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Sud-Gironde, la piste GEIQ
Le projet CLIQ SG, pour "Comité local insertion qualification Sud Gironde", tient son origine d'une reconversion professionnelle. En 2021, Nicolas Jaudard était alors travailleur social. Il avait choisi de s’orienter vers un master de sociologie en « Intervention et innovation sociale », dans la perspective de développer des initiatives de coopération entre acteurs à l’échelle d’un territoire. « J’ai proposé à quelques structures du Sud-Gironde de travailler éventuellement sur un projet dans le cadre de ce master pendant 2 ans. J’ai tout de suite été contacté par la mission locale de Langon. » A l’époque, la mission locale faisait le constat que beaucoup de jeunes accompagnés vers l'emploi, dans le cadre de dispositifs existants ou de structures d’insertion, n’arrivaient pas jusqu'aux entreprises. Et ce, malgré les besoins. « On m’a proposé d’aller « faire le tour des popotes » et d’établir un diagnostic. On m’a demandé d'étudier un peu plus particulièrement les territoires Zéro chômeurs longue durée, et quelle serait leur pertinence pour le Sud-Gironde. Ou une régie territoriale, qui fait partie des réponses envisageables en milieu rural. Ou encore, un Groupement d'Employeurs pour l'Insertion et la Qualification (GEIQ), sachant qu’il en existait un à la Réole, le GEIQ Val de Garonne, un des plus anciens de France, mais qui a fermé quand son directeur est parti à la retraite. La mission locale travaillait en partenariat avec lui, et sa disparition a laissé un vide. » Pourquoi ce lien avec les entreprises ne se fait pas ? Quel est le chaînon manquant ? Y-a-t-il besoin de valoriser les métiers ? Quelles relations entre, d’un côté, les différents acteurs qui accompagnent les publics, et les entreprises de l’autre ? Malgré la présence de SIAE, des missions locales, Pôle emploi, la rencontre ne se fait pas, ou pas suffisamment. Ce qui aboutit à des jeunes qui vivent des problématiques d'isolement, d’addictions, de manque de mobilité, etc. Alors que des entreprises, à proximité, sont prêtes à les embaucher et à les former. « J’ai passé la première année de mon master à rencontrer l'ensemble des acteurs, les conseillers Pôle emploi et mission locale, les SIAE, le Département, la DEETS, les ESAT, tous ceux qui, de près ou de loin, travaillent sur l'insertion professionnelle. Ainsi que les clubs d'entreprises, afin d’aller chercher le point de vue des entrepreneurs sur ces questions. » Le choix entre trois options Ce travail de prospection a débouché au printemps 2022, sur un rapport évoquant les problématiques du territoire, les secteurs en tension, sur les différents acteurs locaux et leurs relations. Au chapitre des hypothèses, trois options étaient présentées : le territoire zéro chômeurs, la régie territoriale, le groupement d’employeurs. « Les différences portaient sur le fait qu’un territoire zéro chômeurs ou une régie territoriale nécessitent une mobilisation politique extrêmement forte sur le long terme. Après réflexion, la solution la plus pertinente semblait être la constitution d’un nouveau GEIQ notamment parce que c'est un modèle porté par les entreprises. » Le territoire de Sud Gironde est marqué par des freins à l’emploi relativement classiques mais très présents. Santé mobilité, isolement, logement, des publics plus exclus que sur d'autres secteurs. L’offre de formation, pourtant relativement riche pour un milieu rural, ne couvre pas tous les besoins. Beaucoup d'orientations se font par défaut mais ne correspondent pas forcément aux attentes des entreprises locales. De fait, les jeunes sont nombreux à partir faire des études mais ne reviennent pas, ou se détournent des études pour différentes raisons (distance, offre pas adaptée à leur projet, etc.) Côté entreprise, le territoire possède un tissu relativement important de TPE/PME notamment industrielles, avec des besoins assez spécifiques : techniciens de maintenance, soudeurs, chaudronniers, opérateurs de machines à commande numérique, etc. Depuis la disparition du GEIQ Val de Garonne, le paysage des GEIQ a bien changé. En Gironde il en existe désormais une dizaine, et beaucoup souhaitent se développer. Plutôt que d’en créer un nouveau, le Comité Régional des GEIQ de Nouvelle-Aquitaine proposait d’étudier les conditions pour que des groupements existants viennent déployer leur offre de services sur ce territoire. Nicolas Jaudard a été chargé de jouer ce rôle d’émulation entre les acteurs locaux, afin qu’ils se familiarisent avec les GEIQ de Gironde et que, finalement, des relations s’établissent et que les entreprises soient intégrées dans la boucle. Deux groupements ont exprimé leur volonté de s’engager dans une initiative commune en Sud-Gironde, le GEIQ BTP de Libourne et le GEIQ des industries technologiques d'Aquitaine. Ils avaient les entreprises, et l’envie de se développer sur place en lien avec les acteurs locaux. « Donc on avait cette sorte de conjonction avec un territoire qui a la volonté qu’il se passe quelque chose, et des structures qui se disent intéressées, mais avec toutes les difficultés de pouvoir créer un réseau, de pouvoir le faire vivre, d’être sur place, de matérialiser le projet en quelque sorte… » Développer les relations entre acteurs locaux « Ce qui m'a beaucoup interpellé, ce sont les rapports entretenus par les différents acteurs avec les entreprises. Dans chaque structure, ESAT, SIAE, agence Pôle emploi, mission locale, il y avait une personne dédiée qui démarchait les entreprises, chacune individuellement avec ses moyens. Tous ces acteurs de l'emploi et de l'insertion ont pour mission d'emmener les personnes qu'ils accompagnent vers l'entreprise. Malgré l'engagement de chacun, à l'échelle du territoire, le lien avec le tissu de PME reste embryonnaire. Une raison de plus qui explique que les parcours n'aboutissent pas jusqu'aux entreprises. » Autre ambition, celle de faire venir les entreprises dans les instances des structures d’accompagnement, de créer des événements, de l'animation, de rassembler les gens avec lesquels elles pourraient créer des passerelles. Sans oublier la dimension formation. « Aujourd’hui, les GEIQ sont présents en Sud-Gironde et sont des acteurs complètement intégrés à l'écosystème. Ils apportent ce lien avec les entreprises et vont le faire de plus en plus. Leurs actions sont planifiées toute l'année avec Pôle emploi, avec les missions locales. Ils y tiennent des permanences et se rendent, grâce aux structures partenaires (Espace services jeunesse, MDSI, SIAE, tiers lieu) à la rencontre des demandeurs d'emploi. Là, les Geiq représentent et convient les entreprises à certaines instances, des liens ont été tissés et les choses sont en train de se développer. Concrètement il y a également eu de nouvelles entreprises qui ont adhéré aux différents GEIQ. Exemple d’action avec un groupe de jeunes en CEJ, qui ont réalisé des films sur les métiers de l’industrie dans les entreprises du Bazadais *. C’était l’occasion pour eux de découvrir ces métiers, et pour la mission locale, le GEIQ Industrie et les autres acteurs, de disposer de supports de présentation sur les métiers d’opérateur sur machine à commande numérique ou de conducteur de ligne de fabrication. Les entreprises s’y retrouvent car ces films, qui seront diffusés pendant la semaine de l’industrie, représentent bien leurs réalités. « Ce genre de projet représente bien les liens qui ont été créés entre le GEIQ, les entreprises, les intervenants locaux et les collectivités, qui ne se parlaient pas nécessairement avant. Ces liens ne vont pas retomber du jour au lendemain, ce sont des personnes qui ont travaillé ensemble sur quelque chose de concret, qui leur plaît à toutes, et tout au long de l'année. » « Je crois que les GEIQ n’avaient pas forcément besoin du Sud-Gironde pour exister. En revanche, pour la mission locale l'agence Pôle emploi, les structures d'insertion par l'activité économique, le Département avec ses bénéficiaires RSA, il était nécessaire de disposer de ce type de dispositif qui ouvre les portes des entreprises aux jeunes, aux personnes en reconversion, à tous ceux qui veulent se former en travaillant. Alors certes, pour l’instant cela ne concerne que les entreprises adhérentes des GEIQ, mais les actions sont accessibles à toutes celles qui veulent s’y associer. » *Ces films seront présentés le 24 novembre lors d’un évènement public.
