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La construction de l’Union Européenne : une organisation libérale au service du capitalisme

La construction de l’Union Européenne :  une organisation libérale au service  du capitalisme | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it


La construction de l’Union Européenne :

une organisation libérale au service

 du capitalisme

 

Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, les pays capitalistes se retrouvent dans une situation économique extrêmement compliquée, avec un fort endettement et des pays à reconstruire matériellement et économiquement. Parce qu’ils devaient rééquilibrer leurs comptes, ils ont fait appel aux États-Unis, qui, ayant tiré très bon compte de la guerre, proposent aux pays européens le plan Marshall, plan d’aide économique, soit de prêt. Le plan est confié à l’OECE (Organisation européenne de coopération économique), qui vise à organiser une coopération économique durable entre pays européens, et exécuter un programme commun de relèvement, l’Economis Cooperation administration, mais également Export-import Bank. Dix-sept pays d’Europe reçoivent ainsi des prêts à travers le Plan Marshall.

 

Les États-Unis, grâce à celui-ci, s’imposent comme régulateur de l’économie en Europe et comme garant d’un impérialisme économique. Ils vont également veiller à empêcher la montée de tout mouvement communiste à l’ouest de l’Allemagne, notamment dans les pays comme la France, où le Parti communiste, au sortir de la guerre, s’est largement renforcé. Les libéraux européens avancent dans le même temps l’idée d’une communauté économique, visant à créer des États-Unis d’Europe sur un modèle étasunien.

 


Ainsi, en 1951, se tient la mise en écrit du traité de Paris sur la CECA (Communauté économique du charbon et de l’acier). Celle-ci vise à mettre en œuvre un marché commun du charbon et de l’acier, en supprimant les droits de douane et les restrictions entravant la libre circulation des marchandises, et en supprimant les aides et subventions accordées aux productions nationales. Ce premier traité signe l’avancée du libéralisme économique, soit le recul du pouvoir de l’État sur les productions économiques, ainsi que l’avancée de la suprématie de l’industrie capitaliste sur la production, soit la dérégulation de la production. Les pays concernés par ce traité sont la RFA, l’Italie, la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg et la France.

 

Les libéraux ne s’intéressent pas seulement aux domaines industriels, mais visent également à joindre à cette union économique une union politique et militaire, face à l’alliance de pays socialistes que constitue le Pacte de Varsovie.

 

En effet, l’idée d’une protection militaire européenne s’éveille également. Suite au déclenchement de la guerre de Corée en 1950, Jean Monnet prend l’initiative de proposer la CED (Communauté européenne de défense), qui serait une armée européenne dans laquelle serait, bien entendu, réintégrée l’armée ouest-allemande, permettant sa remilitarisation face à la montée en puissance des États socialistes, notamment de la RDA.

 

Mais la construction d’une armée européenne se serait également accompagnée d’une communauté politique européenne (CPE), qui serait une fédération des États européens sur le modèle étasunien. Ces deux idées sont finalement abandonnées. 
Cependant, dès 1955, en réponse au Pacte de Varsovie, de nouveaux projets sont impulsés, notamment l’Euratom et le CEEA, projet d’énergie atomique. La communauté européenne devient alors le support, pour les pays européens, de la lutte contre l’Union Soviétique et ses alliés, sur le plan économique avec le libre-échange, mais également par la dissuasion atomique.

 

Le Traité de Rome du 25 mars 1957 vient confirmer la construction d’une coopération économique, mais surtout politique avec la CEE. Le traité a d’abord comme particularité de ne pas avoir de limite temporelle, à la différence de la CECA qui avait une limite de 50 ans. Le Traité de Rome n’a pas non plus de procédure de retrait. Il est également couplé à l’association des territoires dits d’outre-mer (en réalité des colonies), qui garantit la coopération commerciale (zone de libre-échange) entre ceux-ci et chacun des États de la CEE, et la coopération financière avec la FED, celle-ci étant un outil du néo-colonialisme. Il faut souligner qu’en 1957, un certain nombre des anciennes colonies ont conquis par la lutte leur indépendance. Le traité élargit la coopération dans la quasi-totalité des domaines économiques (hormis les domaines publics), qui sont soumis au marché commun, c’est-à-dire à l’union douanière, où les droits de douane sont abolis.

 

Le Traité de Rome institue des pouvoirs supranationaux qui touchent notamment les transports, l’agriculture et les politiques commerciales. La Commission européenne veille à la mise en place des objectifs du traité, le Conseil européen est le pouvoir décisionnel, et le Parlement européen a une fonction consultative.

 

En 1979, le Conseil européen prend la décision de créer le SME (Système monétaire européen), notamment grâce au Fonds européen de coopération monétaire. En effet, l’ERT (table ronde des industriels européens) pousse la CEE à introduire une monnaie unique qui permettrait d’enlever les barrières tarifaires entre les pays, l’un des derniers obstacles à la libéralisation européenne.


L’Union européenne la fixe alors comme objectif dans l’accord de Maastricht de 1991. Depuis 1985, l’abolition des contrôles aux frontières communes est mise en place grâce à l’accord Schengen, qui prévoyait la suppression des contrôles aux frontières et à l’intérieur de l’union. Cependant, l’accord de Schengen prévoit également le renforcement du pouvoir des institutions européennes, en élargissant leurs domaines de compétence, notamment la politique étrangère et la recherche, envisageant donc une union politique, soit l’approfondissement de la gouvernance européenne au détriment de l’autodétermination des peuples et de la souveraineté nationale.
 Celle-ci est scellée au traité de Lisbonne, signé en 2007, prévoyant la mise en application d’une constitution européenne, et renforce l’indépendance de l’Union européenne à l’égard des États.


La gouvernance de l’Union européenne s’affirme verticalement, avec des décisions qui ne sont pas coopératives, mais bien autoritaires : elles ne s’établissent pas d’égal à égal, mais constituent un pouvoir supranational surplombant la souveraineté nationale.

 

Au-delà de ça, elle se base sur des inégalités et la compétition. En effet, l’UE institutionnalise les mécanismes de coopération, mais fige les relations entre les pays européens.
 Elle n’est pas une force de paix comme le prouve son programme d’énergie atomique (EURATOM), son rôle dans la désintégration de la Yougoslavie et la guerre civile qui s’en est suivie, ou encore son intervention impérialiste en Ukraine qui produit aujourd’hui une situation catastrophique.

 

 

 

Par Saskia - Investig’Action – le 4 juillet 2015.

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La vérité émerge : comment les États-Unis ont alimenté la montée d’Isis en Syrie et en Irak

La vérité émerge : comment les États-Unis ont alimenté la montée d’Isis en Syrie et en Irak | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it


La vérité émerge : comment les États-Unis ont alimenté la montée d’Isis en Syrie et en Irak

 

La guerre contre le terrorisme, cette campagne sans fin lancée il y a 14 ans par George Bush, est prise de contorsions de plus en plus grotesques. Lundi, le procès à Londres d’un Suédois, Bherlin Gildo, accusé de terrorisme en Syrie, s’est effondré lorsqu’il est devenu clair que les services de renseignement britanniques avaient armé les mêmes groupes rebelles que le défendeur était accusé d’appuyer.

 

L’accusation a abandonné l’affaire, apparemment pour éviter d’embarrasser les services de renseignement. La défense a fait valoir que poursuivre le procès aurait été un « affront à la justice » alors qu’il y avait beaucoup de preuves que l’État britannique avait lui-même fourni « un soutien massif » à l’opposition armée syrienne.

 

Cela ne concernait pas uniquement l’« aide non létale » vantée par le gouvernement (y compris des gilets pare-balles et des véhicules militaires), mais la formation, le soutien logistique et l’approvisionnement secret d’« armes à très grande échelle ». Selon des rapports cités, le MI6 avait coopéré avec la CIA sur un « réseau d’approvisionnement » d’armes provenant des stocks libyens aux rebelles syriens en 2012 après la chute du régime de Kadhafi.

