Michel Weber, Covid-19(84) – ou La vérité (politique) du mensonge sanitaire : un fascisme numérique, éditions Chromatika, 230 pages, 20€, ISBN : 978-2-930517-68-1. Peut-être tenons-nous là le premier livre important sur la crise de la Covid-19, qui paralyse à peu près toute vie sociale et culturelle depuis maintenant 9 mois ? Son titre, déjà, est extrêmement bien choisi : Covid-19(84) – ou La vérité (politique) du mensonge sanitaire : un fascisme numérique. Tous les concepts qui permettent désormais de penser cette crise, y sont : 1984, la dystopie politique de Georges Orwell ; le politique ; le mensonge sanitaire ; le fascisme ; le numérique ; la vérité. Mais commençons notre « critique » par une diversion, citons des propos de Gilles Deleuze de 1977 repris dans Deux régimes de fous : « Le vieux fascisme si actuel et puissant qu’il soit dans beaucoup de pays, n’est pas le nouveau problème actuel. On nous prépare d’autres fascismes. Tout un néo-fascisme s’installe par rapport auquel l’ancien fascisme fait figure de folklore […]. Au lieu d’être une politique et une économie de guerre, le néo-fascisme est une entente mondiale pour la sécurité, pour la gestion d’une “paix” non moins terrible, avec organisation concertée de toutes les petites peurs, de toutes les petites angoisses qui font de nous autant de micro-fascistes, chargés d’étouffer chaque chose, chaque visage, chaque parole un peu forte, dans sa rue, son quartier, sa salle de cinéma. » Quiconque vit en en 2020 ne peut que ressentir dans sa chair la véracité de ces propos du grand philosophe français ; qui n’a pas entendu parler de dénonciations suite à des non-respects de voisinage de telle ou telle règle du confinement ? Qui n’a pas été témoin de scènes d’agressivité entre pro-masques et anti-masques ? Autant de situations où les micro-fascistes ont pu s’exprimer au grand jour – et avec la « meilleure volonté » du monde : protéger la société etc. Michel Weber, professeur de philosophie et thérapeute, commence son ouvrage très fort : « La rapidité avec laquelle les sociétés dites démocratiques sont remodelées à l’occasion de cet événement doit nous inciter à un questionnement politique (radical (au sens étymologique, en profondeur donc) » ; ce livre est l’histoire de ce questionnement : comment a-t-on pu basculer si vite dans une restriction sans équivalent connu (en temps de paix) de nos libertés à la fois collectives et individuelles ? Weber cite plusieurs fois les travaux de Michel Foucault sur le contrôle biopolitique, et il a bien raison ; citons à notre tour un extrait de Surveiller et punir consacré à l’étude de l’usage du dispositif disciplinaire en période de peste, le panoptisme : « Cet espace clos découpé, surveillé en tous ses points, où les individus sont insérés en une place fixe, où les moindres mouvements sont contrôlés, où tous les évènements sont enregistrés, où un travail ininterrompu d’écriture relie le centre et la périphérie, où le pouvoir s’exerce sans partage, selon une figure hiérarchique continue, où chaque individu est constamment repéré, examiné et distribués entre les vivants, les malades et les morts – tout cela constitue un modèle compact du dispositif disciplinaire. » Foucault va jusqu’à parler de « rêve politique de la peste », car jamais en conditions de paix une population ne pourrait accepter des privations de liberté aussi dures et injustifiées quand il ne s’agit justement pas de peste, mais d’un coronavirus de plus (certes virulent, parce que nouveau justement). Il semble évident qu’avec la téléphonie mobile et la 4G, nous approchons des conditions optimales d’un contrôle social total des individus hyper-connectés. Ce qui devait libérer (la mobilité), enchaîne : tout mouvement libre est devenu impossible ; et la surveillance, via les drones et/ou la reconnaissance faciale, s’annonce sophistiquée et totale comme jamais. Big Brother pourra(it) savoir à tout moment où vous êtes, ce que vous faites – et avec qui. Il est donc naturel que Weber ponctue, tout du long, son ouvrage de citations de 1984, toutes plus effrayantes les unes que les autres quand nous réalisons que nous y sommes (presque)… Oui la crise n’est pas que « sanitaire, mais politique », « et aucune des mesures liberticides n’est fondée scientifiquement ». « Le système politique qui se met en place », largement copié du « modèle » chinois, « est totalitaire, c’est-à-dire que toutes les facettes de la vie des citoyens seront pilotées par une structure idéologique mortifère » (#sauvezdesvies / #restezchezvous !) « ne différenciant plus les sphères privées et publiques. » (La simple recommandation du nombre d’invités à la table de Noël et du port du masque facial chez soi (sic !), arrivée après l’écriture de ce livre, confirme hélas cette « prophétie ».) « Ce totalitarisme sanitaire sera fasciste et numérique » (c’est moi qui souligne). Il convient de préciser ce qui constitue l’essence du totalitarisme : « Toute pensée qui s’immisce dans la sphère privée est totalitaire (destruction de la sphère publique, imposition de comportements intimes, généralisation de la peur de l’autre, etc.). » Restez chez vous, consommez et vivez séparés les uns des autres ! À qui profite le crime ? Follow the money : « Le totalitarisme fasciste est conçu par et pour les nantis » qui gouvernent le monde : les dirigeants des GAFAM et des Big Pharma. Ce qui est foncièrement nouveau, dans cette crise (mais qui était en fait en germe depuis les lois d’exception antiterroristes), c’est que le totalitarisme « est maintenant numérique (il procède par quantification, surveillance, traçage, gouvernance…) et sanitaire (le grand récit qui le justifie est viral ; le remède est hygiénique) ». Le vrai fascisme, disait Roland Barthes, n’est pas d’interdire de dire, mais de forcer à dire ; dans cette crise, pour être un bon citoyen (à la chinoise ?), il faut afficher publiquement qu’on reconnaît la Terreur (sanitaire), via entre autres le port du masque facial, et la distanciation (dont on ne sait plus si elle est physique, ou sociale). Quiconque s’y dérobe est vu comme un mauvais sujet… À la faveur d’une crise d’envergure opportune (pour certains), « le politiquement impossible » devient « politiquement inévitable » : le confinement aveugle de toute une population saine, le traçage, l’imposition du masque à tous, partout, etc. L’état d’urgence sanitaire devient, même en Occident, permanent… Il est évident que sans les technologies numériques, cette épidémie n’aurait pas du tout pu être ce qu’elle a été, et continu
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