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Européisme et nazisme... Das Jahr 2015 (Partie 3/3)

Européisme et nazisme... Das Jahr 2015 (Partie 3/3) | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Photo : Yórgos Ioánnou (1927-1985)

 


Européisme et nazisme... Das Jahr 2015 (Partie 3/3)

Par Panagiotis Grigoriou (*)

 

Suite des parties 1/3 et 2/3 



Je remarque une fois de plus que ce livre n’est toujours pas traduit en langue française, et que le plus souvent, les biographies des personnages historiques précédemment évoqués sont inexistantes ou évasives dans la documentation en langue française, et très exactement, lorsqu’il est question de la période du nazisme. Il faut alors se documenter autrement, en consultant la bibliographie (et même internet), en anglais ou en allemand.

 

Par exemple, Wikipédia en français, mentionne certes, que lorsque Robert Schuman (comme on sait, ministre sous la Troisième République, sous le Gouvernement de Vichy et sous la Quatrième République), s’est réfugié sur ses terres lorraines, il a été arrêté par la Gestapo et mis au secret dans la prison de Metz avant d’être transféré à Neustadt (actuelle Rhénanie-Palatinat) le 13 avril 1941, grâce à un allègement des conditions de détention obtenu par Heinrich Welsch. Cependant, il faut lire (un peu) l’allemand, pour apprendre que Heinrich Welsch, Ministre-Président de la Sarre en 1955 et 1956 avait été le Représentant spécial de l’autorité du commissaire du Reich pour la réunification de l’Autriche au Reich allemand, et de 1940 à 1945, le Chef de l’administration judiciaire allemande en Lorraine occupée.

 

Notre regretté Yórgos Ioánnou, très humble dans son existence et aux manières... comptées comme on dit parfois, il était tout le contraire d’un écrivain prétentieux, méconnaissait éventuellement certaines des histoires... parallèles de l’européisme, revisitées par Mark Mazower. Cependant, le grand écrivain n’ignorait pas le sens de l’histoire.

 

D’où son hostilité devant l’européisme de 1978... comme de 1940. Ioánnou portait en lui les stigmates de l’Occupation allemande, de l’extermination de la très importante communauté juive de Thessalonique, sa ville, ceux de la famine et du sang versé enfin, et cela, jusqu’à l’expérience de la guerre civile. Au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, les rentrées fiscales de l’État (délabré) en Grèce couvraient à peine 6 % quant à ses besoins et dépenses (Mazower, page 273).

 

Mark Mazower (et il n’est pas le seul parmi les historiens), estime, d’après ses sources, que la guerre civile en Grèce avait été une politique délibérée de la part des occupants allemands. La famine en Grèce, la seule famine en Europe du Sud et de l’Ouest à l’exception de celle qu’éprouvèrent les Pays-Bas, mais pour d’autres raisons, rappelait plutôt la « gestion des territoires » conquis plus à l’Est (Pologne, Union soviétique), et les... millions de morts, entre massacres et famine organisée à travers ces espaces. En tout cas, les autorités occupantes allemandes n’ont rien fait pour épargner la famine aux Grecs, plus de cent mille morts ont été dénombrés à Athènes et dans les Cyclades, durant déjà le premier hiver de l’Occupation en 1941.

 

« Nous ne devons pas nous faire du souci pour les Grecs. D’autres après eux seront touchés par le même phénomène », déclarait alors Hermann Göring au printemps 1942. Et la presse allemande du moment en rajoutait : « Est-ce vraiment nécessaire de gaspiller les vivres destinés aux forces de l’Axe pour maintenir en vie les habitants des villes grecques ? Sachant alors, que ces gens sont plutôt des voleurs, des trafiquants, des contrebandiers, des entremetteurs et des oisifs ». Ou encore, « Il faut encore voir jusqu’où iront-elles les forces de l’Axe, si durablement éprouvées dans leur lutte, s’agissant de nourrir en Grèce, une population de quelques millions de fainéants » (Mazower, page 280).

 

Un... argumentaire assez parallèle en somme de celui en usage en ce moment... lorsqu’il est question du... devoir des Grecs et de leur comportement vis-à-vis de « leur » dette, ce qui ne veut pas dire cependant que les Allemands d’aujourd’hui sont les nazis d’hier, mais peut-être plutôt, que certains stéréotypes et survivances culturelles peuvent alors durer longtemps (en Allemagne, en Grèce ou ailleurs) et surtout, que les élites ne changent pas, car la géopolitique demeure, mondialisation ou pas d’ailleurs.

 

Résumons. La mise à mort du gouvernement SYRIZA/ANEL est en cours d’exécution par ces mêmes élites européistes, avec... l’aimable participation des funestes népotistes d’Athènes. Aucune reculade Syriziste ne leur suffira dans la mesure où, quoi qu’il arrive, ce gouvernement porte en lui le germe de la résistance. Et à notre connaissance, des amis (politiques) de SYRIZA en Allemagne en sont bien conscients, d’où un certain désarroi pas forcément exprimé publiquement.

 

D’autres amis allemands voudraient aussi stopper la machine infernale de l’intérieur, ils sont très minoritaires, en tout cas pour l’instant. En plus, du point de vue des élites, il va falloir raconter quelque chose aux autres peuples de la funeste UE, surtout maintenant. Car les élites européistes du temps de la mondialisation ne semblent pas vouloir épargner à terme les habitants de l’Eurocentre, du sort exactement réservé aux Grecs et aux autres... peuplades du Sud.

