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A La Rochelle, les Spielberg en herbe
Traditionnellement, le Festival International du Film de La Rochelle qui se tient début juillet, accueille des artistes en résidence durant toute l'année pour réaliser des projets de courts métrages, écrits et tournés dans l’agglomération rochelaise. Selon ses termes, il entend contribuer à la sensibilisation des jeunes spectateurs. Il veut aussi offrir un accès privilégié aux pratiques cinématographiques à différents publics, notamment ceux qui se trouvent souvent éloignés de la culture. C’est dans le cadre de son dispositif « FEMA – Action ! », que le festival a pris contact avec la mission locale La Rochelle Ré Pays d'Aunis, afin qu’elle mobilise un groupe des jeunes et leur propose de créer un court-métrage en compagnie d’une réalisatrice bordelaise. La première rencontre s’est déroulée en 2022. Elle vient d’être reconduite cette année, avec la même réalisatrice qui a souhaité renouveler l’expérience. « Le but c'est que les participants prennent vraiment part au projet, que les jeunes en soient acteurs de A à Z » précise Bénédicte Maurin, conseillère référente des actions culturelles. « Que ce soit au niveau de l'écriture, des dialogues et du scénario, même si la réalisatrice avait déjà son idée en tête, ainsi qu’au niveau de tous les aspects techniques du tournage, la prise de vue, la prise de son, l’acting. » A l’issue, le résultat de ce travail sera projeté lors du festival, à l’occasion d’un après-midi dédié à la diffusion de tous les courts métrages réalisés pendant la résidence. Plus généralement, la mission locale est très axée sur l'accompagnement, la recherche d'emploi, la formation, l'insertion. Depuis quelques années, elle cherche à s’ouvrir à d’autres actions, notamment à dimension culturelle. Dans cet esprit, elle entretient notamment un partenariat avec les Francofolies et avec les Escales documentaires, le festival international de la création documentaire. L’objectif est double. Ouvrir les jeunes sur ce qui se passe sur le territoire de La Rochelle, culturellement assez dynamique. Ainsi que mener un travail sur des nouvelles compétences et capacités, et sur la confiance en soi. La valorisation par la culture « Nous essayons vraiment de nous positionner un peu plus sur ce type d'actions, qui sont tout aussi valorisantes que de faire de la recherche d'emploi pure. C’est l’occasion pour les jeunes de démontrer leurs talents et de réelles capacités. C'est dans ce but que la coopération s'est faite avec le festival du film. Globalement, nos publics semblent très éloignés de tout ça. Le monde de la culture leur paraît assez inaccessible en fait. Pour nous, c’est l’occasion de leur dire qu’il existe des choses, parfois gratuites, auxquelles ils peuvent accéder facilement. On peut vraiment valoriser le jeune, compléter son CV, parce que la participation à un court métrage est un élément intéressant à y faire figurer. » La mission locale devait réunir une demi-douzaine de jeunes, accompagnés par Anne-charlotte Giraud, une coordinatrice du festival. Une première réunion d'information s’est tenue en mars, en présence de la réalisatrice. Elle est venue présenter le projet, ainsi que le travail effectué l’année précédente, pour qu'ils se rendent compte en quoi il consiste réellement. Pas de sélection à l’issue. Le choix des participants s’est fait naturellement par libre adhésion. Il faut qu’ils soient en mesure de se rendre disponibles pendant une semaine, de plus à une période où beaucoup d’entre eux commencent à occuper des emplois saisonniers. Les jeunes retenus ne correspondent pas à un profil particulier. « Quand on propose des actions de ce genre, nous les ouvrons vraiment à tout le monde. Nous savons qu'il y a des jeunes qui sont plus tournés vers les métiers du spectacle et de la culture. Ceux-là ont une plus grande appétence et vont peut-être venir plus facilement. D’autres ne se projettent pas du tout dans ce secteur mais, par curiosité, ils prennent ça comme une vraie occasion d’enrichir leur parcours. » Pour les conseillers, c’est l’occasion de leur parler découverte des métiers et des emplois liés à la réalisation, dans tous ses aspects techniques. Certains des jeunes qui ont participé l'année dernière sont revenus pour la deuxième édition. « Pendant la semaine, mon rôle est d’accueillir les participants. Je fais un point dans la journée pour savoir si tout se passe bien. Nous n’avons pas l'obligation d'être présents, la réalisatrice et la coordinatrice du festival du film gèrent très bien les groupes sans nous. En plus les jeunes ont un travail à faire, ils partent filmer à l'extérieur, notre présence n’est pas forcément utile. » On peut constater l’effet de ce type d’actions dans le parcours d'un jeune lors des entretiens individuels. Chaque conseiller fait un bilan avec le jeune qu’il accompagne. Elles peuvent également permettre de reprendre contact avec des jeunes qui n’étaient plus forcément en lien régulier avec leur conseiller. Cependant, il s’avère que dans leur majorité, ils ne sont pas particulièrement centrés sur les activités culturelles. Ils connaissent les Francofolies car elles sont très médiatisées, c’est beaucoup moins vrai pour un rendez-vous comme le festival du film. Casser les représentations « Un de mes objectifs lorsque je veux développer des actions comme celle-là, c'est vraiment de leur faire découvrir tout ce qui peut se passer ici, parce qu'on sent qu'il y a une certaine distance entre les jeunes et la culture au sens large. Soit ils ne connaissent pas, soit ils ne cherchent pas à savoir, ou encore ils pensent que ça n’est pas fait pour eux. Ils peuvent avoir une image élitiste de certaines choses qui se passent sur La Rochelle. » « Mon but est vraiment de leur montrer qu’ils y ont droit, que ça fait partie de la richesse de leur territoire. Et que des perspectives professionnelles leur sont ouvertes. Pas seulement à celles et ceux qui ont vraiment un intérêt pour ce secteur, qui voudraient évoluer vers tout ce qui est événementiel, culturel. Cette action leur permet d'avoir une petite porte d'entrée, de commencer à constituer un peu leur réseau. » Contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’engouement des jeunes n’est pas plus fort pour les activités culturelles que pour d'autres actions. Ceux qui participent le plus, le font généralement parce que cela fait partie de leur projet. Finalement, ce sont des profils bien particuliers qui se lancent. Cela dit, les conseillers sont parfois très surpris par les capacités des jeunes à s’engager, à se dépasser, à progresser et à évoluer. La valeur ajoutée de « FEMA – Action ! », c’est que les participants sont vraiment acteurs du projet, véritablement en immersion, au sein d’une équipe de tournage encadrée par des professionnels. Ils sont dans le « faire » plutôt que de se contenter d’être spectateurs. Pour autant, faire un court métrage, réaliser des petites capsules vidéo, nécessite un certain engagement. « Quand on propose des projets qui sortent un peu de l'ordinaire au-delà du CV, des lettres de motivation, de la recherche d'offres d'emploi, les jeunes ont du mal à s’emparer les choses. Je pense que leurs préoccupations liées au contexte familial, social et professionnel peuvent freiner leur envie et leur curiosité. D’où l’importance de proposer des actions visant à la découverte de nouveaux univers. »
Etudier près de chez soi, la solution campus connecté
Autrefois, c’était l’ancienne maison du garde champêtre. Après restauration par la mairie de Saint Macaire (Gironde), elle héberge depuis 2 ans le « campus connecté » porté et animé par la mission emploi formation du Pôle Territorial Sud Gironde, un syndicat mixte réunissant plusieurs communautés de communes. Le bâtiment comporte une salle spacieuse avec une grande table de travail, un équipement de visioconférence, une salle informatique, des espaces de travail. « C’est un lieu que nous avons voulu plaisant, accueillant et convivial », décrit Fiona Joseph, coordinatrice-tutrice. « Cette maison a vraiment une âme. Ce n'est pas juste une salle fonctionnelle et un peu impersonnelle. Les étudiants s’y sentent bien, c'est un peu leur deuxième maison. » Les Campus Connectés sont des lieux d'études labellisés à l'échelle nationale par le ministère de l'Enseignement supérieur de la recherche et de l'innovation. La France en compte aujourd’hui 86, dont 9 implantés en Nouvelle-Aquitaine. Ils sont majoritairement portés par des collectivités territoriales, mais peuvent aussi l’être par des structures associatives. Leur rôle est d'accueillir et d'accompagner des étudiants de tous âges, aussi bien des jeunes en formation initiale, des primo étudiants qui viennent d'obtenir le bac, que des actifs en reprise d'études qui entament un nouveau parcours de formation à distance. Ils doivent respecter un cahier des charges, ainsi qu’établir un partenariat avec un établissement universitaire dit de proximité, qui n'est pas nécessairement celui