CHRONIQUE. L’Assemblée nationale a voté la réintroduction des néonicotinoïdes pour protéger les champs de betteraves. Il existe pourtant d’autres possibilités que le sucre de betterave, qui nuit à la santé, explique dans sa chronique Jean-Baptiste Fressoz.
Réintroduction des néonicotinoïdes : « La crise sucrière actuelle a moins à voir avec les pucerons qu’avec la fin des quotas européens en 2017 »
Publié le 28.10.2020 (abonnés)
"Pendant la monarchie de Juillet (1830-1848), une grande controverse enflamma tout ce que la France comptait de politiciens et d’économistes. On l’appela la « question du sucre ». En jeu, une affaire douanière : fallait-il, oui ou non, défendre le sucre de betterave « indigène » en élevant une muraille tarifaire contre son rival, le sucre de canne ?
Des centaines de brochures, de livres, de pétitions, des jours de débats parlementaires furent consacrés à cette question. Comme l’a montré l’historien David Todd, à travers le sucre se discutait en fait « l’identité économique de la France », sa nature, sa puissance – maritime, continentale ou impériale –, sa place dans le monde, ses relations avec ses possessions d’outre-mer et bien d’autres choses encore. On discuta aussi d’innovation nationale avec, déjà, beaucoup d’emphase.
Hécatombe des insectes volants
Selon le célèbre agronome Mathieu de Dombasle (1777-1843), la betterave sucrière était « une des plus importantes découvertes des temps modernes ». Le futur Napoléon III expliquait qu’elle devait « résoudre, sinon complètement, du moins en grande partie » le problème du paupérisme. Pour ses promoteurs, la culture de la betterave devait permettre de fixer les pauvres dans les campagnes et d’éviter qu’ils ne viennent rejoindre les rangs du prolétariat révolutionnaire.
Presque deux cents ans plus tard, la question du sucre a été sommairement expédiée par le gouvernement alors que les enjeux n’ont sans doute jamais été aussi importants. Dans la nuit du 5 au 6 octobre, suite à une attaque de pucerons sournois, l’Assemblée nationale a voté la réintroduction des néonicotinoïdes, une classe d’insecticides surpuissants dont les scientifiques ont démontré, au-delà de tout doute, la responsabilité dans l’immense hécatombe des insectes volants – une diminution de trois quarts de leur population en trente ans, peut-être la plus grande catastrophe écologique de l’histoire.
Pour justifier ce bond environnemental en arrière, le ministre de l’agriculture, Julien Denormandie, déclarait, catégorique : « Il n’y a pas d’alternative. » Comment en est-on arrivé au point où un ministre peut déclarer froidement qu’il n’y a pas d’alternative à la disparition des insectes ?"
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via Tue, 10 Nov 2020 11:23:15 +0100 (CET)
De : Chez Pol - Libération <newsletter@newsletter.liberation.fr>
"Communistes, Insoumis et Socialistes mais aussi membres de feu le groupe EDS (ex-marcheurs de gauche) se rassemblent ainsi une nouvelle fois pour déposer, ce matin selon nos informations, un recours au Conseil constitutionnel sur le projet de loi Néonicotinoïdes. Durant les débats, la gauche n’avait cessé de dénoncer le retour temporaire de cet insecticide tueur d'abeilles pour «sauver» la filière betterave. Les formations à l’origine de l’initiative en feront un service-après-vente en début d’après-midi."