 

 

Mark Mazower note que le répertoire d’idées et de pratiques dans lequel puisèrent les nazis (pour en rajouter), est bel et bien profondément européen, et plus précisément colonialiste. Contrairement aux autres Puissances (France, Grande-Bretagne), l’Allemagne a tenté de coloniser l’Europe, telle fut enfin la grande... innovation du Vingtième siècle. Parmi ces pratiques, le double système juridique, le double statut, « mutatis mutandis » allant de l’indigénat... à la citoyenneté, par exemple.

 

Ainsi et encore, les régimes politiques imposés au nom de la dette et par le mémorandum comportent autant un paramètre bien de ce type. Cela n’est pas encore tout à fait visible par tout le monde et pourtant. De ce point de vue, l’européisme « progressiste » du Parti de la gauche européenne (SYRIZA compris), tourne alors dans un vide abyssal et surtout, cela se voit. Les travailleurs en Grèce se demandent alors au nom de quel principe, les droits du travail, la Sécurité sociale, les salaires ou enfin, le sens de la vie et de la mort ne sont plus les mêmes en Grèce et en Allemagne. Après tout, au bout de cinq années de saignée sociale, humaine et symbolique, la dette ne cesse alors d’augmenter.

 

La mise à mort du gouvernement SYRIZA/ANEL, ou sinon sa soumission totale, sous forme par exemple de coalition nouvelle incluant le PASOK et le parti initié entre Berlin et Bruxelles « To Potami » (Rivière), ce qui revient au même pour la Gauche et pour ANEL, n’est pas aussi facile que prévue. Les élites oublient parfois que les peuples arrivent à mettre leur grain de sable dans l’Histoire.

 

Nos annalistes et écrivains d’hier et d’aujourd’hui, entrevoient parfois assez clairement les fentes du temps humain qui est le nôtre ; ils y mettent autant et à leur manière, le grain de sable nécessaire. Leur seul héritage à la manière de Yórgos Ioánnou. Jusqu’à la prochaine fois.

 

Enfin, c’est la première fois qu’un dirigeant d’une des trois composantes de la Troïka, formée par le FMI, la Commission et la BCE, le dit face caméra. « L’argent a été donné pour sauver les banques françaises et allemandes, pas la Grèce », a déclaré Paulo Batista, l’un des 19 élus parmi les 24 membres du conseil d’administration du Fonds monétaire international. »

 

Rixes et combats de rue... planétaires. « Das Jahr 2015 », Année 2015.

 

 

Par Panagiotis Grigoriou (*) - greekcrisis.fr – le 8 mars 2015

 

(*) Panagiotis Grigoriou : historien et ethnologue, il porte un regard à la fois ethnographique et de chroniqueur (correspondant en France de NemecisMag 2000-2008). Depuis 2008, parcourant une bonne partie de la Grèce continentale, il s’est rendu sur plus d'une trentaine d'iles en mer Égée et Ionienne, il a rencontré le quotidien de plusieurs milieux sociaux et culturels, touchant aux fractures qui se multiplient tant au niveaux des syllogismes collectifs, qu'à celui des relations interpersonnelles dans un contexte de temps de mutations… (Source : blogger.com)

Koter Info's insight:


Très intéressant et développé en 3 parties, voir :

  1. partie 1
  2. partie 2
  3. partie 3


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La campagne pour le démantèlement des retraites aux États-Unis

La campagne pour le démantèlement des retraites aux États-Unis | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Photo : © Gile Michel / Sipa - lepoint.fr


 

La campagne pour le démantèlement

des retraites aux États-Unis

 Par Andre Damon

 

Les États et les villes des États-Unis sont engagés partout dans une offensive directe contre les retraites des salariés du secteur public, ou fonctionnaires, qu’ils soient actifs ou déjà à la retraite. Ces attaques sont menées dans le mépris le plus total de la loi et foulent aux pieds les dispositions inscrites dans la constitution et qui protègent des prestations sociales gagnées par les salariés au cours de décennies de dur travail.

 

Au début du mois, le juge des faillites Christopher Klein a signé un ordre autorisant la ville californienne de Stockton, à poursuivre son projet de réduction drastique des retraites des salariés dans le cadre d’un accord passé en vue de sortir d’une procédure de faillite. L’accord conclu éliminera les prestations de soins de santé des retraités de la ville et réduira les retraites des salariés nouvellement recrutés, tout en augmentant les cotisations de retraite de ceux en activité.

 

Au moment où il a annoncé sa décision d’autoriser les tribunaux des faillites à réduire drastiquement les prestations des retraités, Klein n’a pu cacher son enthousiasme. Il a déclaré que CalPERS, le système de retraite des employés du public de l’État de Californie, « a imposé d’une main de fer son point de vue dans cette affaire. » Mais, s’est-il vanté, il s’est avéré que le fonds de pension « avait une mâchoire de verre. »

 

Dans l’Illinois, où le juge itinérant John Belz avait annulé l’année dernière une loi de 2013 qui réduisait les retraites des fonctionnaires, les responsables de l’État sont une fois de plus sur le sentier de la guerre. La procureure générale Lisa Madigan, une démocrate, s’apprête à aller devant la Cour suprême de l’Illinois pour plaider que, bien que la constitution de l’État déclare explicitement que les retraites des salariés du public « ne seront pas diminuées ou altérées, » les « pouvoirs de police » de l’État lui permettent de réduire drastiquement au nom de la « sécurité publique » les prestations des retraités actuels.

