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Daesh se niche au plein cœur de l’UE

Daesh se niche au plein cœur de l’UE | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Photo : Gornja Maoca - Reuters

 

 

Daesh se niche au plein cœur de l’UE

 

 

Daesh achète en secret des terrains entourés de forêt près du village d’Osve en Bosnie. Les agences de renseignement bosniaques sont persuadées que l’EI cherche à créer une base à partir de laquelle l’organisation terroriste attaquera l’UE.

 

Les terrains achetés par l’EI ont un atout sans précèdent : leur proximité avec la mer Méditerranée. Cela signifie que les terroristes peuvent facilement y arriver depuis la Syrie, l’Irak et l’Afrique du Nord en traversant illégalement la Grèce, la Turquie, la Macédoine et la Serbie. 

 

Le village d’Osve est situé sur une colline à 96 kilomètres de Sarajevo. On ne peut pas trouver ce village sur les cartes GPS et il est plus commode d’y arriver à pied, car les routes sont trop sinueuses et étroites pour les voitures. Les services de sécurité de la Bosnie croient que Daesh utilise ces territoires pour y entraîner ses nouvelles recrues loin des yeux de la communauté internationale.

 

Un autre atout de la Bosnie pour Daesh, c’est la vente illégale d’armes qui dure depuis le conflit des années 1990

 

>>> Voir aussi : L’État islamique appelle au djihad dans les Balkans

Il y a cinq mois, les forces antiterroristes bosniaques ont aperçu pour la première fois le drapeau de Daesh sur les maisons d’un autre village, celui de Gornja Maoca.

 

L’extrémisme a toujours été un sujet sensible pour les Bosniaques. Selon les estimations des services de renseignements, depuis 2012, environ 200 de ses ressortissants sont partis rejoindre les rangs de Daesh en Syrie et en Irak. Une trentaine seraient morts et quarante environ, rentrés en Bosnie.

 

En septembre dernier, la police fédérale bosniaque (SIPA) a procédé à l’arrestation de deux leaders salafistes Bilal Husein Bosnić et Nusret Imamović. Mais malgré ces arrestations, des centaines de fidèles à travers le pays se sont ralliés à trois autres dirigeants. Il s’agit de Harun Mehicevic, qui était parti en Australie dans les années 1990, mais qui poursuit aujourd’hui ses activités en Bosnie, Jasin Rizvic et Osman Kekic, qui, selon les rumeurs, se battent maintenant en Syrie et Irak. Ils sont soupçonnés d’avoir acheté ces terrains.

 

Selon l’enquête menée par le Mirror, les résidents des villages voisins entendent régulièrement des tirs et voudraient bien quitter la région le plus rapidement possible.

 

« Je m’inquiète pour l’éducation de mes enfants ici. Il vaudrait mieux partir maintenant, mais il n’est pas si facile de vendre la maison », a déclaré un habitant interrogé par le journal britannique.

 

 

 

Par francais.rt.com – le 19 juillet 2015.

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La Russie tire ses marrons du feu

La Russie tire ses marrons du feu | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Photo : de gauche à droite : Riad Haddad (ambassadeur de Syrie à Moscou), Walid Mouallem (ministre syrien des Affaires étrangères), Bouthaina Shaaban (conseillère spéciale du président el-Assad), Sergueï Lavrov (ministre russe des Affaires étrangères), Vladimir Poutine (président de la Fédération de Russie), le 29 juin 2015.

 

 

 

La Russie tire ses marrons du feu

Par Thierry Meyssan (*)

 

Les négociations 5+1 piétinent, non pas du fait de Washington et de Téhéran, mais parce que Moscou entend que le nouvel ordre régional au Moyen-Orient élargi ne viole pas ses intérêts. Thierry Meyssan lève un coin du voile sur la prolongation des entretiens de Lausanne. 

 

Les négociations 5+1 trainent en longueur. Après les problèmes de santé de MM. Kerry et Zarif, toutes sortes d’autres prétextes ont été évoqués pour repousser la signature de l’accord. Pourtant, ni Washington ni Téhéran ne semblent s’affoler. Au contraire, tout fonctionne comme si le problème n’était plus entre les États-Unis et l’Iran, mais entre eux et le Conseil de sécurité.

 

J’ai, ici, révélé les négociations secrètes entre Israël et l’Arabie saoudite pour s’adapter aux conséquences de l’accord [1]. Je ne dispose pas d’informations aussi précises sur l’initiative russe, mais nous pouvons en déduire les grandes lignes.

 

L’accord états-uno-iranien [2] est la stratégie de second choix pour le président Obama après l’échec du partage du « Moyen-Orient élargi » avec la Russie, en 2013 [3]. Lors de la première conférence de Genève à propos de la Syrie (mais sans elle), Washington envisageait de confier à Moscou le soin de brider les pays arabes et d’assurer la sécurité d’Israël où résident plus d’un million d’anciens Soviétiques. Toutefois ce plan échoua, non par la faute des Russes, mais du fait de la division de l’administration Obama. Les obsédés de la Guerre froide, Hillary Clinton et le général David Petraeus en tête sabotèrent l’accord.

 

Il est donc tout à fait logique que Moscou s’assure aujourd’hui que les négociations états-uno-iraniennes ne se fassent pas à ses dépens.

 

Quels sont les objectifs stratégiques de la Russie ?

 

Au plan global, la Russie et la Chine poursuivent leur projet d’établir des routes continentales qui garantissent leur liberté économique. Tandis que les États-Unis tentent par tous les moyens de les en empêcher pour conserver la domination du monde via le contrôle des routes maritimes (théorie du « contrôle des espaces communs ») [4].

 

 

Le gaz contre les armes

 

En ce qui concerne le « Moyen-Orient élargi » [5], la Russie considère que son intérêt est d’avoir à sa frontière méridionale un Iran assez fort pour empêcher une invasion pro-occidentale, mais pas trop fort pour ne pas revenir aux fantasmes de l’Empire perse. Vladimir Poutine entretient aujourd’hui d’excellentes relations tant avec le Guide de la révolution, l’ayatollah Khamenei, qu’avec le président de la République, le cheikh Rohani. Il a pris acte à la fois des succès militaires des Gardiens de la Révolution en Palestine, au Liban, en Syrie, en Irak et au Bahreïn, aussi bien que du formidable développement industriel de l’Iran. Plusieurs fois par semaine, des émissaires russes, officiels ou officieux, se rendent à Téhéran pour échanger des informations politiques, mais aussi militaires et économiques.

 

La Russie s’inquiète des conséquences de la prochaine vente du gaz iranien à l’Union européenne ; un projet qui avait été initialement imaginé par les États-Unis de sorte que Bruxelles puisse se passer du gaz russe. Mais, dans l’esprit de Moscou, ce risque n’existe qu’à court terme, car progressivement la Russie se détourne de l’Union européenne et, à moyen terme, elle vendra son gaz à la Chine. Le risque pour les finances russes n’existe donc que pour une période inférieure à 5 ans, voire moins ; juste le temps de construire ou de renforcer les gazoducs à travers la Sibérie. Pour dédommager la vente du gaz iranien à la place du gaz russe en Europe de l’Ouest, Téhéran s’est donc engagé à acheter pour des sommes considérables de l’armement russe. Il s’agira principalement de missiles antiaériens S-400, capables de détruire n’importe quel aéronef en vol.

 

Cependant, cet accord se heurte à la résolution 1929 du Conseil de sécurité qui prohibe l’exportation d’armes à destination de l’Iran [6] ; une résolution que le président Medvedev avait décidé de soutenir et d’appliquer provoquant une crise avec son Premier ministre d’alors Vladimir Poutine. C’est pourquoi, le même Vladimir Poutine demande aujourd’hui que cette résolution soit abrogée avant la signature de l’accord 5+1.

 

Ce point ne devrait pas heurter Washington, mais accroitra la division du monde en deux blocs.

 

 

Le terrorisme

 

L’autre intérêt stratégique russe dans ce dossier, c’est l’avenir de Daesh. Il ne fait plus aucun doute que l’organisation terroriste, aujourd’hui commandée par la Turquie et financée par une partie de la famille royale saoudienne, est prête à abandonner l’Irak et la Syrie pour se déplacer dans le Caucase russe. Depuis septembre 2014, la direction de l’Émirat islamique a été purgée de ses officiers maghrébins. Ils ont presque tous été remplacés par d’ex-Soviétiques, principalement des Géorgiens et des Ouzbeks. Actuellement, les communications intérieures des officiers de Daesh, par talkie-walkie, ne sont plus en arabe, mais presque toujours en russe ; les jihadistes arabes n’étant que de la chair à canon. Moscou doit donc éliminer Daesh, maintenant au « Proche-Orient », ou devoir le combattre sur son propre sol, demain dans le Caucase.

 

C’est pourquoi la Russie a convoqué une délégation syrienne à Moscou. À la grande surprise du ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Moallem, la délégation n’a pas discuté avec son homologue russe, Sergeï Lavrov, mais a été reçue par le président Poutine, le 29 juin. Celui-ci l’a chaleureusement accueilli en public, en présence de la presse, pour lui délivrer un long discours lui indiquant le projet russe : la Syrie doit se rapprocher de l’Arabie saoudite, de la Jordanie et de la Turquie pour éliminer Daesh. Puis, M. Mouallem fut invité à prendre la parole au point de presse aux côtés du président Poutine, sans jamais avoir eu l’occasion de lui répondre.

 

À l’évidence, la Russie avait déjà secrètement discuté de ce plan non seulement avec l’Arabie saoudite [7], la Jordanie et la Turquie [8], mais aussi avec l’Iran. Et elle tenait à montrer au reste du monde qu’elle était en mesure de dicter sa politique à la Syrie. Cette dernière, quoiqu’interloquée par le plan russe, ne peut qu’y trouver son compte puisqu’il marquerait la fin de la guerre.

 

Au demeurant, le plan russe correspond à la position syrienne qui, depuis janvier 2014 et la seconde conférence de Genève (où elle était invitée à la différence de la première conférence), appelle à l’unité internationale face au terrorisme. Une position qui n’a cessé de faire ricaner vu que les jihadistes sont soutenus, sous le nom d’« opposition modérée » syrienne… par l’Arabie saoudite, la Jordanie, la Turquie et d’une manière générale par l’OTAN.

 

 

Le plan russe est-il réalisable ?

 

Le plan russe, qui est dans l’intérêt de tous les États du « Moyen-Orient élargi », contrevient cependant aux accords déjà négociés entre les Saoudiens et les Israéliens. En outre, il prive la Turquie — et donc l’OTAN — de sa carte majeure : le contrôle du jihadisme international. Sa mise en œuvre dépend de l’équilibre interne de chaque État impliqué ; un sujet qui comprend de très nombreuses incertitudes, mais à propos duquel les services russes doivent être bien renseignés.

 

En réalité, le plan russe pose la question de la sincérité des États-Unis. Veulent-ils vraiment la paix au « Moyen-Orient élargi » (pour transférer leurs troupes en Extrême-Orient) et sont-ils prêts pour cela à se priver de Daesh comme arme future contre la Russie ?

 

C’est pourquoi les consultations continuent. Le président Rohani est en Russie à l’occasion du sommet des BRICS et de l’Organisation de coopération de Shanghaï à Oufa, le président Poutine se rendra en Turquie avant la formation du nouveau gouvernement ou les prochaines élections législatives, tandis que le roi Salman d’Arabie saoudite est attendu à Moscou.

 

 

 

Par Thierry Meyssan (*) - RÉSEAU VOLTAIRE | DAMAS (SYRIE) | 13 JUILLET 2015

  

Notes :

[1] « Exclusif : Les projets secrets d’Israël et de l’Arabie saoudite », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 22 juin 2015.

[2] « Que deviendra le Proche-Orient après l’accord entre Washington et Téhéran ? », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 18 mai 2015.

[3] « Obama et Poutine vont-ils se partager le Proche-Orient ? », par Thierry Meyssan, Оdnako (Russie), Réseau Voltaire, 22 février 2013.

[4] “The Geopolitics of American Global Decline”, by Alfred McCoy, Tom Dispatch (USA), Voltaire Network, 22 June 2015.

[5] « Quelle place pour la Russie au Proche-Orient ? », par Thierry Meyssan, Оdnako (Russie), Réseau Voltaire, 28 juillet 2010.

[6] « Résolution 1929 du Conseil de sécurité », Réseau Voltaire, 9 juin 2010.

[7] « Arabie saoudite et Russie : nouvelle prise de contact », par Boris Dolgov, Traduction Julia, Strategic Culture Foundation (Russie), Réseau Voltaire, 9 juillet 2015.

[8] « Comment Vladimir Poutine a renversé la stratégie de l’OTAN », par Thierry Meyssan, Оdnako (Russie), Réseau Voltaire, 8 décembre 2014.

 

 

(*) Thierry Meyssan : Consultant politique, président fondateur du Réseau Voltaire et de la conférence Axis for Peace. Dernier ouvrage en français : L’Effroyable imposture : Tome 2, Manipulations et désinformations (éd. JP Bertand, 2007). Compte Twitter officiel.

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Vers la fin du système Erdoğan - partie 1/2

Vers la fin du système Erdoğan - partie 1/2 | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Photo : l’islamiste Recep Tayyip Erdoğan prend la succession du prince saoudien Bandar bin Sultan après l’attentat qui l’écarte de la scène en 2012 et devient le coordinateur du terrorisme international. Il prend la succession du Qatar en 2014 lorsque celui-ci doit renoncer à parrainer les Frères musulmans et devient ainsi le vrai leader de la Confrérie. Grisé par son succès, il se croit indispensable aux États-Unis et viole les règles de l’OTAN en signant le traité Turkish Stream avec la Russie.

 

 

Vers la fin du système Erdoğan - partie 1/2

 

 

Thierry Meyssan, qui avait annoncé la chute de Recep Tayyip Erdoğan dès décembre 2014 alors que tous les commentateurs internationaux persistaient à le croire gagnant des élections législatives, revient ici sur la carrière du président turc. Dans cette synthèse, il met en lumière les liens de l’AKP avec les Frères musulmans et le rôle de M. Erdoğan dans la coordination du terrorisme international après l’attentat contre le prince saoudien Bandar bin Sultan.

 

 

L’islamiste Recep Tayyip Erdoğan prend la succession du prince saoudien Bandar bin Sultan après l’attentat qui l’écarte de la scène en 2012 et devient le coordinateur du terrorisme international. Il prend la succession du Qatar en 2014 lorsque celui-ci doit renoncer à parrainer les Frères musulmans et devient ainsi le vrai leader de la Confrérie. Grisé par son succès, il se croit indispensable aux États-Unis et viole les règles de l’OTAN en signant le traité Turkish Stream avec la Russie.

 

 

Échec aux élections législatives


Le résultat des élections législatives turques ne menace pas simplement les projets de Recep Tayyip Erdoğan, qui se voyait déjà en nouveau Sultan, mais le pouvoir même de son parti, l’AKP. Chacun des trois autres partis (MHP conservateur, CHP socialiste et HPD gauche) a indiqué refuser de former un gouvernement de coalition avec lui et souhaiter, au contraire, former une coalition à trois. Dans le cas où ils n’y parviendraient pas d’ici 45 jours, il conviendrait alors soit de confier aux socialistes le soin de former une coalition gouvernementale – une option déjà écartée par l’AKP –, soit de convoquer à nouveau des élections législatives.

 

Ce scénario semble encore improbable, comme le résultat de l’élection paraissait impossible à la quasi-totalité des commentateurs politiques jusqu’au scrutin du 7 juin. Cependant, en signant le 1er décembre 2014 un accord économique avec Vladimir Poutine pour lui permettre de contourner les sanctions de l’Union européenne (Turkish Stream), M. Erdoğan a défié les règles implicites de l’OTAN. Ce faisant, il est devenu l’homme à abattre à la fois pour Washington et pour Bruxelles. Les États-Unis ont donc largement influé en sous-main durant la campagne électorale pour rendre possible le renversement de l’AKP.

 

Pour cette élection, M. Erdoğan s’était fixé comme objectif de remporter 400 sièges sur 550. En réalité, pour faire adopter une constitution taillée sur mesure qui lui accorde les pleins pouvoirs exécutifs, il espérait 367 sièges. À défaut, il se serait contenté de 330 sièges, ce qui lui aurait permis de convoquer un référendum qui aurait adopté le projet de constitution à la majorité simple. De toute manière, il lui en fallait 276 pour disposer de la majorité parlementaire, mais il n’en aura que 258, ce qui est insuffisant pour conserver seul le pouvoir.

 

La domination de l’AKP, depuis 2002, s’expliquait à la fois par ses bons résultats économiques et par la division de son opposition. Or, l’économie turque est en pleine déroute : le taux de croissance qui flirtait avec les 10 % pendant une décennie a chuté lors de la guerre contre la Libye, puis lors de l’opération secrète contre la Syrie. Il est actuellement de 3 %, mais pourrait rapidement devenir négatif. Le chômage se développe soudainement et atteint les 11 %. Ces guerres ont en effet été conduites contre des alliés de la Turquie et des partenaires économiques indispensables. Quant à la division de l’opposition, la CIA qui l’avait envenimée par le passé s’est empressée d’y remédier.

