Les médias face à leur destin

Le quotidien La Croix lance le mercredi 20 janvier 2016 une formule plus moderne pour son journal papier et un site internet plus ambitieux. Passé au format tabloïd en 2013, le quotidien du groupe Bayard adopte une version plus sobre et abandonne son logo sur fond bleu au profit d'un orange éclatant, signe de la "vitalité" du journal, selon ses dirigeants.

Le journal a vendu 90.000 exemplaires par jour en moyenne en 2015, grâce à la fidélité de ses abonnés qui représentent 80% de ses ventes. Ses ventes en kiosques ne représentent que 4.500 exemplaires par jour.

Il faut saluer la campagne multi supports qui accompagne le lancement de cette nouvelle formule, que ce soit sur le print, le mobile ou le web. Vraiment novateur. Bravo.

Après  le « Video In Print », et plus généralement le le mariage digital-print, première mondiale signée  C&A qui permet à certains lecteurs du magazine people Contigo de pouvoir partager sur le papier leur préférence pour un vêtement... sur Facebook.

Bizarre, le bouton unlike n'est pas prévu ;-)

Extrait

La direction du New York Times étudierait le lancement d’une version plus courte de son édition papier quotidienne. L’objectif serait d’augmenter par tous les moyens le chiffre d’affaires généré par l’édition papier du journal. 

Commentaire

Malgré le développement du numérique, le print reste le nerf de la guerre.

Lire aussi

Encore une synthèse très utile sur le rapport secret du New York Times et sur les orientations à donner à sa stratégie numérique. Elle est signée Alice Antheaume.

Nombreux chiffres à comparer avec ceux de votre propre journal, amis journalistes! Entre autre le tableau qui montre que, même si les trois quart des revenus du NYT proviennent encore du papier (abonnements et publicités), les lecteurs, eux, sont en majorité présents sur le numérique (Facebook, Twitter, abonnés aux newsletters, aux alertes, lecteurs sur mobile ou ordinateur…).

Lire aussi Un long chemin vers le Digital First. Les 10 phrases clés du rapport confidentiel sur la digitalisation du New York Times
 

Selon Jean-Christophe Tortora (le Toulousain patron de La Tribune), des salariés de Libé l'auraient contacté pour reprendre le titre:

Surprise, il n'a pas dit non, précisant: ""Dans un tel projet, je maintiendrai le papier, même si dans quelques années à l'évidence il y aura une évolution majeure sur le numérique. Maisaujourd'hui il serait totalement prématuré d'abandonner le papier pour Libération"

Reste l'éternelle question. Que rapportent les lecteurs du web? Pas grand chose. Même si ça fait du bien à l'égo de se dire que les lecteurs augmentent, la vraie question est: Pour quoi sont-ils prêts à payer?

Voici d'ailleurs un autre article au titre moins optimiste sur le même sujet, en Suisse: "Le lectorat de la presse romande s'amenuise et vieillit".

Un utilisateur de téléphone mobile sur quatre paramètre des alertes sur des applications de news ; et avec les réseaux sociaux, "les internautes jouent un rôle actif sur la circulation de l’information : 17% des Français y partagent des actualités", rapporte Mediametrie.

En voilà une bonne nouvelle! 91% des Français suivent l’actualité au moins une fois par jour... grâce à internet... qui les a habitués à ne pas payer. Reste à inverser la vapeur. Première tentative avec les paywalls. Pas sûr que ça marche si les journaux n'augmentent pas leur niveau de qualité.

Actus à suivre dans les médias:

- RFI rénove son site.

- Editialis créé un nouveau mag. appelé Marketing . Ce mensuel de 116 pages existe en version print et digitale.

- So Foot Junior arrive en kiosque le 16 avril.

- Le site e-commerce de luxe Net-a-porter lance magazine bimensuel papier appelé Porter .

