Les médias face à leur destin

Dans leur livre La gratuité à quel prix ?, Joëlle Farchy, Cécile Méadel, Guillaume Sire dressent un portrait complet des acteurs et modèles économiques présents sur le marché des biens culturels en ligne. Ils pointent par la même occasion le problème crucial du partage de la valeur entre des acteurs comme Google, Apple ou Amazon et les créateurs de contenus, notamment quand la gratuité est la règle. Gratuité illusoire soit dit en passant, car il y a en réalité deux prix à payer: l'omniprésence de la publicité d'une part, la monétisation de vos (de nos) données personnelles - goûts, habitudes, voire opinions politiques, religieuses - d'autre part... sans compter le coût d'un abonnement internet, le prix de l'ordinateur et j'en passe.

Toutefois, les chercheurs ne donnent pas de solutions concrètes à l’inégale répartition des revenus. Et c'est bel et bien sur ce point que le bât blesse pour les groupes de presse "Google dépendants".

La home page n'est plus, loin s'en faut, la vitrine chérie des sites de presse, pure player ou non.

Les référenceurs ont tellement bien fait leur travail que de plus en plus de lecteurs arrivent de la vaste toile. Une bonne chose pour les "clics", mais pas forcément pour le portefeuille.

Qui contrôlera les données fournies (volontairement ou involontairement) par ces lecteurs à l'avenir? De la réponse à cette question pourrait bien dépendre la survie de la presse traditionnelle telle que nous la connaissons aujourd'hui.

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Cibler les jeunes urbains branchés de la génération Y, c'est bien. Mais sont-il prêts à payer pour s'informer avec ces sujets décalés qu'ils plébiscitent? Il ne faut pas oublier qu'ils ont été biberonnés à l'actu gratuite en accès libre partout sur internet.

Le positionnement marketing est clair, bien résumé par StreetPress qui parie sur la méthode du «point de vue désaxé» et sur une écriture «cash», «parlée», avec un ton «très Internet» : «Le lecteur doit sentir qu’on parle la même langue.» Mais ça ne change rien au problème.

Reste les appels du pied aux annonceurs qui, pour le coup, peuvent toucher une cible clairement identifiée. Mais le marché publicitaire étant ce qu'il est...

Parmi les médias, les sites issus de la presse écrite sont les plus visibles (plus de 60% des liens) devant les pure-players et des sites radio-tv.

La Commission européenne lance une procédure d’infraction contre le TVA réduite accordée aux sites d’information.
Extrait

"La directive sur la TVA interdit d’avoir un taux réduit, et encore moins super réduit, sur la presse en ligne. Pour changer la donne, il faudrait donc renégocier cette législation européenne. Mais toute décision fiscale en Europe se fait à l’unanimité, soit des années de négociations sans garantie de succès."

Longue et pertinente analyse de FRANCK BOUSQUET et NIKOS SMYRNAIOS.

Jol Press n'est pas le premier pure player à lancer un appel aux dons . Généralement, ce n'est pas bon signe. Signe que, à quelques exceptions près dans le haut de gamme, le modèle économique des pure players reste à inventer.

• Comment les pureplayers dédiés au son vont-ils rebattre les cartes au sein de l’écosystème radio?

• Comment vont se répartir les usages entre tous les canaux (historiques et numériques)?

• Synergies numériques entre groupes radio et groupes TV : va-t-on vers une offre « cross-canal »?

• Personnalisation des contenus, mobilité… qu’écouterons-nous demain, via quel outil, quelle interface? 

Aux Etats-Unis, le nombre de journalistes en presse quotidienne traditionnelle a baissé de 16.000 en six ans, de 2006 à 2012, alors qu'il  y a eu 5.000 créations d'emplois, dans le même temps, dans le journalisme numérique. Si les nouveaux outils permettent de produire plus, avec moins de monde, c'est malheureusement souvent au détriment de la qualité... sauf exception comme Mediapart, preuve que la qualité du contenu est maintenant plus importante que le contenant. En outre, ce qui n'est pas dit dans cet article, c'est que ces journalistes web sont généralement moins bien payés que leurs aînés.

Exemples à l'appui, Le Monde rapporte qu'il "existe sur le Web une multitude de lieux où s'élaborent des discours critiques et politiques sur une multitude de sujets". Des blogs le plus souvent. Des blogs pertinents, enrichissants... mais rarement pour leur auteurs. Pour alimenter un média alternatif, mieux vaut avoir un travail alimentaire à côté!

"En Midi-Pyrénées, la sortie de « Toulouse Mag » et de la lettre économique « Midi Presse Service » (15 salariés), filiale de « La Dépêche du Midi », a été arrêtée. « Le titre a pris de plein fouet l'arrivée de plusieurs "pure players" », analyse un connaisseur des médias locaux"... qui cite la concurrence du pure player Carré d'info en oubliant que ce dernier met aussi la clé sous la porte en invitant ses soutiens à un pot de départ le 12 février.

