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TPP, TTIP et TiSA – « des accords politiques visant à supprimer le modèle démocratique »

TPP, TTIP et TiSA – « des accords politiques visant à supprimer le modèle démocratique » | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Illustrations :

- transcend.org

- Alfred de Zayas - Wikipédia


 

 

TPP, TTIP et TiSA – « des accords politiques visant à supprimer le modèle démocratique »

 

 

Interview du professeur Alfred de Zayas (*), spécialiste de droit international, Genève

 

Le 26 juin dernier, par un vote, le Sénat a investi le président américain Barack Obama d’un mandat lui permettant de conclure des accords commerciaux internationaux sans consultation ni débat préalables des parlements. Par cet acte, le Sénat et le Congrès se sont privés eux-mêmes, de leurs pouvoirs. Dans le contexte des accords internationaux, il s’agit surtout de ces soi-disant accords de libre échange TTIP (Transatlantic Trade and Investment Partnership) et TPP (Trans-Pacific Partnership) ayant des conséquences graves pour la souveraineté des États adhérents à ces accords.


Dans l’interview qui suit, Alfred de Zayas, spécialiste renommé de droit international, en présente toute la complexité du point de vue du droit international.

 

*** 

— Horizons et débats : les accords de libre-échange tels que le TTP, le TTIP ou le TiSA (Trade in Services Agreement), quel impact ont-ils sur la coexistence des peuples, notamment sous les aspects du droit international ?

 

Alfred de Zayas : Il y a une « certaine mythologie du marché ». Le prix Nobel d’économie, Joseph Stieglitz, l’appelle « fondamentalisme du marché », un culte autour du marché. C’est presque une affaire de religion où les hommes jurent que le libre échange engendre le bien et le progrès et le développement de l’humanité entière. Jusqu’à présent, personne n’a livré des preuves empiriques et définitives de cela, car il y a bien sûr des exemples de progrès, mais aussi de revers, de crises financières et de chômage. À part cela, on ne peut pas mesurer « le progrès » uniquement par l’argent, mais aussi par le bonheur, la paix et la justice sociale. L’idée de ces accords de commerce et d’investissement est née à l’époque de l’après-guerre froide. La plupart de ces accords bilatéraux d’investissement (BIT), environ 3 200, ont été accueillis avec beaucoup d’enthousiasme, car les États les trouvaient prometteurs. Pourtant, ils n’ont pas remarqué que, dans ces accords, plusieurs chevaux de Troie fussent cachés.

 


—— Comment peut-on comprendre cela ?

 

Entre-temps, on s’est rendu compte que la plupart de ces accords contiennent des conventions d’arbitrage très particulières, créant un nouvel ordre mondial qui ne sera ni démocratique ni transparent et sans recours. Certaines mesures, telles que la réduction des droits de douane sont utiles et pertinentes, mais les droits de douane sont déjà à un niveau très bas.

 

 

— Il s’agit donc de quelque chose de beaucoup plus important que de « quelques accords de libre-échange » ?

 

Il s’agit de la géopolitique et du pouvoir. C’est un coup des entreprises transnationales, qui ont souvent plus d’argent et plus de pouvoir que quelques États. Quant aux TPP, TTIP ou TiSA, il ne s’agit pas seulement de refuser ces accords. Il faut réformer entièrement le système qui a été établi ces derniers trente ans, et ceci de fond en comble. Les accords, c’est une chose, l’autre, c’est la perte de l’État de droit démocratique qui va de pair.

 

 

—— Qu’est-ce que cela veut dire concrètement ?

 

État de droit veut dire transparence et responsabilité qui présupposent un débat ouvert. Là, on a négocié des accords à huis clos en excluant les syndicats, les spécialistes en matière de droit de l’homme, d’écologie, et de santé : ils n’étaient pas admis aux négociations de l’accord. Et pour éviter tout débat au parlement, le TPP devait passer le parlement par « fasttracking » [procédure accélérée] comme un fait accompli. Il n’y a pas de procédé plus antidémocratique. Cette semaine justement, le Sénat des États-Unis a adopté le « fasttracking ». La loi n’a que passé le Congrès et entrera en vigueur au moment où le Président Obama l’aura signée. Ce n’est qu’un acte formel, car il voudrait conclure ces accords de libre-échange le plus vite possible. La loi porte le nom de « Trade Promotion Authority ».

 

 

—— Quelles sont les conséquences de cette loi ?

 

Au Parlement, elle interdit toute discussion et tout vote sur la détermination du contenu de ces accords. Les motions individuelles sont interdites, il n’y aura qu’un vote « pour » ou « contre ». Ainsi, toute la procédure démocratique sera éliminée. Lorsqu’un parlement « s’émascule » lui-même, c’est un acte totalitaire et une violation de l’article 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

 

 

—— Le processus démocratique est mis hors jeu pour donner la priorité à l’économie ?

 

Pas à l’économie, mais aux entreprises transnationales, à l’industrie pharmaceutique, aux géants du pétrole ou de l’énergie nucléaire. Au fond, ce ne sont pas des accords de libre-échange, mais des accords politiques dans l’intention de supprimer la souveraineté des États en la remplaçant par les dictats des corporations.

 

 

—— Comment faut-il comprendre cela ?

 

Les grands groupes internationaux ont entamé une certaine révolution contre la conception de l’État de la Paix de Westphalie. L’idée comprend le détournement de l’État de droit, laissant de côté la juridiction nationale pour laquelle le monde travaille depuis 200 ans, pour établir la sécurité juridique et pour développer des institutions capables de combattre les violations du droit. L’établissement prévu des tribunaux d’arbitrage dans ces accords, empêchera tout cela et contournera finalement notre système démocratique.

