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Le Yémen sous le feu de la « pax saoudia »

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Carte : lalsace.fr - Infographie AFP


  

Le Yémen sous le feu de la « pax saoudia »

 Par René Naba


« Quiconque atteindra la suprématie maritime dans l’océan Indien serait un joueur important sur la scène internationale », soutenait déjà au siècle dernier le Contre-amiral Alfred Thayus Mahan (1840-1914), géostratège de la Marine des États-Unis, soulignant par là le véritable enjeu stratégique de la nouvelle guerre du Yémen.

 

 

Analyse

 

Le président yéménite, Hadi, réfugié en Arabie Saoudite essaye de remettre une main sur le pays alors que son hôte bombarde le Yémen de manière accrue pour repousser les rebelles Houtis. L’Arabie Saoudite, avec le soutien des États-Unis, emmène une coalition de dix pays (Bahreïn, Qatar, Émirats arabes unis, Koweït, Soudan, Maroc, Pakistan, Égypte et Jordanie) pour tenter de reprendre le contrôle du pays. Les victimes civiles se comptent déjà par dizaines de morts. Le chef de la milice Houti a d’ores et déjà réagi qualifiant cette « agression » de « totalement injustifiée » et appellation à la lutte armée. Un carnage est en cours…

 

 

Flash-Back sur une guerre oubliée

 

Le Yémen fut le champ d’affrontement égypto-saoudien dans la décennie 1960 pourrait redevenir, par tribus interposées, le terrain de confrontation des nouvelles puissances régionales, l’Iran, d’une part, l’Arabie saoudite soutenue par les États-Unis d’autre part. Le repositionnement d’Al Qaida a été opéré dans cette optique-là. Situé à la pointe sud-ouest de la péninsule arabique, frontalier de l’Arabie saoudite au Nord, et du Sultanat d’Oman, à l’Est, le Yémen possède une façade maritime d’une longueur de 1 906 km de côtes, faisant la jonction entre la Méditerranée et l’Océan indien via le canal de Suez et le Golfe arabo-persique. Jamais colonisé, ce pays, placé selon son étymologie à droite sur le chemin du pèlerinage de la Mecque, couvre une surface de 527 970 km2, soit presque autant que la France. Via ses trois îles — Kamran, Perrin, et Socotra —, il commande l’accès à la mer Rouge par le détroit de Bab el-Mandeb, et l’île de Socotra (la plus grande des îles) dans l’océan Indien. Signe de l’importance stratégique de la zone, le Royaume-Uni, du temps du protectorat britannique sur l’Arabie du sud, avait fait du port d’Aden, la grande ville du sud Yémen, la place forte de la présence britannique à l’Est de Suez pour la sécurisation de la route des Indes.

 

La militarisation des voies maritimes figure d’ailleurs parmi les objectifs de Washington dans cette zone de non-droit absolu qui relie la Méditerranée à l’Asie du Sud-est et à l’Extrême-Orient par le canal de Suez, la mer Rouge et le golfe d’Aden. Sur les vingt plus grands ports porte-conteneurs, treize sont situés en Asie. En 2020, l’Asie assurera plus de la moitié des productions mondiales. En superposition à la base de drones installée en Arabie saoudite, les États-Unis caressent le projet d’édifier une base aéronavale à l’ile sud-yéménite Socotra en vue de superviser le mouvement des navires du golfe d’Aden et contribuer à la lutte contre la piraterie maritime, corrosive pour l’image de l’Occident dans le tiers monde. À lui seul, le golfe d’Aden représente 660 000 kilomètres carrés, mais la zone de rayonnement des pirates s’étend désormais jusqu’aux Seychelles, soit deux millions de km2. Les côtes somaliennes courent sur 3 700 kilomètres, relevant de trois États, mais le plus souvent hors de toute juridiction. Vingt mille navires empruntent cette autoroute maritime chaque année, transportant le tiers du ravitaillement énergétique de l’Europe.

