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Premier commentaire de la décision Urgenda

Premier commentaire de la décision Urgenda | Home | Scoop.it

La décision rendue par la Cour Suprême des Pays-Bas le 20 décembre 2019 est assurément une décision historique, compte tenu du nombre de procès climatiques actuellement en cours dans le monde. Les questions qui y sont tranchées, parce qu’elles le sont par une Cour Suprême et sur la base du droit communautaire et du droit conventionnel européen intéressent bien évidemment toutes les juridictions européennes au sens large du terme (c’est-à-dire au sens de la Convention européenne des droits de l’homme) mais très probablement bien au-delà (voir cet égard la décision rendue en Australie et commentée par Thomas Thuillier (revue numéro 4 énergie  environnement infrastructures 2019) qui fait expressément référence aux articles 2 et 8 de la CEDH.

Cette décision tranche la question des obligations de l’État, de la recevabilité des actions des associations et des territoires menacés et du rôle du juge.

Cette décision tout d’abord, après avoir longuement rappelé  les connaissances scientifiques relatives aux dérèglements climatiques et les engagements qui sont ceux des Etats notamment du fait de la signature de la convention des Nations unies sur le climat et de l’accord de Paris, rappelle que les Etats ont des obligations.

La Cour prend d’abord soin de rappeler quelles sont les obligations des Pays-Bas et quels sont les résultats obtenus. Cet état de fait étant rappelé, la Cour tranche tout une série de questions de droit, pour répondre aux objections qui étaient celle des Pays-Bas et qui sont ,pour une large part, celles que l’État français oppose à la demande formulée devant le Conseil d’État par la ville de grande Synthe.

 

Tout d’abord, la cour répond aux différents arguments (prétextes) selon lesquels un État pourrait lui permettre de se décharger de sa responsabilité. La réponse est négative à plusieurs titres.

En premier lieu, l’obligation pour un État de faire « sa » part résulte des articles 2 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. Ces textes exigent en effet de la part des Etats des obligations positives et l’accord de Paris sur la base des travaux du Giec fixe  l’urgence de réduire d’au moins de 25 à 40 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2020 dans les pays de l’annexe I  dont les Pays-Bas mais aussi bien entendu la France font partie. La Cour en déduit que l’objectif de réduction minimale de 25 % est un objectif internationalement reconnu à charge pour l’État de déterminer les mesures concrètes pour y parvenir. Les articles 2 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme s’appliquent, pour la Cour, au problème mondial du danger de changement climatique (points 5..1 à 5.6.de l’arrêt) dans la mesure où la CEDH protège le droit à la vie qui rend obligatoire la prise de mesures appropriées s’il existe un risque réel et immédiat. Le terme d’immédiat doit être traité comme signifiant qu’il doit y avoir un danger qui menace directement les personnes impliquées sans qu’il y ait une illégalité au sens temporel du danger.

S’agissant de l’article 8 et du droit une vie familiale normale, la Cour considère que la jurisprudence relative à l’article 2 s’applique également à l’article 8, les deux articles  jouant non seulement pour des personnes spécifiques mais aussi pour la société ou la population dans son ensemble. Les résidents d’une zone entière s’ils sont menacés peuvent prétendre à l’application de ces dispositions. Cette  obligation comprend autant des mesures préventives, conformes au principe de précaution (clairement réaffirmé à deux reprises par la Cour, que des mesures de réparation ce qui implique que les mesures doivent à la fois concerner les politiques d’atténuation et les politiques d’adaptation. Il revient au tribunal de vérifier que la politique suivie est raisonnable et appropriée et si cette politique a ou non échoué. Cependant, la cour rappelle que le contrôle se rapporte aux mesures à prendre par un État, mesures qui doivent être raisonnables et appropriées et non pas garantir l’atteinte du résultat à atteindre. En conséquence, sans qu’il soit besoin de consulter la Cour Européenne des Droits de l’Homme, la Cour justifie sa décision et applique les articles 2 et 8.