 

La chose était facile compte tenu de la kyrielle de griefs que l’autoritarisme de M. Erdoğan a suscitée. L’union de l’opposition avait déjà eu lieu, à la base, en juin 2013, lors des manifestations du parc Taksim Gezi. Mais le mouvement avait échoué, d’abord parce qu’à l’époque M. Erdoğan était soutenu par Washington, et parce qu’il était resté un soulèvement urbain. À l’époque, les manifestants protestaient certes contre un projet immobilier, mais principalement contre la dictature des Frères musulmans et la guerre contre la Syrie.

 

Constatant que ce mouvement n’avait pas pu le renverser, l’AKP se pensait, à tort, indétrônable. Il a donc tenté de faire passer en force son programme islamiste (foulards pour les femmes, interdiction de cohabitation pour les célibataires de sexe opposé, etc.). Et ce, alors que l’image pure du Sultan se trouvait soudainement remise en cause par la révélation de la corruption de sa famille. En février 2014, on entendait, sur ce qui paraît être une interception téléphonique, M. Erdoğan demander à son fils de cacher 30 millions d’euros en liquide avant une perquisition de la police [1].

 

Tout ceci sans parler de la purge contre les fidèles de son ancien allié, Fethullah Gülen [2], de l’incarcération massive de généraux, d’avocats et de journalistes [3], du non-respect des promesses faites aux Kurdes, et de la construction du plus grand palais présidentiel au monde.

 

 

 

 

 

 

Cet échec est la conséquence de sa politique étrangère


L’échec de Recep Tayyip Erdoğan ne provient pas de décisions intérieures, c’est la conséquence directe de sa politique étrangère. Les résultats économiques exceptionnels de ses premières années n’auraient pas été possibles sans l’aide en sous-main des États-Unis qui voulaient en faire le leader du monde sunnite. Ils ont été stoppés, en 2011, par le ralliement d’Ankara à l’opération de destruction de la Jamahiriya arabe libyenne qui était jusque là son second partenaire économique. La Turquie a réveillé les liens historiques qu’elle avait avec la tribu des Misratas, principalement des Aghdams, c’est-à-dire des juifs turcs convertis à l’islam et installés en Libye au XVIIIe et XIXe siècle.

 

La Turquie avait conscience qu’en attaquant la Libye, elle perdrait un très important marché, mais elle espérait prendre la tête des gouvernements tenus par les Frères musulmans, déjà en Tunisie, puis probablement en Libye, en Égypte et en Syrie. Ce qui a effectivement eu lieu dans les deux premiers États en 2012, mais n’a pas duré.

 

Ankara s’est engagé dans la guerre contre la Syrie. C’est sur le sol turc que l’OTAN a installé le quartier général de coordination des opérations. Durant la première guerre (celle de 4e génération), allant de février 2011 à la conférence de Genève I de juin 2012, l’OTAN transférait en Turquie les combattants d’al-Qaïda en Libye de manière à créer « l’Armée syrienne libre ». M. Erdoğan se contentait de fournir des bases arrières camouflées en « camps de réfugiés », tandis que la presse occidentale aveuglée ne voyait qu’une « révolution démocratique » (sic) dans la lignée du « printemps arabe » (re-sic).

 

En juin 2012, la victoire électorale des Frères musulmans en Égypte pouvait laisser penser à un avenir radieux de la Confrérie. Aussi M. Erdoğan suivit-il le projet d’Hillary Clinton, du général David Petraeus et de François Hollande de relancer la guerre contre la Syrie, mais sur le mode nicaraguayen cette fois. Il ne s’agissait plus de soutenir une opération secrète de l’OTAN, mais de jouer un rôle central dans une guerre classique de très grande ampleur.

 

Le 16 avril 2014, la presse turque publiait une photographie d’Abu Muhammad, un des officiers supérieurs de Daesh qui avait été blessé par l’Armée arabe syrienne à Idleb, puis transféré par le MIT en Turquie et soigné aux frais du contribuable turc dans un hôpital public d’Hatay.

 

 

Recep Tayyip Erdoğan, coordinateur

du terrorisme international

 

Lorsque, en juillet 2012, l’Axe de la Résistance réagissait à l’assassinat des membres du Conseil de sécurité national syrien en tentant d’assassiner le prince saoudien Bandar ben Sultan, Recep Tayyip Erdoğan saisit sa chance. Il substitua la Turquie à l’Arabie saoudite dans la manipulation du terrorisme international.

 

En deux ans, plus de 200 000 mercenaires, venus des quatre coins du monde, transitèrent par la Turquie pour faire le jihad en Syrie. Le MIT — les services secrets turcs — mit en place un vaste système de circulation d’armes et d’argent pour alimenter la guerre, principalement payée par le Qatar et supervisée par la CIA.

 

M. Erdoğan installait trois camps d’entrainement d’al-Qaïda sur son sol à Şanlıurfa (frontière syrienne), à Osmaniye (à côté de la base de l’OTAN d’Incirlik), et à Karaman (près d’Istanbul) où il organisa une académie du terrorisme dans la tradition de l’École des Amériques [4] [5].

 

La police et la Justice turque ont montré que M. Erdogğan était — comme l’ancien vice-président états-unien Dick Cheney — un ami personnel de Yasin al-Qadi, le « banquier d’al-Qaïda ». C’est en tous cas ainsi que le FBI et les Nations unies l’avaient identifié jusqu’à ce qu’il soit retiré de la liste internationale des terroristes, en octobre 2012.

 

Durant la période où il était mondialement recherché, Yasin al-Qadi se rendait secrètement à Ankara, en avion privé. Les gardes du corps de M. Erdoğan venaient le chercher à l’aéroport, non sans avoir d’abord désactivé les caméras de surveillance [6].

 

Le 18 mars 2014, un enregistrement diffusé sur YouTube laissait entendre un directeur de Turkish Airlines, Mehmet Karataş, se plaindre auprès d’un conseiller de M. Erdoğan, Mustafa Varank, que sa compagnie ait été utilisée par le gouvernement pour transférer secrètement des armes à Boko Haram au Nigéria. Le haut fonctionnaire ne s’inquiétait pas d’avoir violé le droit international, mais déplorait que ces armes puissent servir à tuer non seulement des chrétiens, mais aussi des musulmans.

 

En mai 2014, le MIT transférait par train spécial à Daesh quantité d’armes lourdes et de pick-up Toyota neufs offerts par l’Arabie saoudite. L’Émirat islamique, qui n’était alors qu’un groupe de quelques centaines de combattants, se transformait en un mois en une armée de dizaines de milliers d’hommes et envahissait l’Irak.

 

Durant les quatre derniers mois de 2014, la Turquie empêcha les Kurdes du PKK de voler au secours des leurs à Kobané (Aïn al-Arab) lorsque la ville fut attaquée par Daesh. Au contraire, de nombreux journalistes ont attesté que les jihadistes pouvaient librement franchir la frontière [7].

 

Le 19 janvier 2015, la gendarmerie sur requête du parquet intercepta un convoi transportant des armes destinées à Daesh. Cependant, la perquisition fut interrompue lorsqu’on découvrit que le convoi était conduit par des agents du MIT. Par la suite, les procureurs et le colonel de gendarmerie furent arrêtés pour « trahison » (sic). Durant l’instruction de leur procès, un magistrat laissa fuiter que le MIT avait affrété au total 2 000 camions d’armes pour Daesh [8].

 

La colonne vertébrale du système terroriste turc est facilement identifiable : en 2007, l’Académie militaire de West Point a montré que les hommes de l’Émirat islamique en Irak provenaient d’al-Qaïda en Libye (GICL). Les mêmes mercenaires ont été utilisés pour renverser Mouamar el-Kadhafi en 2011 [9], puis pour former l’Armée syrienne libre (les « modérés ») [10]. Les membres syriens de l’Émirat islamique en Irak ont créé al-Qaïda en Syrie (Front al-Nosra). De nombreux combattants libyens et syriens sont revenus au sein de l’Émirat islamique en Irak lorsque celui-ci s’est renommé « Daesh » et a envoyé des cadres à Boko Haram (Nigéria).

 

Mehdi al-Harati est un double national libyen irlandais. En juin 2010, sa photo remerciant M. Erdoğan venu le visiter à l’hôpital après son arrestation par les Israéliens à bord de la Flottille de la Liberté, fit la une de la presse. Lors d’un cambriolage de sa maison en Irlande (juillet 2011), il s’avéra qu’il détenait une grosse somme d’argent en liquide que la CIA lui avait donnée pour aider au renversement du Guide libyen. Il dirigea la Brigade de Tripoli, une unité d’al-Qaïda encadrée par des officiers français, chargée par l’OTAN de prendre l’hôtel Rixos qui servait de cache aux Kadhafi et, au passage, d’assassiner Thierry Meyssan (août 2011).


Sous les ordres d’Abdelhakim Belhaj et avec plusieurs milliers de combattants libyens, il vint en novembre 2011 en Syrie organiser l’Armée syrienne libre, pour le compte de la France. Par la suite, il créa et commanda une autre armée privée, Liwa al-Umma, qui reprit le sigle de l’Armée syrienne libre à la fin 2012. De retour en Libye, il fut élu maire de Tripoli (août 2014) lorsque le pays se divisa entre deux gouvernements, l’un à Tripoli soutenu par la Turquie, l’autre à Tobrouk soutenu par l’Égypte et les Émirats.

 

 

Par Thierry Meyssan - RÉSEAU VOLTAIRE | DAMAS (SYRIE) | 15 JUIN 2015


Thierry Meyssan Consultant politique, président fondateur du Réseau Voltaire et de la conférence Axis for Peace. Dernier ouvrage en français : L’Effroyable imposture : Tome 2, Manipulations et désinformations (éd. JP Bertand, 2007). Compte Twitter officiel.

 

 

 

Notes :

[1] « 30 millions d’euros et la voix d’Erdogan », Réseau Voltaire, 25 février 2014.

[2] « Erdoğan attaque Gülen publiquement », Réseau Voltaire, 23 novembre 2013.

[3] « Le coup d’État judiciaire de l’AKP », par Thierry Meyssan, Al-Watan (Syrie), Réseau Voltaire, 19 août 2013.

[4] « Israeli general says al Qaeda’s Syria fighters set up in Turkey », par Dan Williams, Reuters, 29 janvier 2014.

[5] L’École des Amériques était une école de torture, créée par la CIA durant la Guerre froide, au Panama.

[6] « Erdoğan recevait secrètement le banquier d’Al-Qaida », Réseau Voltaire, 2 janvier 2014.

[7] « Kobané, objet de tous les mensonges », Réseau Voltaire, 1er novembre 2014.

[8] « La Turquie arrête les procureurs qui enquêtaient sur Émirat islamique », Réseau Voltaire, 8 mai 2015.

[9] « Ennemis de l’OTAN en Irak et en Afghanistan, alliés en Libye », par Webster G. Tarpley, Réseau Voltaire, 21 mai 2011.

[10] « L’Armée syrienne libre est commandée par le gouverneur militaire de Tripoli », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 18 décembre 2011 ; « Des islamistes Libyens en Syrie pour « aider » la révolution », par Daniel Iriarte, ABC (Espagne), Réseau Voltaire, 18 décembre 2011.


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>>> Voir la partie 2/2 ici


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L’État islamique commet un massacre dans la ville syrienne sacrée de Palmyre : récits de survivants

L’État islamique commet un massacre dans la ville syrienne sacrée de Palmyre : récits de survivants | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it


L’État islamique commet un massacre dans la ville syrienne sacrée de Palmyre : récits de survivants

 

Nous avons entendu parler des menaces sur les monuments, mais qu’en est-il de la tragédie qu’ont vécue les êtres humains ? Dans la ville voisine de Hayan, située sur les gisements de pétrole et de gaz du désert syrien, Robert Fisk a recueilli les témoignages des rares personnes qui ont réussi à échapper aux envahisseurs djihadistes d’Isis.

 

Lorsque les hommes armés cagoulés de noir de « l’État islamique » ont infiltré la banlieue de Palmyre, le 20 mai, la moitié des personnels de l’usine de traitement du pétrole et du gaz d’Assad Sulieman — 50 hommes en tout – effectuaient leurs 12 heures de travail sur le site pétrolier de Hayan à 40 km de là. Ils ont eu de la chance. Sur leurs 50 collègues hors service qui dormaient dans leurs maisons situées à côté de l’ancienne ville romaine, 25 devaient être bientôt assassinés, au milieu d’au moins 400 civils — y compris des femmes et des enfants – par la milice islamiste que chaque syrien appelle désormais par son acronyme « Daesh ».

 

L’ingénieur pétrolier « Ahmed » — il a choisi ce nom pour protéger sa famille à Palmyre – assistait, par bonheur, à un cours à l’Université de Damas, le jour funeste où Palmyre est tombée. « J’étais horrifié, » m’a-t-il confié. « J’ai essayé d’appeler ma famille. On pouvait encore téléphoner. Ils m’ont dit que « Daesh » (ou Isis) ne permettait à personne de sortir de chez lui. Mais plus tard, mon frère est sorti prendre des photos des corps. C’était tous des hommes. Ils avaient été décapités.

 

Il a réussi à m’envoyer les photos depuis [la ville contrôlée par Isis de] Raqqa par Internet, qui est le seul moyen de communication qui fonctionne encore là-bas. »

 

Certaines des photos sont trop horribles pour être publiées. On y voit des têtes séparées des torses, du sang qui coule en ruisseaux le long de la rue. Dans l’une d’elles, deux cyclistes contournent un corps gisant sur la chaussée. Ces hommes ont été abattus si peu de temps après la prise de Palmyre qu’on peut voir sur les photos les devantures des magasins encore peintes aux couleurs du drapeau rouge, blanc et noir du gouvernement syrien avec ses deux étoiles.

 

« Daesh a forcé les gens à laisser les corps dans les rues pendant trois jours », a poursuivi Ahmed. « Les habitants ont dû attendre leur permission pour ramasser les corps ou les enterrer. Il y avait des cadavres partout dans la ville. Ma famille m’a raconté que deux hommes de Daesh étaient venus chez nous, deux étrangers — un semblait être un Afghan, l’autre avait un lourd accent tunisien ou marocain — et puis ils sont repartis. Ils ont tué trois infirmières. Une a été tuée dans sa maison, une autre dans la maison de son oncle, une troisième dans la rue. Peut-être parce qu’elles avaient aidé l’armée [en tant qu’infirmières]. Le bruit a couru qu’elles avaient été décapitées, mais mon frère dit qu’elles ont été abattues d’une balle dans la tête ».

 

Des gens qui s’enfuyaient précipitamment de Palmyre ont péri lorsque leur voiture a roulé sur des explosifs que les islamistes avaient placés sur les routes. Un d’eux était un général syrien à la retraite de la famille al-Daas et sa femme, une pharmacienne de 40 ans, et son fils de 12 ans ont sauté avec lui. Selon des rapports ultérieurs, il y a eu aussi des exécutions dans l’ancien théâtre romain situé au cœur des vestiges de l’antique Palmyre.

 

Le directeur de l’usine de traitement de gaz et de pétrole de Hayan, Assad Sulieman, secouait la tête, incrédule, en racontant comment il avait appris l’exécution de son personnel au repos. Une partie d’entre eux, pensait-il, étaient gardés prisonniers dans les installations gazières dont « l’État islamique » avait pris le contrôle. D’autres ont été simplement emmenés et mis à mort parce qu’ils étaient des employés du gouvernement. Pendant des mois, avant la chute de Palmyre, il a reçu de terrifiants appels téléphoniques des islamistes, l’un d’eux lorsque des hommes armés assiégeaient une usine de gaz voisine.

 

Il a ajouté : « Ils ont appelé sur mon téléphone personnel, celui de mon bureau, et ils ont dit : » nous venons vous chercher ». Je leur ai dit : » je vous attends ». L’armée les a repoussés, mais mon personnel a aussi reçu ce genre d’appels téléphoniques et ils avaient très peur. L’armée est venue protéger trois de nos installations et les a chassés ». Après la chute de Palmyre, les appels téléphoniques menaçants ont continué, bien que « Daesh » ait coupé tous les téléphones mobiles et fixes dans la ville qu’ils venaient de prendre.

 

Un autre jeune ingénieur d’Hayan se trouvait à Palmyre lorsque « l’État islamique » est arrivé. Il avait tellement peur de témoigner qu’il a même refusé de se choisir un pseudonyme. « J’étais revenu à Palmyre deux jours plus tôt et tout semblait normal, » a-t-il dit. « Quand ma famille m’a dit qu’ils étaient arrivés, je suis resté à la maison comme ma mère, mon frère et mes sœurs et nous ne sommes plus sortis. Tout le monde savait que l’arrivée de ces hommes n’annonçait rien de bon. Il n’y a pas eu d’électricité pendant deux jours, puis les hommes armés l’ont remise en route. Nous avions des stocks de nourriture — nous sommes une famille aisée. Nous sommes restés enfermés toute une semaine, puis nous sommes sortis pour vaquer à nos affaires. Ils n’ont jamais fouillé notre maison ».

