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« L’Union Européenne, c’est l’antithèse de la démocratie » – Joseph Stiglitz, Prix Nobel d’Économie.

« L’Union Européenne, c’est l’antithèse de la démocratie » – Joseph Stiglitz, Prix Nobel d’Économie. | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it


« L’Union Européenne,

c’est l’antithèse de la démocratie » 

Joseph Stiglitz, Prix Nobel d’Économie.

 

Le crescendo d’amertume et de querelles en Europe pourrait faire croire aux étrangers à une sorte de fin de partie plutôt amère entre la Grèce et ses créanciers. En réalité, explique Joseph Stiglitz dans un article paru sur Project Syndicate, les dirigeants européens commencent juste à révéler la vraie nature de la controverse sur la dette actuelle, et la réponse n’a rien de plaisant : il s’agit bien plus de pouvoir et de démocratie que d’argent et d’économie.

 

L’économie derrière le programme que la « Troïka » (Commission européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international) a imposé à la Grèce voilà cinq ans a sombré dans un gouffre, avec une chute vertigineuse de 25 % du PIB. Aucune dépression n’a eu des conséquences aussi catastrophiques, commente Stiglitz, rappelant un simple fait : le taux de chômage parmi les jeunes dépasse aujourd’hui les 60 %. Il est surprenant, poursuit le Prix Nobel, que la troïka refuse de reconnaitre ses échecs. Mais ce qui est encore plus surprenant est que les dirigeants européens n’en aient rien retenu.


Stiglitz rappelle que les énormes sommes d’argent prêtées à la Grèce ont terminé leur course dans les caisses des créanciers du secteur privé – y compris les banques allemandes et françaises. Le FMI et les autres créanciers « officiels » n’ont pas besoin de l’argent qui est réclamé aujourd’hui. S’il s’agissait d’un scénario de « Business as usual », cet argent serait très probablement à nouveau prêté à la Grèce.

 

Mais, encore une fois, ce n’est pas une question d’argent. Il s’agit en réalité d’utiliser les échéances pour contraindre la Grèce à se soumettre, à accepter l’inacceptable – non seulement des mesures d’austérité, mais aussi des politiques punitives de régression.

 

Mais pourquoi donc l’Europe fait-elle cela ? Pourquoi les dirigeants européens refusent-ils de prolonger de quelques jours l’échéance du 30 juin pour le remboursement de la Grèce au FMI ? L’Europe n’est-elle pas synonyme de démocratie ? En fait, c’est antithèse de la démocratie, répond Stiglitz : de nombreux dirigeants en Europe voudraient voir la chute du gouvernement de gauche emmené par Alexis Tsipras. Il n’est pas simple de conseiller les Grecs sur comment voter le 5 juillet, continue Stiglitz. Aucune des deux alternatives – approbation ou refus des conditions imposées par la troïka – ne sera facile, et chacune comporte des risques énormes. Voter « oui » signifierait une dépression sans fin. Il est possible qu’un pays – qui aurait vendu tous ses biens et dont les jeunes auraient émigré – pourrait finalement obtenir l’annulation de sa dette ; peut-être qu’alors la Grèce pourrait obtenir l’assistance de la Banque mondiale. Tout ceci pourrait se produire pendant la prochaine décennie, ou la suivante.

 

À l’inverse, voter « non » laisserait au moins ouverte la possibilité pour la Grèce, avec sa forte tradition démocratique, de décider de son destin. Les Grecs pourraient saisir l’opportunité de construire ainsi un futur qui, même s’il n’est pas aussi prospère que par le passé, serait bien plus prometteur que la torture totalement déraisonnable qu’elle subit actuellement.

 

« Moi je saurais quoi voter, » conclut le Prix Nobel d’Économie.

 

 

 

Par lantidiplomatico.it - traduction : Christophe  pour ilfattoquotidiano.fr – le 29 juin 2015.

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Le problème de l'UE

Le problème de l'UE | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it


Le problème de l'UE, c'est l'Allemagne, pas la Grèce.


Joseph Stiglitz - Prix Nobel d'Economie.