AFEST, un atout pour l’entreprise
« En ce qui concerne l’AFEST, nous étions complètement novices. Mais nous avions envie d'y aller, parce qu'on trouvait la modalité intéressante. » Pour Dorine Burgot, formatrice, consultante et référente AFEST au CIPECMA, organisme de formation situé à Châtelaillon-Plage (Charente-Maritime), « c'était l’occasion de répondre à l'appel à projets lancé par la Région Nouvelle-Aquitaine qui nous paraissait très intéressant. Et c’est Aurélia Trouvé, à l’époque responsable du service Appui RH, qui était au démarrage et à l’initiative de l’AFEST au CIPECMA. Notre première démarche a été de trouver une entreprise en manque de personnel qualifié. » Par le biais de son service commercial, l’organisme a pris contact en 2019 avec l'entreprise « Actif agencement » près de Parthenay (Deux-Sèvres). Un premier rendez-vous avait pour objectif d’effectuer une analyse des besoins de la société, et de vérifier qu’elle ait la capacité de mettre en place une telle action. Elle devait notamment disposer de personnel dédié, tuteurs et salariés formateurs volontaires, et la capacité également d’accorder du temps pour la formation. « Nous avons exposé notre proposition au responsable de l’entreprise, qui a trouvé l'idée très intéressante. Il disposait de plusieurs CV avec des personnes très motivées, des personnes en reconversion qui avaient envie de changer d’activité, mais qui n'avaient pas les bases du métier. » Il a fallu définir avec l’entreprise un nombre d'heures nécessaires pour l'acquisition complète des compétences sur le métier de menuisier agenceur, avec en perspective l’obtention d’un titre professionnel. « Une fois que notre proposition a été acceptée, notre travail a consisté à mettre en place la machine. Comme c'était un premier dossier pour nous, on s’est beaucoup informés. Nous avons créé tous nos outils d'analyse réflexive, la matrice pédagogique, on a vraiment tout fait de A à Z. » Bien connaître l'entreprise Le déploiement de l’action s’est fait en plusieurs étapes. D’abord, une phase d'immersion en entreprise afin de réaliser une analyse du travail pour définir les compétences à acquérir en s’appuyant sur un expert métier interne. Cela nous a permis par la suite de construire tous les outils pédagogiques. Puis, le référentiel du titre professionnel a été comparé au métier tel qu’il était pratiqué dans l’entreprise, pour vérifier que tout concordait, relever tous les écarts et y remédier. Enfin, les formateurs internes ont été informés sur ce qu’était exactement la modalité AFEST, et formés à la façon de transmettre, de mettre en place des mises en situation et d’animer des séquences réflexives. Pour le recrutement de 4 demandeurs d'emploi qui a suivi, Pôle emploi a été sollicité, ainsi que la Maison de l'emploi et des entreprises de Parthenay, et les agences d'intérim. « Nous avons organisé des réunions d’information collective pour expliquer le projet aux demandeurs d'emploi, puisqu’ils n’étaient pas obligés d’accepter ou qu’ils n’avaient peut-être pas envie de passer un titre professionnel. C'est important de leur dire, dès le départ, qu’ils doivent passer en fin de formation devant un jury, parce que certains peuvent faire des blocages. » Les premières réunions étaient aussi l'occasion pour l'entreprise de se présenter et d'expliquer ce qu’était le métier de menuisier agenceur. Plusieurs personnes se sont déclarées intéressées, dont une qui était titulaire d’un BTS dans la banque et qui avait envie de trouver une activité manuelle, particulièrement dans le bois. Les deux candidats retenus répondaient aux critères établis au départ, à savoir l'envie, la motivation et un certain savoir-être correspondant tout à fait à l'entreprise. L’employeur n’avait pas pris d’engagement particulier en matière de recrutement, c’est lui qui a rassemblé les CV et mené les entretiens. La première session a débuté en janvier 2020, suivie d’une deuxième, de fin 2020 au printemps 2021, à chaque fois pour deux personnes et pour une durée de 5 mois. A l’issue, 3 ont décroché le titre professionnel et ont été prises directement en CDI. Tout au long de cette expérience, le travail des intervenants du CIPECMA a consisté à être présents régulièrement dans l’entreprise, chaque semaine ou tous les 15 jours, afin d’effectuer un suivi, réaliser les bilans et les analyses réflexives jusqu'à ce que le formateur soit un peu plus habitués à cette pratique. « En faisant des bilans réguliers, s’il y avait des choses qui n’avaient pas été vues, que du retard avait été pris, notre rôle était de rectifier. Il ne s’agissait pas d’imposer, mais de faire un point sur la situation de l’apprenant, d’être aux aguets pour savoir si la progression se faisait bien. Mais si, par exemple, la lecture des plans n’avait pas été possible parce qu’il n’y avait pas de chantier à cette période, la compétence était alors programmée ultérieurement » Des modalités souples « Plus généralement, on peut passer du C au D au A sans problème, sauf si vraiment il y a des particularités où on a vraiment besoin d'avoir une progression. Le plus important c'est vraiment de mettre en rapport tout l'aspect pédagogique avec les pratiques de l'entreprise. La priorité, c’est que les stagiaires devaient avoir abordé les pratiques du métier. Au besoin, on demandait à l’entreprise de faire intervenir un autre formateur pour ne pas accumuler trop de retard. » Dorine Burgot sait que l’AFEST pourrait s’apparenter à une formation sur le tas. A la différence près qu’elle est programmée, structurée, réfléchie de manière pédagogique et qu’elle doit respecter un cadre légal. A la fois cadrée et très souple, elle présente l'intérêt de s'adapter aux particularités de l'entreprise, aux réalités du métier et des compétences, qui peuvent être différentes d’un environnement à l’autre. Par ailleurs, elle représente une solution pour certaines personnes éloignées de l'entreprise et qui craignent peut-être de reprendre des études. L’idée c'est vraiment de leur redonner une chance de se lever le matin, de reprendre contact avec le travail et d'apprendre sur le terrain. Pour un nouvel intervenant, comme c’était le cas du CIPECMA, la principale difficulté réside initialement dans la compréhension du fonctionnement de l’AFEST et le cadre légal. « Sinon, pour moi, tout part de la faisabilité de projet. La première question c’est, est-ce que cette modalité peut répondre à la problématique de l'entreprise ? Si c'est non, on propose une autre formation. Si c'est oui, on étudie tout ce qui en conditionne la réussite, c’est-à-dire le matériel nécessaire, les moyens humains, etc. On ne peut pas mettre en place une action sans savoir s'il y a un formateur qui est disponible et en capacité de l’accompagner, s’il y a un local pour mettre en place les analyses réflexives. Quand ça n’est pas le cas, on n'y va pas. C’est ça la faisabilité de projet. » D’une session à l’autre, certains ajustements ont été faits. Notamment sur les analyses réflexives, puisque la grille élaborée initialement a été jugée insuffisamment pratique par les référents de