 

En second lieu, la cour répond à l’argument selon lequel du fait de l’appartenance à l’Union européenne, les Etats membres ne seraient pas individuellement tenus d’une quelconque obligation. Cet argument est aussi utilisé par le gouvernement français. La cour le rejette de manière claire en considérant que chaque pays est responsable de » sa » part et peut donc être appelé à en rendre compte c’est-à-dire à assumer sa part de responsabilité y compris sur le plan contentieux. Et le fait que d’autres Etats ne respectent pas leurs engagements est sans effet. La cour tranche le sujet : » il n’est pas possible d’accepter avec cette responsabilité partielle qu’un État n’ait pas à assumer la responsabilité parce que d’autres pays n’honorent pas leur responsabilité partielle ». Elle ajoute que les accords conclus par l’Union Européenne « n’affectent pas la responsabilité individuelle des Etats de l’union pour tout autre raison. La décision relative à la répartition de l’effort indique donc dans le préambule que  cette décision n’exclut pas des objectifs nationaux plus stricts ».

De surcroît, la Cour revient longuement sur l’objectif de 25 % rappelant que l’Union Européenne elle-même considère qu’une réduction de 30 % en 2020 était nécessaire et que l’urgence d’une réduction de 25 à 40 % en  2020 s’appliquait donc également aux Pays-Bas. Dans la mesure où l’État n’a pas apporté la preuve que la réduction d’un minimum de 25 % en 2020 était une charge impossible et disproportionnée, il est condamné à atteindre a minima cet objectif à charge pour lui de trouver les moyens d’y parvenir.

De même est rejeté l’argument selon lequel le pays concerné compterait peu dans les émissions globales de gaz à effet de serre : « la défense selon laquelle la part propre des émissions mondiales de gaz à effet de serre est très faible et qu’une réduction des émissions de son propre territoire ne fait pas de différence à l’échelle mondiale, ne peut pas non plus être acceptée ».

 

Sur le plan procédural, la cour reconnaît la recevabilité de l’action menée par Urgenda  en considérant que le regroupement d’intérêts est par excellence efficace et efficient et qu’il est donc conforme à l’article 2 § 5 de la Convention d’Aarhus et de l’article 13 de la Convention européenne des droits de l’homme. Il va de même des territoires concernés de la recevabilité agirait indirectement juger à propos de l’application de l’article 2 et 8 de la CEDH.

 

Elle tranche également une question très importante sur le rôle du juge. La cour rappelle en effet que  l’État  a une obligation légale en vertu de la protection dont il dispose en vertu de l’article deux et huit de la CEDH et qu’il doit offrir aux résidents des Pays-Bas, la protection de leurs droits à la vie et à une vie privée familiale normale. Il peut donc être condamné à remplir cette obligation par le tribunal sauf s’il existe un motif d’exception visée par la loi néerlandaise. Si le juge ne doit pas s’immiscer dans la prise de décision politique quant à l’opportunité d’une législation, il lui appartient de rendre une déclaration de justice qui équivaut à ce que l’organisme concerné ait agi illégalement en n’adoptant pas de législation appropriée spécifique. De plus, le juge interprète les traités internationaux. En conséquence, si le gouvernement et le Parlement sont libres de prendre les décisions politiques nécessaires il appartient au tribunal d’apprécier si ces institutions ont exercé cette liberté dans les limites de la loi à laquelle ils sont soumis.

 

Cette décision est la première du genre à ce niveau. Le fait que la cour européenne des droits de l’homme n’ait pas été saisie signifie tout simplement que la cour suprême néerlandaise a jugé qu’il n’y avait aucune difficulté d’interprétation des articles 2 et 8 de la CEDH en ce qui concerne le climat.

 

Toutes les objections qu’un État pouvait soulever l’ont été par le gouvernement néerlandais et la cour suprême y a répondu de manière claire et précise.

 

Nul ne peut douter que ce précédent pèsera très lourd dans les différentes décisions que les cours européennes saisies auront à rendre dans les mois et les années qui viennent.