 

L’argument se base sur une interprétation autoritaire et absurde du Dixième amendement de la Constitution des États-Unis qui spécifie que « les pouvoirs non délégués aux États-Unis par la Constitution, ni prohibés aux États, sont réservés aux États respectivement, ou au peuple. » Les Démocrates de l’Illinois avancent que cet amendement permet à l’État de supprimer des prestations de retraite qui sont protégées par la constitution sans même passer par un tribunal de faillite.

 

Si cet argument est accepté par la Cour suprême de l’Illinois, il créera un précédent et permettra à chaque État aux États-Unis de s’en prendre aux retraites des salariés du secteur public.

 

En Pennsylvanie, l’Assemblée législative de l’État est en train de débattre d’un projet de loi qui gèlerait les prestations de retraite des fonctionnaires actifs ou à la retraite et qui remplacerait le régime de retraite des salariés nouvellement recrutés par un plan de style 401(k) [système d’épargne retraite par capitalisation]. À Jacksonville, en Floride, l’État projette d’importantes coupes dans les retraites des futurs retraités.

 

Ces décisions – et des actions identiques dans d’autres États et villes – font suite au précédent créé par la procédure de faillite de Detroit qui avait débuté en juillet 2013 pour se terminer en novembre dernier. Ces décisions ont totalement justifié les avertissements lancés par le World Socialist Web Site au moment de la demande de mise en faillite.

 

Le 20 juillet 2013, deux jours après le dépôt de bilan de la ville, le WSWS écrivait :

 

« Cette demande de mise en faillite a des implications nationales et internationales. Detroit va servir de test pour les autres villes du pays qui se sont retrouvées criblées de dettes du fait de la crise économique. L’utilisation de la bankruptcy court [tribunal fédéral spécifique pour les faillites, privées comme publiques, NDT] pour tailler dans les retraites et l’assurance-santé ouvrira la porte à des attaques du même genre contre des millions d’enseignants, de travailleurs des transports, des services d’assainissement, et d’autres employés municipaux.

 

« Tout comme la Grèce est devenue le modèle des attaques contre les travailleurs dans toute l’Europe et au-delà, la faillite de Detroit – qui va bien au-delà même des mesures brutales appliquées en Grèce – va établir un mode opératoire pour la prochaine étape des attaques contre la classe ouvrière aux États-Unis et partout ailleurs. Ce qui est en jeu ce sont toutes les avancées obtenues sur plus d’un siècle par la classe ouvrière au prix de luttes et de sacrifices immenses et souvent sanglants. » (Voir : « La faillite de Detroit »)

 

L’assaut mené tant au niveau des États qu’au niveau local contre les retraites des salariés du public s’accompagne d’une campagne pour démanteler ce qui reste des retraites dans le secteur privé. En décembre, le Congrès a adopté une loi autorisant les fonds de pension multiemployeurs à réduire drastiquement les prestations versées aux retraités et a éliminé une jurisprudence fédérale de dizaines d’années spécifiant que les retraites de travailleurs actuellement à la retraite ne pouvaient être réduites.

 

L’assaut sur les retraites est entièrement bipartisan vu que Démocrates et Républicains sont tout aussi implacables les uns que les autres lorsqu’ils s’attaquent à la classe ouvrière. Cette attaque est coordonnée par le gouvernement Obama qui a joué un rôle crucial dans la faillite de Detroit.

 

La campagne de démantèlement des retraites est l’une des composantes de l’attaque de l’administration Obama sur les salaires et les prestations sociales des travailleurs. Cette attaque inclut aussi le démantèlement des prestations de santé financées par les employeurs sous les auspices de l’Affordable Care Act et l’attaque systématique lancée contre les salaires en 2009 avec la restructuration de l’industrie automobile.

 

Le sempiternel refrain qui accompagne cette campagne est l’affirmation qu’il « n’y a pas d’argent, que les caisses sont vides » pour payer les retraites. C’est un mensonge.

 

Même le Washington Post – qui a remarqué un « changement dans le contrat social » alors que « les employeurs, les employeurs privés tout comme les gouvernements, considèrent de plus en plus que la prolifération des coûts de retraite est insupportable » – s’est senti obligé de souligner que « l’offensive pour réduire les prestations de retraite a lieu en dépit non pas seulement d’une longue période de solides rendements boursiers, mais aussi d’un rebond de l’immobilier qui devrait alimenter une forte croissance du revenu des villes. »

 

La hausse spectaculaire des cours boursiers a été alimentée par des cadeaux à hauteur de milliers de milliards de dollars aux banques, à qui on a fourni un flux ininterrompu d’argent quasi gratuit. Dans le même temps, des centaines de milliards de dollars ont été débloqués pour financer des opérations militaires dans le monde entier alimentées par l’incessante course à l’hégémonie mondiale de la classe dirigeante américaine. Ce qui doit être payé par un renversement historique de la position sociale de la classe ouvrière.

 

En ce qui concerne la classe dirigeante, les jeunes gens ne devraient pas avoir d’avenir, les travailleurs devraient vivre avec des salaires de misère, les chômeurs devraient mourir de faim et les personnes âgées devraient mourir prématurément.

 

Ce qui est le plus extraordinaire, c’est l’absence de résistance organisée. Ici, les syndicats qui se sont depuis longtemps transformés en entreprises commerciales, jouent un rôle essentiel. Ils ont collaboré à tous les stades avec les Démocrates et les Républicains pour saper et attaquer les retraites. Le syndicat des Teamsters, par exemple, a pleinement soutenu la loi fédérale autorisant les fonds de pension à réduire fortement les prestations. Une multitude de syndicats de l’Illinois appuient la plainte des Démocrates pour réduire les prestations de retraite. Les syndicats jouent un rôle clé dans la répression de l’opposition à la faillite de Detroit.