 

 

La doctrine Obama

 

L’Éthiopie, pays africain non musulman, a été désignée par les États-Unis pour faire office de « gendarme régional » dans la Corne de l’Afrique, à l’instar d’Israël pour le Proche-Orient. Mais l’échec de l’Éthiopie à mater la rébellion du régime des tribunaux islamiques a conduit l’alliance occidentale à mettre en place un dispositif de lutte contre la piraterie maritime s’articulant sur trois volets États-Unis, Union européenne et OTAN. En 2009, 168 actes de piraterie ont été recensés, dont douze navires et deux cent cinquante otages détenus sur la côte somalienne. Le dispositif international est déployé depuis Djibouti (Golfe d’Aden) et les Seychelles (sud océan Indien), qui constituent les principales bases de soutien des opérations maritimes et aériennes anti-piraterie. Une vingtaine de bâtiments de guerre croisent en permanence dans le golfe d’Aden et patrouillent le long des côtes somaliennes.

 

Dans ce périmètre hautement stratégique, les États-Unis ont procédé au plus important déploiement militaire hors du territoire national en temps de paix, en un chapelet de bases (Qatar, Bahreïn, Arabie saoudite). Le dispositif américain est complété en Afrique orientale par la base aéronavale de Diego Garcia dans l’Océan indien et par la colocation de la base française de Djibouti « Le camp Lemonnier ». Un poste d’observation américain en Ouganda donne aux États-Unis la possibilité de contrôler le sud Soudan où se trouve le gros des réserves soudanaises de brut. Le positionnement américain à Djibouti a en outre pour mission de détecter les groupes terroristes en liaison avec ceux du Moyen-Orient et de servir de plateforme opérationnelle pour sa guerre clandestine contre Al-Qaida en Afrique de l’Est, en particulier en Somalie qui a abrité, selon Washington, le Comorien Fazul Abdullah Mohammed et le Kenyan Saleh Ali Saleh Nabhan, impliqués dans les attentats contre les ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie en 1998 au cours desquels deux cent vingt-quatre personnes avaient été tuées.

 

L’attentat manqué d’un Nigérian sur un avion à destination de Detroit (EU), en décembre 2009, quatre mois après l’attentat manqué contre un prince saoudien responsable de la lutte contre le terrorisme en Arabie saoudite, le Prince Mohamad Ben Nayef Ben Abdel Aziz, décédé depuis, a ravivé les craintes des Américains et relancé leur intérêt vers le Yémen, redoutant que ce pays ne serve de repaires aux hommes d’Al Qaida dans la péninsule arabique. L’attentat de Detroit a servi de déclencheur à la mise en œuvre de la nouvelle doctrine américaine de la guerre clandestine contre le terrorisme, dont le Yémen en constitue le banc d’essai.

 

Al Qaida a entretemps procédé à une décentralisation de son mouvement dans une démarche symétrique à la nouvelle doctrine américaine de la furtivité, conférant une large autonomie aux commandements régionaux, en application de la nouvelle stratégie du « combat disséminé » mise en œuvre avec succès par le Hezbollah libanais contre Israël, en 2006. Depuis la reprise des hostilités à grande échelle au Yémen, « Al Qaida » a ainsi procédé à la réunification des deux branches opérant dans la zone, l’Arabie saoudite et le Yémen, pour lancer, en 2008, « Al Qaida pour la Péninsule arabique ». AQPA s’est ainsi attaqué aux objectifs stratégiques, en particulier l’ambassade des États-Unis, en 2008, et à un centre de sécurité d’Aden où étaient détenus des membres de son organisation, en juin 2010, en vue de peser sur la pulsion séparatiste des sudistes yéménites et contribuer à délégitimer le pouvoir central.

 

 

Yémen : nouveau champ d’affrontements inter arabe

 

L’implication d’Al Qaida dans le conflit inter yéménite et son environnement somalien a retenti comme un camouflet à ses anciens partenaires, l’Arabie saoudite et les États-Unis, en même temps qu’elle souligne la dérision de la stratégie américaine dans son objectif majeur, « la guerre mondiale contre le terrorisme », la mère de toutes les batailles.

