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Vers la fin du système Erdoğan - partie 2/2

Vers la fin du système Erdoğan - partie 2/2 | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Photo : l’islamiste Recep Tayyip Erdoğan prend la succession du prince saoudien Bandar bin Sultan après l’attentat qui l’écarte de la scène en 2012 et devient le coordinateur du terrorisme international. Il prend la succession du Qatar en 2014 lorsque celui-ci doit renoncer à parrainer les Frères musulmans et devient ainsi le vrai leader de la Confrérie. Grisé par son succès, il se croit indispensable aux États-Unis et viole les règles de l’OTAN en signant le traité Turkish Stream avec la Russie.

 

 

 

Vers la fin du système Erdoğan – partie 2/2

 

 

 

L’implication publique de la Turquie dans le conflit

 

La Turquie tira un grand profit de la guerre contre la Syrie. D’abord en organisant le pillage de ses trésors archéologiques. Un marché public fut même installé à Antioche pour que les collectionneurs du monde entier puissent acheter les pièces volées et passer commande des œuvres à voler. Puis en organisant le pillage industriel d’Alep, la capitale économique de la Syrie. La Chambre de Commerce et d’Industrie d’Alep a montré comment les usines ont été systématiquement démontées, les machines-outil transférées en Turquie sous l’œil vigilant du MIT. Les Syriens ont porté plainte en Justice, mais leurs avocats turcs ont immédiatement été arrêtés par l’administration Erdoğan et sont toujours emprisonnés.

 

L’Armée turque n’a longtemps qu’envoyé des Forces spéciales en Syrie — plusieurs soldats turcs ont été faits prisonniers par l’Armée arabe syrienne. Cependant, elle a coordonné l’attaque du village chrétien de Maaloula, en septembre 2013 ; un village qui n’offre aucun intérêt stratégique, mais qui est le plus ancien lieu de culte chrétien au monde. Surtout, en mars 2014, l’Armée turque entrait en Syrie pour escorter les jihadistes du Front Al-Nosra (Al-Qaïda) et de l’Armée de l’islam (pro-Saoudien) jusqu’à la ville arménienne de Kassab avec la mission de massacrer les habitants dont les grands-parents avaient fui le génocide perpétré par les ottomans [11]. Sans surprise, la France et les États-Unis s’opposèrent à une condamnation de cette agression par le Conseil de sécurité. Par la suite, l’Armée turque est entrée plusieurs fois en territoire syrien, mais n’y a jamais livré d’autres batailles.

 

Formé aux États-Unis, Hakan Fidan, est devenu l’agent de liaison entre l’état-major de l’OTAN et la Turquie durant la guerre du Kosovo (1998). Homme de confiance de Recep Tayyip Erdoğan, il est nommé en 2003 directeur de la TIKA, l’agence qui développe les liens avec les turcophones d’Asie centrale et soutient le Hizb ut-Tahrir (une scission des Frères musulmans qui mène une campagne terroriste dans la vallée de Ferghana). En 2007, il intègre le cabinet du Premier ministre Erdoğan et devient administrateur de l’AIEA. En 2010, il est nommé chef des services secrets (MIT). Il organise les camps de jihadistes en Turquie et leur approvisionnement en Syrie, y compris pour Daesh. Surtout, il tente d’impliquer les États-Unis dans la guerre contre la Syrie en organisant l’attaque chimique de la ghoutta et en l’attribuant au président el-Assad (août 2013). Suite à la signature de l’accord Turkish Stream avec la Russie, il entre en conflit avec M. Erdoğan et démissionne, mais le 9 mars 2015, il renonce à se présenter aux élections législatives et reprend ses fonctions de chef des services secrets.

 

 

Le poids des crimes de Recep Tayyip Erdoğan

 

La presse turque a largement traité les crimes de l’administration Erdoğan, ce qui lui a définitivement aliéné les populations alévies (proches des alaouites) et kurdes. Les premiers soutiennent massivement le CHP et les seconds le HPD. Mais c’était insuffisant pour faire chuter le nouveau Sultan.