 

De toute évidence, l’absurdité d’envoyer quelqu’un en prison pour faire ce que les ministres et leurs agents de sécurité étaient eux-mêmes en train de faire était de trop. Mais il ne s’agit que du dernier cas d’une longue série. Moins chanceux fut un chauffeur de taxi à Londres, Anis Sardar, qui a été condamné il y a deux semaines à une peine de prison à perpétuité pour avoir participé en 2007 à la résistance à l’occupation de l’Irak par les forces américaines et britanniques. L’opposition armée à une invasion et une occupation illégale ne constitue manifestement pas du terrorisme ou un assassinat selon la plupart des définitions données, y compris par la Convention de Genève.

 

Mais le terrorisme est désormais carrément dans l’œil du spectateur. Et nulle part cela n’est aussi vrai qu’au Moyen-Orient, où les terroristes d’aujourd’hui sont les combattants contre la tyrannie de demain — et les alliés des ennemis — souvent au gré ahurissant d’une conférence téléphonique d’un dirigeant occidental.

 

Pour l’année écoulée, les États-Unis, la Grande-Bretagne et d’autres forces occidentales sont retournés en Irak, soi-disant pour détruire le groupe hyper sectaire terroriste de l’État islamique (anciennement connu sous le nom d’al-Qaïda en Irak). Ce fut après qu’Isis eut envahi d’énormes pans du territoire irakien et syrien et proclamé un soi-disant califat islamique.

 

La campagne ne se déroule pas très bien. Le mois dernier, Isis a pris la ville irakienne de Ramadi, tandis que de l’autre côté de la frontière maintenant inexistante, ses forces ont conquis la ville syrienne de Palmyre. La franchise officielle d’Al-Qaida, le Front Nusra, a également progressé en Syrie.

 

Certains Irakiens se plaignent que les États-Unis sont restés les bras croisés pendant ces événements. Les Américains insistent qu’ils essaient d’éviter les pertes civiles et revendiquent des succès significatifs. En privé, les responsables disent qu’ils ne veulent pas être vus en train de bombarder des bastions sunnites dans une guerre sectaire et courir le risque de bouleverser leurs alliés sunnites du Golfe.

 

Une lumière révélatrice sur la façon dont nous en sommes arrivés là a surgi d’un rapport secret du renseignement américain récemment déclassifié, écrit en août 2012, qui prédisait étrangement — et même louait — la perspective d’une « principauté salafiste » dans l’est de la Syrie et d’un État islamique contrôlé par al-Qaida en Syrie et en Irak.

 

En contraste évident avec les affirmations de l’occident à l’époque, le document du Defense Intelligence Agency identifie al-Qaïda en Irak (devenu Isis) et autres salafistes comme les « principaux moteurs de l’insurrection en Syrie » — et déclare que « les pays occidentaux, les États du Golfe et la Turquie » soutenaient les efforts de l’opposition pour conquérir l’est de la Syrie.

 

Tout en évoquant la « possibilité d’établir une principauté salafiste déclarée ou non », le rapport du Pentagone poursuit, « ce qui est exactement ce que les puissances qui soutiennent l’opposition veulent, afin d’isoler le régime syrien, qui est considéré comme la clé stratégique de l’expansion chiite (lrak et Iran) ».

 

Et c’est bien ce qui est arrivé deux ans plus tard. Le rapport ne constitue pas un document de politique. Il est fortement expurgé et il y a des ambiguïtés dans les termes. Mais les implications sont assez claires. Un an après la rébellion syrienne, les États-Unis et ses alliés ont non seulement soutenu et armé une opposition qu’ils savaient être dominée par des groupes sectaires extrémistes ; ils étaient même prêts à approuver la création d’une sorte d’« État islamique » — en dépit du « grave danger » posée à l’unité de l’Irak — comme un tampon sunnite destiné à affaiblir la Syrie.

 

Cela ne signifie pas que les États-Unis ont créé Isis, bien sûr, même si certains de leurs alliés du Golfe ont certainement joué un rôle — ce que le vice-président américain, Joe Biden, a reconnu l’année dernière. Mais il n’y avait pas d’Al-Qaïda en Irak jusqu’à ce que les États-Unis et la Grande-Bretagne envahissent le pays. Et les États-Unis ont certainement exploité l’existence d’Isis contre d’autres forces dans la région dans le cadre d’un effort plus vaste pour maintenir le contrôle occidental.

 

Les calculs ont changé quand Isis a commencé à décapiter les Occidentaux et publié des atrocités en ligne, et les pays du Golfe soutiennent maintenant d’autres groupes dans la guerre syrienne, comme le Front Nusra. Mais cette habitude occidentale et étasunienne de jouer avec des groupes djihadistes, qui reviennent ensuite pour les mordre, remonte au moins à la guerre de 1980 contre l’Union soviétique en Afghanistan, qui a favorisé l’émergence de l’al-Qaida original sous la tutelle de la CIA.

 

Les calculs ont été ajustés pendant l’occupation de l’Irak, où les forces américaines dirigées par le général Petraeus ont parrainé une sale guerre d’escadrons de la mort à la Salvadorienne (*) pour affaiblir la résistance irakienne. Et ils ont été réajustés en 2011 lors de la guerre de l’OTAN contre la Libye, où la semaine dernière Isis a pris le contrôle de Syrte, la ville natale de Kadhafi.

 

En réalité, la politique américaine et occidentale dans cette poudrière qu’est devenu le Moyen-Orient est dans la lignée classique du « diviser pour régner » impérial. Les forces américaines bombardent un groupe de rebelles tout en soutenant un autre en Syrie, et montent des opérations militaires conjointes avec l’Iran contre Isis en Irak tout en soutenant la campagne militaire de l’Arabie saoudite contre les forces Houthi soutenues par l’Iran au Yémen. Aussi confuse que puisse paraître la politique des États-Unis, un Irak et une Syrie affaiblis et divisés leur conviennent parfaitement.

 

Ce qui est clair, c’est qu’Isis et ses monstruosités ne seront pas défaites par les mêmes puissances qui l’ont emmené en premier lieu en Irak et en Syrie, et dont les guerres ouvertes et clandestines ont favorisé son développement. Les interventions militaires occidentales sans fin au Moyen-Orient n’ont apporté que destructions et divisions. Ce sont les peuples de la région qui peuvent guérir cette maladie — pas ceux qui ont incubé le virus.

 

 

 

Par Seumas Milne (The Guardian) - traduit par LGS - fr.sott.net – le 12 juin 2015

 

 

(*) Notes du traducteur

 

Du Salvador à l’Irak : l’homme de Washington derrière les escadrons de la mort (The Guardian) voir http://www.legrandsoir.info/du-salvador-a-l-irak-l-homme-de-washington...

 

« Les escadrons de la mort » : du Salvador à l’Afghanistan via l’Irak http://www.legrandsoir.info/les-escadrons-de-la-mort-du-salvador-a-l-a...

 

Terrorisme à « visage humain » : L’histoire des escadrons de la mort des États-Unis http://www.legrandsoir.info/terrorisme-a-visage-humain-l-histoire-des-...

 

Irak : les nouveaux escadrons de la mort (The Nation) http://www.legrandsoir.info/Irak-les-nouveaux-escadrons-de-la-mort-The...

 

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Prêt-bail de la 2e Guerre mondiale : l’aide américaine a-t-elle été vraiment si utile ? (I)

Prêt-bail de la 2e Guerre mondiale : l’aide américaine a-t-elle été vraiment si utile ? (I) | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Photo : le Président Roosevelt signe la Loi de prêt-bail

 

 

Prêt-bail de la 2e Guerre mondiale :

l’aide américaine a-t-elle été vraiment si utile ? (I)

Par Evgeniy SPITSYN (Russie)

 

La loi Lend-Lease, ou « une loi visant à promouvoir la défense des États-Unis, » qui a été signée par le Président Roosevelt le 11 mars 1941, a donné au Président américain le droit « de vendre, de transférer la propriété, échanger, louer, prêter ou disposer autrement de… n’importe quel article de défense… au gouvernement d’un pays dont le Président estime la défense vitale pour celle des États-Unis. » Le terme « n’importe quel article de défense » comprend les armes, les équipements militaires, les munitions, des matières premières stratégiques, nourriture et biens civils requis par les forces de l’armée et de la défense du sol, ainsi que tout renseignement d’intérêt militaire.