l’entreprise. La trame a été revue et simplifiée. Dans les idées qui ont émergé, associer une formation en présentiel pour certains points que les apprenants ont eu du mal à voir en entreprise. Ou encore ajouter des apprentissages sur les matières, les différents bois, connaissances utiles pour l’examen final. « Cette AFEST a vraiment permis de donner une bonne dynamique à l’entreprise. C’est pour ça que nous avons voulu organiser deux sessions. D’autant que les personnes recrutées faisaient vraiment partie de l’entreprise, à l’inverse d’un stage. Pour nous, découvrir le métier de menuisier agenceur en même temps, c’était aussi très intéressant. En résumé, une très bonne expérience, compliquée au départ parce qu'on a tâtonné. On a avancé petit à petit, crescendo, en créant nos outils, en se documentant beaucoup sur la mise en place d’une AFEST. Ce projet a été une vraie réussite collective qui a associé l’entreprise, les apprenants, la région, les différents prescripteurs et le CIPCEMA. C’est pour ça que nous sommes encore plus fiers aujourd'hui d'avoir fait ce dossier. »
Coach consulaire pour petites entreprises
La Charente-Maritime compte 22 000 artisans, dont 40% travaillent seuls. Sur toutes les questions de gestion des ressources humaines, ils peuvent solliciter l’aide de la Chambre de métiers et de l’artisanat, notamment lorsqu’ils envisagent un recrutement. En 2021, la CMA 17 a élaboré une nouvelle action à leur attention baptisée « Mon coach RH », retenue dans le cadre de l’appel à projets régional "Initiative Territoriale Emploi". Elle est issue d’une réflexion menée au sein d’un groupe de travail consacré au recrutement, particulièrement l’embauche du premier salarié, qui s’est tenu en 2018 lors des Assises de l'emploi initiées par la CDA de La Rochelle. Pour Lionel Le Kyhuong, chargé de développement ressources humaines à la CMA 17, il est évident qu’il est inutile pour une entreprise de moins de 20 salariés de disposer d’un service RH dédié. C’est là qu’intervient « mon coach RH », dont le principe consiste à accompagner les chefs d'entreprise de l'identification de leur besoin à l’intégration d’un candidat, en passant par la diffusion de l’offre d’emploi et la présélection des profils. Cet accompagnement sur mesure est réparti sur une durée de 21 heures. A l’issue, l’objectif est que le dirigeant soit totalement autonome. La CMA n'a pas attendu « mon coach RH » pour accompagner les entreprises. Sa plus-value, c’est le confort qu’apportent ces 21 heures. « Avec les TPE, nous avons une relation de confiance. Systématiquement, je me déplace dans l'entreprise. J'ai besoin de cerner les attentes du dirigeant, le contexte, l'environnement. C'est un premier échange qui dure souvent 2 à 3 heures. Ils sont demandeurs, je suis là pour travailler avec eux, leur fournir un appui. » Recrutement et maintien Cette action, menée conjointement avec la CCI, comporte en fait deux volets : le premier concerne le recrutement, le second le maintien dans l'emploi ou comment faire en sorte de stabiliser l'effectif de l'entreprise, de le garder mobilisé et motivé. Tout cela passe par le coaching du chef d'entreprise, pour qu'il soit plus serein et sache gérer une situation de crise. Les deux volets sont cumulables, l’accompagnement peut ainsi durer deux fois 21 heures. Seule condition pour être accompagnée, que l’entreprise soit ouverte et qu’elle adhère à la démarche. « Elle ne doit pas chercher le mouton à 5 pattes. Si elle me dit qu’elle veut absolument un homme et pas de femme, je ne peux pas aller dans son sens. Mais ce sont des cas à la marge. 9 fois sur 10, tout se passe très bien et j’arrive à lever des doutes et certaines inquiétudes. » « Ce que je privilégie, c'est la motivation. Je préfère un candidat motivé plutôt qu'un candidat compétent. S’il est les deux à la fois, c’est l’idéal. Mais je préfère quelqu'un qui ne possède pas toutes les connaissances techniques et que l’on peut continuer à former. En matière de recrutement, la plus grosse des difficultés n'est pas de passer à côté d'un mauvais candidat, mais de rater un candidat qu'on n’aurait pas soupçonné compétent. C’est pourquoi j’examine en détails toutes les candidatures. Chaque accompagnement sert vraiment à lever les différents freins. » A noter que les candidats sont identifiés par l’intermédiaire de Pôle emploi, ainsi que par le biais d’annonces sur des sites comme Leboncoin ou Indeed. Idéalement qui dit recrutement, dit anticipation. Mais toutes les entreprises ne savent, ou ne peuvent pas, anticiper leurs besoins et prennent contact avec la CMA en urgence, quand elles sont à court de solutions. Elles ont conscience qu'elles ne s'en sortent plus seules. Certaines sont très ouvertes à l’accompagnement, d'autres ont tellement de difficultés à trouver qu’elles sont prêtes à fournir des efforts, par exemple aménager leurs horaires pour attirer plus de candidats. « Nous ne leur promettons rien. Mais nous faisons tout ce qui est possible et réaliste. Sur les dossiers que j'ai suivis, la majorité des entreprises concernaient le premier recrutement en raison d'un surcroît d'activité. Il y a aussi un facteur chance. Mais si la demande est trop rapide, pas suffisamment préparée, nous avons la possibilité de refuser. » « Nous n’avons pas d'obligation de résultat, mais une obligation de moyens. Parfois, nous trouvons des candidats et nous allons au bout du recrutement. Mais il ne dure pas, parce que le chef d'entreprise n’a rien mis en place ou que l’entreprise souffre d’un problème d'encadrement intermédiaire. J'ai beau bien connaître l'entreprise, je ne maitrise pas tout. Et je ne peux pas me mettre à la place de l’employeur. L 'erreur serait de recopier un accompagnement. A chaque fois je repars de zéro. » L'importance du lien de confiance La CMA et la CCI s’étaient fixé un objectif de 20 accompagnements pour l’année 2021. Les chefs d’entreprises concernés ont tous été satisfaits de ce coaching, mettant particulièrement en avant la relation personnalisée dont ils ont bénéficié. « Sur les actions que l’on menait avant, nous n’avions pas de retours. Comme nous devions fournir un bilan à la Région, nous avons pu disposer de cette évaluation. Pour moi c'était nouveau. Ce qui m'a surpris dans les évaluations, ce n’est pas tant la relation personnalisée, qui était au centre de cette action, mais le fait que les chefs d'entreprise ont apprécié le lien de confiance et le gain de temps qu’elle leur a permis. » Dans sa forme actuelle « Mon coach RH » va progressivement se terminer dans les premières semaines de 2022. La prochaine étape s’appelle « TPE RH+ ». Cette nouvelle action, appuyée par la DREETS, reprend les 2 volets d'accompagnement, en inversant la logique précédente. Il s’agit de s'intéresser à la gestion présente du chef d'entreprise, puis au recrutement. « Cela peut paraître anecdotique, mais pour moi c'est important. » « Parfois, les entreprises continuent à rencontrer tellement de difficultés qu’il me semble nécessaire de voir ce qui se passe chez elles, si elles sont saines et capables de bien intégrer de nouveaux salariés. Si le dirigeant a des bonnes aptitudes, on s’occupe d'abord de ce volet avant de passer au recrutement. On reste sur la durée de 21 heures et globalement sur le même schéma d’accompagnement en face à face. Par ailleurs, alors que « Mon coach RH » ne concernait que la CDA de La Rochelle, nous avons étendu « RH+ » à l'échelle du département. »