 

Le témoignage de cet homme montre la nature aléatoire de la loi d’Isis. Une semaine après l’invasion, la famille est sortie de la maison — les femmes portant le voile islamique intégral — et ils ont pris un bus pour la ville occupée de Raqqa et de là pour Damas. « Ils ont regardé ma carte d’identité, mais ne m’ont pas demandé quel était mon travail », a dit l’homme. « Le voyage en bus s’est passé normalement. Personne ne nous a empêchés de partir ». Comme Ahmed, ce jeune ingénieur pétrolier, était un musulman sunnite — la même religion que les militants de « Daesh » —, mais il n’avait aucun doute sur la nature des occupants de Palmyre. « Quand ils arrivent quelque part », a-t-il dit, « la vie s’arrête ».

 

Les oléoducs et gazoducs syriens courent actuellement sur 160 km de désert, de Homs, au centre de la Syrie, jusqu’aux installations pétrolifères stratégiques du brûlant désert de Palmyre. Il nous a fallu deux heures pour atteindre un endroit situé à 45 km de Palmyre ; les dernières troupes syriennes sont stationnées, plus près, à 12 km de la ville.

 

À l’ouest se trouve la grande base aérienne syrienne de Tiyas – son nom de code « T-4 » vient de la vieille quatrième station de pompage du pipeline Irak-Palestine — où j’ai vu des bombardiers Mig peints en gris décoller dans le crépuscule et revenir atterrir sur les pistes. Une voute de radars plats et des bunkers en béton protègent la base, et il y a des troupes syriennes dans toute une série de fortifications de terre situées de part et d’autre de la route principale qui mène à Palmyre, qui défendent leurs positions avec des mitrailleuses lourdes, de l’artillerie de longue portée et des missiles.

 

Les soldats syriens patrouillent sur la route toutes les quelques minutes sur des pick-up — et ils nous ont parlé de leur dangereuse mission. Ils nous ont dit qu’ils avaient trouvé un engin explosif improvisé quelques heures plus tôt à plus de 45 km à l’ouest de Palmyre. Plus loin sur la route, nous sommes tombés sur l’épave d’un camion plein de bombes que les tirs de roquettes de l’armée syrienne avaient fait exploser. Assad Sulieman, le directeur de l’usine gazière, dit que son père lui a donné comme nom, Hafez, le nom du père du président Bachar al-Assad. Il a expliqué que les rebelles islamistes avaient totalement détruit une usine gazière près de Hayan, l’année dernière, et que ses équipes l’avaient entièrement restaurée et remise en marche en quelques mois en se servant du matériel récupéré sur d’autres installations. La capacité de production de son usine a atteint trois millions de mètres cubes de gaz par jour qui alimentent les centrales électriques du pays et six mille barils de pétrole qui vont à la raffinerie de Homs.

 

Mais l’homme qui connait le mieux les dangers de cette guerre, est le général Fouad — comme tout le monde, dans la région de Palmyre, il préfère utiliser uniquement son prénom — un officier de carrière qui a enregistré sa plus grande victoire sur les rebelles dans une chaîne de montagnes voisine, au moment où son fils a été tué en combattant à Homs. Il nous confie qu’il a ressenti un « grand choc » lorsque Palmyre est tombée. Il pense que les soldats qui se battaient depuis longtemps pour défendre la ville ne s’attendaient pas à une attaque d’une telle force. Selon d’autres militaires — pas le général — « l’État islamique » avançait à ce moment-là sur un front large de 75 km, ce qui a submergé l’armée.

 

« Ils n’iront pas plus loin », a affirmé le général Fouad. « Nous les avons repoussés quand ils ont attaqué trois sites d’exploitation l’an dernier. Nos soldats ont pris et fouillé quelques-uns de leurs quartiers généraux locaux dans la montagne Shaer. Nous avons trouvé des documents sur nos installations de production, nous avons trouvé des livres religieux takfiris. Et nous avons trouvé de la lingerie. »

 

Qu’est-ce que l’État islamique pouvait bien faire de cette lingerie, ai-je demandé ? Le général n’a pas souri. « Nous pensons qu’ils avaient des femmes Yazidi avec eux, celles qu’ils avaient enlevées en Irak. Lorsque nos soldats ont pris leur QG, nous avons vu des hommes plus âgés s’enfuir avec des femmes ».

 

Mais il y a une question qui taraude ce général, comme presque tous les officiers syriens que j’ai rencontrés dans le désert — et tous les civils : Les Américains, qui disent vouloir détruire Isis, savaient bien, grâce à leurs satellites, que des milliers d’hommes armés se massaient pour attaquer Palmyre. Pourquoi n’ont-ils pas prévenu les Syriens ? Et, même si Washington n’aime pas le régime d’Assad, pourquoi ne les ont-ils pas bombardés ? Ils étaient pourtant une cible facile pour l’armée de l’air des États-Unis pendant les jours qui ont précédé l’attaque sur Palmyre. C’est une question à laquelle il faudra un jour donner une réponse.

 

 

 

Par Robert Fisk (*) (independent.co.uk) - traduction : Info-Palestine.eu - Dominique Muselet - legrandsoir.info - le 10 juin 2015

 

 

(*) Robert Fisk est le correspondant du journal The Independent pour le Moyen-Orient. Il a écrit de nombreux livres sur cette région dont : La Grande Guerre pour la civilisation : L’Occident à la conquête du Moyen-Orient.

 

 

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La chute de Palmyre renverse l’équilibre géopolitique au Levant

La chute de Palmyre renverse l’équilibre géopolitique au Levant | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it


La chute de Palmyre renverse l’équilibre

géopolitique au Levant

Par Thierry Meyssan (*)

 

 

La situation s’est considérablement aggravée au Levant avec la coupure par l’Émirat islamique de l’antique « route de la soie », c’est-à-dire du passage de l’Iran à la Méditerranée. Il n’existe que deux options possibles : soit par Deir ez-Zor et Alep, soit par Palmyre et Damas. Le premier chemin est coupé depuis début 2013, le second vient de l’être. La chute de Palmyre aura donc des conséquences considérables sur l’ensemble de l’équilibre régional.

 

La presse occidentale consacre ces jours-ci ses « une » à la Syrie ; une situation que l’on n’a pas connue depuis deux ans, lors de l’affaire des bombardements chimiques de la ghouta et du projet d’intervention de l’OTAN. Les journalistes s’inquiètent de la progression de l’Émirat islamique et de la possible destruction de la ville antique de Palmyre.

 

Pourtant, rares sont ceux qui connaissent l’histoire de la reine Zénobie qui, profitant au IIIe siècle de la faiblesse de Rome, dont les Gaules s’étaient déjà affranchies, proclama son propre fils empereur et elle-même régente. Elle libéra non seulement la Syrie, mais aussi les peuples d’Égypte, de Palestine, de Jordanie, du Liban, d’Irak, d’une partie de la Turquie et même de l’Iran actuels. Sa capitale, Palmyre, fut une cité d’un grand raffinement, ouverte à toutes les religions, étape brillante de la route de la soie reliant la Méditerranée à la Chine. Cependant, le général Aurélien ayant réalisé un coup d’État à Rome parvint à rétablir l’unité de l’empire, écrasant d’abord l’impératrice Zénobie, puis l’empire des Gaules, avant de mettre un terme à la liberté religieuse, d’imposer le culte du Soleil invaincu et de se proclamer Dieu. Cette histoire prestigieuse fait de Palmyre le symbole de la Résistance du Levant à l’impérialisme occidental de son époque.

 

On peut s’étonner de l’importance donnée à la chute de Palmyre par la presse occidentale. D’autant que la plus importante progression de Daesh cette semaine n’était pas en Syrie, ni en Irak, mais en Libye avec la chute de Syrte, une ville cinq ou six fois plus peuplée que la syrienne Palmyre. Pourtant, les mêmes journalistes qui s’étalaient longuement durant les deux derniers mois sur la situation chaotique libyenne et appelaient à une intervention militaire européenne pour mettre fin au transit de migrants ne l’ont pas mentionnée. Il est vrai qu’en Libye, Daesh est commandée par Abdelhakim Belhaj, nommé gouverneur militaire de Tripoli sous les auspices de l’OTAN [1] et reçu officiellement, le 2 mai 2014 à Paris, par le Quai d’Orsay.

 

Pour dramatiser un peu plus, les journalistes occidentaux affirment à l’unisson que désormais « Daesh contrôle la moitié du territoire syrien » (sic). Toutefois, leurs propres cartes les contredisent puisqu’ils n’y montrent qu’un contrôle sur quelques villes et sur des routes, et non pas sur des régions.

 

À l’évidence, le traitement médiatique de la situation au « Moyen-Orient élargi » ne vise pas à rendre compte de la réalité, mais instrumente certains éléments judicieusement sélectionnés pour justifier des politiques.

 

 

Daesh et l’enjeu de Palmyre

 

Nous souhaiterions que l’émotion soulevée par la chute de Palmyre soit sincère et que les Occidentaux, après avoir massacré en une décennie plusieurs millions de personnes dans cette région aient décidé d’en finir avec ces crimes. Mais nous ne sommes pas dupes. Cette émotion sur commande vise à justifier d’une réaction militaire contre ou à propos de Daesh.

 

Celle-ci est indispensable si Washington souhaite toujours signer l’accord qu’il a négocié, deux ans durant, avec Téhéran.

 

En effet, Daesh a été créé par les États-Unis avec le soutien de la Turquie, des monarchies du Golfe et d’Israël, comme nous l’avons toujours dit et ainsi qu’en témoigne un document partiellement déclassifié cette semaine de la Defense Intelligence Agency (DIA) que le lecteur pourra télécharger au bas de cette page.

 

Contrairement aux inepties de certains journalistes qui accusent le « régime de Bachar » (sic) d’avoir fabriqué cette organisation pour diviser son opposition et la faire glisser dans le radicalisme, la DIA atteste que l’Émirat islamique est fonctionnel à la stratégie états-unienne. Ce rapport, daté du 12 août 2012 et qui a largement circulé dans l’ensemble de l’administration Obama, annonçait clairement les plans de Washington :

 

« Si la situation se dénoue, il y aura la possibilité d’établir une principauté de salafistes, reconnue ou non, à l’Est de la Syrie (Hassaké et Deir ez-Zor), ce qui est exactement l’objectif des soutiens de l’opposition [les États occidentaux, les États du Golfe et la Turquie], afin d’isoler le régime syrien, qui est considéré comme la profondeur stratégique de l’expansion chiite (Irak et Iran) ».

 

Ainsi que nous l’avons toujours dit, l’Émirat islamique a été développé par une décision du Congrès des États-Unis, réuni en séance secrète en janvier 2014, afin de réaliser le plan Wright. Il s’agissait de créer un « Kurdistan » et un « Sunnistan » à cheval sur la Syrie et l’Irak ayant pour finalité de couper la « route de la soie » après l’achat de Deir ez-Zor (la ville a été achetée à des fonctionnaires corrompus, sans combat).

 

Depuis la plus haute antiquité, un faisceau de voies de communication relie Xi’an (l’ancienne capitale chinoise) à la Méditerranée. Cette route relie l’Iran à la mer à travers le désert, soit par Deir ez-Zor et Alep, soit par Palmyre et Damas. Elle est aujourd’hui utilisée pour transiter des armes vers la Syrie et le Hezbollah libanais et devrait être utilisée pour transporter le gaz du champ de Fars (Iran), vers le port de Lattaquié (Syrie).

 

Palmyre, la « cité du désert », n’est donc pas simplement un vestige d’un passé merveilleux, c’est une pièce stratégique dans l’équilibre régional. C’est pourquoi il est grotesque de prétendre que l’Armée arabe syrienne n’a pas cherché à la défendre. En réalité, cette armée a agi comme elle le fait toujours depuis l’arrivée des mercenaires dans le pays : de manière à minimiser les pertes civiles, elle se retire lorsqu’ils avancent en petits groupes coordonnés (grâce aux moyens de communication que leur fournit l’Occident) et les frappe lorsqu’ils se regroupent.

 

La Coalition internationale anti-Daesh, créée par les États-Unis en août 2014, n’a jamais combattu les jihadistes. Il est au contraire attesté — non pas une seule « par erreur », mais une quarantaine de fois — que les avions occidentaux ont largué des armes et des munitions à l’Émirat islamique.

 

Au demeurant, ladite Coalition de 22 États prétend disposer d’un nombre supérieur d’hommes, qui sont mieux formés et disposent de meilleurs matériels que Daesh. Pourtant, elle n’a pas fait reculer l’Émirat islamique, mais celui-ci ne cesse de conquérir de nouvelles routes.

 

 

L’évolution des intérêts états-uniens

 

Quoi qu’il en soit, Washington a changé de stratégie. Ainsi que l’atteste la nomination du colonel James H. Baker comme nouveau stratège du Pentagone [2], la page de la stratégie du chaos est tournée. Les États-Unis reviennent à une conception impériale classique, fondée sur des États stables. Et pour signer leur accord avec l’Iran, ils doivent maintenant évacuer l’Émirat islamique du Levant avant le 30 juin.

 

La campagne de presse démesurée sur la chute de Palmyre pourrait n’être qu’une préparation de l’opinion publique à un véritable engagement militaire contre Daesh. Ce sera le sens de la réunion des 22 membres de la Coalition (et de 2 organisations internationales) à Paris, le 2 juin. D’ici là, le Pentagone devra décider s’il détruit l’Émirat islamique ou s’il le déplace et l’utilise ailleurs à d’autres tâches. Trois destinations sont envisageables : déplacer les jihadistes en Libye ; en Afrique noire ; ou dans le Caucase.

 

Dans le cas contraire, l’Iran ne signera pas et la guerre continuera à son paroxysme, car la chute de Palmyre sous les coups de jihadistes fabriqués par l’Occident aura les mêmes conséquences que sa prise par les légions d’Aurélien. D’ores et déjà, elle menace la survie de l’« Axe de la Résistance », c’est-à-dire de la coalition Iran-Irak-Syrie-Liban-Palestine. Le Hezbollah envisage de décréter la mobilisation générale.

 

 

 

Par Thierry Meyssan (*) - RÉSEAU VOLTAIRE | DAMAS (SYRIE) - LE 25 MAI 2015

 

 

Document joint :

Rapport de la DIA sur les jihadistes au Levant, 12 août 2012.

(PDF - 582.2 ko)

 

Notes :

[1] « Comment les hommes d’Al-Qaida sont arrivés au pouvoir en Libye », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 6 septembre 2011 ; « L’Armée syrienne libre est commandée par le gouverneur militaire de Tripoli », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 18 décembre 2011 ; « Selon Interpol, Abdelhakim Belhaj est le chef de Daesh au Maghreb », Réseau Voltaire, 25 février 2015.

[2] « Ashton Carter nomme le nouveau stratège du Pentagone », Réseau Voltaire, 17 mai 2015.

 

 

(*) Thierry Meyssan : consultant politique, président-fondateur du Réseau Voltaire et de la conférence Axis for Peace. Dernier ouvrage en français : L’Effroyable imposture : Tome 2, Manipulations et désinformations (éd. JP Bertand, 2007). Compte Twitter officiel.

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La nouvelle guerre de 1 000 ans !

La nouvelle guerre de 1 000 ans ! | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it



La nouvelle guerre de 1 000 ans !

 

Depuis mars 2003 et l’invasion de l’Irak par l’armada américaine, la région du Moyen-Orient vit sous l’emprise de la guerre et de la violence. Douze ans après cette agression, l’ancienne Mésopotamie est aujourd’hui ruinée et dépecée alors que les guerres ethniques et confessionnelles font rage. Pas loin, un nouveau front a été ouvert en Syrie, qui dure depuis maintenant quatre ans. Une Syrie dévastée qui connaît le sort de son voisin irakien. Ce sont deux berceaux de la civilisation humaine qui sont ainsi mis à mal.

 

Et il y a le Yémen qui, en conflit latent depuis 2011, est désormais à son tour engagé dans une guerre sanglante, dont personne ne peut en prévoir l’issue. À l’ouest de la région arabe, au Maghreb, la situation n’est guère meilleure dont la Libye, qui entre dans la quatrième année d’une guerre fratricide, illustre parfaitement la donne. En Égypte, le nouveau pouvoir militaire — qui organise une meurtrière traque aux opposants — initie des procès de masse inédits dans le monde, créant un effrayant remake de la chasse aux sorcières des âges sauvages.


Le Liban, sans président ni Parlement, depuis le 25 mai 2014, est retombé dans ses travers et un rien pourrait rallumer la flamme de la discorde. Reste la Palestine, avec des guerres qui durent depuis 68 ans, traversant des phases chaudes et froides. Un cas que l’on a rendu et que l’on a voulu insoluble avec, quelque part, une responsabilité patente de dirigeants arabes incapables d’élever le ton et d’aider concrètement les Palestiniens.


Mais, ceux qui bloquent de tous les freins l’émergence d’un État en Palestine sont ceux-là qui jouent les sous-traitants des impérialismes américain et occidental. Or, un point commun lie ces différents évènements du Machrek et du Maghreb : l’interventionnisme tous azimuts des Al Saoud. En fait, les Saoudiens, dont le trône ne tient qu’à la protection des États-Unis, ne sont pas pour peu dans la dégradation des situations en Irak, en Syrie et au Yémen, notamment, où Riyad mène, dans ce dernier pays depuis le 25 mars, une guerre de destruction.