auprès duquel les étudiants suivent leur formation. Pour le Campus Connecté du Sud Gironde, il s’agit de l’université de Bordeaux qui est partenaire de six Campus Connectés de la région. Une autre vie étudiante « Notre campus comporte 15 places, donc on est plutôt sur des micros effectifs. Bien évidemment, il s'agit d'une autre expérience étudiante que celle qu'on peut connaître sur un grand campus universitaire. Au sein d’un de nos groupes, il y a vraiment des profils très variés en âge, en parcours de vie, en formations suivies. Tout au long de l'année il peut y avoir des entrées et des sorties du dispositif, qui se veut très souple. Je pense que c'est ce qui fait son charme auprès des bénéficiaires, à savoir qu’il convient autant aux formations courtes, aux formations longues, qu'à celles qui se déroulent à cheval sur deux années universitaires, etc. » Plusieurs éléments essentiels caractérisent un campus connecté. Il s’agit avant tout d’un site équipé et connecté, ouvert aux étudiants du territoire qui disposent ainsi d’un lieu où se rendre pour progresser dans leur formation à distance. Autre élément important, ils offrent un accompagnement individuel des étudiants, un tutorat qui peut prendre plusieurs formes, du coaching au conseil. Il ne s’agit pas nécessairement d’un accompagnement pédagogique, mais plutôt d'un soutien à l'étudiant et d'un accompagnement dans ses démarches tout au long de sa formation. « La dernière dimension est la dynamique collective qui s’opère au sein des campus, et qui contribue à motiver les étudiants inscrits. On ne leur demande qu’une chose, être présents sur le site 12 heures minimum par semaine. Les étudiants n'arrivent pas toujours à respecter ces conditions, mais c'est l'engagement de départ. C’est nécessaire pour que je puisse faire mon travail de tutrice, que je puisse assurer le suivi individuel et que la notion de dynamique et d'animation collectives du campus prenne tout son sens. » Les animations prennent des formes diverses, sur la base de thématiques. Par exemple, « bien s'informer, bien raisonner, bien parler, dans le monde d'aujourd'hui et de demain ». A cette occasion, des animateurs de Cap Sciences et l’association « les Débatteurs » ont effectué un travail avec les étudiants sur la prise de parole en public, l'éloquence, les présentations orales, etc. Pour sa part, l’association « IMS Project » (Informations pour le Monde Suivant) est venue inciter les étudiants à s’interroger sur la qualité de leurs sources d’informations. Autre exemple avec un projet qui portait sur le thème « cultiver son bien-être ». Dans ce cadre, ont été organisés des ateliers yoga, des séances de basket, une randonnée culturelle pour aller à la découverte de Toulouse-Lautrec, enfant du pays, et une formation aux premiers secours dispensée par l'union départementale des sapeurs-pompiers. Ont également été organisées des visites d'entreprises, des rencontres avec des professionnels, avec le sous-préfet de l'arrondissement de Langon venu présenter l'organisation des compétences sur le territoire. Répondre à un véritable besoin Au regard des deux premières années du campus, il s’avère que la formation à distance répond effectivement à un besoin. « Je pense que beaucoup n'auraient pas envisagé de suivre des études s’ils ne pouvaient pas bénéficier de cette solution à distance. Pour certains, notamment les plus jeunes, les primo étudiants qui viennent d'obtenir le bac, il s'agit souvent d'un choix par défaut. Parfois, ils ne trouvent pas de place en présentiel à l'issue de la campagne Parcoursup. La limite, c’est que la formation à distance est une formule exigeante. Il faut être organisé, autonome, discipliné et régulier. C'est difficile à faire si on est tout seul. Le campus connecté offre justement ce cadre qui aide beaucoup à ne pas décrocher. » Le Pôle Territorial Sud Gironde met à disposition une quinzaine d’ordinateurs portables financés par la Région Nouvelle-Aquitaine. Si la plupart des étudiants sont déjà bien équipés, ils peuvent s’en servir pour des besoins ponctuels, ou faire un emprunt pour la durée de leur formation. Le campus dispose également de moniteurs, de claviers et de souris, si les étudiants veulent se créer un poste de travail un peu plus confortable. « Très tôt il y a eu un dialogue qui s'est mis en place avec les établissements, les lycées du territoire, publics et privés. Ce dialogue perdure. Chaque année, j'interviens dans les lycées pour faire connaître le dispositif. En revanche, nous sommes un peu surpris d’avoir relativement peu de primo étudiants, et plus d'actifs en reprise d'étude que ce à quoi on s'attendait. Ces derniers représentent presque 50% des adhésions. » Pour la suite, le campus connecté aimerait accueillir davantage de personnes en formation professionnelle, pas seulement sur des formations diplômantes, mais aussi des formations certifiantes et professionnalisantes. Il pourrait accueillir des demandeurs d’emploi qui suivent une formation à distance dans le cadre de leur accompagnement par Pôle Emploi. Ce n’est pas le public envisagé au départ, mais qui pourrait être plus nombreux dans les années à venir. En Sud Gironde, le Pôle Territorial envisage de déployer le dispositif. Une nouvelle antenne ouvrira ses portes à La Réole en septembre prochain. A terme, une troisième antenne devrait voir le jour à Bazas. La volonté est de multiplier les lieux pour que les résidents du Sud Gironde puissent avoir accès au dispositif au plus près de chez eux. « Ce qui est formidable avec le campus connecté, c'est qu’il suscite tout un maillage autour de lui, un réseau d'intervenants vers lesquels il est facile de se tourner pour parler mobilité, service civique, travail à temps partiel… Au-delà de la mission d'accompagnement en termes de tutorat, ce qu'on apporte aux étudiants est bien plus large. Nous créons les conditions de mise en relation avec tout un ensemble d'acteurs du territoire, un accompagnement qui va bien plus loin que celui d’un tuteur dans l'enseignement supérieur. »
Dans le cadre de ses missions, l’Ufolep aborde des problématiques de société comme la santé, la prévention des conduites addictives, la parentalité, le maintien de l'autonomie des seniors, etc. Son support principal, celui des activités physiques. Plus récemment, l’Ufolep 64 a décidé de s’occuper d’insertion professionnelle des jeunes, en déployant son projet « bouger pour son avenir » en territoire prioritaire à Bayonne, avec le soutien de la Région Nouvelle-Aquitaine et son appel à projets « Expérimentations en matière d'orientation". A l’origine du projet, un certain nombre d’actions qui étaient déjà menées dans ce même QPV, en lien avec le GIP DSU de l’agglomération bayonnaise, avec des jeunes en difficulté ou qui pouvaient être amenés à se questionner sur leurs projets ou leur orientation. A l’occasion des activités sportives, des séances collectives ponctuelles, les animateurs percevaient différentes problématiques relatives à l’insertion ou à la mobilité, qui constituaient autant de freins à l’épanouissement de ces jeunes. A l’époque, l’Ufolep réfléchissait à la mise en place d’un parcours coordonné, avec un accompagnement régulier sur la durée. « Nous n’avions pas de parcours complet mais des bouts de parcours », précise Bertrand Bedin, agent de développement sport et société à l’Ufolep 64. « Nous sommes agréés pour la formation premiers secours, on forme aussi aux métiers du sport, et nous avons pensé qu’un accompagnement des jeunes pouvait être intéressant au regard de leurs questionnements, sur une tranche d’âge qui est difficile à capter pour les structures du territoire. Surtout dans une période où les perspectives ne sont pas très positives, qui vient se rajouter pour certains à des difficultés familiales ou de perte de repères. » Par ses dispositifs ludiques et activités existants, l’association ambitionnait notamment de toucher des publics de 16 à 25 ans orientés par Pôle emploi et la mission locale, mais également de s’adresser à ceux totalement sortis du circuit d'accompagnement. Education, sport et insertion « Bouger pour son avenir » repose sur le triptyque éducation, sport et insertion-emploi. La dimension sportive s’appuie sur des activités physiques attractives, susceptibles de créer du lien avec des jeunes en difficulté, voire en rupture. En matière d’éducation, l'idée était de partir des objectifs éducatifs de l'éducation populaire. La partie insertion emploi consiste, à la suite des temps collectifs, de faire un point de situation individuellement. En résumé, le projet comporte plusieurs phases, une phase de mobilisation, une phase d'accompagnement collectif pendant laquelle tous les jeunes pratiquent ensemble différentes activités, ce qui permet de repérer ceux qui ont besoin d'être épaulés, par rapport à leurs projets ou leurs problématiques. Puis en phase d’accompagnement individuel, l’association identifie les points de blocage et trouve une manière de les lever à terme, par exemple l'accès au permis. Les jeunes