RH TPE, pour une relation entreprise tous terrains
Dans les territoires majoritairement ruraux, la relation entre l’entreprise et les intervenants de l’emploi et de l’insertion est plus difficile qu’ailleurs, notamment en raison de la dispersion de ces derniers. Les TPE, qui sont rarement dotées d’un service des ressources humaines, ont le plus souvent du mal à saisir la logique des acteurs, et à comprendre pourquoi elles sont sollicitées un jour par telle ou telle structure, le lendemain par une autre. Fort de ce constat, l’association Transition, le PLIE Ouest Béarn (Mourenx) qui intervient sur les communautés de communes Lacq-Orthez et Béarn des Gaves, a décidé il y a quelques années d’engager une réflexion sur une démarche collaborative visant à fédérer les acteurs du territoire dans les domaines de l’emploi, de l’insertion et du développement économique (chambres consulaires, communautés de communes, pépinières). L’idée était de créer un service unique de prise de contact avec les petites entreprises du territoire et de recension de leurs besoins en matière de ressources humaines. Pour élaborer cette action « RH TPE », Transition s’est appuyée sur une expérimentation menée par ses homologues de Brest, les deux structures appartenant au réseau national Alliance ville emploi. « En 2019, nous nous sommes rapprochés d’eux sachant que nous vivions le même contexte, mais sans savoir comment y répondre », décrit Olivier Béral, directeur de Transition. « Ils nous ont formés à leurs outils avant que nous répondions à un premier appel à projets régional GPEC Territoriale, puis un deuxième pour la période 2021-2022 (Initiative Territoriale pour l’Emploi). D’autres financements, notamment le FSE, complètent la subvention régionale. » Une mise en relation en circuit court Le principe de « RH TPE » est de mettre en place une sorte de circuit court de la relation entre l’entreprise et les demandeurs d’emploi, de façon très pragmatique en contactant directement les petites entreprises qui sont moins visitées, le service public de l’emploi s’adressant plutôt aux entreprises à gros potentiel. « Dans un premier temps notre idée était de multiplier les démarches de ce type, sur l’ensemble du territoire et en diversifiant les secteurs d’activité. La difficulté que nous avons rencontrée, c’est la très grande prudence des entreprises quand elles reçoivent un appel qu’elles pensent être du démarchage. Elles sont tellement peu habituées à se voir proposer un service gratuit qu’on a du mal à obtenir des rendez-vous, beaucoup plus que ce que nous avions imaginé. Nous essayons de travailler par du bouche-à-oreille, de la recommandation entre entreprises. » « Les entreprises qui nous accueillent apprécient notre démarche, parce que nous abordons tous les sujets, pas seulement celui des conditions de travail ou de l’emploi des travailleurs handicapés. Nous essayons d’être le plus ouvert possible, pour ne pas créer nos propres biais, nos propres filtres. Notre priorité est d’identifier les sensibilités et les besoins. » L’échange consiste à partir de l’activité de l’entreprise, des ses projets et difficultés, pour ensuite parler de compétences, de formation, des obligations légales et des documents obligatoires qu’elle ne connait pas toujours. « Nous lui donnons rapidement un premier niveau d’infos avec les éléments à notre disposition. Sur un sujet particulier, nous pouvons lui proposer de prendre contact avec un organisme spécialisé. En fait, nous jouons le rôle de relais ». Les thèmes les plus abordés tournent autour de l’emploi, de la formation, du recrutement. Particulièrement celui de la création du premier emploi, une problématique complexe pour des petites entreprises qui craignent de se lancer parce qu’elles ne savent pas comment aborder la question ou qu’elles ne veulent pas modifier leur façon de fonctionner. Autre caractéristique de l’association, c’est de faire des ponts avec le monde de l’insertion, par exemple de relayer les besoins des entreprises à des structures qu’elles ne connaissent pas nécessairement, comme des chantiers d’insertion. La conseillère de Transition qui effectue le démarchage s’est formée à tous ces sujets. Elle échange avec tous les partenaires afin de bien connaître leurs offres de service. Même si l’offre d’emploi n’est pas toujours au bout de ses rencontres, elle détecte souvent de l’offre cachée. Etablir la confiance Un des effets qui n’avait pas été anticipé, c’est que la relation de confiance qui s’établit avec la conseillère rend parfois difficile le relais vers d’autres acteurs. Certaines entreprises préfèrent continuer à traiter avec le PLIE plutôt que de s’adresser à un autre interlocuteur. « La conseillère a été perturbée par des rappels d’entreprises qui veulent continuer avec nous. Nous le faisons, mais du coup nous ne pouvons pas avoir autant de rendez-vous que ce qui était prévu. Dans ces conditions, difficile de se contenter de faire un aiguillage. » Autre dimension de « RH TPE », la possibilité de faire émerger des thématiques à travailler en collectif. Par exemple la question de l’emploi saisonnier en viticulture. Problématique ancienne, mais qui n’était pas traitée malgré quelques plans d’action. La volonté est de trouver un moyen pour que les emplois bénéficient à des acteurs locaux qui en recherchent, plutôt que de faire venir une main d’œuvre extérieure au territoire. « L’idée était de rassembler tous les acteurs, en essayant de contourner les habitudes des uns et des autres. Et de faire en sorte que tout le monde s’y retrouve, de décloisonner toutes les approches, sans avoir l’impression d’être dépossédé. On accueille à notre standard les demandes des personnes qui souhaitent s’inscrire sur des vendanges, on les répertorie, puis on fait la mise en relation avec les viticulteurs. Mais si nous voulons conserver la logique de RH TPE, il faudrait que le projet viticulture se pérennise sous la forme d’une maison des saisonniers, pour faire ce travail de mise en relation, de captation des besoins, avec l’ensemble des acteurs du territoire. Nous avons prouvé que les mises en relation marchaient, et on pourrait participer à un projet plus ambitieux et construit pour les années à venir. » Pour Olivier Béral, c’est dans la nature des PLIE d’être des acteurs de coordination et d’animation de territoire, d’agir sur le terrain en complément de ce qui se fait déjà et pas seulement pour le compte d’un public en particulier. « Nous avions un objectif d’une centaine de TPE rencontrées par an. Mais dans la réalité nous en sommes plutôt à une cinquantaine, sur un potentiel de plus de 1 000 TPE. Ce que nous trouvons pertinent depuis plusieurs mois, c’est de travailler avec les pépinières, notamment « La Station » à Sauveterre-de-Béarn. C’est très intéressant de travailler avec les projets en émergence. »