 

—— Comment faut-il imaginer ces tribunaux d’arbitrage ?

 

En premier, ils sont secrets. Dans ce système, il n’y a ni transparence ni la possibilité de demander des comptes aux « juges ». Les multinationales ont établi une juridiction à part, sans aucune légitimation démocratique et qui exclut le principe de l’État westphalien.

 

 

—— C’est à dire qu’avec ces accords, on abolit l’État national souverain avec son ordre juridique.

 

Oui, il y a deux ontologies qu’il faut prendre en considération. L’ontologie de l’État définit la raison d’existence de l’État. L’État, c’est une société organisée, se légitimant elle-même par le fait que c’est l’État qui, pour protéger les intérêts du peuple, défend la législation. La deuxième ontologie est celle du marché, du business, des affaires. Quand je fais des investissements, quand je suis homme d’affaires, quand je travaille pour une société transatlantique, j’attends des profits. Pour cela, je suis prêt à courir des risques. L’ontologie du capitalisme est de courir des risques. Par ce « investor state dispute settlement » mécanisme [règlement des différends entre les investisseurs et l’EÉtat], ces nouveaux tribunaux d’arbitrage, qui, au fond, ne sont pas de vrais tribunaux, mais des tribunaux d’arbitrage privés, les investisseurs veulent supprimer leur risque, ils veulent une garantie de profit. Donc on veut créer un système anti-ontologique et complètement corrompu.

 

 

—— Comment ces tribunaux fonctionnent-ils ?

 

Les juges sont en général avocats des grandes multinationales. Comme je connais le métier, je sais très bien de quoi je parle. Ces avocats de Wall Street et ailleurs, encaissant 1 000 dollars l’heure, conseillent les multinationales et les États. C’est une excellente affaire. Aujourd’hui, ils sont arbitres, demain conseillers et après-demain PDG d’une multinationale. Il faut l’imaginer, c’est un système corrompu de fond en comble. Mais ils l’ont établi comme cheval de Troie. Dans les années 90, on n’arrivait pas à imaginer qu’une telle chose soit possible.

 

 

—— Par où faut-il commencer ?

 

Le système d’arbitrage secret va entièrement à l’encontre des bonnes mœurs. Le terme de « contra bonos mores » est le terme du droit international désignant des traités ou des contrats qui vont à l’encontre du bonum commune, donc à l’encontre du bien commun, de l’intérêt de la société. De tels traités allant « contra bonos mores » sont nuls, selon l’article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités.

 

 

—— Qu’est-ce que cela implique pour les multiples traités ?

 

Dans mon rapport pour le Conseil des droits de l’homme, je propose d’examiner à la loupe tous les traités, y inclus les bilatéraux. Là, où ils vont à l’encontre du bien commun, il faut les modifier selon l’article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités. C’est un procédé, qui fait partie du droit international qu’on appelle « severability », dérogation des éléments concernés. Il ne faut donc pas supprimer le traité entier. Il suffit de supprimer les articles ou les passages allant à l’encontre du bien commun sans les remplacer. C’est ancré dans le droit international.

 

 

—— On pourrait donc procéder contre tout traité allant à l’encontre du bien commun ? Pourquoi personne ne l’a-t-il fait jusqu’ici ?

 

Parce que les victimes ne s’organisent pas alors que les multinationales sont très bien organisées.

 

—— Les victimes, ce sont l’État concerné et sa population ?

 

Oui, bien sûr. Quand un État, tels l’Équateur, la Bolivie ou le Venezuela, doit payer trois milliards ou 5 milliards de compensations à une multinationale, cela veut dire que ces 5 milliards manquent à d’autres domaines afin que l’État puisse remplir ses obligations sociales. Cela veut dire que, dans tous les domaines, par exemple, celui des infrastructures, du droit de travail, de la santé et bien sûr aussi dans celui de l’enseignement et de la formation les moyens nécessaires vont manquer. C’est une situation anormale qu’on n’avait pas du tout en vue au moment de la signature de ces traités. On ne doit pas dire que les États ont accepté ou ratifié ces traités en connaissance de cause, car ils ne savaient pas qu’il y a une juridiction contra bonum mores.

 

 

—— Comment comprendre cela ?

 

Les arbitres ont effectué et réalisé une interprétation des accords de libre commerce qui va à l’encontre de l’ordre public national et international. Cette interprétation viole les articles 31 et 32 de la Convention de Vienne sur le droit des traités. Aucun homme de bon sens ne pourrait accepter telle chose. Ils ont interprété les termes de confiscation ou d’expropriation de la façon suivante : si le profit que j’attendais est diminué par le fait que l’État augmente le salaire minimum ou renforce les mesures de protection écologique, ce qui oblige la multinationale à éviter la pollution de l’eau, les coûts de la multinationale s’élèveront et le profit diminuera. Donc une mesure étatique tout à fait normale et prévisible ne confisquant aucunement une entreprise étrangère est donc interprétée comme confiscation, car « le profit » est diminué.

 

 

—— Les États n’auraient-ils pas pu prévoir cela ?

 

Jusqu’au moment de la ratification du traité, il n’y avait pas une jurisprudence arbitrale dans ce sens. Personne ne savait qu’on allait interpréter comme expropriation l’augmentation du salaire minimum ou le renforcement de la législation de la protection de l’environnement par l’État. Quand un État, comme le montre l’exemple de l’Allemagne, veut sortir de l’énergie nucléaire, ce sont des décisions devant être prises démocratiquement au sein d’un État. Mais cela diminue le profit des entreprises. Cette diminution du profit est déclarée comme expropriation et comme telle une violation de l’obligation de cet EÉtat envers la multinationale. C’est l’État qui doit payer donc la réduction du profit attendue à la multinationale.

