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France - Mise en demeure pour la ferme-usine des 1 000 vaches

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France - Mise en demeure pour

la ferme-usine des 1 000 vaches

 

 

Suite à l’effroyable témoignage d’un salarié, la ferme-usine des 1000 vaches vient d’être mise en demeure par la préfecture de la Somme. Une première victoire pour les associations de riverains et de protection animale.

 

On imaginait bien que l’usine des 1 000 vaches n’était pas un espace de bien-être… Mais désormais, la réalité dépasse la fiction. Tout est parti d’un mail envoyé d’abord anonymement à l’association Novissen qui lutte depuis toujours contre cette « ferme » installée à Drucat, dans la Somme. « Dans son message, un monsieur expliquait être salarié aux mille vaches, se souvient Michel Kfoury, le président d’honneur de Novissen. Il voulait nous dire des choses, nous lui avons proposé un rendez-vous. Pour prouver son identité, il nous a présenté sa fiche de paie. Puis il nous a montré des photos et nous a livré son effroyable témoignage. »

 

Le voici : 

 

« Ce qui frappe d’abord, c’est l’état des vaches : épuisées, elles tombent de fatigue, elles sont amorphes, comme mortes, sans réaction. Elles ne réagissent pas aux gestes qu’on fait près d’elles et auxquels elles réagissent normalement. On doit utiliser une pince hanche pour les relever quand elles ne le peuvent plus ; au moins deux vaches tombent par semaine. On utilise aussi ces pinces quand elles se trouvent coincées dans leur logette et ne peuvent plus en sortir. Les vaches sont nourries par un approvisionnement fait une fois par jour, composé de maïs d’ensilage, de pulpe de betteraves, de tourteaux de soja (10 à 15 %) et de tourteaux de colza. C’est une nourriture trop azotée, semble-t-il. La nourriture vient de partout, en grande quantité, de France et de Belgique. Les 5 à 10 % qui sont la quantité normalement refusée par les vaches, et qui devraient être jetés, car gâtés, sont systématiquement collectés, remélangés et reproposés aux animaux, cela fait de la nourriture avariée, avec des boulettes de pourri.

 

Le silo de stockage de maïs n’est pas régulièrement nettoyé et récemment on en a sorti deux remorques de nourriture pourrie. On compte une mortalité d’environ 2 à 3 vaches et 5 veaux par semaine. (…) Les vaches sont très sales, beaucoup dans les logettes n’arrivent pas à se relever, trop faibles. Sur le troupeau on compte au moins 300 boiteries. Les pattes souffrent beaucoup à cause du sol en béton. Le béton qui est partout est l’ennemi de la vache. La cause première de la mortalité est le manque de suivi. Les vaches sont malades et ne sont pas toujours soignées. Elles vivent dans leurs excréments de façon permanente. Les logettes devraient être paillées tous les 2 jours, c’est fait tous les 15 jours ! Quand les vaches sont à bout et ne peuvent plus se lever ni marcher, le nouveau responsable de la marche de l’usine, les euthanasie parfois lui-même (jusqu’à quatre dans la même semaine) avec un produit inconnu qu’il injecte à l’animal, alors que c’est un vétérinaire qui devrait normalement le faire »…

 

 

« Le personnel est payé au SMIC, même

les quelques personnes compétentes »

 

Quant au personnel, « il est complètement usé, selon ce témoin. Il y en a de moins en moins, 15 personnes, c’est très insuffisant pour s’occuper du troupeau. Il y a trois traites actuellement par jour. Celle du matin dure de 5 h à 10 h 30-11 h. (…) L’ambiance de travail est très mauvaise. La plupart des personnes embauchées (en dehors de 4 ou 5) sont non qualifiées pour le travail proposé avec des formations en électricité, plomberie… pour s’occuper des animaux. Le personnel se sent maltraité et non considéré. Il y a beaucoup de turn-over : toutes les semaines, 2 à 3 nouvelles personnes s’en vont ; d’autres arrivent. Le personnel est payé au SMIC, même les quelques personnes compétentes.