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L’entreprise inclusive, ou la diversité comme atout pour l’avenir
Une entreprise inclusive est une entreprise qui met en place tous les moyens pour que les personnes, aussi diverses soient elles, s'intègrent dans ses équipes et dans son fonctionnement. Et, de façon plus générale, qui permet à chaque citoyen, même ceux qui sont le plus en difficulté, de trouver sa place et de participer à la société. « Chez Tous Tes Possibles, nous travaillons sur l’ensemble de la chaîne de retour à l'emploi, avec les bénéficiaires, les structures d'insertion et les entreprises, » explique Emeline Gonneau, cheffe de projet entreprises inclusives. « Nous travaillons en particulier avec les personnes qui cherchent à travailler, et les structures employeuses qui ont du mal à recruter. En les accompagnant pour qu’elles se rendent plus inclusives envers les publics plus éloignés de l’emploi, nous leur permettons de mettre en place un cadre bénéfique pour la pérennité de l’emploi et l’épanouissement de tous leurs salariés. Créée en 2016 à Nancy, l’association Tous tes possibles compte aujourd’hui une équipe de 30 personnes réparties partout en France. Initialement, elle avait pour mission de déployer le projet « tous repreneurs », destiné à accompagner les demandeurs d’emploi vers le « repreneuriat ». Aujourd’hui, parmi ses activités, un « numéro vers l’emploi », 8 collectifs emploi territoriaux, et des accompagnements vers les entreprises, notamment par le biais de son pôle laboratoire, un outil de recherche et développement de solutions innovantes. Entreprises et société « Nous pensons vraiment que les entreprises ont un rôle majeur à jouer dans la transformation de la société, surtout au moment où elles ont beaucoup de mal à recruter. Elles sont un peu déstabilisées par le changement de paradigme actuel. Nous leur proposons de faire des recrutements différents, sans CV, ni lettre de motivation. En faisant en sorte que les équipes terrain participent au recrutement, pas uniquement les RH. » La méthode Tous Tes Possibles consiste à proposer un accompagnement direct aux entreprises, en suivant quelques étapes clés. D’abord rencontrer les équipes pour leur présenter la démarche. Ensuite, mener un diagnostic avec le service RH et, selon les cas, quelques salariés. Cette analyse se base véritablement sur l'existant et sur les dynamiques locales. Elle peut être complétée par un travail sur l'attractivité des métiers. Enfin, établir une feuille de route qui contient diverses propositions, comme la révision des offres d’emploi, la modification des entretiens, ou encore la création d’un événement pour attirer des candidats. Le discours tenu par l’association invite les entreprises à être actrices du changement, à faire bouger les choses, pas seulement en matière de techniques RH. Certaines le font pour des raisons sociales, d’autres dans le but d’améliorer leur « marque employeur ». « Peu importe leur raison, ce que nous voulons, c'est qu'elles s’ouvrent à tous les profils et qu’elles déconstruisent certains a priori. Du moment qu’elles acceptent d'accueillir des nouveaux profils, c’est un changement positif autant pour l’interne que pour l'externe. » Autre pilier de l’action, les « ambassadeurs », des salariés volontaires pour faire découvrir leur métier et qui vont participer activement au recrutement du futur collaborateur. Afin qu’ils soient capables de présenter leur activité à quelqu'un qui ne la connaît pas, il est nécessaire de prendre le temps de les former un minimum, à « pitcher » leur métier, à déterminer les savoir-être et savoir-faire nécessaires pour l’exercer, à détecter des soft skills. Une méthode de recrutement innovante, certes, mais aussi une belle marque de reconnaissance pour ces ambassadeurs qui connaissent la réalité de leur poste, et qui peuvent définir quelles sont les compétences nécessaires pour l’occuper. « Ce que nous faisons beaucoup en ce moment, c'est la mise en place de l'immersion professionnelle. Cela consiste à arrêter le recrutement classique, ou le compléter, en généralisant les PMSMP. Notre approche est expérimentale, elle repose sur l’intuition qu’il faut essayer avant d'acheter. L’objectif est de permettre à tous ceux qui veulent faire évoluer leur situation professionnelle d'y arriver même s’ils ont beaucoup de freins à lever. » L'outil de l'immersion "L'objectif est de proposer des immersions débouchant sur une embauche. Évidemment, au cours du processus, le candidat ou l'entreprise peuvent réaliser ou estimer que ce n'est pas le bon métier, la bonne entreprise ou la bonne personne. Dans ces cas, le processus permet aux deux d'ouvrir leurs horizons, de préciser leurs besoins, envies et critères." La démarche reste expérimentale et nécessite un vivier de candidats motivés permettant de garantir un flux de personnes participant à ces recrutements innovants. Pour cela, Tous Tes Possibles travaille avec tout l'écosystème de l'insertion local, et propose des événements et rencontres sur des formats différents des traditionnels salons de l'emploi qui attirent de moins en moins de monde. La durée des immersions doit rester assez courte. Ce sont les ambassadeurs qui sont le plus à même de définir la durée nécessaire. Elles doivent permettre d’aborder toutes les facettes d’un métier, mais sans donner l’impression à la personne qu’elle vient travailler gratuitement. Avec le recul, Tous Tes Possibles constate que nombre d’entreprises utilisent des process de recrutement trop longs et trop lourds, difficiles à faire évoluer. C’est une sorte de cercle vicieux : comme elles ont des problèmes de recrutement, elles travaillent en flux tendu, et donc peuvent consacrer moins de temps au recrutement… « C’est sûr qu’au départ il faut un certain investissement, de la motivation, parce que nous préconisons des changements majeurs. Cela peut paraître anodin, mais passer d’un bac +2 obligatoire pour accéder à un poste, à une situation où il n’y a plus de prérequis de diplôme, ça n’est pas facile. Finalement, tout le monde admet qu’on gagne beaucoup de temps à ne plus faire lettre de motivations, plusieurs entretiens, etc. » Cette prise de conscience que le CV et la lettre de motivation peuvent constituer des freins pour des personnes qui, pour autant, pourraient très bien s’intégrer, dépend aussi de l’entreprise. Pour espérer tout changer, il faut savoir avancer petit à petit en fonction de ce que la structure peut mettre en place. Si elle n’est pas convaincue par les changements proposés, elle peut revenir à son processus de sélection précédent. « Souvent c'est parce que les entreprises sont au pied du mur qu’elles acceptent de tout changer. Quand elles n’y arrivent plus et qu'elles ont besoin de monde. Pour que ça fonctionne, il faut vraiment des équipes qui y croient, prêtes à y consacrer du temps, de l’énergie, embarquer les collaborateurs. Ça doit vraiment toucher tout le monde dans l’entreprise. » https://majrh.fr/