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Joseph Stiglitz montre qu’une suspension du paiement de la dette peut être bénéfique pour un pays et sa population

Joseph Stiglitz montre qu’une suspension du paiement de la dette peut être bénéfique pour un pays et sa population | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it



Joseph Stiglitz montre qu’une suspension

du paiement de la dette peut

être bénéfique pour un pays

et sa population


Par Éric Toussaint (*)

 

Depuis que l’Union européenne est frappée de plein fouet par une crise de la dette et que plusieurs pays sont étranglés par les créanciers, la perspective d’un défaut de paiement pointe à l’horizon. Une majorité d’économistes de droite et de gauche considère qu’il faut éviter un arrêt du remboursement de la dette.


Les crédits octroyés en urgence par la Troïka à la Grèce (mai 2010), à l’Irlande (novembre 2010), au Portugal (mai 2011) et à Chypre (mars 2013) l’ont été sous prétexte d’éviter un défaut de paiement qui aurait eu, disait-on, des effets catastrophiques pour les populations des pays concernés.


Pourtant, on trouve dans plusieurs recherches économiques des arguments forts en faveur de la décision de suspendre le paiement de la dette. De plus, aujourd’hui, il est difficile de nier que les conditions attachées à ces crédits combinées à l’augmentation de la dette ont des effets dramatiques pour les peuples, à commencer par le peuple grec. Il est temps de comprendre qu’une suspension du paiement de la dette peut constituer un choix justifié.


 

Joseph Stiglitz, prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d’Alfred Nobel en 2001, président du conseil des économistes du président Bill Clinton de 1995 à 1997, économiste en chef et vice-président de la Banque mondiale de 1997 à 2000, apporte des arguments forts à ceux qui plaident pour la suspension du remboursement des dettes publiques. Dans un livre collectif |1| publié en 2010 par l’université d’Oxford, il affirme que la Russie en 1998 et l’Argentine au cours des années 2000 ont fait la preuve qu’une suspension unilatérale du remboursement de la dette peut être bénéfique pour les pays qui prennent cette décision : « Tant la théorie que la pratique suggèrent que la menace de fermeture du robinet du crédit a été probablement exagérée » (p. 48).

 

Quand un pays réussit à imposer une réduction de dette à ses créanciers et recycle les fonds antérieurement destinés au remboursement pour financer une politique fiscale expansionniste, cela donne des résultats positifs : « Dans ce scénario, le nombre d’entreprises locales qui tombent en faillite diminue à la fois parce que les taux d’intérêt locaux sont plus bas que si le pays avait continué à rembourser sa dette |2| et parce que la situation économique générale du pays s’améliore. Puisque l’économie se renforce, les recettes d’impôts augmentent, ce qui améliore encore la marge budgétaire du gouvernement. […] Tout cela signifie que la position financière du gouvernement se renforce, rendant plus probable (et pas moins) le fait que les prêteurs voudront à nouveau octroyer des prêts. » (p. 48) Et il ajoute : « Empiriquement, il y a très peu de preuves accréditant l’idée qu’un défaut de paiement entraîne une longue période d’exclusion d’accès aux marchés financiers. La Russie a pu emprunter à nouveau sur les marchés financiers deux ans après son défaut de paiement qui avait été décrété unilatéralement, sans consultation préalable avec les créanciers. […] Dès lors, en pratique, la menace de voir le robinet du crédit fermé n’est pas réelle. » (p. 49)

 

Pour Joseph Stiglitz, certains pensent qu’un des rôles centraux du FMI est d’imposer le prix le plus élevé possible aux pays qui voudraient se déclarer en défaut de paiement et beaucoup de pays se comportent comme s’ils croyaient à cette menace. Il considère qu’ils font fausse route : « Le fait que l’Argentine soit allée si bien après son défaut de paiement, même sans l’appui du FMI (ou peut être parce qu’elle n’a pas eu l’appui du FMI), peut conduire à un changement de cette croyance. » (p. 49)

 

Il met également clairement en cause les banquiers et autres prêteurs qui ont octroyé massivement des prêts sans vérifier sérieusement la solvabilité des pays qui empruntaient ou, pire, qui ont prêté en sachant parfaitement que le risque de défaut était très élevé. Il ajoute que, puisque les prêteurs exigent de certains pays des taux élevés en vertu des risques qu’ils prennent, il est tout à fait normal qu’ils soient confrontés à des pertes dues à un effacement de dette. Ces prêteurs n’avaient qu’à utiliser les intérêts élevés qu’ils percevaient en tant que provisions pour pertes possibles. Il dénonce aussi les prêts « prédateurs » octroyés aux pays débiteurs à la légère par les banquiers (p. 55).

