Interprété en janvier 2012 sur la scène de l'espace Confluences à Paris, sous le titre « Un dhikri pour nos morts », le poème paraît aujourd’hui avec un (gros) sous-titre « La rage entre les dents ». Est-ce pour faire écho à son premier livre, « Un poème pour ma mère, la rose entre les dents », que Soeuf Elbadawi a fait cet ajout, presque vengeur ?
Quoiqu’il en soit, c’est une excellente initiative que d’avoir publié ce texte. Pour sa qualité littéraire, tout d’abord, et parce qu’il évoque une réalité généralement passée sous silence : les drames à répétition des « kwasa kwasa » (embarcations de fortune) qui entreprennent des traversées clandestines et périlleuses entre les Comores et Mayotte. Mayotte, la Française, perçue comme un Eldorado, objet de toutes les convoitises. Mais dans le bras de mer de 70 km qui sépare l’archipel des Comores de Mayotte, des milliers de morts gisent par le fond. Ils n’ont pas réchappé aux naufrages des kwasa vers la terre promise.