Par ailleurs, les titres du groupe La Dépêche continuent jusqu'à la fin des abonnements en cours. En revanche, ils ne prennent plus d'abonnements ou de réabonnements dans le but de s'arrêter effectivement dans quelques mois.

 - Selon le New York Times: « Vox Media est une entreprise née à l’ère du digital, une compagnie technologique qui produit des méidias et non une compagnie de médias qui utilise des technologies."  Ils ont opté pour "des annonces grand format. L’unité Vox Creative surfe sur la vague du brand content ."

- Autre succès, La Presse, à Montréal. L’application est gratuite et les revenus proviennent de publicités multimédias propres aux tablettes, interactives, élaborées et chères.

- Rare exemple de magazine papier ayant réussi son passage dans le numérique, le mensuel international gratuit Vice, qui dispose d’une offre multimédia et d’une abondance de contenus rendue possible par la mutualisation de l’ensemble des éditions de Vice.

Excellent article qui ne se contente pas d'aligner des chiffres ou des noms mais qui détaille aussi les modèles économiques choisis.

Extraits

> En terme de «marques médias» en ligne, le rapport 2015 révèle que les Français préfèrent 20 Minutes, Le Monde et… Google News en 3e position, qui devancent Le Figaro. Par comparaison, l’agrégateur n’arrive qu’en 9e place en Grande-Bretagne, derrière les historiques (BBC, Sky News, Guardian), et 5e en Allemagne. C’est dans les pays latins (Italie et Espagne) que Google fait d’avantage l’actualité.

> Les réseaux sociaux sont de plus en plus utilisés comme une source d’information : 34% des répondants affirment y avoir recours, contre 19% un an plus tôt.

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CHIFFRES A RETENIR

> 16,1 millions d'euros ont été accordés à 25 médias.

> Parmi les projets financés par ce fonds, cogéré par les éditeurs de presse et Google, les dossiers des pure players (7 projets), de la presse quotidienne régionale (5 projets) et de la presse nationale et les hebdomadaires spécialisés (4 projets chacun) arrivent en tête.

> Comme en 2013, où 15,7 millions d'euros avaient été alloués, la totalité de l'enveloppe de 20 millions d'euros n'a pas été engagée. Ces sommes seront reportées sur la troisième année du fonds, en 2015.

Extrait

Les grands journaux américains, comme le New York Times ou le Wall Street Journal, ont débauché des professionnels aguerris de la télévision pour développer et professionnaliser leur service vidéo, et le phénomène touche aussi les pure-players de l'information sur internet, renchérit Bertrand Pecquerie, directeur général du Global Editors Network (GEN).

Bertrand Pecquerie estime que la France participe de cette tendance mondiale. "Sauf, et c'est une vraie contradiction, que l'on va vers des nouveaux formats courts à regarder sur les portables...".

Pour Alexis Madrigal, le succès de certains pure players tient plus à la manière de raconter une information que sur cette dernière elle-même. Leur succès tiendrait donc dans leur capacité à s'adapter aux attentes de leur public... tout comme le font les professionnels du marketing, résume Camille Fumard.

La pub numérique pèse encore peu, à peine 10% des recettes globales aux Etats-Unis, soit 3,4 milliards de dollars en 2013, et 8,7% en France (710 millions d’euros tous médias confondus).

Au-delà de ça, cet article des Echos pose la bonne question... mais n'apporte aucune réponse.

Le fonds Google a décidé de financer 6 projets de la presse quotidienne régionale, 5 de la PQN,  5 de pure players, 3 de news magazine, 1 mensuel, le site internet d’une chaîne d’informations en continu, un hebdo et un gratuit.

Paywall, data journalisme et vidéo sont mis en avant.

Montant total alloué en 2013 : 16 384 440 euros

Montant moyen alloué : 712 k euros

Qu'il s'agisse d'un coup ou non, l'étude commandée par Ouest France sur le bassin nantais est très intéressante. Une bonne façon de voir qui se partage le gâteau publicitaire.

Veille oblige, le sujet me permet de donner un coup de projecteur sur Terri(s)toires, un Webzine qui met en relief les initiatives citoyennes, cultures et modes de vie en Bretagne et dans les Pays de la Loire. 

Déboussolés par les lecteurs, qui sont de plus en plus consommateurs d'info mais qui ne veulent pas la payer, les médias ne savent plus sur quel pied danser. Les médias traditionnels papier se sont adossés il y a longtemps à des sites web gratuits qu'ils sont de plus en plus souvent en train de transformer en paywall. Et voilà maintenant que les pure players réfléchissent de plus en plus à l'idée de proposer une édition papier à côté de leur site, pour proposer de nouveaux espaces aux annonceurs.

Seul petit problème, les médias classiques n'ont pas la culture web... et vice versa. Et si les uns et les autres ouvraient tout simplement leurs portes à des journalistes issus d'autres cultures, pour enfin aller vers un bi-média digne de ce nom... et (donc) monétisable!

Eh bien ça, c'est fait :-) En attendant la réaction de l'Europe :-/