 

Ces organisations droitières et les cadres corrompus qui les contrôlent ne s’intéressent qu’à protéger leurs intérêts financiers de gestionnaires des fonds de pension. Pour maintenir le fonds à flot, ils acceptent volontiers de réduire drastiquement les prestations des syndiqués.

 

Les tensions sociales atteignent le point de rupture. La grève des travailleurs du secteur pétrolier aux États-Unis, en dépit des efforts entrepris par le syndicat des métallos USW pour l’isoler et la trahir, témoigne de la combativité et de la détermination grandissantes des travailleurs américains qui ont subi des décennies durant les suppressions d’emplois et les baisses de salaires et des prestations sociales. Pour faire avancer cette lutte, et les nombreuses autres luttes à venir, les travailleurs doivent s’armer d’une nouvelle stratégie politique qui se base sur l’indépendance à l’égard de syndicats favorables au patronat, une rupture avec les Démocrates et le système bipartite du capitalisme américain, ainsi que sur un programme socialiste afin de réorganiser la société dans l’intérêt des besoins sociaux et non des profits privés.

 

 

 

Par Andre Damon - wsws.org – le 16 février 2015

Koter Info's insight:


C'est ce "modèle US" que l'UE essaye d'installer chez nous avec tous ces traités divers, TAFTA, TTIP, etc.  Tous des noms signifiant un recul social pour nous, mais les médias ne vous en parlent pas, alors tout va bien et tout le monde s'en balance !


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Travailleurs US appauvris

Travailleurs US appauvris | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Source photo : lexpress.fr


L’appauvrissement des travailleurs

industriels aux États-Unis

 Par Jerry White

 

Des rapports récents témoignent du renversement historique survenu dans les salaires et les conditions de vie des travailleurs industriels aux États-Unis, un phénomène qui s’est accéléré à la suite du krach économique mondial de 2008. Ces rapports mettent en lumière la réalité derrière la « reprise économique » d’Obama et les profits accumulés par les sociétés et les institutions financières américaines.

 

L’offensive impitoyable de la classe dirigeante contre la classe ouvrière qui dure depuis des décennies trouve l’une de ses expressions les plus fortes dans l’appauvrissement du Michigan, centre historique de la fabrication automobile américaine et l’un des États les plus prospères du pays pendant les décennies qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale. Selon l’US Bureau of Economic Analysis (Bureau américain d’analyse économique), l’État du Michigan se classe maintenant dans le dernier tiers des États américains en ce qui a trait au revenu par habitant.

 

Après près de 40 années de fermetures d’usines, de licenciements massifs et de réductions des salaires, le revenu par habitant au Michigan est maintenant au 38e rang des 50 États et Washington, DC. Ces chiffres sont encore plus choquants lorsque l’on exclut les transferts gouvernementaux des programmes de sécurité sociale, de Medicare, des coupons alimentaires, d’aide sociale et de prestations pour anciens combattants, faisant reculer le Michigan au 42e rang aux États-Unis.

 

Seule une poignée d’autres États plus arriérés économiquement tels l’Arkansas, l’Alabama, le Mississippi et la Virginie occidentale, sont pires. C’est une ironie de l’histoire que ce soit en grande partie ces États que des centaines de milliers de mineurs du charbon et de métayers pauvres ont fuis pour trouver une vie meilleure dans les usines d’automobiles et les aciéries du Michigan lors des six premières décennies du siècle dernier.

 

Le coût humain de cette situation a été révélé dans un rapport publié plus tôt cette année par Centraide, révélant que 40 % des ménages au Michigan – au nombre de 1,54 million dans l’État – n’ont pas assez d’argent pour satisfaire leurs besoins de base. Dans 73 % des villes du Michigan recherchées, 30 % des ménages ne pouvaient payer pour leur loyer, la garde de leurs enfants, leur nourriture, leurs besoins de transports ou des soins de santé, même s’ils travaillaient.

 

La situation dans le Michigan s’inscrit dans une tendance nationale. La semaine dernière, le National Employment Law Project publiait un rapport intitulé Manufacturing Low Pay: Declining Wages in the Jobs that Built America’s Middle Class (La fabrication des bas salaires : la baisse des salaires dans les emplois qui ont façonné la classe moyenne aux États-Unis).

 

Parmi les révélations de ce rapport :

 

* Sur les 6,2 millions de travailleurs de la production aux États-Unis, plus de 600.000 gagnent un salaire horaire de 9,60 $ ou moins, et plus de 1,5 million de 11,91 $ ou moins. De plus en plus, les travailleurs sont employés par des agences de travail temporaire et de dotation, qui paient des salaires encore plus bas.

 

* Depuis 2003, les salaires réels pour les travailleurs de la fabrication ont diminué de 4 % – soit un dollar l’heure – se traduisant par une perte de revenu annuel de 2 000 $ pour un travailleur industriel travaillant 40 heures par semaine à raison de 52 semaines par année.

* Dans le secteur des pièces automobiles – qui représente désormais les 3/4 de tous les emplois dans l’industrie de l’auto – l’effondrement des salaires est encore plus stupéfiant. Entre 2003 et 2013, les salaires réels dans l’industrie pour les équipes de monteurs ont chuté de 1,47 $ l’heure (9,2 %), tandis que les salaires dans la production des pièces automobiles ont chuté de 2,77 $ l’heure (15 %).