 

Par Corinne LEPAGE

Avocate à la Cour

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Justice climatique : Anne Hidalgo lance une plateforme internationale d'accompagnement des maires

Justice climatique : Anne Hidalgo lance une plateforme internationale d'accompagnement des maires | Home | Scoop.it

La maire de Paris, Anne Hidalgo, a annoncé ce 20 février, la création d'une plateforme internationale d'accompagnement juridique qui sera mise à disposition des maires qui veulent engager des actions de justice climatique à travers le monde. En particulier contre les Etats qui ne respectent pas l'Accord de Paris.

"Il s'agit d'un outil concret et innovant pour lutter de manière collective et internationale contre l'inaction climatique et pour l'affirmation d'une véritable justice climatique", indique la maire de Paris. Cette "legal team" sera placée sous l'égide du C40, un réseau de 95 métropoles engagées pour le climat qu'Anne Hidalgo préside. La plateforme mettra gracieusement à la disposition des villes les services d'experts et d'avocats spécialisés en lien avec le Barreau de Paris.

Cette annonce a été faite dans le cadre de la conférence Justice4Climate qui a réuni des maires français et étrangers, associations, experts, juristes et citoyens à l'Hôtel de Ville de Paris.

 

Parmi les participants figuraient plusieurs protagonistes de procès climatiques : la directrice de la Fondation Urgenda qui a remporté un procès emblématique en appel contre le gouvernement des Pays-Bas, des requérants de L'Affaire du siècle qui attaquent l'Etat français pour carence fautive ou encore l'ancienne ministre de l'Environnement Corinne Lepage. Cette dernière défend le maire de Grande-Synthe qui a également formé un recours contre l'Etat français pour inaction climatique.

 

Laurent Radisson, journaliste
Rédacteur en Chef délégué aux marchés HSE

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La justice climatique est-elle la solution pour faire bouger les Etats?

La justice climatique est-elle la solution pour faire bouger les Etats? | Home | Scoop.it

 

La justice climatique tente de s’imposer comme solution à l’inertie des Etats face aux conséquences du réchauffement climatique sur les citoyens. Véritable issue ou illusion sans lendemain? Éléments de réponse.

 

Faute d’accord, l’affaire se réglera devant la justice climatique. Jeudi, les quatre ONG - la Fondation Nicolas Hulot, Greenpeace France, Notre Affaire à Tous et Oxfam France - à l’origine de la pétition "l’Affaire du siècle" vont déposer un recours en justice contre l’Etat français pour "inaction climatique". Cette pétition, signée par 2,1 millions de personnes - un record - demande à l’Etat "qu’il respecte ses engagements climatiques et protège nos vies, nos territoires et nos droits". Suite à cette démarche, le Premier ministre Edouard Philippe avait reçu les associations et le ministre de la Transition écologique François de Rugy leur avait également répondu dans une lettre. Des réponses jugées décevantes par les associations, qui ont donc décidé de s’en rendre à la justice.

 

Lire aussi - Peut-on revendiquer le droit à un air respirable?

 

Le premier cas de "justice climatique" s’est déroulé aux Pays-Bas. L’ONG Urgenda avait décidé de poursuivre le gouvernement néerlandais car il n’avait pris aucun engagement sur les réductions de gaz à effet de serre. Résultat, le 24 juin 2015, le gouvernement a été condamné à prendre immédiatement des mesures plus contraignantes pour réduire ces émissions. Un jugement confirmé le 9 octobre 2018 par la cour d’appel de La Haye. La cour a en effet estimé qu’une réduction des émissions inférieures à 25% en 2020 ne satisfaisait pas aux exigences du "devoir de diligence" de l’Etat envers les droits fondamentaux. Verdict : d’ici la fin de l’année 2020, les émissions de gaz à effet de serre devront être inférieures d’au moins 25% par rapport à leur niveau de 1990. Une victoire pour l’ONG Urgenda.

 

Certaines actions ont été victorieuses à l’étranger. Mais cela ne veut pas dire que cela va fonctionner ailleurs

Mais peut-on généraliser cette victoire? Quelles chances de succès pour la justice climatique en France ?  "Certaines actions ont été victorieuses à l’étranger. Mais cela ne veut pas dire que cela va fonctionner ailleurs. Chaque Etat a son propre système juridique. Dans ce domaine, comme dans d’autres, comparaison n’est pas toujours raison" explique au JDD Julien Bétaille, maître de conférences à l’Université de Toulouse 1 Capitole.