 

La structure de la loi prêt-bail exige que la nation bénéficiaire réponde à un certain nombre de conditions :

 

1) le paiement n’est pas exigé pour tous les éléments manquants, perdus ou détruits pendant les hostilités, mais tous les éléments ayant survécu qui peuvent être utilisés pour un usage civil doivent être payés en totalité ou en partie, dans le cadre d’un remboursement de prêt à long terme accordé par les États-Unis

 

2) les articles militaires étant stockés dans les pays bénéficiaires peuvent y rester jusqu’à ce que les États-Unis demandent leur retour

 

3) en contrepartie, tous les bénéficiaires doivent aider les États-Unis en utilisant toutes les ressources et informations en leur possession

La loi Lend-Lease exige des pays demandeurs de l’aide américaine de fournir aux États-Unis un rapport financier complet. Le Secrétaire américain au Trésor Henry Morgenthau, Jr. a eu raison de reconnaître cette exigence comme quelque chose de sans précédent dans les affaires mondiales, en affirmant au cours d’une audience du Comité du Sénat, que pour la première fois dans l’histoire, un État et un gouvernement fournissaient volontairement des informations à un autre sur sa propre situation financière.

 

Grâce à la loi prêt-bail, l’administration du Président Roosevelt était prête à aborder un certain nombre de questions urgentes, tant étrangères que nationales. Tout d’abord, son cadre permettrait de créer de nouveaux emplois aux États-Unis, qui n’étaient pas encore complètement sortis de la grande crise économique de 1929-1933. Deuxièmement, la loi Lend-Lease permettait au gouvernement américain d’exercer une certaine influence sur les pays qui bénéficiaient de l’assistance du prêt-bail. Et troisièmement, en envoyant à ses alliés des armes, des marchandises et des matières premières, mais sans s’impliquer sur le terrain, le Président Roosevelt a été capable de rester fidèle à sa promesse électorale, dans laquelle il s’était engagé : « vos garçons ne vont pas être envoyés dans des guerres à l’étranger. »

 

Le système de prêt-bail ne visait en aucune manière à aider l’URSS. Les Britanniques furent les premiers à demander de l’aide militaire sur la base de cette relation spéciale de location (qui ressemblait à un bail d’exploitation) à la fin de mai 1940, à une époque où l’écrasante défaite de la France avait laissé la Grande-Bretagne sans alliés militaires sur le continent européen. Londres a demandé à Washington 40 à 50 « vieux » destroyers, offrant trois options de paiement : amener gratuitement, payer en argent comptant, ou louer. Le Président Roosevelt a rapidement accepté la troisième option, et cette transaction a été achevée à la fin de l’été 1940.

 

C’est à ce moment qu’est venue l’idée aux membres du département du Trésor de reprendre le concept de cette affaire privée et de l’appliquer à toutes les relations intergouvernementales.  Les ministères de la guerre et de la marine ont été amenés à aider à développer le projet de loi prêt-bail, et le 10 janvier 1941, l’Administration présidentielle américaine a introduit cette loi pour examen devant les deux chambres du Congrès, où elle fut approuvée le 11 mars. De plus, en septembre 1941, après un long débat, le Congrès américain a approuvé ce qui a été connu comme le programme pour la victoire, dont le principe de base était, selon les historiens militaires américains (Richard Leighton et Robert Coakley), « que la contribution de l’Amérique à la guerre serait en armes, non en armées. »

 

Le 1er octobre 1941, le commissaire du peuple aux affaires étrangères Vyacheslav Molotov, le représentant du Premier ministre britannique, Lord Beaverbrook et l’envoyé spécial américain Averell Harriman signent le premier protocole (à Moscou), qui marque le début de l’expansion du programme prêt-bail à l’Union soviétique. Plusieurs protocoles additionnels ont été signés par la suite.

 

 

Quelle a été l’importance du prêt-bail américain ?

 

Pendant la guerre, les usines soviétiques produisaient plus de 29,1 millions d’armes légères de tous les principaux types, alors que seulement 152 000 armes légères (0,5 % du total) ont été fabriquées par les usines américaines, britanniques et canadiennes. En regardant tous les types de systèmes d’artillerie de tous calibres, nous voyons une image similaire – 647 600 armes et mortiers soviétiques contre 9 400 d’origine étrangère, ce qui représente moins de 1,5 % du total.

 

Les chiffres sont moins sévères pour les autres types d’armes : le ratio entre la production intérieure de chars et d’artillerie automotrice, et celle des alliés est respectivement de 132 800 contre 11 900 (8,96 %), et pour les avions de combat – 140 500 contre 18 300 (13 %).

 

Sur les près de 46 milliards de dollars qui ont été dépensés pour l’ensemble des aides de prêt-bail, les États-Unis ont attribué seulement $ 9,1 milliards – c’est-à-dire seulement un peu plus de 20 % des fonds – à l’Armée Rouge qui a battu l’immense majorité des divisions de l’Allemagne et de ses satellites militaires.

 

Durant cette période, l’Empire britannique a reçu plus de $ 30,2 milliards, la France – $ 1,4 milliard, la Chine – $ 630 millions et même l’Amérique latine (!) a reçu $ 420 millions. Des fournitures en prêt-bail ont été distribuées à 42 pays.

 

Mais peut-être, malgré le fait que l’assistance transatlantique aient été quantitativement assez négligeable, est-il possible qu’elle ait joué un rôle décisif en 1941, quand les Allemands étaient aux portes de Moscou et de Leningrad, et à moins de 24-40 km de la Place Rouge ?

 

Regardons les statistiques relatives aux livraisons d’armes de cette même année. Dès le début de la guerre jusqu’à la fin de 1941, l’Armée Rouge a reçu 1,76 million de fusils, armes automatiques et mitrailleuses, 53 700 pièces d’artillerie et mortiers, 5 400 chars et 8 200 avions de combat. Parmi ceux-ci, nos alliés dans la coalition antihitlérienne ont fourni seulement 82 pièces d’artillerie (0,15 %), 648 chars (12,14 %) et 915 avions (10,26 %). En outre, une grande partie du matériel militaire envoyé – en particulier, 115 des 466 chars fabriqués au Royaume-Uni – n’ont même pas atteint le front pendant la première année de la guerre.

 

Si nous convertissons ces livraisons d’armes et de matériel militaire en leur équivalent monétaire, puis, selon l’historien bien connu Mikhail Frolov, DSc (Bolchaïa Otechestvennaya Voina 1941-1945, v Nemetskoi Istoriografii. [Grande Guerre Patriotique 1941-1945 dans l’historiographie allemande], Saint-Pétersbourg : 1994), « jusqu’à la fin de 1941 – la période la plus difficile pour l’État soviétique – en vertu de la loi Lend-Lease, les États-Unis envoyèrent à l’URSS du matériel pour une valeur de 545 000 dollars, sur les 741 millions de dollars de fournitures expédiées à tous les pays qui faisaient partie de la coalition anti-hitlérienne. Cela signifie que, durant cette période extraordinairement difficile, moins de 0,1 % de l’aide de l’Amérique est allée vers l’URSS.

 

« En outre, les premières livraisons de prêt-bail au cours de l’hiver 1941-1942 arrivèrent en URSS très tard, alors qu’au cours de ces mois critiques la Russie avait été en mesure de mener, à elle seule, une lutte impressionnante contre les agresseurs allemands, sans aucune assistance, pour ainsi dire, des démocraties occidentales. À la fin de 1942 seulement 55 % des livraisons prévues avaient été faites à l’URSS. »

 

 

Par exemple, en 1941 les États-Unis avaient promis d’envoyer 600 chars et 750 avions, mais seulement respectivement 182 et 204 avaient été effectivement envoyés.


En novembre 1942, c’est-à-dire, au plus fort de la bataille pour le Caucase et Stalingrad, les livraisons d’armes s’étaient pratiquement arrêtées. Des perturbations dans les livraisons avaient déjà commencé en été 1942, quand des sous-marins et des avions allemands avaient presque entièrement anéanti le tristement célèbre convoi PQ 17 qui avait été abandonné (sur ordre de l’Amirauté) par les destroyers britanniques assignés à l’escorter. Tragiquement, seulement 11 des 35 navires de départ sont arrivés sains et saufs dans un port soviétique — une catastrophe qui a été utilisée comme prétexte pour suspendre les convois ultérieurs de la Grande-Bretagne jusqu’en septembre 1942.