 

Quand le patron vient visiter, il note les anomalies qu’il voit, et les réprimandes descendent ensuite sur le personnel. (…) Pour tout laver après la traite, le soir, il faut 1 h 30 à 2 h. Or pour faire ce travail, ils ne sont payés que 20 minutes, pas plus. Et il ne faut pas utiliser trop d’eau, car elle coûte cher. Pour l’abreuvement aussi, le personnel doit utiliser le moins d’eau possible. Par exemple, les abreuvoirs sont noirs : ils devraient être nettoyés chaque jour, ils le sont tous les 15 jours (…). Enfin « cela fait bien rire tout le monde quand on entend qu’il y a 485 vaches traites dans l’usine. Il y en a bien plus ! 725 environ sont en période de lactation, et passent au roto tous les jours. Ce nombre (725) a été attesté sur le compteur du roto, c’est enregistré par la machine, il suffit de vérifier ! En plus de ces 725 laitières, il y a environ 100 vaches taries et en attente de vêlage. En comptant les vaches qui vont se faire traire (plus de 700), celles qui sont à l’infirmerie et celles qui sont prêtes à vêler, on peut estimer le troupeau actuel à plus de 800 vaches, loin du chiffre officiel déclaré de 485 vaches lors du Comité de suivi ».

 

L’homme, licencié depuis, confirme ses propos au magazine Reporterre, ajoutant que « les vaches ont des ongles trop long ou des sabots qui pourrissent ». Joint par Marie Astier, journaliste à Reporterre, Michel Ramery, l’entrepreneur en travaux publics qui a fondé la ferme-usine des mille vaches, balaie ces accusations : « Une vache, ça vaut de l’argent, ce n’est pas dans notre intérêt de les faire mourir, elles sont bien soignées. Quand quelqu’un perd une vache sur cinquante, ça fait mal. Mais c’est vrai qu’avec 700 vaches, on peut en perdre 14 »… Il admet en revanche qu’il y a « à peu près 500 vaches. Ou peut-être 700. Cela fait un mois que je suis parti, mais il y en a quelques une de plus qui sont arrivées. Donc mettons 700 ».

 

 

« C’est une première victoire vers la fermeture »

 

Publié lundi dernier sur le site du magazine Reporterre, le témoignage fait l’effet d’une bombe. Dès le lendemain, Nicole Klein, préfète de la Somme, demande aux inspecteurs de la DDPP (Direction Départementale de Protection des Populations) de réaliser un contrôle du site. Puis décide, « dans un souci de transparence », de communiquer l’intégralité de leurs constatations. On apprend donc que « l’état corporel général des vaches laitières est satisfaisant, à l’exception d’une dizaine de vaches à l’infirmerie, qui sont pour certaines maigres à très maigres (…)L’alimentation est présente et de qualité. (…) Les vaches sont dans l’ensemble bien adaptées aux modalités de couchage en logette et ne présentent pas pour la majorité d’entre elles un état de saleté anormal (…) Quelques vaches adultes ont des pieds à parer, mais dans l’ensemble les pieds sont en bon état. Il semble que l’épisode de boiterie soit maîtrisé. »


Seuls points noirs, toujours selon les services d’inspection : « sur une des 4 aires de stationnement des animaux, le système d’évacuation des urines et des excréments n’est pas satisfaisant. Il en est de même dans le couloir d’accès à l’aire d’attente de la salle de traite. La stagnation de bouses et de liquides à ces endroits n’est favorable ni au confort des animaux ni à leur état sanitaire, ces points doivent être corrigés. (…) À la date de l’inspection, un effectif de 796 vaches laitières a été constaté, soit un dépassement de 296 vaches (+ 59,2 %) ». Résultat : « l’exploitant a la possibilité de faire valoir ses observations dans un délai maximal de 7 jours. À l’issue de ce délai, il lui sera notifié un arrêté préfectoral de mise en demeure visant à respecter les prescriptions de l’arrêté préfectoral du 1er février 2013 en abaissant les effectifs de vaches laitières à hauteur de 500 vaches dans les plus brefs délais ».