Les Saoudiens ont été à bonne école, avec leur opération « Tempête décisive » au Yémen à l’imitation des « tempêtes » désastreuses US contre l’Irak, dans les guerres du Golfe, ou d’Israël contre les Palestiniens. On ne peut comprendre les évènements qui marquent ces pays arabes — en particulier depuis l’avènement dudit « Printemps arabe » — si l’on ne remet pas les faits dans leur contexte géostratégique, et si l’on ne revient pas sur les carences des dirigeants arabes — plus préoccupés à faire pérenniser leur pouvoir que construire des États forts, appuyés sur l’État de droit, la démocratie et les libertés — qui ont de la sorte facilité les ingérences étrangères. Les États-Unis et Israël, notamment, n’ont eu qu’à mettre à profit cette situation pour aggraver, si cela se pouvait, les clivages entre les Arabes. Pendant que ceux-ci s’entre-tuent dans de nouvelles guerres de religion et/ou de leadership, leur monde recule sur tous les plans. Cette région qui avait le potentiel — grâce à son homogénéité historique et linguistique et forte de ses près de 400 millions d’habitants — de devenir une grande puissance, a à contrario gravement régressé et s’est enlisée, sous l’impulsion d’un wahhabisme rampant, dans les guerres tribales et claniques.

 

Alors que le Monde dit « arabe » se vide de son intelligentsia au profit de pays — à leur tête les États-Unis — qui font tout pour le maintenir dans l’obscurantisme et le despotisme, certains régimes arabes, particulièrement l’Arabie saoudite, donnent des coups de pouce décisifs à cette rétrogradation arabe. En fait, Riyad assume l’entière responsabilité de l’avènement de l’islam radical en ayant été à l’origine de la fondation — dans les années 1980 — de la nébuleuse Al Qaïda, conjointement avec les États-Unis. C’est encore l’Arabie saoudite qui finance le terrorisme transfrontalier, singulièrement, en Syrie — où opère l’un de ses bras armés le groupe jihadiste Al Nosra — et dont l’action armée au Yémen tend à détruire le plus pauvre des pays arabes.

 

De fait, tous les ingrédients se trouvent aujourd’hui réunis pour plonger le Monde dit « arabe » dans une guerre de 1 000 ans. Les Al Qaïda et l’autoproclamé « État islamique » (EI/Daesh) — faut-il s’étonner que Daesh qui a détruit en Irak et en Syrie les assises des civilisations anciennes, ne s’en prend ni à Israël, ni aux États-Unis ? — semblent avoir eu pour mission de renvoyer les Arabes à la période de la Jahiliya. Comment peut-il en être autrement quand ces groupes terroristes s’attaquent aux seuls pays arabes ayant fait de la modernité leur credo ? L’histoire ne manquera pas de le relever et de noter le rôle joué par Riyad dans la déroute dudit « Monde arabe ».

 

 

Par Karim MOHSEN (lexpressiondz.com, journal algérien) - Pierre Royant (reseauinternational.net) - le 23 mai 2015.

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La CIA dépassée par le soutien de civils à Daesh

La CIA dépassée par le soutien de civils à Daesh | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Photo : John Brennan, directeur de la CIA, ne comprend pas pourquoi des civils soutiennent ses mercenaires de l’État islamique, malgré leurs crimes.

 


La CIA dépassée par le soutien de civils à Daesh

Par Thierry Meyssan (*)

 

Dépassée par le développement foudroyant de l’Émirat islamique qu’elle a elle-même créée, l’Agence centrale de Renseignement (CIA) sera profondément réorganisée. Mais le problème qu’elle rencontre est sans précédent : une rhétorique qu’elle avait imaginée pour signer des communiqués de revendication d’actes terroristes sous faux drapeaux s’est transformée en une puissante idéologie au contact d’une population dont elle ignorait jusqu’à l’existence. Pour Thierry Meyssan, la réforme de la CIA sera inefficace : elle ne lui permettra pas de gérer le cataclysme qu’elle a provoqué au Levant.

 

 

La CIA est apparue, en novembre dernier, dans l’incapacité d’évaluer la situation en Syrie. Perdue dans ses mensonges, l’Agence ne parvenait plus à identifier les motivations de ses « révolutionnaires ». Pire, elle était incapable de dénombrer les soutiens à la « rébellion » et ceux à la République. Cet échec n’a fait qu’empirer comme l’a montré, fin février 2015, l’effondrement du Mouvement de la Fermeté (Harakat Hazm), l’armée officielle de l’Agence en Syrie [1]. Bien sûr, la vie continue et la CIA a déjà regroupé ses forces au sein d’une nouvelle formation, le Front du Levant (Shamiyat Front).

 

En créant al-Qaïda, puis Daesh, la CIA pensait engager des mercenaires pour réaliser des missions ponctuelles qu’elle ne pouvait pas revendiquer. Elle n’avait jamais envisagé que des civils puissent prendre au sérieux la phraséologie à quatre sous qu’elle avait imaginée pour rédiger des communiqués de revendication. De fait, personne n’a accordé d’importance au charabia d’Oussama Ben Laden selon qui la présence de militaires non-musulmans de l’OTAN, lors de « Tempête du désert », sur le territoire saoudien était un sacrilège qui exigeait réparation. Nulle part on ne trouvera dans le Coran de justification de cette malédiction. Les mercenaires d’al-Qaïda n’ont donc eu aucune difficulté à se battre aux côtés de l’OTAN en Bosnie-Herzégovine et au Kosovo. Il ne semblait pas y avoir de raison de croire qu’il en serait autrement aujourd’hui.

 

Pourtant, lors de la guerre contre la Jamahiriya arabe libyenne, j’avais observé que certains mercenaires d’al-Qaïda semblaient vouloir réellement revenir au mode de vie du VIIe siècle, le « temps du Prophète ». C’était au moins vrai dans l’obscur Émirat islamique gouverné par Abdelkarim Al-Hasadi à Dernaa. Or, il ne s’agissait pas pour eux du VIIe siècle levantin, alors chrétien et ne parlant pas l’arabe, ou même du VIIe siècle français du bon roi Dagobert, mais du VIIe siècle de la péninsule arabique, une société hors du temps, composée selon le Coran de bédouins fourbes et cruels que le Prophète tenta de convertir et d’apaiser.

 

Par la suite, durant la guerre contre la République arabe syrienne, j’observais que les Syriens qui soutenaient al-Qaïda (et aujourd’hui Daesh), sans mobiles financiers, étaient tous membres de familles très nombreuses dont les femmes n’étaient pas autorisées à contrôler leur fécondité. Le clivage qui s’opérait dans le pays n’avait rien de politique au sens moderne du terme. Désormais, l’idéologie des civils qui soutiennent les jihadistes se résume à ce retour à des origines mythiques, celle des gardiens de chameaux d’Arabie du Moyen-âge. Et la CIA qui l’a provoquée, n’en a pas compris la force et n’en a pas suivi l’expansion.

 

Il ne s’agit pas ici de « retour de bâton » — Daesh ne s’est pas retourné contre la CIA. Mais de la transformation d’un groupuscule terroriste en un État et du triomphe d’une rhétorique ridicule parmi certaines populations.

 

La CIA se trouve face au problème de toutes les administrations. Son mode d’organisation, qui lui permit de nombreuses victoires par le passé dans diverses régions du monde, ne fonctionne plus parce qu’elle n’a pas su s’adapter. Organiser un coup d’État et manipuler des masses pour qu’elles soutiennent une organisation terroriste sont deux choses bien différentes.

 

C’est pourquoi le directeur John Brennan a annoncé une refonte complète de la structure de l’Agence, à l’issue de 4 mois de consultations internes.

 

Jusqu’ici, il y avait :

 

• La Direction du Renseignement, chargée d’analyser les données recueillies ;

• La Direction des Opérations, renommée Service clandestin, chargée de l’espionnage humain ;

• La Direction des Sciences et de la technologie, spécialisée dans le traitement des informations scientifiques et techniques

• La Direction du Soutien, chargée de la gestion du personnel, de la fourniture des matériels et du financement.

 

Le personnel était réparti selon ses compétences : les intellectuels au Renseignement, les baroudeurs aux Opérations, les matheux aux Sciences et les organisateurs au Soutien. Bien sûr, chaque direction s’était aussi adjointe des collaborateurs avec d’autres profils pour pouvoir faire son travail, mais schématiquement chaque direction correspondait à un profil humain particulier.

 

Les documents révélés par Edward Snowden nous ont appris que la CIA est la plus importante agence de Renseignement au monde avec un budget de 14,7 milliards de dollars en 2013 (soit le double du budget total de la République arabe syrienne). Mais elle n’est pourtant qu’une agence de renseignement parmi les 16 que comptent les États-Unis.

 

Bref, avec tout cet argent et ces compétences, la CIA était prête à vaincre l’URSS qui s’est effondrée sur elle-même sans son aide il y a plus de 25 ans.

 

Pour faire progresser l’Agence, John O. Brennan a décidé de généraliser le modèle du Centre contre-terroriste, créé en 1986 au sein de la Direction des Opérations ; un modèle ultra-sophistiqué mis en scène dans la série télévisée 24 heures. Cette unité pluridisciplinaire a fait merveille pour répondre presque instantanément aux questions qu’on lui posait. Elle est capable d’identifier un individu, de le localiser et de l’éliminer en un rien de temps pour la plus grande joie de la Maison-Blanche. Et l’on sait que le président Obama se rend chaque jour dans son bunker sous-terrain pour déterminer les cibles de ses drones et faire assassiner qui il veut, quand il veut et où il veut.

 

Selon M. Brennan, il s’agit ni plus ni moins que de faire entrer le Renseignement dans l’ère des nouvelles technologies, des ordinateurs et des satellites. L’Agence devrait donc être rapidement restructurée autour de 16 Centres chargés de chaque région du monde et de divers objectifs généraux.

 

Mais en quoi le modèle du Centre contre-terroriste aurait-il pu comprendre la transformation d’une phraséologie enfantine en une puissante idéologie ?

 

Le succès de l’Émirat islamique provient d’abord de ses soutiens étatiques, de son armement et de son argent. Mais le soutien dont il bénéficie chez quelques Syriens et certains Irakiens n’a rien à voir ni avec le Coran ni avec la lutte des classes. C’est la révolte d’un mode de vie en train de disparaître, d’une société violente dominée par les hommes, contre un mode de vie respectueux des femmes et contrôlant les naissances. Cette transformation s’est faite en Europe avec l’exode rural et les deux Guerres mondiales, sans provoquer de guerres supplémentaires. Elle a été accomplie au début des années 80 par l’Iran de l’imam Khomeiny avec un succès éclatant et s’est progressivement étendue au monde arabe jusqu’à se fracasser sur Daesh ; un conflit qui n’a rien à voir avec la distinction théologique entre chiites et sunnites.

 

La suite des événements est, elle, prévisible. Comme toujours, les États-Uniens pensent que leur problème sera résolu grâce au progrès technique. C’est avec une débauche d’informatique qu’ils vont tenter de comprendre la situation au « Proche-Orient ».

 

Mais comment les États-Unis, fondés il y a deux siècles, pourraient-ils comprendre le cataclysme qu’ils ont provoqué dans la plus ancienne civilisation du monde ? Comment les États-Uniens — des Barbares friqués — et des Bédouins du Golfe pourraient-ils organiser des peuples civilisés depuis six millénaires ?

 

Car c’est le secret du Levant : quantité de peuples différents, ayant leur propre histoire, leur propre langue et leur propre religion, y parlent une même langue vernaculaire et y collaborent ensemble [2]. Les nassériens et les baasistes ont tenté de transformer cette mosaïque en une unique force politique. Ils ont cherché à composer une « Nation arabe » avec des peuples majoritairement non arabes. Un rêve dont il ne reste aujourd’hui que la « République arabe syrienne ». C’est ce projet politique qui était attaqué par Daesh et cette civilisation qui est aujourd’hui menacée par les civils qui le soutiennent.

 

Tandis que les États mono-ethniques sont faciles à conquérir, ils ont appris avec le temps que leur diversité et leur entremêlement les rendent invincibles. C’est d’ailleurs pour cela qu’ils ont protégé les survivants d’un Ancien Monde ; des survivants qui aujourd’hui se révoltent contre eux et les rongent de l’intérieur.

 

Comment la CIA pouvait-elle anticiper que de jeunes Européens, eux aussi nostalgiques de ces temps anciens, se joindraient par dizaines de milliers à Daesh pour s’opposer à la marche du temps et détruire des œuvres d’art millénaires ?

 

La défaite israélienne au Liban, en 2006, a montré que quelques citoyens déterminés étaient capables de faire échouer l’armée la plus sophistiquée au monde. L’homme a déjà triomphé des machines. C’est une erreur de croire que le progrès technique est un critère de civilisation, que des ordinateurs permettront de comprendre qui que ce soit, ni même de le dominer. Tout au plus peuvent-ils collecter de grandes quantités d’information, les trier et les synthétiser. La réorganisation de l’Agence va lui permettre de répondre à toutes les questions du jour, mais à aucune sur ce qui se passera demain.

 

Les États-Uniens et les Européens sont incapables d’admettre que des peuples qu’ils ont colonisés ont rattrapé leur retard technique alors qu’eux-mêmes n’ont pas rattrapé leur retard en civilisation. Ils se trouvent confrontés à leurs limites et ne peuvent plus influer sur le cataclysme qu’ils ont involontairement suscité.

 

 

Par Thierry Meyssan (*) - RÉSEAU VOLTAIRE INTERNATIONAL | DAMAS (SYRIE) – LE 16 MARS 2015

 

Notes :

[1] « Dissolution de l’armée de la CIA en Syrie », Réseau Voltaire International, 3 mars 2015

[2] L’arabe est la langue commune au Levant, mais on y parle aussi les différentes langues kurdes, l’arménien, le turc, l’araméen, le syriaque, l’hébreu, etc. Presque aucun de ses habitants n’est ethniquement arabe.


(*) Thierry Meyssan : consultant politique, président-fondateur du Réseau Voltaire et de la conférence Axis for Peace. Dernier ouvrage en français : L’Effroyable imposture : Tome 2, Manipulations et désinformations (éd. JP Bertand, 2007). Compte Twitter officiel.



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2003 : Bush détruit l’Irak - 2015 : l’Iran s’en empare

2003 : Bush détruit l’Irak - 2015 : l’Iran s’en empare | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it



2003 : Bush détruit l’Irak — 2015 : l’Iran s’en empare

 Par Patrice de Plunkett (*)

 

 

La géopolitique américaine serait-elle mal-voyante ?

 

Nous parlions hier de la pression de Washington contre Moscou depuis 1991. Aujourd’hui, tous nos médias parlent du siège de Tikrit et de la mainmise de Téhéran sur l’Irak. Ils constatent que l’attaque irakienne contre Daesh est encadrée (et menée en grande partie) par les forces iraniennes du « redoutable  Kacem Soleimani », le « général de l’ombre ». Chef de la force al-Qods chargée des opérations internationales des pasdaran, Soleimani s’occupe aussi de la Syrie, du Liban et du Yémen ! Du coup, constatent également nos médias, « Washington s’inquiète de l’emprise de Téhéran »...

 

Avant-hier, le général Dempsey (qui aimerait mieux ne parler que de la Russie) constatait avec irritation que l’Iran déploie dans la bataille de Tikrit « son implication la plus manifeste en Irak depuis 2004, avec de l’artillerie et d’autres moyens ». Les forces de Soleimani progressent sans appui aérien et n’en sollicitent pas, leur objectif étant visiblement de prouver que des musulmans – chiites – peuvent « libérer l’Irak de Daesh sans les Américains ». Les pasdaran iraniens étant catalogués terroristes par le Département d’État, on voit quelle gifle leur victoire sur Daesh représenterait pour Washington.

 

Aucun de nos médias n’a l’air de situer cette évolution dans le contexte des événements depuis 2003. C’est pourtant la clé de compréhension !


En 2003, Washington détruit Saddam Hussein pour diverses raisons, dont les intérêts pétroliers et l’appui inconditionnel à Ariel Sharon. Que l’Irak de Saddam soit géopolitiquement un problème pour Israël était une idée absurde, mais c’était l’idée de Sharon. Résultat en 2015 : l’Irak est sous l’emprise de l’Iran, pays dont Netanyahu proclame qu’il est le vrai grand problème géopolitique pour Israël. Cherchez l’erreur.

 

Syrie, région d’Alep – Le « groupe armé modéré » Harakat Hazm vient de capituler devant les djihadistes du Front al-Nosra, qui se sont emparés des deux cents missiles antichars TOW livrés à ce groupe par la CIA en octobre 2014* : prise dont les djihadistes se félicitent ostensiblement sur Twitter. Devant l’étendue du désastre, le reste de Harakat Hazm a décidé de se dissoudre « pour arrêter le bain de sang ». (Comme dit Thomas Legrand, omnispécialiste à France Inter : « tout le monde sait qu’il faut armer les opposants modérés »). Les missiles US étant livrés avec des instructeurs, ces derniers sont-ils tombés aux mains d’al-Nosra ? va-t-il y avoir aux USA une campagne « bring back our boys » ? ou l’affaire est-elle classified ?