L’erreur est survenue le 1er décembre 2014, lorsque M. Erdoğan a signé un gigantesque accord économique avec le président Poutine, qu’il perçoit comme un Tsar et donc comme un modèle. Peut-être a-t-il craint que les États-Unis se retournent contre lui, une fois la Syrie tombée, à la manière dont ils s’étaient retournés contre Saddam Hussein une fois l’Iran épuisé. Toujours est-il qu’en prétendant jouer sur les deux tableaux, l’Est et l’Ouest, M. Erdoğan a perdu le soutien que lui apportait sans défaillir la CIA depuis 1998.

 

 

En septembre 2012, Recep Tayyip Erdoğan, François Hollande et Laurent Fabius ourdirent un complot pour faire assassiner le président Bachar el-Assad. L’opération échoua.



Le parcours de Recep Tayyip Erdoğan

 

Adolescent, M. Erdoğan pensait entreprendre une carrière de footballeur. Meneur d’hommes, personnalité charismatique, il vécu dans la rue à tête d’un groupe de délinquants. Il rejoignit rapidement la Millî Görüş (littéralement : « Vision nationale », doit être compris dans le contexte de la censure comme « Islam politique ») de Necmettin Erbakan, dont le programme était la réislamisation de la société. Il milita dans un groupe d’extrême droite anticommuniste et participa à diverses manifestations anti-juives et antimaçonniques.

 

Élu au Parlement en 1991, il fut interdit d’occuper ses fonctions en raison du coup d’État et de la répression qui s’abattit sur les islamistes. Élu maire d’Istanbul, en 1994, il exerça ses fonctions sans imposer sa vision islamiste. Cependant, au moment de l’interdiction de son parti, il fut condamné pour avoir récité lors d’un de ses discours un poème panturfiste. Il purgea 4 mois de prison et fut interdit de se présenter aux élections.

 

Libéré, il prétendit avoir rompu avec les erreurs du passé. Il abandonna sa rhétorique anti-occidentale, provoquant la division du mouvement de Necmettin Erbakan. Avec l’aide de l’ambassade US, il fonda alors l’AKP, un parti à la fois islamiste et atlantiste auquel il intégra non seulement ses amis de la Millî Görüş, mais aussi les disciples de Fetullah Güllen, et les anciens partisans de Turgut Özal. Ce dernier était un kurde sunnite qui fut président de 89 à 93. L’AKP gagna les élections de 2002, mais celles-ci furent annulées. Il gagna également les élections de 2003, ce qui permit à Recep Tayyip Erdoğan de devenir enfin Premier ministre, son interdiction politique étant terminée.

 

Arrivé au pouvoir, M. Erdoğan oublia d’imposer ses vues islamistes. Il développa l’économie avec l’aide des États-Unis, puis à partir de 2009 mit en œuvre la théorie du professeur Ahmet Davutoğlu (un disciple de Fetullah Güllen) de « zéro problème avec nos voisins ». Il s’agissait de résoudre, avec un siècle de retard, les conflits hérités de l’Empire ottoman. Entre autres choses, il mit en place un marché commun, en 2009, avec la Syrie et l’Iran, provoquant un boom économique régional.

 

 

L’AKP et les Frères musulmans

 

Bien qu’ayant une histoire différente, la Millî Görüş manifesta toujours un intérêt pour les Frères musulmans égyptiens. Aussi traduisit-elle les œuvres d’Hassan el-Banna et de Saïd Qotb.

 

L’AKP se rapprocha officiellement des Frères musulmans lors de la guerre conduite par Israël contre les Gazaouites, en 2008-09. Ce qui conduisit le gouvernement Erdoğan à soutenir et à participer au projet de Flottille de la liberté organisé par les Frères sous couvert d’une association humanitaire, l’IHH, et sous l’œil vigilant de la CIA [12].

 

Dès les premiers jours du printemps arabe, l’AKP soutenait Rached Ghannouchi en Tunisie, Mahmoud Jibril en Libye et Mohamed Morsi en Égypte. Le parti fournit des spécialistes en communication politique aux Frères musulmans et les conseilla pour imposer leur vision commune de l’islam dans leurs sociétés respectives.