 

« C’est une première victoire vers la fermeture, se félicitent Michel Kfoury et Francis Chastagner, président de l’association Novissen, reçus ce matin à la préfecture de la Somme. Michel Ramery a toujours dit qu’avec un cheptel de seulement 500 bêtes, ce serait la faillite ». De son côté, l’association de protection animale L214 a porté plainte pour mauvais traitement auprès du Procureur de la République d’Amiens. « Nous demandons aux autorités d’ordonner la fermeture de cet élevage qui n’aurait jamais dû voir le jour », explique Brigitte Gothière, porte-parole de L214. À bon entendeur…

 

Pour rappel, selon la carte publiée en février dernier par la Confédération paysanne, 29 projets de ferme-usine sont à l’étude ou déjà à l’œuvre en France. Alors que 90 % des Français s’opposent à l’élevage intensif, le projet sur le point d’aboutir est celui de la « ferme » des 1 000 veaux. Saint-Martial-le-Vieux (Creuse) prépare l’ouverture d’une usine d’engraissement de 8 000 m2 pouvant entasser 1 400 animaux. Sans accès à l’extérieur, reclus dans un box au sol bétonné, les veaux devront doubler leur poids en 200 jours. Ils seront égorgés à l’âge de 15 mois à l’abattoir d’Ussel (Corrèze) selon le rite halal, la viande étant destinée aux marchés méditerranéens. Coût du projet : 1,8 million d’euros… dont 1,2 million d’euros d’aides publiques. Il est urgent de dire stop.

 

 

Par 2012un-nouveau-paradigme.com – le 11 juin 2015

 

Plus d’infos sur novissen.com, l214.com et reporterre.net

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France - Comment les agrocarburants ont conduit aux fermes usines

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Dessin : Tommy Dessine pour Reporterre

 

 

France - Comment les agrocarburants ont

conduit aux fermes usines

 

Si Sofiprotéol a bâti sa fortune sur les agrocarburants, bien aidé par les pouvoirs publics, il assied désormais sa puissance dans le monde agricole par l’élevage. Rebondissant sur la crise du lait, il s’est positionné comme le leader de l’alimentation animale. Et favorise le développement des fermes usines pour écouler ses stocks. Avec une nouvelle astuce pour faire accepter le tout : la méthanisation, nouvelle énergie propre à la mode.

 

Sofiprotéol a donc construit son empire sur un agrocarburant, le diester, qu’il a abondamment financé grâce aux fonds publics. Soit. Mais il reste un problème à régler : que faire des déchets issus de sa production ?

 

Car la trituration, l’étape industrielle qui transforme le grain de colza ou de tournesol en huile végétale, laisse à sa suite un coproduit, qu’on appelle le tourteau. Pour 1 000 kg de ces graines qui donneront le diester, on obtient 560 kg de tourteaux.

Or la production de diester se faisant plus importante avec le boom des années 2000, le volume de tourteaux disponible est devenu chaque année plus conséquent.

 

Heureusement pour Sofiprotéol, ce tourteau constitue une nourriture très protéinée, parfaite pour remplacer dans l’alimentation animale le soja OGM tant décrié, venu d’Amérique. Cela tombe d’autant mieux que la filière des agrocarburants ne s’avère plus si rentable : « Les tourteaux sont indispensables à l’équilibre économique de la filière huile alimentaire et carburant », explique Luc Ozanne, à la direction des engagements Sofiprotéol.

 

 


Valorisation indispensable en alimentation animale

 

Compte tenu des volumes à écouler, l’avenir du diester s’avère dépendre de la capacité des animaux à absorber ces tourteaux. C’est pourquoi, en 2007, Sofiprotéol prend le contrôle de Glon-Sanders, alors le n° 1 en France de l’alimentation animale. La « pieuvre Sofiprotéol«, comme la qualifie Attac, participe également à l’offre publique d’achat d’Evialis, une autre entreprise spécialisée dans l’alimentation animale.

 

 

Le colza est mis à la mode dans l’alimentation animale. Les coopératives s’y mettent, à l’image d’InVivo qui « engage des études sur les coproduits (du colza énergétique NDLR) et leur utilisation en alimentation animale ».

 

Les chambres d’agriculture font de la réclame, comme celle de la Haute-Marne avec cette accroche : « Le tourteau de colza pur, ça marche aussi !! ».

 

Dans le même temps, afin de rendre le colza digeste pour tous les animaux, l’entreprise met à contribution la recherche, celle de l’INRA (Institut national de la recherche agronomique) notamment. On le teste même pour nourrir le canard.

 

Le tourteau se vend partout via des alliances, car « Sofiprotéol est associé à la plupart des acteurs économiques de l’agriculture, coopératives et négociants ».