 

En résumé, Stiglitz plaide pour que les prêteurs assument les risques qu’ils prennent (p. 61). À la fin de sa contribution, il considère que les pays qui s’engagent dans la voie du défaut de paiement ou de la renégociation en vue d’obtenir une réduction de dette auront besoin d’imposer un contrôle temporaire sur les changes et/ou des taxes pour décourager les sorties des capitaux (p. 60). Il reprend à son compte la doctrine de la dette odieuse et affirme que celle-ci doit être annulée (p. 61). |3|

 

 

D’autres économistes abondent dans la même direction que Joseph Stiglitz

 

Il n’est pas le seul à aller dans ce sens. Dans un article publié par le Journal of Development Economics |4| sous le titre « The elusive costs of sovereign defaults », Eduardo Levy Yeyati et Ugo Panizza, deux économistes qui ont travaillé pour la Banque interaméricaine de développement, présentent les résultats de leurs recherches minutieuses sur les défauts de paiement concernant une quarantaine de pays. Une de leurs conclusions principales est la suivante : « Les périodes de défaut de paiement marquent le début de la récupération économique ». |5|On ne peut mieux dire.

 

 

Par Éric Toussaint (*) CADTM – le 16 janvier 2015

 

 

Notes

|1| Barry Herman, José Antonio Ocampo, Shari Spiegel, Overcoming Developing Country Debt Crises, OUP Oxford, 2010.

|2| En effet, une des conditions posées par le FMI lorsqu’il vient en aide à un pays au bord du défaut de payement est d’augmenter les taux d’intérêt locaux. Si un pays échappe aux conditions fixées par le FMI, il peut au contraire baisser les taux d’intérêt afin d’éviter autant que possible des faillites d’entreprises.

|3| Joseph Stiglitz a défendu cette position à de nombreuses reprises au cours des dix dernières années. Voir notamment son livre La grande désillusion, Fayard, 2002.

|4| Journal of Development Economics 94, 2011, p. 95-105.

|5| “Default episodes mark the beginning of the economic recovery”.

 

 

(*) Éric Toussaint, docteur en sciences politiques, est porte-parole du CADTM international et membre du conseil scientifique d’ATTAC France. Il est auteur des livres Bancocratie, Aden, 2014, http://cadtm.org/Bancocratie ; Procès d’un homme exemplaire, Editions Al Dante, Marseille, 2013 ; Un coup d’œil dans le rétroviseur. L’idéologie néolibérale des origines jusqu’à aujourd’hui, Le Cerisier, Mons, 2010.

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Économie : pour la droite libérale, c’est Apocalypse now

Économie : pour la droite libérale, c’est Apocalypse now | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it


Économie : pour la droite libérale,

c’est Apocalypse now

Par Patrice de Plunkett (*)

 

... si elle découvre les constatations des économistes à la conférence de l’INET (1) (Institute for New Economic Thinking), réunie à Paris jusqu’à demain 11 avril :

 

Le pape François avait donc raison ? Ses méprisants détracteurs avaient tort ? La partie critique des pages économiques de La joie de l’Évangile vient d’être confirmée (involontairement) à la 6e conférence annuelle de l’INET, réunie à Paris au siège de l’OCDE autour d’intervenants comme Joseph Stiglitz, Thomas Piketty  et même George Soros.

