Les abeilles menacées par un pesticide omniprésent | Variétés entomologiques | Scoop.it

Il y a quelque chose qui cloche dans les ruches de Steve Martineau au printemps. Plus précisément, à la saison où les agriculteurs sèment le maïs et le soya dans les champs qui s'étendent à perte de vue autour de sa miellerie de Saint-Marc-sur-Richelieu, en Montérégie [Québec].

« Il y a une reine qui a arrêté de pondre pendant sept jours, dit-il, en montrant une de ses 250 ruches. C'est pas normal. L'an dernier aussi on a eu ça. »

Devant plusieurs de ses ruches, un carré de tissu est tendu. Un linceul pour des ouvrières qui meurent mystérieusement.

« Dans une ruche normale, quand une abeille meurt, les autres la transportent le plus loin possible, dit M. Martineau. C'est pour éviter d'attirer des prédateurs. Des abeilles qui agonisent comme ça à un pied de leur ruche, incapables de trouver l'entrée, c'est pas normal. »

« Il y a beaucoup d'abeilles qui perdent leur sens d'orientation, dit-il, en montrant un insecte qui tourne en rond sur le tissu. Et les abeilles les plus affectées ne reviennent même pas ici, elles meurent dans le champ. »

 

Par Charles Côté
LA PRESSE

Publié le 26 mai 2013

 

"Tous les deux jours, Olivier Samson-Robert, un étudiant à la maîtrise de l'Université Laval, vient compter les corps morts et les emporte pour analyse, dans le cadre d'un projet de recherche financé par le ministère de l'Agriculture.

 

L'étudiant est sur la piste d'un suspect : une famille d'insecticides appelée néonicotinoïdes. Ils sont employés comme enrobage des semences de maïs et de soya et se répandent dans la plante tout au long de sa vie.

 

Cent fois la dose mortelle

 

Les composés les plus employés s'appellent clothiamidine et thiamétoxane. Depuis quelques années, la quasi-totalité des semences de maïs vendues au Québec et plus de la moitié des semences de soya sont enrobées avec ces produits.

 

Et cela se vérifie dans les champs où butinent les abeilles et où elles s'abreuvent. « L'an dernier tous les échantillons d'eau contenaient de la clothiamidine et 60 % de la thiamétoxane, dit M. Samson-Robert. Et on parlait de taux à 100 fois la dose mortelle. »

 

Comment ces poisons ont été autorisés alors qu'ils menacent l'insecte le plus utile à l'agriculture ? Les fabricants disaient que les abeilles ne butinent pas le maïs et ne seraient pas exposées.

 

Mais ils n'avaient pas prévu d'autres moyens d'exposition.

 

« Il y a des poussières de néonécotinoïdes qui sont dégagées avec les semoirs pneumatiques, affirme Valérie Fournier, professeure et chercheuse à l'Université Laval. La poussière se dépose sur d'autres plantes comme les pissenlits, qui sont très importants pour les abeilles au printemps. La poussière se dépose aussi sur l'eau où les abeilles s'abreuvent. Au printemps, c'est la première source d'exposition. »

 

[...]

 

[Image] Tous les deux jours, Olivier Samson-Robert, un étudiant à la maîtrise de l'Université Laval, vient compter les corps des abeilles mortes et les emporte pour analyse.