 

À la tête du pays pendant trente-deux ans (1978), le président Ali Abdallah Saleh, destitué depuis, accusait déjà à l’époque les rebelles houthistes de vouloir renverser son régime pour rétablir l’imamat zayidite, aboli en 1962 à Sanaa, et d’être manipulés par l’Iran. Les Houthistes, quant à eux, se plaignaient alors d’avoir été marginalisés par le gouvernement sur le plan politique, économique et religieux, et demandent le rétablissement du statut d’autonomie dont ils bénéficiaient avant 1962. Ils assurent défendre une identité menacée selon eux à la fois par la politique du pouvoir central, qui maintiendrait leur région dans le sous-développement, et par la poussée d’un fondamentalisme sunnite à l’égard duquel Sanaa entretient souvent l’ambiguïté. Issus du courant religieux chiite zayidite, les Houthistes habitent sur les hauts plateaux yéménites et notamment la province de Saada, et présentent de nombreuses différences au niveau du dogme par rapport aux chiites duodécimains iraniens. Ils représentent, en 2007, 30 % environ des 22,2 millions de Yéménites qui sont en majorité sunnites.

 

De plus, ils partagent de nombreuses interprétations religieuses avec la majorité sunnite chaféite. Les Houthistes dénient toute instrumentalisation de leur cause par une puissance étrangère et insistent au contraire sur l’aide que le royaume saoudien apporterait au président. Le Yémen et l’Irak, les deux pays frontaliers de l’Arabie saoudite, constituent les deux balises stratégiques de la défense du Royaume wahhabite, le premier au sud, le second au nord de l’Arabie. C’est dans ces deux pays que l’Arabie saoudite a engagé le combat pour assurer la pérennité de la dynastie wahhabite, à deux reprises au cours des dernières décennies. Cette « guerre oubliée du Yémen » qui revient sur le devant de la scène internationale est en passe de redevenir, le terrain de confrontation des nouvelles puissances régionales, l’Iran, d’une part, l’Arabie saoudite soutenue par les États-Unis d’autre part.

 

 

 

Par René Naba (Madaniya) — elcorreo.eu.org – le 3 avril 2015

 

 

* René Naba est journaliste-écrivain, ancien responsable du Monde arabo-musulman au service diplomatique de l’AFP, puis conseiller du directeur général de RMC Moyen-Orient, responsable de l’information, membre du groupe consultatif de l’Institut Scandinave des Droits de l’Homme et de l’Association d’amitié euro-arabe.

Auteur de : « L’Arabie saoudite, un royaume des ténèbres » (Golias),  « Du Bougnoule au sauvageon, voyage dans l’imaginaire français » (Harmattan),  « Hariri, de père en fils, hommes d’affaires, premiers ministres » (Harmattan),  « Les révolutions arabes et la malédiction de Camp David » (Bachari),  « Média et Démocratie, la captation de l’imaginaire un enjeu du XXIe siècle » (Golias).) responsable éditorial www.madaniya.info

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MALI ET AZAWAD

MALI ET AZAWAD | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it



MALI ET AZAWAD

Par Ibrahima Sène (*)

 

Comme les États-Unis avec l’Armée de l’État Islamique qu’ils ont aidé à s’armer et à s’entraîner contre la Syrie, et qui aujourd’hui s’est retournée contre les intérêts américains, la France risque de voir un nouveau rapprochement du Mnla avec les groupes jihadistes, pour frapper ses intérêts dans la zone sahélo-sahélienne. Et Bamako, qui vient d’être frappé par un attentat meurtrier, risque de retourner à la case départ pour défendre militairement l’intégrité de son territoire et la sécurité de ses populations. 

 

Moktar Belmoktar, chef d’un groupe armé proche d’Al Qaida, vient de revendiquer publiquement l’attaque terroriste de la nuit du 6 au 7 mars à Bamako, intervenue quelques jours seulement, après que le ministre des Affaires étrangères de la France a exigé des mouvements armés, en lutte contre Bamako, de « signer sans délai » les « Accords de paix d’Alger ».