 

 

—— Connaissez-vous des exemples concrets ?

 

En ce moment, c’est Vattenfall, ce grand groupe énergétique suédois, qui tente de se faire indemniser par l’Allemagne de 4 milliards à cause de sa sortie de l’énergie nucléaire. Veolia, une entreprise française de service public, spécialisée en alimentation en eau des communes, est en train de procéder contre l’Égypte pour avoir augmenté le salaire minimum.

 

 

—— C’est absurde. Qu’est-ce qu’on peut faire ?

 

J’ai deux préoccupations principales. Il faut reconnaître que c’est la Charte de l’ONU qui sert de référence acceptée internationale. La Charte de l’ONU garantit la souveraineté de l’État. Au fait, l’ONU a été construite sur le principe de la souveraineté des États. La possibilité de l’État de décider du taux et de l’emploi des impôts est un devoir ontologique et essentiel de l’État. Tout cela est stipulé dans les articles 1 et 2 de la Charte de l’ONU. Les articles 55 et 56 stipulent les droits de l’homme. Lorsqu’un traité viole ces articles ou lorsqu’il est incompatible avec ceux-ci, c’est la Charte qui est prioritaire. En anglais, on dit « it trumps » [cela emporte sur] tous les autres traités. Dans l’article 103 de la Charte de l’ONU est écrit qu’en cas de conflit entre la Charte de l’ONU et un autre traité, c’est la Charte de l’ONU qui doit être appliquée et non pas le traité. Cela doit être consigné par voie de justice nationale et internationale, voir par la Cour internationale de justice, par la Cour européenne des droits de l’homme, par la Cour interaméricaine des droits de l’homme, etc.

 

 

—— Qu’est-ce que cela veut dire concrètement pour ces traités illicites allant à l’encontre des bonnes mœurs et de la bonne foi, du principe démocratique et avec cela du bien commun ainsi que des droits de l’homme ?


C’est au sein de la Cour internationale de justice qu’il faut trouver la solution. Les États membres de l’Assemblée générale doivent exiger, auprès de la Cour internationale de justice de La Haye, une expertise reconnaissant cela et disant aux États qu’ils n’ont pas le droit de ratifier des traités allant à l’encontre de la Charte de l’ONU. Tous ces accords commerciaux bilatéraux, tels le TTP, TTIP, TISA, etc. ainsi que les 3 200 accords bilatéraux déjà existants doivent être modifiées, c’est-à-dire supprimés ou bien ces parties allant à l’encontre de la Charte doivent être supprimées (principe de la « severability »). Mais tout cela, il faut l’initier. La Cour internationale de justice n’est active que motu proprio, elle n’intente pas de procès de sa propre initiative. Quelqu’un d’autre doit prendre l’initiative et intenter un procès auprès de la Cour internationale de justice.

 

 

—— Qui est-ce qui pourrait le faire ?

 

L’assemblée générale de l’ONU selon l’article 96 de la Charte, mais pas seulement elle. Il y a d’autres organisations ayant exactement le même droit telle l’Organisation internationale du travail (OIT), l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et d’autres. Tous ceux qui sont déjà capables d’en reconnaître les conséquences néfastes.

 

Les conséquences de ces accords violent le droit du travail, le droit à la santé, le droit à la protection de l’environnement, le droit à la vie, car très souvent, ces grands projets qui ont pour conséquence que les gens perdent tout, sont poussés au suicide ou meurent de faim sont effectués par des sociétés internationales. Dans mon rapport au Conseil des droits de l’homme, j’ai présenté tout cela et exigé qu’un débat soit lancé sur ce sujet.

 


Monsieur le professeur, nous vous remercions de cet entretien.

La conversation correspond à l’opinion personnelle du professeur de Zayas et n’a pas été officiellement tenue en sa qualité de Rapporteur spécial.

 


>>> Interview du professeur Alfred de Zayas (*) réalisée par Thomas Kaiser - horizons-et-debats.ch – le 14 juillet 2015.

Cf. www.alfreddezayas.com et http://dezayasalfred.wordpress.com

 

***



Charte des Nations Unies

 

  • Art. 55

En vue de créer les conditions de stabilité et de bien-être nécessaires pour assurer entre les nations des relations pacifiques et amicales fondées sur le respect du principe de l’égalité des droits des peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes, les Nations Unies favoriseront :

a. le relèvement des niveaux de vie, le plein emploi et des conditions de progrès et de développement dans l’ordre économique et social ;

b. la solution des problèmes internationaux dans les domaines économique, social, de la santé publique et autres problèmes connexes, et la coopération internationale dans les domaines de la culture intellectuelle et de l’éducation ;

c. le respect universel et effectif des droits de l’homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion.

 

  • Art. 56

Les Membres s’engagent, en vue d’atteindre les buts énoncés à l’Article 55, à agir, tant conjointement que séparément, en coopération avec l’Organisation.

[…]

 

  • Art. 103

En cas de conflit entre les obligations des Membres des Nations Unies en vertu de la présente Charte et leurs obligations en vertu de tout autre accord international, les premières prévaudront.

 

Convention de Vienne sur le droit des traités

 

  • Art. 53

Traités en conflit avec une norme impérative du droit international général (jus cogens)

Est nul tout traité qui, au moment de sa conclusion, est en conflit avec une norme impérative du droit international général. Aux fins de la présente Convention, une norme impérative du droit international général est une norme acceptée et reconnue par la communauté internationale des États dans son ensemble en tant que norme à laquelle aucune dérogation n’est permise et qui ne peut être modifiée que par une nouvelle norme du droit international général ayant le même caractère.