 

Signe de cette alliance, M. Erdoğan facilita, en septembre 2011, la création à Istanbul du Conseil national syrien, appelé à devenir le gouvernement syrien en exil ; une instance entièrement contrôlée par les Frères musulmans [13].

 

En 2012, M. Erdoğan accueillit au congrès de l’AKP les leaders des Frères musulmans au pouvoir, l’Égyptien Mohamed Morsi et le Palestinien Khaled Meschal. De même, il organisa une conférence des Frères, le 10 juillet 2013, auquel participèrent Youssef Nada, Mohammad Riyad al-Shafaka (le guide des Frères en Syrie) et Rached Ghannouchi. Par précaution, ce sont ses anciens amis de la Millî Görüş et non l’AKP qui lancèrent les invitations.

 

Lorsqu’en septembre 2014, le Qatar évite une guerre avec l’Arabie saoudite en invitant les Frères musulmans à quitter l’Émirat, M. Erdoğan saisit à nouveau sa chance et se trouve seul parrain de la Confrérie au plan international.

 

 

L’avenir de la Turquie

 

C’est par facilité que l’on a considéré Recep Tayyip Erdoğan comme un néo-ottoman. Son projet n’a jamais été de reconstituer l’Empire, mais d’en créer un nouveau avec ses propres règles. Il a cru pouvoir s’appuyer alternativement sur le fantasme du Califat (avec le Hizb ut-Tahrir, puis avec Daesh) ou celui du panturkisme (« la vallée des loups »).

 

C’est également à tort qu’on l’a décrit comme un politicien autoritaire. En réalité, il s’est toujours comporté comme un chef de meute et l’on ne dit pas d’un caïd qu’il est autoritaire. Pris en flagrant délit, dans de nombreuses affaires criminelles, il a toujours réagi en niant les évidences et en limogeant ou en arrêtant les policiers et les magistrats qui appliquaient la loi.

 

Même si Recep Tayyip Erdoğan parvenait à soudoyer le MHP, ou tout au moins 18 de ses députés, pour former une coalition gouvernementale, son parti ne restera pas longtemps au pouvoir.


De manière à être certains de ne plus avoir à affronter l’AKP, les États-Unis devraient en favoriser la division en encourageant les disciples de Fetullah Güllen et les partisans de feu le président Turgut Özal à former leur propre parti.

 

Le gouvernement qui succédera à l’AKP devra rapidement libérer les prisonniers politiques et poursuivre les leaders islamistes corrompus, puis abroger diverses lois islamistes pour satisfaire l’opinion publique. Il mettra fin à l’implication de la Turquie dans la guerre d’agression contre la Syrie, mais devrait faciliter l’exfiltration des jihadistes par la CIA, d’Irak et de Syrie vers une autre destination. Il bénéficiera du soutien financier des États-Unis dès qu’il aura remis en question le Traité signé par le président Erdoğan avec le président Poutine.

 

La chute de l’AKP devrait provoquer un repli des Frères musulmans sur le Qatar, seul État qui leur soit désormais favorable. Elle devrait aussi éclaircir l’horizon en Tunisie et en Libye, et favoriser la paix en Syrie et en Égypte.

 

 

 

Par Thierry Meyssan - RÉSEAU VOLTAIRE | DAMAS (SYRIE) | 15 JUIN 2015

 

 

Thierry Meyssan :Consultant politique, président fondateur du Réseau Voltaire et de la conférence Axis for Peace. Dernier ouvrage en français : L’Effroyable imposture : Tome 2, Manipulations et désinformations (éd. JP Bertand, 2007). Compte Twitter officiel.

 

 

Notes :

[11] « Pour Ankara, le massacre est-il une option politique ? », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 27 octobre 2014.

[12] « Flottille de la liberté : le détail que Netanyahu ignorait », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 6 juin 2010.