 

Dans son communiqué rendu public, il ne fait aucun doute que c’est la France qui est visée dans cet attentat au Restaurant « La Terrasse », alors que le Belge et les Maliens tués dans une rue adjacente ne seraient que des victimes collatérales lors de la fuite des assaillants. Le fait que cette attaque soit aussi intervenue dans un contexte marqué par le refus par certains mouvements rebelles de signer les « Accords d’Alger », sous prétexte de la nécessité d’un « délai pour consulter leurs bases », montre bien que ces « accords » ne mettront pas fin à la crise au Nord du Mali.

 

 

Ce serait un signal évident de la volonté de mettre en échec ce « compromis franco-algérien » pour ramener la paix dans cette partie de la zone sahélo-sahélienne, que reflètent les « Accords d’Alger ». Les autorités françaises se sont avérées incapables de faire accepter par le Mnla, qu’elles ont toujours utilisé dans cette crise, ce « compromis franco-algérien » qui éloigne toute perspective d’un « État indépendant touareg » aux frontières de l’Algérie.

 

En effet, le Mnla est victime du changement politique intervenu en France avec le départ de Sarkozy et l’arrivée de François Hollande. Ce changement au niveau de l’Exécutif français, a entrainé des modifications dans les modalités de mise en œuvre des objectifs géostratégiques des autorités françaises dans la zone sahélo-sahélienne.

 

C’est ainsi que l’instrumentalisation du Mnla par Sarkozy, dans la mise en œuvre de la politique géostratégique de la France au Mali, avait comme contrepartie sa promesse de le soutenir pour obtenir, de Bamako, son accord pour transformer le Nord Mali en République indépendante de l’Azawad sous la direction de celui-ci.

 

C’est pour mettre en œuvre cet « Accord », rendu public à plus reprises par les dirigeants du Mnla sans jamais être démentis par les autorités françaises, que ce groupe armé fut transféré et équipé en Libye sous l’égide de la France, pour s’installer au Nord Mali, avant qu’il ne s’attaque aux forces de sécurités du pays pour proclamer l’Indépendance de l’Azawad. 

 

De leur côté, les autorités françaises mirent la pression sur Bamako pour qu’il s’attèle à respecter le calendrier électoral et tenir des élections présidentielles, plutôt que de s’occuper de la libération du Nord Mali transformé en « République indépendante de l’Azawad ».

 

Pour la France, il faillait, après les élections présidentielles puis législatives du Mali, que les nouvelles autorités puissent ouvrir des négociations avec les séparatistes du Nord et non mener une guerre pour libérer cette partie de leur territoire national.

 

L’acceptation de ce scénario français, par le président Malien de l’époque, Amadou Toumani Touré (ATT), fut fatal à son régime qui fut renversé par un coup d’État militaire mené par de jeunes officiers outrés de l’abandon de la souveraineté de leur peuple sur toute l’étendue du territoire malien, dont une partie était livrée à des troupes jihadistes qui se livraient à des massacres des troupes des forces de sécurité et des populations, livrées à elles par le gouvernement malien.

 

Cette réaction patriotique des jeunes officiers fut, pour Paris, un crime de lèse-majesté qu’il fallait sanctionner sans tarder et de façon exemplaire. C’est ainsi que Paris eut recours aux Chefs d’État de l’Uemoa, de la Cedeao et de l’Union Africaine (U.A), qui avaient à leur tête ses « hommes liges », pour étouffer économiquement, financièrement, militairement et politiquement, le nouveau pouvoir militaire afin de l’empêcher de mobiliser le peuple malien d’un « rassemblement de salut national » pour libérer le Nord de leur pays, et assurer l’intégrité de leurs frontières et la sécurité du peuple.

 

C’est pour cela que les avoirs extérieurs du Mali furent bloqués par l’UEMOA, comme cela fut le cas de la Côte d’Ivoire sous BAGBO, et un embargo économique et sur les armes fut décrété par la Cedeao. C’est dans ce cadre que Paris suspendit ses accords de défense avec le Mali, et qu’eut lieu le blocage à Accra des armes commandées par le gouvernement du Mali, bien avant la chute de A.T.T.