 

 

(*) Alfred-Maurice de Zayas, né le 31 mai 19471 à La Havane (Cuba), est depuis 2012 l’expert indépendant des Nations unies pour la promotion d’un ordre international démocratique et équitable 2. Il est historien, avocat et écrivain américain, J.D. (Harvard), Dr Phil. en histoire moderne de l’université de Göttingen, qui a grandi à Chicago. Il est membre des barreaux de New York et de Floride, a travaillé notamment dans le cabinet de Cyrus Vance (1970-1974) à New York. Il s’est rendu an Allemagne avec une bourse Fulbright, a enseigné dans la faculté de droit de l’université de Göttingen où il était chef d’un groupe de travail sur le droit humanitaire, ensuite à l’Institut Max Planck à Heidelberg où il était membre du comité de rédaction de l’Encyclopédie de droit international. Il fut haut fonctionnaire des Nations unies pendant 22 ans (1981-2003), secrétaire du Comité des droits de l’Homme, chef du département de requêtes au Bureau du haut-commissaire aux droits de l’homme à Genève… (Source : Wikipédia)

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Nouvel ordre mondial ni démocratique ni transparent et sans recours !


Mais cela se fera puisque l'information ne circule pas et que les gens s'en fichent !


Si, au moins, chaque lecteur de "La Gazette" répercutait l'info à tous ses proches en recommandant qu'ils fassent pareil, mais ...


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J'emmerde tous les pouvoirs

J'emmerde tous les pouvoirs | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it


Voici une vidéo toujours d'actualité et traduisant mieux ce que j'aurais pu clamer parce que c'est dit par Daniel Balavoine : "J'emmerde tous les pouvoirs".


Tiens, tiens, comme Coluche, c'est aussi un artiste mort "accidentellement" au moment où il dérangeait beaucoup les politiciens en place.


Duc

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Le Parlement européen refuse l’ouverture d’une commission d’enquête sur les Luxleaks

Le Parlement européen refuse l’ouverture d’une commission d’enquête sur les Luxleaks | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Photo : conférence de presse sur l'enquête du Parlement européen sur les LuxLeaks ©European Parliament Conference de presse sur l'enquête du Parlement européen sur les LuxLeaks ©European Parliament

 

 

Le Parlement européen refuse l’ouverture d’une commission d’enquête sur les Luxleaks

 

 

Les trois grands groupes de la coalition favorable à Jean-Claude Juncker se sont mis d'accord pour proposer la création d'une commission spéciale. Un dispositif qui donne moins de pouvoirs pour enquêter sur l'évasion fiscale des entreprises en Europe.

 

La toute puissante conférence des présidents du Parlement européen a décidé jeudi 5 février qu’il n’y aurait pas de commission d’enquête sur le dossier des Luxleaks. Une décision surprenante alors que la demande d’ouverture de cette commission d’enquête sur les pratiques fiscales du Luxembourg avait été signée par suffisamment d'eurodéputés, soit 188 d’entre eux.

 

 

>>Lire : Le Parlement se prononce pour l'ouverture d'une commission d'enquête sur les Luxleaks

 

 

L’indépendance des services du Parlement européen en question

 

Les services juridiques du Parlement européen avaient recommandé, il y a 48 h, aux présidents de groupe, de refuser la création d’une telle commission en estimant que la proposition était mal ficelée.

 

Les experts jugeaient que la proposition de création de commission d’enquête omettait de préciser l’objet de l’enquête, et ne fournissait pas suffisamment d’éléments pour identifier clairement les infractions et les cas de mauvaise administration allégués. Un argument qualifié d’argutie juridique par les Verts, qui estiment qu’un autre expert aurait pu dire l’inverse. « Avec de tels arguments, le service juridique pourrait interdire l’ouverture de toute commission d’enquête » regrette l'eurodéputé Vert belge Philippe Lamberts.

 

L’argument juridique a permis au président du Parlement européen, Martin Schulz, d’éviter de présenter la proposition en session plénière. À la place, la conférence des présidents a proposé que la plénière se prononce sur la création d’une commission spéciale, une question qui devrait être soumise au vote la semaine prochaine.

 

 

Quand les signataires se retirent

 

La demande de création d’une commission d’enquête avait été lancée par le groupe des Verts, avant d’être soutenue par la gauche radicale et d’un certain nombre de députés européens de l'ensemble de tous bords politiques.  

 

 

>>>Lire : La coalition pro-Juncker tente d'éviter une commission d'enquête sur les Luxleaks.

 

 

Au total, 194 députés avaient initialement signé la demande d’ouverture de cette enquête. Mais certains élus ont ensuite retiré leur signature : de 192 début janvier, il ne restait plus que 188 signatures le 5 février.

 

« Les membres du PPE ont été la proie de fortes pressions de la part de leur parti pour qu’ils retirent leur signature, et la plupart l’ont fait » constate une source au Parlement européen.

 

Parmi eux, le député européen Jérôme Lavrilleux, qui reste membre du PPE mais n’est plus membre de l’UMP, ce qui le place dans une position délicate. D’autant que le Parlement européen doit se prononcer prochainement sur la demande de levée de son immunité parlementaire.

 

« La conférence des présidents a décidé à la majorité qu’une commission spéciale aurait plus de pouvoirs et serait plus adaptées à traiter le sujet » a de son côté expliqué Martin Schulz, le président du Parlement européen, lors d’un point presse, tout en rappelant que le Parlement avait l’expérience des deux types de commission et qu’aucune des deux ne posait problème.