Le bon candidat pour la bonne entreprise
« Au départ, nous avions prévu d'aller essentiellement sur des territoires où les difficultés des entreprises en matière de recrutement peuvent être plus préoccupantes qu'ailleurs, » explique Henda Lasram, manager - service RH/emploi de la CCI de la Haute-Vienne. « Et sur des secteurs d'activité plus soumis que d’autres à des pénuries de compétences. Malheureusement, ils se trouve que beaucoup d’entre eux sont touchés, et que les entreprises n’ont pas besoin d'être dans des zones fragilisées territorialement pour rencontrer des difficultés. » La démarche proposée par la CCI, s’appelle « Match pour l’emploi ». Son objet, accompagner les entreprises dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre et faire en sorte que des candidats potentiels répondent aux prérequis, moyennant un accompagnement vers l’emploi ou une formation. En mobilisant les aides et dispositifs existants, toutes solutions facilitant le « matching », d'où le nom du dispositif. La CCI a vite abandonné les critères prioritaires qu’elle s’était fixés en décidant finalement d’accompagner toutes les entreprises, quels que soient leurs besoins de main-d’œuvre, en priorité sur des fonctions techniques. « Cela dit, on ne peut pas traiter les difficultés de recrutement dans les services à la personne comme dans l'industrie. Les freins et les obstacles qui font que les candidats ne répondent pas ne sont pas de même nature. » Accompagner les entreprises en tension La CCI n’a bien sûr pas attendu cette action pour être proche des entreprises, surtout les moins de 50 salariés. Elle les accompagnait déjà dans leurs projets de développement, dans les domaines des RH et de l'emploi. « Avec « Match pour l’emploi », elles viennent spontanément à nous. Si elles sont en situation de tension, nous cherchons tout de suite avec elles des solutions alternatives au recrutement. Par exemple, vérifier en interne s’il serait possible de partager le travail. On ne peut pas leur garantir de trouver rapidement le candidat magique. » Le dispositif s’appuie sur un certain nombre de partenaires comme la Boutique Club Emploi, le Département pour les publics RSA, les missions locales, l’Agefiph… Toutes les structures étant à même de mobiliser des candidats sont tenues informées des besoins identifiés. Les offres sont diffusées aussi largement que possible, sur les réseaux sociaux, sur les sites d'emploi, les différentes plateformes spécialisées comme « Talents d’ici » ou « En route vers l’emploi ». Pour faire la promotion de « Match pour l’emploi », la CCI a organisé des réunions d'information avec les entreprises, afin de recueillir leurs besoins et les informer sur les différents dispositifs susceptibles de répondre à leurs attentes. Elle s’est également rapprochée des organismes de formation, dans le but d’imaginer la mise en place de sessions de formation sur les métiers en demande (POEC ou autre). Problème, certains organismes de formation connaissent eux-aussi des difficultés à trouver des candidats. « Si nous disposons de solutions avec les dispositifs existants c'est l’idéal. Sinon, avec les CV que nous avons, nous essayons d’imaginer des passerelles entre les profils des candidats et les attendus de l'entreprise : formation, accompagnement, tutorat… Si ça ne fonctionne toujours pas, nous procédons à du sourcing nous-même, de l'approche directe de candidat, prioritairement sur la Haute-Vienne, mais aussi sur la France entière. » Par ailleurs, certains évènements ont été mis en place, comme un speed meeting pour les métiers de la restauration, un autre pour les services à la personne. Ainsi qu’une conférence sur l'emploi et le recrutement à laquelle ont été conviés les principaux acteurs de l'emploi, des Opco, l’Etat, la Région. Le but étant de faire connaître aux entreprises les solutions proposées qui peuvent être apportées par les différents intervenants, et qui sont souvent méconnus, comme la méthode de recrutement par simulation, le prêt de main d'œuvre, les groupements d'employeurs. Les publics, notamment les demandeurs d’emploi, ont été invités lors de réunions d’information collectives. Elles sont l’occasion de présenter des offres qui correspondent au profil des personnes présentes, de leur expliquer les attendus de l'entreprise, pas forcément sur le plan des savoir-faire mais aussi sur le plan des savoir être, de l’envie et de la motivation. Priorité à la motivation « Le problème ça n'est même plus de trouver des profils adaptés pour certains métiers, mais de repérer des personnes motivées par le métier proposé, ce qui situe la difficulté encore plus en amont de la recherche simple. Au-delà du salaire, souvent les candidats cherchent autre chose, un projet de vie, du sens, une conciliation avec leur vie personnelle, du télétravail quand c'est possible. Ce qui veut dire aussi qu'une partie du travail doit être menée en amont par l'employeur, en diversifiant ses publics, en faisant des concessions sur les horaires, les conditions de travail, etc. » « On va retrouver des problématiques communes à tous les secteurs d'activité, souvent sur la question du montant des salaires, des horaires, du manque de considération. Il ne faut pas s'étonner que la conjonction de ces facteurs ne donne pas envie à des personnes de se projeter. Aujourd'hui, je conseille aux entreprises déjà de fidéliser les salariés en place. C'est une approche globale qui doit se faire aujourd'hui, une équation sur laquelle on essaie de travailler. C'est notre rôle de conseil. » La CCI ne fait pas d'accompagnement vers l'emploi comme les autres prescripteurs. Lorsqu'elle reçoit un CV qui semble pertinent mais incomplet, il n’est pas transmis tel quel à l'entreprise. Le candidat est contacté, pour vérifier s'il est prêt à se former, ou s’il rencontre des problèmes de mobilité. Peut-être qu'il ne répond pas exactement au profil mais qu’il ne lui manque que la connaissance d’un outil ou d’un logiciel. « Si les entreprises nous confient leurs besoins en recrutement, c'est bien pour que l’on fasse le travail en amont. Donc on ne leur transmet que les CV qui nous semblent répondre à tous les critères ou pour lesquels on peut aller vers un matching entre le besoin et la demande. Parfois, le chef d'entreprise revient vers nous pour nous demander notre avis. Mais dans tous les cas c'est lui qui fera le choix. Nous ne sommes pas un cabinet de recrutement. » Financé dans le cadre de l’appel à projets régional « Initiative territoriale pour l’emploi », « Match pour l’emploi » s’est terminé fin 2021. Mais la CCI entend poursuivre l'accompagnement des entreprises en matière de recrutement, et continuer à répondre à leurs difficultés par la sensibilisation et l'information, puis l'accompagnement conseil. Dans tous les cas, elle veut faire passer le message que si les entreprises veulent avoir des compétences demain ou après-demain, il faut qu’elles les forment aujourd'hui. Occasion de rappeler que parmi les voies de formation, l’apprentissage présente de nombreux avantages pour elles et leurs futurs salariés.