[13] Le Conseil a été initialement présidé par le professeur Burhan Ghalioun, présenté par la presse occidentale comme un « militant laïque » alors qu’il était depuis 2003 le conseiller politique d’Abbassi Madani (président du Front islamique du salut en Algérie). Le Conseil est aujourd’hui présidé par Georges Sabra, présenté comme un « chrétien marxiste », alors qu’il vient d’accomplir son pèlerinage à la Mecque.

Koter Info's insight:


>>> Voir la partie 1/2 ici


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Bouleversement des intérêts US au Levant

Bouleversement des intérêts US au Levant | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Photo : alors que viennent de se tenir à Moscou, sous la présidence de Sergei Lavrov, deux jours de consultation entre le gouvernement syrien et 32 responsables de son opposition, presque tout le monde à Washington souhaite une victoire de Bachar el-Assad. Seuls les partis syriens qui soutiennent le principe de la lutte contre les jihadistes pourront participer au futur gouvernement d’union nationale.

 

 

 

Bouleversement des intérêts US au Levant

Par Thierry Meyssan (*)

 

Alors que la guerre contre la Syrie avait été décidée en 2001 pour briser « l’Axe de la Résistance », pour faire main basse sur ses réserves de gaz, et remodeler le « Moyen-Orient élargi », les priorités de Washington ont été bouleversées. Le nouvel objectif est de stopper la contagion terroriste que tous les États impliqués alimentent et qu’aucun ne parvient plus à contrôler. Le complexe militaro-industriel, les notables de Washington et de grands médias espèrent désormais la victoire de la Syrie de Bachar el-Assad. 

 

La situation au Levant est susceptible d’évoluer rapidement d’une part en raison de la crise d’autorité à Washington et d’autre part à cause de l’accession du prince Salman au trône saoudien. Cette évolution pourrait être facilitée par une alternance politique en Israël.

 

En premier lieu, la crise d’autorité qui paralyse les États-Unis continue à mobiliser la classe dirigeante. Après l’appel du président honoraire du Council on Foreign Relations (CFR) pour que le président Obama s’entoure de personnalités expérimentées des deux camps [1], le New York Times a consacré un éditorial [2] à un rapport publié en octobre par la Rand Corporation [3].

 

Le principal think tank dédié aux questions militaires a opéré un retournement à 180° en un an. Selon lui, la victoire de la République arabe syrienne est désormais « l’option la plus souhaitable » pour les États-Unis, tandis que sa chute serait « la pire des issues ». Les groupes armés ont perdu tout soutien au sein de la population urbaine, les défections se sont interrompues depuis plus d’un an, et l’armée syrienne poursuit sa libération du pays. Au demeurant, poursuit la Rand, la victoire syrienne ne profitera pas à l’Iran tant que Daesh restera présent en Irak. L’institut pronostique que les États qui ont jusqu’à présent alimenté les jihadistes vont cesser de le faire. En effet, ils ne peuvent plus espérer vaincre la Syrie de cette manière et craignent désormais que les jihadistes ne se retournent contre eux. Par conséquent, conclut la Rand, il n’y aura pas de solution négociée avec les États sponsors, mais une claire victoire du « régime » à laquelle les États-Unis devraient être associés.

 

On observera le changement radical de position du complexe militaro-industriel. Il y a un an, la Rand préconisait de bombarder la Syrie comme la Libye, et de mener une action limitée au sol en créant des zones protégées, administrées par les « révolutionnaires ». Aujourd’hui, elle admet implicitement qu’il n’y a jamais eu de révolution en Syrie et, qu’après un long moment d’hésitation sur son avenir, la majorité sunnite soutient à nouveau la République laïque.

 

L’ambiance aujourd’hui à Washington ressemble à celle du début 2006, lorsque l’armée de Terre était enlisée en Afghanistan et en Irak et que Donald Rumsfeld tentait de cacher la défaite. À l’époque, le Congrès créa la Commission Baker-Hamilton. Celle-ci à l’issue de huit mois de travaux conclut que les Forces US ne parviendraient pas à stabiliser les pays qu’elles occupaient sans l’aide de l’Iran et de la Syrie. Le tableau de la situation militaire qu’elle dressa était si effrayant que les États-Uniens sanctionnèrent George W. Bush aux élections de mi-mandat. Le président sacrifia alors Rumsfeld et le remplaça par un membre de la Commission, Robert Gates. Le nouveau secrétaire à la Défense conclut des accords de terrain avec Téhéran et Damas, acheta les principaux groupes de la Résistance irakienne (la carotte) et augmenta le nombre de troupes sur place (le bâton) jusqu’à stabiliser la situation.