 

 

 

Par Patrice de Plunkett (*)  - plunkett.hautetfort.com – le 5 mars 2015

_________

* C’était la première livraison d’armes d’Obama à « l’opposition modérée », sous le mot d’ordre Help the good guys. Déjà les services américains avaient eu du mal à repérer un groupe qui corresponde au label good guys.

 

 

(*) Patrice de Plunkett est un journaliste et essayiste français, qui codirigea le Figaro Magazine.

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Israël contre les Juifs

Israël contre les Juifs | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Photo : Pierre Stambul — vitry94.pcf.fr


 

Israël contre les Juifs

Par Pierre Stambul

 

C’est un refrain bien établi. Vous critiquez Israël et le sionisme ? Vous êtes antisémite ! Un Juif français veut pouvoir « vivre son judaïsme » ? On l’invite à faire son « alyah » et à apporter sa pierre à la colonisation de la Palestine.

 

On essaie de nous marteler que l’histoire des Juifs s’est achevée et qu’Israël en est l’aboutissement. Israël fonctionne comme un effaceur de l’histoire, de la mémoire, des langues, des traditions et des identités juives. La politique israélienne n’est pas seulement criminelle contre le peuple palestinien. Elle se prétend l’héritière de l’histoire juive alors qu’elle la travestit et la trahit. Elle met sciemment en danger les Juifs, où qu’ils se trouvent. Et elle les transforme en robots sommés de justifier l’injustifiable.

 

 

Retour sur un passé récent

 

L’histoire des Juifs français n’a strictement rien à voir avec Israël. Régulièrement spoliés, massacrés ou expulsés par différents rois très chrétiens, les Juifs ont acquis la citoyenneté française avec l’Abbé Grégoire pendant la Révolution. Ces deux derniers siècles ont été marqués par une quête de la citoyenneté et de l’égalité des droits.


L’affaire Dreyfus a révélé que, si une partie de la société française était antisémite, une autre partie, finalement majoritaire, considérait que l’acquittement et la réhabilitation de Dreyfus étaient l’objectif de tous ceux qui étaient épris de liberté et refusaient le racisme.


L’histoire des Juifs français a été marquée par leur participation importante à la résistance contre le nazisme et le régime de Vichy, puis par l’engagement de nombre d’entre eux dans des luttes progressistes et/ou anticoloniales. Les intellectuels juifs de cette époque s’appelaient Raymond Aubrac, Marc Bloch, Laurent Schwartz, Pierre Vidal-Naquet, Stéphane Hessel. C’était une époque où beaucoup de Juifs pensaient que leur propre émancipation passait par celle de tou-te-s. C’était une époque où le racisme, le fascisme et la haine de l’autre étaient considérés comme des abjections à combattre. Les enfants juifs allaient à l’école publique, jamais il ne leur serait venu à l’idée de se séparer des autres dans des écoles confessionnelles.


On s’efforce aujourd’hui en Israël d’effacer l’histoire des Juifs dans les différents pays où ils ont vécu. Si les Juifs ont longtemps été considérés par les antisémites en Europe comme des parias inassimilables et s’ils ont été persécutés parce qu’ils constituaient un obstacle aux nationalismes fous qui rêvaient de sociétés ethniquement pures, ils n’ont jamais recherché la séparation, mais au contraire l’insertion à l’intérieur des sociétés dans lesquels ils vivaient.

 

 

Une assignation à la désertion

 

On fait un saut de quelques années. En tête d’une gigantesque manifestation parisienne censée dénoncer le terrorisme, on trouve trois criminels de guerre, Nétanyahou, Lieberman et Bennet qui viennent de s’illustrer dans le massacre de plus de 2 000 Palestinien-ne-s (essentiellement des civil-e-s) à Gaza pendant l’été 2014. Profitant de l’émotion causée par l’attentat antisémite de la Porte de Vincennes, Nétanyahou est autorisé (par le gouvernement français) à déclarer aux Juifs français qu’ils sont en insécurité en France et qu’ils doivent partir dans leur « vrai » pays, Israël.

 

En fait, le sionisme n’a jamais combattu l’antisémitisme. Il s’en est toujours nourri avec en permanence un seul et unique but : faire immigrer le maximum de Juifs en Israël. Du coup, Nétanyahou n’hésite pas à mettre en danger les Juifs français. Il en fait des étrangers dans leur propre pays, des « touristes » qui n’ont pas compris que leur « patrie » est là-bas. Les Juifs sont sommés d’être des « traîtres » (à la seule et unique cause, celle du Grand Israël de la mer au Jourdain) ou des complices. La France a toujours été un échec pour Israël : à peine 80 000 Juifs sont partis depuis 1948 et une moitié est revenue. Alors la propagande se fait assourdissante. Pourtant, s’il y a bien un pays où les Juifs sont en insécurité, c’est Israël et il sera ainsi tant que la destruction de la Palestine se poursuivra.

 

À « l’alyah » (la montée) des vivants vers Israël, s’ajoute à présent celle des morts. Les autorités israéliennes incitent vivement les Juifs français à faire enterrer leurs proches en Israël. Ainsi les victimes de la tuerie de la porte de Vincennes ont été inhumées au cimetière de Givat Shaul. Ce « quartier » de Jérusalem, c’est l’ancien Deir Yassine, le village martyr de la guerre de 1948 où les milices de l’Irgoun dirigées par Menachem Begin ont massacré toute la population avant que le village ne soit, comme tant d’autres, rayé de la carte. Quel symbole !

 

 

Israël à l’avant-garde de l’islamophobie

 

Les Juifs ont vécu pendant des centaines d’années dans le monde musulman. Ils ont même été accueillis par l’Empire ottoman après leur expulsion d’Espagne en 1492. Aujourd’hui, Israël participe à la diabolisation des Arabes et des musulmans en se comportant en élève modèle du « choc des civilisations ». Le racisme anti-arabe et l’islamophobie s’expriment ouvertement, des politiciens en ont fait leur fonds de commerce et les passages à l’acte sont fréquents. Les crimes de masse comme à Gaza ou la multiplication des propos racistes (pour le rabbin Rosen, les Palestiniens sont des Amalécites et la Torah autorise qu’on les tue ainsi que leurs femmes, leurs enfants, leurs troupeaux) laisseront des traces. Comment imaginer que ce qui est infligé aux Palestiniens sera sans conséquence ?

 

En Israël, des propagandistes rivalisent pour expliquer que les Juifs ont vécu l’enfer dans le monde musulman, masquant le fait que l’antisémitisme a été avant tout une invention européenne et chrétienne. Les Juifs orientaux subissent en Israël des discriminations sociales et un mépris raciste. Ils ont souvent été humiliés et discriminés à leur arrivée. Ils sont coupés de leurs racines et poussés à renier leur identité. L’expulsion des Palestiniens de 1948 est présentée comme un « échange de population » alors que le sionisme est le principal responsable, et de la Nakba, et du départ des Juifs orientaux de leurs pays.

 

 

Qu’y a-t-il de juif en Israël ?

 

Les sionistes ont théorisé l’idée que les Juifs et les non-juifs ne peuvent pas vivre ensemble. C’est totalement contraire à tout ce qui s’est passé pendant des centaines d’années. Cela va à l’encontre de l’aspiration des Juifs à sortir des ghettos, des mellahs et des juderias pour devenir des citoyens normaux.

 

Les Juifs religieux qui émigrent en Israël y rencontreront rarement la religion telle qu’elle a été pratiquée pendant des siècles. Le courant national-religieux s’est imposé. Ce courant intégriste a totalement révisé la religion. Le « peuple élu », ça n’a jamais voulu dire qu’il a plus de droits que les autres, mais au contraire qu’il a plus de devoirs. Parmi les préceptes, il y a « ne fais pas à autrui ce que tu ne veux pas qu’on te fasse » et « tu aimeras ton prochain comme toi-même ». « L’an prochain à Jérusalem », ça n’a jamais voulu dire qu’il faut réaliser le nettoyage ethnique en cours, mais « vivement que le Messie vienne ».

 

L’hébreu a toujours été une langue religieuse interdite à l’usage profane. La religion juive est une religion de « l’exil ». L’installation sur cette terre (d’Israël/Palestine) avant l’arrivée du Messie et a fortiori l’établissement d’un État juif étaient interdits. D’ailleurs, les Juifs expulsés d’Espagne en 1492 ne sont pas allés à Jérusalem. Herzl a rencontré une hostilité quasi unanime des rabbins contre le projet sioniste dès qu’il a été question d’établir un État juif en Palestine.

 

Pour les Juifs laïques, les valeurs dominantes d’Israël sont à l’antithèse de ce que sont pour eux les valeurs du judaïsme. Où trouve-t-on dans la tradition juive le racisme, le chauvinisme, le militarisme, le négationnisme de l’existence et de la dignité de l’autre ? Qu’y a-t-il de commun entre ce qu’ont représenté les grands intellectuels juifs (Einstein, Freud, Arendt, Kafka, Benjamin…) et les criminels de guerre qui dirigent Israël ? Qu’est devenue en Israël la mémoire de celles et ceux qui ont lutté contre le fascisme et le colonialisme (Marek Edelman, Abraham Serfaty, Henri Curiel …) ? De quel héritage juif peuvent se prévaloir les colons et les militaires qui justifient à l’avance les violences et les crimes commis contre les Palestiniens ?

 

Comme l’écrit l’historien israélien Shlomo Sand à propos du livre de Yakov Rabkin Comprendre l’État d’Israël, « celui qui voit dans le sionisme une continuation du judaïsme ferait bien de lire ce livre. Mais celui qui croit que l’État d’Israël est un État juif est obligé de le lire ».

 

Certains Juifs pensent qu’après le génocide nazi, Israël est l’ultime refuge. Au nom de quoi les dirigeants israéliens peuvent-ils brandir partout l’antisémitisme et le souvenir du génocide ? Les sionistes n’ont joué qu’un rôle marginal dans la lutte contre l’antisémitisme et la résistance au nazisme. Certains dirigeants sionistes ont même eu un comportement honteux pendant la montée du fascisme (Ben Gourion avec les accords de Haavara, 1933) et à l’époque de l’extermination (le groupe Stern assassinant des soldats et des dignitaires britanniques). Comment ne pas comprendre que la mémoire du génocide signifie « que cela n’arrive plus jamais » et pas « que cela ne NOUS arrive plus jamais », ce qui correspond à une vision tribale de l’humanité totalement contraire à toutes les formes d’héritage juif.

 

 

Refuser l’assignation et la peur, refuser toutes les formes de racisme et de discrimination.

 

Il y a des confrontations qui ont du sens : les luttes contre l’oppression, la domination, le colonialisme, pour l’égalité des droits. On nous vend aujourd’hui une guerre qui n’est pas la nôtre : celle d’un monde dit « civilisé » contre le « terrorisme islamique ». Dans cette « guerre », les musulmans sont considérés comme des terroristes en puissance et sont sommés de « prouver » qu’ils ne sont pas des complices de Daesh.


Et les Juifs sont assignés à soutenir sans réserve une politique israélienne criminelle contre les Palestiniens et suicidaire pour les Juifs.

 

Cette fuite en avant criminelle tient par la peur. Ce syndrome assure le consensus à un point tel qu’un négociateur palestinien (le professeur Albert Aghazarian) a pu dire que les Israéliens ont peur de ne plus avoir peur. Cette peur irrationnelle a gagné beaucoup de Juifs français.


Dans le contexte du « choc des civilisations », prétexte des dominants pour ensanglanter le monde, il y a en France une montée générale de toutes les formes de racisme. Contrairement à l’image fabriquée par les principaux médias, le racisme frappe essentiellement tous les « dominés », toutes les victimes de l’apartheid social : Arabes, Noirs, Roms. Il prend une nouvelle tournure en se masquant derrière l’islamophobie. Comme il n’est plus politiquement correct de dire « sale arabe », on diabolise l’islam.

 

Il y a aussi une incontestable et détestable montée de l’antisémitisme. Mais les différentes formes de racisme ne sont pas traitées de la même façon.

 

Les dirigeants israéliens et en France le CRIF, participent activement à la stigmatisation des musulmans. Ils affirment contre toute évidence qu’il n’y a qu’un seul racisme à dénoncer (l’antisémitisme) et qu’on est à la veille d’une nouvelle « nuit de cristal ». Ils font apparaître les Juifs comme ceux que le pouvoir protège alors que l’idéologie sécuritaire, les déclarations des principaux dirigeants et le travail nauséabond de pseudo-intellectuels visent une seule population déclarée dangereuse.


Les stéréotypes antisémites se nourrissent aussi de la complicité du CRIF avec la politique israélienne et de la partialité évidente du pouvoir. À l’heure des confusions, l’indignation légitime contre les crimes israéliens fait monter l’antisémitisme et les quelques paumés attirés par la violence effroyable de Daesh commettent des attentats criminels contre les Juifs parce que Juifs.

 

La lutte contre le racisme ne peut pas être découpée. Choisir certaines « bonnes » victimes contre d’autres est à l’antithèse du combat antiraciste. La politique israélienne et la négation totale des droits du peuple palestinien ne protègent absolument pas les Juifs. Au contraire. Pour créer l’Israélien nouveau, il a fallu « tuer le Juif », celui qui pensait que son émancipation passait par celle de l’humanité. Comme le dit le militant israélien anticolonialiste Eitan Bronstein : « nous ne serons jamais libres tant que les Palestiniens ne le seront pas ». En refusant le tribalisme, les Juifs français réaffirmeront une histoire dont ils peuvent être fiers.

 

C’est tou-te-s ensemble qu’il faut combattre tous les racismes, toutes les stigmatisations, toutes les discriminations. C’est tou-te-s ensemble qu’il faut défendre le droit, en Palestine comme ici.

 

 

 

Par Pierre Stambul (Coprésident de l’Union Juive Française pour la Paix) - ujfp.org - le 19 février 2015

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Libye : qui présentera « l’addition à MM. Sarkozy, Juppé et BHL ?

Libye : qui présentera « l’addition  à MM. Sarkozy, Juppé et BHL ? | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it


Libye : qui présentera « l’addition »

à MM. Sarkozy, Juppé et BHL ?

Par Bernard Lugan (*)  

 

Au mois de mars 2011, à l’issue d’une campagne médiatique d’une rare intensité initiée par BHL, Nicolas Sarkozy décida d’entrer en guerre contre le colonel Kadhafi avec lequel il était encore dans les meilleurs termes quelques mois auparavant.

 

Le 17 mars, Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères, arracha la résolution 1973[1] au Conseil de Sécurité de l’ONU, ce qui permit d’ouvrir les hostilités.

 

Le 19 mars, 19 avions français (chasseurs et ravitailleurs) lancèrent un raid de 2 h 30 au-dessus de la Libye. L’incompréhensible guerre franco-libyenne ou otano libyenne venait de débuter.

 

Les raisons de ce conflit aux conséquences à ce point dramatiques qu’une intervention internationale paraît aujourd’hui indispensable sont toujours aussi mystérieuses.

 

À l’époque, l’Élysée avança l’argument d’une action humanitaire destinée à « sauver la population de Benghazi ». Le mardi 16 décembre 2014, le président tchadien Idriss Deby donna une autre explication en déclarant qu’en entrant en guerre en Libye : « l’objectif de l’OTAN était d’assassiner Kadhafi. Cet objectif a été atteint » [2].

 

Quoi qu’il en soit de ses causes officielles ou officieuses, réelles ou supposées, étayées ou fantasmées, le résultat de cette guerre « pour la démocratie et les droits de l’homme », est catastrophique :

 

Les alliés islamistes du Qatar et de la Turquie ont pris le contrôle d’une partie des approvisionnements gaziers et pétroliers de l’Europe.

 

Daesh a lancé une entreprise de coagulation des milices islamistes. Celles qui lui ont fait allégeance contrôlent une partie de la Cyrénaïque et à l’ouest, elles sont sur la frontière tunisienne. Partout, elles font régner la terreur.

 

L’Égypte est directement menacée ainsi que la Tunisie et l’Algérie. Au sud, le Tchad et le Niger sont en première ligne alors qu’avec Boko Haram un second front islamiste s’est ouvert sur leurs frontières.

 

Les gangs islamomafieux déversent des dizaines de milliers de migrants sur les côtes européennes. Au lieu de les refouler, la marine italienne les récupère en mer pour les installer en Europe... d’où ils ne repartiront plus. Or, tout le monde sait que des terroristes se dissimulent parmi eux et qu’ils vont créer des cellules « dormantes » au sein de l’« espace Schengen ».

 

Face à ce désastre, comme s’ils étaient étrangers au chaos qu’ils provoquèrent, Nicolas Sarkozy et Alain Juppé aspirent à la plus haute charge de l’État français. Quant à leur inspirateur guerrier, il continue à promener sa superbe et son échancrure de col sur les plateaux des télévisions...