 

Un nouveau convoi, le PQ 18, perdit en route 10 de ses 37 navires, et aucun autre convoi n’a été envoyé jusqu’en décembre 1942. Ainsi, pendant trois ans et demi, quand une des batailles les plus décisives de toute la Seconde Guerre mondiale a été menée sur la Volga, moins de 40 navires transportant des cargaisons de prêt-bail sont arrivés par intermittence à Mourmansk et Arkhangelsk. Pour cette raison, beaucoup ont naturellement soupçonné Londres et Washington, durant cette période, d’avoir attendu pour voir qui serait encore debout après la bataille de Stalingrad.

 

 

Ainsi, entre 1941 et 1942, seulement 7 % de la cargaison expédiée en temps de guerre par les États-Unis ont atteint l’Union soviétique. La majeure partie des armes et autres matériels sont arrivés en Union soviétique en 1944-1945, une fois que le vent de la guerre avait résolument tourné.

Quelle était la qualité de l’équipement militaire du prêt-bail ?

 

Sur les 711 avions de chasse qui étaient arrivés en URSS à partir du Royaume-Uni à la fin de 1941, 700 étaient des modèles désespérément archaïques tels que Kittyhawk, Tomahawk, et Hurricane, qui étaient nettement inférieurs aux Messerschmitts allemands et aux Soviétiques Yakolev Yaks, tant dans la vitesse que pour l’agilité, et n’étaient même pas équipés de canons. Même si un pilote soviétique a réussi à avoir dans la ligne de mire de ses mitrailleuses un As de l’aviation allemande, ces canons de petit calibre étaient souvent complètement inefficaces contre le blindage robuste de l’avion allemand. En ce qui concerne les nouveaux avions de chasse Airacobra, seuls 11 ont été livrés en 1941. Et les premiers Airacobra sont arrivés en Union soviétique, démontés, sans aucune sorte de documentation, ayant dépassé depuis longtemps leur durée de vie.

 

Soit dit en passant, c’était aussi le cas avec les deux escadrons de chasseurs Hurricane qui étaient armés de canons antichars de 40 mm conçus pour combattre les blindés allemands. Mais ces avions de chasse se sont avérés complètement inutiles, à tel point qu’ils ont été mis au rancart pendant toute la guerre en URSS, car on n’a pu trouver aucun pilote de l’Armée Rouge prêt à voler avec.

 

Une situation similaire a été observée avec le fameux char léger britannique Valentine que les opérateurs de char soviétiques avaient surnommé « Valentinas », et le char mi-lourd Matilda, auquel avait été réservée une expression plus cinglante : « Adieu patrie ». Leur blindage mince hautement inflammable avec son moteur à essence, leurs transmissions plus que préhistoriques, en faisaient une proie facile pour les artilleurs allemands et les lance-grenades.

 

Selon Valentin Berezhkov, un interprète de Joseph Staline, qui a participé à toutes les négociations entre les dirigeants soviétiques et les visiteurs anglo-américains, Staline a été souvent profondément offensé par les actions britanniques, comme celle de fournir des avions obsolètes tels que le Hurricane dans le cadre du prêt-bail, au lieu des nouveaux avions de combat comme le Spitfire. En outre, en septembre 1942, au cours d’une conversation avec Wendell Willkie, un chef de file dans le parti républicain américain, Staline lui a demandé de but en blanc devant les ambassadeurs américain et britannique, William Standley et Archibald Clark Kerr : pourquoi les gouvernements britannique et américain fournissent-ils ces équipements de mauvaise qualité à l’Union soviétique ?

 

Il a expliqué qu’il parlait avant tout de transferts d’avions américains P-40, au lieu de vieux Airacobras, et il a ajouté que les Britanniques fournissaient des chasseurs Hurricane complètement inadaptés, bien inférieurs à ce que les Allemands avaient. Staline affirma que, une fois, lorsque les Américains se préparaient à expédier 150 Airacobras à l’Union soviétique, les Britanniques étaient intervenus et les avaient gardés pour eux-mêmes. « Nous savons que les Américains et les Britanniques ont des avions qui valent mieux que les modèles allemands, mais pour une raison quelconque, beaucoup de ces avions ne parviennent pas jusqu’à l’Union soviétique ».

 

L’ambassadeur américain, l’amiral Standley, ne savait rien à ce sujet, mais l’ambassadeur britannique, Archibald Clark Kerr, a admis qu’il était au courant de l’épisode Airacobra, mais il a défendu leur détournement sous prétexte que, entre les mains des Britanniques, ces avions de combat seraient beaucoup plus précieux pour la cause commune des alliés que s’ils se retrouvaient en Union soviétique…

 

À suivre…

 

 

Par Evgeniy Spitsyn, historien russe et blogueur (orientalreview.org) - Traduction Avic – Réseau International – le 14 mai 2015.

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Vers une guerre américaine en Europe ?

Vers une guerre américaine  en Europe ? | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

© AP Photo/ Mindaugas Kulbis

 

Vers une guerre américaine  en Europe ?

Par Nicolas Bonnal (*)

 

Rien ne fera reculer les Américains : leur situation économique et financière est désastreuse ; le Pentagone d’esprit mercenaire a pris le pouvoir avec l’État profond déclencheur de certains des attentats que l’on sait ; et la Russie surtout leur fait horreur parce qu’elle est depuis trop d’années le seul pays du monde susceptible de leur résister.

 

Le 13 juin, un article du NYT, signé MM. Schmidt et Meyers nous annonce froidement que les USA vont envoyer 5 000 hommes et 1500 chars en Europe orientale. Il faut mettre fin à l’agression russe en Europe, car les Russes vont en effet envahir la Pologne et les pays baltes, en attendant le Portugal et le Maroc…

 

Le nombre impressionnant de commentaires diffusés permet pour une fois de connaître l’opinion de nos chers Américains : un tiers est pour la guerre, un tiers hausse les épaules, un dernier tiers enfin remarque comme nous le caractère aberrant et criminel de la position belliqueuse de leur pays.

 

On se doute que ce ne sont pas ces naïfs qui feront reculer Bush frère & fils, Clinton-femme et Obama, le fidèle disciple de Brzezinski, le Polonais qui voulait anéantir la Russie ! Sur cet intellectuel relativement dément, on rappellera un livre, le Grand Échiquier et ces phrases qui décrivent les raisons de la totale soumission allemande ou japonaise, soixante-dix ans après Dresde ou Hiroshima : « À bien des égards, la suprématie globale de l’Amérique rappelle celle qu’ont pu exercer jadis d’autres empires, même si ceux-ci avaient une dimension plus régionale. Ils fondaient leur pouvoir sur toute une hiérarchie de vassaux, de tributaires, de protectorats et de colonies, tous les autres n’étant que des barbares. »

 

Vassaux ou barbares ! Parlez-nous des droits de l’homme ! Un peu plus bas, le mentor d’Obama ironise : 

« L’Europe de l’Ouest reste dans une large mesure un protectorat américain et ses États rappellent ce qu’étaient jadis les vassaux et les tributaires des anciens empires. Cette situation est assurément malsaine, pour l’Amérique comme pour les nations européennes. »

 

Cette situation n’est pas « malsaine » pour Obama, et c’est donc le début de cette guerre américaine en Europe, qui se soldera par notre extermination ou par une partition ruineuse du continent. Tout cela se fera avec la collaboration des élites européennes qui obéissent à Washington et saccagent au nom du libre-échange ou du grand remplacement l’avenir de leurs peuples.

 

Comme je l’ai déjà montré, tous les dirigeants baltes ont été élevés en Amérique ou y firent leurs études, dans les deux disciplines de ces temps apocalyptiques : la finance et la psychologie. Freud et Rothschild au service d’un Hitler remis en selle par l’Occident le 9 mai dernier. Exagération ? Jeb Bush, frère de qui l’on sait, l’homme aux deux millions de morts en Irak, est venu insulter en Europe Vladimir Poutine la semaine dernière. La femme de l’ex-président Clinton compare Poutine à Hitler : oubliés les 26 millions de tués par le führer qui traitait les peuples est-européens en esclaves ou y gazait les juifs !