 

Deuxièmement, en Arabie, le nouveau roi Salman a d’abord tenté de limoger tous les anciens partisans de son prédécesseur, allant même jusqu’à congédier le prince Miteb et le secrétaire général du palais deux heures après la mort du roi Abdallah. Puis, il est revenu sur ses décisions après avoir reçu les condoléances de son suzerain états-unien. En définitive, Miteb sera le seul survivant de l’ère précédente, tandis que le prince Bandar a été renvoyé. Or, Bandar entretenait Daesh, avec l’aide de la CIA, de manière à faire pression sur le roi Abdallah dans l’intérêt du clan des Sudeiris.

 

Son éviction, exigée par le président Obama, marque probablement la fin de la prédominance saoudienne sur le terrorisme international. Cette fois — la quatrième — devrait être la bonne :

 

— en 2010, le prince avait été banni pour avoir tenté d’organiser un coup d’État, mais il était revenu à la faveur de la guerre contre la Syrie ;

— en 2012, il avait été victime d’un attentat en rétorsion de l’assassinat des membres du Conseil syrien de sécurité nationale, mais il était revenu aux affaires un an plus tard, affaibli et obsessionnel ;

— en 2014, John Kerry exigeait à nouveau son renvoi, mais il revenait sur le devant de la scène à la faveur de la crise égyptienne ;

— il vient d’être sacrifié par son propre clan ce qui ne lui laisse pas de perspective de retour à court ou moyen terme.

 

Troisièmement, l’attaque du Hezbollah par Israël suivie de la riposte du Hezbollah contre Israël met paradoxalement en évidence la faiblesse de Benjamin Netanyahu en pleine période électorale. Le Premier ministre sortant espérait que la Résistance libanaise serait incapable de riposter à son agression et qu’il sortirait auréolé de cet affrontement. Son erreur de calcul pourrait lui coûter son poste, pour la plus grande joie de la Maison-Blanche qui ne masquait plus depuis longtemps son exaspération devant son fanatisme.

 

Des évolutions à Washington, à Riyad et peut-être bientôt à Tel-Aviv, on peut raisonnablement conclure que dans les mois à venir, les États-Unis vont concentrer leurs efforts pour exclure Daesh du Levant et le projeter, hors de leur zone d’influence, contre la Russie et la Chine. De son côté, l’Arabie saoudite devrait essayer à la fois de sauver son autorité chez ses voisins, au Bahrein et au Yémen, tout en apportant son aide au grand perdant de la guerre contre la Syrie, le président Recep Tayyip Erdoğan, que les États-Unis ont décidé de faire chuter.

 

Cette évolution sera plus ou moins longue selon les résultats électoraux à Tel-Aviv. Bien que les jihadistes soient devenus une menace pour la stabilité de tous les États du Levant, y compris Israël, M. Netanyahu pourrait continuer à mettre son aviation et ses hôpitaux à leur service. Mais on imagine mal qu’il persiste lorsque tous les autres États de la région les combattront. Au contraire, dans le cas où le Premier ministre perdrait les élections, son successeur prêterait immédiatement main-forte aux États-Unis contre les jihadistes.

 

Une fois encore, Damas, la plus vieille ville habitée au monde, aura survécu aux barbares qui voulaient la détruire.

 

 

 

Par Thierry Meyssan (*) - RÉSEAU VOLTAIRE INTERNATIONAL -DAMAS (SYRIE) - LE 3 FÉVRIER 2015

 

 

Notes :

[1] « Washington se révolte contre Obama », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire, 26 janvier 2015.

[2] “Shifting Realities in Syria”, The Editorial Board, The New York Times Sunday Review, 24 janvier 2015.