Corinne Lepage, avocate et ancienne ministre de l’Environnement, est, elle, beaucoup plus optimiste : "La justice climatique est un fait planétaire. Elle permet d’établir une vérité objective car c’est un juge qui tranche", explique-t-elle ainsi au JDD. Cette avocate a été à l’initiative, avec Damien Carême le maire de Grande-Synthe, du recours gracieux auprès de l’Etat pour inaction climatique en novembre 2018. Le gouvernement avait deux mois pour répondre. Faute de réponse, un recours en excès de pouvoir contre l’Etat français a été déposé devant le Conseil d’Etat en février 2019.

La difficulté : apporter la preuve d'une faute

Les quatre ONG à l’initiative de "l’Affaire du siècle" attaquent l’Etat sur le fondement de "l’inaction climatique". "Autrement dit, il est reproché à l’Etat ne pas avoir suffisamment agit contre les changements climatiques" explicite le maître de conférences. Les requérantes estiment que l’Etat ne remplit pas ses engagements internationaux. En signant l’Accord de Paris, par exemple, la France aurait dû prendre des mesures pour contenir l'élévation de la température moyenne de la planète bien en dessous de 2 °C.

 

Lire aussi - Climat : quoiqu'il arrive, la Terre va se réchauffer, reste à savoir dans quelle mesure

 

Pour espérer gagner, les associations doivent apporter la preuve d’une faute. Si cette faute est retenue, “alors l’Etat pourrait être condamné à indemniser les préjudices engendrés par son inaction”. Les arguments avancés par les requérants pour prouver la faute sont "assez faibles”" selon Julien Bétaille. Il estime qu'invoquer la violation du droit de l’Union européenne qui imprègne directement les principes juridiques nationaux aurait été un meilleur argument.

C’est ce qu'il s'est produit avec la question de la pollution de l’air. Le 12 juillet 2017, le Conseil d’Etat a enjoint le gouvernement de prendre des mesures concernant la qualité atmosphérique. L’association requérante, les Amis de la Terre, avait fondé son recours sur une directive européenne de 2008. Car ce type de texte impose aux Etats membres de répondre à des objectifs fixés. Ces derniers vont alors faire l’objet d’une loi intégrée dans le corpus juridique national. Elle a donc une répercussion immédiate en droit français. Chaque citoyen peut se prévaloir de la violation d’une directive devant un juge français. "Cela a contraint l’Etat d’agir", relève ainsi Corinne Lepage.

Mais l’Affaire du siècle n'a pas choisi cette stratégie. "On n’est jamais à l’abri d’une innovation juridique de la part des juges", note toutefois Julien Bétaille.

Une condamnation symbolique et après?

"Si l’Etat était condamné, le principal apport de cette décision serait bien sûr symbolique", estime le juriste.

Prenons le cas concret des émissions de gaz à effet de serre. Une fois condamné, le juge pourrait enjoindre l’Etat à agir en adoptant des mesures concrètes. Par exemple : interdire la circulation automobile sur le territoire. Et c’est là que se situe le blocage : si l’Etat refuse d’agir, comment l’y obliger?  "Le problème redeviendrait immédiatement politique", analyse le juriste. Il ajoute : "Il y a de nombreux moyens de réduire les émissions mais beaucoup sont impopulaires. Les taxes sur le carbone en sont un bon exemple!"

La justice pourrait toutefois avoir recours au mécanisme de l'astreinte, comme le rappelle Corinne Lepage. "Si l’Etat n’a pas agi après un certain délai, le juge peut le condamner à payer une certaine somme d’argent tous les jours tant qu’aucune mesure n’a été prise." Le montant de la somme est fixé par le juge. Il faut tout de même qu’elle soit assez dissuasive pour que l’Etat agisse.

"Les actions en justice peuvent initier un mouvement et elles sont importantes, mais c’est avant tout une question démocratique que les Français doivent prendre à bras le corps", note le juriste.

 

  • Par Alice Vitard
 
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