la recherche publique de cette étape de maturation va alors permettre de  « dé-risquer » la technologie et de favoriser son adoption par les entreprises. Ainsi, la collaboration entre recherche publique et entreprises privées favorise l’innovation en partageant les coûts et les risques."

 

 

Laurence Colinet :

 

« Dans la presque totalité des cas étudiés par Asirpa, les scientifiques ne se sont pas limités à la production de connaissances mais ont accompagné leur diffusion dans la société. »

 

L’un des objectifs de nos recherches est qu’elles produisent des bénéfices pour la société, et pour cela, il est nécessaire que la connaissance diffuse au-delà de la sphère académique. Dans la presque totalité des 58 cas d’études analysés par la méthode Asirpa (Analyse des impacts sociétaux de la recherche, voir encadré), on constate que les scientifiques ne se sont pas limités à la production de connaissances mais qu’ils ont accompagné leur diffusion dans la société, soit par une expertise, soit par une collaboration avec des entreprises privées intéressées par leurs travaux.

 

Ils interviennent aussi auprès des pouvoirs publics pour alerter sur un danger par exemple. Mais toutes les recherches n’ont pas vocation à créer de l’impact pour la société. Certains travaux, plus fondamentaux, n’ont pas vocation à être utiles immédiatement. Ils peuvent l’être plus tard, en combinaison d’autres connaissances produites par INRAE, d’autres acteurs académiques ou d’autres acteurs socio-économiques. C’est cet ensemble qui va contribuer à avoir un impact, au cours d’un processus de long terme (une vingtaine d’années est parfois nécessaire entre les premières recherches et la généralisation des impacts dans la société).

 

 

 

Pour aller plus loin
 
 
La méthode Asirpa, initiée en 2010 à l’Inra, vise à analyser les impacts socio-économiques des recherches à partir d’une méthode originale qui, au de-là des impacts économiques, évalue les effets directs et indirects des recherches sur les politiques, l’environnement, la santé, le territoire et le social. La démarche repose sur la réalisation d’études de cas selon des modalités adaptées, et une démarche qui se déroule en 3 étapes : la chronologie, le chemin d’impact, et les dimensions des impacts. En 2021, près de 60 cas ont été analysés par la méthode Asirpa.
 

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[Image] Recherches d'INRAE : quels impacts pour la société ? | INRAE INSTIT https://www.inrae.fr/actualites/recherches-dinrae-quels-impacts-societe

 

DOSSIER - Les travaux d'INRAE ont souvent une portée directe dans notre vie quotidienne. Des impacts économiques bien entendu, mais aussi environnementaux, politiques ou encore sanitaires. Grâce à la méthodologie issue du projet Asirpa, l’Institut est désormais capable de les analyser.

 

Publié le 20 juillet 2015 (mis à jour : 10 décembre 2021)