Tout ça pour dire que certains n'ont pas peur de se lancer dans la presse papier. C'est sans doute qu'elle a encore un avenir... au moins dans les marchés de niche ;-)

Désaffection des acheteurs, de plus en plus âgés et de moins en moins fidèles, et difficulté à monétiser l'audience, sur le papier comme en version numérique onr fragilisé la presse au point qu'elle est maintenant arrivée à un seuil critique. 

Le Cercle des Echos explore quatre pistes pour retrouver un business model.

Piqûre de rappel par La Voix de Nord: 

"Au moins 300 postes de journalistes seront détruits cette année, selon le Baromètre de l'emploi Journalistes 2013. Déjà 2012 avait vu 1.158 suppressions d'emplois dans la presse, dont 600 journalistes. Derniers exemples, Le Monde veut supprimer 29 postes à Courrier International, Nice-Matin 148 postes, le Groupe Sud-Ouest 180, L'Equipe fait partir 71 salariés et 20 minutes va supprimer son service photo. Pour ne pas licencier, Libération négocie avec ses employés des baisses de salaire."

Pendant la baisse des ventes papier de 3,4% (-5,1% pour la PQN; -3,9% pour la presse magazine; -3,5% pour la PQR),  la fréquentation des supports numériques de presse a progressé de 23% en terme de visites.

Merci pour cet appel au dialogue entre les journalistes gardiens du temple papier et les journalistes "innovateurs insolites et provocants" du web. "Les deux parties, où règnent de forts égos, se détestent et ne veulent pas se comprendre", regrette Robert Amlung, directeur de la stratégie numérique de la chaîne publique allemande ZDF.

En France, ce n'est pas loin d'être la même chose. Or, nous n'avancerons qu'ensemble. 

Chroniqueur et blogueur au @nytimes, David Carr est un fidèle lecteur de la presse papier. Mais pour les grands événements, rien ne vaut le flux du temps réel dit-il.

Chronique d'une mort annoncée pour le print? Probable, mais pas certain si le print est en mesure d'apporter de la plus value en terme d'analyse.

L'espoir est donc de "reconquérir un lectorat de centre-ville", dans une cité qui gagne chaque année des milliers d'habitants, et de séduire les annonceurs qui voudront les atteindre, indique le directeur général adjoint du groupe La Dépêche du Midi, Jean-Nicolas Baylet.

Sur le même sujet, lire cet article du Parisien.

Basé à Perpignan, il est conçu et fabriqué par une petite équipe : un rédacteur en chef, un maquettiste et une dizaine de journalistes, jeunes et déjà formés au multimédia.

Déboussolés par les lecteurs, qui sont de plus en plus consommateurs d'info mais qui ne veulent pas la payer, les médias ne savent plus sur quel pied danser. Les médias traditionnels papier se sont adossés il y a longtemps à des sites web gratuits qu'ils sont de plus en plus souvent en train de transformer en paywall. Et voilà maintenant que les pure players réfléchissent de plus en plus à l'idée de proposer une édition papier à côté de leur site, pour proposer de nouveaux espaces aux annonceurs.

Seul petit problème, les médias classiques n'ont pas la culture web... et vice versa. Et si les uns et les autres ouvraient tout simplement leurs portes à des journalistes issus d'autres cultures, pour enfin aller vers un bi-média digne de ce nom... et (donc) monétisable!

Eh bien ça, c'est fait :-) En attendant la réaction de l'Europe :-/

Le gouvernement a annoncé ce vendredi qu'il allait très vite réduire la TVA sur la presse en ligne à 2,1%, contre 20% actuellement, au risque d'encourir des sanctions de Bruxelles. Une première victoire pour Mediapart et toute la presse en ligne qui réclamait une égalité de traitement avec la presse papier. 

Lire aussi cet article du Monde: http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2014/01/17/presse-en-ligne-vers-une-tva-a-2-1-alignee-sur-la-presse-papier_4350111_3236.html

Une bourde commise sur le site du Télégramme le jour de Noël illustre le réflexe de rédactions qui sont encore très tournées vers le papier, avec des journalistes qui gardent le réflexe de le privilégier.