«C’est quelque chose qui me trotte dans la tête ». Marie-Laure habite depuis un an à Villiers-le-Bâcle. Jeudi soir, elle s’est rendue à la réunion d’information sur la prochaine distribution d’iode stable (lire ci-contre). Car, comme tous les habitants du village, ceux de Saint-Aubin, et une partie de Saclay et de Gif-sur-Yvette, elle vit à moins de 2,5 km d’installations nucléaires. « Je sais qu’il y a un risque potentiel. C’est de la vigilance, pas de la paranoïa. J’ai des proches qui résidaient ici et qui sont morts au-delà de 80 ans ! », avance Marie-Laure.
Deux sites font l’objet d’une surveillance draconienne. Le commissariat à l’énergie atomique (CEA) et les laboratoires de CIS Bio, fabriquant de médicaments radioactifs utilisés par exemple en radiothérapie.
« L’un de nos réacteurs, Osiris, est à l’arrêt depuis décembre 2015. La fin d’activité de l’autre, Orphée, destiné à la recherche, est prévue pour 2019. Les risques se réduisent », avance Michel Bédoucha, le directeur du CEA de Saclay. « Un système anti-incendie généralisé a été installé. Et, au maximum, nous ne stockons plus en même temps que 600 doses patient », rassure le responsable de CIS Bio.
« Il reste toujours un fond de méfiance »
« Les sites du plateau de Saclay ont été inspectés 32 fois en 2015. 46 événements significatifs ont été relevés. On parle là d’incident de niveau 0 ou 1 sur une échelle qui va jusqu’à 7, comme Fukushima. En France, l’alerte maximale est montée à 4, jamais au-dessus », avance Jacques Connesson, adjoint au chef de la division d’Orléans de l’autorité de sûreté nucléaire, en charge des sites de Saclay.
« C’est plus encadré qu’il y a 30 ans, c’est sûr mais il reste toujours un fond de méfiance. Personne n’a oublié les mensonges du nuage de Tchernobyl qui s’arrête à la frontière française », confie Sandrine, une habitante de Saint-Aubin.
La réunion publique se termine dans le calme. « Les gens ici sont sensibilisés. Beaucoup d’habitants du secteur travaillent au CEA (NDLR : le site emploie 7 500 personnes). Il y a aussi beaucoup de scientifiques. Au niveau de la pédagogie, c’est plus facile », assure le maire (PS) de Villiers-le-Bâcle, Patrice Gilbon.
Des pastilles d’iode distribuées contre le cancer de la thyroïde
(LP.)
Les 11 et 12 octobre, tous les habitants vivant dans un rayon de 2,5 km autour des sites nucléaires de Saclay vont recevoir un bon à échanger contre des boîtes d’iode stable dans l’une des sept pharmacies partenaires. 1 600 foyers sont concernés. Les lettres seront distribuées par les volontaires de défense et de protection civile de l’Essonne. Un numéro de rue et un nom lisibles sur les boîtes aux lettres sont les bienvenus pour faciliter leur travail.
Les pastilles d’iode de la précédente distribution sont périmées. Il faut ramener les vieilles boîtes aux pharmaciens. A Villiers-le-Bâcle, 54 % de la population seulement est aujourd’hui couverte. « Ce n’est pas suffisant. Il faut que tout le monde joue le jeu. C’est une question de santé », affirme l’autorité de sûreté nucléaire. Car en cas d’incident, l’iode stable sature la glande thyroïde, limitant l’absorption d’iode radioactif qui peut causer des cancers. C’est le préfet qui donne l’ordre d’avaler les comprimés en cas d’incident.
L’opération de distribution est entièrement financée par le Commissariat à l’énergie atomique et le fabricant de médicaments pour la radiothérapie et l’imagerie CIS Bio, les deux exploitants de matière nucléaire concernés.