Voici le tableau (2) bossé par l’INET, qui a décidé – un peu tard – de « confronter les théories économiques avec la réalité du terrain » :

 

Robert Johnson, président de l’INET : « Lors de la crise financière de 2008, nous avons compris que les paradigmes mêmes de la théorie économique avaient échoué : les économistes étaient responsables de mauvaises décisions parce que leurs théories ne rendaient pas compte de la réalité. »

 

► Depuis sa conférence fondatrice en 2010, l’INET soumet à la critique les trois principaux piliers de la théorie économique dominante :

 

1. Premier dogme : « les marchés peuvent s’autoréguler parce que le comportement des acteurs économiques est rationnel ». Ce dogme était faux ! Depuis 2008, « nous savons que les marchés sont radicalement incertains », explique Johnson. Tout modèle reposant sur le culte des marchés « est voué à l’échec ».

 

2. Deuxième dogme : « les politiques économiques doivent laisser les marchés parvenir à leur équilibre naturel optimal exprimé par le niveau relatif des prix et des échanges ». Encore faux !

Baptisé « courbe de Philips », ce dogme a conduit à d’autres faux dogmes :


a) la réduction massive des dépenses publiques, censées être « le premier facteur de distorsion des prix » ;

b) l’interprétation du chômage comme conséquence du « manque de flexibilité de l’emploi »... Ces théories sont contraires à la réalité, constate maintenant l’INET.

 

Depuis les années 1990, en effet, l’offre et la demande sur le marché de l’emploi ne déterminent plus la formation des prix : celle-ci vient de « la mondialisation des chaînes de valeur » (3), de « la financiarisation de l’économie » (le casino global) et de « la capacité des firmes multinationales géantes à bouleverser l’économie d’un territoire en bougeant à leur guise des masses considérables de valeurs ou de technologies » !

 

Le faux dogme du « prix d’équilibre naturel » génère « austérité et chômage » selon Joseph Stiglitz... Or, pour rompre avec ces erreurs, l’INET propose une hérésie majeure aux yeux des libéraux : restaurer le rôle du politique dans l’économie. C’est ce que demandent les papes depuis vingt-cinq ans (même si des « fidèles » français s’obstinent à refuser de suivre les papes dans ce domaine crucial) : après saint Jean-Paul II et Benoît XVI, François demande que le politique oblige l’économie à tenir compte du bien commun.

 

C’est ce que l’INET demande aussi, en insistant pour que l’on considère comme « biens communs » – éléments non marchands dans l’économie – le climat, la biodiversité et les ressources naturelles ; attitude évidemment incompatible avec le libéralisme, pour lequel tout doit être soumis au marché.

 

3. Troisième faux dogme : « le libre fonctionnement des marchés permet d’accroître la richesse de tous et de chacun ». De cette erreur (vieillie, mais encore professée par le FMI et l’OMC) découle l’absurde théorie du ruissellement (trickle-down), selon laquelle l’enrichissement des riches profite mécaniquement aux pauvres...


En condamnant cette théorie des « retombées » (comme « n’ayant jamais été vérifiée dans la réalité »), l’exhortation apostolique du pape François avait scandalisé les chroniqueurs du Figaro, de L’Opinion, des Échos et de Valeurs Actuelles sur le plan économique :  d’où leur campagne oblique pour déconsidérer ce pape sur le plan... religieux. Mais voilà que l’analyse bergoglienne est confirmée par des observations d’économistes !

 

Depuis le putsch ultralibéral des années 1990, disent-ils, les inégalités vont croissant : actuellement les revenus du 1 % de Terriens les plus riches sont équivalents à ceux des 61 % les plus pauvres (démonstration d’un économiste de la Banque mondiale). Un économiste néerlandais montre les méfaits de la financiarisation de l’économie mondiale : le volume des crédits affectés à la sphère financière a explosé depuis trente ans, atteignant 200 % du PIB mondial à la fin des années 1990, puis 400 % en 2007, monstrueuse disproportion par rapport à l’économie réelle ; et la tendance s’aggrave malgré la catastrophe de 2008... 

 

Dans son article du Monde, Reverchon cite cette phrase : « Les fondamentalistes du marché seront les derniers à bouger, comme l’ont été les universitaires marxistes en Union soviétique, qui ont défendu leurs positions jusqu’à la date de leur mort, alors que leur monde s’était écroulé ». L’observation est exacte, bien qu’elle soit de George Soros.