sont également informés des dispositifs de droit commun dont ils n’ont pas forcément connaissance. Les participants s’engagent à être présents régulièrement pendant au moins 6 mois. Aucune obligation contractuelle, cet engagement est volontaire. « Au-delà c'est un peu plus compliqué, parce que leur parcours évolue rapidement. Ils sont à un âge où leur situation bouge beaucoup. Et si on leur propose un accompagnement trop long, on prend le risque de les perdre. L’idée c'est qu’ils utilisent ce laps de temps avec nous pour construire leur projet, même s‘ils peuvent partir à tout moment. Sur une année, on fait 2 groupes d’une douzaine de jeunes, un par semestre. Sur la deuxième période, on ne lâche pas totalement le premier groupe, puisque nous avons amorcé quelque chose, nous voulons préserver ce lien. La charnière se fait pendant l'été parce que, pendant cette période, beaucoup de jeunes se positionnent sur des offres d'emploi. À partir de la fin août, c'est important de réenclencher une dynamique, que l'on puisse les mobiliser plutôt par semestre. Fin 2022 nous avons eu notre quatrième « promotion ». » Répondre aux besoins des jeunes Lors de la première rencontre, les animateurs essaient de déterminer les projets de chacun, s’ils en ont un, et dans ce cas, ce qu'ils aimeraient faire comme activité. C’est là qu’ils évaluent les besoins de chaque jeune et que, en fonction de leur situation et des freins éventuels, ils envisagent un accompagnement complémentaire. Dans l’idéal, le rythme des temps collectif est mensuel. En individuel, des contacts réguliers pour savoir comment leur situation évolue, s’ils ont des besoins particuliers et pour leur proposer d'autres initiatives. Par temps collectifs, il faut comprendre une activité sportive, karting, pirogue hawaïenne, randonnée, vélo ou autre, à laquelle sont conviées des entreprises, une auto-école, un organisme de formation, etc. Le but étant de créer la rencontre avec différents acteurs, faire circuler son CV. La découverte de milieux professionnels fait aussi partie du programme, au besoin en scindant le groupe pour proposer un choix, autant dans la nature de l’activité que dans le secteur considéré (BTP, services à la personne…) afin que chacun s’y retrouve. Sachant que les effectifs comptent environ 40% de filles. La crise Covid a plus que jamais mis en lumière l’importance de la notion de lien chez les jeunes. L’association savait qu’il existait des disparités importantes dans ce public, mais peut-être pas au point de rencontrer quelques jeunes complètement perdus. Elle a dû intégrer le fait que, pour certains jeunes en perte de repères, des activités à priori simples comme se rendre à un rendez-vous peuvent représenter une difficulté ou un effort. D’autres savent au contraire très bien ce qu’ils veulent, et ce qu’ils ne veulent pas en termes d’horaires et de conditions de travail. Selon les profils, la démarche d’accompagnement est dès lors très différente. « Les jeunes qui ne connaissent pas de difficultés particulières, qui ont un projet, sont importants pour nous au sein de l’action. Parce que même si l'accompagnement ne va pas être, pour eux, directement lié à l'emploi, ils sont très utiles en termes de mobilisation et de dynamique pour les autres jeunes. Leur participation peut créer des effets d'entraînement. Pour des jeunes qui sont isolés et en galère, c'est très important. » « Au départ, nous pensions nous concentrer sur la partie insertion professionnelle, mais on a constaté que c’est l'accompagnement global qui est un déclencheur pour tout le reste. On l’avait peut-être un peu sous-estimé. Dans la période, même s'il y a des secteurs qui connaissent des difficultés et de la précarité chez les jeunes, le milieu de l'emploi n’est pas totalement bouché. Le taux de chômage est relativement bas et il y a des propositions. Dans ce contexte, le plus important c'est d'amorcer une démarche active, et de multiplier les apports de positivité. Pour ça, l'activité physique est un bon support. »
Privilégier l'accompagnement global des jeunes
Christine Desport est responsable de secteur Mission Locale Rurale Centre et Sud Vienne (Civray – Vienne). La structure anime depuis 2021 le projet « Inter'Actions Jeunes», lauréat du PIC RMPI. En quoi consiste Inter'Actions Jeunes ? Notre démarche est de repérer les publics fragilisés et de les remobiliser. Dans notre territoire rural, c'est vraiment un enjeu majeur parce que ces « invisibles » existent et qu’ils sont peut-être encore plus isolés que les jeunes de milieu urbain. En plus de leur isolement, ils souffrent du manque de mobilité, notamment de transports en commun. Nous sommes partis de l’idée que nos dispositifs et notre façon de fonctionner depuis des années dans les missions locales, ne correspondent pas à ce public qui manque de repères et de cadres. Comment peut-on les attirer, les motiver à revenir dans la communauté ? Nous avions déjà travaillé sur ce public en 2020, dans le cadre d’un dispositif porté par l’Association Régionale des Missions Locales (ARML) pour le collectif des missions locales. Il nous avait permis d’amorcer les choses, mais on estimait qu'on n’avait pas suffisamment œuvré, essentiellement à cause du contexte très compliqué. Nous avions mis des actions en place, mais on était plutôt sur du repérage. Quelle est votre approche ? Nous avons monté un partenariat local fort. Cela a pour effet de créer une dynamique locale et de nous obliger à repenser notre façon d'agir en direction des jeunes. On voit aussi qu'avec Inter’Actions Jeunes et le Contrat d'Engagement Jeune, nous avons des dispositifs différents et qui, intelligemment combinés, apportent une réponse motivante aux jeunes. En fait, notre métier est en train d'évoluer. Nous étions beaucoup sur l'accompagnement individuel, même si on organisait des ateliers de remobilisation. Ces accompagnements doivent continuer mais l’offre d’ateliers collectifs se renforce. Nous sommes en train de renforcer ce qui forge l’ADN, la valeur première des missions locale à savoir l'accompagnement global, à travers une approche qui a trait à l'animation, pour redonner envie et remobiliser. Inter’Actions Jeunes, comme le CEJ, est vraiment l'affaire de tous les conseillers et non de conseillers spécialement dédiés à ces dispositifs. La mise en place d’ateliers très variés permet de maintenir le niveau de mobilisation et de motivation des jeunes. Cela favorise aussi le raccrochage des jeunes qui peuvent venir expérimenter avant de s’engager. Comment effectuez-vous votre repérage ? La nouveauté, c’est que nous intervenons hors les murs. Deux associations partenaires ont été financées pour l'acquisition d'un minibus aménagé, ce qui nous permet d’aller faire des permanences au plus proche de la population. De plus, nous sommes maintenant labellisés information jeunesse. Nous avons aussi recruté des jeunes en service civique pour être des ambassadeurs auprès des invisibles, ainsi que des lycéens qui peuvent être en situation de décrochage. Nous intervenons également dans les mairies, les MJC ou encore les épiceries sociales pour montrer qu'on existe et pour que les jeunes, les familles, trouvent un interlocuteur de proximité pour répondre à leurs questions. Selon vous, quelles sont les conditions d’un « bon » repérage ? Bien sûr, il faut communiquer sur les réseaux sociaux. Mais je pense surtout que sortir de notre structure est incontournable. Avec le camion AMOR, les permanences chez des partenaires de type MJC, l’appui des jeunes qui sont en service civique. C'est travailler aussi avec des associations sportives pour orienter des jeunes et faire de la remobilisation à travers le sport. Ça pourrait aller jusqu’à tenir une permanence dans un café par exemple. Nous avons même évoqué la possibilité de faire du porte-à-porte, mais ça demande des moyens humains. Sans compter qu’il n’y a pas seulement les jeunes invisibles, il y a aussi tous les autres qu'il nous faut accompagner. Pour l’instant, quels ont été vos résultats ? Nous avons repéré beaucoup plus de jeunes cette année que par le passé. D’ici fin 2023, nous avons prévu un total de 126 jeunes dont 50 en ZRR. Sur notre territoire, les zones péri-urbaines sont limitées, mais elles concentrent le plus de population, donc c'est là où y a le plus de potentiel. Il faut se dire que certains jeunes voient les missions locales comme une nouvelle institution qui implique des obligations pour eux. Il faut casser un peu cette image, le côté très formel de nos accueils, parce que c'est aussi ce qui les dissuade de venir à la mission locale. Nous disons souvent aux jeunes qu’il faut travailler la confiance en soi et oser franchir la porte. C'est aussi à nous de nous adapter, faire la démarche inverse en allant vers eux, nous remettre en cause et revoir notre façon de guider les jeunes. Que faites-vous avec Inter’Actions Jeunes en matière de remobilisation ? Nous avons reconduit des actions comme « Dès-code ton code », pour les préparer au code de la route. Ou « Projette toi », comment un jeune imagine son avenir, pas seulement en termes professionnels. Et puis nous allons beaucoup travailler sur le numérique, afin de raccrocher des jeunes autour d'ateliers plus innovants, comme participer à la Gamers Assembly, travailler sur les fake-news ou sur le pilotage de drone. Certains nous demandent de pouvoir animer un temps collectif pour les autres. Cet été par exemple une jeune a animé un atelier « bien-être » et a donné des conseils pour prendre soin de soi, se maquiller… Nous faisons en sorte d’afficher des activités ludiques, artistiques, même si on continue de leur parler d’insertion professionnelle, de formation. On s'appuie sur des activités proposées par des partenaires, une MJC, un centre socioculturel ou une épicerie sociale qui organise des « journées famille. » Nous avons aussi les vacances accompagnées avec visite d’entreprises, à travers lesquelles on propose à des groupes de partir ensemble une semaine, de monter un budget, etc. Bref, nous essayons de diversifier les choix pour que chaque jeune ait sa place et trouve un intérêt à venir participer. Que font les jeunes ensuite ? Nous évaluerons ce que deviennent les jeunes, quel est le résultat concret derrière. Ça peut être un emploi, une entrée en formation ou en Contrat d’Engagement Jeunes. Mais une sortie positive, ça peut très bien être un jeune qui a travaillé sa mobilité, qui a obtenu son permis de conduire, trouvé d’autres solutions de mobilité, ou encore appris à gérer son budget. Tout ça pour nous, c’est un parcours réussi. Tous les progrès peuvent être valorisés. Je crois qu'il faut voir au-delà du projet professionnel et parler du projet de vie. Les différentes solutions à l’issue du parcours ne sont pas des objectifs absolus en soi, mais ce sont des éléments positifs pour nous. Ça veut dire qu’un jeune trouve sa place dans la société, le monde du travail, qu’il reprend un parcours de formation, qu’il signe un contrat d’apprentissage, un contrat de professionnalisation ou un contrat aidé. Ou encore qu’il s’inscrive dans un parcours d'accompagnement plus intensif avec la mission locale. Quels enseignements tirez-vous de cette expérience ? Cette expérience nous conduit à adopter de nouvelles pratiques en termes d’accompagnement et faire preuve d’innovation, mais aussi à mieux comprendre les jeunes générations et l’évolution sociétale . J’entends trop souvent dire que les jeunes n’ont plus la valeur travail. Mais c’est faux. Ils connaissent la valeur travail mais ils ne la vivent pas de la même manière que nous. A côté de ça, il y a d'autres valeurs qui sont importantes pour eux. Ce sont les curseurs qui ont bougé. On revient sur « l'agir ». Avec les injonctions de placer les personnes en emploi ou en formation, on a eu un peu tendance à oublier qu’il y a des choses à travailler en amont. Et que ça, il faut aussi le financer parce que ça demande beaucoup de temps de travail. Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences : https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx
De la création d’activité en milieu coopératif
Davina HUNDERT est directrice de l’association parisienne Cités Coop, une coopérative d’activité et d’emploi qui propose un accompagnement personnalisé à la création d’activité. L’association est lauréate de l’appel à projets national du PIC « 100% inclusion ». Ouverte au public depuis l'été 2020, elle vient d’ouvrir une antenne à Bordeaux. Comment est née Cités Coop ? Cités Coop est une initiative née au sein de Cité Caritas en 2017. A l’occasion de deux « journées de l'innovation » qui ont réuni tous les acteurs autour de l’association, nous avons évoqué les besoins qui n’étaient pas ou mal couverts afin de trouver une solution à ces manques. Dans le cadre de nos échanges, une animatrice qui travaillait en centre d'hébergement d'urgence pour femmes nous a parlé des ateliers qu’elle animait autour de la couture, de la cuisine et de la création de bijoux. Les femmes y montrent des vraies compétences. Y compris des personnes migrantes qui souhaiteraient créer leur activité, mais qui ne trouvent pas de dispositif adapté. Nous sommes sortis de ces journées de l'innovation en nous disant qu’il fallait que l’on trouve une solution pour l’accompagnement de ces publics, et quelle forme il serait possible de lui donner. Avant cela, nous avons mené des enquêtes auprès des publics hébergés dans les centres d'hébergement à Paris pour vérifier si le constat de l'animatrice était partagé par les personnes accueillies. Effectivement il y avait chez elles une volonté de création d'activité. Vous avez fait le choix de vous constituer en coopérative, pourquoi ? Nous avons fait ce choix après une petite expérimentation de coopérative éphémère en 2018 pour modéliser notre accompagnement. Le modèle des coopératives d'activité et d'emploi nous paraissait le plus adapté. Notamment parce qu'il est le plus sécurisant pour démarrer une activité avec l'utilisation du contrat d'appui au projet d'entreprise (CAPE), puis du contrat d'entrepreneur salarié (CESA) quand l'activité devient rentable. Avec le CAPE, la personne n’a pas besoin de se créer de statut et elle garde ses droits antérieurs. Comme son chiffre d'affaires tombe sur le compte professionnel de la coopérative, il ne vient pas impacter ses ressources. Cela lui permet de constituer un petit coussin de sécurité sur le début de l'activité, avant de pouvoir se verser une rémunération. Quelle est la nature de votre accompagnement ? Nous avons un taux d'encadrement qui est quasiment le double de ce qui se pratique habituellement. Notre accompagnement socioprofessionnel intervient en début de parcours sur la levée des freins périphériques. C’est vraiment de l'accompagnement social pur et dur. En fin de parcours, au cas où l'activité ne deviendrait pas rentable, la personne peut formuler un nouveau projet professionnel avec tout ce qu’elle a appris pendant son parcours. Notre pari, outre notre objectif que les personnes développent une activité qui finisse par être rentable et qu'elles puissent en vivre, c’est que le parcours entrepreneurial qu’elles vont suivre peut leur servir de levier pour une réorientation professionnelle. On y aborde beaucoup de sujets : gestion, comptabilité, numérique, communication démarche commerciale. C’est un parcours riche en apprentissages, ainsi qu’en découverte métier. Quels sont vos publics ? Nous visons un public PIC au sens large. Nous avons aussi environ 30% d'entrepreneurs hors PIC qui n'ont pas de difficultés particulières, mais qui peuvent venir chez nous. Après une grosse année d'expérience, on constate que les publics sont plutôt des gens issus de quartiers politiques de la ville, des demandeurs d'emploi de très longue durée et des jeunes en difficulté. On commence aussi à toucher des seniors à la retraite, qui cherchent des compléments d'activité sans forcément vouloir un salaire complet. Nous sommes sur des publics peu qualifiés, parfois avec des difficultés à parler français. Sur les premiers ateliers on n’arrive pas à parler tout de suite de business plan et à rentrer dans le dur du sujet. Nous expliquons notre approche aux entrepreneurs un peu plus classiques, on se rend compte que la mission sociale de notre structure les intéresse aussi. Aider ceux qui ont un peu plus de difficulté, ça a beaucoup de sens pour eux. Ils acceptent que la pédagogie soit un peu plus lente, qu'ils avancent un peu moins vite mais au bénéfice d'un collectif qui est enrichi. Comment les publics vous connaissent-ils ? Les personnes peuvent arriver vers nous si elles sont accompagnées par un professionnel de l'emploi ou du social. Nous commençons aussi le sourcing direct en QPV. Nous faisons au minimum une réunion d'information collective, pour expliquer notre accompagnement, nos outils et le fonctionnement coopératif parce qu'il est vrai qu'il n'est pas si simple à appréhender. Nous recevons les personnes intéressées pour un diagnostic autour de leur projet. Elles ont parfois besoin d’un accompagnement en amont avant de commencer. Si une personne se sent prête, nous effectuons un diagnostic socioprofessionnel. S’il n’y a aucun obstacle et qu’elle a envie de venir, nous lui proposons une semaine d'intégration. Pendant les mois qui suivent, elle doit assister à une série d'ateliers obligatoires selon son projet. Elle bénéficie d’un accompagnement individuel, avec des rendez-vous réguliers pour suivre le lancement de l'activité. La suite dépend de la façon dont elle se développe, s'il y a besoin de corriger l'offre ou d'aller chercher de nouveaux clients, etc. Vous avez reçu combien de personnes ? Pour l'instant nous avons accompagné une vingtaine d'entrepreneurs. Notre objectif est d'en toucher 180 sur 3 ans à Paris et à Bordeaux. Nous pouvons aller un peu au-delà si nous recevons beaucoup de demandes. Dans notre dispositif la sortie positive c'est la signature du CESA, la création d'entreprise, un accès à l'emploi ou à la formation qui, finalement, débouchent sur une orientation qui convient aux personnes. Il faut surtout qu’on limite très fortement le nombre d’entre elles qui sortent sans solution. Même si c'est inévitable puisqu’il y en a toujours qui abandonnent. L’un des enseignements de cette année, c’est que certains publics ont du mal avec ce qu’on peut appeler un « frein de légitimité. » Qu’envisagez-vous pour la suite ? La priorité du moment c'est d'arriver à toucher les bonnes personnes pour que le projet ait du sens. Le message que nous voulons faire passer aux prescripteurs, c'est qu'il ne faut pas avoir peur de l'entreprenariat, que ça n'est pas nécessairement risqué. Des dispositifs comme le nôtre permettent de sécuriser des parcours, ça n’est pas une mise en danger de la situation de la personne quand elle est déjà précaire. Et ça n'est pas plus risqué que d'aller faire une formation où rentrer en IAE. En Nouvelle-Aquitaine, la création de l'antenne de Bordeaux était une occasion qui s’est présentée à nous. Nous n’avons pas envisagé, pour l'instant, de nous développer sur un autre territoire. Il faut que l'on stabilise le modèle et nous verrons après 2023 s'il y a d'autres territoires qui ont envie de créer localement une structure similaire. Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences : https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx
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Le panier formation des Restos du Coeur
Marie France HUGON est présidente des Tremplins des Restos du Cœur, qui est l’organisme de formation des Restos du Cœur. Leur projet "Les tremplins 100% mobilisés" est lauréat du PIC 100% inclusion. Que représentent aujourd’hui les Restos du Cœur ? Les Restos du Cœur, c’est un siège national à Paris et, dans chaque département, au moins une association départementale. En tout il y en a 117. Chacune a un contrat d'agrément avec l'association nationale, tout en gardant une certaine autonomie. L'aide alimentaire reste le socle des Restos, mais aujourd'hui « l’aide globale à la personne » fait partie du Projet Associatif National des Restos. Un accompagnement sur les problématiques de santé, de langue, d’accès au droit à la justice, au travail, est proposé aux personnes accueillies dans les centres d’activité des Restos. Quel est le rôle des Tremplins dans cet ensemble ? Les Tremplins sont uniques aux Restos. Ils ne sont pas comparables aux associations départementales, dans la mesure où ils n’assurent pas d'aide alimentaire. Nous sommes un organisme de formation, une association juridiquement indépendante sous contrat d'agrément avec les Restos du cœur. Nous proposons des parcours d’insertion professionnelles aux personnes accueillies dans toutes les structures Restos (Centres d’Activité, Ateliers Chantiers d’Insertion et structures logements) de toutes les Associations Départementales. Quels sont les formations que vous proposez ? Nous proposons deux types de parcours. D’abord un parcours de Mobilisation Renforcée vers l'Emploi, pour les gens très éloignés de l'emploi. Ensuite un parcours de professionnalisation construit avec des entreprises partenaires, sur des métiers en tension pour lesquels les entreprises peinent à recruter Nos parcours de formation s’adressent aux personnes accueillies par les centres d'activité, autrefois appelés « centres de distribution », qui leur proposent toute une variété d’aides et d’activités. Les centres nous envoient des personnes rencontrées par des bénévoles, ou par les travailleurs sociaux des Ateliers Chantiers d'Insertion et des quelques structures d'hébergement que compte le réseau. Elles sont orientées vers nous parce qu’elles ont passé la porte des restos à un moment donné et ont partagé leur problématique emploi avec un bénévole ou salarié. Comment intervenez-vous ? Nous n’intervenons sur France entière que depuis le conventionnement avec la CDC dans le cadre du programme 100% Inclusion. Pendant longtemps, nous n’avons travaillé qu’en Île-de-France par manque de ressources. Jusqu’à récemment, certaines associations départementales ne connaissaient pas notre existence, justement parce que nous étions très Franciliens. Il y a déjà eu tout un travail de communication interne à faire. Le plus difficile, c'est d'arriver à convaincre, informer correctement, pour que les bénévoles et salariés dans les ateliers chantiers d'insertion s'emparent de cet outil d’insertion que sont les Tremplins. Et en pratique ? Nous formons des groupes de 10 et 15 personnes, après avoir déterminé un territoire pertinent pour nos publics. La mobilisation est très longue, il nous faut d’abord commencer par les bénévoles et les salariés sur le projet. Une fois qu’ils sont convaincus, on peut démarrer. Charge à eux de convaincre les publics qui sont très éloignés de l’emploi et rencontrent souvent des problèmes de mobilité. Nous essayons de lever les freins, en facilitant les transports, en prenant en charge les frais de déplacement et de restauration, éventuellement des moyens de garde pour les femmes qui ont des enfants à charge. Quelqu’un qui a envie de se rapprocher du monde du travail va rencontrer un bénévole, échanger avec lui. Parfois, c’est long à se mettre en place, mais le bénévole pourra lui parler des Tremplins et de ses parcours. Si la personne est intéressée, un premier échange diagnostic peut être fait. Quelles sont les conditions pour participer à une formation ? Il faut respecter trois conditions pour intégrer un de nos parcours. Être majeur, avoir une autorisation administrative de travailler sur le territoire national, comprendre et se faire comprendre en français. Nous n’avons pas de grosses exigences linguistiques, mais nous ne faisons pas appel à des interprètes. Par ailleurs pour rejoindre un parcours de mobilisation renforcé vers l'emploi, il faut en avoir l'envie et la motivation. Dans la pratique, comment se déroule un Parcours de Mobilisation Renforcée vers l’Emploi ? Lors des parcours, une partie des ateliers est assurée par des bénévoles volontaires, notamment les savoirs de base, le numérique. L’autre partie par des prestataires que l'on rémunère. A Paris, nous avons une équipe de bénévoles qui peut se déplacer pour animer les sessions. On fait aussi intervenir une psychologue du travail pour tout ce qui relève des codes de l'entreprise, et une association qui travaille sur l'image de soi, des choses aussi simples que les questions de présentation, d'hygiène, de code vestimentaire. Nous faisons également beaucoup d’entraînements aux entretiens d'embauche. Nous proposons des visites d’entreprises qui acceptent de nous ouvrir leurs portes, même si elles n’ont pas d’emplois à proposer. C'est l’occasion pour certains d’entrer pour la première fois dans une entreprise, de découvrir un secteur d'activité, un site industriel, un hôtel, un café restaurant, une grande surface… Quand on dit visite, on fait en sorte qu'il y ait des échanges avec les salariés, pour que nos stagiaires prennent vraiment la mesure de ce qui se fait dans l'entreprise et des métiers envisageables pour eux. En matière de formation professionnelle, nous avons des partenaires historiques des Restos, par exemple Carrefour avec lequel nous organisons un parcours pour le métier de boucher, avec un contrat de professionnalisation à la clé. Nous faisons quelque chose d'un peu semblable avec Sodexo, pour des Employés Techniques de Restauration. Nous travaillons à quelque chose d'un peu semblable avec la branche de la propreté, c'est un long processus. Que se passe-t-il à l’issue des formations ? Dans le cadre des Parcours de Mobilisation Renforcée vers l’Emploi on ne garantit pas une sortie à l'emploi. Notre engagement, c'est de valider un projet professionnel, de leur faire découvrir le monde de l'entreprise et du travail. Une fois que le parcours est terminé, nous effectuons un suivi à 6 mois avec un conseiller d'insertion professionnel et des bénévoles. Souvent, une personne garde le contact avec le bénévole qui l'a orientée dans le centre qu’elle continue à fréquenter, ne serait-ce que pour l'aide alimentaire. Il peut aussi y avoir un accompagnement sous forme de parrainage ou de coaching par d’autres bénévoles. Un réseau, ça peut apporter beaucoup de choses. Dans le cadre des parcours de professionnalisation, Carrefour proposent un contrat de professionnalisation d’un an, Sodexo propose aux personnes formées et ayant acquis un premier niveau de qualification, un emploi sur l’un de leurs sites. Quelles sont les perspectives pour les Tremplins ? Avec l'expérience, nous constatons qu’il est plus facile de mobiliser bénévoles et salariés sur cet outil dans des villes moyennes comme Alençon ou Montauban. Nos propositions sont mieux accueillies, probablement parce que les dispositifs y sont moins nombreux. Nous avons cependant déjà travaillé sur Bordeaux, Toulouse, Lyon… Notre force, est l’accompagnement de grande proximité que nous assurons. Quand une personne passe la porte d'un centre d'activité des restos, on lui réserve un accueil « inconditionnel ». Elle repartira forcément avec quelque chose à manger, mais ça ne s'arrête pas là. On l’informe aussi, au besoin lors d’un deuxième entretien, de toutes les autres aides dont elle va pouvoir bénéficier dans son centre. Notre objectif est que toutes les personnes salariées et bénévoles des Restos connaissent les parcours Tremplins, et que nous puissions ainsi former des équipes qui localement seront mobilisées sur l’organisation de nombreux parcours. Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences et du PACTE de la Région Nouvelle-Aquitaine : https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx
Les multiples dimensions de la mobilisation
Parcours Expérience 3D est une action nationale de remobilisation du réseau des Maisons Familiales et Rurales. Elle est menée, entre autres, depuis fin 2020, par le Centre de Formation et Promotion (CFP) de Champcevinel, près de Périgueux. Maelle Périot, conseillère en insertion professionnelle et chargée de vie sociale, en est la coordinatrice. Parcours Expérience 3D est lauréate du PIC 100% Inclusion. En quoi consiste Parcours Expérience 3D ? C’est une action de remobilisation qui mixe des temps collectifs et des temps individuels. On ne voulait pas proposer que du collectif, parce que ça ne correspond pas forcément à tout le monde. 3D, c’est parce qu’on prend en compte les personnes dans toutes leurs dimensions. Sa durée est de 15 mois maximum, ce qui est très appréciable, on a assez de temps pour s'adapter au rythme de chacun. On n'a pas cette pression qui peut exister dans d'autres actions. La première étape de Parcours 3D consiste à prendre le temps de bien identifier les besoins et les freins de la personne. En fonction de ça, on lui propose des temps collectifs, pas forcément les mêmes pour tous (ateliers confiance en soi, cuisine, etc.). Notre souhait, c'était vraiment d'individualiser, de cibler au maximum ce qui va correspondre à chaque participant, de ne pas les mettre en difficulté parce qu’on sait que la perspective de travailler en groupe peut en faire fuir certains. Quelles différences avec une autre action du même type ? La différence c’est que nous n’avons pas d’ateliers pérennes, réguliers, qui suivent un rythme fixe. Là ce n’est pas le cas. On met en place les ateliers en fonction des besoins des personnes. C’est là que réside la nouveauté, et en même temps ça représente une vraie complexité d’organisation. Je fais des ateliers individualisés pour travailler sur la recherche d'emploi ou sur l'orientation avec des outils comme Pass’Avenir. Comment arrivent les candidats ? Les publics peuvent être repérés par les prescripteurs, mais aussi par les assistantes sociales, ou par les associations pour ceux qui sont en attente de titres de séjour. Normalement, une personne arrive chez nous après un entretien tripartite. Ou seule si son référent estime que c’est possible. Selon les cas, je commence par lui présenter le cadre de l’action ou j’essaie d’en savoir plus sur sa situation, de connaitre ses questionnements, ses attentes. Et si elle est d’accord pour participer. On se revoit la semaine d'après pour reparler des objectifs. Je ne fais jamais signer l'accord de participation les premières fois, parce que je vois assez rapidement quelles sont les personnes qui ne vont pas adhérer, par exemple si elles ne viennent pas au deuxième rendez-vous. Qu’entendez-vous par entretien tripartite ? Un entretien tripartite ça veut dire qu’on fait un entretien à trois, avec la personne, son référent et moi. On définit ensemble les objectifs de l'accompagnement. Toujours dans le but d'être au plus proche de ses besoins et de sa situation. Et puis, surtout, pour lui montrer qu’on travaille en partenariat. Je tiens beaucoup à ces temps tripartites, parce que je trouve que ça rassure les gens et que ça les sécurise. Parfois, le temps ne permet pas de faire ce rendez-vous en présentiel, mais il y a toujours au moins un échange téléphonique avec son référent, en présence de la personne. Quel est le public concerné ? C'est un public plus éloigné de l'emploi que celui qui suit nos formations. Même pour la formation du premier niveau, assistante de vie aux familles, il faut à minima que les personnes aient la capacité de reprendre une formation, d'aller à l'emploi, de tenir sur la durée, de passer des évaluations, etc. Pour avoir été CIP pendant plusieurs années, et avoir travaillé sur des ateliers de remobilisation, c'est un public que je connais bien. Mais je constate que nous avons beaucoup de mal à l’accrocher maintenant. Nous recevons plus des femmes, plutôt des femmes isolées. Et environ pour moitié d'origine étrangère, avec les difficultés en français qui font que l’intégration à l’action n’est pas possible. Pour certaines, on est à la limite, elles cherchent surtout un soutien administratif. Comment abordez-vous les participants ? Je pars du principe que s’ils sont là, c'est qu'ils ont envie. Et que s’ils sont là, c'est bien parce qu'il y a des difficultés et des freins. Je ne vais pas attendre d'eux qu'ils respectent une régularité parfaite. Je sais que les premiers mois, ils vont manquer des rendez-vous, qu’ils ne feront pas toujours les démarches convenues, même si c'est quelque chose d'anodin. Le plus important, c'est de ne jamais couper le lien. S’ils sont absents, je les appelle, je dédramatise et je fixe un nouveau rendez-vous. Si on ne faisait que du collectif, on attendrait des participants une certaine rigueur, ne serait-ce que vis-à-vis du groupe. De toute façon, au fur et à mesure de l'avancée du parcours, la régularité s'installe. Après je m’adapte au rythme de chacun. La difficulté, c'est que les temps collectifs sont extrêmement importants, et si le nombre de participants est trop faible, ils n'ont plus lieu d'être. A certains moments, si on constate des blocages par exemple, nous faisons de points de situation, si besoin avec les référents. Il arrive qu’on arrête un parcours, mais c'est rare. Même si on est obligé de l’interrompre, étant donné que les attentes sont vastes, la personne arrive toujours à avancer. Peut-être pas selon nos critères à nous mais pour elle, c’est toujours un progrès. Quel est votre positionnement ? Je suis un peu multi casquettes et je dois faire attention à ne pas me laisser déborder, on pourrait vite dériver vers le rôle de confidente. Je peux entendre toutes les situations, mais je ne peux pas tout traiter, alors je dois rapidement orienter vers d’autres intervenants. Il faut aussi dire que j’ai le beau rôle, je n’ai pas la charge de problèmes comme le RSA, j'ai beaucoup plus de temps à leur consacrer. Du coup je peux agir dans l'urgence. Si quelqu’un a besoin de me voir, je peux m'arranger pour le recevoir dans la journée. Ça c'est quelque chose d'important pour moi. Un conseiller pôle emploi ou une assistante sociale ne peut pas le faire. Quand c'est un public vraiment très en difficulté, très désocialisé, on sait que pour le tenir il faut être proche de lui. Il n’est pas autonome, il va avoir peur, il y a des tas de choses qui peuvent engendrer des ratés. Combien avez-vous réalisé d’accompagnements ? Pour l’instant, j'ai accompagné 15 personnes et j'en ai reçu 19 autres qui n'ont pas intégré l’action. On a eu beaucoup de personnes avec des difficultés de maîtrise de la langue française, pour lesquelles c'était un peu prématuré en termes d'accompagnement. J’ai eu aussi plusieurs personnes qui avaient été orientées sur nos formations, mais qui n’avaient pas les prérequis, donc elles ont été redirigées vers moi, mais n'ont pas voulu adhérer à Parcours 3D. Et qu’avez-vous eu comme résultats ? Quatre personnes sont allées en formation et une personne est partie en emploi. J’ai aussi eu des personnes pour qui l'accompagnement se termine de façon prématurée, essentiellement à cause de problèmes de santé. Ça n’est pas forcément négatif non plus, parce que dans tous les cas il y a des choses qui ont avancé. Le pire c'est vraiment une personne que je perds ou qui n'a pas adhéré parce que ça ne correspondait pas à ses attentes, elle n’en voyait pas le sens, elle n’était pas prête. Mais tout le reste est positif parce que forcément il s'est passé des choses pour elle, une prise de conscience. La temporalité est différente pour chacun, mais c'est de toute façon toujours positif. Quels sont selon vous les améliorations qu’il faudrait apporter à l’action ? Nous sommes partis à la rencontre de chaque partenaire, Pôle emploi, Cap emploi, le conseil départemental, la mission locale. On est allés leur expliquer quel était le but et le principe de cet accompagnement, ce qu'on pouvait proposer, comment on souhaitait que ça se passe et pour quel public. Malgré ça, la difficulté que nous rencontrons depuis le départ c'est le manque de prescriptions. Seul le conseil départemental nous a envoyé des personnes. C'est un superbe outil, mais dont les partenaires ont eu du mal à se à se saisir. Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences : https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx
La citoyenneté, un jeu comme les autres ?