 

 

Des commissions d’enquête rarissimes

 

Les commissions d’enquête sont en fait très rares, puisqu’il n’y en a eu que 3 depuis que le Parlement européen existe, dont celle sur la vache folle, alors que les commissions spéciales sont légion.

 

En 1996, le Parlement européen avait déjà refusé la création d’une commission d’enquête à propos du scandale d’Echelon, un système d’interception des communications mis en place par les États-Unis et d’autres pays anglo-saxons.

 

 

Compétences réduites mais un champ d’enquête élargi pour la commission spéciale

 

Par rapport à une commission d’enquête, une commission spéciale a moins de pouvoir, mais peut se pencher sur des sujets plus larges ; notamment, elle se penchera sur les rescrits fiscaux conclus par les pays ciblés comme le Luxembourg, les Pays-Bas ou l’Irlande dans le passé et dans le présent.

 

Mais les deux types de commission n’ont pas les mêmes droits d’accès aux documents nationaux : la commission d’enquête aurait eu accès à tous les documents nationaux, la commission spéciale n’aura accès qu’aux documents européens.

 

« Je suis très optimiste sur le fait qu’une commission spéciale puisse apporter de vraies améliorations » a estimé le président du Parlement européen.

 

 

Les Verts  furieux

 

Les Verts et la gauche radicale se sont montrés très frustrés de cette décision, notamment le Vert belge Philippe Lamberts.

 

« Nous nous sommes battus, ça a été une longue bataille, parce que la commission d’enquête est l’outil le plus fort contre les problèmes administratifs en UE » a expliqué Philippe Lamberts, estimant que les trois principaux groupes du Parlement européen se sont mis d’accord contre la minorité.

 

« Les trois grands groupes ne voulaient pas donner aux forces minoritaires ce qu’ils voulaient » a assuré Philippe Lamberts.

 

 « Je suis très déçu de ce résultat. Je suis furieux que le droit des minorités au sein d’un Parlement européen soit bafoué à ce point. C’est une agression envers la démocratie européenne ! » s’est exclamé Sven Giegold, élu dans le groupe des Verts en Allemagne.

 

«Le Groupe PPE est déterminé à agir pour garantir l'équité et la transparence au niveau fiscal en Europe », a déclaré Manfred Weber, président du Groupe PPE au Parlement européen, à la suite de la décision prise aujourd'hui par les présidents de groupes politiques au Parlement européen, de mettre en place une commission spéciale chargée de rédiger un rapport d'enquête sur l'équité fiscale en Europe. 

 

« La délégation socialiste française avait soutenu et s’était mobilisée pour la création d’une commission d’enquête » rappelle Pervenche Berès.


« Désormais, nous allons déployer toute notre énergie pour avancer avec les moyens en place en matière fiscale car l’urgence est là ; les chantiers sont nombreux : fiscalité du numérique, taxe sur les transactions financières, impôt sur les sociétés, reporting pays par pays, etc. Avec les moyens à notre disposition, nous ferons notre travail comme nous l’avons toujours fait contre l’évasion fiscale » estime l’eurodéputée.

 

«L’Europe donne l’impression qu’elle a des choses à cacher. Ce n’est absolument pas un bon signal ! » estime Hugues Bayet du PS belge, en charge des affaires économiques au Parlement européen.

 

 

 

Par euractiv.fr –le 5 février 2015

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Le pouvoir des mensonges

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Le pouvoir des mensonges

Par Paul Craig Roberts (*)

 

C’est une des ironies de l’Histoire qui veuille que le monument à la gloire de Lincoln soit un endroit sacré du mouvement des droits civiques avec celui de l’endroit où Martin Luther King délivra son célèbre discours « J’ai fait un rêve ».

 

Lincoln n’a jamais pensé que les noirs étaient les égaux des blancs. Le plan de Lincoln était de renvoyer les noirs en Afrique et s’il n’avait pas été assassiné, renvoyer les noirs en Afrique aurait sans aucun doute été sa politique d’après-guerre.

 

Comme l’a établi de manière conclusive Thomas Di Lorenzo et un bon nombre d’historiens, Lincoln n’a pas envahi la confédération (sudiste) afin de libérer les esclaves. La proclamation de l’émancipation ne s’est pas produite avant 1863 (NDT : rappelons que la guerre « civile » aux États-Unis, plus justement guerre de Sécession eut lieu entre 1861 et 1865), lorsque l’opposition contre la guerre augmenta dans le Nord malgré les mesures d’État policier prises par Lincoln pour réduire au silence les opposants, dissidents et la presse d’opposition. La proclamation d’émancipation fut une mesure de guerre prise par Lincoln investi des pleins pouvoirs à cause de la guerre. La proclamation permettait ainsi que les esclaves noirs émancipés soient immédiatement enrôlés dans l’armée du Nord pour compenser ses lourdes pertes. Le Nord espérait aussi que la proclamation pousserait les esclaves à la révolte dans le Sud pendant que les hommes du sud étaient à la guerre, ce qui aurait eu pour effet de retirer des troupes sudistes du front pour protéger femmes et enfants à l’arrière. Le but était de précipiter la chute du sud sécessionniste avant que l’opposition politique à Lincoln au Nord ne devienne trop importante.

 

Le monument Lincoln (Lincoln Memorial) fut construit non pas parce que Lincoln « libéra les esclaves », mais parce que Lincoln sauva l’empire. En tant que sauveur de l’empire, si Lincoln n’avait pas été assassiné, il serait devenu un empereur à vie.