 

L’INET, créé en 2010, est une fondation financée à l’origine par le même Soros, en compagnie des PDG de Blackberry et du fonds Warburg Pincus : groupes d’intérêts peu portés sur les remises en cause.

 

Mais le fait est là : le diagnostic de l’INET détruit les dogmes devenus pensée unique officielle après 1990. Dogmes auxquels le PS s’est rallié de longue date... Dogmes qui sont (encore aujourd’hui) la Loi et les Prophètes de la droite libérale française ! Pour cette droite, le constat de l’INET est une apocalypse. Elle se gardera donc d’en parler.

 

Nous, en revanche, cette destruction du dogme économique par des économistes nous intéresse. Pour deux raisons :


1. c’est une repentance de la caste coupable ;

2. c’est un retour au réel, partageable par tous les hommes de bonne volonté puisque la réalité est la même pour tout le monde. Les catholiques comptant parmi les hommes de bonne volonté (auxquels fut annoncée la paix sur la terre), ils ne devraient pas manquer de méditer sur cet événement.  À condition que l’information leur parvienne...

 

Bien entendu, les économistes de l’INET ne mettent en cause que le dogme ultralibéral ; ils ne sortent pas du paradigme productiviste. Ce qu’ils proposent n’est donc qu’une demi-révolution. Mais leur demi-révolution consiste à rompre avec le libéralisme : ce n’est pas rien, même si cette rupture inaugurale n’a encore lieu que dans des intelligences.

 

Une rupture concrète exigerait que le politique ressuscite, et que les Etats (miraculeusement réinventés) prennent l’offensive pour changer de système à l’échelon international. On en est loin.

 

Les États s’en remettent à la planète financière depuis trente ans, et la quasi-totalité de la classe politique adhère – en l’absence de croissance ! - au mythe de la croissance infinie.

 

 C’est une secrétaire d’État socialiste qui ânonnait en 2013, dans un forum du PS : « Le progrès il est dans le fait de passer nos frontières et de passer nos limites... » En ce cas, le progrès est réalisé par les multinationales et les fonds spéculatifs, fer de lance du sans limites. Et les bigots de ce « progrès », à gauche et à droite, resteront sourds aux avertissements de la réalité.

 

 

 

Par Patrice de Plunkett (*) - plunkett.hautetfort.com – le 11 avril 2015.


(*) Patrice de Plunkett est un journaliste et essayiste français, qui codirigea le Figaro Magazine… (Source Wikipédia).



Notes :  

(1) dont cinq prix Nobel d’économie... (NDLGazette : Le conseil scientifique de l’INET compte notamment Joseph Stiglitz [prix Nobel 2001], James Mirrlees [prix Nobel 1996], Amartya Sen [prix Nobel 1998], James Heckman [prix Nobel 2000], George Akerlof [prix Nobel 2001] et Michael Spence [prix Nobel 2001] [Source Wikipédia] 

(2) synthèse par Antoine Reverchon [Le Monde Culture & Idées, 11/04].

(3) Glossaire : « La chaîne de valeur désigne l’ensemble des activités productives réalisées par les entreprises en différents lieux géographiques au niveau mondial pour amener un produit ou un service du stade de la conception au stade de la production et de la livraison au consommateur final. Ces activités englobent selon les cas la recherche-développement, la conception, la production, la commercialisation, la distribution, la vente au détail, et parfois même la gestion et le recyclage des déchets. L’intensification de la mondialisation des chaînes de la valeur a entraîné un niveau sans précédent d’interdépendance entre les pays associés aux chaînes d’approvisionnement. »

 

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Madame Lagarde, Monsieur Junker c’est vous qui ne respectez pas vos engagements !

Madame Lagarde, Monsieur Junker  c’est vous qui ne respectez pas vos engagements ! | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Photo : Christine Lagarde

 

Madame Lagarde, Monsieur Junker :

c’est vous qui ne respectez pas vos engagements !