 

Poutine étant Hitler, tous les moyens sont bons pour déclencher la guerre. Le coup d’État de Maïdan (tueurs type Gladio pour déquiller les manifestants rétribués dix dollars par jour, le tout sous les drones de CNN, cette annexe comme Hollywood, du Pentagone) a annoncé la couleur.

 

L’échec de Minsk si prévisible permet de dénoncer une interminable « agression russe » qui justifiera la guerre courte ou nucléaire voulue par les pontes du Pentagone et les élites hostiles américaines (le même NYT précise le même jour qu’il y a maintenant 12 % de sans-abri à Los Angeles). Obama, dont l’agenda « culturel » n’est visiblement pas de protéger les Européens, a pu se vanter d’avoir suscité un renversement de pouvoir à Kiev dans l’indifférence générale. La diabolisation de la Russie fera le reste aux yeux et aux oreilles d’une opinion publique anesthésiée — dixit l’historien du fascisme Payne en parlant des opinions occidentales. Un article utile fait aux USA 10 000 connexions, une chanson de Lady Gaga (voyez sur YouTube) fait un milliard de connexions et un million de commentaires. Avec un tel peuple de zombies, les élites américaines peuvent tout se permettre.

 

Qui reculera ? L’impérialisme stade suprême du capitalisme… La violence impérialiste et capitaliste des Américains est légendaire : voyez l’Amérique du sud (épargnée en ce moment), voyez la hideuse et déshonorante guerre contre l’Espagne en 1898, voyez la destruction du Japon, voyez Hiroshima, voyez Dresde, voyez le Vietnam, voyez la guerre du golfe ou de Libye. Voyez même en temps de paix le comportement des GI dans les bases (cf. Johnson sur Okinawa).

 

Mais notez ce que je vais écrire : l’effondrement de votre niveau de vie, la liquidation de vos industries, le grand remplacement ethnique en cours en Europe et même aux États-Unis ont été rendus possibles par la chute de l’Union soviétique et de sa si honnie Armée Rouge.

 

Ce n’est pas moi qui le dis, mais le prix Nobel US Joseph Stieglitz. François Mitterrand l’avait compris qui disait redouter le jour où « ils allaient avoir les mains libres ». Les actionnaires, les managers, les experts ne sont en effet plus gênés depuis. C’est le siècle des excès, des manipulateurs de symboles, pour reprendre l’expression de Robert Reich, ex-ministre du Travail de Clinton-mari.

 

Rien ne fera reculer les Américains : leur situation économique et financière est désastreuse (voyez John Williams, Michael Snyder, Paul Craig Roberts) ; le Pentagone d’esprit mercenaire a pris le pouvoir avec l’État profond déclencheur de certains des attentats que l’on sait (voyez Griffin, Chalmers Johnson, Peter Dale Scott, tant d’autres courageux auteurs américains) ; et la Russie surtout leur fait horreur parce qu’elle est depuis trop d’années le seul pays du monde susceptible de leur résister ou, dit-on, de les détruire.

 

Une guerre nucléaire partielle, qui détruirait partiellement l’Europe, rapatrierait nos capitaux là-bas, et soumettrait ad vitam l’usine et la banque chinoise un peu désobéissantes ces temps derniers, ne leur fera certes pas peur. On peut même prévoir un scénario ukrainien appliqué à l’Europe : une guerre déshonorante menée par des lâches surarmés et qui rongerait le continent des décennies durant.

 

On souhaite bonne chance au président Vladimir Poutine.

 

 

Par Nicolas Bonnal (*) (fr.sputniknews.com) - reseauinternational.net - le 16 juin 2015.


(*) Nicolas Nonnal est un écrivain français né à Tunis en 1960… (Source Wikipédia)


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USA - Quand l’économie décline, la guerre menace

USA - Quand l’économie décline, la guerre menace | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Photo : Paul Craig Roberts

 

USA - Quand l’économie décline, la guerre menace

Par Paul Craig Roberts (*)

 

Les événements marquants de notre temps sont l’effondrement de l’Union soviétique, le 11 septembre, la délocalisation de l’emploi et la déréglementation financière. Ces événements sont à l’origine de nos problèmes de politique étrangère et de nos difficultés économiques.

 

Les États-Unis ont toujours eu une haute opinion d’eux-mêmes, mais avec l’effondrement de l’Union soviétique, cette autosatisfaction a atteint de nouveaux sommets. Nous sommes devenus le peuple d’exception, le peuple indispensable, le pays choisi par l’Histoire pour exercer son hégémonie sur le monde. Cette doctrine néoconservatrice exonère le gouvernement US des contraintes du droit international, et permet à Washington d’user de la coercition à l’encontre d’États souverains pour refaçonner le monde à son image.

 

En 1992, pour protéger le statut de puissance unique de Washington qui a résulté de l’effondrement de l’Union soviétique, Paul Wolfowitz a élaboré ce qu’il est convenu d’appeler la doctrine Wolfowitz. C’est le fondement de la politique étrangère de Washington. Voici son énoncé :

 

« Notre premier objectif est d’empêcher l’émergence d’un nouveau rival, sur le territoire de l’ancienne Union soviétique ou ailleurs, qui constitue une menace comparable à celle de l’Union soviétique. Cette considération dominante sous-tend la nouvelle stratégie de défense régionale. Elle exige que nous fassions tout ce qui est en notre pouvoir pour empêcher un pouvoir hostile de dominer toute région dont les ressources seraient suffisantes, avec un contrôle consolidé, pour disposer d’un pouvoir global. »

 

En mars de cette année, le Conseil des relations extérieures a étendu cette doctrine à la Chine.

 

Washington est désormais engagé dans le blocage de la montée en puissance de deux grands pays possédant l’arme nucléaire. C’est cet engagement qui justifie la crise provoquée par Washington en Ukraine et son exploitation comme propagande contre la Russie. La Chine est aujourd’hui confrontée au nouvel axe de la politique étrangère de Washington baptisé Pivot to Asia. La construction de nouvelles bases navales et aériennes US vise ainsi à lui assurer le contrôle de la mer de Chine méridionale, aujourd’hui considérée comme une région vitale pour les intérêts nationaux des États-Unis.

 

Le 11 septembre a servi à lancer la guerre des néoconservateurs pour l’hégémonie au Moyen-Orient. Le 11 septembre a également servi à fonder l’État policier aux États-Unis. Pendant que les libertés civiques y fondaient comme neige au soleil, les États-Unis étaient en guerre pendant quasiment tout le début du XXIe siècle, des guerres qui nous ont coûté, selon Joseph Stiglitz et Linda Bilmes, au minimum 6 trillions de dollars [milliers de milliards, NDT]. Ces guerres ont très mal tourné. Elles ont déstabilisé les gouvernements dans une région importante pour la production d’énergie. Ensuite, elles sont largement responsables de la prolifération de terroristes, dont la répression a servi à justifier officiellement ces guerres.

 

Tout comme l’effondrement de l’Union soviétique a donné libre cours à l’hégémonie US, il a entraîné la délocalisation de l’emploi. L’effondrement soviétique a convaincu la Chine et la Russie d’ouvrir leurs marchés de la main d’œuvre, largement sous-exploités, au capital US. Les grandes entreprises US, même réticentes, incitées par la menace d’OPA menées par les grands distributeurs et Wall Street ont transféré à l’étranger leurs activités de fabrication industrielles et des services professionnels tels que le génie logiciel. 

 

Cela a décimé la classe moyenne états-unienne et immobilisé l’ascenseur social. Le PIB et l’assiette fiscale US se sont envolés en Chine et en Inde en même temps que les emplois. La vraie classe moyenne US a cessé de croître et a décliné. En l’absence d’augmentation du revenu pour stimuler l’économie, Alan Greenspan a eu recours à l’endettement des consommateurs, procédé qui a cependant fait son temps. L’économie est aujourd’hui en panne.

