Dans son séminaire sur le transfert, Lacan prend appui sur Le Banquet de Platon pour faire de Socrate l'antécédent historique du psychanalyste : lorsque Alcibiade lui déclare son amour, Socrate le renvoie à Agathon dans une manoeuvre digne d'un analyste. Cette " interprétation " de Socrate lui dévoile ainsi le véritable objet de son désir, en lui prouvant aussi qu'il faut être trois pour aimer. Ce dialogue de Platon met également en relief ce que Lacan appelle la " métaphore de l'amour ", à savoir le renversement à travers lequel, l'aimé, celui qui se trouve être le centre et l'objet du désir des autres, devient aimant, manifestant ainsi un manque et abandonnant du coup sa position confortable. Mais ce n'est pas tout, car on trouverait chez Lacan une " deuxième métaphore de l'amour " implicite, sous-jacente, qui n'est pas formulée comme telle, où c'est l'aimant qui, tout en manifestant un désir sans limites - puisque c'est un désir qui ne saurait se contenter du pauvre aimé de service -, devient lui-même objet du désir de l'autre, qui à son tour passe au statut d'aimant. C'est ainsi que Socrate, par le pouvoir qu'il a de faire déplacer les discours et de renverser les positions subjectives de ses interlocuteurs, devient l'antécédent nécessaire du psychanalyste. Et pour reprendre Borges, on peut même affirmer que le psychanalyste est devenu le précurseur du Socrate que l'on connaît. (PU de Rennes, Novembre 2012)
Préface de Luc Brisson
L’amour n’est pas réciproque
Phèdre et la défense des aimésPausanias et l’amour à sens unique
L’harmonie impossible
Eryximaque et l’amour hydrauliqueAristophane ou la lamelle
Socrate et Agathon
Agathon ou AgalmaSocrate : « Plus il désire, plus il devient lui-même désirable »
Socrate et Alcibiade
Alcibiade et l’aimé devenu aimant
La cure par la parole
Amour et changement de discours