Par Renaud Vivien (*)

 

À quelques jours des élections en Grèce, le FMI et la Commission européenne récidivent. Mettant en garde contre toute mesure d’allègement de la dette grecque, Christine Lagarde, directrice du FMI, vient de déclarer qu’« une dette est une dette, c’est un contrat » tandis que le président de la Commission européenne, Jean-Claude Junker, martèle que « l’Europe attend que la Grèce respecte ses engagements pris vis-à-vis de ses partenaires ». Pour forcer le prochain gouvernement à continuer à appliquer les programmes d’austérité et à rembourser la dette, Mr Junker et Mme Lagarde en appellent donc à la moralité et à la légalité (au respect des engagements pris par les États et au droit du contrat). Le droit international dit pourtant tout autre chose et permet à un État de répudier ses dettes.

 

Dans son rapport sur la « dette odieuse » commandé par l’ONU |1|, le juriste Robert Howse rappelle que l’obligation pour un État de rembourser les dettes n’a jamais été reconnue dans l’Histoire comme étant inconditionnelle. L’obligation de payer une dette n’est pas absolue et rencontre deux limites fondamentales.

 

Premièrement, il est établi en droit international que l’État a d’abord des engagements à l’égard de sa population. En effet, l’obligation de respecter les droits humains l’emporte sur tous les autres engagements pris par l’État comme ceux à l’égard de ses créanciers. L’article 103 de la Charte de l’ONU l’indique très clairement. L’argument juridique de l’« état de nécessité » est encore plus explicite en matière de dette : « On ne peut attendre d’un État qu’il ferme ses écoles et ses universités et ses tribunaux, qu’il abandonne les services publics de telle sorte qu’il livre sa communauté au chaos et à l’anarchie simplement pour ainsi disposer de l’argent pour rembourser ses créanciers étrangers ou nationaux. Il y a des limites à ce qu’on peut raisonnablement attendre d’un État, de la même façon que pour un individu ». L’état de nécessité et la Charte de l’ONU permettent donc à un État de fonder juridiquement une suspension unilatérale du paiement de la dette lorsque son budget ne lui permet pas de subvenir aux besoins fondamentaux de sa population. Ce qui est indubitablement le cas en Grèce.

 

Ajoutons que sur le plan économique, une suspension du remboursement de la dette a des résultats très positifs. Comme l’ont souligné Eduardo Levy Yeyati et Ugo Panizza, deux anciens économistes de la Banque interaméricaine de développement, suite à leurs recherches sur les défauts de paiement concernant une quarantaine de pays, « les périodes de défaut de paiement marquent le début de la récupération économique ». Le Prix Nobel de l’économie, Joseph Stiglitz, partage le même constat et démontre que les conséquences catastrophiques d’un moratoire sur la dette annoncées par les créanciers pour faire peur au pays débiteur ne sont pas réelles : « Empiriquement, il y a très peu de preuves accréditant l’idée qu’un défaut de paiement entraîne une longue période d’exclusion d’accès aux marchés financiers (....) Dès lors, en pratique, la menace de voir le robinet du crédit fermé n’est pas réelle ».

 

Deuxièmement, l’obligation de rembourser une dette ne vaut que si cet engagement est valide, quelle que soit la capacité financière de l’État à payer sa dette. Comme le souligne Howse, le principe de continuité de l’État et le droit du contrat sont limités par des considérations d’équité, la fraude, le changement fondamental de circonstance, la mauvaise foi, l’incompétence du signataire, l’abus de droit, etc.

 

Une commission d’audit de la dette grecque mise en place par le prochain gouvernement (avec participation citoyenne) permettrait d’identifier avec précision les irrégularités dans la constitution de ces dettes, à commencer par la dette à l’égard de la Troïka (FMI, Union Européenne, Banque centrale européenne) qui détient à elle seule 80 % de la dette totale, suite aux sauvetages des banques privées intervenus en 2010 et 2012. Rappelons que les prêts octroyés par la Troïka à la Grèce à partir de 2010 ont servi très largement à rembourser les anciens créanciers, principalement les banques françaises et allemandes qui possédaient la moitié du total des titres de la dette grecque avant l’intervention de la Troïka.