 

 

 

Par Bernard Lugan (*) bernardlugan.blogspot.fr – le 18 février 2015

 

Bernard Lugan est un historien français spécialiste de l’Afrique. De 1972 à 1983, il enseigne à l’Université nationale du Rwanda, pays dans lequel il mène également des fouilles archéologiques. De 1984 à 2009, il est maître de conférences à l’université de Lyon III, où il assure différents cours autour de l’histoire de l’Afrique et de la francophonie. Il dispense également pendant cette période des conférences à l’Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN) ainsi qu’à l’École de guerre au sein du module « Histoire et géostratégie de la francophonie ». En 2009, il publie une histoire universelle de l’Afrique sous le titre Histoire de l’Afrique, des origines à nos jours… (Source Wikipédia)

 

 

Notes :

1)   Voir à ce sujet le texte de la conférence de presse d’Alain Juppé à New York (www.ambafrance-at.org).

2)   

2) Voir mon communiqué daté du 1 janvier 2015 dont le titre est « Le but de la guerre était-il d’assassiner le colonel Kadhafi ? ».

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Par principe élémentaire

Par principe élémentaire | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it


L'état islamique enrage contre ce dessin sur l'oppression des femmes sous la charia.


Publié pour la première fois il y a quelques jours, Osama Hajjaj a reçu d'innombrables insultes et même des menaces de mort des supporters de Daesh en Jordanie.


Sa réponse : "ces cons ne me stopperont pas. Je croirai toujours en la liberté de pensée et d'expression, qui sont des droits humains fondamentaux."


Nous partageons le combat d'Osama et c'est pourquoi nous diffusons ce dessin aujourd'hui, avec sa permission et sa solidarité.


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Et en anglais pour être mieux capté !


Isis is not happy with this cartoon about the oppression of women under Sharia law.


First published a few days ago, Osam Hajjaj has been receiving verbal abuse and, worse, death threats from Daesh / Isis supporters residing in Jordan.


Osama's response : "Those cowards won’t stop me. I still believe that freedom of thought and expression is a human right."


We share Osama's belief and that's why we run this cartoon today. It is published with the express permission of Osama.

Koter Info's insight:


Rien ne justifie une différence entre homme et femme et surtout pas des conneries pseudo culturelles ou religieuses. Et que celui qui n'approuve pas aille se faire voir ailleurs !


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Pourquoi les USA ont-ils ignoré les prédictions sur la Syrie ?

Pourquoi les USA ont-ils ignoré les prédictions sur la Syrie ? | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it


Pourquoi les USA ont-ils ignoré

 les prédictions sur la Syrie ?

Par Rick Sterling

 

 

Il y a presque 3 ans, la DIA (Defense Intelligence Agency) du département de la défense américaine a caractérisé de façon précise la nature du conflit en Syrie et a prédit l’émergence de l’État Islamique. Cette révélation bouleversante a été le résultat de la loi sur la liberté de l’information combinée à un effort du groupe « Judicial Watch » (1) en lien avec la commission spéciale sur Benghazi pour plus de transparence sur les agissements des services secrets américains en Syrie.

 

 

Les sept pages du rapport (rendues publiques) péniblement rédigées par les services secrets en août 2012 révélèrent les choses suivantes :

 

1. La DIA a confirmé la dimension « sectaire » (religieuse) de l’insurrection syrienne puisqu’elle dit : « Les évènements prennent clairement une tournure sectaire. Les salafistes, les frères musulmans et AQI sont les forces majeures qui dirigent l’insurrection syrienne » (2) (AQI= Al Qaeda en Irak).

 

Cette analyse est en nette contradiction avec ce qui est relayé par les médias et les élites politiques occidentales, lesquels ont déclaré que la « révolution syrienne » a été dirigée par des protestants en quête de « démocratie et de libertés ».

 

2. La DIA a confirmé le lien étroit entre l’opposition syrienne et Al Qaeda. Le rapport dit : « Al Qaeda a supporté l’opposition syrienne depuis le début, de manière idéologique et à travers les médias… Al Qaeda a conduit bon nombre d’opérations dans plusieurs villes syriennes sous le nom de Jaish al nusrah (l’armée victorieuse) ». (2)

 

3. La DIA a confirmé que les insurgés syriens permettaient le renouvellement d’Al Qaeda en Irak et en Syrie. Selon le rapport : « Il y a eu une régression d’Al Qaeda dans la province Ouest de l’Irak pendant les années 2009 et 2010 ; cependant, après l’intensification de l’insurrection en Syrie, le pouvoir religieux et tribal, puissance régionale, a commencé à soutenir les révoltes des « sectes ». Ce soutien est apparu au moment des sermons d’après la prière du vendredi, l’on appela des volontaires à soutenir les sunnites de Syrie. » (2)

 

4. La DIA a prédit que le gouvernement syrien allait survivre à cette insurrection, mais que les puissances étrangères et l’opposition allaient morceler le territoire et établir une « capitale » d’opposition comme ce qui a été fait auparavant en Libye. Selon le rapport : « Le régime survivra et possèdera toujours un contrôle du territoire syrien… Les forces d’opposition tentent de contrôler les régions est du pays, adjacentes aux provinces de l’Ouest irakien (Mosul et Anbar), dans le but d’avoisiner la frontière turque avec l’Irak. Les pays occidentaux, les États du Golfe (Émirats arabes) et la Turquie soutiendront ces efforts. Cette hypothèse est plus ou moins en concordance avec les données collectées venant des récents évènements, et ces évènements vont aider à préparer des zones sécurisées sous protection internationale, comme ce qui est arrivé en Libye quand Benghazi a été choisie comme centre de commandement du gouvernement provisoire. » (2)

 

5. La DIA a prédit l’expansion d’Al Qaeda et l’annonce de la création de « l’Etat Islamique » deux ans avant sa création. Selon le rapport : « Si la situation se démêle, il y aura possibilité de mettre en place une principauté salafiste (déclarée ou non) dans la partie Est de la Syrie et c’est exactement ce que les puissances qui soutiennent ce mouvement révolutionnaire veulent, dans le but d’isoler le régime syrien qui est considéré dans la stratégie visant à l’expansion des Shiah (Groupes ethniques d’Irak et d’Iran). La détérioration de la situation a de terribles conséquences sur la situation irakienne… Cela crée l’atmosphère idéale pour le retour d’Al Qaeda dans ses affaires à Mosul et Ramadi, et va fournir un nouvel élan à Al Qaeda, qui a pour prétention d’unifier les jihads parmi les sunnites d’Irak, de Syrie et du reste du monde arabe contre ceux qu’ils considèrent comme ennemis, à savoir les dissidents. DAESH pourrait aussi proclamer un État islamique via son union avec d’autres organisations terroristes en Irak et en Syrie, ce qui créerait un grand danger, car ils seraient soucieux d’unifier et de protéger le territoire irakien. » (2)

 

La dernière prédiction (datant de l’été 2012) est spécialement remarquable puisqu’elle prédit la proclamation de l’État Islamique 2 ans avant sa création réelle. Les rapports secrets d’août et septembre 2012 ont été envoyés au secrétaire d’État, au secrétaire à la défense, au département d’État, au département de la défense ainsi qu’au commandement central.

 

Conclusions et questions

 

Le rapport de la DIA avait précisément mis en lumière le caractère « sectaire » de l’opposition syrienne et prévoyait un renouveau et une hausse de l’influence de l’ISIS conduisant à la proclamation de « l’État Islamique ». L’inaction américaine a permis aux groupes « révolutionnaires » de répandre massivement la mort et la destruction dans la région. Aujourd’hui le monde observe avec horreur les meurtres et décapitations des soldats syriens de la région de Palmyra et des partisans du gouvernement de Bashar Al-Assad commis par les forces armées de Daesh. Ils menacent notamment de détruire parmi les plus précieux trésors archéologiques de l’histoire de l’Humanité.

 

La prise de connaissance du contenu de ce rapport soulève donc les questions suivantes :

 

• Pourquoi le gouvernement américain ne change-t-il pas de politique ?

 

• Pourquoi le gouvernement U.S. continue-t-il de diaboliser le gouvernement laïc de Bashar Al-Assad tout en supportant activement une insurrection alors même que les « salafistes, frères musulmans et Al Qaeda sont les forces majeures » ?

 

• Pourquoi le gouvernement U.S. empêche-t-il les médias mainstream de voir et de diffuser le rapport de 2012 ? (cela aurait sans doute calmé les ardeurs des belliqueux dans la région).

 

• Pourquoi le gouvernement U.S. continue-t-il d’autoriser l’envoi d’armes à l’opposition syrienne, comme il a été détaillé dans un autre rapport secret de septembre 2012 ?

 

La destruction et le chaos dans la région sont-ils les résultats d’une erreur, ou était-ce intentionnel ?

 

Intentionnellement ou non, le gouvernement américain, l’OTAN, les émirats du Golfe et leurs alliés turcs ne sont-ils pas tous sensiblement responsables du chaos, des décès et de la destruction à laquelle nous assistons aujourd’hui en Irak et en Syrie ?

 

 

 

 

Par Rick Sterling (counterpunch.org) - traduit par Investig’action – le 25 juin 2015

 

NDT :

 

(1) http://www.judicialwatch.org/document-archive/

 

(2)http://levantreport.com/2015/05/19/2012-defense-intelligence-agency-document-west-will-facilitate-rise-of-islamic-state-in-order-to-isolate-the-syrian-regime/.


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La guerre du Yémen, la plus idiote guerre de l’Histoire

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La guerre du Yémen, la plus idiote

guerre de l’Histoire

 

Le directeur éditorial du site madaniya.info René Naba revient pour RT France sur la situation au Yémen.

 

Les belligérants yéménites ont pris rendez-vous à Genève le 10 juin 2015 pour tenter de mettre un terme à la guerre qui ensanglante le pays depuis huit semaines. Retour sur le bilan de ce conflit déclenché par les pétromonarchies sous l’égide de l’Arabie saoudite contre le pays le plus pauvre du monde arabe.

 

Certes, toute l’infrastructure du Yémen a été détruite en vue de faire plier les rebelles et plus d’un millier de morts ont été dénombrés au sein de la population sans la moindre protestation du monde occidental.

 

Mais sur le terrain, la première guerre du nouveau Roi Salmane à la tête d’une coalition de sept pays (150 000 soldats, 1 500 avions) s’est révélée catastrophique.

 

Le président yéménite Hadi, homme lige des Saoudiens, n’a toujours pas réussi à reprendre pied sur le sol national qu’il avait déserté, malgré le puissant coup de main de la France à un mini-débarquement de troupes loyalistes à Aden, depuis la base militaire française de Djibouti.

 

Malgré l’encadrement français des troupes saoudiennes assuré par le contingent de la Légion Étrangère stationné sur la base française d’Abou Dhabi, « Zayed Military City », les troupes saoudiennes ont déserté leurs postes face aux rebelles leur laissant près de 30 blindés en guise de prises de guerre. Au total 400 soldats saoudiens ont été tués. La coalition sunnite, elle-même, s’est lézardée. Le Pakistan a refusé d’y participer de crainte d’être instrumentalisé. L’Égypte a pris ses distances face à la montée en puissance d’Al Qaïda, l’allié tacite des wahhabites, sur une base sunnite, face aux rebelles houthistes (chiites).

 

Un désastre absolu en dépit de la présence de pilotes mercenaires français et américains, opérant dans les rangs saoudiens, alléchés par des primes de l’ordre de 7 500 dollars par sortie aérienne. Avec en surprime, une Bentley offerte par le prince Walid Bin Talal pour chacun des 100 pilotes saoudiens participant au bombardement du Yémen. Sans doute une façon très personnelle de développer le patriotisme, le sens du devoir et le goût du sacrifice au sein des forces armées saoudiennes.

 

Daesh opère au cœur de l’Arabie saoudite

 

Mais le pire est le fait que l’État islamique (EI) opère désormais au cœur du Royaume. L’État islamique a officiellement revendiqué fin mai 2015 deux attentats en Arabie saoudite, tous les deux commis un vendredi (22 et 29 mai) avec une cible identique des mosquées chiites du Royaume le jour de la prière.

 

Son premier attentat-suicide, dans la province de Qatif, dans l’est du pays a fait 21 morts et 81 blessés. Le deuxième, une semaine plus tard, le 29 mai, dirigé contre une mosquée chiite de la région pétrolière de Dammam, a fait trois morts et 4 blessés.

 

En plus de s’attribuer la paternité de l’opération, l’EI a déclaré la création d’une nouvelle province, dans le Najd, la région de Riyad, qui est le berceau du wahhabisme, la version ultra rigoriste de l’islam, en vigueur en Arabie saoudite.

 

Depuis le lancement de l’offensive saoudienne, quatre attentats se sont produits à Ryad même, dont deux attribués à Daesh, tuant 4 policiers. Un attentat contre l’ambassade américaine dans la capitale saoudienne a été déjoué, le 28 avril 2015, entraînant l’arrestation de 93 personnes, dont 81 membres du groupe djihadiste Daesh (État islamique).

 

Ce qui fait dire au Général Hussein Salami, adjoint au commandant en chef des gardiens de la révolution iranienne, que « la guerre du Yémen est la plus idiote guerre de l’Histoire ».

 

 

Par René Naba (*) - francais.rt.com – le 15 juin 2015

 

 

René Naba : ancien responsable du monde arabo-musulman au service diplomatique de l’Agence France presse (1978-1990), ancien conseiller du directeur-général de RMC pour l’information (1989-1994). (Source : voltairenet.org)

 

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Pourquoi les États-Unis tentent-ils de remplacer le gouvernement Assad par al-Qaïda en Syrie ?

Pourquoi les États-Unis tentent-ils de remplacer le gouvernement Assad par al-Qaïda en Syrie ? | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Photo : Paul Larudee — freepalestinemovement.org


 

 

Pourquoi les États-Unis tentent-ils de remplacer le gouvernement Assad par al-Qaïda en Syrie ?

 Par Paul Larudee (*)


« Dans le cas de la Syrie, notre opposition au gouvernement Assad est tellement obstinée que nous serions apparemment prêts à défaire un gouvernement qui n’est pas notre ennemi afin de le remplacer par un autre qui l’est. »

 

Il y a un mois, la ville d’Idlib tombait aux mains des combattants de l’opposition, principalement al-Qaïda, ses affiliés et ses alliés. Ce fut un sale coup pour l’armée syrienne. Samedi dernier, la ville voisine de Jisr al-Shughour fut également conquise, majoritairement par les mêmes groupes de combattants.

 

Pour lutter contre le gouvernement syrien et son armée nous retrouvons un mélange de mercenaires syriens et étrangers provenant de dizaines de pays différents. Ils sont fournis, formés, armés et payés par l’Arabie saoudite, les monarchies du Golfe, Israël, la Turquie, l’OTAN, et bien sûr les États-Unis. Leurs armes sont de plus en plus sophistiquées, et il semble que les missiles filoguidés TOW fournis par l’Arabie saoudite (et indirectement par les États-Unis) aient fait une grande différence dans les batailles pour Idlib et de Jisr al-Shughour.

 

Le gouvernement syrien est soutenu principalement par la Russie et l’Iran, plus quelques milliers de combattants du Hezbollah au Liban. Il est également soutenu par une majorité importante de la population syrienne comme le montrent des estimations des services de renseignement étrangers ainsi qu’une élection multipartite en 2014, avec une participation étonnante, même de la part des Syriens expatriés.

 

L’OTAN, les États-Unis et l’opposition syrienne laïque relativement marginalisée disent qu’ils veulent remplacer le gouvernement syrien actuel par un autre qui soit laïque, démocratique, respectueux des droits de l’homme, et qui représente tout le peuple syrien.

 

Vraiment ? Les États-Unis ont sapé et renversé des gouvernements démocratiques en Iran (1953), au Guatemala (1954), au Brésil (1964), au Congo (1965), au Chili (1973), en Turquie (1980), au Nicaragua (1981-1990), en Haïti (2004) et dans les territoires palestiniens occupés (2007), et ils essaient de faire la même chose au Venezuela. Pourquoi ? Parce que le choix démocratique du peuple n’a pas abouti à un gouvernement conforme, inféodé à l’Ouest et aux sociétés multinationales. Car c’est là le véritable programme des États-Unis et de l’OTAN.

 

Il est également difficile d’imaginer que l’Arabie saoudite, les monarchies du Golfe, Israël et la Turquie se soucient de la démocratie et des droits humains. Ils sont davantage intéressés à faire progresser leurs objectifs régionaux et la suppression des rivaux potentiels, principalement et de manière obsessionnelle l’allié de la Syrie, l’Iran.

 

Les États-Unis et Israël ont provoqué la destruction et le changement de régime dans au moins sept pays du Moyen-Orient depuis deux décennies, voire plus. La politique d’Israël depuis sa création a été de garder ses voisins faibles, divisés et dans un état de guerre permanent.

 

 

Sois prudent et attentif à ce que tu souhaites

 

Un changement de régime entraine toutes sortes de conséquences imprévues. De la fin des années 1970 jusqu’au début des années 1990, les combattants de la résistance islamique, y compris Oussama Ben Laden, soutenus par les Américains ont lutté contre un gouvernement laïc en Afghanistan pour finalement le voir remplacé par le régime répressif des talibans.