 

De plus en plus, des sociétés comme General Motors, Ford, Caterpillar, Boeing, Airbus et le fabricant chinois d’ordinateurs Lenovo ramènent aux États-Unis la production faite au Mexique, en Chine et dans d’autres pays à bas salaires. L’écart salarial entre les travailleurs chinois et américains devrait être réduit à 7 $ l’heure d’ici 2015, alors qu’il était de 17 $ l’heure en 2006.

 

La chute des salaires des travailleurs industriels est allée de pair avec le démantèlement d’une grande partie de la base industrielle du pays et la dépendance croissante de l’économie américaine sur la spéculation et le parasitisme financiers. Les États-Unis ont perdu la moitié de leurs emplois dans la fabrication entre 2000 et 2009, et seulement 500.000 des 6 millions d’emplois manufacturiers perdus sont revenus.

 

L’attaque sur les salaires industriels s’est accélérée avec l’Administration Obama lors de la faillite forcée de General Motors et de Chrysler en 2009, où les salaires des travailleurs nouvellement embauchés ont été réduits de 50 %. Le résultat a été des bénéfices record pour les constructeurs automobiles.

 

Pendant la majeure partie de la période qui a suivi la Deuxième Guerre mondiale, le Michigan se classait parmi les 10 premiers États en ce qui avait trait au revenu par habitant, Detroit affichant même en 1960 le revenu par habitant le plus élevé de n’importe quelle ville aux États-Unis. Ce n’était pas là l’accomplissement d’employeurs ayant l’esprit libéral ou de politiciens comme Franklin Roosevelt, mais bien des luttes de masse explosives des années 1930 qui ont vu la création des syndicats industriels. Ces batailles de classe étaient dirigées par des militants de gauche et des travailleurs inspirés par le socialisme et la Révolution russe de 1917.

 

Craignant le danger que les États-Unis aient leur « propre révolution de 1917 », la classe dirigeante américaine, ayant le luxe de posséder une puissante industrie et d’immenses richesses, a accordé des concessions à la classe ouvrière. Au cours des décennies qui ont suivi, les travailleurs industriels du Michigan et d’autres États se sont battus pour obtenir des salaires et des soins de santé payés par l’employeur, des pensions et des congés, permettant à beaucoup de s’acheter une maison, d’envoyer leurs enfants à l’université et de vivre plus sainement et longuement.

 

La classe dirigeante américaine n’a jamais digéré le mode de vie de la supposée « classe moyenne » acquis par les travailleurs. Et pourtant, elle n’a pas pu renverser ses réalisations sans la collaboration des syndicats.

 

À la fin des années 1970 et au début des années 1980, le Syndicat des travailleurs unis de l’automobile (TUA) et d’autres syndicats ont renoncé à toute défense de la classe ouvrière et, au nom de la défense de la « compétitivité » et des bénéfices des sociétés américaines sur la scène mondiale, ils ont collaboré à la destruction de millions d’emplois industriels et à l’appauvrissement des communautés ouvrières de Detroit, de Flint et d’ailleurs.

 

Lors de la restructuration de l’industrie de l’automobile en 2009, les TUA ont accepté des milliards de dollars en actions de GM et de Chrysler à titre de paiement pour leur collaboration dans la réduction des salaires, la fin du paiement des heures supplémentaires après huit heures de travail et l’embauche de milliers de travailleurs temporaires. Le syndicat des TUA s’est transformé il y a des décennies en une entité commerciale, valant maintenant plus d’un milliard de dollars et administrée par une équipe de cadres grassement payés dont les intérêts sont diamétralement opposés à ceux des travailleurs qu’ils prétendent faussement représenter.

 

Les conditions de vie expérimentées au quotidien par des millions de travailleurs au Michigan et dans le reste des États-Unis sont la preuve de l’échec complet d’un mouvement ouvrier basé sur la défense du capitalisme, du nationalisme économique et de la subordination de la classe ouvrière au Parti démocrate.

 

Les gains auparavant acquis par les travailleurs l’ont été par des luttes de masse. L’opposition de la classe ouvrière n’a pas disparu dans les années 1980 ou par la suite. Elle a été sabotée et désorganisée par les TUA et les autres syndicats qui ont chassé de leurs rangs les militants de gauche dans les années 1940 et 1950 et se sont consolidés sur la base de l’anticommunisme et la défense des intérêts mondiaux de l’impérialisme américain.

 

Ce phénomène n’est pas uniquement américain. Face à la mondialisation de la production capitaliste, tous les syndicats basés à l’échelle nationale sont devenus dans tous les pays des organisations anti-ouvrières qui ont supprimé la lutte de classe et aidé à faire baisser les salaires.

 

La voie de l’avant est le développement de nouvelles organisations démocratiques de lutte, indépendantes des syndicats, dans le cadre d’un puissant mouvement politique de la classe ouvrière, présent tant aux États-Unis qu’à l’échelle internationale, et basé sur un programme révolutionnaire pour remplacer le système capitaliste par le socialisme.

 

 

Par Jerry White — wsws.org – le 29 novembre 2014

(Article paru d’abord en anglais le 25 novembre 2014)


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Belgique - Le casse-tête mathématique du financement des pensions

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Source dessin : terredisrael.com



Belgique - Le casse-tête mathématique

du financement des pensions

Par Bruno Colmant (*)

 

Le véritable problème de la Belgique est le vieillissement de la population et les charges de pensions qui y sont associées. Les pensions sont financées par la répartition, c’est-à-dire que les travailleurs actifs transfèrent une partie des revenus qu’ils génèrent vers les pensionnés.