 

Lorsque les biens et les services produits par le travail délocalisé sont introduits aux États-Unis, ce sont des importations qui ne font que dégrader la balance commerciale. Les étrangers profitent de leurs excédents commerciaux pour acquérir des titres, des actions, des entreprises et des biens immobiliers US. En conséquence, les intérêts, les dividendes, les gains en capital et les loyers ne tombent plus dans l’escarcelle des États-Unis, mais de pays étrangers. Cela ne fait que creuser davantage le déficit actuel.

 

Afin de protéger la valeur du dollar sur le marché des changes face à l’ampleur du déficit des comptes courants et à la création de monnaie pour soutenir le bilan des banques trop grandes pour faire faillite, Washington contraint les banques centrales japonaise et européenne à faire tourner la planche à billets aussi. L’impression de yens et d’euros compense l’impression de dollars, protégeant ainsi la valeur de la monnaie US sur le marché des changes.

 

La loi Glass-Steagall, qui avait séparé les activités commerciales des banques de leurs activités d’investissement, a été quelque peu érodée avant d’être abrogée complètement au cours du second mandat de Clinton. Cette abrogation, en même temps que celle de la régulation des marchés de dérivés, l’abolition de la limite de position imposée aux spéculateurs, ainsi que l’énorme concentration financière qui a résulté du fait que les lois antitrust étaient désormais lettre morte, se sont traduites non par la réalisation de l’utopie du marché libre, mais par une crise financière grave et durable. Les liquidités émises par suite de cette crise ont entraîné la formation de bulles sur les marchés actions et obligataires.

 

 

Implications, conséquences et solutions 

 

Lorsque la Russie a bloqué l’invasion de la Syrie et le bombardement de l’Iran prévus par le régime Obama, les néoconservateurs se sont rendu compte que, pendant qu’ils se focalisaient sur leurs guerres au Moyen-Orient et en Afrique depuis une décennie, Poutine avait restauré la puissance économique et militaire russe

 

Le premier objectif de la doctrine Wolfowitz, empêcher l’émergence d’un nouveau rival, avait été manqué. La Russie disait « Non » aux États-Unis. Le parlement britannique s’est joint à elle en opposant son veto à la participation du Royaume-Uni à une invasion US de la Syrie. Le statut du gendarme du monde était ébranlé. 

 

Cela a conduit les néoconservateurs à délaisser le Moyen-Orient pour tourner leur attention vers la Russie. Au cours de la décennie précédente, Washington avait investi en Ukraine 5 milliards de dollars dans le financement de politiciens ayant le vent en poupe et d’organisations non gouvernementales en vue de les mobiliser pour protester dans les rues. 

 

Lorsque le président ukrainien a procédé à une analyse du rapport coût-bénéfice de la proposition d’associer l’Ukraine à l’UE, il a constaté qu’il n’était pas avantageux et l’a rejeté. C’est alors que Washington a fait descendre les ONG dans la rue. Les néonazis ont provoqué la violence et le gouvernement, qui n’y était pas préparé, s’est effondré.

Victoria Nuland et Geoffrey Pyatt ont choisi le nouveau gouvernement ukrainien et mis en place un régime vassal.

 

Washington espérait profiter du coup d’État pour évincer la Russie de sa base navale en mer Noire, seul port russe en eaux tempérées. La Crimée, qui a fait partie de la Russie pendant des siècles, a toutefois choisi de la réintégrer.

 

Dans sa frustration, Washington s’est remis de sa déception en décrivant l’autodétermination de la Crimée comme une invasion et une annexion russes. Washington a profité de cette opération de propagande pour briser la relation économique et politique de l’Europe avec la Russie en la contraignant à prendre des sanctions contre celle-ci.

 

Ces sanctions ont eu des conséquences néfastes pour l’Europe. En outre, les Européens sont préoccupés par l’attitude de plus en plus belliqueuse de Washington. Elle n’a rien à gagner à un conflit avec la Russie et craint d’être entraînée dans la guerre. Certains éléments donnent à penser que les gouvernements européens envisagent une politique étrangère indépendante de Washington

 

La virulente propagande anti-russe et la diabolisation de Poutine ont détruit la confiance de la Russie en l’Occident. Avec le commandant de l’OTAN, Breedlove, qui demande sans cesse plus d’argent, plus de troupes et plus de bases aux frontières de la Russie, la situation devient critique. Dans le cadre d’un défi militaire direct à Moscou, Washington s’efforce d’intégrer à la fois l’Ukraine et la Géorgie, deux anciennes provinces russes, dans l’OTAN

 

Dans le domaine économique, le dollar en tant que devise de réserve pose un problème au monde entier. Les sanctions et autres manifestations de l’impérialisme US conduisent certains pays, dont de très importants, à abandonner le système de paiement en dollar. Le commerce international passant de moins en moins par le dollar, la demande de cette devise chute en dépit de la disponibilité de masses considérables de monnaie résultant du Quantitative Easing [planche à billets, NDT].

 

Du fait de la production délocalisée et de la dépendance aux importations des États-Unis, la chute de la valeur du dollar sur le marché des changes entraînerait une inflation sur le marché intérieur. Les niveaux de vie baisseraient encore, ce qui menacerait par contrecoup les marchés des hydrocarbures, des actions, des obligations et des métaux précieux. 

 

La vraie raison d’être du Quantitative Easing est le soutien du bilan des banques. Toutefois, il vise officiellement à stimuler l’économie et à soutenir sa reprise. Le seul signe de reprise est le PIB réel, qui apparaît positif uniquement parce que le facteur déflationniste est sous-estimé.

 

Il est cependant bien évident qu’il n’y a pas de reprise économique. Avec un PIB négatif au premier trimestre et probablement négatif également au deuxième trimestre, on pourrait assister cet été à une nouvelle aggravation de cette longue récession. 

 

De plus, le taux élevé du chômage (23 %) est différent de ce que l’on connaissait auparavant. Au XXe siècle, après la Seconde Guerre mondiale, la Réserve fédérale maîtrisait l’inflation en ralentissant l’économie. Il s’ensuivait alors une baisse des ventes, une accumulation des stocks et des licenciements. Lorsque le chômage augmentait, la Fed inversait la vapeur et les travailleurs retrouvaient leur emploi. Aujourd’hui, les emplois ont disparu. Ils ont été délocalisés. Les usines sont parties. Les travailleurs ne peuvent plus reprendre leur emploi : il est parti.

 

Restaurer l’économie exige d’inverser le flux des délocalisations et de ramener ces emplois aux États-Unis. Ce serait possible en changeant l’imposition des entreprises. L’impôt sur le bénéfice des sociétés pourrait être fixé en fonction du lieu où elles apportent de la valeur ajoutée aux produits qu’elles commercialisent aux États-Unis. Si les biens et services étaient produits à l’étranger, le taux d’imposition serait élevé. S’ils étaient produits dans le pays, le taux d’imposition serait faible. Il serait possible de fixer les taux d’imposition de manière à compenser le faible coût de production à l’étranger

 

À en juger par la puissance du lobby des multinationales et de Wall Street, cette réforme semble toutefois improbable. J’en conclus que l’économie des États-Unis va poursuivre son déclin.


En politique étrangère, l’orgueil démesuré et l’arrogance des États-Unis, qui se considèrent comme un pays exceptionnel et indispensable, détenteur d’un droit d’hégémonie sur les autres pays, impliquent que le monde s’achemine vers la guerre. Ni la Russie ni la Chine n’accepteront le statut de vassaux accepté par le Royaume-Uni, l’Allemagne, la France et les autres pays d’Europe, le Canada, le Japon et l’Australie. La doctrine Wolfowitz indique clairement que le prix à payer pour la paix dans le monde est l’acceptation de l’hégémonie de Washington. 

 

En conséquence, à moins d’un effondrement du dollar entraînant celui de la puissance US, ou bien que l’Europe trouve le courage de rompre avec Washington pour suivre une politique étrangère indépendante en disant au revoir à l’OTAN, nous risquons fortement une guerre nucléaire.

 

L’agression et la propagande flagrante de Washington ont convaincu la Russie et la Chine que les États-Unis veulent la guerre, ce qui les a conduites à conclure une alliance stratégique. Le 9 mai, les commémorations de la victoire sur Hitler en Russie ont marqué un tournant historique. Les gouvernements occidentaux les ont boycottées, tandis que les Chinois prenaient leur place. Pour la première fois dans l’histoire, des soldats chinois ont défilé avec des soldats russes, et le président de la Chine était assis aux côtés du président de la Russie.