[3] Alternative Futures for Syria. Regional Implications and Challenges for the United States, Andrew M. Liepman, Brian Nichiporuk, Jason Killmeyer, Rand Corporation, October 22, 2014.

 

 

 

(*) Thierry Meyssan : consultant politique, président fondateur du Réseau Voltaire et de la conférence Axis for Peace. Dernier ouvrage en français : L’Effroyable imposture : Tome 2, Manipulations et désinformations (éd. JP Bertand, 2007). Compte Twitter officiel.

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Petit précis de logistique : d’où viennent les armes de l’EIIL ?

Petit précis de logistique :  d’où viennent les armes de l’EIIL ? | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it


Petit précis de logistique :

D’où viennent les armes de l’EIIL ?

 

Voici une analyse concernant l’État Islamique que l’on peut qualifier de rare. Car dès qu’il s’agit de cette engeance, il y a comme une sorte de gel des neurones chez les intellectuels, ce qui les oblige à ressortir les clichés et les leçons apprises dans les livres des recettes de la propagande selon lesquels DAECH a la capacité de réaliser ce qu’aucune armée au monde ne saurait faire. Il n’est pas besoin de l’École de Guerre pour savoir que les exploits militaires qui sont prêtés à DAECH ne peuvent être réalisés sans une aide logistique extérieure, aide abordée dans les médias de manière toujours pudique avec tout le floutage nécessaire. Tony Cartalucci lui, n’a aucune pudeur à appeler un chat un chat. RI

 

 ***

 

Depuis les anciens temps, une armée a toujours demandé un grand soutien logistique afin d’être performante dans quelque campagne militaire que ce soit. Dans la Rome antique, on construisit un vaste réseau de routes non seulement pour faciliter transport et commerce, mais aussi pour permettre aux légions romaines de se déplacer bien plus rapidement là où on en avait besoin et aussi pour accélérer le processus de ravitaillement très important que suscitaient ces légions.


À la fin du XVIIIe siècle, le général français et stratège expert Napoléon Bonaparte notait qu’« une armée marche sur son estomac », se référant au réseau logistique extrême nécessaire pour maintenir une armée en campagne bien nourrie et ainsi maintenir sa capacité de combat. Pour les Français, leur incapacité à maintenir une logistique et un ravitaillement adéquats à leurs forces combattantes, notamment en Russie et la décision des Russes de pratiquer la stratégie de la terre brûlée afin d’empêcher les forces françaises envahisseuses de se nourrir sur le pays, finalement les vainquirent.

 

L’Allemagne nazie souffrait d’un destin similaire lorsqu’elle étira par trop ses capacités logistiques lors de l’opération Barbe Rousse d’invasion de l’URSS. Une fois de plus, les armées de l’envahisseur furent bloquées par leurs ressources limitées avant d’être coupées de leur ravitaillement et annihilées ou forcées de battre en retraite.

 

Dans les temps plus récents, pendant la guerre du Golfe du début des années 1990, une longue ligne de ravitaillement trop loin des troupes alliées envahissant l’Irak ainsi qu’un choc anticipé avec le gros des forces de Saddam Hussein mirent un coup d’arrêt à ce qui fut autrement une avance éclair et qui fut comprise par erreur comme ayant pu atteindre Bagdad si la volonté politique y avait été. La volonté de conquérir était présente, c’est l’intendance qui ne suivait pas…

 

Aussi claires que soient les leçons de l’histoire, elles semblent toujours disparaître avec la troupe de politiciens et d’agences de presse occidentale qui est soit totalement ignorante, soit incroyablement trompeuse.

 

 

Les lignes de soutien logistique de l’EIIL

 

Le conflit actuel qui consume le Moyen-Orient, particulièrement en Irak et en Syrie où le soi-disant « État Islamique » EI ou EIIL opère et combat simultanément, battant, les forces régulières syriennes, libanaises, irakiennes et iraniennes, est nous dit-on, bâti sur un réseau logistique de marché noir de la vente de pétrole et de paiements de rançons.