 

Comme l’écrit très bien le professeur Thomas Di Lorenzo : « Lincoln passa son entière carrière politique à tenter d’utiliser les pouvoirs étatiques pour le bénéfice de la riche élite entrepreneuriale (les 1 % d’aujourd’hui), d’abord dans l’Illinois, puis dans le Nord en général, au travers des tarifs protectionnistes, des avantages corporatistes pour les entreprises du BTP, des voies fluviales et des chemins de fer et d’une Banque Nationale contrôlée par des politiciens comme lui pour tout financer. »

 

Lincoln était un homme d’empire. Dès que le Sud fut conquis, ravagé et pillé, il envoya sa collection de criminels de guerre comme les généraux Sherman et Sheridan, massacrer et exterminer les Indiens à l’intérieur du pays (NDT : Sioux, Cheyennes, Arapahos, Crow, Pieds-Noirs, Comanches, Kiowas, Missourias, Osage, Cree, Ojbiwe, Pawnees, Poncas, Wichitas pour ne citer que les nations les plus connues…) dans ce qui fut un des pires actes de génocide de l’histoire de l’humanité (NDT : pour les « fans » de la compétition victimaire dont nous ne faisons pas partie, le plus grand génocide de l’humanité ayant été sans conteste celui des nations amérindiennes sur l’ensemble du continent américain depuis 1492. Génocide perpétré par les Européens sous édits du Vatican se chiffrant entre 70 et 100 millions de morts selon les sources…)

 

Aujourd’hui, même les sionistes israéliens se réfèrent à l’extermination des Indiens des Grandes Plaines par Washington comme le modèle à suivre pour le vol de la Palestine par Israël.

 

La guerre d’agression du Nord fut faite à propos des tarifs et de l’impérialisme économique du Nord. Le Nord était protectionniste, le Sud était pour le libre-échange. Le Nord voulait financer son développement économique en forçant le Sud à payer plus cher les produits manufacturiers. Le Nord passa la tarification Morrill qui fit plus que doubler le ratio de tarification à 32,6 % et monta même jusqu’à 47 %. La tarification détournait ainsi les bénéfices du Sud résultant de ses exportations agricoles, dans les coffres des industriels et fabricants nordistes. La tarification était faite pour rediriger les dépenses en produits manufacturiers du Sud de l’Angleterre vers les biens de consommation plus chers produits par le Nord.

 

Voilà pourquoi le Sud quitta l’Union, ce qui était un droit à l’autodétermination sous la constitution des États-Unis.

 

L’objectif de la guerre de Lincoln était de sauver l’empire et non pas d’abolir l’esclavage. Dans son premier discours inaugural, Lincoln fit « une défense de fer de l’esclavage ». Son but était de conserver le Sud dans l’Union malgré la tarification Morrill. Quant à l’esclavage, Lincoln dit ceci : « Je n’ai aucun but d’interférer directement ou indirectement avec l’institution de l’esclavage dans les États où il existe. Je crois que je n’ai aucun droit de le faire et je n’ai aucune inclinaison à le faire. » Cette position fut celle de la plateforme politique du parti républicain en 1860, rappela Lincoln à son audience. Lincoln ajouta qu’il soutenait avec ferveur la loi sur les esclaves fugitifs (Fugitive Slave Act) et sa mise en application, qui demandait aux nordistes de pourchasser et de rendre les esclaves qui s’enfuyaient ; il donna également son soutien à l’amendement Corwin à la constitution, qui avait déjà passé le vote de la chambre basse et du sénat et qui interdisait toute interférence fédérale avec l’esclavage. Pour Lincoln et ses alliés, l’empire était bien plus important que les esclaves.

 

Di Lorenzo explique ce que fut l’arrangement que Lincoln offrit au Sud. Mais, alors que l’empire était plus important pour le Nord que l’esclavage, pour le sud, éviter la grosse taxation des produits manufacturiers, ce qui était de fait un impôt sur les bénéfices des exportations de son agriculture, était plus important que les garanties du Nord apportées pour l’esclavage.

 

Si vous voulez vraiment déloger le lavage de cerveau en règle au sujet de la guerre d’agression du Nord sur le Sud, lisez les livres de Di Lorenzo « The Real Lincoln » et « Lincoln Unmasked ».

 

La soi-disant « guerre civile » n’était pas du tout une guerre civile. Dans une guerre civile, les deux côtés de la belligérance combattent pour s’approprier le contrôle du gouvernement du pays. Le Sud ne se battait pas pour contrôler le gouvernement fédéral (de Washington). Le Sud avait fait sécession et le Nord refusait de le laisser partir. (NDT En Europe, en France, on ne parle pas souvent de « guerre civile » au sujet de cette guerre, mais bien de « guerre de sécession ». Il faut savoir que constitutionnellement, le Sud avait parfaitement le droit de le faire, le Nord utilisa la force pour l’en empêcher. Une fois de plus, pour diaboliser une des parties [celle qui fut vaincue bien sûr], on présenta l’affaire comme étant une guerre des gentils antiesclavagistes du Nord se battant contre les méchants sudistes esclavagistes, une manipulation historique de plus quand on regarde les choses de près, ce qui bien sûr est inacceptable pour le parti de la pensée unique sévissant globalement…)

 

La raison pour laquelle j’écris à ce sujet est pour illustrer comment l’Histoire est falsifiée au gré des agendas politiques. Je suis un inconditionnel des droits civils et j’ai participé au mouvement lorsque j’étais étudiant à l’université. Ce qui me dérange est la transformation de Lincoln, un tyran qui était un agent du 1 % et qui avait la volonté de détruire quiconque et quoi que ce soit pour préserver l’empire, en un héros des droits civils. À qui le tour ? Hitler ? Staline ? Mao ? George W. Bush ? Obama ? John Yoo ? Si Lincoln est un héros des droits civils, alors des bourreaux peuvent aussi bien l’être. Ceux qui assassinent des femmes et des enfants dans les guerres de Washington pourraient bien être retournés en défenseurs des droits des femmes et des enfants. Ils le seront probablement du reste.