 

Le rapport du Saker sur les commémorations de Moscou est intéressant. En particulier, le tableau des victimes de la Seconde Guerre mondiale est éloquent. Comparé au nombre de morts US, britanniques et français, celui des morts russes montre très clairement que c’est la Russie qui a vaincu Hitler. Dans l’univers orwellien des pays occidentaux, la réécriture récente de l’histoire omet le fait que c’est l’Armée rouge qui a détruit la Wehrmacht. Selon la version réécrite, Obama n’a mentionné que l’armée US à l’occasion du 70e anniversaire de la reddition de l’Allemagne. À l’inverse, Poutine a exprimé sa gratitude aux « peuples de Grande-Bretagne, de France et des États-Unis d’Amérique pour leur contribution à la victoire ». 

 

Depuis de nombreuses années, le président russe insiste publiquement sur le fait que l’Occident n’écoute pas la Russie. Washington et ses vassaux européens, ainsi que le Canada, l’Australie et le Japon, n’écoutent pas lorsque la Russie dit « ne soyez pas injustes avec nous, nous ne sommes pas votre ennemi. Nous voulons être vos partenaires. »

 

Washington étant resté sourd pendant toutes ces années, la Russie et la Chine sont finalement parvenues à la conclusion qu’elles n’avaient que le choix entre la vassalité et la guerre. Si le Conseil national de sécurité, le Département d’État ou le Pentagone avaient été dirigés par des gens intelligents, Washington aurait été averti que la politique des néoconservateurs ne faisait que semer la méfiance. Cependant, le gouvernement n’étant constitué que de néoconservateurs à l’orgueil démesuré, Washington a commis une erreur qui pourrait être fatale à l’humanité.

 

 

 

Par Paul Craig Roberts (*) (strategic-culture) - traduit par Gilles Chertier, relu par jj pour le Saker Francophone - le 11 mai 2015.

 

(*) Paul Craig Roberts, économiste et journaliste paléoconservateur américain a été sous-secrétaire au Trésor dans l’administration Reagan (1981-1982), et est un des pères fondateurs des Reaganomics. Il a également été rédacteur en chef adjoint au Wall Street Journal… (Source Wikipédia)

 

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La tentative des néocons US de réviser l’histoire de la Seconde Guerre mondiale

La tentative des néocons US de réviser l’histoire de la Seconde Guerre mondiale | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Image : les slogans de « 1984 », par George Orwell

 

 

La tentative des néocons US de réviser l’histoire de la

Seconde Guerre mondiale

Par Wayne Madsen (*)

 

Depuis l’effondrement de l’Union soviétique, les États-Unis placent leurs anciens collaborateurs nazis au pouvoir en Europe de l’Est. Simultanément, Washington tente de priver l’actuelle Fédération de Russie de son mythe national en remettant en question son rôle durant la Seconde Guerre mondiale. De la sorte, les États-Unis entendent à la fois détruire la zone d’influence russe et l’identité russe elle-même. Cette opération se fait au prix d’une réécriture de l’Histoire et d’une réhabilitation du nazisme.

 

Après la chute de l’Union soviétique, l’ancien président des États-Unis et un jour combattant de la Guerre froide, a consacré les quelques années qui lui restaient à vivre à veiller à ce que la Russie prenne sa place dans la communauté internationale. Nixon a conseillé Bill Clinton, alors président, sur la bonne manière de traiter avec la Fédération de Russie, l’État reconnu à l’échelle internationale qui avait succédé à l’Union des Républiques socialistes soviétiques.

 

Une chose que Nixon n’aurait jamais tolérée est la tendance conservatrice actuelle à dénier à la Russie un rôle majeur dans la Seconde Guerre mondiale — connue en Russie comme la « Grande Guerre patriotique » — et dans la victoire des Alliés sur l’Allemagne nazie. Les dirigeants actuels des États-Unis et leurs compagnons de route en Grande-Bretagne, en Europe de l’Est et dans d’autres pays se feraient admonester par Nixon pour leur refus de participer à la cérémonie annuelle du 9 mai, ou « Jour de la victoire », à Moscou.

 

Nixon, qui avait critiqué l’administration de George H. W. Bush pour l’aide pathétiquement inadéquate fournie à la Russie après l’effondrement de l’Union soviétique, aurait peu de temps à perdre avec les cercles politiques états-uniens qui veulent maintenant faire dépérir la Russie et la mettre à genoux.

 

Parmi ceux qui font pression pour un renforcement des sanctions contre la Russie et ignorent son rôle significatif dans la victoire de la Seconde Guerre mondiale, il y a les fils et les filles des émigrés fascistes et nazis d’Europe de l’Est, qui sont arrivés au États-Unis au cours des années qui ont suivi la guerre, la plupart grâce à l’« Operation Paperclip » de la CIA [1], afin d’échapper à des procès pour avoir soutenu la cause nazie dans leurs pays d’origine.

 

Ces émigrés ont contribué à former divers groupes d’extrême droite qui tournaient autour des « Nations captives », l’organisation fédératrice encouragée par l’administration Eisenhower et celles qui lui ont succédé. De cette constellation d’organisations fascistes a émergé le sioniste ukraino-américain Lev Dobriansky et sa fille, ancienne responsable au Département d’État de George W. Bush, Paula Dobriansky, ainsi que l’ancien soutien de la Gestapo allemande en Hongrie, Gyorgy Schwartz, qui s’est plus tard baptisé lui-même George Soros [2]. Aujourd’hui, on trouve leur progéniture idéologique dans les gouvernements de toute l’Europe centrale et de l’Est.

 

Les groupes gravitant autour des milieux émigrés aux États-Unis, par exemple la Fondation Heritage [3], l’American Enterprise Institute (AEI) [4] et la Brookings Institution [5], tout comme Human Rights Watch fondé par George Soros, poussent à une réécriture de l’Histoire après la guerre. Il semble que beaucoup de ces groupes néocons et historiquement révisionnistes préféreraient des commémorations affligées de la défaite des régimes fantoches nazis dans les pays baltes, l’Ukraine, la Biélorussie et la Moldavie plutôt que de reconnaître la victoire de l’Union soviétique sur le nazisme.

 

Les marionnettes de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) dans divers pays de l’Europe centrale et de l’Est sont impliquées dans une guerre de propagande contre la Russie visant à assurer que la célébration du 9 mai à Moscou ne rassemble qu’une maigre participation internationale officielle. Les effets de cette guerre de la propagande sont perceptibles dans la récente déclaration du général tchèque Andor Šándor, le commandant du Renseignement militaire tchèque, qui a pris sa retraite en 2002, en se plaignant de l’espionnage à large échelle des Russes à Prague.

 

Cette histoire a fuité dans le but d’exercer une nouvelle pression sur le président tchèque Milos Zeman, qui avait dit qu’il ignorerait un prétendu consensus de l’OTAN pour boycotter les célébrations du 9 mai, et s’est envolé pour Moscou. L’opposition tchèque a déjà annoncé qu’elle essayerait de faire revenir le parlement sur le financement du voyage de Zeman à Moscou. Prague est, par nature, un point sensible dans les relations de la Russie avec l’Ouest. La République tchèque refuse toujours d’autoriser les troupes de l’OTAN à se baser sur son sol, même si Prague continue à héberger des activités anti-russes comme Radio Free Europe/Radio Liberty et diverses organisations non gouvernementales (ONG) soutenues par Soros. Les interlocuteurs de Soros au Parlement européen exercent aussi des pressions sur le président serbe Tomislav Nikolic pour qu’il annule ses projets d’aller à Moscou mettant en jeu l’adhésion de la Serbie à l’Union européenne.

 

Trois anciens ambassadeurs états-uniens en Ukraine, Steven Pifer, John Herbst, et William Taylor, ont exhorté de manière scandaleuse les dirigeants occidentaux comme le Premier ministre britannique David Cameron, le président français François Hollande, et la chancelière allemande Angela Merkel (elle devrait s’envoler pour Moscou le 10 mai pour y déposer une gerbe lors d’une cérémonie) — qui ont annoncé leur décision de boycotter la cérémonie du 9 mai et la parade militaire à Moscou — à assister à la place à une célébration du « Jour de la victoire » en Europe à Kiev.