 

Le système des pensions s’exprime, de manière froide et cynique, comme un subside accordé par ceux qui vivent moins longtemps envers ceux qui vivent plus longtemps. Ces transferts ne sont pas de l’argent qui disparait en fumée, puisqu’ils contribuent à alimenter le cycle de la consommation.

 

Le problème n’est donc pas là, mais dans l’importance accrue de la charge des pensions, qui va progressivement passer de 10 % à un pic de 17 % du PIB vers les années 2030, c’est-à-dire dans une quinzaine d’années. Un tel prélèvement sur l’économie est insoutenable.

 

Déjà, aujourd’hui, le montant des pensions correspond plus ou moins à la totalité de l’impôt des personnes physiques et des sociétés belge. Une augmentation des charges de pensions deviendra donc structurellement insupportable en termes macro-économiques.

 

La question est de savoir comment financer cette immense charge dans un esprit de solidarité et de justice inter- et intragénérationnelleEn effet, le système des pensions a vu ses fondations s’effriter sous différentes modifications démographiques, telles l’hétérogénéité des vies professionnelles et familiales, la chute de la natalité, l’entrée massive des femmes dans la vie professionnelle et le vieillissement de la population (qui entraînera un déficit structurel de croissance économique de 0,5-0,7 % selon l’OCDE).

 

D’autres facteurs structurels se greffent à ces mutations sociologiques : nos communautés ont abandonné un contexte industriel pour s’engouffrer dans l’économie des services et de la connaissance digitalisée. De surcroît, la mondialisation et la plongée dans l’économie de marché ont mis à vif le manque de compétitivité de notre économie et la finitude d’un modèle d’État-providence.

 

On peut aussi discerner un phénomène de capture générationnelle qui caractérise le système belge des pensions, puisque le nombre relatif d’années de travail a baissé pour les personnes pensionnées (ou qui le seront prochainement) au détriment des travailleurs actifs qui devront financer ce surcoût alors que leur nombre diminue.

 

Mais il ne faut pas s’y tromper : le problème des pensions n’est aucunement limité à leur financementCe qui est véritablement en jeu, c’est la paupérisation de certaines classes de personnes âgées et des disparités de revenus entre les pensionnés.

 

C’est ainsi que les niveaux d’études, l’adaptabilité professionnelle, la nature des familles, le nombre d’enfants et l’espérance de vie entraînent aussi des inégalités.

 

En d’autres termes, la justice doit être assurée non seulement entre les générations, mais aussi au sein des mêmes générations. Un travailleur qualifié, quel que soit son âge, a plus de chances d’être employable et donc capable de constituer une épargne. Ce même travailleur pourra alors décider de s’extraire plus tôt de la vie professionnelle, alors qu’un travailleur moins qualifié se verra plus facilement refuser l’accès au circuit professionnel. De plus, l’espérance de vie est corrélée avec le niveau de revenu et de pénibilité du travail, ce qui engendre aussi des inégalités entre catégories de pensionnés.

 

Contrairement à l’attentisme coupable dont nous avons fait collectivement preuve, il faut aborder le problème du financement avec lucidité et rigueur.

 

Aucune solution ne peut s’exonérer d’une vision dynamique : on doit résoudre ce problème dans le cycle d’une vie entière, caractérisée par des périodes d’activité et de non-activité.

 

On ne peut augmenter exclusivement les cotisations des travailleurs actifs pour financer le vieillissement attendu de la population, comme on ne peut se limiter strictement à reporter ce même coût du vieillissement sur les pensionnés au travers d’une chute de leurs pensions.

 

Il faut donc trouver un équilibre intergénérationnel, tel celui proposé par l’économiste américain Musgrave (et adopté par de très nombreux pays) selon lequel le revenu des travailleurs actifs et des pensionnés doit rester stable, comme si la situation actuelle était sociétalement « juste ».

 

Cette règle de Musgrave, appelée aussi règle des positions relatives fixes, conduit à maintenir constant le rapport entre les revenus par tête de la population active (nets de cotisations de pensions) et les prestations par tête des retraités (nettes d’impôts).

 

Une fois ce rapport établi, le taux de cotisation et le montant des pensions sont périodiquement actualisés en fonction des modifications démographiques et de productivité.

 

Pour respecter cet équilibre de Musgrave, il faudra simultanément augmenter les cotisations des travailleurs actifs et baisser les pensions des travailleurs inactifs. Il s’agit donc d’équilibrer en permanence un immense balancier au fur et à mesure du temps qui passe, en adaptant concomitamment les cotisations et les pensions.

 

Concrètement, cet objectif doit conduire à une employabilité supérieure des jeunes, un allongement de la vie professionnelle et une augmentation du taux d’activité des travailleurs âgés, et ce particulièrement en Belgique. Au reste, il semble que si chacun travaillait jusqu’à l’âge de 65 ans, le financement des pensions serait équilibré.

 

Mais une augmentation autoritaire du taux d’activité des travailleurs âgés relève de l’imposture politique, car les bouleversements conjoncturels et technologiques, conjugués à la disparition de compétences, rendent cette orientation caduque. C’est ainsi qu’on en arrive à retarder l’âge de la pension, non pas pour mettre des travailleurs âgés au travail, mais pour diminuer leurs pensions.