Les secteurs du transport de voyageurs et de l’aide à la personne cherchent désespérément des salariés. A première vue, c’est leur unique point commun. Mais en Haute-Vienne, ils se retrouvent sur un projet qui s’appelle Bi-Emploi*. « Voilà des années que l’on essaie de marier des entreprises de transport de voyageurs avec des structures en difficulté, » constate Annick Fougeras, délégation régionale Limousin de l’AFT. « Nous avions déjà évoqué le secteur de l’agriculture, mais c’était compliqué, du fait que les agriculteurs, surtout les éleveurs, ne pouvaient pas se libérer le matin et le soir. Pourtant nous avons constaté que certains transporteurs en comptaient déjà dans leurs effectifs en double emploi. » Principe du projet Bi-Emploi, former des salariés à la conduite d’autocars pour le ramassage scolaire d’un côté et au métier d’auxiliaire de vie sociale de l’autre. A terme, ils occupent à la fois un emploi de chauffeur et un poste d’aide à domicile. Une expérimentation déjà tentée ailleurs en France, notamment en Bretagne avec la FNTV. A Limoges, afin de s’assurer de la viabilité d’un tel projet, l’AFT et le chargé de mission la DREETS ont organisé début 2021 de nombreuses réunions afin d’en expliquer les contours aux prescripteurs, aux structures d’insertion, aux entreprises, afin de savoir celles qui seraient intéressées par le dispositif. Une organisation particulière Le rapprochement n’a pour autant rien d’évident puisque traditionnellement, le transport de voyageurs et l’aide à domicile sont des métiers qui s’exercent surtout le matin et le soir. « Tout le travail en amont a été d’expliquer aux structures d’aide à la personne que si elles étaient intéressées par le projet, elles devaient savoir que, de 7 à 9 h et de 16h à 18h, elles ne pourraient pas disposer de leurs salariés. Et donc, qu’il fallait qu’elles organisent un planning avec une prise de poste vers 9h 30 qui se termine vers 15h30. » « Ici on parle de métiers un peu différents de ce qu’on entend habituellement par aide à la personne. On est plutôt sur des prestations de confort, du ménage, éventuellement de l‘aide au déjeuner. Ça, c’est pour la période où il y a du transport scolaire, environ 8 mois par an. Pendant les périodes de vacances scolaires, les salariés de Bi-Emploi seront disponibles à temps plein pour l’aide à la personne. » Qui dit deux contrats de travail, dit respect de deux conventions collectives avec leurs propres règles. Ainsi, un salarié du transport n’a pas le droit de travailler le week-end. Ce qui veut dire que les personnes qui s’inscrivent dans le dispositif ne travaillent jamais les samedis et dimanches pendant les périodes scolaires. Et que le travail d’aide à la personne ne peut jamais commencer avant la prise de poste en transport le matin, ni après la fin du service de ramassage. Pour que les règles soient claires, une charte d’engagement a été signée par tous les employeurs et validée par la DREETS. De fait, tout le travail d’organisation repose sur les structures d’aide à la personne. Pendant les périodes scolaires, les salariés passent quotidiennement environ 3 heures au volant de leur véhicule et 3h en tant qu’aide à la personne. Le reste de l’année, ils travaillent à temps plein comme aide à la personne. Les salaires sont lissés sur l’année. « Ce n’est pas simple d’expliquer le principe, mais nous avons montré comment cela pouvait fonctionner sur une année. Les professionnels ont dû se pencher sur ces problèmes, qui sont différents selon les structures, certaines faisant plus d’activités de confort que d’autres. Nous avons aussi intégré une contrainte géographique, un temps maximum de déplacement entre les deux postes de travail. » La question des publics concernés par le dispositif s’est très vite posée. L’idée étant de trouver des personnes non formées, qui recherchent un travail à temps plein. Seuls prérequis, avoir 21 ans, être titulaire du permis de conduire et être apte aux métiers. « Je savais que le sourcing allait être un problème majeur. Et la question du financement. Parce que qui dit double formation, dit coûts importants. C’est l’AFTRAL a répondu à l’appel à projets en partenariat avec le GRETA, l’AFT n’étant pas un organisme de formation » La difficile recherche de candidats Le public visé est un peu particulier, des personnes en recherche d’emploi qui ont très souvent des problématiques associées, de santé ou d’inaptitudes incompatibles avec l’aide à la personne. En l’absence de pass sanitaire, certains profils adaptés ont renoncé. D’autres étaient volontaires, mais connaissaient des problèmes annexes de garde d’enfant, de mobilité, des petits moyens qui les empêchent de venir se former à Limoges. Des informations collectives sur les territoires ont été organisées, avec la participation des entreprises, au moins un professionnel du transport ou un représentant des services à la personne, et au moins un des deux organismes de formation. « Ce qui a manqué, ce sont les candidats. Ceux que nous avions vus en juin sont partis sur autre chose. Il nous a fallu remobiliser début septembre pour organiser de nouvelles informations collectives, communiquer par les réseaux sociaux. En tout, nous avons eu environ 80 candidats renseignés, rencontrés de diverses façons. En pratique, les stagiaires commencent par le TP conducteur transport voyageurs qui se terminera en février 2022, avant d’intégrer le titre ADVF au Greta de Limoges, qui se terminera en juin. Une durée de 8 mois à l’issue desquels les stagiaires seront titulaires des deux diplômes. Quand ils débutent leur formation, ils connaissent déjà leur employeur, chez qui ils ont fait des stages d’immersion. « L’idée générale est que ces personnes aient des solutions pour l’emploi et que les employeurs trouvent des gens motivés. Le binôme employeur dépend de la localisation géographique des apprenants. Et il y a des périodes en entreprise pendant la formation aide à la personne, cela fait partie du cursus. » Les binômes employeurs ont beaucoup échangé. Ils ont aussi dû s’adapter aux candidats, à leur lieu de vie, ce qui est plus facile en général pour les transporteurs qui ont souvent des postes à pourvoir en proximité, mais n’est pas toujours le cas des structures d’aide à la personne. La formation arrivera à son terme en juin 2022. Compte tenu de l’intérêt qu’elle suscite un peu partout en France, en tant que solution pour des personnes éloignées de l’emploi, elle pourrait connaître une suite. « Si elle doit être renouvelée ici, il faudra davantage anticiper la partie sourcing. Le travail en amont avec les entreprises a été le plus long, la charte d’engagement est très précise, ça ne poserait pas de problème pour le dupliquer. Pas plus que de construire des binômes employeurs, il suffit qu’ils se parlent sur un territoire. Le financement des formations peut s’articuler de différentes façons. Trouver des candidats est la partie la plus dure, nous avons assez peu de prise sur ce problème. » *Bi-Emploi est un dispositif financé par l’Etat dans le cadre d’une ADECT (Action de Développement des Emplois et des Compétences Territoriale), le FSE et la Région Nouvelle-Aquitaine.