 

Ces trois larbins ont écrit dans une tribune libre dans le Los Angeles Times que « même si les présidents Clinton et George W. Bush s’étaient rendus à Moscou en 1995 et en 2005 pour d’autres anniversaires de la Victoire », le président Barack Obama ne célébrerait pas l’événement à Moscou, mais à Kiev [6]. Les ambassadeurs refusent de reconnaître que si les dirigeants occidentaux devaient observer cette célébration à Kiev, ils se tiendraient aux côtés de néonazis et de paléonazis de toutes obédiences, y compris des partisans d’Adolf Hitler et du chef nazi ukrainien et membre de la SS allemande, Stepan Bandera.

 

Les trois ex-ambassadeurs US, Pifer, Herbst, et Taylor sont loin d’être les seuls à appeler à ce que le sacrifice de 27 millions de citoyens soviétiques pendant la Seconde Guerre mondiale soit célébré dans une ville où les néonazis et les mercenaires skinheads de toute l’Europe jouissent du pouvoir politique et militaire.

 

Pifer travaille pour la Brookings Institution, un centre important de l’actuelle agit-prop anti-russe, tandis que Herbst était un entremetteur militant au soutien de l’Agence pour le développement international (USAID), de la CIA et des médias grand public pro-occidentaux en Ukraine pour la révolution orange à Kiev.

 

Taylor, en tant que coordinateur en chef de l’aide gouvernementale états-unienne à l’ancienne Union soviétique et à l’Europe de l’Est, a travaillé étroitement avec l’organisation de Soros et le National Endowment for Democracy (NED) [« La NED, vitrine légale de la CIA », par Thierry Meyssan, Оdnako (Russie), Réseau Voltaire, 6 octobre 2010]] pour récolter des fonds au profit de groupes d’extrême droite proaméricains dans la région.

 

Tandis qu’Obama et ses amis dans l’OTAN ne seront pas à Moscou, le Premier ministre grec Alexis Tsipras, qui a demandé des réparations de guerre à l’Allemagne pour son pays, dédaignera le boycott de l’OTAN et se joindra à Zeman pour assister à la cérémonie sur la place Rouge. Les dirigeants de l’Islande, de la Norvège, des Pays-Bas, de la Slovaquie et de la Hongrie pourraient aussi rompre les rangs de l’OTAN et s’envoler vers Moscou pour la cérémonie du 9 mai.

 

Dans ce qui ne peut qu’être considéré comme un camouflet diplomatique pour le régime de Kiev et ses soutiens occidentaux, les dirigeants des Républiques populaires de Donetsk et Lugansk, en Ukraine de l’Est, seront présents sur la place Rouge, aux mêmes tribunes que les dirigeants de 30 autres pays, dont la Chine, l’Inde, la Serbie, la Macédoine, la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro, l’Égypte et l’Afrique du Sud, une situation qui conférera un semblant de reconnaissance de facto de leur statut. En plus, les dirigeants des républiques d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie devraient aussi être présents, ce qui constitue une défaite diplomatique pour les autorités de Géorgie, qui voient ces républiques comme parties intégrantes de leur État.

 

Pendant ce temps, tandis qu’ils appellent à boycotter le « Jour de la victoire » le 9 mai à Moscou, les dirigeants des États baltes sont les hôtes de diverses commémorations nazies dans leurs capitales. La présidente de la Lituanie, Dalia Grybauskaitė, une diplômée du Foreign Service School [département de politique étrangère, NDT] de l’université Georgetown à Washington, un des terrains de recrutement favoris de la CIA, ne fait rien pour empêcher les cérémonies annuelles devant la tombe de la marionnette nazie lituanienne et constructeur de camps de concentration Juozas Ambrazevicius Brazaitis, dont le corps a été rapatrié il y a quelques années de Putnam, au Connecticut, en Lituanie, et réinhumé à Kaunas avec tous les honneurs militaires.

 

Le président d’Estonie, Toomas Hendrik Ilves, un ancien chef du bureau estonien de Radio Free Europe, financée par la CIA, a soutenu la décision du gouvernement estonien en 2007 de déplacer une statue soviétique de la victoire de Talinn vers une base militaire à la périphérie de la ville, où elle siège dorénavant tout près du centre de cyberguerre de l’OTAN. Pendant que les dirigeants de Lettonie rejoignaient leurs partenaires baltes dans la compétition pour le boycott de la cérémonie de Moscou, des vétérans et des partisans de la Légion lettone, Division de la Waffen SS allemande pendant la guerre, paradaient fièrement dans les rues de Riga lors d’une cérémonie organisée chaque année depuis 1991 [7]. Le président letton Andris Bērziņš n’a rien fait pour contrecarrer la cérémonie nazie en Lettonie, bien qu’il trouve abominable qu’un dirigeant occidental reconnaisse le rôle de la Russie en célébrant le jour de la victoire sur Hitler.

 

Bērziņš a été longtemps associé à la Stockholms Enskilda Bank, propriété de la famille suédoise Wallenberg, accusée de collaboration avec l’Allemagne nazie pendant la guerre, ce qui lui vaut une place sur une liste de blocus du gouvernement états-unien.

 

Donald Tusk, président du Conseil européen, et le président de la Pologne Bronislaw Komorowski ont rejoint leurs amis baltes pour essayer de revoir le rôle de la Russie dans l’histoire de la Seconde Guerre mondiale. Le ministre polonais des Affaires étrangères Grzegorz Schetyna a tenté de réécrire l’Histoire en affirmant que ce sont les Ukrainiens, et non les Russes, qui ont libéré Auschwitz. Le ministre russe des Affaires étrangères a répondu à Schetyna en lui disant que « chacun sait qu’Auschwitz a été libéré par l’Armée rouge, dans laquelle toutes les nationalités ont héroïquement servi », ajoutant que la Pologne « dénaturait » l’Histoire.

 

Se livrer à une parodie de l’Histoire, c’est exactement ce que font les dirigeants de l’OTAN en exerçant des pressions sur les dirigeants de pays qui vont de la Corée du Sud et du Japon à la Bulgarie et à l’Autriche pour qu’ils n’envoient pas de représentants officiels à Moscou.

 

Cette action rappelle vraiment le boycott des jeux Olympiques d’été de Moscou, en 1980, lancé sous l’égide des États-Unis et diplomatiquement immature ; un choix réputé pour avoir causé plus de tort à long terme au mouvement olympique qu’un dommage à court terme à l’URSS.

 

 

 

Par Wayne Madsen (*) - RÉSEAU VOLTAIRE INTERNATIONAL | WASHINGTON D. C. (ÉTATS-UNIS) - traduction : Diane (le Saker francophone) - LE 26 MARS 2015

Source : Strategic Culture Foundation (Russie)

 

 

(*) Wayne Madsen : ancien contractant de la National Security Agency (NSA), devenu journaliste spécialisé sur le renseignement électronique, puis sur le renseignement en général. Il a notamment été chef de rubrique de la revue française Intelligence Online jusqu’à son rachat par Le Monde. Il publie le Wayne Madsen Report et intervient régulièrement sur la chaîne satellitaire Russia Today.

 

 

Notes :

[1] « « Operation Paperclip » : des V2 à la Lune », Réseau Voltaire, 24 août 2004.

[2] « George Soros, spéculateur et philanthrope », Réseau Voltaire, 15 janvier 2004.

[3] « Le prêt-à-penser de la Fondation Heritage », Réseau Voltaire, 8 juin 2004.

[4] « L’Institut américain de l’entreprise à la Maison-Blanche », Réseau Voltaire, 21 juin 2004.

[5] « La Brookings Institution, think tank des bons sentiments », Réseau Voltaire, 30 juin 2004.

[6] “Kiev, not Moscow, should be the choice for marking V-E Day”, Steven Pifer, John Herbst & William Taylor, Los Angeles Times, March 16, 2015.

[7] « La présidente de la Lettonie réhabilite le nazisme », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 16 mars 2005.

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