 

Cependant, les tentatives de Sarkozy de mobiliser une armée d’intervention de la Cedeao pour le « rétablissement de l’ordre constitutionnel » au Mali furent bloqués par la résistance du Ghana et du Nigéria, malgré l’activisme de partis politiques et d’organisations de la société civile du Mali, regroupés dans un « Front anti putschiste » pour réclamer le départ des militaires, le retour à l’ordre constitutionnel pour organiser les élections dans le « respect du calendrier républicain ».

 

Ce contexte avait paralysé le nouveau pouvoir militaire et avait permis aux groupes jihadistes de sanctuariser le Nord Mali en y imposant un pouvoir islamique radical et de chasser, vers le Burkina, le Mnla qui les avait associés dans sa lutte indépendantiste.

 

C’est dans cette situation de triomphe des jihadistes qu’est intervenue la chute de Sarkozy, avec l’arrivée de Hollande qui dut changer de modalités de mise en œuvre de la politique géostratégique de la France, face au nouveau projet des groupes jihadistes, d’étendre leur pouvoir hors des limites du Nord Mali, baptisé République indépendante de l’Azawad, pour s’ébranler vers Bamako.

 

La France de Hollande ne pouvait donc plus attendre la tenue d’élections, encore moins l’envoi de troupes de la Cedeao, et décidait ainsi de l’« Opération Serval » en s’appuyant non pas sur l’armée malienne pour libérer le Nord Mali, mais sur le Mnla qu’elle a fait revenir du Burkina sous ses ailes. C’est ainsi que l’armée malienne fut parquée dans les environs de Gao, par la France, avec le soutien des USA et la complicité des Nations Unies qui ont dépêché des forces pour maintenir la paix au Nord Mali, en laissant le Mnla contrôler la région de Kidal, d’où l’« Opération Serval » avait chassé les jihadistes.

 

Cette deuxième occupation du nord Mali par le Mnla, grâce à la France, avait fini par convaincre ses dirigeants du respect, par Hollande, des engagements de Sarkozy d’amener Bamako à accepter leur revendication d’indépendance de l’Azawad. Et surtout que le nouveau pouvoir issu des élections présidentielles n’avait pas hésité de faire arrêter les dirigeants du putsch qui a fait tomber ATT et avait libéré certains de leurs principaux dirigeants pourtant accusés de « crimes de guerre », par les Autorités maliennes, et qui avaient même annulé les mandats d’arrêt internationaux lancés contre les autres. D’autant plus que le nouveau pouvoir avait signé de nouveaux « Accords militaires » avec la France, lui permettant d’exaucer son vœu de toujours de faire de la base militaire stratégique de Tessalit, au nord Mali, sa base opérationnelle dans le cadre de sa nouvelle opération militaire dans la zone sahélo-sahélienne, baptisée « Bahran ».

 

Mais ce que le Mnla n’avait pas pu voir venir, c’est le changement de la politique française vis-à-vis de l’Algérie, qui ne voyait pas d’un bon œil l’avènement d’un État Touareg dans le nord Mali à ses frontières, et qui faisait d’elle l’alliée stratégique du nouveau pouvoir malien qui voulait empêcher la partition de son territoire. D’où le double rapprochement de Paris et de Bamako vers Alger.

 

C’est ainsi que l’Algérie, de verrou qu’il faillait faire sauter sous Sarkozy, au même titre que la Libye sous Khadafi, est devenue avec Hollande un partenaire stratégique dans la zone sahélo-sahélienne avec qui il fallait coopérer. Et pour le Mali, l’Algérie est devenue un allié stratégique contre un État indépendant Touareg au Nord.