 

En conclusion, le problème des pensions ne se règle pas par la loi du marché, mais par un cadre d’économie politique. C’est par l’employabilité des travailleurs, et donc leur formation continue et leur recyclage, qu’on résoudra l’équation des pensions. Il faudra aussi basculer de manière souple vers un système qui combine la capitalisation individuelle et la répartition collective, à l’instar des deuxième (assurance groupe et fonds de pension) et troisième piliers (épargne pension individuelle).

 

Mais, au-delà de ces orientations à long terme, je suis intimement convaincu que les travailleurs actifs devront cotiser pour un montant supérieur à ce qu’ils pourront espérer au titre de pensions et que le financement des pensions par répartition basculera inévitablement vers un système d’allocation uniforme et universelle.

 

 

 

Par Bruno Colmant (*) – blogs.lecho.be/colmant – le 7 mars 2015

 

(*) Bruno Colmant est membre de l’Académie Royale de Belgique, Docteur en Économie Appliquée (ULB) et Master of Science de l’Université de Purdue (États-Unis). Il enseigne la finance appliquée et l’économie à la Solvay Business School (ULB), à la Louvain School of Management (UCL), à l’ICHEC, à la Vlerick Business School et à l’Université de Luxembourg. Sa carrière est à la croisée des secteurs privés, publics et académiques.

 

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Alors que les raffineries américaines son en grève depuis près de deux semaines, lockout des dockers de la côte Ouest des États-Unis

Alors que les raffineries américaines son en grève depuis près de deux semaines,  lockout des dockers de la côte Ouest des États-Unis | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Photo : le port d’Oakland

 

Alors que les raffineries américaines sont

en grève depuis près de deux semaines

 Lockout des dockers

de la côte Ouest des États-Unis

 

Par Jerry White (*)

 

L’Association maritime du Pacifique (PMA), qui représente les transporteurs de fret, les opérateurs de terminaux et les entreprises d’arrimage, a imposé un lockout de quatre jours aux 20.000 travailleurs de 29 ports de la côte Ouest des États-Unis. Les docks étaient fermés jeudi et le seront à nouveau samedi, dimanche et lundi ; un lockout similaire avait déjà eu lieu le weekend dernier.

 

La PMA a pris cette mesure punitive, qui coûtera aux travailleurs des centaines sinon des milliers de dollars en pertes de salaires de base et heures supplémentaires, en représailles à une présumée grève du zèle organisée par l’ILWU (syndicat international des dockers).

 

« Les membres de la PMA ont conclu qu’ils ne mèneraient pas d’opérations sur les navires ces jours-là, car ils auraient à payer des rémunérations très élevées à des équipes entières de travailleurs de l’ILWU pour une productivité sévèrement diminuée, tandis que s’accumule le retard du fret sur les ports de la côte Ouest, » dit une déclaration de la PMA.

 

« Ceci est une tentative de la part des employeurs d’imposer une pression économique sur nos membres pour mieux peser sur les négociations de contrats », a dit le président de l’ILWU Robert McEllrath. « Le syndicat se tient prêt à négocier, comme c’est le cas depuis plusieurs jours ».

 

La PMA a annulé des pourparlers qui avaient déjà été reportés à jeudi et n’a pas rencontré l’ILWU depuis le 6 février. L’ancien contrat de travail a expiré le 1er juillet dernier, mais l’ILWU a ordonné à ses membres de continuer à travailler pendant neuf mois dans l’espoir de conclure un accord avec la médiation du gouvernement.

 

Les appels du syndicat à quelques concessions de la part de la direction n’ont eu d’autre résultat que de voir ces sociétés hautement profitables exploiter la situation pour prendre l’offensive. La PMA aurait proposé une hausse de salaire de 2,8 pour cent par an pour un nouveau contrat d’une durée de 5 ans. Elle a aussi désigné l’impôt indirect de 40 pour cent sur l’assurance maladie dite Cadillac de l’Affordable Care Act (loi sur la protection des patients et des soins abordables) d’Obama, pour demander la fin des assurances maladie pleinement à la charge de l’employeur, une conquête sociale gagnée par les travailleurs portuaires grâce aux luttes de plusieurs générations.

 

Comme d’autres employeurs, la PMA fixe de strictes limites aux travailleurs cherchant à récupérer les revenus perdus durant la plus longue période de stagnation des salaires depuis la Grande Dépression. Ils font pression pour la suppression de plus d’acquis sociaux encore alors même que les bénéfices des entreprises et les marchés financiers grimpent en flèche pour la sixième année consécutive de la soi-disant reprise économique.

 

Ce lockout a lieu au moment où la grève des raffineries américaines en est à sa deuxième semaine. Le principal négociateur Royal Dutch Shell a claqué la porte des pourparlers cette semaine, et les négociations ont été suspendues au moins jusqu’au 18 février. Bien que les cinq plus grosses sociétés pétrolières (Shell, ExxonMobil, BP, Chevron et ConocoPhillips) aient fait $90 milliards de bénéfices l’année dernière en dépit de la chute des prix du pétrole brut, elles s’opposent à toute revendication visant une amélioration des salaires et des conditions de travail.

 

Ces sociétés ont riposté à la grève partielle du Syndicat des travailleurs de l’acier (USW), qui ne mobilise que 5 200 sur les 30.000 travailleurs du syndicat, en supprimant les prestations maladie des grévistes et en mobilisant des cadres, des employés d’autres entreprises et d’autres catégories de personnel pour maintenir la production.