En 2020, deux anciens managers du groupe La Poste décident de créer « Les Autrement Dit ». But de la structure, accompagner des managers par le biais de solutions ludiques. Le premier outil développé dans cet esprit concernait l’entretien professionnel : « Kiparle de Demain », pensé comme un parcours ludique entre manager et collaborateur Puis sont venus d’autres jeux à destination des entreprises, en fonction de leurs besoins en termes de gestion de projet, gestion de conflits. La structure a aussi abordé le monde de l’éducation, initialement à la demande d’un lycée poitevin pour préparer des étudiants de BTS à leur entretien de recrutement en stage ou en premier emploi. C’est avec les équipes de Sciences Po Poitiers, que « Les Autrement Dit » ont imaginé un projet sur l’engagement citoyen. A l’origine, il s’agissait d’accompagner les étudiants dans leur parcours civique de 3 ans, pendant lequel ils sont censés mener un projet citoyen en s’engageant auprès de structures diverses. Son nom, « Kisengage », pensé comme un produit hybride, à la fois jeu de société et application numérique, afin de toucher tous les publics. « Ce qui était intéressant, c'était de révéler l'engagement citoyen avec des jeux collaboratifs en mode physique, » explique Manuel Duperthuis, co-dirigeant. « Donc un jeu de plateau avec des cartes, et une application numérique pour effectuer un suivi du parcours d'engagement citoyen pendant leurs 3 ans. Elle permet de visualiser la progression de chaque utilisateur, ses connaissances des différentes thématiques citoyennes grâce à des quiz, des échanges en communauté, des propositions d'articles. » Privilégier les échanges entre joueurs La volonté de départ était que les joueurs échangent sur des thématiques aussi diverses que l'environnement, le droit du vivant, la sexualité, la lutte contre l'exclusion, la liberté et la justice, ou encore la démocratie, la coopération, l'éducation, les médias. « Kisengage, c'est avant tout une méthodologie, par la mise en place d'outils ludiques. Son principe est de pousser les participants à endosser des rôles différents, même si leur opinion est à l’inverse de celle qu’on leur demande de défendre. On voulait vraiment créer un jeu d'échange des visions de chacun et on voulait créer une application pour qu’ils suivent leur parcours personnel sur ces différents sujets. Le travail de conception a été mené à l’origine avec un groupe pilote d'étudiants de Sciences Po pour déterminer les thématiques pertinentes, parce que « l'engagement citoyen » reste une notion un peu vague. » Le jeu se déroule en plusieurs phases, à commencer par une première réflexion sur les thématiques. Les participants sont invités à en choisir une, ou la tirer au hasard, y réfléchir collectivement, chacun faisant part de sa perception. La phase suivante est consacrée à la conception du discours, ainsi qu’au débat. C’est l’occasion d’aborder les fake news, apprendre à identifier les mauvaises informations ou celles qui ne sont pas forcément vérifiées. Une autre est consacrée à l'évolution des thématiques dans le temps, une sorte de frise chronologique dans laquelle il faut replacer telle loi ou événement, les replacer dans leur contexte et en comprendre la progression. L’accès à l’application est individuel. L’utilisateur avance au fur et à mesure de ses réponses à différents quiz. Il déverrouille progressivement les étapes les unes à la suite des autres. A terme, cet outil permettra d’organiser des moments de jeu à distance avec d’autres joueurs. Il inclut les règles des différents jeux physiques, afin que les utilisateurs soient le plus autonomes possible. « Dans nos jeux, on se rend compte que si on laisse une plus grosse place à l'autonomie, les échanges se font plus facilement. Dès qu'un référent est présent, c'est un peu plus compliqué à d’obtenir de la matière. » « Nous essayons d’élaborer des règles du jeu accessibles, sinon on prend le risque de perdre beaucoup de monde. Ce qui est intéressant, c’est de réfléchir autrement par rapport à ces grandes thématiques citoyennes, d’aboutir à des prises de conscience et de croiser les différentes visions. Quel que soient les utilisateurs, on peut leur faire prendre conscience qu’un sujet de société n’est pas juste pompeux et descendant, qu’ils peuvent aussi agir dessus. » Si le jeu a été initialement développé avec des étudiants en Sciences Po, il est utilisable avec n'importe quel public. Il a été proposé à différentes structures comme les missions locales, les maisons de quartier, qui ont besoin de donner un peu de sens à la question de l'engagement citoyen, qui ne peut se résumer à quelques cours d'instruction civique, mais qui concerne la vie de tous les jours. L’outil est assez souple pour faire du sur-mesure par rapport aux besoins d'un partenaire. La pratique au-delà de la théorie « Une fois que l’on intègre une structure pour faire son parcours civique, la théorie ne suffit pas. C’est la mise en pratique, la mise en action via le jeu, qui fait que les joueurs vont se révéler. On organise des sessions d'une heure à une demi-journée. Plus, ce serait trop long, et c'est compliqué à mette en place pour les structures. Les phases de jeu peuvent se faire en 1 heure, on peut les interrompre et les reprendre pendant une autre séance, organiser une autre phase la semaine d’après. Les animateurs ne sont pas bloqués par rapport à un atelier. » L’accompagnateur, l'encadrant ou le professeur joue un rôle d'impulsion et de suivi, qui est assez différent de sa posture habituelle. Il ne s’agit pas d'enseignement en tant que tel, il faut l’aborder plutôt comme un complément ludique de groupe en mode collaboratif. Dans les collèges et les lycées, les enseignants doivent consacrer du temps aux questions de citoyenneté. « Kisengage » leur propose de le faire par d’autres moyens que ceux dont ils disposent, de façon autonome puisqu’ils peuvent l’utiliser quand ils le veulent, en fonction de leur emploi du temps et de leur programme. « De toute façon, ce qui est contraint ne fonctionne pas pour les professeurs, les élèves, les étudiants. Donc il faut proposer une solution à laquelle consacrer une heure ou plus, sur une telle ou telle thématique. Cette souplesse, dans notre réflexion initiale et dans notre cahier de charges, c'était obligatoire. » La méthode a été testée fin 2021, avec des groupes pilotes d'étudiants, des associations étudiantes, des groupes d’élèves, des maisons de quartier. Le contenu existe, mais il n’est pas encore pleinement opérationnel. L’appel à projets régional "Expérimentations de solutions numériques innovantes" a permis de faire l'expérimentation. L'application est quasiment terminée, mais demande encore du travail en termes de développement, de serveurs, etc. « Après cette période d'expérimentation, nous sommes dans la phase de développement des contacts dans différentes autres structures, d’organisation des tests. Nous avons des points d'échange prévus avec quelques établissements scolaires, par exemple avec un collège de la région qui est intéressé pour la partie égalité fille garçon. » « De fait il y a un grand phénomène en cours autour de l'engagement citoyen. On constate bien que l'engagement dans l'associatif est de plus en plus en perdition, alors qu'il y a des gros besoins. Notre enjeu c'est, comment faire prendre conscience de ces besoins grâce à notre approche ludique. » https://latribulad.com https://lesautrementdit.fr
Horizon, boîte à outils pour projet professionnel
Maloup Bory est responsable territoriale pour les Compagnons Bâtisseurs dans les Landes. Elle est référente du projet « Horizon » en Nouvelle Aquitaine. Le projet Horizon est porté par un consortium de plusieurs associations régionales Compagnons Bâtisseurs et par l’Association Nationale des Compagnons Bâtisseurs. Il est lauréat du PIC 100% inclusion. Que font les compagnons bâtisseurs ? Nous travaillons sur deux champs d’action principaux : l’insertion sociale par l’habitat et l’insertion professionnelle. Une de nos actions phares est l’auto-réhabilitation accompagnée. Nous allons chez des ménages modestes, sur prescription sociale, pour les accompagner dans la réhabilitation de leur logement. Les personnes participent de A à Z au projet de rénovation, elles en sont complètement actrices. Outre l'objectif de mieux vivre chez soi, notre objectif est la remobilisation plus globale des ménages chez qui nous intervenons. Finalement, le chantier est aussi un prétexte. De fait, nous croisons depuis longtemps le public cible de l'appel à projets 100% inclusion. Un public qui est en demande d’accompagnement dans le réinvestissement de leur logement, mais aussi un accompagnement plus large, plus personnel et professionnel. Et nous faisons plus que le croiser, nous allons chez lui, on entre dans l'intimité des personnes. Pendant un chantier, en général 10 jours, il se passe beaucoup de choses de manière très informelle. Une relation de confiance se crée avec l'animateur, les gens se confient. Quelle est l’origine du projet Horizon ? Jusque-là, tous les besoins exprimés par les gens, nous n’en faisions pas grand-chose, par manque de temps et de financement. On avait un sentiment de frustration par rapport à ça. D’autant que nous avons une réelle compétence dans l'accompagnement des personnes, puisque nous animons aussi des chantiers d’insertion. L'idée du projet Horizon est d’essayer d’y apporter une réponse par un accompagnement socioprofessionnel des publics que l’on croise sur nos chantiers. Il a démarré au printemps 2020. Quelle est sa plus-value ? Nous ne sommes pas dans le cadre d'un accompagnement classique de type chantier d'insertion. Nous faisons du sur-mesure. Ce qui est intéressant, c’est que ça questionne aussi le cadre de l'accompagnement classique. On se sert du chantier comme d’un prétexte à la rencontre des publics pour créer une relation de confiance avec eux. Et si besoin, les accompagner par la suite à l'issue du chantier. Quels sont les publics que vous touchez ? En général ce sont des personnes qui ont plus ou moins un lien avec nous. Soit ce sont des habitants chez qui nous faisons des chantiers, soit elles ont participé à un chantier solidaire ou encore à des ateliers bricolage. Notre public cible, ce sont les personnes qui passent sous les radars des dispositifs, et qui ne sont pas forcément accompagnées par ailleurs. Beaucoup d’entre elles ont ce besoin, mais ne l’expriment pas forcément d'elles-mêmes, soit parce qu'elles ont déjà eu une mauvaise expérience, soit parce que tout simplement, elles ne savent pas à qui s’adresser. On se place en quelque sorte en médiateur entre eux et les structures classiques, l’assistante sociale, Pôle emploi, la mission locale, pour les ramener vers les dispositifs de droit commun. Comment