 

La capacité de combat de l’EIIL est celle d’un État-nation. Il contrôle de vastes portions de territoires s’étalant de la Syrie à l’Irak et il est non seulement capable de défendre militairement ce territoire étendu, mais il possède les ressources pour l’occuper, incluant des ressources pour administrer les populations subjuguées en son sein (NDT : comme un nouvel État COLONIAL tiens, tiens…)

 

Pour les analystes militaires, surtout les anciens des forces armées occidentales et aussi les membres des médias occidentaux qui se rappellent les convois de camions gigantesques qui furent requis pour pouvoir envahir l’Irak dans les années 1990 puis de nouveau en 2003, ils se demandent tous aujourd’hui où sont les camions de l’EIIL ? Après tout, si les ressources pour maintenir la capacité de combat exhibée par l’EIIL étaient disponibles au sein des seuls territoires syriens et irakiens occupés, alors certainement que les forces irakiennes et syriennes posséderaient également une capacité de combat au moins égale sinon supérieure à celle de l’EIIL, mais elles ne l’ont tout simplement pas.

 

Et si les lignes logistiques de ravitaillement de l’EIIL étaient uniquement confinées sur le territoire irakien et syrien, alors certainement que les forces régulières irakiennes et syriennes utiliseraient un des grands avantages qu’elles ont leur possession, leur puissance aérienne, pour couper la ligne de ravitaillement des combattants de l’EIIL de sa source. Mais ceci ne se produit pas et… IL Y A UNE TRÈS BONNE RAISON À CELA.

 

Les lignes de ravitaillement de l’EIIL sillonnent précisément des endroits où les forces aériennes irakienne et syrienne ne peuvent pas aller. Au nord chez le voisin turc membre de l’OTAN et au sud-ouest chez les alliés des États-Unis que sont la Jordanie et l’Arabie Saoudite. Au-delà de ces frontières existe un réseau logistique qui s’étend sur une région qui englobe l’Europe de l’Est et l’Afrique du Nord.

 

Les terroristes et les armes qui furent laissés après l’intervention de l’OTAN en Libye en 2011 furent rapidement envoyés en Turquie puis en Syrie, le tout coordonné par les officiels du ministère des Affaires étrangères américain et des services de renseignement basés à Benghazi, un nid de terroristes depuis des décennies.

 

Dans un article de 2013, The London Telegraph rapportait, « CIA « running arms smuggling team in Benghazi when consulate was attacked », » que :

 

[CNN] a dit qu’une équipe de la CIA travaillait dans une annexe proche du consulat sur un projet de fournir des missiles libyens récupérés aux rebelles syriens. Des armes provenaient également d’Europe de l’Est comme le rapportait le New York Times dans un article de 2 013, « Arms Airlift to Syria Rebels Expands, With Aid From C.I.A., » que : 

Depuis des bureaux dans des endroits tenus secrets, des officiers des services actions du renseignement américain avaient aidé des gouvernements arabes à faire leurs emplettes d’armes, incluant de larges livraisons en provenance de la Croatie et ont parlementé avec les chefs rebelles pour savoir qui devrait recevoir les armes à leur arrivée, d’après des officiels américains parlant sous condition d’anonymat. »

 

Quand les sources médiatiques occidentales se réfèrent continuellement à l’EIIL et autres factions opérant sous la bannière d’Al Qaïda comme à des rebelles « modérés », il est très clair que si ces milliards de dollars d’armement allaient vraiment à ces « rebelles modérés » alors ce serait eux et non pas l’EIIL, qui domineraient le champ de bataille, or ce n’est pas le cas.

 

De récentes infos ont révélé que dès 2012 le ministère de la Défense des USA n’avait pas seulement anticipé la création d’une « principauté salafiste » s’étendant de la Syrie à l’Irak, précisément là où existe l’EIIL aujourd’hui, mais qu’il l’encourageait vivement et contribuait aux circonstances de sa création et réalisation pratique.

 

 


Quel est le degré d’extension des lignes

de logistique de l’EIIL ?