 

Les employeurs ont le soutien total du gouvernement Obama et des deux partis de la grande entreprise. Jeudi, un groupe bipartite de membres du Congrès a appelé à une « résolution rapide » du conflit sur la côte Ouest.

 

« Nous estimons qu’il s’agit aujourd’hui de la plus grande menace pour notre nation, » a dit le député Kurt Scrader (Démocrate de l’Oregon), utilisant le vocabulaire habituellement associé aux soi-disant menaces terroristes. Schrader a pressé Obama, qui se trouvait dans la région de la Baie de San Francisco pour un sommet sur la cybersécurité vendredi, de rencontrer les dirigeants de la PMA et de l’ILWU, écrit le Los Angeles Times.

 

Dans l’éventualité d’une grève ou d’un lockout, ont dit les députés, Obama devrait avoir recours à l’argument de « risque pour l’économie nationale » pour invoquer la Loi Taft-Hartley, comme l’avait fait le président George Bush en 2002, afin de rouvrir les docks.

 

Faisant écho à des remarques similaires à propos de la grève de l’industrie pétrolière, le porte-parole de la Maison-Blanche Éric Schultz a dit jeudi que le président suivait de près la situation des docks. Il a ajouté, « Nous pensons qu’elle devrait se résoudre à la table des négociations ».

 

À ce stade, Obama compte sur l’ILWU et l’USW pour contenir et finalement étouffer ces luttes avant qu’elles ne deviennent un catalyseur pour d’autres secteurs de la classe ouvrière, comme les 139.000 travailleurs de GM, Ford et Chrysler dont les contrats expirent en septembre prochain.

 

Mais si toutefois les syndicats n’y parvenaient pas, Obama et les deux partis de la grande entreprise auraient recours aux pouvoirs répressifs de l’État capitaliste, à savoir les lois antiterroristes, la police militarisée, les troupes de la garde nationale, le FBI, etc., pour essayer de venir à bout d’un tel mouvement.

 

Depuis l’imposition de coupes claires dans les salaires et les droits sociaux des travailleurs de l’industrie automobile pendant la restructuration de 2009 chez General Motors et Chrysler, la Maison-Blanche a mis au centre de sa politique économique la baisse des salaires et le transfert des coûts d’assurance maladie et de retraite des sociétés aux travailleurs.

 

En cela, Obama a joui de l’entière collaboration du syndicat United Auto Workers, de l’USW, de l’ILWU et d’autres syndicats. Obama a nommé le Président de l’USW International Leo Gerard à sa commission pour la compétitivité des entreprises en 2013 afin qu’il réduise les coûts du travail dans les secteurs de la manufacture et de l’énergie.

 

Les syndicats ont tout fait pour étouffer l’opposition de la classe ouvrière. La grève du zèle de l’ILWU et le débrayage limité à l’appel de l’USW, avec des piquets de grève réduits et sans aucune tentative de mobiliser d’autres secteurs plus larges de la classe ouvrière, sont en grande partie inefficaces et le sont à dessein.

 

Les syndicats sont alliés à Obama et au Parti démocrate, ils ont passé des décennies à collaborer avec les employeurs pour baisser le niveau de vie des travailleurs. Les dirigeants syndicaux sont tout aussi hostiles à un mouvement social de la classe ouvrière que le sont leurs maîtres capitalistes.

 

Le président de l’USW Gerard et le Président de l’ILWU Robert McEllrath recherchent une concession symbolique qui, espèrent-ils, suffira à apaiser les travailleurs et à les convaincre d’accepter un contrat de plus leur faisant perdre des acquis. Les grandes entreprises ont réagi en mettant les syndicats au défi et en redoublant d’agressivité : lockout des travailleurs, annulation des prestations d’assurance maladie et organisation d’opérations visant à briser les grèves, tandis que se tiennent en réserve les gouvernements au niveau fédéral, régional et local.

 

Dans le même temps, les travailleurs ont de plus en plus le sentiment qu’ils doivent répliquer sur le même mode et se battre pour récupérer leurs années de pertes. La résurgence d’un tel état d’esprit est la conséquence de niveaux d’inégalité sociale sans précédent et de la complète insensibilité d’un gouvernement qui renfloue les banques, mène des guerres criminelles et approuve le pillage social de la part les élites capitalistes et financières.

 

Pour que les travailleurs trouvent une voie qui les fasse avancer, ils doivent s’émanciper de la mainmise des syndicats propatronaux. Ils doivent construire de nouvelles organisations de lutte contrôlées par la base, afin de mobiliser les travailleurs des docks et de l’industrie pétrolière dans un mouvement de grève puissant qui inverse l’érosion du niveau de vie et des conditions de travail. Confrontés à des sociétés maritimes et pétrolières organisées à l’échelle mondiale, les travailleurs doivent rejeter le nationalisme des syndicats et lutter pour s’unir avec leurs frères de classe internationaux dans une lutte commune.

 

La lutte pour la défense des emplois et du niveau de vie, tout comme la lutte contre la dictature et la guerre, est avant tout une lutte politique contre Obama, contre les deux partis de la grande entreprise et contre le système capitaliste qu’ils défendent.

 

 

 

Par Jerry White (*) - wsws.org – le 14 février 2015

 

(*) Jerry White est un militant politique américain, cofondateur du Survivor Corps. Il est un chef de file reconnu de l’historique International Campaign to Ban Landmines… (Sources : Wikipédia)


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