Cette intervention s’est accompagnée de plusieurs irrégularités qui ont pour effet de remettre en cause la validité des engagements sur la dette si chère à Mr Junker et Mme Lagarde.

 

La Troïka a tout d’abord commis un abus de droit. Comme le rappelle l’Expert des Nations Unies sur la dette en 2012, « les créanciers et les entreprises privées sont tenus de respecter les droits humains et de ne pas tirer profit d’une crise pour imposer au débiteur des réformes structurelles ». Or, la Troïka a fait le contraire puisqu’elle a profité de la détresse financière de la Grèce pour lui imposer des programmes d’austérité (les memoranda) en échange de prêts.

 

De plus, ces mesures d’austérité sont illégales au regard du droit grec, mais aussi du droit européen et international. Dans un rapport commissionné par la Chambre du travail de Vienne |2|, le juriste Andreas Fischer-Lescano démontre que les memoranda de la Troïka violent une série de droits fondamentaux tels que le droit à la santé, à l’éducation, au logement, à la sécurité sociale, à un salaire juste, à la propriété privée, mais aussi la liberté d’association et de négociation collective. Tous ces droits sont protégés par de nombreux textes juridiques qui engagent non seulement les États, mais aussi les institutions européennes et internationales comme celles qui composent la Troïka.

 

La validité des memoranda et des prêts qui les accompagnent est aussi entachée par le fait que la Troïka n’est pas compétente, en vertu des Traités européens, à légiférer sur le droit de grève, la santé, le droit d’association, l’éducation et la réglementation des niveaux de salaire. Enfin, l’exclusion du Parlement européen dans l’élaboration et la signature des memoranda bafoue le principe de séparation des pouvoirs protégé par les traités européens.

 

 

Toutes ces violations permettent à la Grèce d’annuler ses engagements à appliquer les mesures d’austérité et à rembourser la dette à l’égard de la Troïka.

 

Elles montrent également le fossé entre les propres engagements du FMI et de l’Union européenne et la réalité. À cet égard, Mme Lagarde ferait bien de relire l’article premier des statuts de l’organisation qu’elle dirige et qui donne au FMI comme mission de « contribuer à l’instauration et au maintien de niveaux élevés d’emploi et de revenu réel et au développement des ressources productives de tous les États membres ».

 

 

Par Renaud Vivien (*) CADTM – le 22 janvier 2015

 

Notes

|1| Robert Howse, “The concept of odious debt in public international law”,CNUCED, juillet 2007

|2| Rapport « Human Rights in Times of Austerity Policy », publié le 17 février 2014

 

 

(*) Renaud Vivien est co-secrétaire général du CADTM Belgique

Koter Info's insight:


Troïka ou Mafia, on se pose la question !


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Joseph Stiglitz : le problème n’est pas la Grèce, c’est l’Europe

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Joseph Stiglitz : le problème n’est pas la Grèce,

c’est l’Europe

 

Joseph Stiglitz poursuit notre série sur la façon dont les économistes interprètent la situation politique de la Grèce en regard de la crise économique dans toute l’Europe.

 

Alors que les États-Unis montrent enfin des signes de rétablissement, de l’autre côté de l’Atlantique, une demi-décennie perdue est en train de se transformer en une décennie entière. L’Europe semble avoir perdu la raison, écrit Joseph Stiglitz dans un article paru le 8 janvier sur le site Project Syndicate, qui espère que les élections en Grèce lui permettront de la retrouver (NDLR : une autre traduction française, du texte intégral, est également disponible sur Project Syndicate).

Bernard Marx.

 

 

L’Europe a perdu la raison 

(extraits)

 

Dans la plupart des pays de l’Union européenne, le PIB par habitant est inférieur à ce qu’il était avant la crise. Une demi-décennie perdue se transforme rapidement en une décennie entière. Derrière les froides statistiques, des vies sont ruinées, les rêves sont brisés, et les familles se disloquent (ou ne se constituent pas) à mesure que la stagnation – la dépression dans certains endroits – suit son cours année après année...