 

Ce n’est qu’avec la tenue des négociations de paix à Alger, que le Mnla a découvert peu à peu le changement de la politique française envers l’Algérie et ses conséquences sur les engagements qu’elle avait pris pour la réalisation de son projet politique. D’où le dépit amoureux entre Paris et le Mnla, qui refuse d’obéir aux injonctions de Paris pour signer « les Accords de Paix » d’Alger, et l’attentat spectaculaire du mouvement jihadiste proche de Al Qaida qui vient rappeler tristement ses engagements d’hier, à la France, vis-à-vis de l’Azawad.


Comme les États-Unis avec l’Armée de l’État Islamique qu’ils ont aidé à s’armer et à s’entraîner contre la Syrie, et qui aujourd’hui s’est retournée contre les intérêts américains dans cette sous-région du Moyen-Orient, la France risque de voir un nouveau rapprochement du Mnla avec les groupes jihadistes, pour frapper ses intérêts dans la zone sahélo-sahélienne. Et Bamako, risque de retourner à la case départ pour défendre militairement l’intégrité de son territoire et la sécurité de ses populations.

 

La France, une fois Tessalit en poche, veut se retirer du Mali le plus rapidement possible pour concentrer ses efforts militaires au soutien du Tchad et du Niger dans la guerre contre Boko Haram, et exploiter au maximum, par sa présence, les conséquences de la reconfiguration du Nigéria et du Cameroun qu’entrainerait inéluctablement la partition attendue du Nigéria sous les effets conjugués des coups de Boko Haram et d’une grave crise post électorale. D’où son engagement total au « compromis franco-algérien » de paix qui lui permet, avec l’implication totale de l’Algérie, de mieux assurer la sécurité de ses intérêts économiques dans la zone, contre les jihadistes.

 

En effet, une crise post « électorale qui va paralyser l’État nigérian serait du pain béni pour Boko Haram en vue de faire éclater le Nigéria au détriment de nos aspirations pan africaines, et de la sécurité de nos peuples.

 

Les Nigérians qui ont poussé leur pays vers ce gouffre ont trahi à jamais ces aspirations des peuples d’Afrique pour satisfaire les intérêts géostratégiques des USA et de la France en Afrique. Ils n’ont tiré aucune leçon de ceux qui, au Moyen-Orient et au Mali, ont servi pour faire cette sale besogne pour les grandes puissances occidentales et qui aujourd’hui, par « dépit amoureux » s’en prennent à elles.

 

La preuve est aussi faite, que les « Accords de défense » avec la France et les USA, signés par nos gouvernants, ne résistent nullement à leurs intérêts stratégiques qui priment sur nos intérêts nationaux que ces « Accords » sont censés défendre.

 

Bamako devrait donc, lui aussi, profiter de l’implication totale d’Alger pour faire appliquer ces « accords de paix », et solliciter le soutien de la Cedeao, sous la direction du Ghana, et de l’Ua, sous la direction de Mugabe, pour faire respecter l’intégrité de son territoire et y assurer la sécurité de ses populations.

 

Plus que jamais, avec les « Accords d’Alger », les conditions sont politiquement réunies pour permettre à la Cedeao et à l’Ua, de remplir leurs missions historiques d’intégration de nos forces armées et de sécurité, pour défendre l’intégrité territoriale des États issus du colonialisme et la sécurité de leurs populations.

 

C’est ce défi que la crise politique et militaire du Nigéria lui impose aussi de relever. C’est pourquoi il est attendu du pde la Cedeao et de l’Ua de s’impliquer auprès des partis politiques en compétition et des organisations de la société civile du Nigéria, pour éviter tout recours à la violence ou à la paralysie de l’Etat, pour régler les contentieux électoraux que le monde entier attend et que l’Afrique redoute profondément.

 

Pan Africanistes de tous les pays d’Afrique et de la Diaspora, Unissons-nous pour le respect des « Accords de paix d’Alger », et pour un « traitement politique » approprié de toute crise post électorale au Nigéria. Ne laissons pas les ennemis de l’Afrique nous avoir une nouvelle fois.

 

 

 

Par Ibrahima Sène (*) - metamag.fr - le 13 mars 2015

 

 

(*) journaliste à Penbazuka.org

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