 

Ce soutien a contribué à créer al-Qaïda, qui se répand au Yémen, en Afrique de l’Est et d’autres endroits. S’en sont suivies des attaques majeures contre des installations américaines au Yémen, au Kenya et deux fois contre le World Trade Center à New York. Ensuite les États-Unis ont envahi l’Afghanistan en 2002. C’est devenu un bourbier et potentiellement la plus longue guerre de l’histoire américaine, au prix de mille milliards de dollars, d’une infrastructure et d’une économie nationale en ruine, et des milliers des vies américaines en sus. Cette guerre n’est pas encore terminée et les avantages supposés pour États-Unis sont difficiles à établir. En fait, suite à cela, les États-Unis sont probablement encore moins en sécurité qu’avant et nous n’avons parlé que de l’Afghanistan.

 

Si l’on ajoute les interventions américaines en Irak, en Libye, au Yémen et en Syrie les coûts montent à plusieurs milliers de milliards de dollars et plusieurs milliers de vies américaines, un détail à côté de plus d’un million de morts parmi les populations locales. Lors de toutes ces interventions, nous avons laissé derrière nous des États paralysés et en déliquescence, avec al-Qaïda et ses successeurs (Daesh, alias ISIS, alias le mouvement takfiri) pour combler le vide.

 

Dans le cas de la Syrie, notre opposition au gouvernement Assad est si obstinée que nous sommes apparemment prêts à défaire un gouvernement qui n’est pas notre ennemi afin de le remplacer par un autre qui l’est.

 

Les mercenaires payés issus de l’opposition modérée sont tous alliés à al-Qaïda et combattent sous sa direction. Al-Qaïda et Daesh contrôlent la plupart des territoires détenus par l’opposition syrienne et assument la plupart des combats. Nos alliés, la Turquie, l’Arabie saoudite et le Qatar, avec le soutien plus discret des monarchies du Golfe et d’Israël, fournissent à peu près toutes les armes et l’argent. Ils organisent le recrutement des mouvements les plus fanatiques sous une bannière islamique, qui promet de semer la mort, la misère, l’intolérance et l’oppression dans les territoires qu’ils contrôlent. A leur charge également d’assurer le nettoyage ethnique des populations qu’ils considèrent comme hérétiques, musulmanes et non musulmanes, indifféremment.

 

 

Pourquoi voudrions-nous qu’ils prennent le contrôle de la Syrie ?

 

Malheureusement, la décision US n’a rien à voir, semble-t-il, avec le bon sens.

L’Arabie saoudite et Israël estiment qu’al-Qaïda et Daesh sont de meilleures options qu’un gouvernement allié avec l’Iran. Ils ne voient aucune objection à la conquête de la Syrie par des terroristes.

 

Ils ont chacun des amis puissants aux États-Unis, y compris les faucons guerriers au Congrès comme les sénateurs John McCain, Lindsay Graham et Ted Cruz, ainsi que la candidate à la présidentielle Hillary Clinton.

 

Ils ont le soutien du vaste complexe militaro-industriel, le plus grand de la planète, des néo-conservateurs au sein de la presse, parmi les conseillers, les responsables gouvernementaux et les membres du Congrès, ainsi que du lobby israélien.

 

Ces groupes paralysent la politique américaine et placent les intérêts d’une infime fraction d’entreprises américaines et de particuliers fortunés – sans parler de gouvernements étrangers comme l’Arabie saoudite et Israël – au-dessus des intérêts du reste du pays. Soit ils n’ont pas appris des nombreuses erreurs passées ou alors ça leur convient, ils en tirent des fortunes et veulent continuer.

 

Seuls les efforts de gens doués d’une conscience, avec l’appui d’intérêts économiques qui ne se bâtissent pas sur la destruction, la mort et le chaos, sont susceptibles de mettre un terme à cette corruption rampante.

 

Les Présidents George Washington et Dwight Eisenhower nous ont tous les deux mis en garde face aux conséquences lorsqu’on permet à des puissances étrangères et à des intérêts particuliers de devenir trop puissants. Il n’est pas garanti que cette nation arrivera à rassembler de quoi inverser la relation de dépendance entre la montée des groupes terroristes comme al-Qaida et Daesh et les intérêts américains qui tirent profit de l’assassinat de masse qui est leur objectif.

 

 

 

 

Par Paul Larudee (*) (veteransnewsnow) — traduit par Evanis, relu par jj pour la Saker Francophone – le 26 mai 2015.

 

(*) Paul Larudee cofondateur de Syria Solidarity Mouvement (Mouvement Solidarité Syrie)

 

En savoir plus : Ils sont le monde, pas nous, les autres.

 

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Pour l’Empire, la finalité c’est le chaos, pas la victoire

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Pour l’Empire,

la finalité c’est le chaos, pas la victoire

Par Peter Koenig (*)

 

 « Une fois de plus, un pays « libéré » par les Occidentaux bascule inéluctablement dans le chaos. » Global Research

Ce pourrait être n’importe lequel de ces pays à feu et à sang où Washington et ses séides d’Europe de l’Ouest et de l’Est ont semé la guerre – spirale sans fin de chaos, de ruine et de mort – et la soumission.

 

Le cœur même du problème : en réalité, la stratégie de Washington et de l’OTAN n’est pas de gagner la guerre ou le conflit, mais de créer et maintenir les conditions d’un chaos permanent. Un moyen imparable de contrôler à la fois les populations, les nations et les ressources, et de garantir à l’Ouest une demande permanente de troupes et de matériel militaire – aux États-Unis, le complexe militaro-industriel et les industries et services connexes représentent à eux seuls plus de 50 % du PIB. Par définition, un pays en pleine débâcle ou en plein chaos est en banqueroute et manque toujours d’argent – l’argent des conditions drastiques, l’argent de l’austérité, celui que dispensent le FMI, la Banque Mondiale et d’autres « institutions de développement » aussi sinistrement notoires, entre autres usuriers. Un argent synonyme d’esclavage, a fortiori lorsqu’accordé à des dirigeants corrompus qui se fichent pas mal de leur peuple.

 

Et c’est ça qui est visé, pas autre chose, au Yémen, en Ukraine, en Syrie, en Irak, au Soudan, en Centrafrique, en Libye… et n’importe où ailleurs. Peu importe qui se bat contre qui. EI / Isil / IS/ Daish / Daesh / Al-Qaeda, quelque nom d’organisation de tueurs mercenaires qu’on veuille ajouter à la liste, c’est autant d’étiquettes pour noyer le poisson. On peut aussi bien y ajouter Blackwater, Xe, Academi et tous les autres noms utilisés successivement pour mieux brouiller les pistes. Les prostituées de l’Empire anglo-saxon sioniste, les prostituées de bas étage, à côté des prostituées de luxe que sont l’Arabie Saoudite, le Qatar, le Bahreïn et les autres États du Golfe ; avec en plus la France et l’Angleterre bien sûr.

 

François Hollande venait à peine de signer pour plusieurs millions d’Euros de contrat, rien qu’avec le Qatar, pour la vente de 24 chasseurs bombardiers Rafale, qu’il repartait aussitôt pour Riyad pour discuter avec le roi Salman de la vente de nouveaux Rafales. Les affaires vont bien ! Et puis c’est bien pratique pour « éradiquer » des ennemis fabriqués de toutes pièces ; et aussi pour pouvoir prendre part au sommet du Conseil de la Coopération du Golfe (CCG) le 5 mai. Sujet des discussions au sommet : les « crises » de la région, notamment au Yémen, créées par l’Occident dans l’intérêt de Washington (et de ses maîtres sionistes) et imputées aux « rebelles », qui se battent simplement pour un gouvernement plus juste.

 

L’Occident a inventé tout un vocabulaire à vous rendre malade. C’est comme un virus qu’on vous inocule dans le cerveau – du moins ce qu’il en reste – au point qu’on en devient incapable de se rappeler ce que les mots veulent dire réellement. On les répète tels quels et on prend le tout pour argent comptant. Après tout, les médias de masse vous les enfoncent jusqu’aux tripes du matin au soir. Quand des gens se battent pour leur liberté, pour leur survie, contre des régimes oppresseurs, ce sont des « terroristes », des « rebelles ». Les réfugiés d’Afrique qui fuient les pays frappés par les conflits infligés par Washington – réfugiés dont plus de 4 000 ont déjà péri en mer cette année en tentant d’aller chercher « une vie meilleure » de l’autre côté de la Méditerranée – sont commodément rebaptisés « immigrants » [euphémisme d’usage pour éluder le statut de réfugié]. Généralement on précise « immigrants illégaux » pour enfoncer le clou. Les immigrants sont autant de mendiants ; les immigrants illégaux, du gibier de potence ! Tout ça n’a rien à voir avec le chaos et l’horreur économique où les Occidentaux ont plongé leurs pays. Tiens donc ! Honte à toi Bruxelles !

 

À propos de chaos, M. Hollande sait pertinemment que ses chasseurs bombardiers servent en réalité les intérêts du Parain pour semer davantage de chaos et de destruction dans toute la région, davantage de morts, davantage de misère, davantage d’esclavage – davantage de réfugiés sombrant en Méditerranée – et davantage encore de ce chaos sans fin, de gens à la limite de la survie, de gens qui n’ont plus les moyens de se battre pour défendre leur pays, leurs ressources, leur liberté, car ils doivent avant tout se battre pour leur propre survie, pour la survie de leurs enfants ou celle de leur famille. Tu parles d’un empire !

 

Non, franchement, quand quelqu’un vend à d’autres pays des chasseurs bombardiers ou n’importe quel type de machine à tuer, en sachant pertinemment que ces armes servent à tuer des gens, à détruire des pays, est-ce que ce type n’est pas un criminel contre l’humanité ? N’est-ce pas un criminel de guerre de la pire espèce ?

 

M. Hollande, en plus d’être un criminel de guerre, est un parfait larbin, persuadé qu’au bout du compte quelques miettes du butin de ce pillage énorme finiront par tomber dans son assiette et qu’il pourra un jour nager avec ses maitres dans un paradisiaque océan de lait et de miel. Pense-t-il vraiment sauver l’économie de son illustre pays, qui produisait jadis des Victor Hugo, des Balzac, des Stendhal et autres Dumas, en vendant des machines à tuer aux autres séides de l’Empire ? Est-ce que ça l’intéresse que 83 % de son électorat le méprise ?

 

Semer le désordre, le chaos et la ruine, c’est tout ce que Washington et ses vassaux savent faire. C’est pas gagner des guerres qu’ils veulent, ce qu’ils veulent c’est le chaos éternel et la ruine, des populations faciles à écraser. Ils appellent ça « full spectrum dominance » [domination totale ou dans tous les domaines].

 

Et comme l’armée américaine et son « Big Brother » (ou big sister) l’OTAN ne peuvent pas être partout, ne veulent pas qu’on les voie partout, ils se payent des tueurs. Washington invente et crée, puis finance avec son intarissable flot d’argent les ISIS, Daesh ou Al-Qaeda – et le répertoire de s’élargir au bon vouloir du maitre – afin qu’ils combattent pour elle, qu’ils tuent pour elle, pour produire chaos et « false flags » [opérations dites « sous fausse bannière », ou pseudo-ennemis qui servent nos intérêts], de sorte qu’au final, l’OTAN et le Pentagone, son bulldozer, puissent intervenir et prétendre « détruire » ces mercenaires qu’ils ont eux-mêmes créés depuis le début. Jamais les médias ne vous diront la vérité là-dessus.


Ils vous mettent dans la tête que les Houtis – secte shiite humanitaire de gauche – et les sunnites s’entretuent au Yémen pour le pouvoir ; que les Saoudiens et leur coalition de monarques ne font que libérer le Yémen d’une bande de terroristes ; que les Houtis ont le soutien de l’Iran (majoritairement shiite) – affirmation récemment démentie avec véhémence par un responsable de l’ONU – et que les Houtis doivent donc être brisés. Une bonne occasion de plus pour Washington de tout faire retomber sur le dos de l’Iran ! Et une fois les Houtis asservis et décimés en nombre suffisant, un président fantoche sera mis en place, comme l’ex-président Saleh ou son successeur Hadi, de façon que Washington puisse indéfiniment verser de l’huile sur le feu et oppresser la population du pays, pour garder un accès illimité au port stratégique d’Aden – et au golfe d’Aden.

 

Même chose pour l’Ukraine : est-ce que Daesh, ISIL, ISIS, Al-Qaïda ou quelque nom qu’on veuille lui donner est présent en Ukraine ? Je vous le donne en mille, sous les ordres de la CIA et de quelque 6 000 militaires américains – envoyés comme instructeurs uniquement, bien sûr. Ils forment les troupes de Kiev à la meilleure manière d’exterminer rapidement leurs propres frères, dans le Donbass. Ils les entrainent à y enraciner le chaos. Et si les soldats refusent d’être formés à tuer leurs frères, le régime nazi de Kiev les fusillera comme traîtres. Point final ! C’est tellement simple. Comme ça, personne ne résiste.

 

Et à présent les « conseillers » militaires américains et la CIA, avec l’aide de leurs tueurs professionnels (les nazis de Kiev, ISIS/Daesh/Al-Qaeda, peu importe) accumulent les provocations pour embarquer Poutine dans une vraie guerre – autant que possible une Troisième guerre mondiale. Si ! La troisième en moins de cent ans, tout à fait susceptible de dévaster l’Europe et peut-être même le monde entier. Jusqu’ici, le monde était passé à côté d’un tel désastre, principalement grâce à la sage stratégie de non-confrontation des Russes.

 

De fait, c’est clair, ISIS/Daesh/Al-Qaïda est en Ukraine. Ils sont partout où l’Empire exige qu’ils soient présents. C’est à ça qu’on les paye. Un vrai boulot de prostituées. Des prostituées spécialement conçues pour ça ; et bien payées en plus. Ici, l’idéologie n’est qu’une feuille de vigne bien commode pour les médias – comme ça nous pouvons tous nous convaincre qu’en fait, ce sont les musulmans qui sont pourris – et certains plus que d’autres. L’Occident doit les combattre, car ils représentent un danger énorme et imminent pour nos libertés, pour notre liberté, pour nos démocraties – et en particulier pour les valeurs néolibérales de notre économie de marché version tout est gratuit.

 

Parce que c’est ça l’ultime finalité : l’humain comme simple élément de fonctionnement du marché, jetable, réductible à autant de chair à canon, exterminable en masse avec des OGM empoisonnés, des drones, des bombes, des famines créées artificiellement, de sorte qu’en fin de compte les survivants soient réduits au servage, aux mains d’une élite extrêmement réduite, qui contrôle les quatre coins du globe et TOUTES ses ressources, pour maintenir le standing de gens exceptionnels – mais oui, la nation exceptionnelle finira elle-même par se réduire à une poignée de personnes exceptionnelles vautrées dans l’opulence.

 

Rappelez-vous cette phrase abjecte d’Henry Kissinger (la vision de l’un des plus épouvantables criminels de guerre encore vivant aujourd’hui), Prix Nobel de la Paix, lui aussi d’ailleurs (sic) : « Qui contrôle les réserves de nourriture contrôle les peuples ; qui contrôle l’énergie peut contrôler des continents entiers ; qui contrôle l’argent peut contrôler le monde. »

 

Ces mots sonnent chaque jour plus vrai. Mais seulement tant que nous le permettons ; tant que nous, le peuple, nous les 99,999 % des habitants du globe, nous acceptons qu’il en soit ainsi.

 

 

 

Par Peter Koenig (*), Chaos – not Victory – is the Empire’s “Name of the Game”, Global Research, 6 mai 2015 - traduction : Dominique Arias - mondialisation.ca – le 16 mai 2015.

 

 

(*) Peter Kœnig est économiste et analyste géopolitique. Ancien cadre de la Banque Mondiale, il a travaillé dans le monde entier comme le domaine de l’environnement et des ressources en eau. Il écrit régulièrement pour Global Research, ICH, RT, Sputnik News, The Voice of Russia, Ria Novosti, TeleSur, The Vineyard of the Staker Blog, entre autres sites Internet. Il est l’auteur de Implosion – An Economic Thriller about War, Environmental Destruction and Corporate Greed – ouvrage de fiction base sur des faits réels et sur 30 ans d’expérience de la Banque Mondiale autour du monde.

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Vidéo. Charlie, USA, Daesh : les 7 médiamensonges

Vidéo. Charlie, USA, Daesh : les 7 médiamensonges | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it



Charlie, USA, Daesh : les 7 médiamensonges (vidéo)

 

 

C’est dans un souci de rétablir le dialogue entre les « Charlie » et les « pas Charlie » que Michel Collon met en lumière les relations entre les États-Unis et le terrorisme.

 

 

 

>>> Voir la vidéo : ‪ « Charlie, USA, Daesh :

les 7 médiamensonges »


 

 

Par Michel Collon / Investig’Action – le 3 avril 2015


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Liban - Interview exclusive du général Michel Aoun, mars 2015

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Liban - Interview exclusive du

général Michel Aoun, mars 2015

 

« Utiliser des terroristes
pour faire plier al-Assad

est très dangereux »

 

Depuis des décennies, le Liban fait figure d’entonnoir pour toutes les crises qui secouent le Moyen et le Proche-Orient. Riyad, Washington et Israël y déploient une influence désastreuse en instrumentalisant le féodalisme et le confessionnalisme qui restent la plaie du pays. Quinze ans après la fin de ce que l’on a faussement appelé la « guerre civile libanaise », le pays cherche encore son salut et reste plus que jamais l’otage des grands jeux régionaux. Chef du Courant Patriotique Libre, le général Michel Aoun se bat sans relâche pour l’unité et la souveraineté de son pays. Patient et résolu ; inspiré mais pragmatique, visionnaire autant qu’incorruptible, cet homme d’exception pourrait devenir le prochain Président du Liban, mettant ainsi fin à 8 mois de vacance de la Présidence. Il a accepté de répondre aux questions d’entrefilets.com. Interview exclusive.