 

Mais le résultat tarde à venir : en 2009, les incorporations de tourteaux de colza dans l’alimentation animale sont de 31 000 tonnes alors que la production de diester atteint 1,8 million de tonnes. Le compte n’y est pas.

 

 

Le défaut de l’herbe : elle pousse toute seule

 

Pour Sofiprotéol, il faut donc s’assurer de meilleurs débouchés. Les vaches laitières, très gourmandes en protéines, en représentent un très intéressant : la France, deuxième producteur laitier d’Europe, en compte alors pas loin de 4 millions. Problème, nos bovins consomment encore en majorité « cette herbe suspecte de pousser toute seule », dixit un ancien dirigeant de la FNSEA.

 

C’est à ce moment-là qu’intervient la crise du lait, en 2008 et 2009. Elle marque le tournant. La FNPL (Fédération nationale des producteurs de lait), branche laitière de la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles) prône la contractualisation comme solution à la crise.

 

De quoi s’agit-il ? En échange de la collecte d’un volume de lait garanti, l’éleveur doit s’engager à acheter à sa coopérative tous les produits qu’elle peut lui vendre. En tête desquels… l’alimentation animale.

 

La contractualisation selon le rapport Racine :

http://www.reporterre.net/IMG/pdf/doc_no2_rapport_racine_page_19_et_1.pdf

 

La Fédération nationale des coopératives laitières (FNCL) avait commandé la rédaction d’un règlement intérieur de coopérative laitière au cabinet Racine de droit des affaires, en 2009, avant la contractualisation.

 

L’effet de levier d’un tel contrat serait une aubaine pour Sofiprotéol. Et qui est alors le vice-président de la FNSEA qui pousse dans le sens de cette contractualisation ? Xavier Beulin, qui dirige en même temps Sofiprotéol…

 

Mais la majorité des éleveurs refuse cette clause, tout comme de négocier un contrat en direct avec leur laiterie — souvent des géants comme Lactalis ou Sodiaal. Et devant la levée de boucliers provoquée par cette idée, le projet est plus ou moins abandonné.

 

 

Un fonds laitier géré par Sofiprotéol

 

Au même moment (2008), un fonds interprofessionnel laitier se crée, le Fedil, doté de 15 millions d’euros, pour soutenir la filière laitière. Et à qui est confiée la gestion du Fédil ? À Sofiprotéol.


Joli tour de passe-passe : on ouvre la porte du marché laitier à l’activité industrielle de Sofiprotéol, mais on justifie ce choix par son activité financière. Le mélange des genres est total : « Les élevages laitiers constituent le premier débouché des tourteaux de colza. Il était donc naturel que Sofiprotéol mît son savoir-faire d’établissement financier à la disposition du Centre national interprofessionnel de l’économie laitière (Cniel) pour gérer son Fonds de développement des entreprises de transformation laitière (FeDil) », déclare Sofiprotéol dans son rapport d’activité 2011.

 

L’extrait du rapport d’activité :

http://www.reporterre.net/IMG/pdf/doc_no_4._page16_rapport_activite_sofiproteol_2011.pdf

 

Les fermes tombent les unes après les autres. Les éleveurs sont pris en tenaille entre un prix du lait qui baisse et des charges en hausse : le prix de l’alimentation animale s’est envolé avec celui des céréales (en partie à cause des agrocarburants, qui réduisent l’offre), tandis que le prix du pétrole — nécessaire aux tracteurs, aux machines agricoles, aux engrais, etc. — flambe. Ils demandent une régulation des volumes de lait et un prix qui tienne compte de ces hausses. Sans être entendus. La contractualisation est finalement rendue obligatoire par la Loi de modernisation agricole en 2010. Elle impose un bras de fer très inégal. L’industrialisation de l’élevage est en route, comme le chantent les éleveurs laitiers :

 

 Vidéo des laitiers

 

Le Haut conseil à la coopération agricole (HCCA), alors présidé par… Xavier Beulin, chiffre en 2010 les conséquences dans un rapport au titre explicite : La filière laitière française : la compétitivité aura un prix, des choix inéluctables.