faites-vous pour les aborder ? En fait, il faut arriver à trouver le bon équilibre entre la proximité et la relation de confiance. Toujours dans le but que les personnes soient autonomes et qu'elles puissent faire les démarches par elles-mêmes. C’est parfois compliqué, c’est souvent plus facile d'aller voir l'accompagnatrice Horizon qu’elles croisent tous les jours plutôt que d'aller faire une démarche auprès de sa conseillère Pôle emploi. Nous faisons en sorte que notre accompagnement ne soit pas trop formel, parce que le formalisme fait parfois peur. Donc on s'adapte, on fait vraiment du sur mesure. Nous avons une charte, que l'on fait signer ou pas en fonction de la relation qu'on est en train de tisser. C’est un contrat moral plus qu'autre chose, il n'y a pas d'obligation. Nous essayons de balayer les freins à l'emploi en premier et de travailler sur la partie sociale. Mais la priorité reste tout de même le projet professionnel derrière. En Nouvelle-Aquitaine, nous avons comme objectif d'accompagner 100 personnes par an pendant 3 ans. Nous avons 4 « incubateurs », en Gironde, dans le Lot-et-Garonne, dans les Landes et dans les Pyrénées-Atlantiques. Chaque incubateur dispose d’un animateur Horizon, dédié à cet accompagnement. Quelle est la durée de votre accompagnement ? Au début nous étions partis sur des périodes de 3 mois renouvelables. Mais on s'est rendu compte que ça ne fonctionne pas vraiment. Donc ce qu'on essaie de faire, c’est de poser un diagnostic avec la personne au début et on s'adapte à son rythme et à ses disponibilités. En fait, nous n’avons pas d'objectif en termes de temporalité, c'est vraiment chemin faisant. Que considérez-vous comme une sortie positive ? La sortie positive, c’est quand l'accompagnement a bien rempli l’objectif fixé à la base, et que la personne peut passer à autre chose, que ce soit un emploi, une formation, un service civique… Mais nous considérons aussi qu’une sortie positive c'est, par exemple, si elle a passé son permis ou qu’elle a résolu sa problématique sociale. L'idée est qu’elle soit autonome, qu’elle connaisse les dispositifs dont elle peut bénéficier et qu'elle puisse aller frapper à la bonne porte. Au besoin nous pouvons faciliter la prise de contact. Quelle influence a eu le projet Horizon sur vos pratiques ? La nouveauté en interne, c'est que pour que ce projet fonctionne, il faut que ce soit vraiment un travail d'équipe. On décloisonne les missions de chacun, afin que tout le monde s'en empare : l’animateur technique, l’adulte-relais, l’animateur horizon et le coordinateur. Nous sommes passés par une longue période d'appropriation du projet par les animateurs, des sessions de formation toute la première année. Déjà parce que c'est un projet national qu’il faut adapter au régional, puis au local, voire au très local. Il faut qu’on l’adapte aux pratiques de chaque territoire. Et puis il a fallu que l’on apprenne tous à parler le même langage. Est-ce que votre accompagnement est compatible avec celui d’une autre structure ? Il est complémentaire. Et je pense que ce qui fait la force du projet, c'est que nous sommes sur un accompagnement de proximité, au quotidien, chose que les autres intervenants ne peuvent pas toujours faire. Mais on ne fait pas à la place des partenaires. Quand on a fini notre travail de remobilisation, nous leur passons le relais. Au début c'est vrai qu’il a fallu expliquer le projet, user de pédagogie, montrer qu’on ne vient pas prendre le travail des autres. Une fois que les partenaires l'ont compris, ils adhèrent au projet parce que pour eux c'est tout bénéfice. Ça leur permet de toucher des publics qu’ils n’auraient pas forcément, par exemple des jeunes qui ne viennent pas d’eux-mêmes à la mission locale. Cet article est publié pour le compte de "La Place", la plateforme collaborative créée par la DGEFP, dédiée aux acteurs du Plan d’Investissement dans les Compétences : https://www.cap-metiers.pro/pages/552/Place.aspx
Mobiliser les démobilisés
Le CPA Lathus (Vienne) est une association connue principalement pour ses camps de loisirs d’été et ses centres équestres ouverts aux enfants et aux adultes. Il dispose d’un Centre Permanent d’Initiatives pour l’Environnement (CPIE) ainsi que d’un chantier d’insertion avec 3 services : animation, restauration, agriculture, espaces verts et maraichage. L’association a également un service formation/insertion, regroupant notamment des formations qualifiantes dans l’animation. Considérant que le centre se focalisait surtout sur l’insertion professionnelle pure et dure, avec pour objectif la mise à l’emploi, l’équipe a pensé qu’il serait utile de proposer une solution sur le territoire pour les personnes démobilisées. Elle a gardé en tête ce projet pendant plusieurs années, baptisé initialement « dynamisons les zones pour les résignés ruraux », avant qu’il prenne corps en 2020 grâce à l’appel à projets régional « Mobilisation Formation ». Le CPA Lathus coordonne aujourd’hui cette action. « Il a fallu trouver un nom que l’on puisse proposer aux participants. Les retours sur le terme « résignés » étaient négatifs, même si le concept lui-même ne l’est pas, puisqu’il décrit la réalité de la situation de personnes qui n’arrivent plus à avancer, mais qui sont volontaires pour trouver de l’aide auprès de certains intervenants. » Reprendre confiance C’est donc une action de remobilisation qui est aujourd’hui proposée aux publics. Elle vise trois objectifs : favoriser la capacité à oser et aller vers, développer l’appétence à se former, trouver une place dans le champ socioéconomique du territoire. Le terme formation n’est pas utilisé, il peut parfois effrayer. Elle est ouverte aux personnes qui ont besoin de se remobiliser, de reprendre confiance en elles, ainsi que celles qui ont des projets mais sont freinées par des problèmes de mobilité, de santé, de garde d’enfants. Elle s’adresse tout autant aux jeunes qu’aux bénéficiaires du RSA, aux demandeurs d’emploi, aux personnes en arrêt maladie qui envisagent une reconversion, ou encore des personnes en reconstruction après des accidents de la vie. « Nous leur proposons d’avancer ensemble, de travailler sur la vie quotidienne, la connaissance de soi et du territoire. Le but est d’atteindre aussi aisément que possible leurs objectifs propres. Les projets sont ambitieux, donc on avance étape par étape et on met en place un plan d‘action pour la suite. Les personnes sont un peu dans le flou au début, mais il suffit qu’elles se reconnaissent un moment dans la description que nous leur faisons de l’action pour se sentir concernées. » Chaque session dure 3 mois, à raison de 3 à 4 jours par semaine. Au sein d’un groupe de 8, les participants trouvent de l’entraide, de la bienveillance. D’autant plus que la diversité d’âge entre 16 et 50 ans, d’expériences de vie, de difficultés et de connaissances rendent les échanges plus riches. On leur laisse la possibilité de choisir ce qu’ils veulent faire, et travailler collectivement pour construire des activités. Le premier jour d’une session est consacré à la visite du CPA et à la proposition d’un planning à débattre avec le groupe. Certaines activités sont d’ores et déjà programmées, mais si une personne exprime un besoin particulier (découvrir une association, une entreprise, etc.) il est pris en compte dans la mesure du possible. L’emploi du temps comporte des activités physiques au centre ou à l’extérieur, de la sensibilisation à la transition écologique avec le CPIE, des activités de vie quotidienne. Visite de la centrale de Civaux, d’un refuge pour chats, matinée nettoyage de la nature, tout est envisageable. Le but est que chaque personne qui ressent un besoin de découvrir quelque chose puisse le faire au cours de l’action. « Nous proposons du théâtre avec l’association Tusitala, des jeux d’expression orale et de communication pour que les participants apprennent à se connaître, travaillent sur la prise de parole, la gestion de l’intonation et des émotions, etc. Ils mettent en place un petit projet artistique. Par exemple, les participants à la session précédente ont écrit des textes qu’ils sont ensuite allés déclamer au saut de la Brame, un lieu naturel un peu isolé. » Modifier le lien avec les conseillers « Nous avons aussi organisé deux ateliers de partage des savoirs, avec des conseillers de mission locale ou de Pôle emploi, des travailleurs sociaux de la MDS de Montmorillon, de la PASS (Permanence d'Accès aux Soins de Santé) et de l’ADECL (Association dynamique d'entraide du Canton de Lussac-les-Châteaux), qui viennent partager un moment avec le groupe. Chaque participant transmet un savoir-faire: du tricot, du dessin, des puzzles, de la pétanque… Le but est de modifier la relation et de mettre en place une réciprocité. C’est une façon de les valoriser, de révéler les talents, de partir de leur terrain. » Le programme inclut également 3 entretiens individuels avec une accompagnatrice au mieux-être (Carole Champain – libr&Sens) afin d’engager la construction d’un projet personnel ou professionnel, de travailler sur les freins et la gestion du stress. Ceux qui le désirent peuvent bénéficier d’une séance de réflexologie. Tous les participants peuvent solliciter un entretien individuel dès qu’ils en ressentent le besoin. Pour faire connaitre le projet sur le territoire et mobiliser les partenaires*, afin qu’ils identifient et orientent des personnes, le CPA Lathus a organisé des informations collectives dans diverses structures. "Le bouche-à-oreille a bien fonctionné pour la première session. Nous n’avons pas rencontré de problèmes de mobilité, grâce au covoiturage qui s’est facilement mis en place. Comme l’action n‘est pas rémunérée, on souhaitait qu’elle ne coûte rien aux participants, donc nous avons remboursé les frais de déplacement, et de garde s’ils en avaient. Nous déjeunons tous ensemble au CPA Lathus afin de renforcer les liens et de rencontrer les utilisateurs de la structure. C’est une façon de lever certains freins. » L’objectif de ce projet est également de découvrir le secteur de la formation. L’idée est de faciliter la découverte, lever les aprioris qui sont liés à leurs représentations. « La deuxième session est en cours, elle se terminera fin janvier. C’est une vraie solution pour tous ceux qui ne se sentent pas prêts à travailler ou entrer en formation. C’est une sorte de sas. On débouche aussi sur d’autres dispositifs, comme Amorce de parcours ou des entrées en SIAE. » * Les partenaires du CPA Lathus : le CIDFF sur les comportements et préjugés sexistes, le droit des familles, la MJC Claude Nougaro (Montmorillon), la MJC Vignes Aux Moines (Secteur St Germain et St Savin), le CFPPA de Montmorillon, Mobi’Vienne (éco mobilité), la PASS.
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