 

 

Une vie au service du Liban

 

La vie du général Michel Aoun est indissociable de celle du Liban. Tour à tour officier héroïque, résistant acharné et politicien de génie, son nom marque chaque page de l’histoire de ce Liban qu’il aime avec passion et désintéressement. Les grands médias ont découvert son nom avec sa nomination au poste de Président du Conseil des ministres en 1988. Héritant d’un Liban alors en pleine guerre, Michel Aoun avait tenté (déjà) de libérer le pays des influences extérieures, et de mettre les milices au pas.


Il fut finalement contraint à l’exil après l’invasion du Pays du Cèdre par la Syrie en 1990, invasion « autorisée » par les États-Unis en échange du soutien de Damas lors de l’opération « Tempête du désert » contre l’Irak. Tout au long de son exil, il luttera politiquement pour libérer son pays du joug syrien. Avec succès. Triomphalement accueilli à son retour au Liban en 2005, il n’a eu de cesse depuis de lutter pour la stabilité du pays. Son génie politique le conduira à réaliser une entente historique avec Hassan Nasrallah, chef du mouvement chiite Hezbollah. 

 

Verbatim

 


— M. Kerry aurait confié à l’archevêque de Beyrouth qu’il pensait que le Liban aurait « un Président d’ici à deux mois ». Mais il semble conditionner cela à un accord sur le nucléaire avec l’Iran. Qu’en pensez-vous ?

 

La déclaration de M. Kerry n’est pas tout à fait claire. Il est cependant certain que le poids des interférences extérieures a toujours été important dans la vie politique libanaise. Or il y a un apaisement en cours entre l’Iran et Washington d’une part, et entre l’Iran et l’Arabie saoudite d’autre part. Cet apaisement laisse en effet entrevoir une solution pour le Liban.

 


— Les Américains permettraient-ils votre élection ?

 

Oui. Les Américains comme les autres savent que, par mon comportement, j’ai toujours recherché la cohésion entre les différentes communautés libanaises pour préserver la stabilité du pays. Et pour tout le monde, la stabilité du Liban est très importante.

 


— Mais le camp chrétien est lui-même encore divisé ?


Il y a certainement des divergences, mais il y a surtout un consensus là aussi sur la nécessité de préserver la stabilité du pays. Que ce soit en Irak, en Libye, au Yémen ou en Syrie, beaucoup de pays, notamment du pourtour méditerranéen, sont noyés dans le feu et le sang. La stabilité du Liban est d’autant plus capitale.

 


— Vous avez été le principal héros de la résistance lorsque la Syrie occupait le Liban. Et vous en avez payé le prix fort par un exil de 15 ans. Aujourd’hui, vos alliés du Hezbollah combattent contre Daesh en Syrie, et vous soutenez la légalité syrienne. Expliquez-nous votre position ?

 

Lorsqu’un pays occupe vos terres, vous devez le chasser. Mais ensuite, il faut rétablir des relations de bons voisinages. C’est ce que nous avons fait. Maintenant, si le régime de Bachar al-Assad devait s’effondrer et que les terroristes de Daesh devaient prendre le pays, ce serait un chaos pire qu’en Libye. L’engagement du Hezbollah a permis de protéger nos frontières et de préserver notre intégrité territoriale.

 


— Les Américains ont envoyé des armes au Liban pour aider l’armée à lutter contre Daesh et les Français devraient le faire d’ici avril. Mais tous deux soutiennent en même temps les rebelles contre Bachar el Assad qui combat lui aussi Daesh sur le terrain. C’est un peu une politique de pompier pyromane non ?

 

Malheureusement, l’attitude des Occidentaux est difficilement lisible et n’aide certainement pas à la pacification. Certains pensent se servir de groupes terroristes pour faire capituler Bachar al-Assad. Mais ensuite quoi ? C’est très dangereux. Si Daesh devait triompher en Syrie ou en Irak, même l’Europe et la Russie finiraient par être atteintes. N’oublions pas qu’en Tchétchénie notamment, la braise islamiste couve encore.

 


— Vous parlez de la Russie, comment voyez-vous cette nouvelle guerre froide entre Washington et Moscou qui a surgi de la crise ukrainienne.

 

Il était clair que la Russie ne pouvait pas accepter de perdre ses accès à la Méditerranée. Mais je ne crois pas à une confrontation directe. Les Européens ne l’accepteront pas. Une Ukraine fédérale paraît être une solution incontournable.

 


— En tant que responsable chrétien, votre alliance avec le Hezbollah chiite montre qu’un dépassement de ce confessionnalisme qui empoisonne la vie politique libanaise est possible. Un tel accord étendu aux sunnites serait une véritable révolution politique au Liban, et un modèle de cohabitation pour le monde entier ? Est-ce possible ?

 

Nous avons déjà fait la moitié du chemin pour cela. Nous devons veiller à l’équilibre entre les différentes confessions et à leur légitime représentation politique. C’est le fondement de mon action, car la stabilité du Liban passe par son unité.

 


— Face aux agressions israéliennes, une structure comme celle-là branche militaire du Hezbollah est manifestement la bonne réponse. Mais à long terme, comment voyez-vous la cohabitation ?

 

Au plan sécuritaire, notre accord avec le Hezbollah recouvre deux aspects : la résistance à l’expansionnisme israélien au Sud, et la lutte contre le terrorisme. Bien évidemment, une fois ces situations aplanies, beaucoup de solutions existent pour l’intégration de la branche militaire du Hezbollah dans le respect de la souveraineté nationale, par exemple sous la forme d’une force de réserve. Mais ce n’est pas la seule option. Ce qui est sûr, c’est que des solutions existent.

 


— Si vous êtes élu à la Présidence, dans quel domaine voudriez-vous agir en premier ?

 

Il y en a beaucoup en fait. Le Liban a cruellement besoin de réformes dans de nombreux domaines autant économiques que sociaux. Nous devons moderniser nos institutions.

 


— Vous pensez aux problèmes de confessionnalisme ?

 

Il faut éduquer les jeunes générations pour en finir avec l’esprit de clan ou la tentation du repli confessionnel.  La nation une et indivisible doit être le bien commun de tous. Il y a un immense travail à accomplir pour en finir avec les vieux réflexes. Cela ne se fera pas du jour au lendemain. Mais nous y arriverons.

 

 

 

Par entrefilets.com - le 9 mars 2015

Pour aller plus loin :

>>Entre 1988 et 1990, nous avons partagé le quotidien des Libanais durant la guerre dite «de Libération». Voici notre galerie photos.

>>La guerre de libération, 1988-1990

>>D’anciens articles sur le Liban

 


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Comment les États-Unis ont substitué Wall Street aux Nations Unies

Comment les États-Unis ont substitué Wall Street aux Nations Unies | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Photo : Alastair Crooke

 

 

Comment les États-Unis ont substitué

Wall Street aux Nations Unies

Par Alfredo Jalife-Rahme (*)

 

Jadis, le Conseil de sécurité des Nations Unies pouvait prendre des sanctions à l’encontre de personnes, de groupes ou d’États qui menaçaient la paix mondiale. Mais aujourd’hui, Washington utilise le vocable de « sanctions » pour masquer ses agressions économiques contre ceux qui lui résistent. Bien sûr, les « sanctions » unilatérales des États-Unis sont illégales en droit international. Il ne s’agit en réalité que d’embargos, forme moderne des sièges militaires.

 

Lors du Forum d’Istanbul, Alastair Crooke a offert un entretien d’une grande profondeur géostratégique à Yonca Poyraz Doğan, qui tient la rubrique Monday Talk dans le quotidien turc Today’s Zaman, pour l’édition en anglais [1].

 

Alastair Crooke a été fonctionnaire de haut rang dans le M16, avant d’être conseiller en politique extérieure de l’Union européenne et du sénateur états-unien George Mitchell ; il dirige actuellement le groupe de réflexion Conflicts Forum, qui a son siège à Beyrouth.

 

Citoyen britannique, Crooke est également l’auteur de l’ouvrage Résistance, l’essence de la révolution islamiste [2], et il approfondit ici des thèmes déjà développés par Juan C. Zarate, l’ancien vice-assistant de W. « Baby » Bush, dans son livre La guerre du Trésor : déclenchement d’une nouvelle ère de guerres financières [3] ; il reprend aussi le stratège financier James Rickards, qui avait présenté un exposé [4] à l’International Institute for Strategic Studies de Londres ; je m’étais moi-même basé sur leurs travaux pour offrir une conférence à l’Institut de Recherches Économiques de l’UNAM il y a deux ans.

 

 

 

Alastair Crooke explique donc en détail la nouvelle hégémonie US en termes de financiarisation de l’ordre global, à une époque où l’ordre international dépend plus du contrôle de la Réserve fédérale et du Trésor des USA que de l’ONU. Sa lecture géofinancière rend patente la suprématie du dollaro-centrisme de Wall Street par-dessus l’ordre légal caduc de l’ONU ; en effet le système de l’hégémonie du dollar n’a pas besoin de la dépendance US par rapport à l’ONU, et en laisse le contrôle au secrétariat au Trésor, contrôlé à son tour par David Steve Cohen, ce qui explique le fait que les instruments militaires sont devenus moins accessibles à l’administration états-unienne pour des raisons de politique extérieure. En effet, qui surveille donc le vigilant D. S. Cohen ?

 

Crooke considère que les USA et Wall Street sont parvenus à contourner l’ONU pour imposer leur ordre global « basé sur un système dollaro-centré » au moyen de « l’instrumentation de la position US comme contrôleur de toutes les transactions en dollars, ce qui permet de se passer de tous les vieux outils (sic) de la diplomatie et de l’ONU. »

 

À son avis, « le monopole de la devise de réserve est devenu l’instrument unilatéral US, déplaçant l’action multilatérale de l’ONU, tandis que les USA réclament que soit sous leur juridiction toute transaction formulée en dollars, partout dans le monde.

 

Jusqu’où les monétaristes de la Réserve fédérale et du Trésor US poussent-ils le mépris pour l’agonisante ONU ?

 

Aujourd’hui les USA ne tiennent plus compte de l’ordre international structuré autour de l’ONU et de son corpus de lois internationales, et ils tendent à imposer leurs « sanctions économiques pour faire pression sur certains (sic) pays. » Les sanctions économiques des USA se sont substituées aux lois internationales, tandis que la pléiade des financiers monétaristes israélo-anglo-saxons prend la place de la vieille garde des juristes de l’ONU.

 

L’année dernière, on a calculé que les transactions globales en dollars US correspondaient à un minimum de 65 % de l’échange de biens et de services, pourcentage qui a dû augmenter avec l’effondrement de l’euro et la guerre des devises qui a provoqué des dévaluations abruptes, depuis le yen japonais jusqu’au real brésilien.

 

Il faut souligner une coïncidence inédite : les chefs du colossal contrôle financier des USA, sont trois Israélo-Américains : David Steve Cohen, le surveillant en chef, Jack Lew, le secrétaire au Trésor, et Janet Yellen, gouverneur de la Réserve fédérale. Un énorme pouvoir financier…

 

David Steve Cohen est l’équivalent dans le Mexique néolibéral actuel, du point de vue opérationnel, d’Alberto Bazbaz Sacal, celui qui a négligé de porter son regard sur les pots-de-vin internes dans son Unité de Renseignement financier, du secrétariat aux Impôts, mais ne connaît aucune réprimande pour autant, et qui a ignoré la fraude étrange de Ficrea.

 

Quelles sont les chances de succès du nouvel ordre financier global imposé par Wall Street et les USA ?

 

La cosmogonie de Crooke est géofinancière : elle applique la géopolitique des finances aux grandes puissances, en particulier à la Chine et à la Russie, qui ont noué une alliance pour contrer la guerre financière entre les USA et la Russie, véritable conflit géostratégique qui se déploie en Ukraine, d’où émergera le Nouvel ordre mondial, ce qui est la thèse de notre blog [5].

 

Après la rude correction infligée par la banque israélo-anglo-saxonne à l’Iran, comme le signale le livre de Juan Zarate, et maintenant la guerre géofinancière contre la Russie, dans ses quadruples modalités, sanctions, effondrement du rouble et du pétrole, fuite massive de capitaux, le « système du pétrodollar qui cotise en dollars l’or noir, se trouve blessé à mort », selon Crooke, qui considère que la Chine a compris que la Russie constitue le premier domino ; si la Russie tombe, la Chine se retrouvera en première ligne. C’est pourquoi elles cherchent ensemble à créer un système financier parallèle (sic) déconnecté du système financier occidental, qui inclut la réplique du Swift et des entités comme la Banque de Développement Asiatique face au FMI.

 

Il faut encore ajouter la création de la nouvelle Banque de développement des BRICS et leur mini FMI lors du sommet de Fortaleza au Brésil, tellement important à mon avis qu’il a déclenché la fureur contre la Russie en Ukraine quelques jours plus tard (il faut comprendre dans ce cadre l’attentat contre le vol de la Malaysia Airlines, commis par les oligarques ukrainiens liés à l’OTAN).

 

Alastair Crooke signale que c’est la Chine, et non pas le FMI, qui est en train de sauver le Venezuela, l’Argentine et la Russie tandis que leurs devises s’effondrent, et il rapporte que la Chine se faisait déjà du souci pour le rouble à la mi-décembre, ce qui l’a poussée à intervenir pour arrêter la chute.

 

Les tendances financières sont favorables à la Chine, qui est en train de déplacer le FMI et la Banque mondiale et qui opère comme « barrière face à un système financier qui se trouve pris dans un virage dramatique pour évoluer et se distancer du contrôle occidental », ce qui touche de près le Proche-Orient et ses flux financiers provenant du pétrole.

 

Il annonce « la fin du système du pétrodollar pour recycler les revenus pétroliers de Wall Street », alors que la chute du prix du pétrole a créé subitement d’immenses turbulences financières qui ont mis en danger le système financier global.

 

Le long texte de l’entretien avec Crooke est fascinant : il révèle qui sont derrière les salafistes du groupe DAESH /ISIS/ISIL et nous fait comprendre comment l’effondrement artificiel des prix du pétrole a pour but de faire du tort à l’Iran et de faire pression sur la Russie pour leur faire changer d’attitude envers le président Baschar al Assad de Syrie, processus dans lequel les dérivés financiers de Wall Street ont joué un rôle décisif, comme ils le font maintenant avec les métaux précieux, en particulier l’or et l’argent.

 

  

Par Alfredo Jalife-Rahme (*) (La Jornada - Mexique) - Traduction Maria Poumier - RÉSEAU VOLTAIRE INTERNATIONAL - MEXICO (MEXIQUE) – le 4 MARS 2015

 

Notes :

[1] “Turkey might become hostage to ISIL just like Pakistan did”, Yonca Poyraz Doğan, Today’s Zaman, February 1, 2015.

[2] Resistance : The Essence of the Islamist Revolution, Alastair Crooke, Pluto Press (February 17, 2009), 328 pages.

[3] Treasury’s War : The Unleashing of a New Era of Financial Warfare, Juan Zarate, PublicAffairs (2013), 512 pages.

[4] Currencies of Power and the Power of Currencies : The Geopolitics of Currencies, Reserves and the Global Financial System, James Rickards, IISS Seminar (2012), 18 pages.

[5] Blog d’Alfredo Jalife-Rahme (en espagnol).

 

 

(*) Alfredo Jalife-Rahme : professeur de Sciences politiques et sociales à l’Université nationale autonome du Mexique (UNAM). Il publie des chroniques de politique internationale dans le quotidien La Jornada et l’hebdomadaire Contralínea. Dernier ouvrage publié : El Hibrido Mundo Multipolar : un Enfoque Multidimensional (Orfila, 2010).

 

 

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Le général Clark révèle que Daesh est un projet israélien

Le général Clark révèle que Daesh est un projet israélien | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it


Le général Clark révèle que

Daesh est un projet israélien

 

Le général Wesley Clark, ancien suprême commandeur de l’OTAN, a déclaré à CNN que l’Émirat islamique (dit « Daesh ») (NDLGazette : l’EII devient l’État islamique en Irak et au Levant [EIIL] ou État islamique en Irak et al-Sham, parfois désigné par l’acronyme anglais ISIS ou par l’acronyme arabe Daech ou Daesh – source Wikipédia) avait été « créé par nos amis et nos alliés pour vaincre le Hezbollah ». Le général Clark mettait ainsi clairement en cause la responsabilité d’Israël.

 

Depuis 2001, le général Clark est le porte-parole d’un groupe d’officiers supérieurs opposés à l’influence israélienne sur la politique extérieure des États-Unis, à ses développements impérialistes agressifs et au remodelage du « Moyen-Orient élargi ». Il s’était opposé au déploiement de troupes en Irak, et aux guerres contre la Libye et contre la Syrie.

 

 

 

PAR LE RÉSEAU VOLTAIRE INTERNATIONAL - 21 FÉVRIER 2015

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