 

 Télécharger le rapport :

http://www.reporterre.net/IMG/pdf/hcca_la_compe_titivite_aura_un_prix.pdf

 

 

Le scénario prévoit la réduction par deux ou par trois du nombre de fermes laitières à l’horizon 2035. Le résultat est connu : il faut compenser par de grandes fermes.

 

 

Le colza, la solution à tous vos problèmes...

 

D’ailleurs, Xavier Beulin ne s’en cache pas : les troupeaux doivent s’agrandir nous dit-il. C’est le seul moyen de s’en sortir.

 

De son côté, un éleveur d’Ille-et-Vilaine, premier bassin laitier de France explique : « On fait grandir les exploitations laitières pour que les éleveurs achètent de plus en plus de colza. Plus le troupeau grandit, moins les vaches vont dehors. C’est trop compliqué de les sortir entre deux traites, de trouver assez de prairies à proximité. Vous verrez : plus il y a de vaches dans une ferme, plus les silos de granulés sont gros ! » Pour lui, pas d’alternative : ses animaux consomment du colza de Glon-Sanders, première filiale dans l’alimentation animale de Sofiprotéol.

 

Sans surprise, la ferme usine des Mille vaches prévoit elle aussi un régime à base de colza. Un vrai avantage selon ce document extrait du dossier présenté par l’actionnaire unique, M. Ramery, pour l’obtention des autorisations.

 

 Dossier de la SCEA de La Cote de la justice, promoteur de la ferme usine des Mille vaches :

http://www.reporterre.net/IMG/pdf/doc_no5_tourteaux_de_colza_1000_vaches.pdf

 

La ferme usine des Mille vaches se fournit-elle chez Sofiprotéol pour son colza ? Rien ne permet de le dire.

 

En tout cas, pour toutes les autres fermes usines, faites le calcul : une vache ingère en moyenne 3,5 kg de tourteau de colza par jour. Soit, pour 1 000 vaches, 3 500 kg de tourteau de colza par jour et 1 277 tonnes par an. Une bénédiction pour le diester ! Comment ne pas souhaiter leur multiplication sur le territoire, quand on produit des tourteaux de colza ?

 

Mais cela ne suffit pas. Car en élevage laitier, la taille ne fait pas la compétitivité. Les fermes les plus rentables sont celles qui transforment le lait et récupèrent la valeur ajoutée autrement captée par les laiteries. Le meilleur exemple est celui des AOC de montagne (Beaufort, Comté, Abondance…) qui sont restées à l’abri de la crise.

 

 

La rente de la méthanisation

 

Alors, comment permettre à une ferme géante d’être compétitive ? La solution prônée, notamment par le rapport sur l’élevage laitier et allaitant du député Germinal Peiro en 2013, est de valoriser les effluents d’élevage. C’est-à-dire la bouse. Ou le lisier pour les cochons. Bienvenue dans le monde enchanté de la méthanisation.

Pour Xavier Beulin, c’est un avenir d’autant plus intéressant qu’il lui permet de nouveau de se draper d’une logique écologique.

 

Le processus est en marche : le gouvernement adopte un plan de méthanisation, doté de 2 milliards d’euros, visant mille fermes avec méthaniseurs d’ici 2020 en France.

 

Oserait-on encore y voir un hasard ? Sofiprotéol se lance dans la méthanisation, nouvelle voie de croissance. Il investit dans les entreprises de méthanisation Biogasyl et Fertigaz et a pris des parts dans un fonds d’investissement notamment tourné vers la méthanisation.

 

Bien sûr, l’installation d’un méthaniseur n’est concevable que pour de grosses exploitations… La boucle est bouclée, et l’économie circulaire devient la caution qui justifie l’industrialisation en marche de l’agriculture. Les agrocarburants ont beau marquer un coup d’arrêt, Sofiprotéol a su devenir indispensable à l’élevage français, intérêt stratégique pour écouler ses tourteaux. Finis les pâturages, adieu, les paysans, voici venues les grandes fermes usines.

 

Tout ceci doit beaucoup à un homme, qui a su forcer les verrous et les clivages du monde agricole. Pour cela, Xavier Beulin a su s’entourer et faire peser son influence dans les plus hautes sphères de la société française. C’est l’objet du dernier volet de notre enquête : 5 — Xavier Beulin, l’homme aux mille bras.

 

 

 

Par Barnabé Binctin et Laure ChanonReporterre – le 26 février 2015


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