 

Ceci est le monde pervers et tordu dans lequel nous vivons. Vladimir Poutine, le président de la Russie, est confronté au renversement par Washington d’un gouvernement dûment élu en Ukraine, un allié de la Russie et durant des siècles partie de la Russie elle-même, alors que Poutine est lui faussement accusé d’envahir l’Ukraine. La Chine est accusée par Washington de violer les droits de l’Homme tandis que Washington a assassiné plus de civils au XXIe siècle que tous les autres pays combinés.

 

Partout en Occident des mensonges monstrueux demeurent intouchés. Les mensonges sont institutionnalisés dans les livres d’histoire, dans les programmes scolaires et universitaires, dans les déclarations politiques, dans les mouvements et les causes et dans la mémoire historique.

 

Ce sera très très dur pour l’Amérique de survivre aux mensonges qu’elle vit.

 

 

 

Par Paul Craig Roberts (*) -  traduit de l’anglais par Résistance 71 - reseauinternational.net – le 15 avril 2015

Source : http://www.paulcraigroberts.org/2015/04/13/power-lies/

 

(*) Dr Paul Craig Roberts a été assistant au Secrétariat du Trésor des États-Unis, chargé de la politique économique sous le gouvernement de Ronald Reagan ; et éditeur associé du Wall Street Journal. Il a été journaliste pour Business Week, Scripps Howard News Service, et Creators Syndicate. Il a enseigné dans de nombreuses universités. Ses articles sur Internet sont largement suivis et reçoivent un accueil mondial. Ses derniers livres sont : The Failure of Laissez Faire Capitalism and Economic Dissolution of the West and How America Was Lost. (Source : lesakerfrancophone.net).

Koter Info's insight:


La vraie face de Lincoln et le mode d'emploi réel d'époque (comme toujours actuel) des USA. Rien n'a fondamentalement changé depuis Lincoln : domination, guerre, chaos et génocide.


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Sexe, pouvoir et emploi en Belgique

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Sexe, pouvoir et emploi en Belgique

Par Joël Girès

 

 

On entend souvent dire aujourd’hui que les hommes et les femmes sont pratiquement égaux en Belgique. Malheureusement, c’est loin d’être le cas. Examinons cela à travers leur répartition sur le marché du travail. Observer les inégalités dans l’emploi est important, celles-ci étant extrêmement déterminantes (dans le sens qu’elles ont un fort impact sur toutes les autres – sur les inégalités de revenu, de santé ou de logement, par exemple) [1].

 

Pour voir quelle est la situation en Belgique, j’ai classé les individus selon leur emploi [2]. Les données proviennent d’une enquête récente pratiquée dans toute la Belgique [3]. L’étude présentée ici ne considère que les personnes qui ont un emploi ou qui sont demandeuses d’emploi (elles ont entre 20 et 60 ans) [4]. La classification possède 11 catégories. Les chefs d’entreprise sont les personnes qui contrôlent les moyens de production (les entreprises). Les indépendants sont les personnes ayant un emploi, mais qui ne sont pas subordonnés à un employeur. Les salariés constituent quant à eux la plus grande partie de la population. Ils se définissent comme soumis à la volonté d’un employeur. Cependant, les situations sont diverses au sein des salariés. C’est pourquoi ceux-ci sont différenciés selon leur autorité sur le lieu de travail et les privilèges associés à leur emploi. L’autorité est définie par le fait de superviser d’autres salariés. Ce critère permet de différencier les superviseurs des travailleurs.

 

Les privilèges de l’emploi occupé sont ceux en termes de salaire et de prestige. Ils sont abordés en distinguant 3 catégories d’emplois : les emplois très privilégiés désignent les emplois de juge, médecin ou ingénieur par exemple, qui donnent accès à de hauts salaires (ce type de personne vit dans un ménage qui gagne en moyenne, pour tous ses membres [5], 3 510 € net) et à beaucoup d’estime ; les emplois moyennement privilégiés désignent les emplois tels ceux d’infirmier, d’électricien ou d’enseignant dans le secondaire, considérés comme estimables, mais cependant moins bien payés (revenu net du ménage : 2 852 €) et réputés que les précédents ; les emplois peu privilégiés regroupent les emplois déconsidérés, peu valorisants et mal payés (revenu net du ménage : 2 523 €), comme les emplois d’ouvriers de manutention ou d’employés de bureau, à la poste ou dans l’administration [6].


En ce qui concerne les demandeurs d’emploi, ils sont classés selon leur dernier emploi. Les demandeurs d’emploi n’ayant jamais travaillé sont, eux, regroupés au sein d’une catégorie spécifique, représentant la part de la population active la plus démunie. Le résultat apparaît dans le tableau 1. (Voir ci-dessus)

 

Dans ce tableau, les cases ont été coloriées en orange lorsque l’on est sûr de trouver significativement plus d’hommes que de femmes dans la catégorie considérée [7].