Emploi formation, une dynamique locale en Val de Garonne
Le Val de Garonne (Marmande / Tonneins) possède une certaine richesse en matière d’emploi industriel, de l’ordre de 18% (pour une moyenne de 13% en France), avec quelques sociétés de taille importante, notamment dans le secteur de l’aéronautique (Asquini Nexteam, Lisi Aerospace). Mais il a également des publics salariés peu qualifiés en grande proportion (23% pour une moyenne nationale autour de 17%). En 2017, suite à de nombreux retours d'entreprises qui connaissaient des difficultés de recrutement, Val de Garonne Agglomération s’est engagée dans une démarche de Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences Territoriale (GPECT) mettant l'accent sur les métiers de l'industrie. Selon René Zaros, vice-président chargé du développement économique, « Nous avons toujours tendance à dissocier économie locale et emploi de la formation professionnelle, alors que cette dernière est un outil important à leur service. Nous les élus, nous devons nous saisir de cette problématique quand bien même cela est un travail de longue haleine. » Le diagnostic, mené en 2018, a montré que les entreprises ne connaissaient pas suffisamment bien les outils de formation implantés sur leur territoire et que ces derniers n'étaient pas adaptés à 100 pour 100 à la demande locale. A la même époque, la Région Nouvelle-Aquitaine a proposé de mettre en place sur les territoires voisins de Marmande et de Langon, une expérimentation baptisée « Recruter », ciblée sur les métiers de la transformation des métaux et de la mécanique industrielle. « La proposition de la Région répondait tout à fait à la problématique de notre territoire, » commente Emilie Denaules-Malbec, chargée de mission. « Nous avons bâti un plan sur 5 axes, avec des actions autour de la communication, de l'orientation, la mise en place d'un réseau partenarial ainsi qu’un travail autour des ressources humaines. » L’expérimentation « Recruter » a été lancée en février 2019, et ses premières actions en mai de la même année. Par exemple, un travail sur des offres d'emploi vidéo a été réalisé afin d’essayer de changer le regard sur certains métiers et d'attirer de nouveaux candidats. En septembre, a été organisée une semaine de l'industrie avec notamment des visites d'entreprises et une exposition sur l'industrie locale en partenariat avec Pôle emploi. Dynamiser les partenariats « Notre GPECT et l'expérimentation « Recruter » avaient le même objectif. C'est pour cela que nos deux démarches se sont imbriquées naturellement. D’autant que le collectif d'acteurs était déjà constitué. « Recruter » est venue en complément et a permis une structuration de notre GPECT. Ce lien entre Langon et Marmande a permis de créer de nouvelles dynamiques. La véritable force de la démarche réside dans le travail partenarial : lorsque nous avons des contacts avec des recruteurs, ce sont nos partenaires, notamment Pôle emploi, Cap emploi et la mission locale qui mobilisent les publics en adéquation avec leurs besoins. » Pour René Zaros, « en matière d'emploi il faut avoir la sagesse de faire la politique des petits pas. Nous avons entre 500 et 750 offres permanentes à pourvoir sur le territoire. C’est difficile de mettre en adéquation ces emplois et les personnes en situation de chômage. » Pour créer la rencontre entre employeurs et demandeurs d’emploi, des cafés de l'emploi thématiques sont organisés régulièrement, ainsi que des « job dating inversés » au sortir des formations, pour que les chefs d'entreprises viennent rencontrer les diplômés avant qu'ils ne rentrent sur le marché du travail. « Avec des groupes de 10 à 15 personnes, nous avons parfois plus d'entreprises que de jeunes. Ça fonctionne bien, mais par petites touches. » Dans le domaine de la formation, Val de Garonne Agglomération travaille avec la ville de Marmande à la création, sur une friche industrielle, d’un campus des formations industrielles. Il fait lui-même partie d’une réflexion globale autour de la création d'une « halle technologique » qui s’intègre dans l’expérimentation « Recruter ». L'idée est de mettre en réseau les organismes de formation des deux territoires (Val de Garonne et Sud Gironde), en dépassant les frontières administratives, afin de créer entre eux une complémentarité et un lien, ainsi que doter les plateaux techniques d'équipements supplémentaires. Ce campus propose d’ores et déjà des formations en soudure et chaudronnerie, d’autres sont en cours de construction telle que la maintenance industrielle. « Quelques entreprises nous disent qu'elles n'ont plus qu'une personne capable de faire tourner certaines machines. C'est une des raisons qui expliquent la mise en place des formations en soudure et chaudronnerie. La maintenance industrielle devrait venir aussi bientôt. Sur ces métiers, nous avons de la main-d'œuvre qualifiée qui arrive, mais il y a des problématiques qui reviennent régulièrement sur d'autres métiers comme chauffeur routier, plombier, maçon, charpentier. Progressivement, nous allons étendre notre champ d'intervention à d'autres secteurs d'activité, cela va aussi certainement s'imposer. » Le levier de la connaissance des métiers « Sur la jeunesse, nous essayons aussi d'être performants », ajoute René Zaros. « Ça me tient à cœur parce qu'il faut aller chercher les jeunes là où ils sont, c'est-à-dire dans les écoles et au moment de leurs intentions d’orientation en 4e et 3e. Je crois que nous nous devons d'aller chercher cette population pour l’informer sur les métiers et la former. Si les entreprises veulent pérenniser leur activité, il faut qu'elles aient cette volonté de former. » « Recruter » a duré une année. La démarche menée en Val de Garonne s’est poursuivie et a été renforcée par l’attribution du label « Territoire d'industrie ». L’année 2020 a été perturbée, avec elle les animations de découverte des métiers avec les collèges. Néanmoins, quelques intervenants ont tout de même pu se déplacer. Les actions en matière d’emploi, les cafés et les job dating inversés ont pu se tenir, mais aucun évènement au-delà d’une quarantaine de personnes n’a été organisé. Pour l’instant, le salon bisannuel de l’emploi est maintenu. Parmi les points positifs, les rencontres informelles entre organismes de formation et entreprises. Pour René Zaros, « avec « Recruter », ce qui a été bénéfique aussi, c’est le retour en termes de confiance des entreprises vis-à-vis des acteurs institutionnels. Ces relations se poursuivent, et lorsqu’on les sollicite, elles répondent présentes et viennent à nos animations. » « La dynamique emploi s’est étoffée », ajoute Emilie Denaules-Malbec. « Nous accompagnons les entreprises qui veulent recruter, nous n’avions pas prévu ce type d’actions au départ. Sur le moyen terme, c’est toute la partie formation qu’il nous faut travailler. Dans ce domaine la réactivité est moins grande. Mais c’est important pour notre territoire que les organismes de formation répondent au mieux aux besoins des entreprises. Le travail sur l’orientation et découverte des métiers est une action à long terme mais tout aussi importante afin de pouvoir satisfaire durablement les besoins des entreprises. »
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