 

Alors que beaucoup en Occident jouent les ignorants sur la manière dont l’EIIL obtient son approvisionnement afin de maintenir optimale sa capacité de combat, quelques journalistes se sont rendus dans la région et ont filmé et rapporté les convois de camions sans fin qui suppléent l’armée terroriste.

 

Est-ce que ces camions roulaient depuis des usines saisies par l’EIIL dans les territoires irakiens et syriens ? Non. Ils venaient de loin en Turquie, traversant la frontière syrienne en toute impunité et se dirigeaient vers leurs destinations sous la protection évidente de l’armée turque. Les tentatives par l’aviation syrienne d’attaquer ces convois de ravitaillement et les terroristes qui les accompagnent ont été contrées par la défense antiaérienne turque…

 

La chaîne internationale allemande Deutsche Welle (DW) a publié le premier constat vidéo d’un média occidental illustrant et documentant que l’EIIL n’est pas fourni par la vente au marché noir de pétrole ou par l’argent issu de rançons d’otages, mais par des ravitaillements valant des milliards de dollars transportés en Syrie depuis la Turquie, membre de l’OTAN. La frontière turco-syrienne voit passer des centaines de camions par jour…

 

Le rapport intitulé, « ‘IS’ supply channels through Turkey, » confirme ce qui a été rapporté par des analystes politiques (reported by geopolitical analysts) depuis 2011 à savoir que l’EIIL ne peut survivre et ne survit de fait que grâce à un énorme sponsorship d’état multinational incluant évidemment la Turquie elle-même.

 

En regardant les cartes du territoire tenu par l’EIIL et en lisant les rapports d’action de ses manœuvres offensives à travers la région et au-delà, on peut facilement imaginer les centaines de camions par jour que cela nécessite pour maintenir un tel niveau de capacité combattante.. On peut facilement imaginer des convois similaires traversant les frontières de l’Irak en provenance de la Jordanie et de l’Arabie Saoudite. Des convois similaires passent certainement en Syrie depuis la Jordanie.

 

Ainsi, considérant les réalités logistiques et leur importance de tout temps dans les campagnes militaires au travers de l’histoire humaine, il n’y a pas d’autre explication plausible quant à la capacité de l’EIIL de perpétrer une guerre en Syrie et en Irak sans avoir les immenses ressources qui lui sont envoyées depuis l’étranger.

 

Si une armée marche sur son estomac et les estomacs de l’EIIL sont remplis des vivres en provenance de l’OTAN et du Golfe, alors l’EIIL continuera à marcher pendant longtemps, probablement même de plus en plus vite. Le point clef pour briser les reins de l’EIIL est de briser les reins de sa ligne de ravitaillement. Pour pouvoir le faire néanmoins, et précisément c’est pour cela que le conflit traîne tant en longueur, il faudrait que l’Irak, la Syrie et l’Iran et autres pays sécurisent éventuellement leurs frontières et forcent l’EIIL à combattre en Turquie, en Jordanie et en Arabie Saoudite, scénario difficile à mettre en place, car des nations comme la Turquie ont créé des zones tampons de facto en territoire syrien qui demanderait une confrontation directe avec les forces turques pour les éliminer.

 

Avec l’Iran rejoignant l’équipée avec le déploiement supposé de quelques milliers de soldats pour renforcer les opérations de l’armée syrienne, de grands principes de dissuasion pourraient empêcher la Turquie de renforcer ses zones tampons.

 

Ceci nous laisse avec cette perspective de la région totalement tenue en otage par l’OTAN avec la perspective d’une guerre régionale catastrophique dans le but de défendre et de perpétuer le carnage perpétré par l’EIIL en Syrie, le tout totalement soutenu de manière sous-jacente par un réseau logistique émanant de territoires de l’OTAN.

 

 

Par Tony Cartalucci (journal-neo.org) – Résistance 71 - reseauinternational.net – le 13 juin 2015

 

 

Note de Résistance 71 :

N’oublions jamais que l’OTAN = Organisation Terroriste de l’Atlantique Nord. Ceci est une fois de plus prouvé. Quand assez est-il assez ?…


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