Il est frappant de constater à quel point les positions de pouvoir sont occupées bien plus souvent par des hommes que des femmes. En effet, les hommes sont surreprésentés parmi les chefs d’entreprise et les superviseurs. Les deux seules catégories où les femmes sont surreprésentées (cases bleues du tableau) sont les travailleurs peu privilégiés et les personnes n’ayant jamais travaillé, position la plus défavorisée ! Détaillons ces résultats.

 

Si l’on considère uniquement les propriétaires d’entreprise (figure 1 – dans celle-ci ne sont repris que les propriétaires d’entreprise avec au moins 1 salarié), on remarque que ce sont pour 70 % d’entre eux des hommes. Et si l’on regarde du côté des salariés qui ont de l’autorité sur leurs lieux de travail (figure 2), la proportion est semblable : elle est de deux tiers. Par contre, si l’on considère la catégorie des travailleurs peu privilégiés (figure 3), ceux-ci comprennent une majorité de femmes [8].

Ainsi, dans le monde de l’emploi, les donneurs d’ordres sont bien souvent des hommes, et ceux qui les reçoivent, des femmes...

 

Revenons maintenant sur la question des privilèges associés aux emplois [9]. Dans la figure 4, on peut voir la répartition par sexe des emplois selon les privilèges qu’ils ouvrent. On remarque que les hommes en emploi occupent plus souvent que les femmes des postes très et moyennement privilégiés, et moins souvent des postes peu privilégiés [10].

 

Le diplôme est généralement invoqué pour justifier que certains ont de « meilleurs » emplois que d’autres (ceux-ci étant plus « qualifiés »). Or, si l’on s’intéresse au plus haut niveau de diplôme obtenu par les hommes et femmes [11], les différences ne vont pas dans le même sens que celles montrées pour les postes privilégiés. En effet, la figure 5 indique une proportion semblable d’hommes et de femmes ayant des diplômes de l’enseignement supérieur de type long [12]. Et si l’on prend aussi en compte les diplômes de l’enseignement supérieur de type court, on peut considérer les femmes sur le marché de l’emploi comme étant plus diplômées que les hommes [13] ! Malgré cela, les femmes occupent moins souvent les postes les plus privilégiés.

 

Les chiffres ne permettent pas de voir quels mécanismes sont à la base de cette inégalité ; on peut néanmoins penser que celle-ci est produite par le fait que les secteurs où la présence de femmes est importante (enseignement, santé, social) sont moins valorisés (socialement et financièrement), par le fait que les femmes ont moins de temps à consacrer à une carrière, s’occupant encore bien davantage que les hommes des tâches domestiques et ménagères, et par les discriminations sexistes dans le monde du travail [14].

 

 

Par Joël Girès - inegalites.be – le 1er mars 2015

 

 

Notes

[1] 

Voir Alain Bihr et Roland Pfefferkorn, Le système des inégalités, Paris, La Découverte, 2008.

[2] 

La classification utilisée est inspirée de celle développée par le sociologue Erik Olin Wright : Class counts. Student edition, Cambridge, Cambridge University Press, 2000. Son opérationnalisation est issue des procédures que H. Leiulfsrud, I. Bison et E. Solheim proposent dans le document Social class in Europe II.

[3] 

Il s’agit de The European Social Survey (ESS). La base de données est librement accessible sur le site : http://www.europeansocialsurvey.org.

[4] 

Sont exclus de l’échantillon les étudiants, les personnes ne travaillant pas du fait d’un handicap ou d’une maladie durable, les retraités et les personnes au foyer.

[5] 

Je ne dispose que du revenu du ménage, et pas du salaire individuel de la personne. Ce dernier montrerait sans doute des différences plus importantes.

[6] 

Cette échelle des postes plus ou moins privilégiés est créée sur base du nom du métier occupé par la personne. Je pars de l’idée que certains groupes professionnels ont agi pour faire reconnaître leur emploi comme plus « complexe » que d’autres, légitimant par là divers privilèges, notamment en termes de salaires.

[7] 

L’enquête ayant été menée auprès d’un échantillon d’un peu plus de 4 700 personnes, on ne peut parfois pas dire si de petits écarts en pourcentage se retrouvent effectivement dans la population belge en général. Ce n’est pas le cas des cellules coloriées en orange ou en bleu, dont il est presque certain que la surreprésentation est réelle.

[8] 

Les écarts présentés par les figures 1 à 3 sont tous statistiquement significatifs.

[9] 

Ce point ne concerne donc que les salariés.

[10] 

Concernant les postes privilégiés, tous les écarts de proportion entre hommes et femmes sont statistiquement significatifs.

[11] 

La classification des diplômes comprend quatre niveaux. Le niveau supérieur long désigne les personnes qui ont un diplôme de l’enseignement supérieur non universitaire de type long, universitaire, ou un doctorat. Le niveau supérieur court désigne les personnes dont le diplôme le plus élevé est un graduat. Le niveau secondaire supérieur désigne les personnes qui ont au maximum un diplôme du secondaire supérieur (général, technique ou professionnel). Le niveau secondaire inférieur désigne les personnes qui ont au maximum un diplôme du secondaire inférieur (général, technique ou professionnel). Ce dernier niveau comprend également les personnes qui ont au maximum un diplôme du primaire ou qui n’ont aucun diplôme.

[12] 

En effet, la différence de proportion d’hommes et de femmes ayant des diplômes de l’enseignement supérieur long n’est pas statistiquement significative.

[13] 

Mis à part le niveau de diplôme le plus élevé, les écarts de proportion entre hommes et femmes concernant le niveau d’éducation sont tous statistiquement significatifs.

[14] 

Voir le rapport très complet Femmes et hommes en Belgique. Statistiques et indicateurs de genre. Édition 2011.

 

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