L’Europe n’est pas une victime. Oui, l’Amérique a mal géré son économie ; mais non, les États-Unis n’ont pas, en quelque sorte, réussi à transférer le poids de la crise sur l’Europe. Le malaise de l’UE est auto-infligé. Il est la conséquence d’une succession sans précédent de mauvaises décisions économiques, à commencer par la création de l’euro. Bien que destiné à unir l’Europe, l’euro l’a en définitive divisé ; et en l’absence de la volonté politique de créer les institutions qui permettraient à une monnaie unique de fonctionner, les dommages ne cessent pas.

 

 

Renverser les politiques d’austérité

 

Le désordre actuel découle en partie de l’adhésion à la croyance depuis longtemps discréditée que les marchés fonctionnent bien, sans imperfections concernant l’information et la concurrence. L’ubris a également joué un rôle. Comment expliquer autrement le fait que, année après année, les prévisions des fonctionnaires européens en ce qui concerne les effets de leurs politiques ont toutes été fausses ?


Ces prévisions ont été erronées non pas parce que les pays de l’UE ne ont pas réussi à mettre en œuvre les politiques prescrites, mais parce que les modèles sur lesquels ces politiques reposaient étaient totalement viciés. En Grèce, par exemple, les mesures destinées à réduire le fardeau de la dette laissent ce pays plus accablé qu’il ne l’était en 2010 : le ratio dette-PIB a augmenté, en raison de l’impact éprouvant de l’austérité budgétaire sur la production. Le Fonds monétaire international a pour sa part reconnu ces défaillances intellectuelles et politiques...

 

Plus que de réformes structurelles dans les pays membres, l’Europe a besoin d’une réforme de la structure de la zone euro elle-même, et d’un renversement des politiques d’austérité, qui a échoué tant de fois à relancer la croissance économique. Ceux qui pensaient que l’euro ne pourrait pas survivre ont eu tort. Mais les critiques ont eu raison sur une chose : à moins que la structure de la zone euro ne soit réformée, et l’austérité inversée, l’Europe ne se rétablira pas.

 

 

La Grèce, un nouveau test pour l’Europe

 

Le drame en Europe est loin d’être terminé. Une des forces de l’UE est la vitalité de ses démocraties. Mais l’euro a enlevé aux citoyens – en particulier dans les pays en crise – leur voix au chapitre sur leur destin économique. À plusieurs reprises, les électeurs mécontents de la direction de l’économie ont rejeté leurs gouvernements, obtenant seulement que le nouveau gouvernement continue sur la même voie dictée par Bruxelles, Francfort et Berlin. Combien de temps cela peut-il continuer ? Et comment vont réagir les électeurs ? On observe dans toute l’Europe, une croissance alarmante de partis extrémistes, opposés aux valeurs des Lumières qui ont fait la réussite de l’Europe. Dans certains endroits, des mouvements séparatistes importants se constituent.

 

La Grèce va maintenant constituer un nouveau test pour l’Europe. La baisse du PIB grec depuis 2010 est bien pire que celle à laquelle l’Amérique a été confrontée pendant la Grande dépression des années 1930. Le chômage des jeunes est supérieur à 50 %... Le parti d’opposition de gauche Syriza, qui s’est engagé à renégocier les termes du plan de sauvetage de l’UE de la Grèce, est en tête dans les sondages d’opinion. Si Syriza gagne mais ne prend pas le pouvoir, le motif principal en sera la peur de la façon dont l’UE va répondre. La peur n’est pas la plus noble des émotions, et elle ne saurait constituer le type de consensus national dont la Grèce a besoin pour aller de l’avant.

 

Le problème n’est pas la Grèce. C’est l’Europe. Si l’Europe ne change pas sa façon de faire – si elle ne réforme pas la zone euro et si elle n’abroge pas l’austérité – une réaction populaire deviendra inévitable. Peut-être la Grèce va-t-elle maintenir le cap cette fois-ci encore. Mais une telle folie économique ne peut continuer éternellement. La démocratie ne le permettra pas. Mais combien de souffrances supplémentaires l’Europe devra-t-elle endurer avant qu’elle revienne à la raison ?

 

 

Traduction B. M. - regards.fr – le 12 janvier 2015

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