Et si les boues d’épuration valaient de l’or ? | Koter Info - La Gazette de LLN-WSL-UCL | Scoop.it

Photo : des chercheurs de l’Arizona State University ont mesuré la quantité des métaux présents dans les boues d’épuration et évalué leur valeur. Une véritable mine d’or... © Michael Northrop, Biodesign Institute, ASU ; (lid) ASP, Inc./DollarPhotoClub.com, (gold) Clearviewstock/iStockphoto

 

 

Et si les boues d’épuration valaient de l’or ?

 

En France, la production de boues d’épuration représentait 1,8 million de tonnes de matière sèche en 2009. Des déchets encombrants qui contiennent pourtant de nombreux métaux, précieux ou non. Cette matière pourrait bien être valorisée estiment aujourd’hui des chercheurs de l’Arizona State University. 

 

Le traitement des eaux usées s’accompagne de la production d’une grande quantité de boues d’épuration. Une quantité qui croît, d’années en années, conséquence de la croissance démographique et d’une réglementation qui devient de plus en plus stricte. Ainsi en 2003, la production de boues d’épuration était, en France, de 900.000 tonnes de matière sèche. En 2009, elle avait déjà atteint 1,8 million de tonnes. L’élimination de ces boues pose problème aux gestionnaires de stations d’épuration. Environ 60 % d’entre elles sont valorisés en agriculture. Mais la présence de contaminants dans ces boues a tendance à rendre de plus en plus délicat leur épandage.

 


11 millions d’euros de métaux dans nos égouts

 

Parmi les contaminants que l’on retrouve dans les boues d’épuration figurent toutes sortes de métaux. Les scientifiques de l’Arizona State University s’y sont intéressés de plus près. Ils ont d’abord rassemblé des boues venues de tous les États-Unis pour obtenir un échantillon représentatif. Ils ont ensuite analysé ce dernier à l’aide d’un spectromètre de masse capable d’identifier les différents éléments contenus dans la boue après ionisation dans un plasma super chaud.

 

Selon les résultats publiés en ligne sur Environmental Science & Technology, les boues d’épuration produites par une ville d’un million d’habitants en un an contiennent plus de 11 millions d’euros de métaux. Du platine, de l’argent, du cuivre, du fer, du zinc et même de l’or pour plus de 2 millions d’euros ! Les alchimistes cherchaient à transformer le plomb en or… peut-être auraient-ils dû s’intéresser de plus près à ce qui transite dans nos égouts.

 

 

Des questions concernant la faisabilité technique et économique

 

Ces résultats encourageront-ils à corriger le regard porté sur les eaux usées ? Quelques expérimentations ont déjà été lancées dans le but de valoriser ces métaux. Au Japon, par exemple, une station d’épuration située à proximité de nombreux fabricants d’équipements de précision aurait ainsi extrait près de 2 kg d’or dans chaque tonne des cendres issues de l’incinération de ses boues. L’expérimentation des chercheurs de l’Arizona State University, quant à elle, annonce qu’une tonne de boues contiendrait 16,7 grammes d’argent et 0,33 gramme d’or.

 

Et les métaux ne sont pas les seuls éléments de valeur que renferment les boues d’épuration. Ainsi aux États-Unis le Hampton Roads Sanitation District s’est lancé, en 2010, dans l’extraction de phosphore et d’azote qui sont ensuite vendus comme fertilisants. Une opération encouragée par une nouvelle réglementation visant à protéger la baie de Chesapeake. Mais, pour que ce type d’expérience se généralise, il faut encore que les techniques d’extraction se perfectionnent et deviennent plus rentables.

 

L’étude de l’Arizona State University ne s’est en effet pas intéressée au coût qu’engendrerait l’extraction des métaux contenus dans les boues d’épuration. Un point pourtant capital, ici comme ailleurs. Les chercheurs vont donc désormais se pencher sur la faisabilité économique, mais aussi technique. Car la plupart du temps, les métaux cachés dans les boues d’épuration s’y trouvent à l’état de particules microscopiques ou complètement dissoutes. Les spécialistes se montrent toutefois optimistes. Il faut dire que laisser ainsi ces métaux dans les boues d’épuration se paie aussi en pollution et risque pour la santé publique.

 

 

Par Nathalie Mayer - Futura-Sciences - le 23 janvier 2015